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Mots Présentés Leurres
Génération Profond Superficiel
D'après une analyse globale, on peut noter un forte
significativité du facteur Type de mots (F (1,106) = 359.58,
p < .00001), mais aucune du facteur Groupe (F (2,106) =
.18, p = .83). On remarque en outre une interaction significative
entre les Groupes d'encodage et les Types de mots : F (2,106) = 3.60,
p = .03.
Cela signifie que selon les groupes, la différence
entre les mots présentés et les leurres n'est pas la même.
En effet le type d'encodage a des effets différents selon qu'il s'agit
de leurres ou de mots présentés.
Concernant les mots présentés, on note un taux
plus important de rappel pour la condition profonde (m = 63) que pour
les deux autres conditions, qui semblent,
elles, plus ou moins équivalentes (m = 57
pour la génération et m = 55 pour le traitement
superficiel). Cette équivalence est confirmée par l'absence de
différence significative entre les deux encodages. Cependant, la
différence des rappels entre la condition profonde et les deux autres
est significative (F (1,106) = 15.57, p = .0001).
Concernant les leurres, on remarque un moindre taux de rappel
pour la condition profonde (m = 16) par rapport aux deux autres
(m = 21) qui sont ici aussi équivalentes. Cependant on ne
dénote pas de différence significative entre les trois types de
traitement. La tendance est la même que pour les mots
présentés : les mêmes effets sont observés pour les
traitements « Génération » et « Superficiel
».
Les encodages « Génération » et
« Superficiel » produisent les mêmes effets qu'il s'agisse de
mots présentés ou de leurres. L'encodage « profond »
améliore le souvenir des mots présentés sans augmenter
pour autant les faux souvenirs du leu rre.
On observe une variation des résultats selon le type
d'encodage, à partir d'une simple épreuve de rappel.
Les résultats concernant le taux de rappel de mots
présentés confirment dans l'ensemble nos hypothèses.
Tout comme on l'avait supposé, un traitement profond
provoque une meilleure performance lors de la récupération par
rapport au traitement superficiel. En effet, cet encodage fait appel à
un traitement sémantique avec l'évaluation de la pleasantness. Il
donne lieu à une large propagation de l'activation en mémoire
sémantique de concepts associés au mot présenté.
Ces différents concepts activés servent d'indices lors de
l'épreuve de rappel, facilitant la récupération des mots
précédemment présentés.
L'encodage superficiel ne nécessite qu'un traitement
au niveau lexical (ici compter les voyelles du mot). Le traitement
n'étant pas profond il y a très peu
d'activation en mémoire. Lors du rappel, il reste peu
de traces mnésiques des mots présentés, rendant plus
difficile leur récupération en mémoire. Ceci explique le
moindre taux de rappel des mots avec ce type de traitement.
L'encodage génération fait appel au processus
de distinctivité. La focalisation sur la lettre manquante du mot permet
un traitement sémantique. En effet le participant, en recherchant cette
lettre, doit activer en mémoire le mot et donc son sens. La focalisation
sur ce concept permet un traitement sémantique de celui-ci mais limite
l'activation. Ainsi cet encodage favorise le rappel correct des items sans pour
autant augmenter la propagation de l'activation vers des concepts
associés. On suppose donc un moindre taux de rappel de leurres. Soraci
et al. (2003) observent avec ce type de traitement un taux
élevé de rappel de mots mais pas d'augmentation au niveau des
leurres (expérience 3). Ils expliquent leurs résultats par le
processus de distinctivité qu'occasionne la génération.
Cependant dans notre expérience l'encodage
génération ne provoque pas une meilleure
récupération des mots présentés. Au contraire le
taux de rappel est inférieur à celui du traitement profond. Il
est possible que cet d'encodage selon les sujets s'apparente davantage à
un traitement lexical. La focalisation de la voyelle manquante provoquerait un
traitement plus ou moins superficiel. On peut supposer que le participant ait
recours à un traitement automatique pour trouver la lettre, donnant une
moindre importance au sens du mot. Ainsi le taux de rappel de mots
présentés s'en trouverait affecté.
Les résultats du rappel de leurres, quant à
eux, ne confirment pas nos hypothèses de départ.
Du fait du traitement superficiel des mots, la propagation de
l'activation étant moindre, on s'attendait à un taux moins
élevé de rappel de leurres par rapport à l'encodage
sémantique. Nous supposions qu'une importante propagation en
mémoire lors d'un traitement profond induirait plus facilement les faux
souvenirs. Cependant on observe une tendance de rappel de leurres plus
élevée en condition superficielle par rapport au traitement
profond. Ce résultat est également observé avec la
génération : on supposait que ce traitement n'engendrerait pas
d'augmentation de rappels de leurres grâce au processus de
distinctivité ; pourtant on remarque une tendance identique à
celle du traitement superficiel par rapport à
l'encodage profond.
Ce résultat pourrait s'expliquer par l'activation du
leurre au moment du rappel, conséquence de la récupération
des mots associés. En effet, lorsque le participant rédige sa
liste de mots au moment du rappel, on peut supposer que le fait d'écrire
les items effectivement perçus et associés entre eux,
provoquerait l'activation du leurre en mémoire sémantique. Ainsi,
tout se passerait à la phase de récupération. En examinant
dans notre expérience la position du leurre dans les listes de
récupération, la tendance du rappel de leurres se trouve en fin
de liste.
Quelques études récentes se sont
intéressées à la force des relations associatives au sein
du matériel (Roediger & al, 2001). En dehors du fait qu'une
liste de mots est fortement associée au leurre critique, elle est
également composée de concepts fortement associés entre
eux. Dans le cas d'un traitement peu profond, le taux élevé de
rappel de leurres découlerait donc de l'activation en mémoire
provoquée lors de la récupération, par le rappel du sujet
lui-même.
La propagation de l'activation, lors d'un traitement profond,
des concepts associés aux mots présentés, a pour
conséquence une augmentation des rappels de leurres. Cependant on
observe l'effet inverse. Nous ne pouvons donc pas interpréter nos
résultats en terme de propagation d'activation, mais plutôt en
terme de distinctivité. En effet, un traitement différentiel lors
de l'encodage permet une meilleure discrimination entre les items
présentés et ceux qui ont été activés.
Ainsi, si le rappel de leurres ne se trouve pas augmenté c'est
grâce au processus de distinctivité : celui-ci ne réduit
pas leur formation en mémoire, mais cette stratégie de
récupération permet de les retenir.
L'expérience décrite précédemment
mettait en oeuvre une tâche de rappel standard. Or selon le type de
traitement utilisé lors de l'encodage, les processus sollicités
seront différents au moment de la récupération des
items.
Un encodage peut s'effectuer selon deux possibilités :
la première est l'activation en mémoire, à partir de
l'item présenté, des concepts associés. La seconde est un
traitement spécifique de l'item, en lui attribuant une
caractéristique qui lui est propre. Cette seconde possibilité
permet, à la récupération, une meilleure discrimination du
mot perçu que celui activé en mémoire.
La réduction des faux souvenirs peut passer par la
récupération grâce à une variété de
stratégies telles que la distinctivité c'est-à-dire le
monitoring, ou bien lors de l'encodage suscitant soit un processus relationnel
entre concepts, soit un traitement spécifique des items.
Afin de déterminer le processus qui induit les faux
souvenirs, certains auteurs, plutôt que de faire varier les conditions
d'encodage, font varier les conditions de récupération en
utilisant le rappel de tous les items présentés ainsi que tous
ceux venant à l'esprit des participants. C'est la condition
d'inclusion.