2. Le site web
bancaire comme marché de services
Le site Web n'est pas seulement un média de
communication multimédia puissant permettant à la banque
d'atteindre des clients très ciblés et de vendre des services
directement en ligne. Le site par sa nature n'est pas seulement un objet
esthétique au sens d'Holbrook et Hirschman (1982) qui peut être
évalué sur des critères de forme et design. Toutes les
entreprises, quel que soit leur secteur d'activité, créent une
relation de service lorsqu'elles décident de mettre en ligne un site
Web. Les clients vivent une expérience de service qui est
médiatisée par le site Web de l'entreprise.
Corrélativement, la question qui se pose est de savoir si le concept de
marché de services permet de définir la nature de la relation
entre une banque et ses clients. Le marché de service est défini
comme le moment de l'interaction entre un client et une entreprise. Pour
certains auteurs, elle constitue le coeur du marketing des services (Eiglier et
Langeard, 1987). La rencontre de service constitue le « moment de
vérité » au cours duquel les clients et les employés
bancaires co-produisent le service.
Rayport et Svioka (1995) suggèrent que les
expériences de services traditionnelles pourraient se dérouler
dans un environnement virtuel dans lequel les produits et les services existent
comme des informations numériques. Sans aller jusqu'à remplacer
les interactions entre le personnel et les clients, les technologies et
notamment celles qui permettent le libre service, modifient la conception de la
rencontre de service. Toutefois, ainsi que le notent Walker et Craig-Lees
(1998), quand une relation interpersonnelle est normalement attendue, il faut
veiller à ce que la technologie ne crée pas une distance avec le
client.
Le potentiel relationnel d'Internet en général
et d'un site Web en particulier modifie fondamentalement la conception
traditionnelle de l'expérience de service. L'internaute participe plus
qu'avec tout autre média de distribution à la rencontre de
services. C'est lui qui entre en relation avec l'entreprise. Il décide
du moment et du lieu de la relation. De plus, il contrôle
l'expérience de service en organisant par lui-même sa navigation
selon ses attentes et son degré d'expertise. Le site Web est l'interface
qui permet de soutenir la coproduction du service : « le service
crée un système complexe de relations entre offre et demande : la
conception de la prestation et sa réalisation ne peuvent être
séparées et mobilisent à la fois le producteur et le
consommateur qui coopèrent étroitement ». Le rôle du
concepteur est d'utiliser le potentiel relationnel que lui offre la technologie
afin de permettre la participation du client en lui proposant une interface
facile à utiliser, efficace, conviviale et un contenu qui corresponde
à ses attentes. Le rôle du personnel chargé de l'interface
reste très important, mais il fait partie des coulisses et non plus de
l'avant scène.
a. La
qualité de service
Si la différenciation et le positionnement des services
de banque en ligne s'effectue sur la base de l'offre de services
délivrées via le site Web, il faut se poser la question de
l'évaluation de ces services et donc de l'efficacité du site du
point de vue de sa capacité à médiatiser
l'expérience de service vécue par les clients. La
littérature sur la mesure de la satisfaction et de la qualité
perçue des services est riche et il est possible d'en retenir quelques
fondements qui pourront a priori être utiles à l'évaluation
des services en ligne.
L'évaluation de la qualité des produits
industriels est plus aisée que celle des services. En effet,
rappelons-le, trois caractéristiques rendent la qualité des
services difficilement mesurable : ils sont hétérogènes
(chaque exécution de service est différente et dépendante
des acteurs de la servuction), ils sont intangibles (on ne peut pas les toucher
physiquement) et ils sont inséparables (le processus de production d'un
service est simultané à sa distribution et à sa
consommation ; on ne peut séparer leur production et leur
consommation). En l'absence de mesures objectives, il convient pour
évaluer la qualité de service de mesurer la perception de cette
qualité par ses consommateurs. La recherche en marketing des services
s'est naturellement focalisée sur les relations interpersonnelles entre
les clients et le personnel en contact. Par exemple, Bitner et al. (1990) ont
identifié trois sources de satisfaction ou d'insatisfaction des clients
vis-à-vis d'une relation de service : la capacité du personnel
à personnaliser le service, la résolution des problèmes et
les éléments inattendus qui surviennent durant
l'expérience. Parasuraman et al. (1985) soulignent l'importance de la
rencontre de service dans le jugement de la qualité de service
perçue par un client. La qualité de service perçue est
décrite comme une forme d'attitude, relative mais non équivalente
à la satisfaction, qui résulte de la comparaison entre attentes
et performances. Leurs travaux ont également permis de distinguer les
principales dimensions d'une expérience de service qui participent au
jugement d'un client : la fiabilité, la serviabilité, la
compétence, l'accessibilité, la courtoisie, la communication, la
crédibilité, la sécurité, la compréhension
du client et les éléments tangibles.
Selon Llosa (1996), les dimensions proposées ne
qualifient pas la qualité perçue mais plutôt
l'expérience de service en elle-même. On admet aujourd'hui
qu'elles constituent un squelette à partir duquel les chercheurs peuvent
construire un outil de mesure de la qualité de service adapté
à leur champ d'étude. Néanmoins, ces dimensions de la
qualité de service sont établis sur une conception traditionnelle
de l'expérience de service qui ne prend pas en compte le rôle
joué par la technologie. Elles soulignent notamment l'importance du
contact interpersonnel entre les clients et le personnel. C'est pourquoi, il
convient de préciser quelles sont les dimensions de l'expérience
de service sur Internet qui servent à former le jugement de
qualité ou de satisfaction d'un client vis-à-vis d'un site
Web.
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