L'engagement francais dans le processus d'internationalisation des droits de l'hommepar Aurelia Kergueno epouse Peuch Université Pierre Mendes France de Grenoble - DEA "histoire, droit, droits de l'homme" 1996 |
SECTION II- LA RETENUE FRANCAISE FACE A LA RATIFICATION DE LA CONVENTIONAlors qu'elle avait joué un rôle moteur dans son élaboration, que ce soit au stade parlementaire avec Pierre-Henri TEITGEN, ou au niveau des experts avec Charles CHAUMONT, jusqu'à la signature par Robert SCHUMAN à Rome, pourquoi la France devait-elle désormais marquer le pas? Comme sans doute pour toutes les questions engageant les Etats, la vraie réponse se trouve dans un ensemble de facteurs. Nous tenterons d'exposer les principaux. Une présentation succinte des différents arguments juridiques précèdera un exposé des raisons inavouées qui guidèrent les gouvernements successifs.245(*) A- Les raisons avancées par les Gouvernements français1- Sous la Quatrième République Sous la IVème République, cinq arguments principaux furent avancés contre la ratification de la Convention : - la Convention ne serait qu'une "énumération de principes généraux dont l'application est laissée à la législation interne de chaque pays signataire" (avis de l'Assemblée de l'Union française). - la Convention laisserait "au bon vouloir des Gouvernements l'extension de ses dispositions aux territoires extra-européens", établissant ainsi une "intolérable discrimination raciale" (avis de l'Assemblée de l'Union française). - l'article 11 de la Convention priverait "en fait tous les fonctionnaires de la liberté de réunion et d'association". - l'article 16 de la Convention placerait les étrangers "sous un régime d'arbitraire et d'exception". - l'article 2 du premier protocole additionnel porterait "obligation de subventionner les écoles confessionnelles", étant ainsi contraire au caractère laïc de la République. 2- Sous la Cinquième République La Vème République se targuait d'avoir résolu le problème de "l'Ecole" et d'avoir résorbé les séquelles de la guerre d'Algérie, mais elle ne ratifia pas non plus la Convention européenne. En novembre 1964, le Garde des Sceaux Jean FOYER avait exposé, lors d'un débat à l'Assemblée parlementaire, trois objections à cette ratification : - elle obligerait la France à "modifier certains articles fondamentaux de (son) Code de Procédure pénale". - la Convention obligerait également la France à supprimer le monopole de l'ORTF et à accepter sur le territoire national n'importe quelle radio ou télévision privée. - les dispositions fondamentales de la Convention seraient rédigées "en contemplation des règles du droit criminel britannique et en méconnaissance totale des règles de la procédure criminelle en vigueur dans notre pays". * 245 Remarque: Il revient au professeur Karel VASAK d'avoir analysé les raisons officielles et officieuses de la France à ce sujet. V. Colloque de Besançon, Revue des droits de l'homme, pp. 563 à 566 |
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