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La protection sécuritaire des personnes déplacées à  l'intérieur de leur propre pays en R.D.C.: cas des camps de déplacés de Lushagala et Bulengo dans la province du Nord-Kivu


par Alvine HADJI USSENI
Université de Kisangani - Licence 2023
  

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SECTION 2 : DE LA PROTECTION DES DEPLACES INTERNES

Chaque année, des millions de personnes sont forcées de s'enfuir de chez elles en raison de violences, de conflits ou de catastrophes, qu'il s'agisse d'événements soudains comme des inondations, des tremblements de terre ou des cyclones, ou de phénomènes à évolution lente en lien avec les changements climatiques. Le Rapport mondial sur le déplacement interne 2020 de l'Observatoire des situations de déplacement interne (IDMC) indique qu'en 2019, 3,4 millions de personnes ont été déplacées en raison de catastrophes en Afrique subsaharienne.

Et selon OIM (Organisation Internationale pour les Migrations), le nombre de personnes déplacées en RDC a atteint 6,9 millions de personnes à la fin de 2023 (en majorité dans les provinces du Nord-Kivu et de l'Ituri). Un nombre le plus élevé jamais enregistré37(*).

Pour la première fois, des données sur les déplacements ont été recueillies à travers les 26 provinces du pays par l'ONU via sa Matrice de suivi des déplacements38(*).

C'est pourquoi, il est important d'organiser la gestion de ces personnes pour une meilleure prise en charge afin qu'elles soient protéger.

Actuellement, il existe plusieurs programmes de protection essentiels pour les déplacés en République Démocratique du Congo. Le HCR collabore avec des organisations locales pour fournir une aide juridique et psycho-sociale aux communautés39(*).

Sur ce point, nous sommes appesanties sur 3 points, à savoir : la définition de la protection des déplacés, les différents types de protection organisés pour les groupes vulnérables, tels que les déplacés, par les instruments juridiques nationaux et internationaux, et le danger de la non protection des déplacés internes en RDC.

§1. Qu'est-ce que la protection des déplacés ?

Comme pour les réfugiés, la protection des déplacés comprend un ensemble de mesures qui contribuent à garantir les droits de déplacés. Cela peut inclure les mesures de sécurité, des activités d'assistance, etc.

Parmis les droits fondamentaux des déplacés, on peut citer : le droit à la vie, à la sécurité, au travail, à l'éducation pour les enfants, à l'assistance etc.40(*)

§2. Différents types de protection

A. Protection contre les discriminations

Ø Non-discrimination

Les déplacés présentent des vulnérabilités particulières liées à leur situation. Ils doivent être traités avec humanité et ne pas être victimes de discriminations fondées sur leur situation ou tout autre motif.

Il est important que rien dans la législation existante ne distingue les déplacés de la population générale en vue d'un traitement moins favorable. Les personnes protégées doivent être traitées avec les mêmes égards et sans aucune distinction de caractère défavorable - CG IV, art. 3 et 27 ; PA I, art. 75 ; PA II, art. 2.1) et 4.1) ; règles 87 et 88 du DIHC41(*)

Ø Protection au même titre que le reste de la population civile

Les déplacés font partie de la population civile et ont de ce fait droit aux protections accordées à tous les civils - CG IV, art. 4 et 27 ; PA I, art. 51 et 75 ; PA II, art. 4 et 5 ; règles 1 et 7 du DIHC42(*).

B. Protection du droit à la vie, à la dignité et à la liberté

Ø La vie et la dignité des personnes déplacées doivent être respectées- CG IV, art. 3, 27 et 32 ;

Ø Tout comme les autres civils, ces personnes ne doivent pas être l'objet d'attaques, sauf si elles participent directement aux hostilités

Ø Elles ne doivent pas être utilisées comme boucliers humains

Ø En outre, leur bien-être physique ou mental doit être protégé - PA I, art. 75.

Ø En cas de déplacement forcé, les personnes déplacées peuvent être internées ou assignées à résidence uniquement si d'impérieuses raisons de sécurité l'exigent - CG IV, art. 78. Dans les conflits armés non internationaux, les arrestations et détentions arbitraires sont interdites en toutes circonstances - PA II, art. 5.1) et règle 99 du DIHC. Les déplacés devraient avoir le droit de circuler librement à l'intérieur et à l'extérieur des camps ou d'autres structures d'accueil.

C. Protection pour une meilleure condition de vie et assistance humanitaire

Ø Conditions de vie et assistance humanitaire43(*)

En cas de déplacement, toutes les mesures possibles doivent être prises afin que les déplacés soient accueillis dans des conditions satisfaisantes d'hygiène, de santé, d'alimentation et de logement (- CG IV, art. 49.3; PA II, art. 17.1) ; règle 131 du DIHC44(*).

Le non-respect de ces dispositions peut constituer une violation grave du DIH (- CG IV, art. 147 et PA I, art. 85.4).

Dans les situations de conflit armé, il est interdit de prendre pour cible les denrées alimentaires, les récoltes, le bétail, les installations et réserves d'eau potable et les ouvrages d'irrigation (-PA I, art. 54 et 56 ; PA II, art. 14) ; règle 54 du DIHC.

Les puissances occupantes ont le devoir d'assurer l'approvisionnement des populations locales en vivres (- CG IV, art. 55).

L'utilisation de la famine comme méthode de guerre est un crime de guerre (Statut de la Cour pénale internationale, art. 8.2) ; règle 53 du DIHC.

Durant les conflits armés, les États doivent respecter leur obligation de fournir aux blessés et aux malades les meilleurs soins médicaux possibles au vu de leur état de santé physique et mental (-art. 3 commun aux 4 CG ; CG IV, art. 16, 55 et 56 ; PA I, art. 10 ; PA II, art. 7.2 et 8) ; règles 109 et 110 du DIHC.

En cas de besoin, les parties à un conflit armé doivent s'acquitter deleur obligation de garantir un approvisionnement suffisant en vivres en demandant la fourniture d'aide alimentaire et en autorisant et facilitant son acheminement. Si les autorités responsables ne sont pas en mesure de remplir ces obligations, elles ne doivent pas entraver l'assistance humanitaire offerte par d'autres organismes humanitaires impartiaux. Cette assistance sera de nature exclusivement humanitaire et impartiale, et conduite sans distinction de caractère défavorable (- PA I, art. 70 et 71 ; PA II, art. 18.2).

D. Protection des vies de famille

L'unité des familles devrait être protégée. Dans les situations d'internement ou de détention durant un conflit armé, ainsi que dans les camps ou autres abris collectifs, les membres d'une même famille doivent en général être réunis dans le même lieu. Si des familles se trouvent dispersées, toutes les mesures possibles doivent être prises pour faciliter leur regroupement (CG IV, art. 82.2, et 3 ; PA I, art. 75.5) ; règle 131 du DIHC45(*).

E. Protection d'identité

Ø Documents d'identité

Toute personne déplacée a le droit d'être déclarée et de se voir attribuer un nom à la naissance, notamment dans les situations d'occupation.

Les États sont expressément tenus de délivrer des documents d'identité aux déplacés (CG IV, art. 50, et - CG IV, art. 97.6)46(*).

F. Protection des Biens des déplacés

Dans les situations de conflit armé, les biens de déplacés ne doivent :

Ø Pas faire l'objet de pillages, ni d'attaques directes ou conduites sans discrimination (CG IV, art. 33) et règle 52 du DIHC ;

Ø Ces biens ne doivent pas être utilisés comme boucliers lors d'opérations militaires ni constituer des objectifs militaires ; (PA I, art. 85 et règle 11 du DIHC - PA I, art. 51)

Ø Ils ne doivent pas faire l'objet de destructions ou d'appropriations au titre de représailles, ni être utilisés pour des peines collectives (PA I, art. 52 -- PA I, art. 75.2)47(*).

En tout temps, propriétés et biens doivent être protégés contre toute destruction ou appropriation arbitraire et illégale (comme le vol), occupation ou utilisation.

Et l'obligation de transférer des personnes évacuées vers ou depuis des territoires occupés en vue de leur retour chez elles dès la fin des hostilités implique, pour ces personnes, le droit de récupérer leurs biens. Les droits de propriété des déplacés doivent donc être respectés (règle 133 du DIHC).

G. Protection sociale et emploi des déplacés

Les dispositions générales du DIH concernant la non-discrimination qui sont d'application pendant un conflit armé, valent aussi pour l'emploi, les activités économiques et la sécurité sociale.

Des règles minimales régissant les conditions de travail doivent être respectées pour certaines catégories ou personnes astreintes au travail dans des situations de conflit armé.

Le Droit International Humanitaire interdit également le travail forcé non rémunéré ou abusif des déplacés (- PA II, art. 4.2, et règle 95 du DIHC)48(*).

H. Protection sur l'éducation des enfants déplacés

Les parties à un conflit armé doivent prendre les mesures nécessaires pour que les enfants, devenus orphelins ou séparés de leur famille du fait de la guerre, ne soient pas livrés à eux-mêmes et pour que leur éducation soit facilitée en toutes circonstances (- CG IV, art. 24.1).

La puissance occupante doit également faciliter le bon fonctionnement des établissements éducatifs (CG IV, art. 50.1).

En cas de conflit armé, les enfants doivent recevoir une éducation, y compris religieuse et morale (PA II, art. 4.3 et 28.2)49(*).

I. Protection des enfants déplacés contre le recrutement forcé

Les déplacements rendent les enfants particulièrement vulnérables au recrutement forcé dans les forces ou les groupes armés. Le DIH interdit le recrutement forcé des enfants de moins de 15 ans (PA I, art. 77.2; et PA II, art. 4.3)50(*).

Ces enfants ne doivent pas être forcés ni autorisés à participer directement aux hostilités. Les mineurs de plus de 15 ans qui sont recrutés ne doivent pas faire l'objet de pratiques discriminatoires du fait qu'ils sont déplacés.

* 37 OIM, la crise humanitaire alarmante dans l'est de la RDC exige des mesures urgentes pour protéger les populations, publié le 2 juillet 2024, disponible sur https://www.iom.int. Consulté le 5 juillet 2024

* 38 OIM-Communiqué global du 30 octobre 2023 : Près de 7 millions de personnes déplacées en RDC : un record, consulté le 30 juillet 2024 à 8 :57 sur https://www.iom.int.

* 39 CICR, Droit international humanitaire coutumier, Henckaerts, Jean-Marie et Doswald-Beck, Louise, CICR-Bruylant, Bruxelles, 2006.

* 40 ONG reach out : QU'EST-CE QUE LA PROTECTION DES DEPLACES ?, 2005, P. 2-3, consulté en mai 2024.

* 41 CICR, personnes déplacées à l'intérieur de leur propres pays et droit international humanitaire, Convention de Genève (CG IV)art. 3 et 27 ; PA I, art. 75 ; PA II, art. 2.1) et 4.1) ; règles 87 et 88 du DIHC.

* 42 Idem,art. 4 et 27 ; PA I, art. 51 et 75 ; PA II, art. 4 et 5 ; règles 1 et 7 du DIHC.

* 43 Convention de l'Union africaine sur la protection et l'assistance aux personnes déplacées en Afrique, adoptée lors de sa Session extraordinaire tenue le 22 octobre 2009 à Kampala (Ouganda).

* 44 CICR, personnes déplacées à l'intérieur de leur propres pays et droit international humanitaire, Convention de Genève (CG IV)art. CG art. 49.3) ; PA II, art. 17.1) ; règle 131 du DIHC etc.

* 45IDEM, art. 82.2) et 3) ; PA I, art. 75.5) ; règle 131 du DIHC

* 46 CICR, personnes déplacées à l'intérieur de leur propres pays et droit international humanitaire, Convention de Genève- CG IV, art. 50 et 97.6

* 47 IDEM, art. 33 et règle 52 du DIHC - PA I, art. 85 et règle 11 du DIHC et suivants.

* 48IDEM, art. 27 et PA I, art. 75.1) CG IV, art.40, - PA II, art. 4.2) etrègle 95 du DIHC.

* 49IDEM, art.24.1) - CG IV, art.50.1) - PA II, art. 4.3)a) et 28.2).

* 50 Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant, concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés relève cet âge à 18 ans (art. 2).

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