UNIVERSITÉ CATHOLIQUE DE L`AFRIQUE DE
L'OUEST UNITÉ UNIVERSITAIRE A ABIDJAN
(UCAO /UUA)
UNITE UNIVERSITAIRE A ABIDJAN (UUA)
Faculté de Droit Civil
LA PROTECTION DE LA VICTIME DEVANT LES JURIDICTIONS
REPRESSIVES IVOIRIENNES
Mémoire en vue de l'obtention du diplôme
de Master en Droit Privé Option : Recherche Professions
Judiciaires
Présenté par : Sous la direction de :
Monsieur OUATTARA Monsieur YEO Nawa
Gneneindjomain Moussa Maître de conférences,
Agrégé des facultés de droit
Abidjan, Novembre 2023
DEDICACE
Pour leurs nombreux sacrifices, labeurs, conseils,
prières et leur soutien indéfectible, ce travail est
dédié à des personnes spéciales et
précieuses, en l'occurrence notre père Monsieur Gberi-Bè
OUATTARA et notre mère Madame Diatou Mariam OUATTARA. Qu'ils trouvent
dans cette étude l'expression de tout notre amour et l'exorde de notre
gratitude.
II
REMERCIEMENTS
Le succès de ce travail résulte des efforts
conjugués de plusieurs personnes auxquelles nous tenons à
exprimer nos sincères remerciements bien qu'il soit difficile voire
impossible de faire une liste exhaustive.
Nos remerciements s'adressent en premier lieu au Professeur
YEO Nawa pour avoir accepté de diriger ce travail, nonobstant les
multiples responsabilités qui lui incombent. Ses remarques, conseils et
directives nous ont été d'une utilité
indéniable.
Nos remerciements s'adressent ensuite à l'ensemble du
corps enseignant ainsi qu'à l'Administration de la Faculté de
Droit Civil de l'Université Catholique de l'Afrique de l'Ouest -
Unité Universitaire à Abidjan qui nous ont transmis, tout au long
de notre formation, le goût de l'effort, l'acceptation de notre part de
sacrifice. Ces valeurs ont été pour nous de grandes ressources
pour parvenir à l'achèvement de ces études.
De même, à mes frères, soeurs et ami(e)s,
nous adressons nos remerciements pour tous ces moments où ils n'ont
cessé de croire en nous.
Aussi, pour nous avoir soutenu durant notre parcours
universitaire, nous remercions humblement Messieurs Bertrand KOFFI, Lionel
OUSSOU, et Rodrigue KOFFI.
A l'institution estudiantine dénommée
Conférence des Délégués de la Faculté de
Droit Civil (CDFDC) où nous avons servi et appris en tant que
Président, et à ses membres, nous témoignons nos
reconnaissance et fierté.
Nous souhaitons également témoigner notre
gratitude à notre ami et frère Carlos ASSAMOI pour la
qualité de sa compagnie et pour tous les moments de joie et de doute que
nous avons passés ensemble. « C'est la fin qui donne un sens
à tout ce qui précède ».
Nos remerciements s'adressent également à nos
compagnons devanciers de la RAS Formation, pour avoir partagé avec nous
leurs expériences et leur temps, pour leurs soutiens, leurs
amitiés positives et leurs encouragements constants.
Pour finir, la rédaction de ce mémoire nous
offre l'opportunité de remercier infiniment DIEU pour sa grâce et
sa bonté intarissable dans notre vie.
III
AVERTISSEMENT
La Faculté de Droit Civil de l'Université
Catholique de l'Afrique de l'Ouest-Unité Universitaire à Abidjan
(UCAO-UUA) n'entend donner ni approbation ni improbation aux opinions
émises dans ce mémoire. Ces opinions doivent être
considérées comme propres à leur auteur.
IV
SIGLES ET ABREVIATIONS
al. alinéa
art. article
Bull crim. Bulletin des arrêts de la cour
de cassation, chambre criminelle
CA Cour d'appel
Cass. Cour de cassation
CDFDC Conférence des
Délégués de la Faculté de Droit Civil
Cf confer
CP Code pénal
CPP Code de procédure pénale
Crim. Cour de Cassation, Chambre criminelle
CRPC Procédure de comparution sur
reconnaissance préalable de
Culpabilité
D. Dalloz
D.P. Recueil périodique Dalloz
éd. édition
Et. Al. Et alii (autres)
Ibid. Signifie qu'il s'agit de l'ouvrage que
l'on vient tout juste de citer
dans la note précédente, mais à une page
différente
V
Idem. Signifie qu'il s'agit du même
auteur, du même ouvrage et de la
page que la référence précédente
in. cité dans
Infra Plus loin ; ci-dessous
J.O.R.C.I. Journal Officiel de la
République de Côte d'Ivoire
L.G.D.J. Librairie générale de
droit et de la jurisprudence
n° numéro
ODCCP Office for Drug Control and Crime
prevention (Bureau du
Contrôle des Drogues et de Prévention du Crime)
Op.cit. Signifie du même auteur dans
l'ouvrage déjà cité plus haut
p. Page
R.J.A.C.A.T. Recueil des jurisprudences des
arrêts des cours d'appel et tribunaux
RAS Rassemblement des Amoureux du Savoir
s. Suivant
Supra Plus haut ; ci-dessus
Trib. Correct. Tribunal correctionnel
UCAO-UUA Université Catholique de
l'Afrique de l'Ouest - Unité Universitaire à Abidjan
v. Voir
VI
SOMMAIRE
INTRODUCTION 1
PREMIERE PARTIE : UNE PROTECTION RECHERCHEE 9
CHAPITRE 1 : LA RECHERCHE PAR LA PLURALITE DES MODALITES
D'INTEGRATION DE LA VICTIME DANS LA PROCEDURE PENALE .... 10
Section 1 : La dualité des modalités
d'intégration par voie d'action 11
Section 2 : La dualité des modalités
d'intégration par voie d'intervention 21
CHAPITRE 2 : LA RECHERCHE PAR LA PLURALITE DES DROITS
RECONNUS A LA VICTIME PENDANT LA PROCEDURE PENALE 28
Section 1 : Les droits de facilitation de la procédure
à la victime 29
Section 2 : Les droits de participation à la manifestation
de la vérité 37
DEUXIEME PARTIE : UNE PROTECTION LIMITEE 46
CHAPITRE 1 : LA LIMITATION DANS LA PARTICIPATION DE LA
VICTIME A LA PROCEDURE PENALE 47
Section 1 : L'intégration partielle de la victime dans la
procédure 48
Section 2 : La nécessité de renforcement de la
sécurité de la victime 56
CHAPITRE 2 : LA LIMITATION DANS LES PROCEDURES
ALTERNATIVES AUX POURSUITES 63
Section 1 : La passivité de la victime dans les
procédures accélérées prévues 64
Section 2 : L'absence de procédures privilégiant la
réparation du préjudice de la
victime 72
CONCLUSION 80
1
INTRODUCTION
« Si les systèmes de justice pénale du
monde étaient des entreprises privées, ils mettraient tous la
clef sous la porte car la moitié de leurs principaux clients - à
savoir les victimes de crimes - ne sont pas satisfaits de leurs services
».1
Partant de ces écrits de Monsieur Jan Van Dijk,
certaines victimes, malgré la reconnaissance de leur participation au
procès pénal2 pour la réparation de leurs
préjudices, ne sont pas satisfaites du traitement que leur accorde le
système répressif. En effet, ce constat se justifie par le fait
que l'envers du crime n'est pas généralement la première
préoccupation du système de justice pénale.3 Le
procès pénal, au regard de son objet, vise à sanctionner
l'auteur d'un acte antisocial pénalement sanctionné. Dès
lors, il oppose le ministère public, représentant légitime
des intérêts de la société, à l'auteur
présumé de l'acte antisocial. La procédure pénale
vise ainsi à protéger l'intérêt public. La peine,
enjeu de la procédure pénale, est prononcée pour le compte
de la société et non pour le compte de la victime4.
Face à cette justification systématique qui ne
privilégie pas les intérêts des victimes dans le
système pénal, plusieurs reformes internationales5 et
nationales6 ont vu le jour dans l'optique d'améliorer la
situation des victimes dans le procès pénal. Toutefois,
malgré ces réformes, la protection des victimes ainsi que de
leurs intérêts demeure une préoccupation majeure. C'est ce
qui justifie notre étude dont le sujet trouve sa formulation en ces
termes : La protection de la victime devant les juridictions
répressives ivoiriennes.
1 Jan Van Dijk, Administrateur général
au Centre des Nations Unies pour la prévention internationale du crime
et l'un des principaux responsables de l'étude internationale Cf ODCCP
« Dixième congres des Nations Unies pour la prévention du
crime et le traitement des délinquants », consultable sur
https://www.un.org/french/events/10thcongress/2088af.htm,
consulté le 27 octobre 2023 à 01h 49
2 Par le procès pénal nous entendons
la procédure pénale en tant qu'ensemble des règles qui
définissent la manière de procéder pour la constatation
des infractions, l'instruction préparatoire, la poursuite et le jugement
des délinquants. Ici, nous intéresserons principalement aux
phases de l'instruction, de poursuite et de jugement.
3 CARIO (R.), RUIZ-VERA(S.), Droit(s) des
victimes, De l'oubli à la reconnaissance, Ed. L'Harmattan 2015,
P.13 in NIAMBE (K. R.), « La participation de la victime au
procès pénal », Thèse, Université
Alassane OUATTARA de Bouaké, 2020, 457p.
4 Cf ENM-pénal 2011, « La procédure
pénale », [en ligne]
https://www.prepa-isp.fr/wp
content/uploads/2018/09/ENM-Annales-P%C3%A9nal-2011.pdf , consulté le 25
octobre 2023 à 03h01
5 A titre d'exemple, le Conseil économique
et social des Nations Unies a adopté en juillet 2005 des principes
fondamentaux et des directives concernant le droit à un recours et
à une réparation des victimes du droit international relatif aux
droits de l'homme et violations graves du droit international humanitaire.
6 Nous pouvons citer la loi n°2021-892 du 21
décembre 2021 relative aux mesures de protection des victimes de
violences domestiques, de viol et de violences sexuelles autre que
domestiques.
2
Cette étude nécessite, avant tout, une approche
définitionnelle des mots-clés notamment « protection
», « victime » et « juridictions
répressives ».
Partant de l'idée que « toute
définition en droit est périlleuse »7, ces
notions-clés n'ont pas fait l'objet de définition de la part du
législateur ivoirien.
S'agissant de la « protection », elle est
définie par le dictionnaire Le Robert comme « l'action de
protéger, de défendre quelqu'un ou quelque chose.
Protéger, c'est aider une personne de manière à la mettre
à l'abri contre toute attaque. C'est défendre contre toute
atteinte ».
De même, pour Gérard CORNU, « la
protection est la précaution qui consiste à prémunir une
personne ou un bien contre un risque, à garantir sa
sécurité, son intégrité, etc., par des moyens
juridiques ou matériels ».8
Ainsi, appréhender la protection de la victime devant
les juridictions répressives revient à s'interroger sur les
moyens juridiques mis à la disposition de la victime pour garantir sa
sécurité, son intégrité et ses
intérêts notamment la réparation de son préjudice
devant les juridictions pénales.
Quant au mot « victime », la notion
principale de notre sujet, il est présenté comme une notion
difficile à saisir en raison de son évolution selon les
époques. En effet, le sens commun qualifie généralement de
victime toute personne qui subit et qui souffre soit des agissements d'autrui,
soit d'événements néfastes. 9
De même, selon le Lexique des termes juridiques, «
à l'origine personne offerte en sacrifice aux dieux, la victime au
sens général commun s'entend de toute personne qui souffre d'une
atteinte quelle qu'en soit l'origine, portée à ses droits, ses
intérêts ou son bien-être. Dans un sens plus restreint c'est
une personne qui a été tuée ou blessée
».10
Dans le même ordre d'idée, le Vocabulaire
juridique de Gérard CORNU définit la victime comme «
celui qui subit personnellement un préjudice, par opposition
à celui qui le cause, auteur »11.
Ces définitions sus évoquées, qui ne
comportent pas ou ne font pas allusion à la notion d'infraction, ne
semblent pas nous convaincre eu égard à notre sujet.
7 YAYA (M. S.), « le droit de l'OHADA face
au commerce électronique », Thèse, Université de
Montréal et Université de Paris-Sud 11, 2011, p.5
8 CORNU (G.), Vocabulaire juridique, Association
Henri Capitant, PUF, 12ème éd., 2018, p.1743
9 Cf ENM-pénal 2011, op.cit.
10 GUINCHARD (S.), DEBARD (T.), Lexique des termes
juridiques, Paris, Dalloz, 26ème éd., 2019, p. 1106
11 CORNU (G.), op. cit., p.2254
3
Par contre, la définition contenue dans la
décision cadre du Conseil de l'Union européenne attire notre
attention. Cette décision définit la victime au sens pénal
comme « la personne qui a subi un préjudice, y compris une
atteinte à son intégrité physique ou mentale, une
souffrance morale ou une perte matérielle, directement causé par
des actes ou omissions qui enfreignent, la législation d'un Etat membre
».12 Cette définition, nous le constatons, fait
allusion à l'infraction13, l'objet du droit pénal.
Ainsi, la victime est perçue comme la personne dont la
souffrance a pour origine la commission d'une infraction. Cette acception de la
victime trouve son fondement dans les dispositions de l'article 7 du code de
procédure pénale alinéa premier. Ce texte dispose que :
« l'action civile en réparation du dommage causé par un
crime, un délit ou une contravention, appartient à tous ceux qui
ont personnellement souffert du dommage directement causé par
l'infraction ».
En clair, la victime est une personne physique ou morale qui a
personnellement souffert du dommage directement causé par la commission
d'un acte anti-social que constitue l'infraction. Partant de cette conception
de la victime, seront exclues de notre étude les victimisations dont
l'origine n'est pas un acte constitutif d'infraction.
En fait, il résulte de la compréhension de cette
définition retenue de la victime que ne saurait acquérir la
qualité de victime toute personne n'ayant pas personnellement souffert
du dommage directement causé par l'infraction.
Cependant, cette compréhension connait un
assouplissement depuis la réforme du code de procédure
pénale en 2018. Désormais, sur le fondement des articles 7, 8 et
20 dudit code, les victimes dites médianes ou indirectes peuvent exercer
l'action civile en réparation du dommage causé par l'infraction.
Il s'agit entre autres des héritiers, des victimes par ricochet et des
associations agissant dans un but d'intérêt
collectif14.
En définitive, par « victime » nous
pouvons entendre toute personne, physique ou morale, ou groupe de personnes
ayant souffert d'un dommage directement ou indirectement causé par une
infraction.
12 GUINCHARD (S.), DEBARD (T.),
op.cit., 2019, p.1106
13 C'est l'article 2 du CP qui
définit l'infraction. Selon cette disposition « Constitue une
infraction tout fait, action ou omission, qui trouble ou est susceptible de
troubler l'ordre public ou la paix sociale en portant ou non atteinte aux
droits des personnes et qui comme tel est légalement sanctionné
».
14 Article 8 du CPP
4
Certes le législateur ivoirien ne définit pas la
notion de victime, mais, il emploie certains mots ou groupes de mots pour la
designer. Il s'agit entre autres de « plaignant
»15, de « partie civile »16,
« partie lésée »17 de «
ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par
l'infraction »18.
L'appellation « partie civile » attire
particulièrement notre attention en raison de la nuance qui existe entre
elle et la notion de « victime ».
En effet, la victime, comme définie
précédemment, est la personne qui a personnellement subi un
préjudice directement causé par l'infraction. Si elle n'agit pas
en justice ou si elle saisit les juridictions civiles, elle garde toujours
cette appellation de « victime ». Par contre, si elle
décide de saisir les juridictions répressives, elle doit se
constituer partie civile. Ainsi la partie civile sera toute victime d'une
infraction ayant porté son action civile devant la juridiction
répressive. Avec la qualité de partie civile, la victime
intègre le procès pénal et y devient partie à part
entière. Autrement dit, toute partie civile est une victime19
mais toute victime n'est pas une partie civile. Toutefois, il est possible que
la victime, alors qu'elle ne s'est pas constituée partie civile, se
trouve devant les juridictions pénales. Dans ce cas, elle a une place
très réduite20 dans le procès et y est
généralement traitée comme un
témoin21.
Relativement à l'expression « juridictions
répressives », pour bien la cerner, il est judicieux de
s'intéresser en amont à la définition de la notion de
« juridiction » d'une part et du qualificatif «
répressive » d'autre part.
Selon le Lexique des termes juridiques, la juridiction «
dans un sens fonctionnel, et employé au singulier uniquement,
désigne la jurisdictio, le pouvoir de dire le droit ; dans un sens
organique, et employé au singulier comme au pluriel,
désigne
15 Article 116 nouveau du CPP
16 Article 101 du CPP
17 Article 8 du CPP
18 Article 7 du CPP
19 Exceptés les cas où certaines
personnes ou associations qui peuvent subroger la victime dans la constitution
de partie civile.
20 Elle bénéficie de certains droits
tels que l'assistance d'un avocat pendant les enquêtes et le
bénéfice des mesures de protection pendant l'instruction.
21 Selon le Lexique des termes juridiques, le
témoin est un simple particulier invité à déposer,
dans le cadre d'une enquête ou sous la forme écrite d'une
attestation, sur les faits dont il a eu personnellement connaissance,
après avoir prêté serment de dire la
vérité.
5
les organes qui sont dotés de ce pouvoir
»22. Il ressort de là que la juridiction est
l'organe doté du pouvoir de dire le droit23.
Quant au qualificatif « répressive
», il s'entend de « ce qui se rapporte à la
répression, qui tend à son organisation, à sa mise en
oeuvre et à son application ».24 Il a pour synonyme
le qualificatif « pénal » qui est défini comme
« ce qui se rapporte aux peines proprement dites, aux faits qui
encourent ces peines et à tout ce qui concerne la répression de
ces faits ».25 Il est également parfois synonyme du
qualificatif « criminel » au sens large et par opposition
à « civil », qui englobe en ce sens « tout
ce qui se rapporte aux infractions et à leurs sanctions
»26.
Ainsi « les juridictions répressives
» ou les juridictions pénales ou encore les juridictions
criminelles sont des organes dotés du pouvoir de dire le droit en
matière de la répression, son organisation, sa mise en oeuvre et
son application. En clair, les juridictions répressives sont les organes
compétents en matière des infractions et de leurs sanctions.
En outre, dans l'optique de parvenir au bon fonctionnent de la
justice répressive, le législateur ivoirien a instauré
deux types de juridictions pénales. Il s'agit d'une part des
juridictions répressives d'instruction et d'autre part des juridictions
répressives de jugement.
Relativement aux juridictions d'instruction, il s'agit au
premier degré du juge d'instruction27 et au second
degré de la chambre d'instruction de la cour d'appel28.
Concernant les juridictions de jugement, au premier degré, se trouvent
le tribunal criminel29, le tribunal correctionnel30 et le
tribunal de simple police31. Au second
22 GUINCHARD (S.), DEBARD (T.),
op.cit., 2019, p.619
23 « Dire » a ici le sens
de « trouver la règle de droit régissant le cas et la
lui appliquer concrètement » in NTAMBWE (C. Y. N.),
Initiation à la science et à la théorie du droit,
Côte d'Ivoire, UCAO, 2021, p.133
24 CORNU (G.), op.cit.,
p.1913
25 CORNU (G.), op.cit., p.1593
26 CORNU (G.), op.cit., p.636
27 Article 97 du CPP. Le juge
d'instruction est le magistrat que la loi a chargé de procéder
à l'instruction des affaires au niveau des tribunaux de première
instance.
28 Article 215, 228 et 205 du CCP.
La chambre d'instruction connaît de l'instruction au second degré
des affaires criminelles, de l'examen des appels contre les ordonnances du juge
d'instruction et de l'examen des requêtes en annulation des actes du juge
d'instruction.
29Article 20 du CPP. L'ancienne
cour d'assise, le tribunal criminel est compétent pour juger en premier
ressort les individus renvoyés devant lui par l'ordonnance de renvoi.
30 Article 390 du CPP. Le tribunal
connaît des délits au premier ressort.
31 Article 531 CPP. Le tribunal de
simple police connaît des délits au premier ressort.
6
degré, se trouvent la chambre criminelle de la cour
d'appel32 et la chambre correctionnelle de la cour
d'appel.33
La cour de cassation, en raison de son rôle de
contrôle des jugements et arrêts rendus par les juridictions de
fond, est aussi une juridiction répressive.34
A titre indicatif, le ministère public et le greffe, en
raison de leurs rôles respectifs de poursuite et d'authentification du
procès, ne seront pas exclus dans le cadre de cette étude. Par
contre, le juge de l'application des peines35, qui est aussi un
organe répressif ne sera pas principalement évoqué dans
notre travail.
Aux termes de cette réflexion terminologique, il
ressort que la protection de la victime devant les juridictions
répressives doit s'entendre de la manière dont le
législateur défend la victime, son intégrité, ses
intérêts, ses droits, contre toute atteinte dans la
procédure pénale mais aussi surtout des moyens juridiques mis
à sa disposition pour garantir la réparation de son
préjudice.
Il ressort également de cette approche
définitionnelle que notre étude portera sur la victime non
constituée ou non encore constituée partie civile et
principalement sur la victime qui a la qualité de partie civile en
raison des droits dont elle dispose devant les juridictions
répressives.
Le champ d'étude défini, il importe à
présent de présenter l'intérêt de notre sujet.
Celui-ci revêt un double intérêt qui est à la fois
scientifique et pratique. S'agissant de l'intérêt scientifique, il
réside dans le fait que nos travaux contribueront à la
connaissance de la protection de la victime d'une infraction dans le
procès pénal et à la compréhension des droits dont
elle dispose pour assurer sa protection.
Cette étude permettra également de
révéler les insuffisances au niveau de la protection de la
victime afin d'inciter le législateur ivoirien à une
réforme des droits de la victime adaptés à son statut.
Relativement à l'intérêt pratique, notons
que nos travaux permettront aux justiciables surtout aux victimes d'emprunter
les voies et moyens qui leur
32 Article 370 du CPP. La chambre
criminelle, remplaçante de la cour d'assise, connait des affaires
criminelles ayant fait l'objet d'appel.
33 Article 573 du CPP. La chambre
des appels correctionnels connaît des appels interjetés contre les
jugements rendus par les tribunaux correctionnels et les tribunaux de simple
police.
34 Articles 219 et 514 du CPP
35 Article 723 du CPP. Le juge de
l'application des peines (JAP) est un magistrat du siège du tribunal
judiciaire, compétent pour fixer les principales modalités de
l'exécution des peines privatives de liberté ou de certaines
peines restrictives de liberté, en orientant et en contrôlant les
conditions de leur application.
7
permettront de demander et obtenir la réparation de
leurs préjudices devant les juridictions pénales surtout si le
ministère public ne veut pas engager les poursuites.
Notre étude, loin d'être la première,
s'inscrit dans la lignée des réflexions déjà
menées sur le statut de la victime dans le procès pénal en
droit ivoirien36. Sa singularité se saisit par son sujet qui
porte sur la protection de la victime que n'a cessé de chercher le
législateur ivoirien à travers sa présence dans le
procès pénal. En effet, la présence de la victime devant
les juridictions répressives est consacrée depuis la loi
n°60-366 du 14 novembre 1960 portant code de procédure
pénale37. Par ailleurs, depuis la réforme du code de
procédure pénal en 2018 avec la loi n°2018-975 du 27
décembre, nous constatons un renforcement de la protection de la victime
notamment l'amélioration de ses droits. La loi n° 2022-192 du 11
mars 2022 modifiant celle de 2018 s'inscrit dans la même logique. Ces
reformes mettent en lumière l'actualité de ce sujet.
Dès lors, notre étude soulève le
problème suivant : le législateur ivoirien s'est-il
vraiment préoccupé de la protection de la victime devant les
juridictions répressives ?
Pour répondre à cette interrogation, trois
méthodes de recherche seront adoptées à savoir la
méthode descriptive, la méthode analytique et la méthode
comparative.
D'abord, le choix de la méthode descriptive se justifie
par le fait que les droits de la victime assurant sa protection devant les
juridictions pénales sont méconnus par les justiciables et par
les victimes elles-mêmes. Il est important d'user de cette méthode
pour éclairer les justiciables qui souffrent d'une infraction sur les
mesures à prendre pour la réparation du préjudice subi.
Ensuite, l'adoption de la méthode analytique trouve sa
justification dans le fait que la victime est considérée comme
une partie accessoire voire secondaire dans le procès pénal.
Cette méthode permettra d'analyser l'impact de la place secondaire de la
victime sur sa protection.
36 A titre d'exemple, nous pouvons citer la
thèse de NIAMBE Kassi Richard portant sur « la participation de
la victime dans le procès pénal », thèse
soutenue à l'Université Alassane OUATTARA de Bouaké en
2020.
37 L'article premier du CPP de 1960 disposait que :
« L'action publique pour l'application des peines est mise en
mouvement et exercée par les magistrats ou fonctionnaires auxquels elle
est confiée par la loi. Cette action peut aussi être mise en
mouvement par la partie lésée, dans les conditions
déterminées par le présent Code ».
8
Enfin, le recours à la méthode comparative dans
le cadre de notre analyse s'explique par le fait que, au besoin, nous nous
réfèrerons aux législations étrangères pour
apprécier le traitement que réserve le législateur
ivoirien à la victime qui se trouve devant les juridictions
répressives.
Par ailleurs, l'analyse de l'arsenal juridique
répressif ivoirien donne de constater et de noter que depuis le code de
procédure pénale de 1960 jusqu'à celui de 2018 tel que
modifié par la loi n°2022-192 du 11 mars 2022, le
législateur cherche progressivement la protection de la victime. Mais
cette protection demeure limitée.
C'est donc au gré de ce constat que notre étude
consistera à analyser la protection recherchée de la victime
devant les juridictions répressives (PREMIERE PARTIE) ainsi que les
limites de cette protection (DEUXIEME PARTIE).
9
PREMIERE PARTIE : UNE PROTECTION RECHERCHEE
Les juridictions répressives sont celles qui
connaissent en principe des affaires pénales. Mais exceptionnellement,
la loi leur permet de se prononcer sur l'action civile de la victime. Cette
possibilité concourt à la recherche de la protection de la
victime et se justifie, en plus des avantages qu'elle offre à la
victime, par le fait que la victime n'est pas étrangère à
l'affaire pendante devant ces juridictions pénales. C'est le premier
témoin ou le témoin principal du fait ayant troublé
l'ordre public ou la paix sociale et pour la répression duquel les
juridictions pénales sont saisies.
En fait, la protection de la victime est recherchée
parce qu'elle est le siège de la commission de ce fait antisocial,
source de sa souffrance. C'est à ce juste titre que l'Etat dans
l'optique de veiller au rétablissement de l'ordre public lui accorde une
main protectrice et une oreille attentive en lui permettant de participer
à la procédure pénale. Partant, la protection de la
victime est recherchée devant lesdites juridictions par cette
possibilité qui lui est offerte d'intégrer la procédure
pénale. Cette intégration se fait par plusieurs modalités
(CHAPITRE 1) et donne droit à la victime d'exercer une panoplie de
droits pendant la procédure pénale (CHAPITRE2).
10
CHAPITRE 1 : LA RECHERCHE PAR LA PLURALITE DES MODALITES
D'INTEGRATION DE LA VICTIME DANS LA PROCEDURE PENALE
Selon le Robert Micro-poche, « la modalité est
la forme particulière d'un acte, d'un fait, d'une pensée, d'un
objet. Elle est synonyme de manière ».38 Par
intégration, il faut entendre, « incorporation de nouveaux
éléments à un système ».39
Ici, il s'agit d'analyser les formes particulières ou les
manières qui permettent de faire entrer la victime dans la
procédure pénale en tant que partie intégrante afin de
rechercher sa protection.
Quant à la procédure pénale, elle est
« l'ensemble des règles qui définissent la
manière de procéder pour la constatation des infractions,
l'instruction préparatoire, la poursuite et le jugement des
délinquants ».40
A titre de précision, l'intégration de la
victime, c'est sa participation au procès pénal41. En
effet, les modalités d'intégration ou de participation sont en
réalité les modalités de constitution de partie
civile,42 car c'est par le biais de celle-ci qu'elle est partie au
procès. Cette constitution peut se faire soit par voie d'action soit par
voie d'intervention. Et, pour chaque voie d'intégration, le
législateur a prévu deux modalités. De ce fait, il y a
d'une part une dualité de modalités d'intégration de la
victime à la procédure par voie d'action (SECTION 1) et d'autre
part, une dualité de modalités d'intégration par voie
d'intervention (SECTION 2).
38 REY (A.), Le Robert
Micro-poche, Paris, Le Robert, éd. 2018, avril 2018, p. 912
39 REY (A.), op.cit., p.771
40 GUINCHARD (S.), DEBARD (T.),
op.cit., 2019, p.853
41 Le procès pénal est
ici synonyme de la procédure pénale.
42 Pour Jacques LEROY, «
la constitution de partie civile est l'expression procédurale de
l'action civile » in LEROY (J.), Procédure pénale,
L.G.D.J. 7ème éd., 2021, p.298
11
Section 1 : La dualité des modalités
d'intégration par voie d'action
La voie d'action est celle qui permet à la victime de
se constituer partie civile et de mettre en mouvement l'action
publique43. C'est la constitution de partie civile à titre
principal car elle déclenche, à elle seule, les poursuites
pénales. Elle offre un effet « moteur », c'est-à-dire
elle entraine la mise en mouvement de l'action publique44. Cette
voie d'intégration de la victime n'est possible que lorsque l'action
publique n'est pas mise en mouvement par le ministère public ou par une
autre partie s'estimant lésée. En outre, cette possibilité
offerte à la victime de mettre en mouvement l'action publique concourt
sans nul doute à la recherche de sa protection.
Par ailleurs, l'intégration de la victime par la voie
d'action peut se faire devant les juridictions de jugement par le moyen de la
citation directe (Paragraphe 1) et devant les juridictions d'instruction par le
moyen de la plainte avec constitution de partie civile (Paragraphe 2).
La victime emploiera la modalité de la plainte avec
constitution de partie civile ou la citation directe, suivant que le
procès pénal doit être ou non précédé
d'une instruction préparatoire.
Paragraphe 1 : La citation directe
La citation directe est l'acte de procédure par lequel
le ministère public ou la victime saisit directement la juridiction de
jugement en informant le prévenu des coordonnées de
l'audience45. Elle est délivrée à la
requête du procureur général, du procureur de la
République, de la partie civile et de toute Administration qui est
légalement habilitée46. La définition de cet
acte de commissaire de justice47, permet de voir son utilité
en ce sens qu'il permet à la victime de saisir directement
43 Article 6 alinéa 2 du CPP
44 SOYER (J-C), Droit pénal et
procédure pénale, Paris, L.G.D.J., 12ème éd.,
1995, p.279
45 GUINCHARD (S.), DEBARD (T.), op.cit., 2019,
p.186
46 Article 586 du CPP
47 Article 585 du CPP
12
le tribunal répressif (A). Toutefois, le champ
d'application et le formalisme requis pour la mise en oeuvre de ce
procédé font qu'il est inadéquat (B).
A - Un instrument utile au regard de ses effets
L'utilité de la citation directe se perçoit
d'abord par le fait qu'elle permet à la victime de se constituer partie
civile. En effet, par cette constitution, la victime intègre la
procédure pénale puisqu'elle devient partie au procès
pénal. Ce nouveau statut lui accorde de nombreux droits
procéduraux48 dont l'exercice permet de rechercher sa
protection.
En outre, cet instrument est utile pour la victime dans la
mesure où il lui permet, en se constituant partie civile, de saisir
directement la juridiction de jugement et de mettre en mouvement l'action
publique49. C'est ce qui ressort de la lecture combinée des
articles 6 al. 2 et 586 du CPP qui consacrent respectivement la mise en
mouvement possible de l'action publique par la partie lésée et la
délivrance de la citation à la requête de la partie
civile.
Ainsi, une personne qui est victime d'un délit ou d'une
contravention peut, en se constituant partie civile, respectivement saisir le
tribunal correctionnel50 et le tribunal de simple
police51pour demander la réparation du préjudice
subi.
En effet, la saisine directe du juge favorise la protection de
la victime en raison de la rapidité qu'elle offre dans la
résolution de l'infraction commise. La victime aura donc la chance de
voir son affaire jugée dans un délai raisonnable52. En
effet, la célérité permet d'éviter la disparition
des éléments de preuve ou l'oubli de certains détails des
faits par les témoins. Autrement dit, le principe de
célérité permet l'efficacité du système
judiciaire.
De même, l'utilité de cet instrument trouve sa
fortune dans le fait que la victime d'une contravention ou d'un délit,
dans l'exercice de son action civile, n'est pas soumise obligatoirement
à la saisine du juge d'instruction ou du
48 V. infra p.28
49 Crim, 8 décembre 1906, D 1907, I, 207.
Trib. Correct. Abidjan, Section de Tiassalé, jugement n°17 du 21
janvier 1997, R.J.C.A.T., n°2-2000, p.130
50 Article 396 du CPP
51 Article 543 du CPP
52 Ce principe directeur de la procédure
pénale est prévu par l'article 5 alinéa premier qui
dispose : « Il doit être définitivement statué sur
la cause de toute personne poursuivie dans un délai raisonnable
».
13
ministère public. Elle ne va donc pas se heurter au
filtrage du juge d'instruction et à son éventuelle information.
Aussi, évite-elle le pouvoir d'appréciation du procureur de la
République des suites à donner aux plaintes
déposées et aux dénonciations faites au
parquet53. Ainsi, la citation directe est un palliatif à
l'inertie du procureur de la République et au juge d'instruction
vis-à-vis d'une affaire dont ils sont saisis par la victime. En effet,
au regard de l'art. 51 al. 1 du CPP le procureur peut décider de ne pas
donner suite à la plainte.
Aussi le juge d'instruction peut rendre une ordonnance de non
informer ou de non-lieu54.
En cas de classement sans suite du procureur et en cas de
refus d'informer du juge instructeur, la victime peut, directement, porter
l'affaire en cause à la connaissance du juge de jugement pour un
éventuel jugement.
En sus, la citation directe est bénéfique pour
la victime en ce sens qu'elle permet de suspendre à son profit la
prescription de l'action publique.55
Par ailleurs, le tribunal saisi par une citation directe est
obligé de statuer sur l'action publique même si la partie civile
se désiste. En fait, le désistement de la partie civile n'a en
principe aucune influence sur l'action publique. Mais pour un certain nombre
d'infractions, le désistement de la victime partie civile par le retrait
de sa plainte emporte l'extinction de l'action publique. Il s'agit des
infractions dont la poursuite est subordonnée à la plainte de la
victime. C'est le cas par exemple du délit d'adultère
subordonné à la plainte du conjoint offensé. Cette
extinction exceptionnelle de l'action publique peut se justifier soit par le
fait que les infractions en question lèsent les intérêts de
la partie civile sans constituer des atteintes graves à l'ordre publique
; soit parce que la poursuite est de nature à troubler l'honneur de la
victime ou de sa famille.
L'analyse que voici a permis de voir l'utilité de la
citation directe à travers les effets qu'elle produit. Mais,
malgré cette utilité, cet instrument, au regard de son champ
d'application et de son formalisme, parait inadéquat.
53 Article 51 alinéa 1 du CPP
54 Article 221 du CPP
55 C'est l'article 12 du CPP qui prévoit les
délais de prescription de l'action publique en fonction de l'infraction
en cause. Selon cette disposition, en matière criminelle, l'action se
prescrit par 10 années révolues ; en matière
délictuelle, elle se prescrit par trois années révolues et
en matière contraventionnelle, elle se prescrit par une année
révolue.
14
B- Un instrument inadéquat
La citation directe est inadéquate en raison de son
domaine d'application restreint et de son formalisme rigoureux.
Relativement au champ d'application de la citation, celui-ci
est défini par les articles 396 et 543 du CPP. Selon ces textes, ce sont
le tribunal correctionnel56et le tribunal de simple
police57 qui sont saisis par la citation directe à la
requête de la partie civile. Ces deux articles réservent l'usage
de la citation aux délits et aux contraventions58. Le domaine
d'application de la citation directe se trouve limité. Car, elle ne peut
être employée que lorsqu'une instruction n'est pas
nécessaire59, ce qui exclut obligatoirement les crimes, et
limite les hypothèses en cas de délit60.
Ainsi, cette exclusion est en réalité
prévue par l'art. 96 du CPP qui dispose que : « L'instruction
préparatoire est obligatoire en matière de crime ; sauf
dispositions spéciales, elle est facultative en matière de
délit ». De ce fait, la partie lésée ne peut
employer ce moyen de poursuite en cas de crime en raison de
l'obligatoriété affirmée de l'instruction et en cas
d'infraction en cause, quoique qualifiée de délit,
nécessite l'ouverture d'une information61.
Notons que lorsque l'auteur de l'infraction est inconnu, la
victime ne peut recourir à la citation directe. Car elle doit donner des
informations sur l'identification de la personne poursuivie, son
identité s'il s'agit d'une personne physique ou sa dénomination
et son siège s'il s'agit d'une personne morale. Dans
56 Article 396 du CPP
57 Article 543 du CPP
58 C'est l'article 3 de la loi n° 2021-893 du
21 décembre 2021 modifiant la loi n°2019-574 du 26 juin 2019
portant code pénal qui procède à la classification des
infractions lorsqu'il dispose que : « Les infractions pénales
sont classées suivant leur gravité, en crimes, délits et
contraventions.
L'infraction est qualifiée :
1°) crime : si elle est passible d'une peine
privative de liberté perpétuelle ou temporaire supérieure
à dix ans ; 2°) délit : si elle est passible d'une peine
privative de liberté inférieure ou égale à dix ans,
et supérieure à deux mois, et d'une peine d'amende
supérieure à 360.000 francs ou de l'une de ces deux peines
seulement ou si elle est qualifiée comme tel par la loi ; 3°)
contravention : si elle est passible d'une peine privative de liberté
inférieure ou égale à deux mois et d'une peine d'amende
inférieure ou égale à 360.000 francs ou de l'une de ces
deux peines seulement. »
59 BONFILS ( PH. ), « L'action pénale de
la victime, une action en justice innomée au régime juridique
clairement défini », in Institut pour la justice,
N°17, Juillet 2012 [ en ligne]
https://www.institutpourlajustice.org/content/2017/11/Etudes-Victime-Droit-Laction-p%C3%A9nale-de-la-victime.pdf
, consulté le 13 octobre 2023 à 19h52mn
60 RENAULT-BRAHINSKY (C.), Procédure
pénale, Paris, Lextenso, 23ème éd., 2023, p.97
61 NIAMBE (K. R.), « La participation de
la victime au procès pénal », thèse,
Université Alassane OUATTARA de Bouake, 2020, p.106
15
ce cas, elle ne peut procéder que par voie de plainte
avec constitution de partie civile. Cette exclusion montre encore que le
domaine d'application de cet instrument est restreint. Toutefois, si l'auteur
présumé dissimule son identité exacte, il peut
néanmoins être poursuivi sous l'identité qu'il
utilise62.
A l'inverse, en matière de contraventions, la victime ne
dispose que de la citation directe car la voie de la plainte avec constitution
de partie civile ne peut être empruntée pour la simple raison
qu'une information judiciaire n'est pas prévue. L'inadéquation de
la citation directe se perçoit également par son formalisme
rigoureux. En effet, selon l'art. 586, elle peut être
délivrée à la requête de la partie civile. Il
énonce le fait poursuivi ainsi que les textes de lois qui le
répriment.
En outre, la citation doit indiquer le tribunal saisi, le
lieu, l'heure et la date de l'audience et préciser la qualité de
prévenu, de civilement responsable. En plus de ces mentions, la partie
civile doit faire la mention de ses noms, prénoms, profession ou
domicile réel ou élu. Ces mentions permettent au prévenu
de connaitre l'identité de la personne poursuivante.
Toutes ces mentions énumérées à
l'art. 186 du CPP sont en principe sanctionnées par la nullité.
Mais l'art. 600 du même code dispose : « La nullité d'un
acte de commissaire de justice ne peut être prononcée que
lorsqu'il a eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la
personne qu'il concerne... ».
Celle-ci doit également, avant de faire signifier la
citation directe, obtenir l'accord du parquet sur la date de l'audience pour
laquelle la citation est délivrée. De plus, l'exploit doit
également contenir les nom, prénoms et adresse du commissaire de
justice 63.
L'art. 587 prévoit les délais minimums pour
comparaitre devant le tribunal après la délivrance de la
citation. De cet article, un délai de trois jours est requis si la
partie citée réside au siège du tribunal, de cinq jours si
elle réside dans le ressort du tribunal. Ce délai est de huit
jours si elle réside dans un ressort limitrophe, de quinze jours si elle
réside dans un autre ressort du territoire de la République de
Côte d'Ivoire et de deux mois dans tous les autres cas. Ainsi si ces
délais minimums ne sont pas observés, le tribunal déclare
nulle la citation. La nullité n'est pas envisagée si la personne
citée se présente. Mais le tribunal doit
62 STEFANI (G.), LAVASSEUR
(G.), BOULOC (B.), Procédure pénale, Dalloz,
14ème éd., p.616
63 NIAMBE (K. R),
op.cit., p.109
16
sur la demande de la partie citée, ordonner le renvoi
à une audience ultérieure. La demande doit être
présentée avant toute défense au fond64.
En outre, les articles 589 et suivants traitent de la
signification de la citation. La personne qui reçoit copie de l'acte
doit signer l'original. Si elle ne veut pas ou ne peut pas, mention en est
faite par le commissaire de justice.65 Notons que la copie est
remise au concerné au domicile indiqué66. S'il est
absent, l'auxiliaire de justice interpelle la personne présente au
domicile sur son indentification, la durée de l'absence et sur l'adresse
à laquelle celui-ci peut être trouvé afin de s'y
transporter pour lui remettre la copie de l'acte67. Si la personne
trouvée déclare ne pas connaitre l'adresse, la copie lui est
remise. Cependant, le commissaire de justice doit aviser sans délai
l'intéressé de cette remise68.
Par ailleurs, si le commissaire ne trouve personne au domicile
du concerné, il remet une copie de cet exploit au maire ou à
défaut à un adjoint, au conseiller municipal
délégué ou au secrétaire de mairie ou encore au
sous-préfet si la localité n'a pas de mairie. L'auxiliaire de
justice avise sans délai la personne concernée par lettre
recommandée en l'informant qu'elle doit retirer la copie de l'exploit
à l'adresse indiquée, dans les moindres
détails69. Si la personne citée n'a pas de domicile ou
de résidence connue, le commissaire de justice remet l'exploit au
parquet 70. Dans ce cas, le procureur requiert un officier de police
judiciaire pour rechercher et découvrir l'adresse de la personne
concernée.
En outre, la victime doit élire domicile dans le
ressort du tribunal saisi, à moins qu'elle n'y soit domiciliée.
Elle doit également, si elle n'a pas obtenu l'assistance
judiciaire71, et sous peine de non recevabilité de son
action, consigner72 au greffe la somme présumée
nécessaire pour les frais de la procédure73.
De ce qui précède, la citation directe,
malgré la restriction de son champ d'application et son formalisme assez
rigoureux, est un instrument important à la disposition de la victime
pour exercer son action civile par voie d'action. A côté
64 Article 588 du CPP
65 Article 589 in fine du CPP
66 Article 590 du CPP
67 Article 591 du CPP
68 Article 592 du CPP
69 Article 593 du CPP
70 Article 594 du CPP
71 V. infra p.35
72 V. infra P.51
73 Article 401 du CPP
17
de cet instrument, le législateur ivoirien permet
également l'intégration de la victime par voie d'action dans le
procès par le procédé de la plainte avec constitution de
partie civile.
Paragraphe 2 : La plainte avec constitution de partie
civile
La plainte avec constitution de partie civile est l'acte par
lequel la victime d'une infraction saisit et sollicite du juge d'instruction
l'ouverture d'une information judiciaire et réclame la réparation
du dommage que lui a causé cette infraction. La plainte avec
constitution de partie civile, contrairement à la citation directe,
à un domaine élargi et permet la saisine du juge d'instruction
par la victime. De ce fait, elle apparait comme un mode approprié pour
la victime (A) et performant au regard de ses effets (B).
A - Un mode approprié
Ce mode de saisine des juridictions répressives est
approprié en raison de l'élargissement de son champ d'application
et de son formalisme moins rigoureux par rapport aux exigences de la citation
directe.
Relativement au champ d'application, ce mode, selon l'art. 106
du CPP, est utilisé par toute personne qui s'estime victime d'un crime
ou d'un délit dont la répression nécessite, aux termes de
l'art. 96 dudit code, l'ouverture d'une information judiciaire.
Au regard de l'art. 96 du CPP, l'instruction est obligatoire
en matière criminelle et facultative en matière
délictuelle.
En effet, l'instruction est obligatoire en matière
criminelle parce que les crimes sont les infractions les plus graves en ce
qu'ils sont punis des peines les plus lourdes. Dès lors, leur jugement
mérite beaucoup de précautions. En sus, l'instruction n'est pas
obligatoire en matière délictuelle parce que les délits
sont de moindre gravité et sont punis moins sévèrement que
les crimes. Ainsi, de telles infractions peuvent être jugées sans
qu'il soit nécessaire de procéder à une information
judiciaire. Partant, la victime d'un crime ne dispose d'autre moyen pour saisir
les juridictions répressives que de recourir à la plainte avec
constitution
18
de partie civile. Par contre, la victime d'un délit qui
souhaite exercer son action civile devant le juge répressif a le choix
entre la citation directe devant le juge de jugement et la plainte avec
constitution de partie civile devant le juge d'instruction. Toutefois, la loi
peut exiger l'instruction pour certains délits. Elle peut
également l'exiger en raison de la personne de l'auteur
présumé, le cas d'un mineur par exemple.
En clair, pour la victime qui se constitue partie civile par
voie d'action, la plainte est la voie de procédure exclusive en
matière criminelle et l'une des voies en matière
délictuelle74.
C'est ce mode qui est également employé si
l'auteur de la faute pénale est inconnu. Cela se justifie par le fait
que la plainte avec constitution de partie civile permet de saisir
l'enquêteur de la justice par excellence, le juge d'instruction, qui
dispose de moyens pour rechercher l'auteur présumé.
La victime a également recours à cet instrument
lorsque les faits doivent être élucidés en raison de leur
complexité. Dans ce cas, une information judiciaire bien menée
permettra de comprendre ce qui s'est réellement passé et de
situer les responsabilités des différents acteurs. Ces deux cas
de figure permettent encore d'affirmer que cet instrument est
adéquat.
Il convient cependant de relever que les infractions
qualifiées de contraventions sont exclues du champ de la plainte avec
constitution de partie civile. Cela se justifie par le fait que l'information
judiciaire n'est pas prévue en matière de répression des
contraventions. Aussi, l'art. 106 qui traite du domaine de ce mode les exclut.
Cette exclusion se justifie également par la nature même des
contraventions. Elles sont moins sévèrement
réprimées que les autres infractions. Ainsi, la victime d'une
contravention ne peut pas recourir à la plainte avec constitution de
partie civile. Une telle plainte serait donc irrecevable75.
Mais si une contravention est connexe à un crime ou un
délit soumis à instruction, la contravention fera
également l'objet de cette procédure. Elle ne sera pas
dissociée des autres infractions.
En substance, il faut noter que, la plainte avec constitution
de partie civile favorise largement l'intégration de la victime dans le
procès pénal et cela grâce à son champ d'application
large. Cette intégration est également favorisée par le
74 GUINCHARD (S.), BUISSON (J.),
Procédure pénale, Litec, 2ème
éd., 2000, p.706
75 Cass. crim., 18 avril 1929, D.P. 1930, I,
40
19
formalisme moins rigoureux auquel est soumis ce mode. En
effet, le législateur ivoirien, ne précise pas la forme de la
plainte avec constitution de partie civile. C'est ce que l'on constate à
la lecture de l'art. 106 du CPP qui dispose : « Toute personne qui se
prétend lésée par un crime ou un délit peut en
portant plainte se constituer partie civile devant le juge d'instruction
compétent ». Face à cette imprécision nous
pouvons dire que la plainte peut se faire soit verbalement devant le juge
d'instruction soit par écrit. Lorsqu'elle est faite de façon
orale, le juge d'instruction doit dresser le procès-verbal de la
déclaration. Lorsqu'elle est faite par écrit, simple lettre
recommandée avec accusé de réception adressée au
juge d'instruction, elle doit relater les faits dénoncés,
indiquer les textes de lois qui les répriment et préciser
l'identité du présumé auteur si elle est connue. Sinon la
plainte est déposée contre X. Elle est datée et
signée de son auteur. En tout état de cause, la plainte doit
contenir l'intention manifeste de la victime de se constituer partie
civile.76
Par ailleurs, la victime doit, aux termes de l'art. 110 du
CPP, élire domicile dans le ressort du tribunal saisi, à moins
qu'elle n'y soit domiciliée. Elle doit également selon l'art. 109
du CPP, si elle n'a pas obtenu l'assistance judiciaire, et sous peine de non
recevabilité de son action, payer une consignation fixée par le
juge d'instruction saisi.
A titre de droit comparé, en plus de ces conditions de
recevabilité, l'auteur de la plainte doit justifier que le procureur de
la République a porté à sa connaissance qu'il n'engagera
pas des poursuites à la suite de la plainte déposée par la
victime ou qu'un délai de trois mois s'est écoulé depuis
la saisine du procureur de la République.77
Lorsque ces conditions sont remplies, la plainte avec
constitution de partie civile devient un mode performant dans le
déclenchement des poursuites.
B- Un mode performant
La plainte avec constitution de partie civile est performante
en raison de l'effet pénal de l'action civile par voie d'action qu'elle
déploie78. En effet,
76 Cass. crim., 8 mai 1979, Bull.
crim. n°165.
77 Article 85 al.2 de
procédure pénale (France), Paris, Dalloz, 61ème
éd.,2020, p.343
78 GUINCHARD (S.), BUISSON (J.),
Procédure pénale, 5e
éd.,2009, n°1515 et s. in NIAMBE (K. R.), op.cit., p.123
20
contrairement à la plainte simple qui informe la
justice de la commission d'une infraction, la plainte avec constitution de
partie civile permet de mettre en mouvement l'action publique79 et
partant, de saisir le juge d'instruction.
Aussi, cet instrument est-il performant car il permet une
réelle concurrence avec le ministère public dans le
déclenchement des poursuites. En effet, selon le principe de
l'opportunité des poursuites, le ministère public a le pouvoir
d'apprécier les suites à donner aux plaintes
déposées au parquet. Il peut donc décider de poursuivre ou
de classer l'affaire sans suite, sans une motivation obligatoire, lorsqu'il
estime qu'il n'est pas opportun de mettre en mouvement l'appareil judiciaire.
Le procureur de la République jouit d'une liberté totale en
matière d'appréciation des poursuites. Pour cette raison et du
fait que le procureur de la République ne présente pas des
garanties d'indépendance eu égard à sa subordination au
pouvoir exécutif, les victimes courent le risque de se heurter à
l'inertie et aux résistances du procureur à poursuivre. Ces
attitudes du procureur créent souvent une inégalité entre
les victimes. Pour contourner ces différents obstacles et garantir la
réparation des dommages causés aux victimes, la loi a
prévu la plainte avec constitution de partie civile. Par son biais, les
victimes saisissent directement le juge d'instruction qui sera amené
à faire des instructions. En clair, à l'instar de la citation
directe, la plainte avec constitution de partie civile est une solution contre
l'inaction du ministère public.
On peut également noter que la plainte avec
constitution de partie civile est pour la victime ce qu'est le
réquisitoire à fin d'informer80 pour le
ministère public. En ce sens qu'elle permet de saisir le juge
d'instruction aux fins d'ouvrir une information judiciaire.
De ce fait, la saisine du juge d'instruction et de son
obligation d'informer sont également une preuve de la performance de
l'instrument étudié. L'obligation d'informer du juge
d'instruction après saisine se justifie par le fait que la plainte avec
constitution de partie civile permet de mettre en mouvement l'action publique
qui n'est effective que par l'ouverture d'une information judiciaire.
Toutefois, au regard de l'art. 107 du CPP cette obligation
connait quelques limites. En effet, le juge d'instruction n'est pas
obligé d'informer si les faits ne peuvent légalement comporter
une poursuite ou s'ils n'admettent pas aucune
79 Crim, 8 décembre 1906, D 1907, I, 207
80 C'est l'acte par lequel le ministère
public requiert le juge d'instruction d'ouvrir une information, soit contre une
personne désignée, soit contre un inconnu que le juge
d'instruction aura mission d'identifier.
21
qualification pénale. Il peut également refuser
d'informer si, formellement, il constate son incompétence ou
l'irrecevabilité de la plainte en raison du non-paiement de la
consignation. Dans ce cas, il rend une ordonnance de non-lieu ou de refus
d'informer. A ce stade, il convient de souligner que la plainte avec
constitution de partie civile fait l'objet d'un encadrement dans le but
d'éviter des constitutions dilatoires et
abusives81.
De tout ce qui précède, les modalités de
constitution par voie d'action permettent à la victime de mettre en
mouvement l'action publique. Après cette influence sur l'action
publique, notons-le, la partie civile n'a plus d'influence sur cette
action82 son exercice étant réservé au
ministère public83. C'est lui qui va soutenir la poursuite
s'il l'estime bien-fondée, ou bien requérir un non-lieu du juge
d'instruction ou une relaxe de la juridiction de jugement s'il estime qu'il n'y
a pas lieu de poursuivre. La partie civile ne sera donc plus en cause que pour
la défense de ses intérêts civils, tout comme dans
l'hypothèse où la constitution de partie civile s'est faite
à titre accessoire. Mais, il n'empêche que, dans tous les cas, la
partie civile se trouve reliée au procès pénal : elle y
devient partie84.
Sous un autre angle, le législateur, dans la recherche
de la protection de la victime, permet à celle-ci d'intégrer la
procédure même si l'action publique est déjà mise en
mouvement. Elle le fera par les modalités d'intégration par voie
d'intervention.
Section 2 : La dualité des modalités
d'intégration par voie d'intervention
L'intégration est dite par voie d'intervention ou
à titre accessoire en ce sens qu'elle intervient après la mise en
mouvement de l'action publique par le ministère public85. En
effet, cette voie permet à la partie lésée de se faire
prendre en « remorque » de l'action publique pour y
défendre ses intérêts civils86. Par ce
81 V. infra p.51
82 Exceptée
l'hypothèse dans laquelle l'action pénale s'éteint par le
retrait de la plainte de la victime si l'action pénale était
subordonnée au dépôt d'une plainte.
83 Articles 6 et 42 du CPP
84 SOYER (J-C), op.cit.,
p.281
85 Article 20 du CPP
86 SOYER (J-C), op.cit., p279.
mécanisme, il apparait que le législateur entend
manifestement faire de la victime une partie au procès pénal et
partant, lui accorder une protection.
L'intervention de la victime dans la procédure
pénale peut se faire d'une part, au cours de la phase de l'instruction
préparatoire par le biais d'une constitution de partie civile ordinaire
(Paragraphe 1), et d'autre part, pendant la phase de jugement
par le biais d'une déclaration de partie civile (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : La constitution de partie civile
ordinaire
Selon l'art. 108 du CPP., alors qu'elle n'a pas mise en
mouvement l'action publique devant le juge d'instruction, la victime peut
néanmoins se constituer partie civile au cours de l'information
judiciaire. Cela va se faire au cours de son audition et en réponse
à la question du juge d'instruction de savoir si elle se constitue
partie civile ou non. Ce procédé est convenable à la
partie lésée (A) et déploie d'importants effets (B).
A - Un procédé convenable
Après la mise en mouvement de l'action publique par le
ministère public qui a donné lieu à l'ouverture d'une
information judiciaire, le législateur, dans le souci de toujours
rechercher la protection de la victime, permet qu'elle intègre la
procédure pénale pour demander la réparation du
préjudice subi. Cette intégration se fait par la constitution de
partie civile de la victime devant le juge d'instruction. C'est la constitution
de partie civile ordinaire par opposition à la plainte avec constitution
de partie civile.
Cette faculté offerte à la victime est
prévue par l'art. 108 du CPP qui dispose : « La constitution de
partie civile peut avoir lieu à tout moment au cours de l'instruction
». Selon cette disposition, tant que la procédure se trouve
devant les juridictions d'enquête, la victime peut toujours exercer son
action civile devant le juge d'instruction et devant la chambre
d'instruction87. Cette disposition ne précise pas la forme de
cette constitution. Ce qui permet de soutenir qu'elle peut
22
87 Cass. crim., 25 juin 1937, D.P.,
1938. 4, note Leloir
se faire par écrit, une simple lettre adressée
au juge d'instruction dans laquelle la victime déclare manifestement se
constituer partie civile ou par déclarations verbales. Cela va se faire
au cours de son audition et en réponse à la question du juge
d'instruction de savoir si elle se constitue partie civile ou non. Le magistrat
instructeur reçoit alors la réponse de la victime
consignée dans le procès-verbal d'audition.
Ce mode est donc convenable en ce sens qu'il n'est pas soumis
à un formalisme trop rigoureux. Il est également convenable en
raison de son champ d'application étendue. En effet, ce
procédé concerne les faits dont est saisi le juge d'instruction
pour information. L'information étant obligatoire en matière
criminelle et facultative, donc possible, en matière délictuelle,
la constitution de partie civile ordinaire concerne alors les crimes et
certains délits.
Par ailleurs, il faut souligner que ce type de constitution de
partie civile se limite aux seuls faits incriminés et aux seules
personnes mises en cause par le juge d'instruction88. Donc, en
principe, la victime en se constituant partie civile ne peut cibler ni des
faits nouveaux ni d'autres personnes non inculpées. Si elle veut voir
ces faits nouveaux et ces personnes non suspectes mises en cause, elle peut,
à cet effet, les citer directement devant les juridictions de
jugement.
En outre, l'art. 108 al. 2 du CPP dispose : « Dans
tous les cas, la recevabilité de la constitution de partie civile peut
être contestée, soit par le ministère public, soit par
l'inculpé, soit par une autre partie civile ». En cas de
contestation, il revient au juge d'instruction de statuer sur la
recevabilité ou non de la constitution de partie civile de la personne
qui prétend être lésée par les infractions dont il
est saisi.
Sous un autre angle, l'emploi de ce procédé,
contrairement à la plainte avec constitution de partie civile, n'est pas
soumise au paiement d'une consignation. Cela se justifie par le fait que la
procédure est déjà déclenchée par le
ministère public et partant, les frais de procédure sont à
la charge de l'Etat.
La plainte avec constitution de partie civile ordinaire
reçue produit des effets.
23
88 Crim. 9 nov. 1995, Bull.
n°345
24
B - Des effets en cas de
recevabilité
La constitution de partie civile qui intervient après
le déclenchement du procès pénal permet à la
victime, en cas de recevabilité, d'acquérir la qualité de
partie civile. Elle devient ainsi une partie intégrante au
procès.
Ce nouveau statut fait perdre à la victime son ancien
statut de témoin89. En effet, la qualité de partie
civile favorise la recherche de la protection de la victime à travers
les avantages procéduraux attachés à ce statut. De ce
fait, elle peut obtenir des dommages-intérêts en réparation
de son préjudice, la juridiction se trouvant tenue de statuer sur sa
demande.90 La victime constituée partie civile participe au
procès et partant, concourt à l'instruction. Ainsi, elle pourra
se faire assister d'un conseil, elle est également informée de
l'évolution de la procédure et elle se voit notifier les actes
importants de la procédure notamment les ordonnances
juridictionnelles91. Elle peut également demander qu'une
expertise soit faite. Enfin, elle peut exercer des voies de recours contre les
décisions du juge d'instruction.92
La victime qui ne se constitue pas partie civile jouit de
quelques droits pendant le procès en raison de son statut de spectateur
légitime mais à une échelle réduite puisqu'elle est
traitée comme un témoin.
Par ailleurs, nous constatons que la victime en raison de sa
constitution perd la qualité de témoin. En effet, le
témoin est « un simple particulier invité à
déposer, dans le cadre d'une enquête ou sous la forme
écrite d'une attestation, sur les faits dont il a eu personnellement
connaissance, après avoir prêté serment de dire la
vérité ».93 De cette définition, le
témoin doit donc prêter serment avant de faire ses
déclarations. L'art. 432 du CPP disposant que : « la personne
qui s'est constituée partie civile ne peut plus être entendue
comme témoin » alors, la victime, constituée partie
civile, n'est pas soumise à cette exigence qui tend à assurer la
sincérité des déclarations. Cette impossibilité qui
tend à assurer l'équité et la préservation des
droits de la défense trouve sa justification dans la règle «
Nullus idoneus testis in re sua intelligistur ». Cette
règle signifie que « personne
89 Article 323-6° du CPP
90 PRADEL (J.), Procédure
pénale, Paris, CUJAS, 14ème éd., 2008,
p.605
91 Article 217 du CPP
92 V. infra p.42
93 GUINCHARD (S.), DEBARD (T.), op.cit., 2019,
p.1050
n'est considérée comme témoin dans sa
propre cause ou encore personne ne peut être témoin dans son
propre costume ». L'article susmentionné tel qu'écrit
« ... ne peut plus être... », permet de comprendre
aisément que la victime non constituée ou non encore
constituée est traitée comme un témoin d'où
l'appellation « Témoin-victime ». Et par voie de
conséquence, elle est soumise à la prestation de
serment94 avant déposition.
Aussi, toujours dans l'optique de protéger suffisamment
la victime, le législateur lui offre à nouveau la
possibilité de se constituer partie civile devant les juridictions de
jugement déjà saisies.
Paragraphe 2 : La déclaration de partie
civile
Le législateur dans un souci de recherche de la
protection de la victime, va permettre à celle-ci, si elle n'a pas pu se
constituer partie civile par voie d'action ou par voie d'intervention devant le
juge d'instruction, de s'intégrer, après l'ouverture d'un
jugement, dans la procédure devant les juridictions de jugement. Cette
modalité d'intégration ou de constitution de partie civile se
fait par la déclaration de partie civile soit à l'audience du
jugement de l'action publique (B) soit avant (A).
A - La déclaration avant l'audience de jugement de
l'action publique
Aux termes de l'art. 429 du CPP, la partie civile peut exercer
son action civile avant l'audience du jugement de l'action publique. En effet,
cette déclaration est consignée et reçue par le greffe de
la juridiction qui va statuer. Elle peut également se faire par un
dépôt de conclusions. L'art. 430 ajoute que « lorsqu'elle
est faite avant l'audience, la déclaration de partie civile doit
préciser l'affaire concernée, l'infraction poursuivie et contenir
élection de domicile dans le ressort du tribunal saisi, à moins
que la partie n'y soit domiciliée. Elle est immédiatement
transmise par le greffier au ministère public qui cite la partie civile
pour l'audience ». L'exigence de l'élection du domicile
contenue dans ce texte permet de faciliter la
25
94 Article 319 du CPP
26
notification des actes de procédure à la victime
en cas de recevabilité de sa déclaration.
Par ailleurs, le tribunal saisi apprécie la
recevabilité de la constitution de partie civile. Il peut donc la
déclarer irrecevable s'il estime qu'elle est irrégulière.
En outre, l'irrecevabilité peut être réclamée par le
parquet, le prévenu, le civilement responsable ou une autre partie
civile95. La victime constituée partie civile qui ne veut pas
comparaitre à l'audience du jugement peut se faire représenter
par un avocat. Mais dans cette hypothèse, le jugement est contradictoire
à son égard 96. Mais, dans l'hypothèse
où la partie civile et son conseil représentant ne comparaissent
pas, la partie civile régulièrement citée est
considérée comme se désistant de sa constitution de partie
civile.
Cette procédure exposée est également
requise lorsque la déclaration est faite au cours du déroulement
de l'audience de jugement.
B - La déclaration à l'audience de
jugement
Aux termes de l'art. 428 du CPP, « toute personne
qui, conformément à l'article 7, prétend avoir
été lésée par un délit peut, si elle ne l'a
déjà fait, se constituer partie civile à l'audience
même ». La déclaration de constitution de partie civile
peut se faire par la déclaration consignée par le greffe par le
dépôt de conclusions.97A l'audience du jugement des
délits et des contraventions, la déclaration de partie civile est
possible jusqu'au prononcé du jugement sur le siège ou la mise en
délibéré. Ensuite, lorsque les parties sont,
conformément de l'art. 400 du CPP, présentes à l'audience,
le président doit, avant les débats sur le fond, les inviter
à déclarer si elles se constituent parties civiles et avant les
réquisitions du ministère public sur le fond. Le président
leur demande de préciser le montant des dommages-intérêts
qu'elles réclament.98 A l'audience du jugement des crimes, la
déclaration est possible jusqu'à la fin de l'instruction à
l'audience99.
95 Article 433 du CPP
96 Article 434 du CPP
97 Article 429 du CPP
98 Article 431 du CPP
99 Article 334 du CPP
27
Il suit de ce qui précède que la présence
de la victime est obligatoire pour la réception de sa déclaration
de partie civile devant les tribunaux criminels, correctionnels et
contraventionnels.
Contrairement au droit ivoirien, le droit comparé
notamment français permet à la victime de se constituer partie
civile sans être tenue de comparaitre. Cela se fait par l'envoi d'une
lettre recommandée avec avis de réception ou d'une
télécopie qui doit parvenir au tribunal vingt-quatre heures au
moins avant l'audience. Dans ce cas, la partie civile n'est pas obligée
de comparaitre ou de se faire représenter. Mais la décision
rendue sera considérée à son égard comme
contradictoire et elle lui sera signifiée.100
La victime qui a pu se constituer partie civile devant les
juridictions de jugement jouit d'un certain nombre de privilèges. Elle
participe aux débats et peut obtenir la réparation de son
préjudice. Elle peut poser des questions et exercer des voies de recours
contre les décisions des juridictions en cause.
Par ailleurs, il importe de souligner que les modalités
de constitution de partie civile à titre accessoire ne permettent
l'intervention de la victime devant les juridictions répressives qu'en
première instance. La partie civile ne serait pas admise à
intervenir pour la première fois en appel, les réquisitions sur
le fond étant déjà faites en première instance. Ce
serait d'ailleurs empêcher la personne poursuivie, condamnée
à une réparation civile, de pouvoir faire elle-même appel
de la décision qui l'a condamnée, et la priver ainsi de la
garantie du double degré de juridiction101 ,dans
l'hypothèse où une autre victime serait intervenue. Ainsi, la
victime qui n'a pas pu intervenir en première instance, pour
défendre ses intérêts civils, est appelée à
saisir les juridictions civiles.
De tout ce qui précède, nous pouvons retenir que
pour rechercher la protection de la victime, la loi met à sa disposition
plusieurs modalités qui lui permettent d'intégrer le
procès pénal. Cette intégration lui permet de jouir d'une
panoplie de droits pendant la procédure.
100 Article 420-1 du code de procédure pénale
(France), Paris, Dalloz, 61ème éd.,2020, p.822
101 SOYER (J-C), op.cit., p.279
28
CHAPITRE 2 : LA RECHERCHE PAR LA PLURALITE DES
DROITS RECONNUS A LA VICTIME PENDANT LA PROCEDURE PENALE
La victime qui intègre la procédure se voit
reconnaitre une pluralité de droits dont l'exercice permet de rechercher
sa protection. Il faut noter que ces droits sont accordés à la
victime en sa qualité de partie au procès. En d'autres termes,
ces facultés sont réservées à la victime qui s'est
constituée partie civile en ayant naturellement recouru à l'une
des modalités d'intégration précédemment
analysées. Par ailleurs, la victime qui ne s'est pas constituée
partie civile sera traitée comme un témoin.
En effet, les droits reconnus à la victime pendant la
procédure peuvent être regroupés en deux catégories.
La première catégorie est celle qui vise à faciliter la
procédure pénale à la victime afin de lui assurer une
participation effective (SECTION1). Quant à la seconde catégorie,
elle est constituée de droits qui permettent à la victime de
participer à la manifestation de la vérité (SECTION 2).
29
Section 1 : Les droits de facilitation de la
procédure à la victime
La procédure pénale revêt une certaine
complexité et une certaine technicité. Ce qui fait qu'elle n'est
pas à la portée de tous. En plus, elle se veut fortement
secrète. La victime, généralement un profane, devenue une
partie intégrante au procès aura du mal, sans savoir et
assistance, à participer efficacement à la manifestation de la
vérité et partant, à la recherche de sa protection devant
les juridictions pénales. Par conséquent, pour faciliter la
procédure à la victime et lui permettre d'être utile dans
la recherche de la manifestation de la vérité, le
législateur lui accorde le droit de savoir l'état et l'avancement
de la procédure pénale (Paragraphe 1) et le
droit à l'assistance pendant la procédure (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Le droit de savoir
Selon le dictionnaire Le Robert, savoir c'est «
être conscient de ; connaître la valeur, la portée de
». Ici, le droit de savoir, c'est le droit reconnu à la
victime de connaitre ses droits pendant la procédure et l'état
ainsi que l'avancement de la procédure. Il s'agit concrètement de
son droit à l'information (A) et son droit d'accès aux dossiers
de la procédure (B).
A- Le droit à l'information
« L'exercice effectif d'un droit n'est possible que
si la personne concernée en a connaissance ».102
Une personne victime d'une infraction bénéficie de plusieurs
droits devant les juridictions répressives. Mais comme l'a
souligné le conseiller référendaire Madame
Frédérique AGOSTINI, cette panoplie de droits ne sera
effectivement exercée que si leur titulaire connaît leur existence
ou si cela est porté à sa connaissance.
102 AGOSTINI (F.), « les droits de la partie civile dans
le procès pénal » [en ligne]
https://www.soulie-avocat.fr/categories/actualites-102/articles/les-droits-de-la-partie-civile-dans-le-proces-penal-8.htm,
consulté le 17 octobre 2023 à 23h23
30
En raison de l'importance du droit à l'information de
la victime, les juridictions répressives sont tenues d'informer la
victime de ses droits, de la durée et de l'avancement de la
procédure.
Mais ce droit de savoir, qui permet de faciliter la
procédure à la victime et d'y intervenir efficacement,
connaît une application lacunaire en droit ivoirien. En effet, le
législateur ivoirien n'exige pas aux juridictions répressives
d'informer la victime, dès l'entame de la procédure, des droits
dont elle est titulaire. Il s'agit entre autres du droit d'obtenir la
réparation du préjudice subi, le droit de se constituer partie
civile, le droit à l'assistance judiciaire ou d'un avocat, le droit
d'être informée en cas d'ouverture d'une information judiciaire et
le droit d'accès aux actes de procédure. Pour une meilleure
protection de la victime, il serait judicieux que les juridictions
répressives avisent les victimes de leurs droits dès leur
première comparution comme le fait le juge d'instruction lors de la
première comparution de la personne mise en cause. En effet, selon
l'art. 133 du CPP, lors de la première comparution du mis en cause, le
juge d'instruction l'informe de son droit à l'assistance d'un avocat,
à ne faire aucune déclaration. A notre sens, la personne qui a
subi un préjudice mérite également un traitement
similaire.
En revanche, force est de reconnaître que le
législateur ivoirien, à travers plusieurs dispositions, garantit
l'exercice du droit à l'information de la victime. En effet, la victime
constituée partie civile par le biais de son conseil a connaissance des
ordonnances de renvoi et toute ordonnance dont la partie civile peut interjeter
appel103. La victime est également avisée par le juge
d'instruction, pour faire des observations, en cas de demande de mise en
liberté du détenu104. La décision ordonnant
l'expertise est également notifiée à la partie
civile.105 Le juge d'instruction convoque la partie civile et lui
donne connaissance des conclusions de l'expert106. La
procédure est communiquée à la partie civile vingt-quatre
heures au plus tard avant l'audition de celle-ci107.
Pour garantir l'effectivité de ce droit qui est une
obligation à la charge de l'appareil judiciaire répressif, le
législateur ivoirien exige de la partie civile dont le conseil ne
réside pas au siège de l'instruction la communication au greffe
du
103 Article 217 du CPP
104 Article 172 alinéa 6 du CPP
105 Article 196 du CPP
106 Article 204 du CPP
107 Article 135 du CPP
31
juge d'instruction une adresse géographique,
téléphonique ou électronique pour recevoir les avis et
convocations.108 En réalité, cette exigence
d'élire domicile a pour but de simplifier la notification des actes et
de prévenir les contestations. Les droits sus mentionnés
permettent à la victime d'être informée plus ou moins de
l'avancement de la procédure. Toutefois, aucune obligation ne
pèse sur le juge d'instruction d'informer la victime de la durée
et de l'avancement de la procédure. Cela n'est donc pas assorti de
sanctions. En tout état de cause, l'on devrait permettre que toutes les
décisions importantes qui jalonnent la procédure soient
notifiées à la partie civile.
Par ailleurs, le droit à l'information est aussi permis
et renforcé par un autre droit. Il s'agit du droit de la victime
d'accéder aux dossiers de la procédure.
B - Le droit d'accès aux dossiers de la
procédure
L'accès aux dossiers de la procédure est un
droit important car il permet à la victime de préparer avec
minutie ses auditions et ce au même pied d'égalité avec la
personne poursuivie.
Par dossier, il faut entendre « la réunion de
documents, actes de procédure, jugements relatifs à un litige
dont est saisie une juridiction civile, commerciale, sociale, dans un dossier
sur lequel se trouvent mentionnés en outre les divers
événements de la procédure »109. La
victime a donc le droit d'accéder à cet ensemble de documents
relatif à la procédure la concernant et qui constitue le support
de l'action pénale. Le dossier contient les pièces et les actes
de procédure110 dont la victime a droit d'en avoir
connaissance111. Cet accès est possible pendant l'instruction
et devant le juge de jugement.
108 Articles 110 et 135 alinéas 5 et 6 du CPP
109 GUINCHARD (S.), DEBARD (T.), op.cit., p.398
110 Les procès-verbaux et les ordonnances du juge
d'instruction sont respectivement des pièces et actes de
procédure.
111 Ce droit n'était pas classiquement reconnu à
la victime. Il fallait attendre une jurisprudence française ( CA
Aix-en-Provence,23 mai1961, D. 1961, p.484) qui donne la faculté
à l'avocat d'obtenir une copie du dossier. C'est donc à travers
l'avocat que la victime partie civile avait accès au dossier de la
procédure. Mais ce droit a connu une progression en ce sens
qu'aujourd'hui il est possible pour la victime non assistée d'obtenir
des copies relativement à la procédure. Mais cette progression ne
connait pas une application effective dans la législation ivoirienne.
32
Pendant la phase d'instruction, la partie civile jouit du
droit de communication du dossier de la procédure. Ce droit est
prévu à l'art. 135 du CPP en ces termes : « elle [la
procédure] est également remise à la disposition du
conseil de la partie civile, vingt-quatre heures au plus tard avant les
auditions de cette dernière ». On peut également citer
l'art. 230 du même code. Selon cette disposition, pendant un délai
de quarante-huit heures en matière de détention préventive
ou de cinq jours en toute autre matière, le dossier, comprenant les
réquisitions du procureur général, est
déposé au greffe de la chambre d'instruction et est tenu à
la disposition des conseils, des inculpés et des parties civiles
reçues au procès.
De la lecture de ces deux articles, deux constats se
dégagent.
D'une part, la partie civile non assistée ne peut avoir
accès au dossier de la procédure puisque les notifications sont
faites aux conseils. De ce fait, la partie civile non assistée, se voit
opposer le secret de l'instruction malgré qu'elle soit une partie au
procès. Ce traitement nous parait inadéquat car il prive la
partie qui n'a pas pu payer les honoraires d'un avocat et n'a pas
bénéficié de l'assistance judiciaire de prendre
connaissance de la procédure la concernant. Le législateur doit
lui permettre d'accéder au dossier tout en lui exigeant le secret de
l'instruction.
D'autre part, le conseil de la victime a accès au
dossier dans un délai de vingt-quatre heures avant l'audition de son
client. En fait, le délai de vingt-quatre heures accordé au
conseil pour préparer la défense de son client nous parait
insuffisant surtout si le dossier présente une certaine
complexité. Il serait judicieux de revoir ce délai à la
hausse afin de donner un temps suffisant à l'avocat pour préparer
de façon efficace la défense des intérêts de la
victime112.
En outre, selon l'art. 217 du CPP, avis est donné
à la partie civile, par l'intermédiaire de son conseil, dans un
délai de vingt-quatre heures de toutes les ordonnances
juridictionnelles113. Les ordonnances dont la partie civile peut
interjeter appel lui sont signifiées à la requête du
procureur dans un délai de vingt-quatre heures. Toutefois, il serait
judicieux de signifier à la partie civile certaines ordonnances dont
elle ne peut interjeter appel. Par exemple l'ordonnance de mise en
liberté. Cela permettra à la victime de prendre des mesures de
sécurité.
112 Le législateur peut lui accorder
un délai de cinq jours comme il a fait pour les réquisitions du
procureur général à l'article 230 du CPP.
113 Le juge d'instruction prend deux types
d'ordonnances, les ordonnances administratives et les ordonnances
juridictionnelles.
Par ailleurs, l'accès au dossier de la procédure
est aussi prévu pendant la phase de jugement. La partie civile peut se
faire délivrer une copie des procès-verbaux constatant
l'infraction, les déclarations écrites des témoins et les
rapports d'expertise. Elle peut prendre ou faire prendre copie de toute autre
pièce de la procédure.
Cette panoplie de facultés tire sa fortune de l'art.
287 du CPP. Ce texte dispose en substance que : « la partie civile, ou
son conseil, peuvent se faire livrer, à leurs frais, copie de toutes
pièces de la procédure ». Mais, contrairement aux
accusés à qui ces pièces sont délivrées
gratuitement, la partie civile doit assurer les frais de délivrance des
pièces demandées. Nous proposons que le législateur
prévoie la délivrance gratuite des pièces à la
partie civile afin qu'elle ait un accès effectif et une bonne maitrise
de la procédure.
A titre indicatif, la partie civile, à l'instar des
autres parties à l'instruction, est tenue du secret
professionnel114 qui tend à la protection des
intérêts privés et participe à la manifestation de
la vérité.
De ce qui précède, l'analyse du droit de savoir
de la victime a permis de voir son importance mais aussi de comprendre
l'importance pour la partie civile d'être assistée pendant la
procédure.
Paragraphe 2 : Le droit à l'assistance
Dans l'optique de toujours faciliter le procès
pénal à la victime, le législateur ivoirien lui permet en
cas d'insuffisance de ressources financières de bénéficier
de l'assistance judiciaire (B). Cela permet de garantir le principe
d'accès de tous à la justice. Que la victime ait les moyens ou
pas elle peut saisir la juridiction répressive. De même, elle peut
si elle le désire se faire assister d'un Avocat (A) pour la
défense de ses droits et intérêts.
A - L'assistance d'un avocat
33
114 Article 22 du CPP
34
L'avocat est bien plus qu'un conseiller. Il est un soutien
psychologique. La victime bénéficie de l'assistance d'un conseil
à toutes les étapes de la procédure répressive.
Au stade de l'enquête préliminaire, la victime
selon les dispositions de l'art. 97 du CPP peut se faire assister d'un conseil.
En effet, tout comme l'auteur et les complices de l'infraction, la victime a la
possibilité de solliciter le concours d'un conseil. Elle opte pour cette
assistance si elle en a les moyens et si elle estime que l'intervention d'un
conseil est nécessaire en fonction de la nature de l'infraction ou des
intérêts qui s'y attachent. Mieux, au regard de l'al. 2 de l'art.
ci-dessus, dans les localités où il n'y a pas d'avocat, elle peut
exceptionnellement se faire assister d'un parent ou un ami. En
réalité, tout ceci permet d'encourager la victime à porter
à la connaissance des officiers de police judiciaire l'infraction. Par
conséquent, de telles garanties d'assistance lui permettent de
participer à la manifestation de la vérité et lui facilite
la procédure pénale.
Au cours de l'instruction, la partie civile peut se faire
assister d'un conseil et elle ne peut être entendue qu'en sa
présence. Le dossier de la procédure est mis à la
disposition de son conseil. Cette mise à disposition facilite le
déroulement de l'instruction au profit de la partie civile qui peut, par
le biais de son conseil, connaître le contenu des déclarations des
inculpés ainsi que des témoins et des civilement responsables.
Au cas où, la victime ne s'est pas faite assister d'un
conseil lors de l'enquête préliminaire et au cours de
l'instruction, le législateur lui offre encore la possibilité de
le faire en phase de jugement. Il est donc clair qu'au niveau de l'assistance
d'un avocat, plusieurs possibilités s'offrent à la victime de la
procédure jusqu'avant le prononcé de la décision.
En substance, le droit à l'assistance d'un conseil
à toute étape de la procédure pénale ou d'un parent
ou ami à titre exceptionnel au niveau de l'enquête
préliminaire concourt à la facilitation de ladite
procédure au profit de la victime. La victime qui s'est
constituée partie civile sans s'adjoindre les services d'un avocat est
donc particulièrement démunie face à la machine
judiciaire115.
115 PIGNOUX (N.), « la
réparation des victimes d'infractions pénales
», Thèse, Pau des Pays de l'Adour, 2007, p.450 in
NIAMBE (K. R.), op.cit. p.89
35
Cependant, il s'agit d'une victime qui a les ressources
suffisantes pour louer les services d'un avocat. Car sans avocat, les
intéressés ne peuvent jouir que de manière imparfaite et
incomplète des droits qui leur sont accordés par la
loi116. Toutefois, une victime n'ayant pas le montant exigé
pour sa défense devrait, si elle y aspire forcément, faire usage
du mécanisme de l'assistance judicaire.
B - L'assistance judiciaire
Ce type d'assistance est régi par la loi n°72-833
du 21 décembre 1972 portant code de procédure civile, commerciale
et administrative et le Décret n°2016-781 du 12 octobre 2016 fixant
les modalités d'application de la loi de 72 relativement à
l'assistance judiciaire abrogeant le décret n°75-139 du 9 mai 1975
fixant les modalités d'application des art. 27 à 31du code de
procédure civile.
L'assistance judiciaire, hors le cas où elle est de
droit, a pour but de permettre à ceux qui n'ont pas de ressources
suffisantes, d'exercer leurs droits en justice, en qualité de demandeur
ou de défendeur sans aucun frais. L'assistance judiciaire peut
être accordée en tout état de cause à toute personne
physique ainsi qu'aux associations privées ayant pour objet une oeuvre
d'assistance et jouissant de la personnalité civile.117
L'assistance judiciaire est applicable à tous litiges, aux actes de
juridictions gracieuses ou aux actes conservatoires. Cette assistance est une
procédure par laquelle l'Etat veut garantir l'accès à la
justice aux victimes. A travers cette assistance, la victime qui ne
possède pas de ressources suffisantes peut déclencher l'action
publique, peut bénéficier des services d'un avocat commis
d'office tout au long du procès.
Par ailleurs, le recours à cette possibilité a
connu ou connait quelques difficultés. En effet, sous l'empire du
décret de 75, chaque demande d'assistance devait se faire au niveau du
bureau central qui était à Abidjan. La distance
éloignée de ce bureau était un véritable obstacle
à sa mise en oeuvre. Mais avec le décret de 2016118 ,
il a été envisagé d'implanter un bureau local
auprès de chaque tribunal. Mais l'on se demande si chaque tribunal en
Côte d'Ivoire est assorti d'un bureau local d'assistance. En tout
état de cause, au niveau national existe le bureau
116 DESPORTES (F.), LAZERGES-COUSQUER (L.),
Traité de procédure pénale, ECONOMICA, 4ème
éd., 2015, p.1153
117 Article 27 du code de procédure
civile
118 Décret n°2016-781 du 12
octobre 2016 fixant les modalités d'application de la loi de 72
relativement à l'assistance judiciaire, J.O.R.C.I., n°2 du 02
janvier 2017.
36
national au sein de la Chancellerie qui connait en dernier
recours des contestations relatives aux décisions des bureaux
locaux.119
L'existence d'un seul bureau national dans la ville d'Abidjan
nous parait un obstacle à l'exercice du droit à l'assistance
judiciaire. En effet, la victime démunie qui n'a pas obtenu satisfaction
devant le bureau local sera amenée à abandonner son droit
à l'assistance judiciaire si elle doit se rendre à Abidjan pour
contester cette décision. De ce fait, on assiste à la limitation
de sa protection.
Cependant, la procédure d'admission à
l'assistance est régie par le chapitre 4 du décret de 2016.
Effet, le requérant doit faire la demande par écrit devant le
secrétariat du bureau local120. Cet écrit doit
contenir ses coordonnées, l'exposé des faits et motifs
invoqués, la juridiction saisie, la nature de l'acte.121 Il
doit également contenir le certificat d'imposition ou de non-imposition
délivré par les services des impôts du
requérant122. Après l'enregistrement de la demande, un
récépissé est donné au requérant. Toutefois
notons qu'avis peut être donnée à la partie adverse de
contester cette demande.123 Mais, malgré l'importance de ce
mécanisme, il reste méconnu des populations notamment de
victimes. C'est à ce juste titre que Namizata Sangaré,
présidente du Conseil National des Droits de l'Homme indiquait que
« l'accès à la justice est important dans
l'élaboration d'un Etat de droit. Toute personne, quelle que soit sa
situation, a droit à une assistance judiciaire. Mais malheureusement
très peu de gens sont informés ou en font la demande. Cette
journée vise à inciter les personnes qui n'ont pas les moyens
à faire la demande et à se faire assister, mais aussi les inviter
à connaître les mécanismes »124.
En un mot, les droits de facilitation de la procédure
à la victime lui permettent d'utiliser efficacement ses droits de
participation à la manifestation de la vérité.
119 Article 02 du décret de 2016 op.cit.
120 Article 12 du décret de 2016 op.cit.
121 Article 13 du décret de 2016 op.cit
122 Article 14 du décret de 2016 op.cit
123 Article 18 du décret de 2016 op.cit
124 « Assistance judiciaire en Côte d'Ivoire : Des
praticiens et acteurs de la société civile
réfléchissent », [En ligne]
https://www.fratmat.info/article/223409/societe/justice/assistance-judiciaire-en-cote-divoire-des-praticiens-et-acteurs-de-la-societe-civile-reflechissent
37
Section 2 : Les droits de participation à la
manifestation de la vérité
La manifestation de la vérité n'est pas à
confondre avec la recherche de la vérité. En effet, pendant
l'instruction l'occasion est donnée à chaque partie de participer
à la manifestation de la vérité. Mais en vrai, chaque
partie ne recherche que sa vérité. Le procureur cherchera les
faits qui montrent la culpabilité de la personne poursuivie et la
personne mise en cause cherchera à avancer des éléments de
preuve qui attestent son innocence. Quant à la victime constituée
partie civile, celle-ci, après avoir démontré qu'elle a
effectivement subi du préjudice du fait de la personne poursuivie,
cherchera des preuves pour que la culpabilité de celui-ci soit
reconnue.
Cependant, pour participer à la manifestation de la
vérité, la victime dispose de véritables droits
d'intervention participant à la recherche de la vérité
(Paragraphe1) et du droit de discussion de la procédure
(Paragraphe2).
Paragraphe 1 : Les véritables droits
d'intervention participant à la recherche de la
vérité
Ici, en réalité, la victime recherche sa
vérité, la vérité qui lui permettra d'avoir gain de
cause devant les juridictions répressives. Toutefois, cela peut
favoriser la manifestation de la vérité. Pour ce faire, le
législateur lui permet, une fois constituée partie civile, de
concourir à l'instruction (A) et de produire des preuves en justice
(B).
A- Le droit de concourir à l'instruction
A l'instar des autres parties au procès, la partie
civile s'est vu accorder un droit qui relève de la compétence du
juge d'instruction, celui d'accomplir ou de faire accomplir des actes
d'investigations. En effet, pendant l'instruction, la partie civile a le droit
de proposer une orientation de la procédure lui paraissant utile
à la manifestation de la vérité. En fait, elle peut
demander au juge chargé de l'instruction d'accomplir certains actes
d'instruction.
38
Cette faculté offerte à la partie civile a pour
fondement de l'art. 101 du CPP qui dispose en ces termes : «
l'inculpé et la partie civile peuvent également solliciter du
juge d'instruction, l'accomplissement des actes leur paraissant utiles à
la manifestation de la vérité ». De là, provient
le droit pour la victime d'orienter les investigations. En cas de
sollicitation, si le juge d'instruction ne compte pas donner une suite
favorable à la demande des parties, il est tenu, dans les cinq jours de
la demande, de rendre une ordonnance motivée. Passé ce
délai, le juge d'instruction est tenu d'accomplir les actes
requis.125
Mais quels sont les actes pour lesquels la partie civile peut
solliciter le juge d'instruction ? Le législateur ivoirien ne
précise pas les actes pour lesquels la partie civile peut solliciter le
juge d'instruction. Mais l'analyse du CPP permet de noter quelques actes.
En effet, selon l'art. 193 du CPP, la partie civile peut
solliciter le juge d'instruction pour ordonner une expertise126
lorsqu'une question d'ordre technique se pose127. Si le juge
accepte, la mission de l'expert qui est l'examen de questions d'ordre
économique est précisée dans la décision qui
ordonne l'expertise128. L'expert va donc collaborer à la
découverte de la vérité. Dans le même ordre
d'idée, la partie civile peut lui demander une
contre-expertise129 ou un complément d'expertise. La partie
peut préciser les questions qu'elle souhaite poser dans sa demande.
En raison de l'imprécision de ces actes, l'on
s'interroge si la partie civile peut demander au juge d'instruction de
procéder à son audition ou son interrogatoire, à
l'audition d'un témoin, à une confrontation ou un transport sur
les lieux. Le législateur ivoirien doit apporter de la précision
quant à la nature de ces actes. Toutefois, en l'état actuel des
choses, l'on peut dire que le juge d'instruction a un pouvoir
d'appréciation en la matière.
Par ailleurs, le fait de concourir à l'instruction
donne à la victime un droit de regard sur la procédure. A cet
effet, selon l'art. l'art.103 du CPP, la partie civile
125 Article 100 alinéa 3 du CPP
126 Selon le Lexique des termes juridiques, l'expertise est la
procédure de recours à un technicien consistant à demander
à un spécialiste dans les cas où le recours à des
contestations ou à une consultation ne permettrait pas d'obtenu les
renseignements nécessaires, d'éclairer le tribunal sur certains
aspects du procès nécessitant l'avis d'un homme de l'art.
127 Article 193 du CPP
128 Article 195 du CPP
129 Mesure d'instruction destinée à faire
vérifier par d'autres hommes de l'art les résultats d'une
précédente expertise.
39
peut, dans l'intérêt d'une bonne administration
de la justice, demander au président du tribunal le dessaisissement du
juge d'instruction.
L'analyse que voici permet de noter que dans la recherche de
la vérité, pendant l'instruction, la partie civile a un
véritable droit d'intervention, celui de concourir à
l'instruction. En plus de ce droit, la partie civile a le droit de produire des
preuves en justice.
B- Le droit de produire des preuves en justice
Ce droit est reconnu à la victime constituée
partie civile pour lui permettre de participer à la recherche de la
vérité. La manifestation de la vérité permet la
protection de la partie civile que le législateur recherche en lui
accordant le droit de produire des preuves en justice.
Le droit de produire des preuves ou techniquement le droit
à la preuve est « le droit pour une partie de tenter de
convaincre le juge de la réalité des faits qu'elle invoque
à l'appui de sa prétention ».130 Il
découle du principe général du « droit d'être
entendu ».
Par la preuve, il faut entendre « la
démonstration d'un droit ou d'un fait par le moyen d'arguments admis par
le droit ».131 La preuve comprend le moyen utilisé
pour faire la démonstration et le résultat obtenu de cette
démonstration.
La question de la preuve est d'une importance pratique
énorme car un adage latin rappelle que « Parum est non esse et
non probati », « en droit, ne pas exister ou ne pas pouvoir
être prouvé est la même chose ». En d'autres
termes, en droit, un fait non prouvé n'existe pas. C'est donc tout
à fait logique qu'on permette à la victime, qui souffre
personnellement de la commission de l'infraction, de produire des preuves pour
soutenir ses prétentions. En droit ivoirien, la commission de cette
infraction peut être établie par tout mode de preuve132
: c'est le principe de la liberté des preuves133.
Mais de toute évidence, en vertu du principe de
l'intime conviction du juge, celui-ci apprécie souverainement la
portée des preuves débattues ; la valeur des preuves est
appréciée par le juge et non pas déterminée par la
loi134. La victime
130NTAMBWE (C. Y. N.), Initiation
à la science et à la théorie du droit, Côte
d'Ivoire, UCAO, 2021, p.184
131 NTAMBWE (C. Y. N.), op.cit., p.177
132 Article 437 du CPP
133 Il signifie que tous les moyens sont
possibles pour prouver un fait et la loi n'établit pas une certaine
hiérarchie entre les preuves.
134 DESPORTES (F.), LAZERGES-COUSQUER (L.),
op.cit., p.468
40
est donc libre d'envoyer le mode de preuve qu'elle peut dans
la limite du possible pourvu qu'il soit admis en droit. Car les preuves
obtenues illégalement ne sont pas admises.
En clair, ce principe a une double dimension qui s'exprime
dans la liberté de celui qui fournit la preuve ; c'est la liberté
dans l'admissibilité de la preuve et dans la liberté
d'appréciation de celui qui reçoit la preuve. C'est autrement
exprimé le principe de l'intime conviction.135
Par ailleurs, la charge de la preuve incombe au
ministère public en sa qualité de partie poursuivante dans le
procès pénal. Mais, la victime, pour soutenir sa
prétention et maximiser ses chances et de voir réparer son
préjudice, peut produire des preuves.
En outre, la victime peut discuter des preuves. En effet, elle
peut s'opposer à l'audition d'un témoin dont le nom ne lui aurait
pas été signifié ou notifié136 ou
demander le retrait momentané d'un témoin après sa
déposition137 ou encore demander la présence
jusqu'à la clôture d'un témoin dont la déposition
parait fausse138.
Succinctement, la partie civile par son droit de concourir
à l'instruction et de produire des preuves participe
véritablement à la manifestation de la vérité. En
outre, son droit de discussion de la procédure lui permet
également de participer à la manifestation de la
vérité.
Paragraphe 2 : Le droit de discussion de la
procédure
La victime parce qu'elle s'est constituée partie civile
a le droit de discuter la procédure. C'est le pouvoir de contester les
prétentions des autres parties et les décisions du juge. Pour se
faire, la loi lui permet de participer aux débats contradictoires (A) et
de contester les décisions des juridictions pénales si elle n'est
pas satisfaite (B).
135 AYIE (A. A.), Précis de procédure
pénale, ABC, éd. 2021, p.55
136 Article 318 du CPP
137 Article 326 du CPP
138 Article 230 du CPP
41
A- Le droit de participation aux débats
contradictoires
La phase des débats est la phase la plus importante de
la procédure pénale. En effet, c'est à cette occasion que
les parties au procès s'expriment, expriment mieux leurs
différents moyens de preuve. C'est aussi le moment pour la victime
d'exprimer ses angoisses, sa souffrance afin de soutenir la condamnation de la
personne poursuivie. Cette possibilité présente donc une
importance toute particulière pour la victime139. Ce sont
donc les débats qui permettent de parvenir à la manifestation de
la vérité et à situer les responsabilités.
En clair, c'est au cours des débats contradictoires que
la partie civile peut demander et obtenir des dommages-intérêts.
C'est même là le but habituel de sa constitution. En fait, la
partie civile, en vertu du prince de l'oralité140 et à
l'instar des autres parties au procès intervient oralement pour
administrer ses preuves.
Par ailleurs, la partie civile peut intervenir lors des
débats en déposant des conclusions qui contiennent ses
prétentions et leurs fondements. A cet effet, elle peut produire toutes
pièces et documents pouvant étayer ou soutenir son argumentation.
C'est ce qui ressort de l'art. 303 du CPP qui prescrit que : «
l'accusé, la partie civile et leurs conseils peuvent déposer
des conclusions sur lesquelles le tribunal est tenu de statuer ». Le
dépôt des conclusions peut donc se faire devant le tribunal
contraventionnel, le tribunal de simple police et le tribunal criminel pour ne
citer que ces juridictions de premier degré. Aussi, la partie civile
peut intervenir de façon orale : c'est le principe de l'oralité
des débats qui fait du procès pénal un procès
vivant.
L'un des avantages de participer aux débats pour la
partie civile est la possibilité qui lui est donnée de discuter
les preuves des autres personnes après la phase de l'instruction
définitive. Ainsi, au cours des débats, son conseil va s'atteler
à développer dans son exposé la nature du préjudice
subi et le montant de la réparation réclamée. L'art. 482
du CPP indique l'ordre d'interventions orales des parties notamment de la
partie civile. Selon ce texte, « l'instruction terminée, la
partie civile est entendue en sa demande, le ministère public prend
ses
139 Les pénalistes en herbe, « La
victime, grande oubliée du procès pénal ? » [En
ligne]
https://www.lespenalistesenherbe.com/post/la-victime-grande-oubli%C3%A9e-du-proc%C3%A8s-p%C3%A9nal,
consulté le 05 octobre 2023 à 09h39
140 « Ce principe signifie qu'au
jugement les preuves doivent être administrées oralement. A ce
titre, il concerne tous ceux qui participent aux débats » in
CONTE (P.) et MAISTRE DU CHAMBON (P.), Procédure pénale,
ARMAND COLIN, 3ème éd., 2001, p.330
42
réquisitions, la personne civilement responsable
s'il y a lieu et le prévenu présentent leur défense. La
partie civile et le procureur peuvent répliquer. Le prévenu ou
son conseil ont la parole les derniers ».
En sus, pendant les débats, la partie civile est
autorisée à poser des questions aux autres parties au
procès, par l'intermédiaire du président141. Au
cours des débats, la partie civile discute donc les preuves. Elle peut
par exemple selon l'art. 332 du CPP récuser un interprète en
motivant sa récusation.142
Par ailleurs, l'on peut constater certaines
défaillances lors de l'audience des débats. Elles se situent au
niveau des audiences à huis clos. Le huis clos est une exception au
principe de la publicité des débats. L'on a recours à
cette exception lorsque la publicité est dangereuse pour l'ordre public
et les moeurs143. L'imprécision du contenu de l'ordre public
et des moeurs nous amène à savoir si le huis clos peut être
déclaré en faveur de la victime qui peut, à notre sens, en
bénéficier, car dans certaines affaires, celle-ci a une certaine
intimité à préserver. Il est aussi regrettable de noter
que c'est le tribunal qui, à l'exclusion de tout autre, déclare
le huis clos.
En outre, dans les procédures alternatives aux
poursuites, la victime peut aussi participer oralement au débat mais
dans un moindre degré que pour les procédures dites classiques.
En cas de composition pénale, la victime peut être
auditionnée par le président du tribunal pendant l'audience de
validation de cette mesure. De même, en cas de procédure de
comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, la
partie civile est invitée à comparaitre, assistée par un
avocat si elle le souhaite, afin de se constituer partie civile et demander une
indemnisation.
Par ailleurs, le juge, après avoir écouté
les différentes parties lors des débats contradictoires, statue
sur les différents intérêts en conflit et situe les
responsabilités.
A l'instar des autres parties, si la victime n'est pas
satisfaite de la décision, la possibilité lui est offerte de
contester.
B- Le droit de contestation
141 Article 300 du CPP
142 V. Supra p.37
143 Article 294 du CPP
43
Par droit de contestation, il faut entendre le droit de
critique ouverte contre les décisions des juridictions jugées
insatisfaisantes. Dit autrement, il s'agit des voies de recours offertes
à un plaideur. Ce sont des voies de droit qui ont pour objet propre de
remettre en cause une décision de justice. Elles permettent aux
plaideurs d'obtenir un nouvel examen du procès, ou d'une partie de
celui-ci, ou de faire valoir les irrégularités observées
dans le déroulement de la procédure.144 Cette
possibilité de faire réexaminer une affaire par une juridiction
supérieure est une garantie essentielle de bonne justice145.
C'est la manifestation du principe du double degré de juridiction.
Ainsi, la victime non satisfaite, à la lumière
de la loi, peut exercer des recours aussi bien contre les décisions des
juridictions d'instruction que contre celles des juridictions de jugement mais
seulement sur les intérêts civils.
Relativement à la contestation des décisions des
juridictions d'instruction, la partie civile est autorisée à
emprunter deux voies, une voie ordinaire, l'appel, contre les ordonnances du
juge d'instruction146 et une voie extraordinaire, le pourvoi en
cassation contre les arrêts de la chambre d'instruction147.
Devant le juge d'instruction, l'appel de la partie civile est seulement
possible lorsqu'il s'agit des ordonnances de non informer ou de non-lieu,
faisant grief à ses intérêts civils, par laquelle le juge
d'instruction statue sur sa compétence et de rejet de sa demande
d'expertise ou de la contre-expertise. Elle ne peut donc interjeter appel
contre une ordonnance relative à la détention préventive.
La partie civile bénéficie d'un délai de 72 heures pour
interjeter appel. Comme effet, le dossier d'instruction est
immédiatement transmis au procureur général,
accompagné du rapport d'appel du procureur de la République. Le
procureur général saisit la chambre d'instruction. S'il ne s'agit
pas d'une ordonnance de clôture, le juge d'instruction poursuit son
instruction sauf décision contraire de la chambre
d'instruction148.
Par ailleurs, devant la chambre d'instruction, la partie civile
forme, dans un délai de 15 jours, pourvoi en cassation contre ses
arrêts en cas de violation de la loi. En effet, selon l'art. 612, la
partie civile ne peut se pourvoir en cassation contre les arrêts de la
chambre d'instruction que s'il y a pourvoi du ministère
144 GUINCHARD (S.), DEBARD (T.),
op.cit., 2019, p. 1115
145 NIAMBE (K. R.), op.cit., p.309
146 Article 221 nouveau de CPP
147 Article 603 du CPP
148 Article 222 du CPP
44
public, sauf dans les cas suivants :
1° lorsque l'arrêt de la chambre a dit n'y avoir lieu
à informer ;
2° lorsque l'arrêt a déclaré
l'irrecevabilité de l'action civile ;
3° lorsque l'arrêt a déclaré l'action
publique prescrite ;
4 ° lorsque l'arrêt a d'office ou sur
déclinatoire des parties prononcé l'incompétence de la
juridiction saisie ;
5° lorsque l'arrêt a omis de statuer sur un chef
d'inculpation ;
6° lorsque l'arrêt ne satisfait pas en la forme,
aux conditions essentielles de son existence légale.
Ce pourvoi suspend l'exécution de l'arrêt en
cause sauf en ce qui concerne les condamnations civiles.149
Concernant le recours contre les décisions des
juridictions de jugement, la partie civile bénéficie de voies de
recours ordinaire et de voies de recours extraordinaire.
Les voies de recours ordinaire sont l'opposition et
l'appel150. En effet, la partie civile recourt à
l'opposition, dans un délai de 10 jours, lorsqu'elle est en Côte
d'Ivoire ou d'un mois lorsqu'elle est hors de la Côte
d'Ivoire151, lorsqu'il y a eu un jugement par défaut à
son encontre152. Selon l'art. 514 du CPP, l'opposition rend le
jugement par défaut non avenu dans toutes ses dispositions faisant
l'objet de recours. En outre, la partie civile a recours également
contre les décisions des juridictions de jugement sur les
intérêts civils seulement.153 Mais en cause d'appel, la
partie civile ne peut former aucune nouvelle demande, par contre, elle peut
demander l'augmentation des dommages-intérêts154.
L'appel a alors un effet suspensif.
Concernant les voies de recours extraordinaire, c'est
seulement le pourvoi en cassation qui est ouvert à la partie
civile155 relativement aux arrêts et jugements rendus en
dernier ressort en matière criminelle, correctionnelle et de simple
police. Ce pourvoi de la partie civile qui doit se faire dans un délai
de 15 jours
149 Article 605 du CPP
150 Arrêt n° 262/98 du 04 mai 1998 de la cour
d'appel de Bouake In KOUADJANE (A. N.), Jurisprudence en matière
pénale, Éd. LOIDICI, p.100
151 Article 516 et 517 du CPP
152 Article 514 du CPP
153 Article 558-3° du CPP
154 Article 575 du CPP
155 Article 603 et 604 du CPP
45
n'est possible que sur les intérêts civils
seulement. A l'instar des autres voies de recours, le pourvoi en cassation a un
effet suspensif.
De tout ce qui précède, retenons de l'analyse
faite au niveau de la première partie de ce mémoire que le
législateur ivoirien s'est préoccupé de la protection de
la victime devant les juridictions pénales dès l'entame de la
procédure jusqu'au prononcé de la décision. Mais l'analyse
de l'arsenal juridique répressif actuel donne de constater que cette
protection tant recherchée est limitée.
46
DEUXIEME PARTIE : UNE PROTECTION LIMITEE
La protection de la victime est à rechercher en
principe devant les juridictions civiles. Mais, même si la victime est
autorisée à exercer son action civile devant les juridictions
répressives, il n'en demeure pas moins vrai que la tâche n'est pas
aisée. C'est donc à titre accessoire qu'elle réclame la
réparation de son préjudice devant les juridictions
pénales. De ce fait, elle occupe une place secondaire dans le
procès pénal. En effet, le procès pénal oppose
classiquement le ministère public, la partie poursuivante et la personne
poursuivie, le présumé auteur de l'infraction en cause.
La place secondaire ou accessoire de la victime dans le
procès pénal semble avoir un impact sur sa protection. En ce sens
qu'elle est limitée à certains égards. Cette limitation se
conçoit au niveau de la participation de la victime à la
procédure pénale (CHAPITRE1), que la
participation soit à titre principal soit à titre accessoire. En
outre, la limitation de la protection de la victime se laisse constater dans
les procédures alternatives aux poursuites (CHAPITRE 2).
47
CHAPITRE 1 : LA LIMITATION DANS LA PARTICIPATION DE
LA VICTIME A LA PROCEDURE PENALE
La participation c'est l'action de participer. Selon le
dictionnaire Le Robert, « participer c'est prendre part à
». Il signifie également collaborer. Ici, appréhender
la limitation de la protection de la victime dans sa participation à la
procédure pénale revient analyser sa protection limitée
dans la part qu'elle prend dans la procédure pénale, sa
collaboration dans cette procédure qui vise la répression de
l'infraction dont elle a été victime.
Pour bien participer à la procédure, la victime
doit y être intégrée totalement. Mais si cette
intégration est partielle comme cela peut être constaté
(SECTION1), la protection de la victime se trouve limitée au niveau de
sa participation. En outre, pour participer ou collaborer efficacement, la
victime doit être en sécurité. Mais le système
sécuritaire de la victime tel que prévu par le législateur
ivoirien laisse voir qu'il y a une nécessité à le
renforcer (SECTION2).
48
Section 1 : L'intégration partielle de la
victime dans la procédure
Admettre l'intégration de la victime dans la
procédure pénale, c'est le fait de la faire rentrer dans cette
procédure comme partie intégrante. Cette intégration ne
sera effective ou totale que si elle a pleinement la capacité de mettre
en mouvement l'action publique lorsque celle-ci n'est pas déjà
mise en mouvement par le ministère public. Or, à ce niveau,
quelques difficultés s'imposent à la victime qui veut
déclencher les poursuites.
Aussi, cette intégration ne permettra pas la
participation efficace de la victime que si celle-ci, pendant la
procédure, a les mêmes armes que les autres parties au
procès. Malheureusement, cette égalité des armes est
ineffective. Il convient donc d'analyser les obstacles à la mise en
mouvement de l'action publique par la partie lésée (Paragraphe
1) et l'ineffectivité du principe de
l'égalité des armes (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Les obstacles à la mise en
mouvement de l'action publique
par la victime
La mise en oeuvre de l'action publique par la victime se
heurte à certaines difficultés. Certaines d'entre elles rendent
impossible l'exercice de ce droit par la victime, elles sont d'ordre
procédural, et d'autres dépendent de la situation
financière de la victime. Il convient donc d'analyser les obstacles
d'ordre procédural (A) et d'ordre économique (B) à la mise
en mouvement de l'action publique par la victime.
A- Les obstacles d'ordre procédural
L'action de la victime se trouve irrecevable en raison de la
procédure qui est à observer. La personnalité de l'auteur
en cause et un choix déjà fait par la victime constituent souvent
des obstacles à la mise en oeuvre de l'action, condition pour être
intégré dans la procédure pénale.
En effet, il s'agit de la règle « electa una
via non datur recursus ad alteram », des immunités et de
certains cas spécifiques.
49
Relativement à la règle « electa una
via non datur recursus ad alteram », consacrée par l'art. 10
du CPP, elle signifie que « une voie choisie, on ne peut revenir
à l'autre ». En effet, la victime après la commission
d'une infraction a le choix libre de la juridiction devant laquelle elle entend
mener son action en réparation156. De ce fait, elle peut
choisir soit la voie civile soit la voie pénale : c'est le droit
d'option dont bénéficie la victime.
Mais cette option n'est possible que si la voie pénale
est ouverte à l'action en même temps que la voie civile, le
dommage a pour fondement l'infraction et l'action publique est toujours en
vigueur au moment de l'exercice de l'action civile. Une fois la voie choisie,
ce choix devient irrévocable en vertu de l'art. 10 qui dispose que
« la partie civile qui a exercé son action devant la
juridiction civile compétente ne peut la porter devant la juridiction
répressive. Il n'en est autrement que si celle-ci a été
saisie par le ministère public avant qu'un jugement sur le fond ait
été rendu par la juridiction civile ». De ce fait, la
victime qui a engagé son action devant les juridictions civiles ne peut
plus revenir devant les juridictions pénales sauf si le ministère
public a déclenché les poursuites et que la juridiction civile
n'a pas encore rendu un jugement. Dans ce cas, la juridiction civile sursoit
à statuer.157
Toutefois, si la juridiction civile saisie est
incompétente, la victime doit pouvoir porter son action devant le
tribunal répressif si elle le désire.
Cette règle semble protéger le prévenu.
Elle évite qu'il soit trainé d'une juridiction à une
autre. Elle évite également la perte des preuves et du fait
générateur. En outre, la règle « electa una
via... » n'étant pas d'ordre public car établie dans
l'intérêt de la personne poursuivie, seule cette personne peut se
prévaloir de la violation de cette règle et en plus doit la
soulever au seuil du procès, le tribunal ne pourrait soulever d'office
la violation de cette règle.158
Cette règle, sans doute, constitue un obstacle pour la
victime. La victime peut ignorer ou se tromper du caractère
infractionnel du fait, il faut lui permettre de saisir les juridictions
pénales pour bénéficier des avantages procéduraux.
Aussi, si elle change d'avis cela permet de saisir les juridictions
pénales de l'infraction, ainsi, la société est
informée du fait qui a troublé l'ordre public. Cela permet
d'éviter l'impunité.
156 Articles 8 et 9 du CPP
157 C'est la consécration du principe « le
pénal tient le civil en l'état ».
158 ALLA (E.), procédure pénale, ABC,
éd., 2017, p.189
50
A titre indicatif, l'option en faveur de la voie
répressive offre de multiples avantages. Elle permet d'obtenir justice
avec une plus grande rapidité que devant le juge civil. Elle offre
également l'avantage de l'économie. Le choix de la voix
répressive procure d'autre part une facilité de preuve
incontestable. Il y'a également un avantage d'efficacité. Il faut
ajouter enfin que l'option en faveur de la voie répressive permet
d'éviter que l'action civile ne se heurte à l'autorité de
la chose jugée attachée à une décision
pénale sans que la victime ait pu défendre ses
intérêts159. Cependant, cette option n'est pas sans
conséquence. En effet, la partie civile, étant partie à
l'instance, ne peut être entendue comme témoin à
l'instruction ni aux débats160. Elle encourt également
des sanctions pécuniaires en cas de constitutions abusives de partie
civile161. Or, elle sera bien souvent le principal témoin
à charge ; son absence risque alors d'affaiblir l'accusation et de
conduire à un acquittement qui aurait peut-être été
évité, si elle avait été entendue.
A côté de cette règle obstacle, il y a les
immunités qui constituent également un obstacle au
déclenchement de l'action publique.
Les immunités sont définies comme « la
cause d'impunité, qui tend à la situation particulière de
l'auteur d'une infraction au moment où il commet celle-ci, s'oppose
définitivement à toute poursuite, alors que la situation
créant ce privilège a pris fin »162. Ces
immunités sont au nombre de trois : les immunités familiales, les
immunités politiques et les immunités diplomatiques.
En effet, les immunités politiques concernent le
Président de la République163, le médiateur de
la République, et les membres de l'Assemblée
Nationale164 pour les opinions émises pendant l'exercice de
leur fonction.
Les immunités diplomatiques constituent la garantie de
l'exercice de la fonction du diplomate165. Quant aux
immunités familiales166, celles-ci protègent les liens
de famille et interdisent la poursuite d'un membre pour un bien.
Reconnaitre des immunités c'est admettre des causes de
limitation à l'exercice de l'action publique empêchant à la
victime de la déclencher.
159 STEFANI (G.), LAVASSEUR (G.), BOULOC (B.),
Procédure pénale, Dalloz, 18ème
éd., 2001, p.266
160 Idem
161 V. infra P.51
162 YAO (E. Y.), l'arrêt de la cour suprême de
côte d'ivoire du 10 janvier 2002 et l'exercice de l'action civile
à l'occasion d'une infraction pénale : relecture de l'article 4
du CPP, op.cit./ p.213 in NIAMBE (K. R.), op.cit., p.163
163 Article 157 de la constitution du 08 novembre 2016
164 Article 91 de la constitution du 08 novembre 2016
165 Article 104 du CP
166 Article 103 du CP
51
Par ailleurs, à titre indicatif, il est interdit
à la victime de se constituer partie civile devant la Haute cour de
justice167 et devant les juridictions militaires (le droit de mettre
en mouvement l'action publique n'est reconnu à la victime par aucune
disposition du code de procédure militaire, elle peut simplement
déposer une plainte ou faire une dénonciation). De plus, en
matière de délit de presse seul le procureur est habilité
à déclencher les poursuites.
Dans ces hypothèses le procureur de la
République retrouve pleinement et exclusivement son pouvoir
d'appréciation des suites à donner aux plaintes
déposées ou dénonciations faites au parquet. Il y'a donc
le risque que la victime se heurte à l'inertie du procureur. Il serait
judicieux d'écarter ce risque en permettant à la victime de
saisir le juge du jugement ou le juge d'instruction lorsque le procureur refuse
de poursuivre.
En plus de ces obstacles liés à la
procédure, la victime doit faire face aux obstacles liés à
ses ressources financières.
B- Les obstacles d'ordre économique
Deux types d'obstacles se dressent devant la victime qui veut
utiliser le prétoire pénal pour faire réparer son
préjudice. Il s'agit du paiement exigé d'une consignation et de
certaines sanctions pécuniaires en cas de constitution
irrégulière.
Relativement à l'exigence de la consignation, il faut
dire que c'est l'art. 109 du CPP qui en fait mention. Selon ce texte, «
la partie civile qui met en mouvement l'action publique doit, si elle n'a
obtenu l'assistance judiciaire, et sous peine de non-recevabilité de sa
plainte consigner au greffe la somme présumée nécessaire
pour les frais de la procédure. Cette somme est fixée par une
ordonnance du juge d'instruction. Un supplément de consignation peut
être exigé d'elle au cours de l'information, par ordonnance du
juge d'instruction dès que le reliquat parait insuffisant pour assurer
le paiement de tous les frais ». De ce fait, La victime doit
impérativement verser le montant de la consignation pour être
recevable dans sa constitution168.
167 L'article 6 al. 2 de la loi organique
n°2002-5 du 31 janvier 2005 déterminant la composition, le
fonctionnement et la procédure de la Haute cour de justice
168 C.A. Daloa,23 juin 1999, R.J.C.A.T.
n°4-2000, p.38
52
Cette consignation est exigée, lorsque la victime
exerce son action civile par voie d'action en recourant soit à la
citation directe169 soit à la plainte avec constitution de
partie civile170. C'est le juge d'instruction qui fixe le montant et
le délai dans lequel cette somme doit être payée. Il a donc
un pouvoir d'appréciation en la matière. Sans nul doute, cette
condition financière apparait comme un obstacle pour les victimes pour
accéder à la justice. Les victimes qui n'ont pas les moyens
nécessaires pour faire juger un fait qui ne leur est pas imputable et
qui ne bénéficient pas de l'assistance judiciaire, tourneront le
dos aux juridictions pénales. Ainsi, nous assistons à une remise
en cause du principe de l'égalité de tous devant la
justice171. La consignation peut être donc un véritable
obstacle à l'intégration de la victime à titre principal
ce qui limite considérablement la protection de ses
intérêts.
Pour éviter cette triste réalité,
l'assistance judiciaire doit être améliorée pour que les
victimes en bénéficient effectivement. Aussi, serait-il judicieux
de trouver des critères de fixation de la consignation pour
éviter des consignations trop couteuses. En outre, il serait
également judicieux d'écarter le paiement de la consignation pour
les infractions les plus graves.
Evoquons à présent l'instauration de sanctions
pécuniaires en cas de constitution irrégulière.
La constitution de partie civile par voie d'action devant le
juge d'instruction n'est pas sans conséquence pour la partie civile.
En effet, le législateur dans le but de
préserver la personne poursuivie contre les abus de constitution de
partie civile notamment les constitutions malveillantes, hasardeuses et
fantaisistes de la victime, a mis à la disposition de celle-ci des
actions contre la victime. En effet, selon l'art. 112 al. 1er du CPP, «
quand, après une information ouverte sur constitution de partie
civile, une décision de non-lieu a été rendue,
l'inculpé et toutes personnes visées dans la plainte, et sans
préjudice d'une poursuite pour dénonciation calomnieuse, peuvent,
s'ils n'usent de la voie civile, demander des dommages-intérêts
à la partie civile pour abus de constitution de partie civile, dans les
formes indiquées ci-après ».
De ce fait, la personne poursuivie a deux actions contre la
victime dont la constitution est mal fondée.
169 Article 401 du CPP
170 Idem
171 Article 4 de la Constitution du 08 novembre 2016
53
D'une part, elle peut exercer une action civile devant les
juridictions civiles ou pénales pour demander des dommages et
intérêts.
D'autre part, la personne peut exercer une action, devant les
juridictions pénales, pour des faits de dénonciation
calomnieuse172. Dans ce cas, la partie civile, en plus du paiement
des dommages et intérêts, encourt une sanction pénale. Mais
les juridictions répressives ne doivent pas systématiquement
à partir de cette qualification prononcer une sanction car l'infraction
visée est une infraction intentionnelle. Il faut donc démontrer
l'intention de la partie civile de nuire à la personne poursuivie. Car,
« l'exercice d'une voie de droit ne doit nullement être
entravé par la crainte de pouvoir se voir réprimer à son
tour, alors même que l'usage était de bonne foi
»173.
Par contre, cette possibilité n'est guère
envisageable lorsque l'ordonnance de non-lieu a été prise suite
à la mise en mouvement de l'action publique par le parquet174
. Dans le cas contraire, si le juge d'instruction a rendu une ordonnance de
renvoi devant les juridictions de jugement (en cas de délit ou
contravention) ou une ordonnance de transmission des pièces au Procureur
général (en cas de crime), l'inculpé et les autres
personnes visées par la procédure ne peuvent valablement initier
une telle action.175
La personne poursuivie peut également exercer son
action civile pour dommages et intérêts lorsque la partie civile
désiste au sens de l'art. 435 du CPP ou si elle ne gagne pas gain de
cause devant le juge d'instruction176. Dans ces hypothèses,
la partie civile est tenue de payer les frais de justice.177
Ces différentes sanctions, sans conteste,
évitent les constitutions abusives ou dilatoires, mais limitent
considérablement le déclenchement de l'action publique par la
victime et partant, son droit d'accès à la justice. A cet effet,
sa protection se trouve limitée.
172 L'article 446 du CP qui prévoit
cette infraction dispose qu'« est calomnieuse la dénonciation
intentionnellement mensongère, par quelque moyen que ce soit, d'un fait
faux, susceptible d'exposer celui qui en est l'objet à une sanction de
l'autorité administrative, de son employeur ou à des poursuites
judiciaires. ».
173 FRANCOIS ( E. E. ), « De
l'intérêt de porter plainte et de se constituer partie civile
devant le juge
d'instruction », [ en ligne ]
https://www.ivoire-juriste.com/2019/10/article-de-doctrine-de-linteret-de-porter-plainte-de-se-constituer-partie-civile-devant-le-juge-dinstruction-ivoirien.html
, consulté le 11 octobre 2023 à 14h56
174 Cour suprême Chambre judiciaire
Arrêt n° 1884 du 7 janvier 1984 (CAB) In KOUADJANE (A. N.),
Jurisprudence en matière pénale, Éd. LOIDICI, p.
100
175 FRANCOIS ( E. E. ), op.cit.
176 Article 211 du CPP
177 Article 499 du CPP
54
Par ailleurs, les insuffisances au niveau de l'application du
principe de l'égalité des armes constituent également une
limite à la protection de la victime.
Paragraphe 2 : L'ineffectivité du principe de
l'égalité des armes
Ici, nous entendons par l'ineffectivité l'application
insuffisante du principe. En effet, le principe de l'égalité des
armes est « un principe, inclus dans le droit à un
procès équitable, en vertu duquel toutes les parties à un
procès doivent bénéficier d'une parfaite
égalité de traitement et de moyens dans la préparation et
l'exposé de leur cause. Le principe interdit que l'une des parties
à un procès soit placée dans une situation de
désavantage manifeste par rapport à l'autre partie
».178 Apres cette brève définition,
analysons la signification de ce principe (A) avant de montrer le maintien des
prérogatives disproportionnées entre les parties (B).
A- La signification du principe
Le principe de l'égalité des armes «
requiert que chaque partie se voit offrir une possibilité
raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent
pas dans une situation de net désavantage par rapport à son
adversaire ».179 Ce principe, contrairement au principe du
contradictoire, permet à chaque partie de défendre sa cause dans
un certain équilibre avec son adversaire. Certaines législations
utilisent l'expression « l'équilibre des droits des parties
». Cette expression montre que les parties doivent avoir des droits
équivalents, équilibrés, ce qui exclut des
disparités importantes mais n'implique pas une
uniformité180. Il ne peut y avoir une uniformité en
raison de la situation et des statuts différents des protagonistes.
Toutefois, malgré cette réalité, l'équilibre des
droits des parties doit être observé.
178 GUINCHARD (S.), DEBARD (T.),
op.cit., 2019, p. 432
179 CEDH 2 octobre 2001, G.B c/ France, Req.
n° 44069/898, §58 ; CEDH 27 octobre 1993, Dombo Beheer B.V c/ Pays
Bas, Req. 14448/88, §33 in TADROUS (S.), « La place de la victime
dans le procès pénal », thèse, Université
Montpellier I, 2014, p.60
180 DESPORTES (F.), LAZERGES-COUSQUER (L.),
op.cit., p.337
Aussi, s'il n'est pas facilement soutenable d'exiger une
égalité entre la partie civile et le ministère public, il
l'est, par contre, d'exiger une certaine égalité entre la partie
civile et le prévenu. En effet, le parquet n'est pas l'adversaire de la
partie civile même si souvent les intérêts sont
différents. Mais le prévenu demeure l'adversaire de celle-ci dans
la mesure où il est la personne contre qui elle exerce son action.
Actuellement « l'égalité des armes doit se
décliner désormais à trois. L'équilibre doit
être recherché alors dans une relation triangulaire entre le
ministère public accusateur, le défendeur et la victime
»181. Mais en attendant, certaines prérogatives
disproportionnées demeurent entre les parties.
B- Le maintien des prérogatives
disproportionnées entre les parties
La victime qui s'est constituée partie civile
bénéficie du principe de l'égalité des armes tout
au long de la procédure comme c'est le cas de la possibilité qui
est donnée à chaque partie de demander et obtenir une expertise.
Mais, malheureusement, l'analyse de la procédure a permis de noter
quelques limites en défaveur de la victime.
D'abord, au niveau de l'exercice des voies de recours, nous
constatons que la partie civile ne peut se pourvoir en cassation qu'avec un
pourvoi préalable du ministère public. Cela nous parait
déséquilibré, car la partie civile étant partie au
procès, comme le parquet, ne devrait pas voir son recours
subordonné à celui du chef du parquet. Cela constitue une limite
à sa protection dans la mesure où le parquet peut refuser
d'exercer ce droit de se pourvoir en cassation. La victime se trouve donc
confrontée à l'inertie du ministère.
Ensuite, au niveau de l'accès aux dossiers de la
procédure, le constat est que le prévenu ou l'accusé
reçoit gratuitement les copies et procès-verbaux des rapports des
expertises, les déclarations des témoins. Mais, la partie civile
pour bénéficier de ce principe du contradictoire doit
débourser de l'argent. Ce constat laisse penser que la justice traite la
victime comme un suspect et présume sa mauvaise foi.
Aussi, au niveau du droit à l'information, le
prévenu, dès la première comparution est-il avisé
par le juge d'instruction de son droit d'être assisté
55
181 TADROUS (S.), op. Cit., p.335.
56
pendant la procédure. Cette information n'est pas
donnée à la victime lorsqu'elle vient porter à la
connaissance de la justice l'infraction qui a troublé l'ordre public, la
cause de sa souffrance.
Ce déséquilibre au niveau des droits des parties
est un obstacle à la protection de la victime. En effet, la victime ne
pourra bien défendre ses intérêts que lorsqu'il existe une
certaine proportionnalité entre les droits des parties.
Nous remarquons que ces différentes prérogatives
disproportionnées entre les parties au détriment de la victime
limitent, sans nul doute, sa protection.
Par ailleurs, cette protection se trouve également
limitée en raison du risque que la victime soit l'objet d'une
victimisation secondaire. Il importe donc de renforcer sa protection.
Section 2 : La nécessité de renforcement
de la sécurité de la victime
Le législateur ivoirien a pris des mesures pour assurer
la sécurité de la victime. C'est le cas par exemple de l'art. 327
du CPP182 qui interdit et réprime la subordination du
témoin. Cet art. peut donc s'appliquer à la victime non
constituée partie civile. Le législateur a également
prévu à travers l'art. 153 du CPP183 le
mécanisme de surveillance du mis en cause en instituant la
détention préventive184 et le contrôle
judiciaire185. Ce mécanisme, sans doute, peut garantir la
sécurité de la victime.
182 Art.327 du CP dispose que « Quiconque au cours d'une
procédure judiciaire use de promesses, offres, ou présents, de
pressions, menaces, voies de fait, manoeuvres ou artifices pour
déterminer un témoin, un interprète, un traducteur ou un
expert à faire une déposition, une traduction ou un rapport
mensonger, est puni d'un emprisonnement d'un à trois ans et d'une amende
de 300.000 à 3.000.000 FCFA ou de l'une de ces deux peines seulement si
cette subornation ne produit pas son effet et dans le cas contraire, des peines
sanctionnant les faux témoins, experts ou interprètes. Est puni
également des mêmes peines celui qui exerce des
représailles contre un témoin, un interprète, un
traducteur ou un expert en raison de sa déposition, de sa traduction ou
son rapport ».
183 Art. 153 du CPP dispose que « La liberté est
de droit, le contrôle judiciaire et la détention préventive
des mesures exceptionnelles. Lorsqu'elles sont ordonnées, les
règles ci-après doivent être observées ».
184 Art. 360 du CPP dispose que « Si l'inculpé
se soustrait volontairement aux obligations du contrôle judiciaire, le
juge d'instruction le convoque ou le fait comparaître devant lui par tous
moyens pour l'entendre en ses explications. Le juge d'instruction décide
soit du maintien du contrôle judiciaire soit d'un placement de
l'inculpé en détention préventive quelle que soit la peine
privative de liberté encourue ».
185 Art. 154 du CPP dispose que « Le contrôle
judiciaire peut être ordonné par le juge d'instruction à
toute étape de la procédure dans le cas où
l'inculpé encourt une peine d'emprisonnement ».
57
Plusieurs moyens sont donc prévus pour assurer la
protection de la victime. Mais malgré ces mesures, la victime n'est pas
à l'abri d'une victimisation secondaire186. Elle peut
être exposée à des intimidations, des extorsions, des
menaces. En raison de ce risque, certaines législations ont
trouvé nécessaire de mettre à la disposition de la victime
de « nouveaux procédés » à savoir la
visioconférence (Paragraphe 1) et la possibilité
pour elle de garder l'anonymat pendant la procédure (Paragraphe 2). Nous
souhaitons une inspiration de la part du législateur dans ce sens.
Paragraphe 1 : L'admission souhaitée de la
visioconférence
« La visioconférence est la possibilité
d'utiliser, lorsque les nécessités de l'enquête ou de
l'instruction le justifient, des moyens de télécommunication
sonores ou audiovisuels, garantissant la confidentialité, qui permettent
de réaliser un acte de la procédure, audition, interrogatoire,
confrontation ,prolongation de garde à vue , débats
contradictoires préalables à une détention provisoire
d'une personne déjà détenue, alors que les personnes se
trouvent en différents points du territoire de la République. Le
procédé est également utilisable devant une juridiction de
jugement pour l'audition des témoins, parties civiles ou experts, et,
avec l'accord de toutes les parties, pour la comparution d'un détenue
»187. Cette définition permet de déduire que
la visioconférence peut être un procédé de
protection de l'intégrité physique et psychique de la victime.
Mais son utilisation à cette fin sécuritaire (A) connait un
encadrement (B).
A- La dimension sécuritaire de la
visioconférence
L'enjeu de la sécurité a dominé
très largement l'implantation de la visioconférence dans
certaines législations. Elle a en effet été l'un des
moteurs lors de l'introduction de la visioconférence en Italie non pas
seulement pour
186 Prof. Robert ROTH Et. Al., « La
protection de la victime dans la procédure pénale », rapport
d'évaluation rédigé sur mandat de l'Office
fédéral de la justice, Centre d'Etude, de Technique de
d'Evaluation Législatives Faculté de droit, Université de
Genève, octobre 1997, p.18
187 GUINCHARD (S.), DEBARD (T.),
op.cit., 2019, p.1107
58
auditionner la personne mise en cause mais également
pour protéger les témoins188. La victime non
constituée partie civile ayant le même régime juridique
qu'un témoin trouve protection dans l'utilisation de ce
procédé. La partie civile tire également une protection de
ce moyen car, au même titre que la victime simple, elle mérite une
protection renforcée. C'est le lieu de souligner que la personne
poursuivie n'est plus la seule à en bénéficier mais aussi,
l'expert, le témoin, l'interprète et enfin la partie qui nous
intéresse le plus ; la partie civile189.
Cet outil de communication garantit la sécurité
de la victime. Mais, il n'est utilisé que si cela se justifie par la
situation de la victime. En effet, certaines victimes sont traumatisées
par la présence de leur agresseur. Ces derniers de par leur
présence sont capables d'exercer certaines pressions sur elles. Pour
éviter ou restreindre ce traumatisme et préserver la
sérénité de la victime, la visioconférence peut
être mise en oeuvre. Notons également que le déplacement de
certaines victimes peut les exposer à l'agression des malfaiteurs. La
visioconférence permettra à la victime de rester dans sa zone de
sécurité pour défendre ses intérêts. Ce moyen
permet également à une victime qui est dans
l'impossibilité de se déplacer, en cas de maladie par exemple, de
participer à la procédure en toute sécurité.
Mais compte tenu de la virtualité de ce
procédé et des droits de la défense ainsi que de la
préservation de l'ordre public, la mise en oeuvre de la
visioconférence connait un encadrement.
B - L'encadrement de la mise en oeuvre de la
visioconférence
Le premier geste de justice est de délimiter un lieu,
de circonscrire un espace propice à son accomplissement190.
Mais force est de constater que la visioconférence affaiblit ce premier
geste dans la mesure où elle contient des lieux séparés.
Toutefois, le Professeur Jérôme BOSSAN explique bien que cette
méthode est analysée comme neutre car elle «
constituerait un moyen
188 BOSSAN (J.), « La visioconférence dans le
procès pénal : un outil à maîtriser », in Revue
de science criminelle et de droit pénal comparé, 2011/4
(N°4), pp. 801-816 [en ligne]
https://www.cairn.info/revue-de-science-criminelle-et-de-droit-penal-compare-2011-4-page-801.htm?contenu=plan
, consulté le 19 octobre 2023 à 04h05
189 TADROUS (S.), op.cit., p.189
190 A. Garapon, Bien juger. Essai sur le rituel
judiciaire, 2001 in BOSSAN (J.), « La visioconférence dans le
procès pénal : un outil à maîtriser », in
Revue de science criminelle et de droit pénal comparé,
2011/4 (N°4), pp. 801-816
59
d'administrer la justice sans incidence puisque,
malgré la pluralité de lieux, ni l'oralité ni même
l'unité de temps ne seraient touchées ». Malgré
cette assurance, l'emploi de la visioconférence suppose la rencontre
préalable des accords des différentes parties au
procès.
Par ailleurs, la Cour européenne des droits de l'homme
a déjà validé ce mode de participation aux débats
judiciaires comme conforme au principe du procès équitable mais
sous la condition que le recours à la visioconférence poursuive
un but légitime et que les modalités de déroulement s'y
attachant respectent les droits de la défense des parties dans chaque
cas d'espèce. L'emploi de ce procédé doit donc poursuivre
la préservation de l'ordre public, son but ultime, et la protection des
parties aux procès.
Pour recourir efficacement à cet outil, il faut
l'absence de difficultés techniques qui demeure une condition
essentielle de bonne utilisation de la visioconférence dans le cadre du
procès.191
En sus, il importe de souligner que la visioconférence
présente des avantages économiques et assure une certaine
célérité du procès en ce sens qu'elle permet de
réduire les délais et les coûts, et évite les
déplacements éventuels de la victime.
De ce qui précède, la visioconférence
permet de garantir la sécurité de la victime car elle la
préserve contre d'éventuelles nouvelles attaques de la part de
ses malfaiteurs. En outre, à l'instar de la
vidéoconférence, la possibilité qui est donnée
à la victime dans certaines législations de garder l'anonymat
protège la victime contre une victimisation secondaire.
Paragraphe 2 : L'admission souhaitée de la
possibilité de garder
l'anonymat
En plus des moyens de sécurité prévus et
de la visioconférence souhaitée, la victime nécessite
parfois encore plus de sécurité, spécialement lorsque de
par son identité ou son domicile, son intégrité physique
est menacée. Pour éviter cette menace et éviter la
réitération de l'infraction, certains législateurs
permettent à la victime de garder l'anonymat pendant la
procédure. De ce fait, le fait de garder
191 CEDH, 5 oct. 2006, Marcello Viola c/ Italie,
préc., § 74. In BOSSAN (J.), « La visioconférence dans
le procès pénal : un outil à maîtriser », in
Revue de science criminelle et de droit pénal comparé,
2011/4 (N°4), pp. 801-816
60
l'anonymat parait une mesure de sécurité (A).
Mais, en raison des droits de la défense dont le respect doit être
observé, le recours à cette mesure de sécurité doit
être encadré (B).
A - Une mesure de sécurité
Garder l'anonymat pendant la procédure consiste pour la
victime, constituée ou non partie civile, de ne pas
révéler l'adresse de son domicile192. Souvent il peut
s'agir également de garder l'anonymat complet, dans cette
hypothèse, la victime ne dévoile pas son identité. En
effet, lorsque la victime ne dévoile pas l'adresse de son domicile ou
garde l'anonymat complet, elle peut élire pour domicile celui de son
avocat ou un commissariat ou encore une brigade de gendarmerie193.
C'est à cette adresse que les avis et notifications seront faits.
Cette mesure est sécuritaire car elle permet
d'éviter que la vie de la victime ou son intégrité
physique, celle des membres de sa famille ou de ses proches soit, par son
audition ou sa participation au débat, gravement mise en danger. En
clair, cette mesure protège la victime contre les intimidations, les
menaces et les représailles de son agresseur. Ainsi, l'anonymat concerne
des préoccupations de survie.
Pour cet impératif, le procureur ou le juge
d'instruction peut saisir, par requête motivée, le juge des
libertés et de la détention (JLD) pour autoriser l'anonymat
souhaité par la victime. Ce magistrat, par décision
motivée, peut autoriser que les déclarations de la victime soient
recueillies sans que son identité ne soit apparente dans le dossier de
la procédure. Le procès-verbal de l'audition ne comporte pas la
signature de la victime. Cette protection permet d'éviter, ou du moins
de limiter, les effets de la « victimisation secondaire
»194. Ainsi le préjudice subi ne se verra pas
accroitre.
Par ailleurs, il importe de souligner que l'anonymat
protège la victime des médias surtout lors des audiences des
débats publics. En effet, il est important de
192 L'article 706-57 du code de procédure
pénale (France), Paris, Dalloz, 61ème éd.,2020,
p.1263
193 LEGEAIS (R.), « L'utilisation de
témoignages sous forme anonyme ou déguisée dans la
procédure des juridictions répressives », in
Revue internationale de droit comparé, 1998,
pp. 711-718
194 Prof. Robert ROTH Et. Al., « La
protection de la victime dans la procédure pénale », rapport
d'évaluation rédigé sur mandat de l'Office
fédéral de la justice, Centre d'Etude, de Technique de
d'Evaluation Législatives Faculté de droit, Université de
Genève, octobre 1997, p.8
61
protéger la victime contre les divulgations de la
presse, surtout lors des procès à sensation.
En sus, Les situations impliquant des victimes mineures ainsi
que les cas d'infractions sexuelles justifient elles aussi le respect de
l'anonymat en audience si la victime le demande195.
Mais compte tenu des droits de la défense le recours
à la garde de l'anonymat connait un encadrement.
B - Un recours encadré
Le recours à cette mesure doit être
encadré dans la mesure où sa mise en oeuvre est susceptible de
porter atteinte aux droits de la défense. En effet, toute personne mise
en cause veut bien connaitre l'identité de la personne qui l'a mise
entre les mains de la justice. Cela permet en réalité au mis en
cause de préparer sa défense.
A cet effet, le recours à cette possibilité doit
être commandé par la nécessité de protéger la
sécurité de la victime. Ce sera le cas si l'audition de la
victime met gravement en danger sa vie ou son intégrité physique,
celle des membres de sa famille ou de ses proches. Sans cet impératif,
le recours à cette possibilité serait impossible. Aussi, le
recours à la garde de l'anonymat est encadré par la
possibilité qui est donnée au mis en examen de s'opposer lorsqu'
« au regard des circonstances dans lesquelles l'infraction a
été commise ou de la personnalité du témoin, la
connaissance de l'identité de la personne est indispensable à
l'exercice des droits de la défense »196.
Dans ce cas, certains législateurs ont prévu
d'utiliser un dispositif d'audition à distance rendant la voix du «
témoin » non identifiable. C'est un système de
déformation de voix et de floutage d'images. Cette mesure vise encore
plus ou moins à protéger la victime.
En outre, le recours à cette mesure est encadré
dans la mesure où son octroi est subordonné à
l'appréciation du juge des libertés et des peines, et par le
contrôle exercé par la chambre d'instruction sur les
décisions d'octroi.
195 Ibid., p.10
196 Article 706-60 du code de procédure pénale
(France), op.cit., p.1265
62
Par ailleurs, certains législateurs subordonnent le
recours à l'anonymat à la commission d'une infraction susceptible
d'être qualifiée crime ou délit et punie d'au moins trois
ans d'emprisonnement. Nous pensons avec le Docteur TADROUS que cette condition
est inutile et il convient de la supprimer puisque la protection
nécessitée par l'anonymat complet va dépendre de la
personnalité de la victime et celle du présumé auteur de
l'infraction, de la sensibilité de la victime et des risques de
représailles à son encontre. Or, le risque de représailles
va dépendre de la rancoeur ou de la fragilité de la
personnalité de l'auteur de l'infraction et non de la gravité de
l'infraction197.
En substance, l'analyse de ce chapitre a permis de montrer que
la protection de la victime est effectivement limitée au niveau de sa
participation au procès pénal.
Sous un autre angle, sa protection se trouve également
limitée dans les procédures alternatives aux poursuites.
197 TADROUS (S.), « La place de la victime dans
le procès pénal », Thèse,
Université Montpellier I, 2014, p.458
63
CHAPITRE 2 : LA LIMITATION DANS LES
PROCEDURES ALTERNATIVES AUX POURSUITES
Les procédures alternatives aux poursuites sont des
moyens permettant au parquet de ne pas engager l'action publique en fonction du
comportement du délinquant198. Le procureur a recours
à ces alternatives lorsque le suspect de l'infraction reconnait
partiellement ou totalement les faits pour lesquelles il est poursuivi. Elles
permettent au ministère public de maîtriser le contentieux en
faisant en sorte que les multiples dénonciations et plaintes trouvent un
traitement qui garantit et réconcilie les intérêts des
différentes parties au procès. Ainsi, elles permettent au parquet
de disposer d'une troisième option entre la poursuite, sa raison
d'être, et le classement sans suite. On peut affirmer que ce type de
mesures a été favorisé dans le but d'éviter
d'augmenter le nombre de classements sans suite. La plupart des alternatives
aux poursuites vont alors permettre de répondre aux attentes des
victimes qui sollicitent une réponse pénale199. Ces
mesures alternatives au règlement des conflits comportent une certaine
accélération dans la résolution des conflits et
constituent un soulagement pour la justice pénale. Mais elles concernent
généralement la petite ou moyenne délinquance.
Par ailleurs, la subordination du recours aux alternatives au
comportement du délinquant et à l'accord du procureur de la
République laisse présager la protection limitée de la
victime. Cela se confirme par le rôle passif que joue la victime dans les
procédures accélérées prévues dans la
législation ivoirienne (SECTION 1). La protection des
intérêts de la victime est en outre limitée par le fait
qu'il n'existe pas, actuellement, en procédure pénale ivoirienne
des mesures alternatives qui mettent en avant la réparation du
préjudice subi par la victime (SECTION 2).
198 BENILLOUCHE (M.), Leçons de
Procédure pénale, Ellipeses, 3ème
éd., 2017, p.96
199 TADROUS (S.), op.cit., p.261
64
Section 1 : La passivité de la victime dans les
procédures accélérées prévues
L'état actuel de l'ossature pénale ivoirienne
permet de constater que le législateur a prévu des
procédures qui permettent l'accélération de la
résolution de certains conflits. Le but essentiel de ces
procédures accélérées est d'éviter un
procès à une personne qui reconnaît les faits qui lui sont
reprochés. Ici, il sera question d'analyser la protection de la victime
dans ces procédures qui visiblement sont en faveur de la personne
poursuivie et en faveur du soulagement de la justice pénale. Ce constat
trouve sa justification dans le fait que la mise en oeuvre de ces alternatives
est en fonction du comportement du délinquant et de l'accord
indispensable du chef de parquet.
Ces procédures sont, en fait, des opérations qui
se passent généralement entre le procureur de la
République et le délinquant. A cet effet, la victime est souvent
dans une position passive vis-à-vis de ces mesures. La passivité
de la victime sera analysée dans les procédures
accélérées phares. Il s'agit de la procédure de
transaction sur l'action publique (Paragraphe 1) et de la procédure de
la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité
(Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Dans la procédure de transaction
sur l'action publique
Le législateur ivoirien a pris le soin de
définir cette mesure alternative. En effet, l'art. 14 du CPP prescrit
que : « la transaction consiste au paiement d'une amende
proposée par le procureur de la République dans les limites de la
peine d'amende prévue par la loi pour l'infraction constatée et
acceptée par le délinquant200. De cette
définition législative, il apparaît clairement que la
transaction sur l'action publique est une opération entre le chef du
parquet et le mis en cause (A). Toutefois certains articles suivant l'art. 14
du CPP définissent
200 L'appellation « délinquant » nous parait
inadéquate. Car le mis en cause, jusqu'à la reconnaissance des
faits qui lui sont reprochés ou à l'acceptation de la
transaction, jouit du principe de la présomption d'innocence. Il serait
donc approprié que le législateur emploie les expressions «
présumé délinquant » ou « mis en cause
».
65
le traitement qui est réservé à la
victime. Mais ce traitement nous parait inadéquat à certains
égards (B).
A - Une opération entre le procureur de la
République et le mis en cause
Au regard de l'art. 14 du CPP, c'est le procureur de la
République qui propose le paiement d'une amende au délinquant.
Cette opération ne serait mise en oeuvre qu'avec l'accord du
délinquant qui doit expressément accepter la proposition du
ministère public.
La subordination de la mise en oeuvre de la transaction
à la proposition du procureur et à l'acceptation de celle-ci par
le délinquant peut se justifier. En effet, ici, la transaction concerne
l'action publique dont l'exercice relève exclusivement de la
compétence du procureur de la République. Pendant cet exercice,
le procureur requiert l'application de la loi et partant, de la peine. On
comprend donc que la loi lui autorise de faire une telle proposition.
Par ailleurs, il faut souligner que le procureur de la
République a en principe l'exercice de l'action publique et non la
disposition de celle-ci. La disposition de l'action publique appartient
à la société. Partant de ce constat, le procureur de la
République ne peut donc pas transiger car la transaction constitue un
acte de disposition dans la mesure où elle éteint l'action
publique201. C'est donc de façon exceptionnelle que cette
possibilité est offerte au chef du parquet. Cette exception peut se
justifier par le souci d'accélération et d'efficacité du
procès, et de désengorgement des juridictions de jugement, mais
aussi et surtout par le souci d'éviter ou d'augmenter les cas de
classement sans suite.
En ce qui concerne l'accord indispensable du
délinquant, qui peut se faire assister d'un conseil pendant la
procédure202, la justification se trouve dans le fait qu'il
est le bénéficiaire de la transaction et la partie contre qui le
procureur requiert l'application de la peine. La procédure ne serait
donc possible sans son accord.
Cette procédure est donc avantageuse pour le
délinquant qui l'accepte. D'abord, elle lui permet de ne pas suivre une
longue procédure pour son jugement. Il ne va donc pas en principe durer
entre les mains de la justice s'il reconnait les
201 Article 14 in fine du CPP
202 Article 14 alinéa 2 du CPP
faits qui lui sont reprochés en acceptant la
proposition de l'amende faite à lui par le procureur.
Ensuite, la transaction peut éviter l'aggravation
éventuelle de la peine applicable au prévenu. En effet, devant le
procureur, le prévenu n'encourt que le paiement d'une amende. Mais
devant le juge, il est possible que la loi soit appliquée dans toute sa
rigueur ce qui aboutirait à un jugement condamnant le prévenu
à une peine d'emprisonnement, ou à des mesures de
sûretés.
Par ailleurs, il convient de préciser que la
transaction n'est possible qu'en matière délictuelle et
contraventionnelle. Elle concerne donc les infractions de faible ou moyenne
gravité. Ce qui exclut la transaction en cas de crime ou des
délits sévèrement réprimés. C'est pourquoi
la loi a limitativement prévu certains cas dans lesquelles la
transaction est impossible203. Ces cas sont :
1° les infractions commises sur les mineurs ou les
personnes incapables de se protéger ;
2° les vols commis avec les circonstances aggravantes ;
3° les infractions à la législation sur les
stupéfiants, les substances psychotropes et vénéneuses
;
4° les délits commis en matière de terrorisme
;
5° les délits en matière de blanchissement
des capitaux et de financement du terrorisme ;
6° les attentats aux moeurs ;
7° les évasions ;
8° les atteintes à l'ordre public et à la
sûreté de l'Etat ;
9° les outrages, les offenses au Chef de l'Etat ;
10° les infractions contre la paix et la tranquillité
publique ;
11° la connexité avec des infractions pour
lesquelles la transaction n'est pas admise ;
12° toutes autres infractions pour lesquelles la loi
n'admet pas la transaction.
La transaction vaut reconnaissance de l'infraction et
éteint l'action publique. Elle est constatée par un
procès-verbal contenant l'accord irrévocable des parties et
signé par elles. Ce procès-verbal contient les renseignements sur
l'identité des parties, le montant de l'amende et mention du paiement de
celle-ci et, s'il y a lieu les saisies ou restitutions. Ces renseignements sont
mentionnés sur un registre
66
203 Article 13 du CPP
67
tenu au parquet à cet effet204. Ensuite le
procès-verbal est transmis au président du tribunal pour
homologation. Le greffier en chef y appose la formule exécutoire. Il est
conservé au rang des minutes et n'est susceptible d'aucune voie de
recours205.
Cette analyse a permis de montrer que la transaction en
matière pénale n'intervient principalement que sur l'action
publique. Elle profite au prévenu qui, en réalité, a
commis l'infraction en causant du tort à la victime. Mais est-ce le cas
pour la victime qui est reléguée au second plan ?
B - Un traitement inadéquat de la
victime
L'art. 51 al. 4 dispose que : « le procureur de la
République peut, dans les cas où elle est possible, soit
d'office, soit à la demande de la victime, son
représentant légal ou son ayant droit, proposer la transaction au
délinquant ».
L'art. 14 al. 3 prescrit que : « s'il existe une
victime, le procureur de la République est tenu d'aviser celle-ci du
projet de transaction et recueille ses avis et observations préalables
».
De l'économie de ces deux dispositions, il ressort que
la victime peut prendre part à la transaction lorsqu'elle est à
l'origine ou non de ce projet. Dans le premier cas, elle y prend part parce
qu'elle propose au procureur la transaction. Dans le second cas, elle ne fait
pas de proposition, ce qui veut dire que c'est le procureur qui, d'office,
propose le projet au délinquant. Mais elle y prend part dans la mesure
où elle peut faire des observations et émettre des avis
lorsqu'elle est avisée par le procureur.
De ce point de vue, l'on ne peut dire que la victime est
soumise à un traitement inadéquat. Mais, l'idée du
traitement inadéquat est corroborée par le fait que le procureur
de la République n'est pas lié par les avis de la victime et par
le traitement qui est réservé à la victime lorsqu'elle
refuse de transiger. En effet, le procureur n'est pas lié par les avis
de la victime car le consentement de la victime n'est nullement requis pour la
mise en oeuvre de la transaction. Ainsi, l'avis de la victime importe peu et le
dernier mot revient au procureur. C'est ce qui ressort clairement de la lecture
de l'art. 18 al. 1er lorsqu'il dispose en ces termes : «
le
204 Article 15 du CPP
205 Article 17 du CPP
refus de transiger de la victime ne fait pas obstacle
à la transaction sur l'action publique entre le procureur de la
République et le délinquant ». La victime ne peut donc
s'opposer à la transaction sur l'action publique même si elle peut
la proposer au procureur. L'admission de la transaction pénale par le
ministère public en cas de refus de la victime est désavantageuse
pour la victime.
En fait, si le délinquant accepte de payer l'amende
proposée par le ministère public, la transaction a lieu et cela
met fin à l'action publique. Par conséquent, le dossier est
classé sans suite pour cause de transaction et le délinquant est
libéré automatiquement s'il était gardé
provisoirement ou détenu. Cependant, la victime, après avoir
perdu un puissant allié, le procureur de la République, est
renvoyée à saisir les juridictions répressives pour
statuer sur les intérêts civils car la transaction vaut
reconnaissance de l'infraction. Nous assistons donc à un rejet de la
partie civile à qui possibilité est donnée de demander au
procureur la proposition de la transaction au
délinquant206.
Ce renvoi occasionne le déboursement de frais
supplémentaires pour la victime. En fait, la victime prendra attache
avec un commissaire de justice pour saisir les juridictions répressives
aux fins de statuer sur les intérêts civils conformément
aux dispositions de l'art. 396 nouveau du CPP. Or, cela engendre des frais
supplémentaires pour la victime et elle est laissée pour compte
sans l'intervention du ministère public. Une telle procédure
n'est pas à l'avantage de la victime. Nous proposons, pour éviter
d'éventuelles dépenses à la victime qui souffre
déjà, qu'il soit permis au procureur de la République de
citer le prévenu devant la juridiction répressive de jugement. Ce
jugement portera donc uniquement sur les intérêts civils.
De ce qui précède, nous avons remarqué la
passivité voire la fragilisation de la victime dans la procédure
de transaction sur l'action publique. De même, qu'en est-il du traitement
de la victime dans la procédure de comparution sur reconnaissance de
culpabilité ?
68
206 Article 51 alinéa 4 du CPP
69
Paragraphe 2 : Dans la procédure de comparution
sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC)
Contrairement à la transaction, il n'existe pas de
définition légale de la comparution sur reconnaissance
préalable de culpabilité. Mais l'art. 522 al. 1er permet de
mentionner que c'est une opération au cours de laquelle le procureur de
la République propose au prévenu d'exécuter une ou
plusieurs des peines principales ou complémentaires encourues. De cette
mention, on voit que cette mesure est une alternative aux poursuites. Mais
l'analyse des art. 521 et s. qui régissent la CRPC donne de constater
que ce projet dépend des volontés du procureur de la
République et du mis en cause (A) et qu'un traitement approprié
n'est pas accordé à la victime dans cette opération
(B).
A - Le recours à la CRPC soumis aux
volontés du procureur de la République et du mis en
cause
Aux termes de l'art. 521 du CPP, « le procureur de la
République peut, d'office ou à la demande du prévenu,
recourir à la procédure de comparution sur reconnaissance
préalable de culpabilité... ». On constate clairement
que la mise en oeuvre de cette procédure résulte de la
volonté du procureur de la République ou de la demande faite
à lui par le prévenu qui plaide coupable.
La subordination du recours à cette procédure
aux volontés du procureur et du mis en cause trouve justification.
En effet, la CRPC concerne l'action publique dont l'exercice
relève exclusivement de la compétence du procureur de la
République. Pendant cet exercice, le procureur requiert l'application de
la loi et partant, de la peine. On comprend donc que la loi lui autorise, de
façon exceptionnelle, de faire une telle proposition. Cela permet
d'éviter l'encombrement de la justice pénale, le classement sans
suite des affaires dont est saisi le parquet.
En ce qui concerne la possibilité donnée au mis
en cause de demander au procureur de recourir à la procédure de
« plaider coupable », il faut noter que cela tend au renforcement des
droits de la défense. Aussi, c'est le prévenu qui est le
destinataire voire le bénéficiaire de cette procédure. Il
est donc concevable qu'il
70
puisse demander au procureur de recourir à la CRPC. La
mise en oeuvre de cette procédure évite au prévenu une
procédure éventuellement longue.
Mais, si le procureur et le prévenu sont libres de
recourir à la CRPC, leurs volontés d'y recourir doivent respecter
le domaine et la procédure de cette mesure.
En effet, le recours à la CRPC n'est possible que
lorsque les faits poursuivis sont constitutifs d'un délit passible d'une
peine d'emprisonnement de cinq ans au plus et le prévenu reconnaît
les avoir commis207. Dans ce cas, le procureur peut proposer au
prévenu d'exécuter une ou plusieurs des peines principales ou
complémentaires encourues. Lorsqu'une peine d'emprisonnement est
proposée, sa durée ne peut être supérieure à
un an, ni excéder la moitié de la peine d'emprisonnement
encourue. A l'issue de la procédure, un procès-verbal est
adressé sous peine de nullité208 et le
président du tribunal est saisi pour homologation.
En revanche, une catégorie de prévenus ne
peuvent bénéficier de la CRPC et partant, ne peuvent demander le
recours à celle-ci. En effet, l'art. 530 du CPP dispose en ces termes :
« les dispositions du présent chapitre ne sont applicables :
- lorsqu'un mineur est poursuivi ;
- en matière de délit de presse ;
- aux délits d'atteintes volontaires et
involontaires à l'intégrité des personnes ayant
entraîné une mutilation ou une infirmité permanente
;
- aux délits d'agressions sexuelles ;
- aux délits poursuivis selon une procédure
spéciale, non compris le flagrant délit ».
De ce qui précède, il résulte que seuls
le procureur et le prévenu sont à l'origine de la
procédure de comparution sur reconnaissance préalable de
culpabilité. La victime n'a donc pas la possibilité de demander
au procureur de recourir à cette alternative. Cette exclusion laisse
présager le traitement défavorable de la victime dans cette
procédure.
207 Article 521 du CPP
208 Article 528 du CPP
71
B - Le traitement inapproprié de la
victime
La procédure de comparution sur reconnaissance
préalable de culpabilité n'accorde pas de traitement convenable
à la victime. Cela est corroboré par la place réduite
qu'occupe la victime dans cette procédure.
En effet, si le législateur ivoirien, dans la
procédure de transaction, a permis à la victime d'être
à l'origine de la procédure, d'y émettre des avis et de
faire des observations, dans la procédure de CRPC, il la prive de ces
possibilités. Au fait, l'accord de la victime n'est nullement
exigé pour recourir au CRPC. Elle n'a donc pas la possibilité de
s'opposer personnellement à sa mise en oeuvre. Pire, sa présence
n'est nulle part autorisée lors de la phase de comparution de la
personne poursuivie devant le chef du parquet. La victime est donc exclue de la
phase pendant laquelle son présumé auteur reconnaît
l'infraction dont elle souffre et pour laquelle elle cherche réparation.
La présence éventuelle de la victime pourrait se solder par un
certain accord entre elle et le prévenu ce qui permet de
préserver ses intérêts civils. Pendant la procédure,
si la victime est identifiée elle est simplement informée sans
délai par tout moyen de cette procédure209. Cette
information n'est pas donnée dans le but de permettre à la
victime d'intervenir immédiatement dans la procédure. Son
intervention se produit tardivement.
En effet, selon l'art. 527 du CPP « elle est
invitée à comparaitre en même temps que l'auteur des faits,
accompagnée le cas échéant de son conseil, devant le
président du tribunal ou le juge délégué par lui
pour se constituer partie civile et demander réparation de son
préjudice ». C'est donc lors de la phase de l'homologation que
la victime intervient pour se constituer partie civile et demander la
réparation. Or, devant le président du tribunal, on peut assister
à une audience formelle et expéditive génératrice
de frustrations pour la victime.210 Une telle audience est possible
dans la mesure où l'homologation a lieu le même jour que le
président vérifie la réalité des faits et leur
qualification juridique retenue pendant la procédure de
CRPC211.
Par ailleurs, la non comparution de la victime à
l'audience d'homologation ne constitue pas un obstacle à l'homologation
car le président ou le juge délégué par
209 Article 527 du CPP
210PIGNOUX (N.), la réparation des
victimes d'infractions pénales, op.cit., p. 478 in NIAMBE (K. R.),
« La participation de la victime au procès pénal
», thèse, Université Alassane OUATTARA de Bouake, 2020,
p.478
211 Article 523 du CPP
72
lui peut, au regard de l'art. 527 du CPP, statuer sur la
demande. La partie civile peut faire appel de l'ordonnance conformément
aux dispositions de l'art. 558-3° du CPP.
De tout ce qui précède, nous constatons que dans
les procédures accélérées prévues par le
législateur ivoirien, la victime est soumise à un traitement
inadapté. Ce qui limite sa protection recherchée en droit
ivoirien. Cette protection est davantage limitée par l'absence de
procédures qui mettent en avant la réparation du dommage
causé à la victime.
Section 2 : L'absence de procédures
privilégiant la réparation du préjudice
de la victime
Il existe en droit comparé plusieurs
mesures212 qui mettent en avant la réparation du
préjudice subi par la victime. Mais la médiation pénale
(paragraphe 1) et la composition pénale (paragraphe 2) en sont les
mesures phares. En effet, en ce qui concerne la prise en compte effective de la
victime dans le règlement du contentieux pénal la concernant, ces
deux mesures alternatives semblent les mieux adaptées. Elles
présentent un avantage considérable pour la victime car elles
mêlent réparation et punition, en faisant de la première
une échappatoire à la seconde.213
Paragraphe 1 : L'instauration espérée de
la médiation pénale
La médiation pénale « consiste sous
l'égide d'un tiers à mettre en relation l'auteur et la victime
afin de trouver un accord sur les modalités de réparation mais
aussi de rétablir un lien et de favoriser, autant que possible, les
conditions de non-réitération de l'infraction alors même
que les parties sont appelées à se
212 On peut citer à titre d'exemple
l'éloignement du conjoint ou de l'ancien conjoint violent ou le
classement sous condition d'indemnisation.
213 TADROUS (S.), op.cit., p.265
73
revoir ».214 De cette
définition apparait clairement le traitement privilégié de
la réparation du préjudice de la victime que comporte cette
mesure alternative. On le voit, elle contient une dimension réparatrice
du dommage de la victime (B). Mais analysons d'abord son champ d'application
(A).
A- Le domaine
La médiation pénale concerne les infractions de
faible gravité. Mais le domaine, avec le temps, va connaitre une
évolution pour s'appliquer à des infractions plus ou moins
graves. Telles que les infractions de violences volontaires, d'escroquerie de
vol ou tentative de vol, de recel, de dégradation volontaire, des
infractions de tapage et d'abandon de famille.
Ensuite, le recours à la médiation va
évoluer et s'adapter à la réalité judiciaire et
ainsi intégrer le contentieux dit « technique ». «
Les nuisances sonores de sites industriels, de loisirs (stand de tir, circuit
moto cross, discothèque, club de parachutisme...); les infractions
à l'environnement (pollution fluviale, non-respect des débits
réservés ou encore des systèmes de protection de
circulation de la faune aquatique) et certaines infractions en matière
d'urbanisme font désormais partie des dossiers traités couramment
par les médiateurs pénaux »215.
Par ailleurs, en général, elle est
majoritairement proposée lorsque le conflit oppose des personnes qui se
connaissent, c'est-à-dire des membres d'une même famille, ou des
personnes qui entretiennent des relations de voisinage ou des relations
sociales (employés d'une même société par
exemple)216. Nous remarquons que cette mesure concerne
généralement des infractions qui mettent en conflit un groupe de
personnes qui sont amenées à vivre ensemble ou à se voir
régulièrement. Pour éviter des déchirures ou des
fissures interminables entre « les personnes condamnées
à vivre ensemble ou à se voir continuellement », cette
procédure alternative a été mise en place.
214 Définition de la circulaire CRIM
2004-03 E5 du 16 mars 2004 relative à la politique pénale en
matière de réponses alternatives aux poursuites et de recours aux
délégués du procureur
215 P. GOSSEYE, Médiateur pénal
et directeur de l'ABCJ de Pau, « La mise en oeuvre de la médiation
pénale par l'Association béarnaise de contrôle judiciaire
de Pau », AJ Pénal 2011, p. 221 in TADROUS (S.), op.cit., 2014,
p.256
216 Cf. J. FAGET, « La double vie de la
médiation », Droit et Société, n°29, 1995, p.
25-35, spéc. p. 33 in TADROUS (S.), op cit., 2014, p.265
74
En effet, conduire des personnes proches ou ceux qui nous
entourent devant la justice classique crée généralement de
la rancoeur difficilement oubliable dans les coeurs des perdants. Cette
alternative permet d'éviter ce genre de tensions dans les relations
entre les proches. En pareille circonstance, les protagonistes comprennent
mieux le recours à un tiers, médiateur, pour trouver des
solutions plus ou moins adaptées à la nature de leurs relations.
En clair, leur rencontre en présence d'un médiateur favorise
parfois l'apaisement des conflits alors qu'une sanction pénale peut les
attiser.
De surcroît, le médiateur doit être un
tiers impartial pour faciliter ce processus et garantir sa
crédibilité. Il advient que ce soit le procureur
lui-même217. Mais cette possibilité connait des
oppositions, le procureur n'étant pas tout à fait impartial
puisqu'il dispose de la possibilité de mettre en mouvement l'action
publique et serait alors chargé de rapprocher la preuve de la
culpabilité218. En tout état de cause, le procureur
dispose du choix discrétionnaire du tiers intervenant dont il
définit les limites de sa mission de façon précise et le
délai de la médiation219. Les parties peuvent
être assistées par des avocats.
Après l'analyse du domaine de ce mécanisme, il
convient d'examiner sa dimension réparatrice.
B - La dimension réparatrice
La prise en compte de la réparation du préjudice
causé à la victime est tellement importante dans cette
procédure que l'on a fait de la réparation du préjudice le
premier but. En effet, en droit sénégalais, la médiation
doit être « susceptible d'assurer la réparation du
dommage causé à la victime, de mettre fin au trouble
résultant de l'infraction, [ou] de contribuer au reclassement de
l'auteur des faits »220. La prise en compte de la
réparation commence déjà par
217 Article 32 de la loi n°2016-30 du 08
novembre 2016 modifiant la loi n°65-61 du 21 juillet 1965 portant Code de
procédure pénale sénégalais
218 BENILLOUCHE (M.), op.cit., p.98
219 Le droit sénégalais
précise le délai de la médiation. En effet l'article 32
al.6 de la loi n°2016-30 du 08 novembre 2016 modifiant la loi n°65-61
du 21 juillet 1965 portant Code de procédure pénale
sénégalais dispose « La tentative de médiation
pénale doit intervenir dans les 15 jours de la saisine du
médiateur ».
220 Article 32 al.3 de la loi n°2016-30
du 08 novembre 2016 modifiant la loi n°65-61 du 21 juillet 1965 portant
Code de procédure pénale sénégalais
75
l'accord requis de la victime avant de recourir à la
médiation. En effet, cette alternative n'est possible qu'à la
demande ou avec l'accord de la victime. Ainsi, la médiation
pénale met en avant la réparation du préjudice de la
victime.
A l'issue de la procédure, le médiateur adresse
un rapport au procureur de la République présentant les
étapes de l'opération, les objectifs poursuivis et le
résultat final. Le procureur ou son médiateur dresse un
procès-verbal de la réussite de la médiation signé
par lui et les parties et dont une copie est remise aux parties.221
Une médiation pénale réussie peut aboutir à des
accords divers. Il peut s'agir de l'engagement d'accomplir une prestation, du
versement des dommages-intérêts, de renoncer à un
comportement.
Cette procédure a également pour avantage
d'offrir une occasion aux victimes de s'exprimer suffisamment, d'exprimer leurs
colères, leurs angoisses et leurs incompréhensions. En sus, la
médiation pénale permet à la victime de ne pas ressentir
un sentiment de seconde victimisation. En effet, la seconde victimisation fait
référence à une perception de la victime, selon laquelle
la victime n'est pas acceptée ni soutenue par les
autres222.
La médiation pénale, comme on peut le constater,
est une mesure consensuelle dont la finalité est d'arriver à
trouver à travers un dialogue des mesures destinées à la
réparation du dommage causé. Elle prend essentiellement donc en
compte la réparation du préjudice de la victime. Mais il faut
noter que cette procédure, dans sa mise en oeuvre, doit consister aussi
à mettre fin au trouble résultant de l'infraction ou encore
contribuer au reclassement de l'auteur des faits. Par ailleurs, si la
médiation pénale se solde par un échec dans la
résolution du litige, le plaignant, sous réserve des poursuites
engagées par le procureur, pourra saisir les juridictions
répressives223. Cette possibilité permet de noter que
la médiation pénale n'a pas un effet extinctif de l'action
publique. En revanche, elle est une des causes de suspension de l'action
pénale. C'est la raison pour laquelle la médiation pénale
est parfois qualifiée de « classement sans suite sous condition
».224
L'analyse que voilà a permis de montrer comment la
médiation pénale met en avant la réparation du
préjudice de la victime. Cet avantage considérable nous
221 BENILLOUCHE (M.), op.cit., p.98
222 WIMMERS (J-A.), Introduction à la
victimologie, Presse de l'université de Montréal, 2003,
p.80
223 Article 32 in fine de la loi
n°2016-30 du 08 novembre 2016 modifiant la loi n°65-61 du 21 juillet
1965 portant Code de procédure pénale sénégalais
224 GARE (T.), GINESTET (C.), Droit
pénal Procédure pénale, Dalloz,
3ème éd., 2004, p.255
76
amène à espérer son admission et
l'admission de la composition pénale qui accorde plus ou moins le
même avantage à la victime.
Paragraphe 2 : L'institution espérée de
la composition pénale
La composition pénale constitue aussi une alternative
à la poursuite dans la mesure où elle ne peut être
proposée que si l'action publique n'a pas encore été
exercée. Elle suspend donc la poursuite jusqu'à l'expiration du
délai imparti pour son exécution. Comme les autres mesures
alternatives aux poursuites, la composition pénale a pour but de limiter
l'encombrement des juridictions et diminuer le nombre des classements sans
suite. La différence notable tient à l'intervention d'un juge du
siège qui vient valider l'accord résultant de cette
mesure225.
La composition pénale consiste, pour le procureur de la
République, tant que l'action publique n'a pas été mise en
mouvement, à proposer ou faire proposer, par une personne
habilitée, à celui qui reconnait avoir commis certains
délits ou certaines contraventions, d'exécuter une ou plusieurs
mesures présentant le caractère d'une sanction.226
Cette mesure ne figurant pas dans l'arsenal juridique répressif
ivoirien, il est judicieux de la présenter (A) et de mettre en
lumière sa dimension réparatrice du préjudice subi par la
victime (B). Par ailleurs, l'analyse qui suit trouve son fondement en droit
comparé.
A- La présentation
Si le législateur ivoirien n'a pas prévu la
composition pénale, en revanche, il y a une autre procédure qui
n'est pas à confondre avec celle-ci. Il s'agit de l'amende de
composition prévue par les articles 534 et s. du CPP. L'art. 534
prescrit que : « avant toute citation devant le tribunal de simple
police, le juge dudit tribunal saisi d'un procès-verbal constatant une
contravention, peut faire informer le contrevenant de la faculté qu'il a
de verser, à titre d'amende de
225 TADROUS (S.), op.cit., p.268
226 DESPORTES (F.), LAZERGES-COUSQUER (L.),
op.cit.2015, p.813
77
composition, une somme qui est fixée par le juge
conformément au mode de calcul déterminé par décret
». Ainsi, le paiement de cette somme éteint l'action publique.
Cette mesure a un domaine limité contrairement à la composition
pénale qui a un domaine élargi.
La présentation de la composition pénale
consistera donc à analyser son domaine d'application, les mesures
encourues et la procédure requise.
Relativement au champ d'application, cette procédure
est appliquée lorsque les faits en cause sont constitutifs de
délits ou de contraventions227. En droit français, ces
délits doivent être punis, à titre principal, d'une peine
d'amende ou d'une peine d'emprisonnement inférieure ou égale
à cinq ans228. Ainsi échappent à la composition
pénale les délits d'homicide involontaire, les délits de
presse et les délits politiques229. Les crimes et les
délits punis d'une peine d'emprisonnement supérieure à
cinq ans échappent également au domaine de la composition
pénale. Cette exclusion peut se justifier par le fait que ces
infractions sont sévèrement réprimées et
nécessitent l'ouverture d'une information judiciaire qui implique
naturellement l'intervention du juge d'instruction. En clair, en raison de la
gravité ou de la complexité des infractions exclues, leur
jugement doit se faire selon la procédure traditionnelle.
La composition pénale est une mesure proposée
par le procureur de la République. Mais sa mise en oeuvre n'est possible
que si l'auteur présumé accepte en reconnaissant tout ou partie
des faits pour lesquels il est mis en cause. Le délinquant qui accepte
cette alternative encourt plusieurs mesures.230 Jl peut lui
être interdit de ne pas recevoir ou rencontrer pour une durée
déterminée la ou les victimes de l'infraction
désignées par le procureur de la République ou ne pas
entrer en relation avec elles ou encore ne pas paraître dans certains
lieux pendant une certaine durée. Ces mesures, comme on peut le
constater, intéressent particulièrement la victime. Mais en plus
de ces mesures, le procureur peut demander au délinquant de verser une
amende de composition au Trésor public ou de remettre son
véhicule pour une durée déterminée à des
fins
227 Article 41-3 du code de procédure pénale
(France), Paris, Dalloz, 61ème éd.,2020, p.181, 182
228 Article 41-2 du code de procédure pénale
(France), op.cit., p.178,179,180,181
229 BENILLOUCHE (M.), op.cit., p.100
230 Les mesures issues de la composition pénale sont
multiples. Nous ne pourrons produire dans le cadre de ce travail une liste
exhaustive. En droit français ces mesures sont définies par
l'article 41-2 du code français de procédure pénale.
78
d'immobilisation ou de ne pas quitter le territoire national
ou encore de remettre à la justice son permis de conduire.
Relativement à la procédure, le
délinquant à qui l'on propose la composition pénale doit
être informé de son droit de se faire assister par un conseil. La
validation de la proposition est subordonnée à son acceptation
par le délinquant. Après l'acceptation, le procureur de la
République saisit par requête le président du tribunal
compétent aux fins de validation. Le président de la juridiction
peut soit valider la proposition, dans ce cas, elle est mise en
exécution, soit la rejeter, dans ce cas, elle devient caduque. En toute
hypothèse, sa décision prend la forme d'une ordonnance
insusceptible de recours.
Lorsque la victime est identifiée, le président
du tribunal peut procéder à son audition avant d'homologuer
l'ordonnance validant la composition. Aussi, La décision de validation
de la mesure de composition pénale rendue par le Président lui
est notifiée.231
Si l'auteur exécute la composition pénale,
l'action publique est éteinte. Mais en cas de refus de la personne ou
d'inexécution de la composition, le parquet met en mouvement l'action
publique.
Par ailleurs, après avoir présenté la
composition pénale, analysons maintenant sa dimension
réparatrice.
B - La prise en compte de la réparation
La réparation du préjudice subi par la victime
est prise en compte dans la procédure de la composition pénale en
ce sens qu'elle constitue une condition de mise en oeuvre de cette alternative.
C'est ce qui ressort du projet de loi français qui portait sur cette
alternative. En effet, « lorsque la victime est identifiée, et
sauf si l'auteur des faits justifie de la réparation du préjudice
commis, le procureur de la République doit proposer à ce dernier
de réparer également les dommages commis par l'infraction
» 232.
231 Cf Le village de la justice, «
Qu'est-ce que la composition pénale ? » [En ligne]
https://www.village-justice.com/articles/est-que-composition-penale,26681.html
consulté le 15 octobre 2023 à 23h33
232 Projet de loi n° 434 (1997-1998)
relatif aux alternatives aux poursuites et renforçant
l'efficacité de la procédure pénale, Elisabeth GUIGUOU,
ministre de la Justice, Garde des Sceaux, déposé au Sénat
le 14 mai 1998 in TADROUS (S.), op.cit.p.269
La composition pénale est, en effet, « une
justice réparatrice qui favorise la victime et où le procureur
garde le pouvoir de décision mais la réparation du
préjudice constitue un enjeu essentiel de l'issue de la
procédure, puisque la réparation est d'un certain point de vue la
sanction »233.
En outre, la composition pénale ne peut être
valablement mise en oeuvre que lorsqu'elle inclue une dimension
réparatrice du dommage causé à la victime dont
l'identité est connue.
En effet, le procureur de la République doit
obligatoirement proposer au délinquant la réparation du dommage
qu'il a causé à la victime et ce, dans un délai
relativement court. Cette proposition peut consister en la remise en
état d'un bien endommagé par la commission de l'infraction. Cette
alternative permet à la victime d'obtenir rapidement la
réparation de son dommage. En sus, parmi les mesures que propose le
procureur au délinquant dans le cadre de cette procédure,
certaines intéressent particulièrement la victime et visent
à assurer sa protection. C'est le cas par exemple de l'interdiction qui
peut être faite au mis en cause de recevoir ou de rencontrer la victime,
en cas d'infraction commise au sein de la famille, de résider hors du
domicile ou de la résidence du couple et, le cas échéant,
de s'abstenir de paraître dans le domicile ou la résidence du
couple ou aux abords immédiats de celui-ci. Cette dernière
disposition est aussi applicable lorsque l'infraction a été
commise par l'ancien compagnon de la victime et le domicile concerné est
donc celui de la victime234. Cela favorise la réparation du
préjudice dans une certaine sécurité.
79
233 S. JACOPIN, Le renouveau de la sanction
pénale, évolution ou révolution ? préc., p.108
234 TADROUS (S.), La place de la victime dans le
procès pénal, Thèse, Université Montpellier I,
2014, p.270
80
CONCLUSION
Somme toute, cette étude a consisté à
analyser la protection de la victime devant les juridictions
répressives. Nous nous sommes attelés au cours de notre analyse
à formuler des recommandations, mieux à suggérer des
pistes de solutions qui nous ont semblé pertinentes pour renforcer la
protection de la victime. Cette réflexion s'est faite sur la base des
insuffisances qu'il nous a été donné de constater pendant
notre étude et cela a permis de répondre à notre question
de recherche.
Il en ressort que le législateur ivoirien, depuis le
Code de procédure pénale de 1960 jusqu'à celui de 2018 tel
que modifié par la loi n°2022-192 du 11 mars 2022, a cherché
progressivement à protéger la victime dans le procès
pénal. Toutefois cette protection demeure limitée.
Ainsi, la recherche de la protection de la victime se laisse
percevoir à travers l'intégration de celle-ci dans la
procédure répressive.
En effet, l'effectivité de cette intégration
s'est vue assurer par une pluralité des moyens dont dispose la victime
pour se constituer partie civile ; devenant par là une partie à
part entière au procès.
Nous avons constaté que ces procédés sont
de deux types. D'un côté, il y a ceux qui, pour assurer
l'intégration de la victime dans la procédure pénale,
mettent en mouvement l'action publique. Il s'agit de la citation directe
délivrée à la requête de la partie civile et de la
plainte avec constitution de partie civile. De l'autre côté, il y
a ceux qui permettent à la victime d'intégrer la procédure
répressive alors que les poursuites sont déjà
déclenchées par le ministère public ou par une autre
partie civile. Il s'agit des procédés de constitution de partie
civile ordinaire et de la déclaration de partie civile. Ces
modalités d'intégration ont permis à la partie
lésée d'éviter les inerties éventuelles du chef du
parquet quant au déclenchement des poursuites et des filtrages du chef
des enquêtes quant à l'ouverture d'une information judiciaire.
De même, la victime, une fois constituée partie
civile, s'est vue accorder un éventail de droits dont l'utilisation
n'avait d'autre but ultime que de concourir à sa protection, à la
protection de ses intérêts incluant la réparation du
préjudice qu'elle a subi du fait de la commission d'une infraction. A
cet effet, elle bénéficie d'une part, des droits qui lui
facilitent la procédure pénale à savoir le droit de savoir
et le droit à l'assistance. Et d'autre part, la partie
lésée bénéfice des droits
81
qui assurent sa participation à la manifestation de la
vérité. Il s'agit des droits de concourir à l'instruction,
de produire des preuves en justice, de participer aux débats
contradictoires et d'exercer des voies de recours.
De ce qui est de la limitation de la protection de la partie
lésée dans la procédure répressive, nous avons
noté quatre aspects.
Le premier est relatif à l'intégration
même de la victime dans le procès pénal. En la
matière, la victime se heurte aux difficultés procédurales
et surtout économiques. Ces obstacles ont privé et privent un bon
nombre de victimes du prétoire pénal. Pour assurer
l'intégration de la victime, nous avons proposé la mise en place
de critères de fixation de la consignation. Cela éviterait les
consignations trop coûteuses. Dans le même ordre d'idée, il
importe d'améliorer les conditions d'accès à l'assistance
judiciaire pour les victimes à ressources insuffisantes.
Le deuxième aspect concerne l'ineffectivité du
principe de l'égalité des armes entre les parties qui est l'un
des principes garantissant un procès équitable aux parties.
Le troisième aspect porte sur le traitement
inadéquat réservé à la victime dans les
procédures alternatives aux poursuites. Nous avons proposé plus
d'implication de la victime dans les procédures de transaction sur
l'action publique et de comparution sur reconnaissance préalable de
culpabilité. Nous avons également souhaité l'admission des
procédures qui mettent en avant la réparation du préjudice
subi par la victime telles que la médiation pénale et la
composition pénale.
Le dernier aspect touche au système de
sécurité de la victime pendant le processus qui nécessite
un renforcement pour éviter une victimisation secondaire de celle-ci. A
ce propos, nous avons suggéré que le législateur ivoirien
s'intéresse à la visioconférence et à la
possibilité pour la victime de garder l'anonymat dans certains cas au
cours de la procédure.
Il résulte de tout ce qui précède que la
protection recherchée de la victime est nécessairement
perfectible. A cet effet, le législateur ivoirien, lors des reformes
à venir, pourra tenir compte de nos critiques mais aussi et surtout de
nos suggestions et recommandations. En substance, tout ceci n'a qu'un seul but,
celui de parvenir à une protection suffisante de la victime qui occupe
encore une place secondaire dans la procédure pénale en
Côte d'Ivoire.
Au sortir de cette étude, il est clair que notre
analyse n'a pas pu cerner tous les aspects de la protection de la victime, de
ses droits et de ses intérêts. A cet effet,
82
d'autres réflexions peuvent être menées
sur la protection de la victime au moment de l'exécution de la
décision de condamnation de l'auteur de l'infraction surtout si celui-ci
est insolvable235.
235 Depuis les reformes du Code de
procédure pénale de 2018, la partie civile ne
bénéficie plus de la mesure de contrainte par corps. Cette mesure
lui était accordée sous l'empire du Code de procédure
pénale de 1960, en son article 699, tel que modifié par la loi
n°69-371 du 12 août 1969. La suppression de ce moyen de pression, a
donc privé la victime d'un éventuel paiement effectif et d'autres
garanties de paiement tels que la consignation, le cautionnement solidaire et
la sûreté réelle.
83
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victimologie, Presse de l'université de Montréal, 2003,
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4- THESES
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5- TEXTES DE LOI
1- TEXTES ETRANGERS
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2020, 2791p.
- Loi n°2016-30 du 08 novembre 2016 modifiant la loi
n°65-61 du 21 juillet 1965 portant Code de procédure pénale
sénégalais
85
2- TEXTES NATIONAUX
- Loi n°2016-886 portant Constitution du 08 novembre
2016, J.O.R.C.I., n°16 du 19 novembre 2016 telle que modifiée par
la loi constitutionnelle n°2020-348 du 19 mars 2020, J.O.R.C.I. n°23
du 19 mars 2020
- Loi n°2019-574 du 26 juin 2019 portant code
pénal, J.O.R.C.I., n°09 spécial du 10 juillet 2019 telle que
modifiée par la loi n°2021-893, J.O.R.C.I., n°04 du 13 janvier
2022
- Loi n°2018-975 du 27 décembre 2018 portant code
de procédure pénale, J.O.R.C.I., n°4 spécial du 13
mars 2019 telle modifiée par la loi n°2022192 du 11 mars 2022,
J.O.R.C.I., n°28 du 07 avril 2022
- Loi n°72-833 du 21 décembre 1972 portant Code de
procédure civile, commerciale et administrative, J.O.R.C.I., n°7 du
05 février 1973
- Loi n°60-366 du 14 novembre 1960 portant Code de
procédure pénale, J.O.R.C.I., n°12 du 24 février
1961
- Décret n°2016-781 du 12 octobre 2016 fixant les
modalités d'application de la loi de 72 relativement à
l'assistance judiciaire, J.O.R.C.I., n°2 du 02 janvier 2017
6- JURISPRUDENCES
- C.A. Daloa, 23 juin 1999, R.J.C.A.T. n°4-2000, p.38
- Arrêt n° 262/98 du 04 mai 1998 de la cour d'appel
de Bouake in KOUADJANE (A. N.), Jurisprudence en matière pénale,
Éd. LOIDICI, p.229
- Trib. Correct. Abidjan, Section de Tiassalé, jugement
n°17 du 21 janvier 1997, R.J.C.A.T., n°2-2000, p.130
- Crim. 9 novembre 1995, Bull. n°345
- Cour suprême Chambre judiciaire Arrêt n°
1884 du 7 janvier 1984 (CAB) In KOUADJANE (A. N.), Jurisprudence en
matière pénale, Éd. LOIDICI, p. 100
- Cass., Crim., 8 mai 1979, Bull. crim. n°165
- CA Aix-en-Provence,23 mai1961, D. 1961, p.484
86
- Cass. crim., 25 juin 1937, D.P., 1938. 4, note Leloir - Cass.
crim., 18 avril 1929, D.P. 1930, I, 40
- Crim, 8 décembre 1906, D 1907, I, 207
7- DICTIONNAIRES
- CORNU (G.), Vocabulaire
juridique, Association Henri Capitant, PUF, 12ème
éd., 2018, 2300p.
- GUINCHARD (S.), DEBARD (T.), Lexique
des termes juridiques, Paris, Dalloz, 25ème éd., 2018, 1943
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- GUINCHARD (S.), DEBARD (T.), Lexique
des termes juridiques, Paris, Dalloz, 26ème éd., 2019, 1144
p.
- REY (A.), Le Robert Micro-poche,
Paris, Le Robert, éd. 2018, avril 2018, 1657p.
8- AUTRE DOCUMENT
-RAPPORT
- Prof. Robert ROTH Et. Al., « La
protection de la victime dans la procédure pénale », rapport
d'évaluation rédigé sur mandat de l'Office
fédéral de la justice, Centre d'Etude, de Technique de
d'Evaluation Législatives Faculté de droit, Université de
Genève, octobre 1997, 57p.
9- WEBOGRAPHIE
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civile dans le procès pénal » [en ligne]
https://www.soulie-avocat.fr/categories/actualites-102/art.s/les-droits-de-la-partie-civile-dans-le-proces-penal-8.htm
, consulté le 17 octobre 2023 à 23h23
- BONFILS ( PH. ), « L'action pénale
de la victime, une action en justice innomée au régime juridique
clairement défini », in Institut pour la
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crime et le traitement des délinquants », consultable
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la composition pénale ? » [En ligne]
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consulté le 15 octobre 2023 à 23h33
- Les pénalistes en herbe, « La
victime, grande oubliée du procès pénal ? » [En
ligne]
https://www.lespenalistesenherbe.com/post/la-victime-grande-oubli%C3%A9e-du-proc%C3%A8s-p%C3%A9nal,
consulté le 05 octobre 2023 à 09h39
88
TABLE DES MATIERES
DEDICACE I
REMERCIEMENTS II
AVERTISSEMENT III
SIGLES ET ABREVIATIONS IV
SOMMAIRE VI
INTRODUCTION 1
PREMIERE PARTIE : UNE PROTECTION RECHERCHEE 9
CHAPITRE 1 : LA RECHERCHE PAR LA PLURALITE DES MODALITES
D'INTEGRATION DE LA VICTIME DANS LA PROCEDURE PENALE .... 10
Section 1 : La dualité des modalités
d'intégration par voie d'action 11
Paragraphe 1 : La citation directe 11
A - Un instrument utile au regard de ses effets 12
B- Un instrument inadéquat 14
Paragraphe 2 : La plainte avec constitution de partie civile
17
A - Un mode approprié 17
B- Un mode performant 19
Section 2 : La dualité des modalités
d'intégration par voie d'intervention 21
Paragraphe 1 : La constitution de partie civile ordinaire 22
A - Un procédé convenable 22
B - Des effets en cas de recevabilité 24
Paragraphe 2 : La déclaration de partie civile 25
A - La déclaration avant l'audience de jugement de
l'action publique 25
B - La déclaration à l'audience de jugement 26
CHAPITRE 2 : LA RECHERCHE PAR LA PLURALITE DES DROITS
RECONNUS A LA VICTIME PENDANT LA PROCEDURE PENALE 28
Section 1 : Les droits de facilitation de la procédure
à la victime 29
89
Paragraphe 1 : Le droit de savoir 29
A- Le droit à l'information 29
B - Le droit d'accès aux dossiers de la
procédure 31
Paragraphe 2 : Le droit à l'assistance 33
A - L'assistance d'un avocat 33
B - L'assistance judiciaire 35
Section 2 : Les droits de participation à la
manifestation de la vérité 37
Paragraphe 1 : Les véritables droits d'intervention
participant à la recherche de
la vérité 37
A- Le droit de concourir à l'instruction 37
B- Le droit de produire des preuves en justice 39
Paragraphe 2 : Le droit de discussion de la procédure
40
A- Le droit de participation aux débats
contradictoires 41
B- Le droit de contestation 42
DEUXIEME PARTIE : UNE PROTECTION LIMITEE 46
CHAPITRE 1 : LA LIMITATION DANS LA PARTICIPATION DE LA
VICTIME A LA PROCEDURE PENALE 47
Section 1 : L'intégration partielle de la victime dans
la procédure 48
Paragraphe 1 : Les obstacles à la mise en mouvement de
l'action publique par la
victime 48
A- Les obstacles d'ordre procédural 48
B- Les obstacles d'ordre économique 51
Paragraphe 2 : L'ineffectivité du principe de
l'égalité des armes 54
A- La signification du principe 54
B- Le maintien des prérogatives
disproportionnées entre les parties 55
Section 2 : La nécessité de renforcement de la
sécurité de la victime 56
Paragraphe 1 : L'admission souhaitée de la
visioconférence 57
90
A- La dimension sécuritaire de la
visioconférence 57
B - L'encadrement de la mise en oeuvre de la
visioconférence 58
Paragraphe 2 : L'admission souhaitée de la
possibilité de garder l'anonymat 59
A - Une mesure de sécurité 60
B - Un recours encadré 61
CHAPITRE 2 : LA LIMITATION DANS LES PROCEDURES
ALTERNATIVES AUX POURSUITES 63
Section 1 : La passivité de la victime dans les
procédures accélérées prévues 64
Paragraphe 1 : Dans la procédure de transaction sur
l'action publique 64
A - Une opération entre le procureur de la
République et le mis en cause 65
B - Un traitement inadéquat de la victime 67
Paragraphe 2 : Dans la procédure de comparution sur
reconnaissance préalable
de culpabilité (CRPC) 69
A - Le recours à la CRPC soumis aux volontés du
procureur de la République et
du mis en cause 69
B - Le traitement inapproprié de la victime 71
Section 2 : L'absence de procédures privilégiant
la réparation du préjudice de la
victime 72
Paragraphe 1 : L'instauration espérée de la
médiation pénale 72
A- Le domaine 73
B - La dimension réparatrice 74
Paragraphe 2 : L'institution espérée de la
composition pénale 76
A- La présentation 76
B - La prise en compte de la réparation 78
CONCLUSION 80
BIBLIOGRAPHIE 83
TABLE DES MATIERES 88
91
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