CONCLUSION DU CHAPITRE
En somme, dans ce chapitre, nous avons fait une
présentation des déchets et de leur gestion suivant une approche
conceptuelle et aussi contextuelle. Pour y parvenir, nous nous sommes tout
d'abord attardés sur les généralités des
déchets, et la présentation des caractéristiques des
déchets solides ; par la suite nous avons fait d'une part une
présentation de l'état des lieux de la production des
déchets dans les PED et au Cameroun et d'autre part celle des
systèmes de gestion des DS. Toutefois, comme nous l'avons montré
dans ce chapitre il n'est pas évident de résoudre le
problème de production de déchet car c'est un
phénomène qui est fortement corrélé avec la
croissance démographique et l'urbanisation des villes.
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ANALYSE DE L'EVOLUTION DES MODES DE GESTION DES DECHETS
SOLIDES URBAINS PAR LES MENAGES AU CAMEROUN ENTRE 2007 ET 2014
CHAPITRE II :
ANALYSE THEORIQUE DU CHOIX DU MODES DE GESTION DES
DECHETS SOLIDES URBAINS PAR LES
MENAGES
La littérature relative au comportement des
ménages face aux choix du mode de gestion des DS est abondante et fait
l'objet des polémiques. Même si l'analyse de ce comportement
permet d'évaluer les déterminants du choix d'un mode efficace
d'évacuation des déchets ménagers, il n'en reste pas moins
que les résultats de cette analyse demeurent mitigé. Ayant pour
fondement la théorie du choix social, plusieurs autres théories
ont vu le jour en rapport avec ce sujet.
L'objectif de ce chapitre est de passer en revue les
différents travaux en rapport avec le mode de gestion des déchets
solides par les ménages. Pour ce faire deux sections dont la
première sera consacrée aux travaux théoriques et la
seconde aux différents travaux empiriques.
II.1. LES FONDEMENTS THEORIQUES DES MODES DE GESTION
DES DECHETS SOLIDES
La mobilisation de quelques théories dans notre travail
de recherche nous permettra de part et d'autre de montrer les relations entre
les ménages et le choix des différents modes de gestion des
déchets qu'ils produisent. Plusieurs approches peuvent expliquer notre
travail de recherche, mais la fondamentale est celle la théorie des
préférences révélées de Samuelson
(1938) considérée comme une théorie
néoclassique.
II.1.1. La théorie des préférences
révélées
Les modèles économiques de la tradition
néoclassique se fondent généralement sur les
préférences individuelles des agents concernés et,
rarement sur les préférences sociales. Ainsi, Samuelson a
proposé en 1938 de fonder l'analyse des choix individuels sur
l'observation des choix effectifs des agents économiques, plutôt
que sur les hypothèses à priori portant sur les
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SOLIDES URBAINS PAR LES MENAGES AU CAMEROUN ENTRE 2007 ET 2014
relations de préférence ou de fonctions de
satisfaction hypothétiques. Il s'agit donc dans cette théorie de
comprendre quelles relations de préférences correspondent aux
choix observés et non plus de déduire d'un système
d'axiomes sur les préférences, les choix qui peuvent en
découler.
Samuelson (1938) a proposé de déduire les
préférences des consommateurs en observant leurs choix.
Plutôt que questionner les consommateurs sur leurs
préférences, en leur proposant plusieurs paniers de biens
possibles, la théorie des préférences
révélées se limite uniquement à l'observation de
leur comportement. Supposons que ces consommateurs soient des ménages ;
Dans le mode d'évacuation des déchets à choisir, le
ménage révèle ses préférences. Supposons que
le ménage choisi d'évacuer ses déchets dans un bac
à ordure plutôt que de les jeter dans la nature. Si le bien A
coûte plus cher ou est aussi cher que le bien B, alors le consommateur
révèle qu'il préfère le bien A au bien B. En
supposant que ses préférences ne changent pas, il ne faut pas que
lors d'un autre achat il révèle le contraire. Pour que son
comportement soit cohérent, Samuelson (1938) propose « l'axiome
faible des préférences révélées »
suivant : Si A est préféré à B alors B ne doit pas
être préféré à A dans une même
situation de prix et de revenu. Avec cet axiome, la relation de
préférence doit être asymétrique, de même
qu'il réussit à déduire l'homogénéité
de degré zéro de la fonction de demande et le signe
négatif de l'effet de substitution.
u ( x )
Pour traiter le cas d'un nombre quelconque de biens Houthakker
(1950) a l'idée toute naturelle de suggérer un renforcement
itératif de l'axiome de Samuelson. Il propose alors l'axiome fort des
préférences révélées suivant : soit
RD la relation « directement préféré
à » et
différents biens. Si ,alors ne doit pas
être directement préféré à . Avec cet
axiome, la relation de préférence doit être acyclique.
Dans l'analyse économique il est courant de
synthétiser le comportement du consommateur et
de décrire ses préférences au moyen d'une
fonction d'utilité . Les choix de consommation
sont classiquement décrits par la maximisation d'une
fonction d'utilité directe quasi concave dans un ensemble
budgétaire satisfaisant la contrainte de revenu.
Dans ce contexte, un ménage effectue ses choix
d'élimination des déchets solides afin de maximiser simplement
son utilité sous contrainte de son revenu. Si le ménage choisit
le mode A plutôt que le mode B, il révèle ainsi
préféré le mode A au mode B. Les ménages font face
à
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SOLIDES URBAINS PAR
?max U(x, y)
p x p y ? R
1 ( ) ( )
LES MENAGES AU CAMEROUN ENTRE 2007 ET 2014
un prix pour bénéficier du service de collecte
des ordures ménagères. En effet, même si les ménages
ne paient pas directement pour bénéficier dudit service, ils le
font indirectement via la taxe d'enlèvement des ordures
ménagères (TEOM). Dans ce contexte, on suppose qu'un prix
payé par le ménage pour l'élimination de ses ordures
ménagères existe, et est unique quel que soit l'alternative qu'il
choisit par la suite. Au demeurant, s'il semble pertinent de penser que dans la
gestion domestique des déchets ce qui influence plus l'utilité
d'un ménage est le temps ou l'effort à consacrer à chaque
mode d'évacuation (désutilité, sacrifice, coût
d'opportunité), toute analyse qui vise à remplacer les prix par
le temps ou l'effort aboutira à des difficultés d'analyses qui
dépassent le cadre de ce travail.
sc
? ? ?
Ainsi, Selon Varian (2003), l'objectif du consommateur
rationnel est la maximisation de son utilité, sous sa contrainte
budgétaire R. Supposons qu'il se débarrasse des quantités
et à
travers deux alternatives d'évacuation, son
problème peut donc s'écrire sous la forme :
Avecla quantité de déchets
déversée dans les bacs à ordures, la quantité
déversée dans
les décharges sauvages et la quantité totale des
déchets du ménage à évacuer. La
résolution
de ce programme permet d'obtenir les quantités
optimales et qui maximisent son utilité.
Contrairement à la théorie néoclassique
du consommateur où le ménage tire directement satisfaction du
mode d'évacuation qu'il choisit, la nouvelle théorie du
consommateur, impose aux ménages l'intégration d'autres
paramètres à l'instar des caractéristiques des
différents modes d'évacuation pour effectuer leurs choix.
II.1.2. La nouvelle théorie économique du
consommateur de Lancaster
Selon la nouvelle théorie microéconomique du
consommateur de Lancaster (1966), l'utilité est portée sur les
caractéristiques ou les propriétés des biens, plutôt
que directement sur les biens eux-mêmes. Ainsi, le bien n'est plus le
principal argument entrant dans la fonction d'utilité du consommateur
mais plutôt les caractéristiques contenues dans ce bien. Ce ne
sont pas les
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ANALYSE DE L'EVOLUTION DES MODES DE GESTION DES DECHETS
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biens en tant que tels qui fournissent de l'utilité aux
consommateurs, mais leurs caractéristiques intrinsèques.
Les biens possèdent des caractéristiques
objectives alors que les individus ont des préférences
subjectives pour ces caractéristiques sources d'utilité du
consommateur. Ainsi, lorsqu'on achète une voiture, ce n'est pas la
voiture elle-même qui procure une satisfaction à son possesseur,
mais les services rendus par tel modèle de voiture sous forme de
confort, prestige, vitesse etc...
Ainsi, nous pouvons dire que l'utilité des
ménages dans le cadre de la gestion des déchets ménagers
n'est pas directement affectée par le choix d'une des alternatives
d'évacuation des ordures ménagères, mais plutôt par
les caractéristiques que possèdent ces différentes
alternatives. Par exemple, celle de valoriser ses déchets, celle de la
capacité à détériorer l'environnement, ou encore
celle de la disposition finale des déchets (gérer soi-même
ou confier ses déchets aux services de collecte)
En fait si, lors de l'activité de gestion des
déchets, pour se débarrasser de leurs ordures les ménages
choisissent tout en maximisant leur satisfaction de déposer leurs
ordures soit dans les bacs à ordures (ou attendre le passage des camions
ramasseurs), soit dans des décharges sauvages, soit de procéder
au recyclage, ce qui influence en réalité leur choix et leur
satisfaction ce sont les propriétés que possèdent les
différentes alternatives d'évacuation.
Dans ce sens, un ménage qui intègre fortement
les variables environnementales12 peut choisir de confier ses
déchets à HYSACAM13 ou de se débarrasser de
ceux-ci en les recyclant, plutôt que de les jeter dans des
décharges sauvages. De plus, si le même ménage
intègre la caractéristique « valorisation des déchets
», il choisira alors finalement de les recycler plutôt que de les
confier à HYSACAM. D'un autre point de vue, un ménage qui
préfère gérer lui-même ses
déchets14 sera enclin à les recycler ou à les
déposer dans la nature, plutôt que de les
12 Et dont la caractéristique est
la capacité à dégrader l'environnement.
13 On fait l'hypothèse ici que
les modes de traitement des déchets produisent moins
d'externalités négatives que les déchets ménagers
déposés dans la nature.
14 Ici, la caractéristique est
donc la « disposition finale des déchets »
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SOLIDES URBAINS PAR LES MENAGES AU CAMEROUN ENTRE 2007 ET 2014
confier aux services de collecte. En outre, si le même
ménage n'intègre pas la caractéristique environnementale,
il décidera finalement de déposer ses déchets dans la
nature.
A l'aube de la nouvelle théorie du consommateur de
Lancaster, il existe une possibilité d'expliquer, de prévoir et
d'influencer les choix d'élimination des ménages. Puisque, ces
choix sont fonction de la perception qu'ont les ménages des
caractéristiques des différentes alternatives.
Ici, les ménages font face à plusieurs
alternatives d'évacuation de leurs ordures ménagères. A
cet effet, Gourieroux (1989) souligne que la meilleure façon de
décrire le comportement de l'individu face à plusieurs
alternatives est de supposer que l'individu fait des choix rationnels,
représentables par une fonction d'utilité aléatoire.
II.2. TRAVAUX EMPIRIQUES SUR LES MODES DE GESTION DES
DECHETS SOLIDES ;
La mobilisation de quelques travaux empiriques dans notre
travail de recherche nous permettra de part et d'autre de montrer les relations
effectives entre les ménages et le choix des différents modes de
gestion des déchets qu'ils produisent.
II.2.1. Travaux conduits à l'échelle
internationale
Babio & Houssou (1996.) ont mené une étude
dans quatre principales villes du Benin qui étudie avait pour objectif
d'analyser les facteurs qui influencent le mode d'évacuation des DSM
dans le nord du Benin à travers les exemples des villes de Parakou,
Djougou, Kandi et Malanville. Dans les pays développés
contrairement aux PED, l'élimination des déchets est un peu
contrôlée. Les grandes villes d'Afrique se caractérisent
par une faible collecte des DS variable d'une ville à une autre. A titre
d'exemple on a 60% à Dakar, 56% Conakry, 55% à Abidjan, 36%
à Ouagadougou, 10% à Dar-Es-Salam et au Benin 10%. Ces
données sont corroborées avec les travaux selon lesquels 78% de
la population du Benin rejetait ses ordures dans la nature. Or depuis
l'avènement de la décentralisation au Benin c'est aux
collectivités territoriales décentralisées que revient la
charge prérogative en matière d'environnement, d'hygiène,
de collecte et de traitement des déchets. Mais les quatre villes
retenues pour notre étude rencontrent d'énormes
difficultés à assurer la pré-collecte, la collecte et
l'élimination
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SOLIDES URBAINS PAR LES MENAGES AU CAMEROUN ENTRE 2007 ET 2014
des déchets produits par les ménages. En effet
malgré l'existence des acteurs privés les ménages
continuent d'évacuer plus leurs déchets dans le nature. Afin
d'identifier les principales caractéristiques du mode
d'évacuation des DSM dans les villes étudiées des analyses
descriptives ont été effectuées. Le test de khi-deux a
été utilisé pour apprécier l'existence ou non d'une
relation statistiquement significative entre le mode d'évacuation et les
variables retenues au seuil de significativité de 5%. Afin de
déterminer l'impact réel de chacune des variables à
étudier et d'identifier celles qui ont plus d'effet sur le mode
d'évacuation des déchets, des analyses de régression
logistiques ont été utilisées. Cette étude a abouti
à plusieurs résultats :
? Le mode de gestion des déchets n'est pas fonction de
la ville considérée. Le comportement des ménages en
matière de gestion des déchets sont presque identiques d'un
centre urbain à un autre.
? Dans l'ensemble des quatre villes le mode
d'évacuation des déchets n'est pas très lié au sexe
car aucun lien statistique n'a été décelé entre le
mode d'évacuation des déchets et le sexe Pv= 0,737>0,05. En
revanche dans la ville de Parakou révèle un lien très
hautement significatif entre le sexe et le mode d'évacuation des
déchets (Pv=0,000 <0,05) ; en effet les femmes ont une tendance plus
élevée que les hommes (68,34%) à rejeter les
déchets dans la nature à Parakou que dans les autres centres
urbains (Djougou, Kandi et Malanville).
? Le mode d'évacuation des déchets n'est pas
fonction de l'âge du chef de ménage PV= 0,580> 0,05). Par ville
les résultats obtenus présentent quelques différences ;
à Parakou un lien très hautement significatif a été
détecté entre l'âge du chef de ménage et le mode
d'évacuation des déchets. En effet les chefs de ménages
âgés entre 15 à 32 ans (75%) puis de 33 à 44 ans
plus que l'autre tranche d'âge 45 et plus ont une forte propension
à évacuer dans la nature.
? Les enquêtes menées auprès de 585 chefs
de ménages à Parakou, à Djougou, à Kandi et
à Malanville au nord du Bénin révèlent que le mode
d'évacuation des déchets est étroitement lié au
niveau d'instruction des chefs ménages. En effet, à 100 % un lien
associatif très hautement significatif a été
observé entre l'évacuation des déchets et le niveau
d'instruction des chefs de ménages au niveau global (P-Value = 0,000
<0,05). Il en est de même dans les villes de Parakou (P-Value = 0,035
<0,05) et de Djougou (P-Value = 0,001<0,05). Ainsi, plus les chefs de
ménages sont instruits moins ils
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SOLIDES URBAINS PAR LES MENAGES AU CAMEROUN ENTRE 2007 ET 2014
rejettent leurs déchets dans la nature. Toutefois, ces
résultats ne sont pas vérifiés à Kandi (P-Value =
0,813>0,05) et à Malanville (P-Value = 0,291>0,05). En effet, dans
ces agglomérations la quasi absence des structures de pré
collecte est manifeste. Ainsi toutes les catégories
socioprofessionnelles faute d'autres alternatives, évacuent leurs DSM
directement dans la nature.
> L'évacuation des déchets dans la nature
n'est pas liée à la taille des ménages.
> Le statut matrimonial des chefs des ménages n'a
aucune influence dans le mode d'évacuation des déchets. En effet,
qu'ils soient mariés, célibataires, divorcés ou
veufs/veuves, les chefs de ménages ont une forte propension à
évacuer leurs déchets directement dans la nature. Le test de khi2
réalisé n'a révélé aucun lien
statistiquement significatif entre le statut matrimonial et le mode
d'évacuation des déchets dans l'ensemble des quatre villes
(P-Value = 0,564>0,05).
> Les résultats des travaux réalisés
dans l'ensemble des villes étudiées révèlent que
plus le revenu des chefs de ménages est élevé, plus le
ménage évacue ses ordures par les structures de pré
collecte
> Les locataires des maisons ont une forte propension
à déverser directement leurs déchets dans la nature. En
effet, les résultats des travaux effectués dans l'ensemble des
villes de Parakou, Djougou, Kandi et Malanville montrent que plus les chefs des
ménages sont propriétaires de maisons, plus ils s'abonnent aux
structures de pré collecte de ramassage des ordures. Ainsi, un lien
hautement significatif au seuil de 100 % a été observé
entre le statut de résidence et le mode d'évacuation des
déchets (P-Value = 0,000<0,05).
> Les enquêtes menées dans l'ensemble des
villes de Parakou, Djougou, Kandi et Malanville révèlent à
100% des liens très hautement significatifs entre le mode
d'évacuation des déchets et la catégorie
socio-professionnelle des chefs de ménages (P-Value = 0,000<0,05).
Les données permettent de souligner que les cadres de l'administration
plus que les autres catégories socio-professionnelles (ouvriers
qualifiés, manoeuvres, ménagères, producteurs,
pêcheurs, commerçants, transporteurs, artisans et chefs religieux)
évacuent leurs déchets solides ménagers par les structures
de pré collecte.
> Le type de quartiers (haut standing, moyen standing et
bas standing) a une influence dans le mode d'évacuation des
déchets.
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Mukuku et al. (2018) ont mené une étude
en république démocratique du Congo dont l'objectif était
de décrire les caractéristiques sociodémographiques des
enquêtés ainsi que la gestion des déchets ménagers
dans la commune de Katuba à Lubumbashi, République
Démocratique du Congo. En effet la gestion des déchets est la
canalisation organisée et systématique des déchets
à travers les voies pour s'assurer qu'ils sont éliminés
avec attention à des garanties acceptables de santé publique et
environnementale.
Cependant, une gestion adéquate ne peut être
réalisée sans un plan de gestion des déchets bien
conçu. Selon Rossel et Jorge, les stratégies de planification de
la gestion des déchets devraient préconiser l'évitement de
la production de déchets, l'utilisation de technologies plus propres, la
promotion du recyclage et de la récupération des déchets,
en utilisant un traitement approprié pour les déchets
générés et l'élimination adéquate des
déchets. Il y a un passage d'un système de gestion des
déchets basé sur les décharges vers un système plus
intégré. La gestion intégrée des déchets est
considérée comme la clé du succès du traitement des
ordures ménagères. Une bonne gestion des déchets solides
implique la hiérarchie séquentielle de la réduction des
sources, de la réutilisation, du recyclage et de l'élimination
sûre. Les efforts de réduction des déchets ménagers
à la source et au moyen de diverses techniques comme le recyclage, la
réutilisation et le compostage déterminent le schéma de
gestion des déchets optimal.
Des études empiriques sur l'impact du statut
économique et social des ménages et les attributs des
déchets ainsi que des préoccupations environnementales sur les
pratiques d'élimination des déchets solides sont
nécessaires pour améliorer la gestion des déchets solides
au niveau des ménages en RDC en général et dans la ville
de Lubumbashi en particulier où la problématique de la gestion de
l'environnement est pertinente. La collecte des ordures ménagères
constitue l'une des plus grandes difficultés que rencontrent les
autorités urbaines. Ces difficultés se traduisent par une
accumulation des ordures ménagères, la création de
nombreux dépôts sauvages, la stagnation des eaux usées et
pluviales dans de nombreux quartiers et le manque de la sensibilisation
stratégique de la population.
Une étude descriptive transversale du 1er avril au 31
mai 2017 a été menée ; Elle a concerné les
ménages de la commune de Katuba, où un échantillon de
convenance a été tiré. Un total de 170 ménages
avait été interrogé parmi lesquels 18 avaient
refusé de répondre aux questionnaires, ce qui correspond à
un taux de réponse de 89,4%. Les variables suivantes ont
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été retenues dans cette étude à
savoir les caractéristiques sociodémographiques des
enquêtés (âge, sexe, niveau d'instruction, occupation), les
paramètres en rapport avec la gestion des déchets ménagers
(utilisation des poubelles de stockage, mode de stockage, mode de traitement,
mode de transport, rythme d'évacuation, valorisation), la connaissance
des dangers dus à la présence des déchets ainsi que les
propositions des enquêtés concernant la gestion des déchets
(méthode de paiement des frais de collecte des déchets, vente des
déchets recyclables, méthode de séparation de
déchets). Les résultats suivants peuvent découler de ces
travaux :
? Les caractéristiques sociodémographiques des
répondants. Cent trente-deux (86,8%) répondants étaient de
sexe féminin et le sexe ratio F/M de 6,6. L'âge moyen était
de 35,4 #177; 13,2 ans (extrêmes : 18 et 79 ans) et 42,8% des
répondants avaient un âge variant entre 20 à 30 ans.
Soixante-deux virgule deux pourcent des répondants avaient un niveau
d'étude secondaire, 18,4% ont un certificat d'étude primaire et
15,8% sont universitaires. Soixante-cinq virgule sept pourcent des
enquêtés n'avaient aucune profession et 21,7% étaient
commerçants.
? On observe des paramètres en rapport avec la gestion
des ordures. Quatre-vingt-deux virgule deux pourcent (125/152)
d'enquêtés avaient déclaré qu'ils utilisent des
poubelles de nature diverse (sceau, sac, sachet) pour stocker leurs
déchets ménagers solides. S'agissant du mode de stockage, 88,8%
des répondants mélangent les ordures et seulement 11,2%
effectuaient le tri des déchets en séparant les
biodégradables des non biodégradables.
Une autre étude est celle (Amado, 2016) qui a
évalué dans quelle mesure la mise en oeuvre des pratiques de GDS
à Calabarzon en termes de réutilisation, collecte,
réduction, recyclage, traitement et élimination finale des
déchets. Les résultats ont révélé que les
pratiques de gestion des déchets solides sont mises en oeuvre dans une
large mesure. Parmi les pratiques, la collecte des déchets a obtenu la
moyenne composite la plus élevée, en particulier en ce qui
concerne la promotion des 3R (réduire, réutiliser, recycler) dans
la collecte des déchets. Les chercheurs ont recommandé la mise en
place d'un partenariat entre l'université et l'entrepreneur en recyclage
(local et privé).
Diawara (2009) a réalisé une étude
économique sur la demande des ménages pour l'amélioration
des services municipaux d'élimination des déchets solides en
Malaisie, les ménages étant l'unité d'analyse car ils sont
les utilisateurs directs des installations
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ANALYSE DE L'EVOLUTION DES MODES DE GESTION DES DECHETS
SOLIDES URBAINS PAR LES MENAGES AU CAMEROUN ENTRE 2007 ET 2014
d'élimination des déchets solides. Les
résultats de l'étude montrent une forte influence de la
perception et du facteur de distance sur le modèle de choix public pour
les options d'élimination des déchets. Par la suite, ils
proposent que le gouvernement tienne des consultations plus ouvertes avec le
public afin de comprendre ses points de vue et ses besoins avant de tenter
d'annoncer toute politique de gestion et d'élimination des
déchets solides. Il est également démontré que les
autorités doivent être plus transparentes dans la future
proposition de technologie d'élimination des déchets afin de
convaincre le public de leurs avantages, mais ne pas laisser le public deviner
et présumer les aspects négatifs en raison du manque de
connaissances et d'accès à l'information.
Diawara (2009) montre dans sa thèse que globalement les
populations au niveau de vie élevé, résidant dans les
immeubles d'habitation ou dans les villas de haut standing du noyau primitif,
conditionnent leurs ordures dans des sacs ou des poubelles en attendant le
passage des camions bennes de ramassage (80 %), tâches qui sont en
général confiées aux domestiques (90 %) ou aux vigiles
chargés de la surveillance des résidences et des villas. Ce sont
ces derniers qui « sortent » les poubelles lors du passage des
camions bennes dans ces îlots huppés du Plateau, alors que les
immeubles du centre des affaires disposent de bacs collectifs qui ne sont
généralement pas en proie au vol. Cependant pour les couches
moins aisées, le conditionnement sera très sommaire à
l'image de ce qui se fait à quelques encablures dans le secteur de
Niayes-Tiocker : les poubelles sont généralement de fortune et
stockées parfois à l'intérieur des concessions ou alors
dehors, auquel cas elles sont agrémentées par les déchets
des petits commerces attenants et exposées aux animaux errants (chiens,
chats, nuisibles). Les distances moyennes parcourues par les populations pour
présenter leurs poubelles sont généralement
inférieures à 50 mètres, même en période
d'irrégularité de la collecte.
Parrot et al (2009) ont montré qu'il existe
une relation entre le niveau de vie et le ratio journalier. De nombreuses
études ont également indiqué l'importance du mode de vie
de la population, du type d'habitat, des habitudes alimentaires et de
l'influence des saisons sur la quantité et la qualité des
déchets produits (Aloueimine, Matejka, Zurbrugg, & Sidi Mohamed,
2006; Thonart, Diabate, Hiligsmann, & Lardinois, 2005). Cependant, la
comparaison entre les différents ratios ne doit pas occulter les
différences relatives aux périodes d'études, à la
méthode d'évaluation du gisement, au lieu d'étude
(à la source ou à la décharge), à
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ANALYSE DE L'EVOLUTION DES MODES DE GESTION DES DECHETS
SOLIDES URBAINS PAR LES MENAGES AU CAMEROUN ENTRE 2007 ET 2014
l'échantillonnage pris en compte pour l'étude et
à la durée de l'étude (Ngambi 2015). En fait, il n'y a pas
de réelle normalisation, toute chose qui complexifie la comparaison.
II.2.2. Travaux conduits au Cameroun
Boubacar (2011) visait à évaluer la perception
qu'a la communauté des stratégies et des défis de gestion
des déchets solides municipaux dans la municipalité de Buea et le
conseil municipal de Kanifing en Gambie. L'étude a
révélé que les poubelles de collecte des déchets
n'étaient pas réparties uniformément ; que les
déchets n'étaient pas totalement éliminés aux
points de collecte officiellement désignés ; que la plupart des
gens utilisaient des sacs, des seaux en plastique, entre autres, pour le
stockage des déchets ; alors que les déchets organiques
étaient les plus générés (35%) et 41%} de
déchets, dans les deux municipalités, Buea et Kanifing.
L'étude recommande de fournir davantage de poubelles et de sensibiliser
la communauté aux normes d'hygiène et d'assainissement et
à l'importance du tri des déchets au point d'origine dans les
deux municipalités
Manga et al (2008) entendent étudier les
facteurs qui expliquent les comportements de gestion des déchets
ménagers agricoles à Yaoundé. Les résultats
indiquent que la taille des familles et l'accessibilité d'un quartier
augmentent la probabilité d'avoir des infrastructures
d'élimination des déchets par rapport au recyclage des
déchets et/ou à leur élimination dans des aires ouvertes.
D'autre part, l'éloignement des exploitations agricoles, le faible
revenu agricole, l'accessibilité d'un quartier, la quantité
totale de déchets produits et l'expérience agricole du chef de
famille sont les déterminants du recyclage organique au niveau des
ménages agricoles. Ainsi, afin d'éviter les amoncellements
désordonnés d'ordures et d'encourager le meilleur choix en
matière d'élimination des déchets, la distance entre les
ménages et les poubelles devrait être réduite.
Ngambi (2015) dans sa thèse montre que le revenu du
ménage a un impact significatif sur l'utilisation des bacs à
ordures ; il montre également que les revenus des habitants, quel que
soit leur lieu de résidence, permettent d'apprécier le niveau de
vie des ménages. Pour ressortir les différences entre les classes
socioéconomiques, nous avons pris comme indicateur le profil
monétaire du ménage. Il s'agit essentiellement des revenus
mensuels qu'un ménage peut avoir pour satisfaire les besoins vitaux de
la famille En effet il essaie de classifier les ménages selon leur
profil monétaire. En fonction des occupants adultes d'un ménage
et les revenus des chefs
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KINGUE MOUDOUTE Albert Racel
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ANALYSE DE L'EVOLUTION DES MODES DE GESTION DES DECHETS
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de ménages (homme ou femme, homme et femme), cinq
groupes socioéconomiques ont été déterminé
:
? Les ménages très pauvres (5%) sont moins
représentés mais très vulnérables. Les chefs de
familles n'exercent aucune activité stable et
rémunératrice de revenus. L'argent gagné occasionnellement
provient des petits travaux (défrichage d'une concession, d'un champ,
fouilles dans les chantiers de constructions, etc.). Ils vont se
débarrasser sans gêne de leurs ordures dans la nature, du faite de
leur habitat précaire étant nettement très
éloigné des bacs ne sont pas desservis par Hysacam.
? Les ménages pauvres (36%) sont gérés
par un chef de famille ayant un emploi précaire (gardien, jardinier,
ménagère, etc.) ou une petite activité commerciale
informelle (échoppe, caisse de cigarettes). On trouve aussi dans cette
catégorie les agents de l'Etat. Le salaire des chefs de famille peut
commencer à 28 440 F CFA représentant le SMIG et peut être
plafonné à 100 000 F CFA ; Mais ce sont les ménages ayant
le plus grand nombre de personnes. Cette catégorie commence à
entrevoir le déplacement vers un bac à ordure. Mais continue
nettement d'utiliser une décharge sauvage pour se débarrasser de
leurs ordures
? Les ménages intermédiaires (19%) sont en
majorité dirigés par des fonctionnaires moyens, des sous cadres
du secteur privé et des travailleurs du secteur informel (petit
commerçant, technicien, etc.). Leur ressource se trouve dans
l'intervalle 101 000-250 000 F CFA.
? Les ménages moyens (28%) ne sont pas riches mais
disposent de ressources suffisantes pour ne pas régresser dans la classe
des ménages « intermédiaires ». Ils parviennent
à satisfaire leurs besoins élémentaires mensuels sans
pression dans la gestion. Dans le ménage où les deux parents ont
un revenu minimum de 125 000 F CFA, les avoirs pécuniaires mensuels
varient de 251 000 à 500 000 F CFA. ici la culture d'utilisation d'un
bac à ordure est déjà encrée dans les moeurs ils
vont de moins en moins déverser leurs ordures dans la nature.
? Les ménages riches représentent 15% des
classes socioéconomiques dans la ville de Yaoundé. En dehors de
leur milieu social courant (habitat haut standing), on les retrouve
parsemés dans les autres types d'habitat. Ils ont des revenus
supérieurs à 500 000 F CFA par mois et peuvent faire divers
investissements et épargnes pour leur
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descendance sans contrainte. Ici la tâche de se
débarrasser des ordures est confiée aux domestiques ou aux
vigiles chargés de la surveillance des résidences et des
villas.
Sotamenou (2012) dans son étude visait à
identifier les variables explicatives qui influencent l'utilisation du compost
au Cameroun d'une part et d'autre part, à déterminer les effets
de ces variables sur chaque niveau de fertilisation. Les chercheurs ont
constaté que les variables clés qui peuvent aider dans la
formulation des implications politiques afin d'améliorer l'utilisation
des engrais organiques au Cameroun sont : l'adhésion aux
coopératives paysannes, les droits de propriété
foncière, la culture des produits alimentaires et la distance entre le
domicile et la ferme des agriculteurs. Il faudrait donc construire des stations
de transfert pour la collecte et le stockage des déchets solides
produits par les ménages vivant dans les basses terres. Cela
allégera le fardeau des entreprises de collecte des déchets
solides dans les zones inaccessibles et favorisera la vulgarisation et la
promotion du compostage.
L'étude de Parrot et al.,(2008) donnent un
aperçu de l'état de la GDSM dans la capitale du Cameroun,
Yaoundé, et suggère des solutions possibles pour son
amélioration. Le résultat a révélé que les
distances et le manque d'infrastructures ont un impact majeur sur la collecte
des déchets. Par conséquent, il est recommandé d'augmenter
le nombre de poubelles à proximité des ménages. Par
ailleurs, le recyclage doit être encouragé afin de réduire
la quantité de déchets purs et de promouvoir l'intensification
écologique de l'agriculture à Yaoundé. Sensibiliser
davantage le public à la gestion des déchets domestiques,
à l'assainissement urbain et au recyclage, alors les ménages
devraient bénéficier du soutien des municipalités.
D'autres recherches doivent être menées dans ce domaine.(Diawara,
2009; Manga et al., 2008), l'objectif de l'étude était d'analyser
de manière critique la situation actuelle de la gestion des
déchets au Cameroun en se référant particulièrement
au cadre politique et aux rôles dévolus aux différentes
parties prenantes dans la réalisation des objectifs spécifiques
de gestion des déchets. Les résultats indiquent que les services
de gestion des déchets solides sont rudimentaires, essentiellement la
collecte et le déversement. La réglementation actuelle ne traite
pas adéquatement de la manutention ou de l'élimination des
déchets. A partir de ces résultats, la mise en oeuvre d'une
gestion durable des déchets par la recherche de consensus, la
consultation, l'encouragement et l'ouverture doivent être
développés avant de maximiser le potentiel disponible pour la
réutilisation, le recyclage et la valorisation des déchets au
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Cameroun. Une refonte radicale des systèmes politiques
et réglementaires actuels est également nécessaire pour
atteindre cet objectif.
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