A. La
période 2011
Entre le 15 et le 31 décembre 2016, les
autorités congolaises ont agi pour empêcher et contenir la tenue
de manifestations publiques contre le maintien au pouvoir du Président
Kabila au-delà de la fin de son deuxième et dernier mandat
constitutionnel le 19 décembre. Dans les principales villes de la RDC,
les forces de défense et de sécurité, dont les agents de
la PNC, mais également des militaires des FARDC équipés
d'armes létales, ont été massivement
déployées dans le but d'empêcher et de répondre aux
manifestations publiques attendues, malgré les interdictions
imposées au préalable par les autorités.
Dans ce contexte, le BCNUDH a documenté au moins 40
personnes tuées, dont cinq femmes et deux enfants, et 147 autres
blessées, dont 14 femmes et 18 enfants, résultant d'un usage
disproportionné de la force et de l'utilisation de balles réelles
par les forces de défense et de sécurité, en particulier
l'armée, dont les soldats de la Garde républicaine et de la
Police Militaire, qui ne sont ni équipés ni entrainés pour
les opérations de gestion des foules.
Avant, pendant et après les manifestations, les forces
de défense et de sécurité ont par ailleurs
procédé à des arrestations à grande échelle
de personnes suspectées de planifier ou de participer à des
manifestations, dont des membres et des militants de partis d'opposition et de
mouvements citoyens.
Entre le 15 et le 31 décembre 2015, au moins 917
personnes, dont 30 femmes et 95 enfants, auraient été
arrêtées en RDC par les forces de défense et de
sécurité. Bien que la plupart aient été
libérées, au moins 70 parmi elles ont été
condamnées pour des infractions de droit commun tels que la destruction
méchante, le pillage, la rébellion ou la participation à
un mouvement insurrectionnel et plusieurs ont été soumises
à des traitements cruels, inhumains ou dégradants lors de leur
arrestation ou pendant leur détention.
Entre le 15 et le 31 décembre 2016, en lien avec les
manifestations, le BCNUDH a documenté qu'au moins 40 personnes ont
été tuées par des agents de l'État, dont cinq
femmes et deux enfants : 17 à Kinshasa, 12 à Lubumbashi (province
du Haut-Katanga), huit à Boma et trois à Matadi (province du
Kongo Central). Au moins 38 de ces victimes ont été tuées
par balle par les forces de défense et de sécurité. Durant
la même période, au moins 147 personnes ont été
blessées par des agents de l'État, dont 14 femmes et 18 enfants :
64 à Lubumbashi, 51 à Kinshasa, 16 à Matadi et 12 à
Boma, ainsi qu'une personne dans chacune des villes de Luebo (province du
Kasaï), Kananga (province du Kasaï central), Mbuji-Mayi (province du
Kasaï oriental) et Beni (province du Nord-Kivu).
Bien que certains incidents documentés par le BCNUDH se
soient déroulés lors d'affrontements avec des manifestants
violents, les informations collectées dénotent un usage excessif
et disproportionné de la force, dont l'utilisation d'armes
létales et de balles réelles, tirées sur les parties
supérieures du corps par les forces de défense et de
sécurité congolaises en réponse aux manifestations des 19
et 20 décembre.
L'utilisation d'armes létales par des forces de
défense et de sécurité lourdement armées contre des
manifestants viole les droits garantis par le droit international ainsi que par
la Constitution congolaise et est contraire aux standards internationaux
régulant l'usage de la force et des armes à feu par les agents de
maintien de l'ordre. De plus, plusieurs victimes ont été
blessées des suites de traitements cruels, inhumains ou
dégradants lors de leur arrestation ou de leur détention, en
violation des normes internationales et du droit congolais.
A Kinshasa, par exemple, au moins 17 personnes, dont deux
femmes, ont été tuées, et au moins 51 autres, dont sept
femmes et deux enfants, ont été blessées par des agents de
l'État. La plupart des incidents documentés dans la capitale ont
commencé dans la nuit du 19 au 20 décembre 2016, lorsque les
forces de défense et de sécurité ont commencé
à tirer à balles réelles et à utiliser des grenades
lacrymogènes pour disperser la population qui était descendue
dans la rue en faisant du bruit à l'aide de sifflets et de casseroles.
Ce soir-là, un homme a été tué par balle par des
militaires des FARDC pendant que la population manifestait et sifflait dans la
commune de Masina à Kinshasa. Les violences à Kinshasa ont
continué tout au long de la journée du 20 décembre, quand
les militaires de la Garde républicaine et de la Police Militaire
procédaient à des tirs de sommation pour disperser la population.
Sur les 17 personnes tuées documentées par le BCNUDH à
Kinshasa, deux l'ont été le 19, 15 et 20 décembre.
Quinze de ces victimes ont été tuées soit
par des balles perdues, soit par des tirs directs, un homme est mort
après avoir été percuté par un camion de la PNC, et
un autre homme, arrêté le 19 décembre à Masina,
serait mort des suites de traitements cruels, inhumains et dégradants
pendant sa détention au camp militaire Kokolo. Le 20 décembre, au
moins 29 personnes ont été blessées (dont cinq femmes et
un enfant), dont au moins 16 par balle et trois à la suite de
traitements cruels, inhumains et dégradants lors de leur arrestation ou
détention par les forces de défense et de sécurité.
La plupart des personnes tuées ou blessées ont été
évacuées par des agents de la PNC vers des camps militaires tels
que les camps Kokolo et Tshatshi et vers la morgue de l'hôpital de
référence Mama Yemo. L'accès à ces lieux a
été refusé au BCNUDH.
A Lubumbashi, entre le 15 et le 31 décembre 2016, le
BCNUDH a documenté la mort de 12 personnes, et 64 blessés, pour
la plupart résultant de l'utilisation de la force létale par les
forces de défense et de sécurité, dont des agents de la
PNC et des militaires des FARDC, certains habillés en tenue civile, en
réaction à des manifestations violentes. Lors de la seule
journée du 20 décembre, neuf hommes, une femme et un enfant de 17
ans ont été tués par balle réelle lorsque les
forces de défense et de sécurité ont tiré sans
distinction sur des manifestants violents. Au moins trois de ces victimes, dont
un homme tué à bout portant dans le quartier Matshipisha, ont
été tués par des agents de la PNC et six, dont deux hommes
tués à bout portant dans les quartiers Katuba II et Kisanga, ont
été tués par des militaires des FARDC.
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