La protection du droit de manifester dans l'espace publicpar Charles ODIKO LOKANGAKA Université de Kinshasa - Doctorat 2020 |
2. Un régime discriminatoire basé sur la raceLe monde colonialiste était fondé sur le racisme, il n'y a point de doute à cela275(*). Comme P. Curtain et d'autres l'ont souligné, « l'entrée de l'Europe en Afrique a coïncidé avec l'apogée, aux XIXe et XXe siècles, du racisme et du chauvinisme culturel en Europe même276(*) ». L'examen attentif des textes des chansons qui utilisent la veine coloniale, montre l'exploitation de la recherche d'exotisme avec ses conséquences sur le paternalisme, la bonne conscience coloniale et le racisme sans fard qui prévaut la plupart du temps. L'image de l'indigène, va être au centre de ce dispositif de légitimation de l'acte colonial, et devenir le point de cette rencontre de nationalismes pourtant profondément distincts. En effet, par la force des valeurs universalistes et la pression des idées nationalistes qui vont progressivement subsumer le discours colonial, la Belgique va graduellement créer un modèle de l'« indigène » pour renforcer et légitimer le discours colonial de la métropole. On assistera ainsi à une réglementation discriminatoire mettant en présence les citoyens belges, les immatriculés et les indigènes non immatriculés. Il faut noter cependant que le discours des colons était propagateur d'un égalitarisme qui véhiculait une idée "fausse" de l'égalité naturelle entre les hommes, alors que la réalité faisait état d'un anti modernisme qui se décline sous différentes facettes, une glorification du monde rural et de la famille chrétienne, une hiérarchisation de la société, une glorification des élites, un anticapitalisme (souvent théorique) et un anti-intellectualisme virulent277(*), destiné à maintenir une race sous le joug de la servitude coloniale. L'article premier de l'Ordonnance-Loi n°25-131 sur la Répression des manifestations de racisme ou d'intolérance religieuse du 25 mars 1960, prévoit une peine de servitude pénale d'un mois à un an et d'une amende n'excédant pas 3000 francs, ou d'une de ces peines seulement, les inscriptions murales, le port d'emblèmes, les gestes, les paroles ou les écrits susceptibles de provoquer, d'entretenir ou d'aggraver la tension entre races, ethnies ou confessions. Le monde colonialiste était fondé sur le racisme, il n'y a point de doute à cela278(*). Les effets néfastes de ce racisme sur le plan social étaient de grande ampleur et brisait le principe. La mobilité constante d'une population active presque entièrement composé de migrants, son manque de qualification et le racisme général étaient autant d'handicaps pour les travailleurs africains qui auraient voulu réclamer à ses employeurs capitalistes un meilleur salaire et des conditions de travail moins pénibles. * 275 Gérald Attali, dans son Enseignement de fait colonial, l'affirme sans ambages : « Que celle-ci [la colonisation] ait été la domination d'un peuple par un autre, avec une pratique marquée par le racisme, l'arbitraire, la violence nue, personne ne saurait le nier ». * 276 CURTIN (P.) et alii, Africanhistory, Londres, Longman, 1978, p. 484. * 277 BLANCHARD (P.), Discours, politique et propagande. L'AOF et les Africains au temps de la Révolution nationale (1940-1944), in BECKER (Ch.), SALIOU MBAYE et IBRAHIMA THIOUB (dir), AOF : réalités et héritages. Sociétés ouest-africaines et ordre colonial, 1895 - 1960, Dakar, Presses de la sénégalaise, 1997, p. 329. * 278 Gérald Attali, dans son Enseignement de fait colonial, l'affirme sans ambages : « Que celle-ci [la colonisation] ait été la domination d'un peuple par un autre, avec une pratique marquée par le racisme, l'arbitraire, la violence nue, personne ne saurait le nier ». |
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