UNIVERSITE DE KINSHASA
FACULTE DE DROIT
DEPARTEMENT DE DROIT PUBLIC INTERNE
B.P. 204 KINSHASA XI
LA PROTECTION DU DROIT DE MANIFESTER DANS L'ESPACE
PUBLIC EN RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO
Étude de droit comparé français,
espagnol et béninois.
Par
Charles ODIKO LOKANGAKA
Diplômé d'Etudes Supérieures en Droit
Public
Thèse présentée et défendue en
vue de l'obtention du grade de Docteur en Droit.
Membres du jury:
- Prof. Jean Louis ESAMBO KANGASHE, Président;
- Prof. Jacques DJOLI ESENG'EKELI,Promoteur ;
- Prof.Paul-Gaspard NGONDANKOY NKOY-ea-LOONGYA,
Co-promoteur ;
- Prof. Célestin MUSAO KALOMBO,
Secrétaire ;
- Prof. ILUME MOKE, Membre effectif ;
- Prof. Ivon MINGASHANG, Membre suppléant ;
- Prof. MULAMBA MUBYABO, Membre suppléant.
Année Universitaire 2019-2020
ÉPIGRAPHIE
« Quand un peuple
ne défend plus ses libertés et ses droits, il devient mûr
pour l'esclavage. »
Jean-Jacques Rousseau
DÉDICACE
À Sarah Kabuya, mon épouse.
REMERCIEMENTS
Je tiens ici à exprimer toute ma gratitude envers
Monsieur le professeur Jacques Djoli Eseng'ekeli, mon Promoteur de
thèse, pour son entière disponibilité, ses conseils
toujours précieux et son soutien constant tout au long de ce travail de
recherche. Je lui sais également gré de la relation de confiance
réciproque qui s'est installée dès le début de
notre collaboration et qui ne s'est jamais démentie.
J'adresse en deuxième lieu ma profonde reconnaissance
au Professeur Paul-Gaspard Ngondankoy Nkoy-ea-Loongya, Co-promoteur et mon
encadreur scientifique depuis 2010. C'est sous ses auspices que l'idée
même de cette thèse, portant sur un de ses sujets de
prédilection, est née. Comme l'a si bien dit un jour le
professeur Jacques Djoli, si scientifiquement je suis pour lui un
« fils adoptif », c'est que, pour le professeur
Paul-Gaspard Ngondankoy, je peux revendiquer bien volontiers le titre de
« fils biologique ». Je le remercie pour la confiance,
l'encadrement et la rigueur scientifique reçus de lui.
Mes remerciements s'adressent en troisième lieu
à l'ensemble du corps professoral de la Faculté de Droit de
l'Université de Kinshasa et particulièrement aux Professeurs
Jean-Louis Esambo Kangashe, Président du Jury, Célestin Musao
Kalombo, Secrétaire du Jury, Ivon Mingashang, Michel Ilume Moke et
Félicien Mulamba Mubyabo pour leurs précieuses remarques,
lesquelles ont permis d'améliorer la qualité de cette
étude.
J'adresse aussi mes sincères remerciements à
tous ceux qui ont contribué à l'accomplissement de ce
travail : tout d'abord, le Professeur Léon Odimula Lofunguso ainsi
que Messieurs les Abbés Professeurs Yengo et Nkwasa pour leurs conseils
et leurs relectures ; ensuite, Monsieur le Chef de Travaux Christian
Tshiamala et l'Assistant Dani Oleko pour leurs concours et la relecture
d'ensemble du tapuscrit.
Une pensée va vers mes amis et tous ceux qui ont
partagé, à un moment ou à un autre et de diverses
manières, ces cinq années de recherches. Je pense
particulièrement aux Docteurs Félicien Kalala et Patrick Mende,
aux assistants et chefs de travaux Ngebas Kipoy, Leroi Kangulumba, Byumanine
Mpova, Célestin Kanyama, Emmanuel Ramazani Shadary, Laurent Onyemba,
Célestin Ekoto, Cyrille Makepa et Franck Losoli. Leur présence et
leur soutien sans faille m'ont aidé plus qu'ils ne peuvent le penser.
Mes remerciements particuliers vont à mes parents
Émile Lokangaka et Antoinette Edumbe ainsi qu'à mes oncles et
tantes Albert Wongodi (d'heureuse mémoire), Simon Dikete, Kema Odiko,
Ahoka Odiko, Ehowande Odiko, Okako Odiko, Lomandja Odiko, Welo Odiko, Ndjeka
Odiko et Djemba Lokoto.
Je ne peux oublier mes frères et soeurs Ekodi
Lokangaka, Tshike Lokangaka, Asamawo Lokangaka, Wungudi Lokangaka, Lokanga
Lokangaka et Lopaka Lokangaka.
Je remercie - last but non least - ma famille : Sarah
Kabuya, mon épouse ; Bryan Odiko, mon fils ; Fortelle
Glorieuse Odiko, Muriella-Promel Odiko et Raelle Odiko, mes
filles.
PLAN SOMMAIRE
Première partie :
LA LIBERTÉ DE MANIFESTATION : SA
FONDAMENTALITÉ,
SES DIMENSIONS HISTORIQUES ET CONTEXTUELLES
Chapitre I : La fondamentalité du droit de
manifester dans un état démocratique
Section 1 : Le principe de liberté, fondement
substantiel de la liberté de manifestation
Section 2. Les traits caractéristiques de la
fondamentalité du droit de manifester
Section 3 : La proximité sémantique
impliquant une précaution de langage dans l'usage de certains
concepts
Chapitre II : L'évolution des cadres
contextuel et juridique de l'exercice de la liberté de
manifestation
Section 1 : Le Congo-Belge : l'exercice de la
liberté de manifestation dans un contexte colonial
Section 2 : Le Congo-Zaïre : l'exercice de la
liberté des manifestations dans un contexte dictatorial
Section 3 : La liberté de manifestation sous les
régimes de Laurent-Désiré Kabila et Joseph Kabila
III : L'ancrage de la liberté de
manifestation en droit comparé
Section 1 : La liberté de manifestation en
France
Section 2 : La positivité de la liberté de
manifester en Espagne
Section 3 : La liberté de manifestation au
Bénin
Deuxième partie :
LA PROTECTION DE LA LIBERTÉ DE
MANIFESTATION
DANS L'ESPACE PUBLIC CONGOLAIS
Chapitre I : Une architecture virtuelle de protection
de la liberté de manifestation
Section 1 : Les mécanismes non-juridictionnels de
protection de la liberté de manifester
Section 2 : Les mécanismes juridictionnels de
protection du droit de manifester
Section 3 : Le régime de responsabilité
découlant de la liberté de manifestation
Chapitre II : Contradictions,
ambiguïtés et inadaptations pratiques du système juridique
congolais de protection de la liberté de manifestation
Section 1 : La hiérarchie des normes : une
exigence de l'effectivité de la liberté de manifestation
Section 2 : La liberté de manifestation : un
droit constitutionnel dont les modalités d'exercice postulent
l'intervention du législateur
Section 3 : La liberté de manifestation : la
nécessité de la cohérence du système juridique de
protection
Chapitre III : Prospectives pour une protection
plus efficace et plus effective du droit de manifester dans l'espace public
congolais
Section 1 : La nécessité de réformer
le système juridique congolais de protection de la liberté de
manifestation
Section 2 : La légitimité de la norme de
protection de la liberté de manifestation et la nécessité
de sa mise en oeuvre
Section 3 : L'instauration d'un service public de la
justice de qualité
PRINCIPAUX SIGLES,
ABRÉVIATIONS ET ACRONYMES UTILISÉS
ABAKO : Association des Bakongo
AFDL : Alliance de Forces Démocratiques pour la
Libération du Congo
AJDA : Actualité Juridique de Droit
Administratif
ANC : Alliances Nationales Congolaises
AUF : Agence Universitaire de la Francophonie
BCNDH : Bureau Conjoint des Nations Unies aux Droits de
l'Homme
CE : Cour Européenne
CEDH : Cour Européenne de Droit de l'Homme
Cfr. : Conferatur (voir tel, ou se référer
à...)
CNDH : Commission Nationale des Droits de l'Homme
CRIDHAC : Centre de Recherche Interdisciplinaire pour la
Promotion et la Protection des
Droits de l'Homme en Afrique Centrale
Dir : Sous la direction de
Éd. : Éditions
EUA : Éditions Universitaires Africaines
FARDC : Forces Armées de la République
Démocratique du Congo
FONUS : Forces Novatrices pour l'Union et la
Solidarité
Ibidem : Même auteur encore
Idem : Même auteur
J.O.R.D.C : Journal Officiel de la République
Démocratique du Congo
LGDJ : Librairie Générale de Droit et de
Jurisprudence
M.P.R. : Mouvement Populaire de la
Révolution
MONUSCO: Mission de l'Organisation des Nations Unies pour la
Stabilisation du Congo
NNT : Number Needed to Treat (Nombre de Sujet
Nécessaire pour Traiter)
OFCJOJ : Organisation, Fonctionnement et
Compétence des Juridictions de
l'Ordre Judiciaire
ONG : Organisation non gouvernementale
ONU : Organisation des Nations Unies
Op. cit. : Opus Citatum (ouvrage déjà
cité)
Ord. : Ordonnance
p. : page
pp. : pages
PUF : Presses Universitaires de France
PUK : Presses Universitaires de Kinshasa
R.D.P : Revue de Droit Public
R.I.D.C : Revue Internationale de Droit
Comparé
RDC : République Démocratique du Congo
SOS : Save our Souls (Sauver nos Âmes)
spéc. : spécialement
UDPS : Union pour la Démocratie et le
Progrès Social
Unikin : Université de Kinshasa
vol. : volume
Le droit de manifester revêt une importance tout
à fait particulière dans le cadre d'un État de
droit1(*). Il constitue la
pierre angulaire du principe de la démocratie et des droits de
l'homme et représente, pour une société
démocratique, l'une des conditions primordiales de son progrès et
de l'épanouissement de chacun2(*). En aménageant une place propre et
indépendante à cette liberté3(*), le Constituant congolais de 2006 semble avoir pris
conscience de l'exacte mesure de ces enjeux. En effet, le lien entre droit de
manifester et la démocratie est communément affirmé dans
le droit positif, la jurisprudence et la doctrine4(*).
Le Tribunal constitutionnel espagnol, affirme dans cette
perspective que « la reconnaissance du droit de manifester par la
Constitution manifeste la volonté de consacrer un élément
déterminant de l'État démocratique et de l'État de
droit ».5(*) La
Cour européenne des droits de l'homme voit dans la liberté de
manifestation l'un des fondements essentiels de la société
démocratique6(*). Sa
constitutionnalisation marque dans la plupart des États, la
volonté claire et précise de ceux-ci de lui assurer plus
d'autorité et de stabilité7(*), permettant aux pouvoirs publics d'en sauvegarder la
fondamentalité.
Au plan doctrinal, Hubert Alcaraz et Olivier Lecucq
considèrent « la liberté de manifestation comme un
pilier indispensable au système démocratique qui impose la
liberté d'expression et la liberté des supports
d'expression ».8(*)Fraisse décrit « la liberté de
manifestation comme l'une des libertés civiles et politiques participant
à l'émergence et à l'enracinement de la culture
démocratique dans l'État moderne »9(*). Elle représente, de ce
fait, le thermomètre ou l'un des indices probants dans
l'appréciation de l'état des lieux ou du niveau
démocratique d'un État10(*). En même temps, « elle est
l'arme politique la plus efficace du moment où le recours à la
force n'est plus un mode normal d'expression, mais bien une violation du
droit ». A vrai dire, le droit de manifester est une véritable
expression du constitutionnalisme populaire. Gérard Sain Saulieu
démontre que « la manifestation permet à la
démocratie de se mettre en oeuvre face à l'incurie
anesthésiante des politiques qui n'engendrent pas l'allégresse.
Tous ces gens dans la rue représentent une expression populaire, pour
pallier l'impuissance du politique, contraints de prendre le risque d'une
redoutable incertitude sur l'avenir, en payant ainsi le prix du
disfonctionnement des institutions étatiques »11(*).C'est à cette dynamique
que nous devons tous les mouvements observés dans le monde.
D'aucuns s'étonneraient de constater que l'arsenal de
nouvelles techniques utilisées pour restreindre la liberté de
manifestation soit plus impressionnant que les efforts déployés
pour la protéger. La violence n'est plus que policière ; elle a
fini pour prendre des allures politiques et judiciaires. Pourtant, dans une
démocratie, le contrat conclu entre le peuple et l'État repose
sur l'idée selon laquelle celui-ci doit respecter les droits et
libertés de celui-là.12(*) Ainsi, la raison d'être de l'État est
d'apporter aux individus un minimum de sécurité leur permettant
de s'épanouir pleinement.13(*)
Avant de continuer, il nous paraît important de signaler
notre choix consistant à ne pas opérer une distinction entre les
concepts droit et liberté. Nous allons les utiliser l'un pour l'autre.
Ce choix n'a aucune intention d'invalider la dichotomie notionnelle entre un
droit et une liberté. Celle-ci existe à l'évidence,
quoiqu'elle soit à la fois discutable sur le plan doctrinal que du droit
positif. Dans plusieurs textes qui consacrent ce droit on trouve les deux
expressions, soit en raison de l'instrument qui le porte ou d'un choix
personnel dicté par la conception personnelle ou étatique des
droits et libertés fondamentaux.
Pour certains auteurs, dont Löhrer les droits subjectifs
et les libertés publiques sont assimilables. Les seules
différences qui les caractérisent, tiennent surtout au
degré de latitude laissé à leurs titulaires14(*). Les droits sont des
libertés strictement pré-orientées ou encore
prédéterminées. Leur contenu n'est ni variable ni
négociable au gré des personnes en relation. Quant aux
libertés, elles sont des droits largement pré orientés, de
telle façon que leurs titulaires possèdent, au sein de cette zone
préfixée, une capacité d'autodétermination15(*). Ainsi que le définit
Jean Rivero, la liberté est un pouvoir d'autodétermination, en
vertu duquel l'homme choisit lui-même ses comportements
personnels16(*).
Pour permettre une bonne "entrée en matière" de
cette dissertation, il nous revient, dans cette introduction, (1) de fixer le
contexte de l'étude (2) et de dresser un état de la question, (3)
avant de poser la problématique de l'étude (4) et
d'émettre les hypothèses de la recherche (5). Ces rubriques
seront suivies de la justification de l'étude (6), de l'indication de la
démarche méthodologique (7) et de la délimitation du champ
de la recherche (8), le tout finissant par l'annonce d'un plan sommaire (9).
1. CONTEXTE DE
L'ÉTUDE
La dynamique socio-politique et juridico-institutionnelle en
République Démocratique du Congo, est caractérisée
de nos jours par la recherche de l'émergence et de consolidation d'un
système démocratique et de mise en place d'un État
post-autocratique.
Afin de traduire dans les faits cet état de chose, la
rue a été mobilisée par une partie de l'opinion publique.
En l'occurrence, l'opposition politique représentée notamment par
les associations de la société civile et les mouvements dits
citoyens, pour qui le régime en place s'illustraient dans son
fonctionnement par la violation de la Constitution. L'article 64 de ladite
Constitution a été ainsi mis à contribution dans le but de
faire échec à une telle entreprise.17(*) Car, estimaient-ils, que dans
pareilles circonstances, la rue s'est toujours révélée
plus forte que la police et l'armée, plus efficace que la diplomatie,
quand tout devient trop insupportable, quand aucune issue politique ne se
profile, le recours à elle reste l'ultime espoir d'un changement
radical ».18(*)
La situation politique traduisait un climat d'antagonisme
provoqué par la tentative du président Joseph Kabila de rester au
pouvoir au-delà de ses deux mandats constitutionnels opposant deux
camps, en l'occurrence, la Majorité au pouvoir et l'Opposition. La
scène était jonchée des partisans du régime, qui
scandent au passage du Président de la République le cri
« Wumela », c'est-à-dire « demeure
longtemps au pouvoir », en face de leurs adversaires politiques qui
criaient « Yebela » c'est-à-dire, « sois
intelligent et sage pour quitter le pouvoir à temps, sinon, le peuple
t'y contraindra ».Eu égard à une telle ambiance, la
suspicion permanente, le contrôle strict et rapproché de
toute tentative de manifestation ainsi que la censure systématique
deviennent le mode de fonctionnement ordinaire pour éviter qu'un
mouvement contestataire ne déstabilise le régime et ses
dignitaires.
Quelques manifestations ont bien eu lieu. Un grand nombre
d'entre elles ont en réalité été cependant
interdites, cela sans une motivation particulière. Par ailleurs, aucun
contrôle de proportionnalité des mesures de restriction n'est
apparu nécessaire pour apprécier leur bien fondé au regard
de la menace à l'ordre public alléguée. Les auteurs de
multiples entraves portées contre cette liberté n'ont
manifestement pas été inquiétés en termes de leur
responsabilité.
On invoque habituellement l'ordre public
immatériel.19(*)
D'aucuns voient dans cette pratique, la volonté de museler l'Opposition
et la Société civile. Dans ce cadre, seules les manifestations
statiques et de soutien au régime peuvent recevoir l'approbation du
pouvoir20(*). En
témoigne les différentes restrictions et limitations
imposées pour l'exercice de la liberté de manifestation.
A cet effet, « un arsenal de nouvelles techniques
est utilisé pour restreindre cette liberté. L'ordre public
immatériel, la privatisation de l'espace public, la volonté de
faire payer les manifestations pour les dégâts qu'elles
génèrent et les nouvelles méthodes policières
constituent autant de menaces ». À la suite des manifestations
de janvier 2015, le Ministre de la Communication et Porte-parole du
Gouvernement a, au cours d'un point de presse organisé au lendemain des
évènementsimputé la responsabilité des
dégâts orchestrés par les manifestants aux organisateurs
desdites manifestations, tout en envisageant la possibilité de faire
saisir leurs patrimoines en vue d'éventuelles réparations des
dommages causés tant sur les biens publics que privés.
La description du paysage socio-politique dans lequel se
déroulent les mouvements de contestation par voix des manifestations
publiques en République démocratique du Congo, serait
incomplète si l'on indique également que les tactiques de
terreur sont souvent utilisées par les organisateurs et les manifestants
dans le but de donner de l'ampleur à leur revendication, ne peuvent que
susciter d'inquiétudes. Une certaine opinion se fait la fausse
idée qu'une manifestation sans dégâts matériels
passe pour un échec. En recourant dans cet ordre d'idée à
la terreur par l'érection des barricades, les jets des pierres,incendies
de véhicules et bâtiments privés tout comme publics ainsi
que les brûlages des pneus sur la voie publique. Il s'agit là,
parmi tant d'autres dérapages aux conséquences fâcheuses
qui rendent légitime, la question de savoir si l'on peut
prétendre demeurer dans un idéal démocratique.
Sans rechercher à participer, ni à tenter de
répondre par une telle question, à ce stade, il y a simplement
lieu de relever que chaque fois que le pouvoir en place se trouve confronter
à cet état de fait, il fait usage des moyens répressifs.
Les moyens de télécommunication sont perturbés, l'internet
et le téléphone mobile. A Cette attitude autoritaire, interdisant
techniquement la liberté d'expression et se traduisant aux yeux des
observateurs par le caractère ouvertement répressif du pouvoir
correspondent paradoxalement à la révolte.21(*)
Les services de l'ordre et le Pouvoir judiciaire, au lieu
d'être les garants des droits fondamentaux et des libertés
publiques, sont détournés de leurs missions traditionnelles
à la solde des individus et fonctionnent sous les soubresauts du
politique. Dans leur actif, on dénombre plusieurs cas d'arrestations
arbitraires, des jugements sur commande politique22(*) et une brutalité
policière insoupçonnable.
C'est à cette dynamique que l'on doit attribuer les
différentes manifestations du 19, 20 et 21 janvier 2015, celles du 19 au
20 septembre 2016 convoquées par le Rassemblement de l'Opposition
congolaise et celles organisées le 31 décembre 2017 par le
Comité Laïc de Coordination, appuyé par la hiérarchie
de l'Église Catholique pour exiger l'application de l'Accord de la Saint
Sylvestre signé le 31décembre 2016 et qui prévoyait, entre
autres, l'organisation des élections en décembre 2017,
l'ouverture des médias proches de l'opposition et la libération
de prisonniers politiques.23(*)
Alors que certaines manifestations ont été
déclarées et autorisées, d'autrespar contre, interdites,
ont débouché sur une violente répression causant des
pertes en vies humaines, des arrestations arbitraires et des
dégâts matériels importants, au nombre desquels on peut
énumérer une centaine des morts, des pillages et des casses des
biens publics que privés, sans épargner la profanation des
quelques lieux de culte (les paroisses catholiques). Il en résulte une
question de la responsabilité pénale qui implique des poursuites
judiciaires à l'encontre des acteurs des faits subversifs
présentés en déterminant le rôle joué par
chaque acteur.
Cette description du contexte dans lequel s'exerce la
liberté de manifestation en République démocratique du
Congo ne suffit pas pour appréhender réellement l'état de
lieu de la protection de cette liberté dans ce pays à forte
tradition autocratique.24(*) Il importe de faire l'état de la question
avant de poser la problématique de la présente recherche.
2. ÉTAT DE LA
QUESTION ET REVUE DE LA LITTÉRATURE
La question de la protection de la liberté de
manifestation est au coeur d'un paradoxe qui devrait nécessairement
conduire les juristes à s'interroger sur le rôle que jouent les
pouvoirs publics en tant que premiers débiteurs des droits fondamentaux
d'une part, et sur la fonction que remplit la norme juridique en tant
qu'instrument de conduite humaine, d'autre part. L'esprit libéral qui a
présidé à l'élaboration de la Constitution du 18
février 2006 laissait donc à penser que pareille liberté
allait désormais connaitre son âge d'or. L'espoir était
d'autant plus fort que l'article 26 lui ménage une place propre,
indépendante par rapport aux libertés classiques telles que
relatives à l'expression et réunion, auxquelles elle a
été depuis longtemps attachée25(*). Pourtant, l'espoir n'a pas
fait long feu. Le régime n'arrive pas à faire face à la
désagrégation du système politique congolais.
Autant la liberté de manifestation connait aujourd'hui
une très forte actualité dans le monde entier, autant elle subit
en même temps de fortes limitations et revers, aussi bien dans les pays
en transition démocratique que dans les pays occidentaux,
considérés traditionnellement comme étant les pays de
vieilles démocraties26(*). Certains pensent même à son
éclipse.
Aujourd'hui, plus de quatorze ans après la promulgation
de cette Constitution, l'architecture de protection du droit de manifester
demeure inachevée. La promulgation formelle d'une loi censée
fixer les mesures d'application de la liberté de manifestation, telle
que prévue par l'alinéa 4 de l'article 26 libellé
ci-dessous, continue à être victime d'une politique de l'autruche,
de restriction camouflée, le Parlement et la Présidence se
rejetant mutuellement la responsabilité du défaut de sa
promulgation formelle.
En vertu del'article 26 précité « La
liberté de manifestation est garantie. Toute manifestation sur les voies
publiques ou en plein air impose aux organisateurs d'informer par écrit
l'autorité administrative compétente. Nul ne peut être
contraint à prendre part à une manifestation. La loi fixe les
mesures d'application ».27(*) Paul-Gaspard Ngondankoy dégage de cette
formulation quatre principes fondamentaux susceptibles d'encadrer ce
concept. A savoir : la garantie de la liberté de manifestation ; la
déclaration ou l'information qui n'impose pas aux organisateurs d'une
manifestation de requérir une quelconque autorisation des pouvoirs
publics. Puis l'autonomie de volonté, qui implique que la participation
à une manifestation ne peut être forcée. Et enfin, celuide
la réserve législative reconnaissant au seul législateur
le pouvoir d'imposer les limites à la jouissance des droits et
libertés fondamentaux28(*).
Si les deux articles de Paul-Gaspard Ngondankoy sur la
liberté de manifestation ont inspiré et motivé cette
étude, celle-ci ne manque pas de prendre ses distances sur bon nombre de
questions. En l'occurrence, sur l'effectivité de la promulgation de
droit, s'agissant de la loi portant modalités d'exercice de la
liberté de manifestation. Comme le dit le Tribunal suprême
espagnol, à la Constitution les grands principes, à la loi
organique les conditions précises d'exercice ou le contenu propre du
droit de manifester29(*).
Pourtant l'adoption et la promulgation d'une loi portant mesures d'application
de la liberté de manifestation devrait être inscrite parmi les
priorités du gouvernement issu des élections de 2006. Or la
confusion persiste jusqu'à ce jour.
En observant la pratique de cette disposition par les pouvoirs
publics, nous avons l'impression que cette liberté est
conditionnée par une autorisation préalable. Tout indique que les
pouvoirs publics considèrent que la nouvelle loi n'étant pas
encore promulguée, il faille se résigner à appliquer
l'article 4 du décret-loi de 199930(*), même si celui-ci contredit l'esprit de la
norme supérieure qui consacre le régime d'information. C'est
aussi le lieu de répondre à la question de savoir si le
Décret-loi du 29 janvier 1999 sur la liberté de manifestation et
de réunion pacifique reste encore en vigueur et valide pour être
appliqué.
Dans l'hypothèse où il faut considérer
ce décret-loi, il importe de rappeler que dans un système
juridique, une norme trouve sa validité dans sa conformité
à la norme fondamentale qui lui donne légitimité. Aux
termes de l'article 221 de la Constitution31(*), ce Décret-loi devrait en principe être
considéré comme abrogé implicitement surtout dans ses
dispositions jugées contraires à la Constitution, notamment en
son article 4 qui institue un régime d'autorisation contraire à
celui d'information institué par l'article 26 de la
Constitution.32(*) Donc,
si l'on peut l'affirmer, avec Patrick Wachsmann33(*), que la hiérarchie des normes est un
instrument privilégié de protection des libertés, la
suprématie de la Constitution du 18 février 2006 sur les autres
textes implique le principe de nullité de plein droit de tout acte
contraire à la Constitution, le contrôle de tous les actes, qu'ils
émanent du législateur ou de l'administration, étant le
gage par excellence de la protection des libertés.34(*)
Il se fait pourtant que dans les faits on a l'impression
d'être confrontéà deux régimes contradictoires, ce
qui nous permet de l'affirmer avec Julien Betaille que l'absence de
contradiction entre les normes constitue l'une des conditions juridiques de
l'effectivité de la norme35(*). Cependant, le régime juridique de la
liberté de manifestation en droit congolais accuse une contradiction
évidente. Cette incompatibilité pèche contre le principe
de la hiérarchie des normes et affecte la cohérence du
système juridique qui commande que la norme inférieure soit
conforme à la norme supérieure. L'une des conséquences de
cet état des choses réside dans le risque d'une neutralisation
réciproque de leurs effets respectifs, voire d'une domination des effets
de la norme inferieure sur ceux de la norme supérieure36(*).
La contrariété entre le Décret-loi du 29
janvier 1999 et la Constitution du 18 Février 2006 rend non seulement
ineffectif l'exercice de la liberté de manifestation, mais aussi, permet
la neutralisation des effets de la Constitution en tant que norme fondamentale
au profit d'un décret censé tirer sa légitimité de
sa conformité à la Constitution. Toutefois, les critères
de validité retenus dans le cadre de l'ordre juridique devraient
permettre d'assurer sa cohérence, et ainsi préserver
l'effectivité de la norme. En outre, pour être cohérent,
l'ordre juridique doit nécessairement organiser la purge des normes non
valides puisqu'un acte invalide « produit des effets de droit tant
qu'il n'a pas été annulé »37(*). L'incompatibilité
dudit décret-loi doit dès lors être attestée et
ainsi organiser son retrait de l'ordonnancement juridique.
Aussi, s'il faut s'appuyer sur les prescrits de l'article 140
alinéa 2 de la Constitution38(*), le défaut de promulgation d'une loi par le
Président de la République dans le délai constitutionnel
vaut promulgation de droit. Ainsi, la proposition de la loi portant mesures
d'application de la liberté de manifestation devrait être
considérée comme promulguée de plein droit, même si,
à la surprise générale et au mépris de toute
logique juridique, ladite proposition serait renvoyée en violation de la
Constitution pour une nouvelle lecture au Parlement, laissant ainsi cohabiter
l'actuelle Constitution avec le décret-loi du 29 janvier 1999.
Autant dire que, quelles qu'aient été les bonnes
intentions du Constituant en faveur d'une démocratie libérale,
les conditions ne sont en réalité, pas réunies pour
pouvoir assurer un développement favorable de libertés, en
général et de celui du droit de manifester en particulier. Le
régime de la liberté de manifestation reste ainsi, dans la
pratique tout au moins, à quelque chose près, le même que
sous l'empire du décret-loi de 1999.
Dans la doctrine, le vide est loin d'être comblé.
Les travaux juridiques existants n'ont pas de notre point de vuedirectement
permis de répondre précisément à cette
problématique. Paul-Gaspard Ngondankoy ne cesse d'alerter, lors de ses
différentes interventions, sur la liberté de manifestation
concernant le risque de voir les associations civiles et politiques, ainsi que
leurs acteurs, dominer le débat sur la liberté de manifestation.
Car, écrit-il, cette actualité est d'autant plus importante
à analyser que le silence de l'intellectuel comporte le risque de
laisser à ces acteurs le droit de tout dire sur cette liberté
fondamentale, notamment celui de l'enfermer dans son seul aspect politique et
ainsi réduire le cercle de son champ d'application39(*).
Parmi les recherches importantes conduites dans ce cadre, on
peut citer le colloque sur la liberté de manifestation dans l'espace
public, organisé du 18 au 19 mars 2017 par la Faculté de Droit et
Science politique de l'Université d'Aix-Marseille. Même si, dans
ce cadre, les apports de la comparaison ont été précieux
pour comprendre les contradictions qui affectent l'exercice de cette
liberté, l'absence d'une analyse sur l'Afrique représente un vide
qu'il conviendrait de combler par une étude plus globalisante, prenant
en compte les spécificités africaines et congolaises.
Les quelques analyses portant sur la question de protection de
la liberté de manifestation n'ont pas pris suffisamment en compte la
situation de la République démocratique du Congo et ses
spécificités. Elles contribuent néanmoins à la
conceptualisation des standards internationaux sur la liberté de
manifestations. Afin de pouvoir répondre à la question de savoir
si l'on assiste à une éclipse de cette liberté au regard
de ce que Jacques Djoli qualifie, non sans raison, de tératologie des
libertés fondamentales ou cette production protéiforme des
déclarations, chartes, structures relatives aux libertés sur fond
d'indigence effective et des pratiques nocives ou malveillantes, c'est qui est
une forme de dépossession des libertés publiques, l'étude
d'une aire européenne est apparue opportune mais pas suffisante.
Durant les cinq dernières années, les peuples
africains ont réinvesti la rue avec l'intention d'en faire un moteur de
démocratisation. Tous ces mouvements qui ont provoqué plusieurs
mutations tant sur le plan politique que juridique et causé des
dégâts matériels et pertes en vies humaines, n'ont pas fait
à ce jour l'objet de plusieurs recherches afin d'expliquer et
appréhender les contradictions et les paradoxes autours de l'exercice du
droit de manifester. L'essentiel des questionnements sur la liberté de
manifestation, à travers la littérature remarquable, tourne
autour des plusieurs problématiques liées tantôt à
sa fondamentalité, à son implémentation et à
l'établissement des limites à l'exercice de cette liberté,
tantôt à la gestion de l'espace public et privé,
tantôt à la sécurité publique, etc.
Abordant la question, Gabriel Babineau recèle pourtant
les différentes questions liées à la problématique
dont l'occupation des lieux publics, la place de la violence dans la jouissance
de la liberté de manifester et les limites établies dans
l'exercice de cette liberté. Il souligne le fait que la limite
imposée pour assurer le caractère pacifique de la manifestation
ne doit pas restreindre indument le droit de manifester40(*), c'est-à-dire affecter
le noyau dur de la liberté de manifestation ou altérer sa
substance. Très vite, l'importance d'une justice indépendante,
à même de sanctionner les différentes violations, se
réclame.41(*)
C'est pourquoi, parlant de la prise en charge
constitutionnelle et législative du droit de manifester, Omar Bendourou
martèle sur l'établissement du système de contrôle
de constitutionnalité et des sanctions pénales42(*), qu'il considère comme
gage de la protection du droit de manifester. Julie Ferrero propose de
déplacer le point focal de l'analyse de la liberté de
manifestation de la sphère interne au niveau international, dans une
approche « top-down »43(*)sa régulation. L'évaluation des apports
de la protection internationale permettra de mettre en lumière le
contraste entre la force de la consécration de ce droit et l'ambivalence
de sa mise en oeuvre44(*).
Cette étude souscrit à cette démarche. La richesse de la
jurisprudence internationale permet de contribuer et d'inspirer positivement
les éventuelles réformes tant sur le plan juridique
qu'institutionnel afin de rendre plus cohérent l'ensemble du
système juridique de protection du droit de manifester45(*).
La rareté des études axées
spécifiquement sur la liberté de manifestation est reconnue par
les juristes. La liberté de manifestation est souvent engloutie dans la
liberté de réunion pacifique ou d'association auxquelles elle
peut être rattachée avec comme conséquence
déplorable que la majorité de recherches porte sur les droits
fondamentaux en général, pourtant le droit de manifester
présente des caractéristiques spécifiques dues à
son influence sur le plan politique et à son essentialité.
En République démocratique du Congo, les
premières recherches sur la question de la protection de la
liberté de manifestation avaient consisté, principalement,
à préciser son régime juridique d'abord, comme innovation
apportée par la nouvelle Constitution promulguée en 2006, puis,
à démontrer l'inconstitutionnalité du Décret-Loi de
janvier 1999 portant modalités d'exercice de la liberté des
manifestations, lequel décret-loi soumettait l'organisation d'une
manifestation à un double régime, celui de la déclaration
préalable et celui de l'autorisation46(*).
Cet état de choses, avait pour vocation d'affirmer la
suprématie de la Constitution sur le Décret-loi
conformément au principe d'autorégulation du système
juridique. L'article de Yatala et plusieurs conférences
organisées à la suite de la promulgation de la Constitution du 18
février 2006, répondaient de cet objectif47(*).
On citera Trésor Lungungu dont les recherches, en la
matière, proposent l'instauration d'un observatoire de manifestations
publiques pour assurer une jouissance effective du droit de manifester48(*). De notre point de vue, un
organe dépourvu de moyen de contrainte ne saurait permettre de rendre
effective la protection du droit de manifester, car n'exerçant qu'une
magistrature morale.
Cette étude se démarque de celles qui l'ont
précédé. D'abord, parce qu'elle s'inscrit dans la
perspective du droit comparé et ensuite, parce qu'elle ne se limite pas
à identifier les contradictions, les ambiguïtés et les
paradoxes autour de l'exercice de cette liberté, mais propose les
mécanismes permettant d'enserrer cette liberté dans un cadre
juridique répondant aux standards internationaux, susceptibles de
favoriser une jouissance aisée et effective du droit de manifester et
notamment à travers le renforcement (pénalisation) des sanctions
visant l'entrave au droit de manifester.49(*)
Sur le plan du droit positif, en dépit de la
règlementation existante, les manifestations organisées en 2015,
les 19, 20 et 21 janvier, et celles de 2016, par le
`'Rassemblement'' dans le but d'empêcher au Président
Kabila de rester au pouvoir au-delà de la fin de son dernier mandat
fixé au 19 décembre 2016, ont été entravées,
débouchant sur des pertes en vies humaines, sans dénombrer tous
les cas d'arrestations arbitraires et de disparition forcée. Les
comportements des acteurs, lors de ces évènements, n'ont,
à ce jour fait l'objet d'aucune recherche scientifique rigoureuse.
Pourtant, ils suscitent les questions de responsabilité
tant dans le chef des manifestants que dans celui des pouvoirs publics. Cette
responsabilité peut être pénale ou civile et politique.
Elle est pénale lorsqu'elle fait intervenir les notions de trouble
à l'ordre public par le fait de comportement des acteurs ou par le fait
d'entraver volontairement l'exercice du droit de manifester. L'aspect civil de
cette responsabilité réside dans l'appréciation des
dégâts causés et des préjudices subis par le fait de
ces comportements.
3.
PROBLÉMATIQUE
L'étude de la protection de la liberté de
manifestation dans l'espace public en République Démocratique du
Congo suscite denombreuses interrogations que de réponses susceptibles
de favoriser sa compréhension. La garantie constitutionnelle offerte
à l'article 26 de la loi fondamentalepour sa jouissance effective
devrait être complétée par une loi portant mesures
d'application, aux termes de l'alinéa 4 de la disposition
constitutionnelle sus-évoquée.
Le défaut de promulgation formelle de cette loi laisse
cohabiter dans l'arsenal juridique deux textes contradictoires qui tendent
à se neutraliser mutuellement et à favoriser, dans la pratique,
la prédominance des effets de la norme inférieure sur ceux de la
norme supérieure, engendrant ainsi une anomalie juridique susceptible de
porter atteinte au principe de la hiérarchie des normes juridiques.
Compte tenu de cette anomalie juridique, l'étude du
régime de la protection constitutionnelle de la liberté de
manifestation en droit positif congolais, par rapport à d'autres
systèmes juridiques existants, nous a paru nécessaire. Dès
le départ, plusieurs questions ont taraudé notre esprit, dont les
deux principales ci-après : d'abord, quels sont les facteurs qui
participent à la dégradation des conditions d'exercice du droit
de manifester en République Démocratique du Congo ? Ensuite,
si ces facteurs sont identifiés, quelles sont les pistes
thérapeutiques appropriées pour rendre effective la protection du
droit de manifester dans ce pays ?
Telle est la substance de la problématique de cette
étude dont il convient, à présent, de dégager des
hypothèses.
4. HYPOTHESES DE
TRAVAIL
Le scientifique n'est pas seulement celui qui propose des
réponses aux questions posées. Il est aussi, et peut-être
surtout, celui qui pose de bonnes questions et fournit des réponses
adéquates. La validité d'une recherche ne dépendra
pourtant pas seulement de la pertinente des questions qu'elle soulève,
mais aussi de la vérifiabilité des réponses provisoires
formulées en formes d'hypothèses.
En l'espèce, nous partons de l'hypothèse
selon laquelle l'absence d'un régime juridique cohérent,
l'inexistence et l'obsolescence des sanctions de l'entrave ainsi que la
persistance de la culture autocratique et l'incivisme des citoyens constituent
les principaux vecteurs de la fragilité de l'exercice de la
liberté de manifestation en République démocratique
du Congo.
Il s'agit dans cet ordre d'idées, de procéder
à l'harmonisation du système de protection du droit de
manifester, par le renforcement et l'individualisation des sanctions de
l'entrave au droit de manifester ainsi que l'éducation constitutionnelle
en vue d'une citoyenneté active, si l'on veut réellement donner
une portée réelle du droit de manifester, dans un environnement
où le juge joue un rôle central.
5. JUSTIFICATION DE
L'ÉTUDE
La présente recherche se fixe comme objectif principal
de trouver les moyens théoriques et pratiques susceptibles de contribuer
à l'émergence de la liberté de manifestation. La recherche
comparative étant par essence une étudede reforme, l'enjeu
essentiel consisteà identifier, à partir d'une comparaison entre
quelques systèmes juridiques de promotion et de protection du droit de
manifester, le meilleur système afin de contribuer à la
réforme du système juridique congolais.
Principalement, deux facteurs justifient le choix de mener une
recherche sur la protection de la liberté de manifestation en droit
constitutionnel : d'un côté, le désintérêt
affiché par la doctrine vis-à-vis de cette liberté (A) et,
d'un autre côté, le besoin indispensable de protection effective
du droit de manifester (B), garantie de l'expression populaire dont la
privation peut conduire à des insurrections ou des rebellions
armées. Se basant néanmoins sur les réalités
juridiques comme factuelles des autres systèmes juridiques, il importe
tout autant de justifier le choix que nous avons porté sur la France,
l'Espagne, le Bénin (C) pour en faire les miroirs de cette recherche.
5.1. Une question
d'actualité délaissée par la doctrine
La liberté de manifester connaît aujourd'hui une
très forte actualité, et ce dans le monde entier. Paradoxalement,
elle n'a pas fait l'objet d'autant d'études doctrinales que d'autres
libertés, à l'instar de la liberté d'expression, à
laquelle elle peut etre rattachée. A cet égard, offrant des
exemples de limitation apportée à cette liberté
par-delà les frontières, son étude dans une perspective de
droit comparé s'impose. Il s'agit d'examiner la façon dont le
droit positif, notamment français, espagnole, et béninois encadre
cette liberté.
Du même avis que Paul-Gaspard Ngondankoy et Jean-Marie
Denquin, nous partageons le constat selon lequel, il y a moins de
réflexions des spécialistes sur la question de la liberté
de manifestation, laissant la place au politique et à la
Société civile. Pourtant l'idée que la somnolence de la
doctrine facilite la prolifération des monstres n'est pas seulement
ultime vestige de la pensée des lumières. Au-delà de son
influence directe et mesurable, la pensée critique crée un climat
d'insécurité. Elle reste la seule méthode connue pour
insécuriser la bêtise50(*). Dans le même sens, Paul-Gaspard Ngondankoy
s'inquiète du silence de l'intellectuel et craint que cette
liberté demeure l'apanage des acteurs sociopolitiques qui peuvent se
permettre de tout dire ou de ne rien dire sur cette liberté
fondamentale, et notamment le risque de l'enfermer dans son seul aspect
politique et, ainsi, réduire le cercle de son champ
d'application51(*).
Le Constituant congolais de 2006 se démarque nettement
de ses prédécesseurs en ce qui concerne la liberté de
manifestation. Cette liberté est autonomisée, les limitations
constitutionnelles sont supprimées, le régime juridique est
assoupli. Pourtant, il faut bien reconnaître que ces innovations mises en
place n'ont guère suscité l'intérêt de la doctrine.
En dépit de quelques études, généralement peu
enthousiastes consacrées à cette liberté, la question de
la liberté de manifestation a été jetée dans les
oubliettes. Dans ces conditions, l'étude de la protection de la
liberté de manifestation apparaît tout à fait bienvenue.
5.2. L'indispensable besoin de
protection de la liberté de manifester
La recherche de l'ancrage de l'État de droit passe
nécessairement par une protection efficiente des droits et
libertés fondamentaux des citoyens et l'accroissement du rôle du
juge. Les mécanismes de protection des droits fondamentaux, en
général, et de la liberté de manifestation, en
particulier, ont jusqu'ici révélé des vices
congénitaux insusceptibles de favoriser l'âge d'or de ces droits
et libertés pourtant rêvé autant par le Constituant que par
plusieurs analystes de la Constitution du 18 février 2006 en raison
de son caractère libéral.
Cette recherche s'efforce ainsi de comprendre et d'essayer de
trouver un mécanisme de protection notamment grâce au droit
comparé en mettant en avant les ambiguïtés, les paradoxes,
les contractions autour de l'exercice de cette liberté dont l'importance
n'est plus à démontrer.
Pierre Favre fait remarquer qu'il existe une
représentation du droit de la manifestation qui ne correspond nullement
au droit positif.52(*)« L'intuition de départ qui motive
cette recherche est celle d'une éclipse, d'une limitation contemporaine
des libertés, dont la liberté de manifestation fournirait une
vision très nette »53(*). Même si, l'actualité récente a
bien montré la faiblesse des États jadis considérés
comme pays de liberté mais l'embrasement que provoque cette
liberté sur l'ensemble de continent nécessite d'être
expliqué d'une manière rigoureuse. Telle est la justification
importante d'un travail d'évaluation sur la consécration et
l'effectivité d'un droit capital comme celui de manifester dont les
liens avec la démocratie et l'État de droit sont
incontestablement prouvés tant par la doctrine que la jurisprudence.
Une évaluation de l'article 26 de la Constitution du 18
février 2006 s'impose donc, dans le souci de mesurer l'impact de cette
disposition sur la jeune démocratie de la RDC après plus d'une
décennie de sa consécration.La contribution expérimentale
de cette étude se traduit par le fait qu'elle constitue un instrument de
référence important dans les débats liés à
la liberté de manifestation qui oppose systématiquement «
pouvoir » et « peuple ». Importe le choix des pays
ciblés, objet de la comparaison.
5.3. Choix des États,
objet de la comparaison
Le problème du choix des objets à comparer est
étroitement lié à celui du questionnement : la comparaison
n'étant pas un but en soi, mais un moyen, on compare des objets en vue
de répondre à une question préalablement
formulée54(*). Au
regard d'un tel constat, le choix du droit français, en vue de rendre
compte de la protection de la liberté de manifestation, nous a
semblé nécessaire. Ceci s'explique par l'existence d'une
filiation explicite entre le droit congolais et le droit français, par
le fait de l'histoire et, conséquemment, de leur appartenance à
la famille romano-germanique.
En outre, même si d'autres sons de cloche se font
entendre au regard des atteintes constatées contre le droit de
manifester en France, il n'apparaît pas justifié d'affirmer que la
liberté de manifestation subit actuellement une éclipse en droit
français. D'une part, si les textes définissent un régime
d'exercice relativement strict, celui-ci ne connaît pas un durcissement
au cours de la période contemporaine55(*). Au contraire, la pratique sur le long terme se
caractérise par un certain libéralisme, ainsi qu'en
témoigne le nombre de manifestations se déroulant sans avoir
été déclarées. D'autre part, alors que cette
liberté ne bénéficiait auparavant d'aucune protection
juridictionnelle effective, la réforme des référés
a permis de soumettre les restrictions dont elle peut faire l'objet à un
contrôle rapide et efficace du juge administratif. Au regard de cette
évolution, il est possible d'affirmer que l'histoire récente de
la liberté de manifestation en France est marquée par le
progrès et non par la régression56(*).
En ce qui concerne d'autres pays, loin d'être purement
subjective, la préférence donnée aux exemples espagnol et
béninois se trouve, au contraire, commandée par des facteurs
objectifs. L'Espagne demeure l'un des pays européens comportant, en plus
des garanties constitutionnelles plus accentuées de la liberté de
manifestation57(*), des
recours destinés à protéger les droits fondamentaux des
personnes, notamment le recours d'Amparo. Ce recours est une des
compétences principales du Tribunal Constitutionnel prévues dans
la Constitution. L'objet de ce type de procès est la protection du
justiciable contre les violations des droits et libertés reconnus aux
articles 14 à 29 de la Constitution, provenant de dispositions, actes
juridiques, omissions ou simple voie de fait des pouvoirs publics, des
Communautés Autonomes et des autres entités publiques de
caractère territorial, corporatif ou institutionnel, ainsi que de leurs
fonctionnaires ou agents. L'interposition d'un recours d'Amparo, on ne peut
faire valoir d'autres prétentions que celles qui visent à
rétablir ou à préserver les droits ou les libertés
pour lesquels on a formulé le recours.
Malgré les controverses actuelles, le Bénin est
restéun lapse de temps un modèle démocratique à
l'échelle du continent africain et héberge une Cour
constitutionnelle à compter au nombre de plus crédibles et
prolifiques. De plus, le Bénin a été retenu en raison des
mutations constitutionnelles survenues, lesquelles ont placé la
liberté au coeur des règles constitutionnelles de fonctionnement
du pouvoir politique. Le Bénin est le pays qui a opéré les
premiers bouleversements constitutionnels avec la mise sur pied d'une «
Conférence des forces vives de la nation ».58(*) Depuis lors, la
démocratie béninoise ne cesse de rayonner à
l'échelle continentale au point d'apprivoiser les chercheurs. Aussi
c'est l'activisme du citoyen béninois qui commande le choix de ce pays.
La Bénin et la République démocratique du Congo, ont aussi
un héritage colonial. Un régime reconnu pour son caractère
absolu.
Le contour de la recherche ainsi établi, on est
désormais en mesure de fournir des indications sur les méthodes
employées dans cette recherche.
6. INDICATIONS
MÉTHODOLOGIQUES
L'étude des libertés publiques présente
une difficulté particulière, qui tient au caractère de
« discipline-carrefour » propre à la matière59(*). Jean Rivero pense qu'elle
suppose la connaissance d'un certain nombre de données fondamentales
relevant des autres disciplines. Perpétuellement, elle fait appel
à des notions telles la démocratie, la séparation des
pouvoirs, la légalité, la police administrative... et aujourd'hui
de plus en plus celle de l'État de droit.60(*)
Pareille attitude n'infère pas que le chercheur devient
moins juriste ni qu'il cesse de le devenir ; bien au contraire, souligne
Paul-Gaspard Ngondankoy, en s'appuyant sur des approches non juridiques, le
juriste restera juriste, mais il ne fermera pas ses portiques aux autres
spécialistes en la matière.61(*) Par ailleurs, « ne dit-on pas que
celui qui ne connaît que le droit ne comprendra pas le droit »
? « Et que le droit constitutionnel ne trouve toute sa signification
qu'en étant placé dans le point de convergence des
phénomènes juridiques et politiques »?
Si l'actualité semble fournir d'amples justifications
en faveur d'une recherche spécifique sur cette liberté, celle-ci
se veut historique et comparative. Historique en ceque l'étude ne
s'inscrit pas nécessairement dans une analyse synchronique de la
liberté de manifestation ; elle se préoccupe de retracer son
évolution dans l'histoire politique et institutionnelle de la RDC en
prenant en compte les soubresauts qu'a connu ce droit fondamental dans la
construction de son régime juridique. Recherche comparative au regard du
fait que l'encadrement de la manifestation par un régime de police doit
être examiné ainsi que la manière dont les publicistes ont
dans chaque pays de la comparaison, pensé cette liberté.
L'approche juridique aura aidé à résoudre
le problème du contenu des textes et de leur interprétation. Elle
renferme plusieurs grilles de lecture interprétatives :
littérale, téléologique, génétique ou
chronologique, holistique et systémique.
L'interprétation littérale, même si elle
ne permet pas d'appréhender la réalité juridique dans
toute son ampleur, n'est pas à rejeter. Elle est le point de
départ de l'analyse d'une norme. Elle permet de décrypter le
langage juridique, de percer les zones sombres de la linguistique juridique en
décodant le jargon juridique qui paraît de plus en plus comme un
langage ésotérique que seuls les techniciens peuvent
déchiffrer. Dans le contexte précis de cette étude,
l'interprétation littérale a été mise à
profit pour examiner le régime juridique de la liberté de
manifestation depuis que la RDC existe comme État jusqu'à ce
jour.
L'interprétation téléologique a permis de
dégager le sens d'un texte au regard de sa raison d'être,
c'est-à-dire, en fonction du but et l'objectif visés par le
créateur de la règle en étude ; l'interprétation
génétique ou chronologique cherche à appréhender
l'intention de l'auteur de la règle.
L'interprétation systémique : elle cherche
à donner à une disposition son sens en tenant compte de sa place
dans la structure générale du texte. Elle implique donc la prise
en considération d'autres dispositions pour dégager le sens de
l'une d'elles. Jean Combacau explique en effet que, « La science juridique
ne consiste pas à la connaissance des règles mais des
systèmes juridiques articulés au sein desquels aucune n'a de sens
en elle-même et n'en acquiert que parce qu'elle est reliée
à d'autres ».62(*)
Cette conception qu'il convient d'appeler le
systémisme juridique mérite d'être
appréhendée en dépassement des dispositions d'un
même texte. En effet, le systémisme fait le pari qu'il n'y a
d'intelligence possible du monde qu'à condition de saisir les relations
que tissent entre elles les différentes parties des ensembles
organisés. Ramenée en droit, l'interprétation
systémique d'une règle doit prendre en compte les rapports,
contractions et interactions nécessaires de ladite règle avec
d'autres et de la norme dont elle relève avec les autres normes dans le
système juridique, en vue d'en préserver la cohérence.
L'interprétation génétique recherche
l'intelligence de la règle de droit dans les causes qui ont sous-tendu
sa naissance ou sa création. Pour Ambroise Kamukuny en utilisant
l'interprétation génétique, l'on peut également
comprendre une disposition juridique en se référant à la
genèse du texte, en recherchant l'intention de ses auteurs,
généralement dans les travaux préparatoires ou les
débats parlementaires qui ont précédé son adoption.
Il est en effet fréquent que l'auteur du texte ait lui-même dit
les objectifs de son texte ou le sens à lui accorder lorsqu'il en
défendait l'adoption63(*). Ceci est d'autant plus clair, lorsqu'on cherche
à comprendre la charte coloniale.
La méthode juridique ne saurait à
elle-même se suffire. Le recours à la méthode des sciences
politiques trouve toute sa pertinence dans cette étude dans le fait
qu'étudier la règle de droit, particulièrement dans le
domaine constitutionnel, c'est suivre en témoins attentif le mouvement
qui n'a jamais cessé d'entraîner les sociétés
politiques à s'organiser selon un certain ordre (...), écrit
Georges Burdeau.64(*) Et
que l'histoire démontre que la rue a contribué à
influencer les différentes mutations intervenues dans le monde, en
général et en République démocratique, en
particulier.
S'agissant particulièrement de la liberté de
manifestation publique, les problèmes qu'elle pose, ne sont nullement
abstraits ; c'est chaque jour, et à travers le monde tout entier, qu'ils
affleurent à la surface de l'actualité, parfois au premier plan.
Il faut donc, pour donner à la matière son caractère
véritable, et sa dimension, s'attacher à saisir, à travers
la presse et dans la vie, les faits qui s'y attachent, et qu'elle peut
éclairer. Le contact entre l'étude théorique et la
réalité quotidienne, toujours utile, est, en matière de
libertés publiques, particulièrement nécessaire et
fécond. Une fois menée en dehors de la réalité,
cette étude perdrait toute sa pertinence et tout son
intérêt.
La dimension historique que comporte cette recherche sur la
liberté de manifestation appelle elle-même le recours à la
méthode y relative. La situation actuelle des libertés publiques
est fonction de l'histoire : évolution des idées, successions des
événements...tout nous en rapproche. Par ailleurs, «
l'histoire est un trésor aux mains des juristes qui leur permet
d'éclairer la situation des institutions existantes et de prévoir
leur évolution future, et même de connaître les institutions
disparues pour comprendre par contre, les institutions actuelles. C'est dire
que l'histoire permet d'éclairer le présent et de baliser
l'avenir ».65(*)
L'approche comparative pour une recherche de ce genre est sans
doute indispensable compte tenu du caractère universaliste de ce droit.
En outre, la comparaison permet de se dégager du cadre étroit
national, en l'occurrence congolais, de transcender ses particularités
pour mieux en faciliter la compréhension, mais aussi en apprécier
la signification.
Inhérente à toute démarche comparatiste,
la justification du recours au droit comparé se révèle, en
effet, indispensable. A priori, l'objet de l'étude entreprise
constituerait une justification suffisante, l'apport du droit comparé
à l'étude des droits de la personne humaine n'étant plus
à démontrer. Déjà en 1968, René Cassin
écrivait à ce sujet : « toutes les utilités reconnues
en général à la méthode comparative, on les trouve
au maximum dans l'étude des droits de l'homme »66(*). Terrain
privilégié pour le comparatiste, les droits et libertés le
sont, en réalité, tout autant que la liberté de
manifestation, dont le large mouvement de diffusion à travers le monde
lui permet de prétendre à l'universalité. Par
conséquent, l'étude de la protection des droits fondamentaux
à travers la situation de la liberté de manifestation se
voudrait, de par son objet même, particulièrement propice à
une approche comparatiste.
L'universalisme de la liberté de manifestation ne
saurait échapper à la pertinente remarque du doyen Francis
Delpérée lorsqu'il soutient que « la leçon de la
science comparatiste des institutions publiques est aussi de montrer que,
par-delà les ressemblances institutionnelles qu'il est légitime
de relever, voire de grouper en systèmes ou en régimes, des
différences fondamentales subsistent. Elles tiennent à la
diversité des circonstances historiques qui entourent la création
des États »67(*).
Kriesi n'a aucun tort de dire que: «...penser sans
comparaison est impensable et en l'absence de comparaison, toute pensée
scientifique l'est également. Ceci nous permettra donc de faire
incursion hors du seul droit congolais des libertés publiques pour voir
ce qu'il en est sous d'autres cieux, plus particulièrement dans les
États connus pour être des foyers d'émergence des
libertés publiques et dont la situation pourrait être moins
alarmante sur la question de leur protection.
Il s'ensuit qu'une approche de la protection d'un droit
fondamental, telle que consacré par le constituant de 2006 ne
permettrait pas « d'appréhender toutes les problématiques,
réelles ou potentielles » que recèle le sujet. C'est
l'analyse de la question de la liberté de manifestation dans une
approche quelque peu « universaliste » et « intemporelle »
impose le recours au droit comparé. Et ce, d'autant plus que le droit
comparé offre la possibilité de proposer, sur la base des
expériences française et espagnole, une vision prospective de ce
que pourrait être, mutatis mutandis, la protection de la liberté
de manifestation en RDC dans les années à venir.
Car, ainsi que l'a fait remarquer René Cassin, «
parmi les différentes utilités reconnues aux recherches de droit
comparé, figure d'abord l'avantage d'une meilleure connaissance du droit
national, grâce aux réflexions que suscitent les règles en
vigueur dans les droits étrangers : le jeu des miroirs permet
d'apercevoir certains aspects particuliers d'un objet qu'un regard direct n'a
pas permis de découvrir »68(*).
On peut noter que ces pays dans lesquels le vent de la
contestation a soufflé, ont en commun notamment l'héritage
colonial. Voilà qui justifie à suffisance le recours à
cette méthode dans le cadre de la présente recherche qu'il
convient de délimiter.
7. DÉLIMITATION DU
CHAMP DE LA RECHERCHE
L'une des règles fondamentales d'une recherche
scientifique est relative à la délimitation du champ de
l'étude. « Restreindre le champ d'application d'une étude
est une loi de la nature » et « l'objet de la recherche doit
être délimité dans le temps et dans l'espace, si non le
sujet ne peut être épuisé». A cette double limitation
traditionnelle s'ajoute une limitation matérielle de l'objet de la
recherche.
Du point de vue spatial, la recherche concerne principalement,
mais pas exclusivement, la République Démocratique du Congo, ce
qui sous-tend que les droits et les situations de la liberté de
manifestation sous d'autres espaces seront mis à contribution dans le
cadre de cette recherche afin de permettre une migration juridique.
Du point de vue temporel, cette étude se veut d'abord
une évaluation de l'application de l'article 26 de la Constitution du 18
février 2006, telle que modifiée à ce jour. Par la suite,
la recherche remontera à la période qui a
précédé l'adoption de cette Constitution jusqu'à
celle de l'État indépendant du Congo.
Matériellement, la recherche va consister, d'une part,
à l'analyse des textes régissant la liberté de
manifestation, et d'autre part à la présentation des faits et des
événements les plus marquants d'ici ou d'ailleurs, susceptibles
de permettre de lier la théorie à la pratique sur la question en
étude, sans omettre une étude statistique du cadre d'exercice de
la liberté de manifestation en RDC sur cette période
déterminée. Il n'est pas superfétatoire de rappeler que la
recherche se situe dans le droit constitutionnel et précisément
le droit constitutionnel des libertés.
PREMIERE PARTIE :
LA LIBERTE DE MANIFESTATION : SA FONDAMENTALITE,
SES DIMENSIONS HISTORIQUES ET CONXTUELLES
|
Introduction
L'histoire juridique du régime de la liberté de
manifestation en République Démocratique du Congo nous
démontre qu'elle s'inscrit en dents de scie. Les textes y relatifs ainsi
que les régimes politiques qui se sont succédé en ont
développé des clichés aux natures diverses. Tous les
pouvoirs qui se sont suivis l'un à l'autre ont eu maille à partir
avec la jouissance de ce droit par ses titulaires, d'abord en raison de
l'absolutisme qui caractérisait le régime colonial et, ensuite,
au regard du régime dictatorial qui s'en est suivi. En somme, tous ces
deux régimes ayant comme dénominateur commun leur méfiance
vis-à-vis de la liberté.
Le régime juridique de cette liberté a connu une
évolution tributaire de conceptions dominantes, qui émaillent les
différents contextes sociopolitiques auxquels l'État congolais a
fait face de ses origines à ce jour. L'histoire politique de la
République Démocratique du Congo connait plusieurs divisions et
subdivisions susceptibles de variations selon une étude à une
autre et selon les objectifs de chaque chercheur.
Les étapes les plus marquantes de l'histoire du Congo
sont cependant connues : la période coloniale, elle-même
répartie en deux sous périodes, celle de l'État
indépendant du Congo et celle du Congo belge ; le règne du
président Mobutu caractérisée par une rude dictature,
englobant l'ère de la "démocratisation" déclenchée
à partir des années 1990 jusqu'au retour à la
République Démocratique du Congo avec l'avènement de
l'AFDL ; ce dernier événement introduira le pays dans une
nouvelle phase, celle des régimes kabilistes ayant balisé la voie
à la Constitution de la 3e République
promulguée le 18 février 2006, jusqu'à la récente
passation des pouvoirs le 24 janvier 2019.
La philosophie de la colonisation sous-tend d'un environnement
très hostile aux droits de l'homme en général et à
la liberté de manifestation en particulier. Celle-ci étant par
essence l'expression des revendications à l'égard des pouvoirs
publics, le régime dictatorial mobutien ne pouvait naturellement pas lui
réserver bon accueil. Ne dit-on pas qu'un pouvoir soupçonneux
redoute toujours qu'une manifestation de rue ne tourne à l'émeute
ou, pire, à la révolution ! Ainsi le droit de manifester
peut apparaître comme une concession, une faiblesse du pouvoir.
« Pourtant, il n'en est rien car contrairement à la
révolution, la manifestation ne met pas nécessairement en cause
le pouvoir, les croyances ou l'identité collective. Il s'agit d'une
soupape, pas d'une bombe »69(*).
C'est à partir de 1990 que les manifestations publiques
reprennent dans leur ampleur et que le peuple redécouvre cette recette
démocratique. L'essoufflement de la classe politique dans la lutte
contre le régime de Mobutu videra de son ampleur la manifestation
publique, jusqu'à ce que l'AFDL vienne en finir avec le régime
dictatorial avant d'en instituer un autre qui sera combattu par plusieurs
mouvements rebelles ; cette étape consacre l'éclipse des
manifestations publiques. L'assassinat de Laurent-Désiré Kabila
en 2001 conduira le pays vers une transition qui a ouvert la voie à la
Constitution de la 3e République.
Cette partie s'attellera à relever la
fondamentalité et la centralité du droit de manifester dans une
démocratie (chapitre I). Il y sera analysé également
l'évolution de l'exercice de la liberté de manifestation publique
en République Démocratique du Congo en vue de mettre en
lumière pour en tirer des leçons, des péripéties de
cette liberté au travers de l'histoire politique du pays (chapitre II).
Cette approche nous place dans la dimension historique de la question. Elle
sublime l'étude en cherchant à appréhender les
problèmes de la protection de la liberté de manifestation
publique dans les origines de celle-ci et à travers son
expérimentation dans la société. Pareille étude
serait sans grand apport si elle ne sert de lumière qui illumine le
présent.
Cependant, la question de la liberté de manifestation
mérite d'être abordée en des termes nouveaux. La
beauté du cadre juridique a déjà démontré
ses limites, ou mieux, son insuffisance à solutionner les
problèmes que posent la jouissance et l'exercice du droit de manifester.
Ces problèmes ne sont pas à rechercher en dehors du cadre
général des droits fondamentaux tant en RDC que dans d'autres
États à travers le monde. Il est ainsi loisible d'examiner, dans
une approche comparative, le droit de la liberté de manifestation
(chapitre III).
CHAPITRE PREMIER :
LA FONDAMENTALITÉ DU DROIT DE MANIFESTER DANS
UN ÉTAT DÉMOCRATIQUE
|
En RépubliqueDémocratique du Congo, la
liberté de manifester est consacrée par l'article 26 de la
Constitution du 18 février 2006 suscitée.
Les manifestations publiques constituent un véritable
levier de la démocratie libérale, et comme nous l'avons
relevé plus haut, la crise qui affecte la démocratie
représentativedémontre l'importance de la liberté de
manifestation. Les limites et les multiples abus des mécanismes de la
représentation démocratique appellent qu'une place soit
aménagée à l'intervention directe dans l'action publique
par le souverain primaire, et, de ce point de vue, la liberté de
manifestation demeure un moyen privilégié.
Mais avant d'aborder la dimension juridique de cette question,
il convient d'analyser la liberté dont la liberté de
manifestation ne constitue qu'une facette70(*) ; seront explorés ensuite le terme
« manifestation » associé ou non au concept
liberté et enfin les concepts dérivant de leur corrélation
(section I).
Un autre problème réel est d'ordre purement
terminologique. Certains auteurs emploient indifféremment certains
concepts alors qu'ils ne sont pas équipollents. De notre point de vue,
il sied d'éviter que la proximité sémantique n'entraine un
imbroglio scientifiquement désagréable (section III).
Mais au-delà de ces aspects théoriques de la
liberté, il faut mettre en exergue la fondamentalité de ce droit
(section II) dans l'ordre juridique de la RDC.
Section
1. Le principe de liberté, fondement substantiel de la liberté de
manifestation
Le fondement du droit de manifester doit être
recherché à partir des concepts qui le composent, principalement
le terme « liberté ». Cette démarche est
indispensable pour cerner la liberté de manifestation sous l'angle du
droit (§1). Ainsi, placée dans un contexte juridique précis
- sous l'angle du droit interne comme du droit international - la
liberté de manifestation mérite d'être
épluchée (§2) pour éviter toute
équivocité et confusion avec les notions voisines(§3).
§1.
Les fondements de la liberté de manifestation
L'étude sur la protection de la liberté de
manifestation implique que soit préalablement déterminés
les contours et le fondement de cette liberté avant toute
explication.
Préoccupation politique et sociale majeure de notre
temps, l'aspiration à la liberté chute dans le formidable gouffre
de perplexité que l'idée génère. Dans un pays
engagé de plein pied dans l'ère démocratique, la
liberté de manifestation occupe une place de choix, en même temps
qu'elle demeure à bien des égards, le baromètre de la
démocratie.
D'après Marcel-René Tercinet, l'histoire
révèle que « la manifestation est l'un des moyens
privilégiés par les citoyens pour affirmer leurs croyances, pour
défendre leurs intérêts, voire pour renverser un
régime politique [...]. Son développement en matière
politique ou sociale traduirait le besoin ressenti par les citoyens de revenir
à la démocratie directe »71(*).
La liberté de manifestation est un droit fondamental
aux implications politiques certaines. Droit subjectif individuel et/ou
collectif lorsqu'elle est consacrée, la liberté de manifestation
devient plus un fait politique lorsqu'elle est exercée. Elle
mérite ainsi, pour une appréhension exacte, d'être
placée dans le viseur optique d'une parallaxe binoculaire, une double
approche simultanée juridique et de science politique, qui permet une
analyse holistique des phénomènes juridiques en droit public.
En effet, la règle de droit est une construction.
L'étudier, c'est suivre en témoin attentif, le mouvement qui n'a
jamais cessé d'entrainer les sociétés politiques à
s'organiser selon un ordre72(*). En revanche, le fait politique découlant de
l'exercice de la liberté de manifestation est spontané. La
maîtrise de la règle de droit, en l'espèce le droit de la
liberté de manifestation, requiert inévitablement la connaissance
des forces qui stimulent la règle, les figurent dans lesquelles elle
s'inscrit et pourquoi pas les mutations sociales qui l'engendrent et qu'elle
provoque.
Saisir le concept « liberté » dans
son articulation juridique est incontournable pour percer le sens de la
liberté de manifestation.
1. Liberté comme
prérogative
Le conflit des libertés tire son origine de celui
opposant la liberté du sujet à la liberté du groupe
social, considérée ici comme la liberté de tous. Il sied
cependant de relever que la liberté du sujet n'est pas forcément
l'opposé de la liberté de tous, une possible conciliation permet
de déboucher par une harmonieuse convergence entre les deux.
L'un de ces concepts polysémiques, le terme
« liberté » peut recevoir plusieurs sens.
Gérard Cornu en relève par exemple une dizaine :
« bienfait suprême consistant pour un individu ou un peuple
à vivre hors de tout esclavage, servitude, oppression, sujétion,
domination extérieure ou étrangère ; situation
garantie par le droit dans laquelle chacun est maitre de soi-même et
exerce comme il veut toutes ses facultés ; exercice sans entrave
garanti par le droit de telle faculté ou telle activité ;
fait de n'être ni arrêté ni détenu, etc.73(*)
Dans l'esprit des lois, Charles de Secondât dit
Montesquieu définit « la liberté comme le droit de
faire tout ce que les lois permettent et de n'être point contraint de
faire ce que l'on ne doit pas vouloir »74(*). De notre point de vue, dans
les rapports avec la loi, la liberté devrait être perçue,
non comme le droit de faire ce que les lois permettent, mais plutôt comme
le droit de faire tout ce que les lois ne prohibent pas. Cette dernière
conception rime avec l'idée qui considère la liberté comme
principe de la vie, sauf à respecter les restrictions nécessaires
qu'impose la coexistence des membres du groupe social, lesquelles restrictions
sont portées par la loi.On se rapproche ainsi de la conception des
révolutionnaires qui considéraient la liberté comme le
pouvoir de faire tout ce qui ne nuit pas à autrui75(*).
La liberté apparaît ainsi comme un pouvoir
d'autodétermination, en vertu duquel l'homme choisit le comportement
qu'il adopte. En définitive, avec Barthélémy
Omeonga76(*), nous
considérons la liberté comme le pouvoir reconnu à la
personne de déterminer sans contrainte son action ou sa pensée.
Elle constitue donc une prérogative du point de vue de son titulaire et
de ses attributs, et tend à ignorer le contexte social dans lequel
s'inscrit nécessairement son exercice, contexte qui peut l'amener
à se heurter à d'autres intérêts légitimes.
2. Un concept à
controverses
Aussi vieille que l'humanité, la recherche de la
liberté demeure d'une redoutable modernité77(*). C'est en effet l'une des
préoccupations de la société internationale
exprimée lors du Sommet du millénaire, c'est-à-dire
à l'occasion de la réunion extraordinaire des Chefs d'État
et de Gouvernement tenue au siège des Nations Unies à New
York du 6 au 8 septembre 2000, parmi les valeurs fondamentales que
doivent sous-tendre les relations internationales au
XXIème siècle figure «la liberté
»78(*).
La valeur liberté intéresse autant les
générations actuelles, futures que passées79(*). Avec Maurice Agulhon,
admettons dès maintenant que « la liberté,
réduite à son principe simple, à sa
définition élémentaire, est une valeur à peu
près unanimement reconnue »80(*). Dans ce combat du millénaire pour notre
liberté, la bataille pour son affirmation en tant qu'attribut de
l'être humain semble gagnée.
Le constituant congolais de 2006 inscrit son oeuvre dans ce
combat, en réaffirmant son adhésion et son attachement à
la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, à la Charte
Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples, aux Conventions des Nations
Unies sur les Droits de l'Enfant et sur les Droits de la Femme.81(*).
Joint à la liberté, c'est alors un ensemble plus
vaste, celui des droits de l'Homme, qui se trouve placé au centre des
discussions politiques et juridiques. Les droits de l'homme
bénéficient depuis quelques décennies d'une promotion
considérable et d'une spécificité corrélative. Sans
parler de leur médiatisation par l'action des très nombreuses
ONG, le droit leur réserve une place privilégiée.
Le Vocabulaire de Lalande commence par indiquer que
« la liberté est l'état de celui qui fait ce qu'il veut
et non ce que veut un autre que lui : elle est l'absence de contrainte
étrangère »82(*). Cette définition générale ouvre
sur de nombreuses questions, dont cette dernière qu'en est-il de la
liberté dans la société ? Pour y répondre, le
Dictionnaire de Lalande distingue deux sens du mot liberté. Dans un
premier, « les mots libre ou liberté marquent simplement
l'absence de contrainte sociale s'imposant à
l'individu »83(*). On remarquera que cette définition se situe
dans la droite ligne de la précédente, qu'elle précise
simplement.
Pour l'illustrer, Waschsmann reprend le propos du héros
du Film d'Orson Welles, Citizen Kane : « Il n'y une
personne au monde qui décide pour moi, et cette personne, c'est
moi », témoigne d'un individualisme
exacerbé84(*). Mais
dans un second sens, dont Lalande précise qu'il est doté d'une
valeur « appréciative », le mot désigne
« non seulement le degré plus au moins haut
d'indépendance que possède l'individu à l'égard du
groupe social dont il fait partie, mais également le degré
d'indépendance que l'on considère comme normale et souhaitable,
constituant un droit et une valeur normale ».85(*) Réunis dans un sommet,
en 1989, les Chefs d'État et de Gouvernement des pays ayant le
français en partage ont rappelé, à l'occasion du
bicentenaire de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, que
la dignité humaine et le respect des droits de la personne sont des
aspirations communes à tous les États de la
Francophonie.86(*)
La philosophie a aussi posé puis amélioré
sa définition en énonçant que la liberté est une
action qui, réalisée par un sujet libre, n'est pas limitée
: « caractère indéterminé de la volonté
humaine ; libre arbitre »87(*). « La liberté, ajoute Ricoeur, n'est
aucunement une entité, une espèce d'être ; c'est un
caractère, exprimé par un adjectif, qui s'attache à
certaines actions humaines »88(*). La liberté est une action qui ne
connaît donc pas non plus de limite extérieure. Elle serait une
capacité d'agir totale que ni l'entendement humain, ni
l'environnement physique ne seraient en mesure de borner.
Mais déjà on pressent un premier hiatus :
l'homme n'est-il pas « libre » d'asservir autrui, de
détruire la liberté du genre humain ? Cela n'est pas
improbable. Car s'il y a « une véritable permanence de
l'aspiration humaine à la liberté, qui traverse
allègrement les époques et réunit les courants de
pensée les plus divers », c'est « en justifiant les actes
les plus opposés»89(*). Cependant, l'évolution du sens du mot
liberté semble nuancer la contradiction selon laquelle la
liberté, en se réalisant, se retournerait contre elle. Au milieu
du XIVème siècle, le concept de liberté semble limiter
l'action du sujet : il devient un « pouvoir d'agir, au sein d'une
société organisée, selon sa propre détermination,
dans la limite de règles définies »90(*).
La novation sémantique, introduite par la suite au
cours du XVIème siècle, ne doit pas masquer cette
réalité : si la liberté est « absence de contrainte
», autrement dit, une « possibilité », un «
pouvoir d'agir sans contrainte »91(*), c'est que les limites - qui pourraient
paraître au premier abord supprimées par l'adjonction des
termes « sans contrainte » - sont intégrées aux
vocables « possibilité » et « pouvoir »92(*).
Une action libre peut ontologiquement tout faire,
possibilité et pouvoir, sauf nier la liberté car l'alternative
est la suivante : soit cette action libre nie la liberté et
recrée une contrainte et, ainsi, contrarie sa propre
définition sous l'angle de « l'absence de contrainte »
; soit elle peut nier la liberté et, pour ne pas contredire sa
définition, la « possibilité » ou le «
pouvoir » d'agir sont les manifestations lexicales de l'inhérence
de limites à la liberté93(*).
Paul-Gaspard Ngondankoy indique que les droits naturels
consacrés dans le texte constitutionnel passent du statut philosophique
à un statut juridique94(*). Il ne s'agit pas, à proprement parler, d'un
passage d'un statut à un autre, ce qui suggérerait une perte du
premier statut en l'occurrence le statut philosophique desdits droits mais d'un
élargissement de celui-ci. C'est ce qui ressort des propos de cet auteur
lorsqu'il renchérit que « leur affirmation dans le texte
constitutionnel revêt donc, de ce point de vue, une double
portée : philosophique d'abord, parce qu'ils constituent des
valeurs justificatives des autres droits et libertés reconnus ;
juridique ensuite, parce qu'ils sont susceptible d'être invoqués,
à titre autonome, comme des droits subjectifs devant leurs organes de
protection.
Dans ce contexte, la conceptualisation de la liberté
pose un premier paradoxe sémantique : une action libre n'est jamais
totalement libre. Aussi pour concrétiser la liberté convient-il
de lever ce paradoxe, mais bien plus, de fixer les contours de la
liberté de manifestation.
Cette liberté d'action postulée conduit
inévitablement à un conflit ; elle en est la prémisse (A).
On peut alors en déduire l'inéluctabilité du conflit
originel en tirant une conclusion qui s'impose : la nécessité de
la liberté de tous (B).
A. Le conflit entre la
liberté du sujet et la liberté de tous
Le fait que la liberté soit « souvent
présentée » à la fois comme un « objet de
conquête » et « une réalité
"inaliénable" »95(*) suscite l'étonnement voire un certain malaise.
Frédéric Laupies estime en effet que la liberté
prétendument donnée demeure discutée. « Si elle
est à conquérir, elle n'est pas déjà donnée
; si, en revanche, elle est inaliénable, elle est toujours
déjà là. Ces deux pôles induisent à leur tour
des contradictions : si on la tient pour inaliénable, sa défense
apparaît inutile et contradictoire ; si on la défend, elle peut
être tenue pour une réalité fragile, voire contingente et
relative »96(*).
N'est-il pas dès lors prudent de tenter de lever cette double
contradiction puisque le consensus à peine énoncé est
déjà fragilisé ?
Selon Philippe Segur, « au commencement
étaient les devoirs et non les libertés (...). L'histoire des
libertés s'écrit alors en creux, à partir de leur
négation »97(*). La liberté est le résultat d'une
conquête de l'homme sur l'homme : « l'histoire des droits de l'homme
est dominée par l'écartèlement de la personne entre
l'obéissance et la délivrance. Mais dans cette histoire, le
devoir précède le droit »98(*).
La liberté, c'est naïvement une faculté
positive, la capacité d'agir sans contrainte. Si « en appeler
à une évidence intrinsèque des droits de l'homme
est une solution paresseuse qui relève d'une illusion culturelle
»99(*), pour
autant, entreprendre de proposer une ou plusieurs significations de la
liberté est un exercice éminemment philosophique et telle
n'est pas l'ambition de ce travail.
C'est la liberté dont seul le droit peut s'occuper :
« le droit est une discipline sociale. Seuls relèvent de lui les
rapports de l'homme avec les autres et la société. Dès
lors, il abandonne au philosophe les aspects du problème de la
liberté étrangers à son objet propre »100(*). La réflexion en
droit ne peut porter que sur l'existence de la liberté perceptible en
tant qu'objet social : « réfléchir sur la liberté,
c'est réfléchir sur les conditions de sa réalisation dans
la vie humaine, dans l'histoire, au plan des institutions »101(*).
B. La
collision des libertés antagonistes
Refonder la résolution du conflit de libertés
résulte de la possibilité ouverte par la notion
d'intérêt général de penser différemment la
conjonction entre liberté du sujet et liberté de tous.
L'intérêt général conçoit autrement le
rapport entre droits et libertés. « Issu de la Raison moderne, il
est le plus mauvais système d'organisation politique à
l'exception de tous les autres »102(*).
En effet, l'intérêt général semble
ici, là, partout, depuis toujours, sous des vocables, certes
différents, lesquels n'occultant pas toutefois la prégnance d'un
intérêt qui transcende les intérêts particuliers et
dont celui-ci procède. « Partout, on s'accorde pour admettre qu'il
existe une chose publique, la republica, à côté et bien
souvent au-dessus de la multitude des choses privées » annonce
Élisabeth Zoller immédiatement en prélude à son
ouvrage103(*). Didier
Truchet voit dans l'intérêt général autant
« un élément régulateur de la liberté
qu'un facteur d'atteinte à celle-ci. Il peut être aussi
l'élément conciliateur de deux libertés antagonistes
»104(*).
La notion d'intérêt général serait
donc appropriée pour comprendre la volonté de limiter
collectivement les libertés et absorber, en principe, tous les cas de
conflits de libertés. La notion d'intérêt
général paraît offrir, comme on va le voir, un
cadre de références global à la liberté en rendant
possible cette mutualisation. La définition de l'intérêt
public en tant qu'objectif de l'État énoncée par le
professeur Zoller corrobore cette prise de position. « Cet
intérêt public, on pourrait aussi dire la chose publique, ce n'est
rien d'autre que l'État105(*) ».
L'État est fait, non pas de la somme de tous les
intérêts privés, mais seulement de la somme de tous
les intérêts que les hommes ont décidé, par un
acte de libre volonté, de mettre en commun »106(*). La notion
d'intérêt général est désormais
convoquée pour rendre compte de ce que la définition juridique de
la liberté, ou pour le dire d'une autre manière, la restriction
de la liberté pour la protéger, est l'affaire de tous. Il existe
donc un intérêt public, distinct des intérêts
privés, un intérêt public en soi »107(*).
C'est cet intérêt public qui constitue le point
conciliateur du conflit entre la liberté du sujet et la liberté
de tous, et la liberté de manifestation mérite d'être
placée dans cette perspective, au regard des impératifs de
l'ordre public qui en imposent les restrictions.
Le postulat de départ de la liberté du
sujet conduit inexorablement à la conséquence que la
liberté de tous est nécessaire. Mais cette
nécessité d'ordre logique aggrave le contexte conflictuel dans
lequel se meut l'exercice de la liberté. L'égale liberté
de tous rend ce conflit inéluctable. Être contraint de
résoudre ce conflit suppose, en premier lieu, qu'on ne peut s'y
soustraire. Précisément, les caractères de la
liberté humaine, sa définition acceptée, montrent
qu'admettre la liberté implique l'égalité entre les
individus. C'est à cette double condition, liberté-attribut et
égalité-corrélat, que se trouve confirmé le conflit
inéluctable. Il naît du télescopage de l'exercice de leurs
libertés par des êtres égaux.
L'homme isolé, et dans son droit d'agir comme il
l'entend, est libre. La liberté, entendue philosophiquement autrement
dit comme un pur fait est théoriquement illimitée. Cependant,
sitôt qu'est admise la liberté de l'homme, sont admises, de plano,
les libertés des hommes, la liberté de tous. Cela tient à
l'énoncé même108(*). Si tous les hommes sont libres, alors ce sont des
êtres également libres. Leur égalité découle
de leur liberté dès l'état de nature.
Symétriquement on comprend qu'« une liberté totale tuerait
l'égalité au profit des plus forts (...) »109(*).
On peut s'appuyer sur le propos de Kant pour expliciter les
conséquences de la liberté110(*). L'auteur de la Doctrine du droit rappelle
qu'« il n'y a qu'un seul et unique droit
inné»111(*):
« La liberté (comme indépendance vis-à-vis de
l'arbitre contraignant d'un autre individu), dans la mesure où
elle peut coexister avec la liberté de tout autre suivant une loi
universelle, est cet unique droit originaire qui appartient à tout homme
en vertu de son humanité »112(*).
Mais il ajoute immédiatement que cette liberté
s'accompagne de « l'égalité innée,
c'est-à-dire l'indépendance qui consiste à ne pas
être obligé par les autres à davantage que ce à quoi
on peut aussi réciproquement les obliger. Par conséquent, la
qualité de l'être humain qui réside dans le fait
d'être son propre maître (sui juris), en même temps que celle
d'un homme intègre (justus), parce que, avant tout acte juridique, il
n'a rien fait d'injuste. Enfin aussi la faculté de faire envers d'autres
ce qui en soi n'amoindrit en rien ce qui leur revient, pourvu qu'ils ne
veulent pas l'admettre (...) : toutes ces facultés d'agir sont
déjà inscrites dans le principe de la liberté innée
et n'en sont pas réellement distinctes (...) »113(*).
C'est une illustration de ce que, chez Kant, liberté et
égalité sont logiquement associées,
l'égalité découlant nécessairement de la
liberté. Si tous les hommes sont libres, alors ils sont forcément
égaux. Il n'existe qu'un seul droit à la liberté, lequel
inclut nécessairement le principe d'égalité. « En
d'autres termes, l'équilibre social, fondé sur un principe
moteur individuel et inné, la liberté, est compensé par un
principe régulateur social, l'égalité. La doctrine
réactualise la pensée de Kant en se référant
à une contraction sémantique inédite :
"l'Égale-liberté"114(*).
L'état de nature, état de liberté pour
l'homme disait Locke115(*), « est aussi un état
d'égalité ; en sorte que tout pouvoir et toute juridiction est
réciproque, un homme n'en ayant pas plus qu'un autre. Car il est
très évident que des créatures d'une même
espèce et d'un même ordre, qui sont nées sans
distinction, qui ont part aux mêmes avantages de la nature, qui
ont les mêmes facultés, doivent pareillement être
égales entre elles, sans nulle subordination ou sujétion (...)
»116(*).
L'égalité, comme limite inhérente à la
liberté, est cependant, faute de règle commune garantissant cette
limite, source de conflits.
Dorénavant identifiée, l'origine du conflit va
peu à peu être appréhendée par l'homme. Ce n'est au
fond qu'au prix du respect mutuel de la liberté de chacun que l'on
parvient à respecter la liberté de tous. Impliquant
l'égalité de jouissance, la vraie liberté,
c'est-à-dire une liberté effective pour tous, ne peut s'exercer
que « dans le respect du droit d'autrui »117(*).
Il faut pour cela trouver un équilibre entre deux
réalités en conflit. Toute la difficulté est effectivement
que « l'égalité (...) et la liberté sont à la
fois opposées et complémentaires »118(*). Cela est
résumé par ce chiasme évocateur : « Trop de
liberté tue l'égalité, trop d'égalité tue
la liberté »119(*). De l'équilibre dépend
l'avènement de la vraie liberté. Or, pour parvenir à
trouver cette vraie liberté, elle doit être respectée par
chacun. « Si l'idée de la liberté était absolue, et
s'il n'existait aucune limite à l'exercice de la
liberté, celle-ci risquerait de s'autodétruire »120(*).
La liberté du sujet entre en conflit avec la
liberté d'autrui et empêche la réalisation de la
liberté de tous. Car, fondamentalement, la liberté est
impuissante à se définir elle-même ; elle ne peut
« s'auto-définir » car elle est de même valeur.
La liberté ne peut par conséquent être
pensée sans recourir à d'autres concepts. Conscient de cette
spirale destructrice de sa propre liberté dans laquelle ce conflit le
fait entrer inexorablement, l'homme va s'attacher à trouver des
solutions aux conflits de liberté, en particulier, en cherchant un
concept ou une notion suffisamment large pour rendre compte de cette
coordination entre liberté du sujet et liberté de tous.
En somme, un élément extérieur susceptible d'arbitrer
pour le résoudre le conflit entre liberté du sujet et
liberté de tous.
§2. La liberté de
manifestation sur la voie publique en question
Les manifestations publiques ont toujours été
organisées et réglementées, mais très rarement le
concept de manifestation publique a été défini. Le droit
positif congolais ne comporte pas des dispositions constitutionnelles ou
légales définissant à proprement parler la manifestation
publique.
Pourtant, celle-ci doit être le plus possible
circonscrite et distinguée de notions qui lui sont proches. Le
décret-loi du 29 janvier 1999 portant réglementation des
manifestations et les réunions publiques énumère les types
des manifestations publiques »121(*). Mais on n'y retrouve guère une
définition de liberté de manifestation. Toutefois, en tenant
compte de cette énumération et a contrario des réunions
publique122(*), le
professeur Yatala définit les manifestations publiques comme
« des rassemblements en déplacement continu, comme les
marches, les défilés, les cortèges, les
cérémonies d'accueil, les processions politiques, culturelles, ou
religieuses »123(*). Cette définition, si elle en est une,
laisse un goût d'inachevé parce qu'elle ne demeure pas moins
l'énumération d'une série d'agissements publics qui
s'apparentent au droit de manifester.
1. Le
sens de la liberté de manifestation
La liberté de manifestation est à la fois un
besoin humain et un moyen d'expression sociopolitique. Il s'agit d'une
liberté d'expression et un support de moyens d'expressions. A ce titre,
la manifestation s'est vue qualifiée par le Conseil constitutionnel
français de « droit d'expression collective des idées
et des opinions ».124(*)
Parmi les besoins fondamentaux qui participent au sens de
l'humain, celui de manifester en est un. En tant qu'humain, toute personne est
toujours animée des désirs et de traduire ses états
d'âmes, des sentiments de natures diverses sont exprimés de
diverses manières : la joie, la colère, l'amour, le
mécontentement ou les émotions de toute sorte. Ce besoin prend
une autre dimension lorsqu'il est ressenti par un groupe d'individus,
c'est-à-dire, quand plusieurs personnes expriment l'un de ses
sentiments.
Selon Marcel-René Tercinet, l'histoire
révèle que "la manifestation125(*) est l'un des moyens privilégiés par
les citoyens pour affirmer leurs croyances, pour défendre leurs
intérêts, voire pour renverser un régime politique [...].
Son développement en matière politique ou sociale traduirait le
besoin ressenti par les citoyens de revenir à la démocratie
directe"126(*).
L'actualité récente en Afrique en
général et en République Démocratique du Congo en
particulier, démontre le rôle de cette liberté dans le
processus de démocratisation des Etats africains. Pour certains, la
manifestation est le moyen le plus efficace permettant aux citoyens de
participer directement à la gestion de leurs pays et d'influencer ses
décisions.
Si, pour plusieurs, corruptibilité de la manifestation
est synonyme de violence, elle est davantage encore synonyme de
détournement et de récupération de sens. « Car,
par définition, un manifestant ne donne pas le sens de ses actions. Il
crie, il marche, parfois il agit dans ces manifestations-actions qui sont
à elles-mêmes leurs propres fins. Mais le travail politique
d'explicitation ne lui appartient pas à tout le moins ni
entièrement, ni directement ». La
« manifestation de papier »127(*), le travail sur le sens
à donner à l'événement manifestant fait toujours
l'objet d'un débat entre les acteurs sociaux et politiques
concernés.128(*)
Soit, les manifestants ne contrôlent pas le sens
politique qui émane du rassemblement. Cela ne signifie toutefois pas que
les manifestants ne manifestent que pour manifester, qu'ils ne s'expriment pas
sur les raisons de leur action lors de l'événement, pris encore,
que « ....la manifestation n'est pas un lieu de débat, d'un
échange d'idées », étant
« dirigée principalement vers l'action ».129(*)
« Le discours discréditant la manifestation
en raison de ses propriétés soi-disant proactives est le
détournement du sens le plus important auquel est confrontée
cette forme de participation à la vie politique. »130(*) Certes, « la
manifestation pacifique et l'impact qu'elle obtient dans l'immédiat
résident avant tout dans le nombre de participants et la force des
slogans et des phrases-chocs, susceptibles d'attirer l'attention des passants
et de colorer le clip destiné au télé-journal du
soir ».131(*)
Peut-être bien que le nombre de participants et les slogans qu'ils
scandent font peu pour avancer de nouvelles idées sur la cause qu'ils
défendent. N'en demeure pas moins ce discours détourne le sens de
la manifestation en ce qu'il nie à cette action sa capacité
à créer un espace de discussion valable et en ce qu'il omet
d'analyser cette action à la lumière de l'argumentaire du
mouvement social auquel elle appartient.132(*)
C'est pourquoi cela serait considéré comme un
voeu d'un retour à la démocratie directe. Dans les pays d'Afrique
comme dans d'autres, l'écart entre la volonté du peuple et l'agir
des élus devient profond. Ce qui fait croire me semble-t-il à une
confiscation de pouvoir du peuple au profit des
élus.
D'une part, dire qu'au sein d'une manifestation, l'action
prend le pas sur le discours ne signifie pas que celle-ci n'est pas un lieu
d'échange d'idées. Malgré l'apparente unité de la
manifestation, il faut se garder de mettre chaque manifestant dans le
même panier. Effort d'organisation, division du travail et unité
de discours obligent, ce ne sont pas tous les manifestants qui agissent
à titre de « porte-parole » auprès des
médias.
Ce ne sont pas non plus tous les manifestants qui
accomplissent un travail d'information. Reste que toute manifestation pacifique
est le théâtre d'une éducation populaire, plus ou moins
formelle (par exemple, kiosque d'information sur la cause défendue et
les causes apparentées, distributions de tract ou teach in133(*)). Reste aussi que toute
manifestation est un amalgame de comportements individuels et
collectifs.134(*) Au
sein du rassemblement, la formation de groupe est le comportement collectif le
plus souvent rencontré.135(*) Composés le plus souvent de personnes qui se
connaissent déjà, ces groupes offrent une structure qui facilite
le dialogue, l'échange et le débat.
D'autre part, la finalité de la manifestation n'est pas
d'apporter une réflexion étoffée et pleine de nuances sur
une situation sociale jugée inacceptable, mais de réveiller les
consciences au sujet de cette dernière en créant un
événement de toutes pièces. Comme le devoir parental de
correction par rapport au devoir d'éducation, la texture
« plus musclée » de la manifestation requiert pour
être comprise qu'elle soit placée en contexte, c'est-à-dire
à l'intérieur du mouvement social auquel en général
elle appartient.
A. La
diversité des formes de manifestation
Aux termes de l'article 2 de la proposition de loi fixant les
mesures d'application de la liberté de manifestation, il est
disposé que : « la manifestation s'entend comme tout
rassemblement sur les voies publiques ou en plein air, préalablement
déclaré, en vue d'extérioriser une conviction ou une
volonté collective affirmant, approuvant ou désapprouvant un
fait, un acte ou une mesure quelconque ».136(*)Dans son alinéa
deuxième, elle distingue la manifestation mobile de la manifestation
stationnaire. Lorsque la manifestation se déplace d'un point à
l'autre de la voie publique, elle est mobile. Elle est stationnaire lorsqu'elle
ne comporte aucun déplacement.137(*) Celle-ci nous semble complète, car, elle
retient trois éléments, qui sont : une action collective,
une action publique ainsi que la portée expressive.
Cité par Gabriel Babinau, André Jodouin
définit, la manifestation comme une « une action collective et
publique qui a pour but la communication ».138(*) Cette définition a
l'avantage d'englober la manifestation sous toutes ses formes. Elle retient
aussi trois éléments essentiels de la manifestation, soit ses
aspects collectifs, publics, et expressifs. Fillieule et Tartakowsky
considèrent que la manifestation renvoie toujours à quatre
éléments : une occupation momentanée d'un lieu
physique ouvert, une expressivité, une pluralité de participants
et une dimension politique139(*). Le quatrième élément n'est pas
toujours évident, du fait que certaines manifestations n'ont rien de
politique étant donné qu'elles ont pour finalité la juste
satisfaction d'un besoin social.
Pour Bernard Stirn,la manifestation est « une
réunion qui présente la double particularité d'être
organisée sur la voie publique et d'avoir pour projet d'exprimer un
sentiment collectif ». Elle peut être fixe ou se combiner avec
un déplacement et un cortège. Mais comme on peut vite s'en rendre
compte, cette approche s'écarte de celles que propose bon nombre de
législations sur la question, qui distinguent les manifestations
publiquesdes réunions publiques.140(*)
La manifestation peut se dérouler dans ces deux types
d'endroits, pourvu qu'il s'agisse d'un lieu ouvert au public. La notion
d'occupation momentanée de lieux physiques ouverts exprime bien cette
idée. La dimension publique de la manifestation est intimement
liée à sa dimension expressive. Pour que la manifestation puisse
communiquer son message, il faut nécessairement qu'elle se
déroule à la vue des gens, donc dans un lieu physique ouvert au
public.
Pour Fillieule et Tartakowsky, il s'agit de la dimension
première de la manifestation : toute manifestation a pour dimension
première l'expressivité, tant pour ses participants que pour les
publics, par l'affirmation visible d'un groupe préexistant ou non, par
la mise au jour de demandes sociales plus au moins précises. Ce second
critère permet d'exclure le rassemblement de foule
hétérogène, sans principe unificateur, mais aussi des
actions politiques visant la discrétion, voir le secret141(*).
Enfin, pour qu'il s'agisse d'une manifestation, celle-ci doit
« se traduire par ou déboucher sur l'expression de
revendications de nature politique ou sociale »142(*). Ce critère est
à la fois central et délicat. Délicat puisque la nature
politique de la manifestation ne serait pas toujours évidente. En effet,
il peut arriver qu'elle soit dérivée plutôt
qu'intentionnelle. Même si celle-ci semble être la plus
considérée surtout en raison de la faillite de système de
gouvernance des Etats. ·Par exemple : une émeute qui
éclate dans un quartier défavorisé peut être le
signe d'une crise sociopolitique. Cette dernière dimension touche
directement au coeur du débat sur l'importance de la manifestation
puisqu'elle sous-entend les liens que la manifestation entretien avec la
démocratie.
La liberté de manifestation peut être mieux
appréhendée dans ses différences avec d'autres expressions
qui ne lui sont pas similaires. Il va de soi que la manifestation
nécessite une pluralité d'acteurs puisqu'il implique toujours une
réunion ou un rassemblement de gens. La manifestation se tient aussi
nécessairement en public, mais il ne s'agit pas ici d'une dichotomie
entre propriété publique et propriété
privée.
B. Ce
que une manifestation publique n'est pas
Il existe plusieurs mouvements ou rassemblement qui
s'apparentent à la manifestation qui méritent d'être
élucidés afin d'éviter la confusion dans leur
appréhension. Parmi ceux-ci, on peut citer l'attroupement et le
soulèvement populaire, les contre-manifestations et autres.
B.1. L'attroupement et le
soulèvement populaire
Sur le plan pratique, il n'est nul doute que l'attroupement
soit confondu à une manifestation ou vice-versa. Cela n'est pas de la
considération juridique. Il faut aussi noter la controverse sur le
caractère licite ou illicite d'un attroupement.
Le droit distingue la manifestation de l'attroupement. Pour
certains chercheurs, les deux concepts ne se renvoient aucunement l'un à
l'autre. Pierre Favre143(*) considère qu'un attroupement est un
rassemblement des personnes qui ne respecte pas les conditions
nécessaires à une manifestation publique.144(*)En d'autres termes, un
attroupement n'est pas très éloigné de la manifestation
mais la nuance qui existe mérite d'être relevée, car sur le
plan juridique les effets sont importants. Yatala soutient que, « la
manifestation publique diffère de l'attroupement qui constitue un
rassemblement improvisé des personnes et qui présente des risques
de trouble à l'ordre public. L'attroupement se caractérise
d'après lui par son improvisation et sa
désorganisation »145(*). Ainsi, il ne bénéficie pas de la
même protection juridique que la manifestation et peut être
réprimé par la loi pénale.
Si le code pénal français réprime
l'attroupement en tant que tel, le code pénal congolais par contre,
réprime l'attroupement lorsqu'il est utilisé pour s'opposer
à l'exécution des travaux publics146(*). Pour Bertrand Pauvert et
Xavier Latour, conformément au principe du libre accès à
la voie publique, le rassemblement de personnes sur celle-ci n'a en tant que
tel rien d'illicite et n'a donc pas à être autorisé d'une
quelconque manière.147(*)
Il en est tout autrement de son déroulement149(*). En effet, tout
rassemblement sur la voie publique peut se voir qualifié d'attroupement,
à la discrétion des autorités publiques. L'attroupement
désigne un rassemblement spontané et inorganisé de
personnes sur la voie ou l'espace publique ; il n'est pas en tant tel
interdit ou illégal. Il ne prend un tel caractère que si,
sommés de se disperser par l'autorité de police, ses participants
refusent de se soumettre à l'invitation qui est faite. A ce moment
l'attroupement prend un caractère illégal150(*) et peut être
dispersé par la force publique151(*).
Il existe enfin un droit spécifique de l'insurrection,
entièrement séparé des droits de la manifestation et de
l'attroupement et qui est assorti des lourdes peines parmi les dirigeants et
pour les fournisseurs d'armes.
B.2. La
contre-manifestation
La contre-manifestation n'est autre que la
manifestation qui s'oppose à une autre en exprimant une opinion
contraire. Etymologiquement, la contre-manifestation, vient du mot
« manifestion », précédé par le
préfixe « contre ».152(*)Si la majorité de
manifestations traduisent les pensées révolutionnaires, nous
devons aussi préciser que d'autres manifestations expriment le soutien
au régime et donc n'a rien de contestataire.En même temps que la
liberté de manifestation occupe l'actualité, la
contre-manifestation, elle se présente comme une alternative à
l'existence d'une pensée unique dans une société
donnée.
Depuis un certain temps, les contre-manifestations ont refait
surface. En République démocratique du Congo, le nombre
d'élus dans une assemblée n'est plus le seul critère pour
identifier une majorité politique. Les contestations récurrentes
des résultats électoraux ont provoqué une crise de
légitimé. Les protagonistes recours ainsi constamment à la
rue pour prouver leur ancrage au sein de la population.
La contre-manifestation entretien aussi un lien étroit
avec la démocratie.En ce sens qu'elle permet non seulement l'expression
des idées et des opinions mais aussi facilite le pluralisme qui est
élément essentiel dans un Etat de droit.Il faut de ce point de
vue, retenir que la liberté d'expression se révèle aussi
bien dans la manifestation que dans la contre-manifestation.
2. La
liberté de manifestation : composantes et corollaires
Le droit de manifester peut être bien compris à
partir de ses composantes et de ses corollaires. Dans les lignes suivantes,
nous allons déterminer les éléments constitutifs de la
liberté de manifester et identifier ses corollaires.
Le droit de manifester se compose de trois
éléments principaux. Il s'agit de :élément
temporels, élément finalistes et élément
objectifs :
L'élément temporel, découle du
fait que le regroupement un caractère momentané, à la
différence de la liberté d'association. Ceci implique que la
réunion et la manifestation exigent un regroupement temporel d'un
groupement d'individus qui poursuivent une même finalité.
S'agissant de l'élément finaliste, ce
dernier se rapporte à l'objectif poursuivit dans la manifestation. Cet
objectif peut être soit la défense de l'intérêt
général, soit de l'exposition des opinions ou des idées
contestataires. Si la majorité de manifestations traduisent les
pensées révolutionnaires, nous devons aussi préciser que
d'autres manifestations expriment le soutien au régime et donc non rien
de contestataire.
Enfin, l'élément objectif, fait la
différence car elle sert à déterminer le typer de
manifestation et le cas échéant le régime juridique
applicable.
§3.
Le lien entre la liberté de manifestation et les autres droits et
libertés
Comme le relève Jean Morange, « il n'y a
guère de liberté qui se conçoive isolée des
autres »153(*). Avant de les distinguer l'une des autres, Henri
Oberdorff traite ensemble « les libertés de réunion, de
manifestation et d'association qui constituent selon lui de libertés
essentielles pour le bon fonctionnement les
démocraties »154(*). En ce qu'elles permettent à l'individu de
participer de manière effective à la vie de la cité, elles
représentent la forme la plus aboutie de la liberté d'expression
collective des idées et des opinions155(*)
1. Une liberté
articulée avec la liberté d'expression
La liberté de manifestation est un mode d'expression
collective d'une opinion ou d'un malaise profond et d'une réclamation de
changement. De par son essence, la manifestation est toujours porteuse d'un
message. L'attitude affichée par les participants traduit souvent le
mécontentement ou le soutien que le groupe porte au régime ou
à son action. C'est l'un des moyens les plus utilisés par les
groupes des pressions pour atteindre leurs objectifs.
La manifestation, lorsqu'elle est revendicative, n'est rien
d'autre que l'expression collective, et non pas individuelle, d'idées et
d'opinions. Les deux libertés sont très étroitement
liées, elles s'articulent, se combinent, se complètent. La Cour
prend soin de faire le départ entre les deux libertés :
l'une est la règle générale, l'autre la règle
spéciale. La connexité des notions permet à la Cour
d'appliquer à la liberté de manifestation, les principes bien
posés relatifs à la liberté d'expression156(*).
2. Une liberté
découlant de la liberté des réunions pacifiques
Traditionnellement, une réunion
est « une rencontre organisée et temporaire de plusieurs
personnes en vue d'entendre l'exposé d'idées, de se concerter sur
la défense d'intérêts ou d'entreprendre une action
commune »157(*). La liberté de manifestation publique se
distingue également de la liberté d'association, car, cette
dernière suppose la constitution des groupes permanents.
En premier lieu, il convient de distinguer les manifestations
publiques des réunions publiques. Celles-ci sont
généralement perçues comme des rassemblements
sédentaires d'au moins deux personnes ne comportant aucun mouvement
continu de déplacement d'un lieu à l'autre, alors que
celles-là implique forcément un déplacement
continu.158(*)
La liberté de réunion est un droit collectif
apparenté à la liberté de manifestation et qui est une
faculté reconnue à toutes personnes, organisées ou non en
association civile permanente, de se rassembler, c'est-à-dire de se
trouver ensemble pour discuter, partager, se divertir...bref, pour faire ou ne
pas faire quelque chose159(*).
Même si plusieurs législations ne donnent pas de
définitions formelles de la réunion, la jurisprudence est
précieuse pour mieux connaitre les formes qu'elle peut revêtir. Ce
sont par ailleurs, des textes concernant le maintien de l'ordre, de la
sécurité qui permettent de la circonscrire encore plus.
Il sied d'explorer la définition de la liberté
de manifestation en droit international. L'une des particularités de
cette dernière est d'être incluse dans la liberté de
réunion, qui peut prendre plusieurs formes. Selon Frédéric
Sudre, « le droit à la liberté de réunion pacifique,
qui se traduit par la formation de groupes momentanés (réunion,
manifestation), permet l'échange en commun d'idées et la
manifestation collective de l'activité publique160(*) ».
Le Rapport conjoint du Rapporteur spécial sur le droit
de réunion pacifique et la liberté d'association et du Rapporteur
spécial sur les exécutions extrajudiciaires. Sommaires ou
arbitraires concernant la bonne gestion des rassemblements (ci-après
« Rapport conjoint ») indique en ce sens qu'« une
«réunion», selon l'acception la plus courante, est un
rassemblement intentionnel et temporaire dans un espace privé ou public
à des fins spécifiques, qui peut prendre la forme d'une
manifestation, d'un meeting, d'une grève, d'un défilé,
d'un rassemblement ou d'un sit-in, avec pour objectif d'exprimer des griefs ou
des aspirations ou de célébrer des
événements161(*) ».
La capacité de se rassembler et d'agir collectivement
est fondamentale pour le développement démocratique,
économique, social et personnel, l'expression des idées et la
promotion d'une citoyenneté engagée. Les réunions peuvent
contribuer utilement au renforcement des systèmes démocratiques
et, parallèlement aux élections, jouent un rôle fondamental
dans la participation de la population en plaçant les gouvernements face
à leurs responsabilités et en permettant l'expression de la
volonté du peuple dans le cadre des processus
démocratiques162(*).
3. Une liberté se
rapprochant de la liberté d'association
Les manifestations emportent association des manifestants,
c'est-à-dire pour manifester, ces derniers ont besoin de s'associer.
Mais n'en vas pas pour autant que toute association débouche à
une manifestation que des individus peuvent s'associer pour bien d'autres
fins. C'est ce qu'explique d'ailleurs plus clairement P.-G. Ngondankoy
lorsqu'il tente de définir la liberté d'association qu'il
qualifie au passage de « droit collectif par excellence »,
comme la faculté reconnue à plusieurs êtres humains de
s'associer, c'est-à-dire de se réunir en vue de coordonner le
travail d'intérêt ou de sentiments163(*).
Plus particulièrement, la liberté de
manifestation est un mode d'expression collective d'une opinion ou d'un malaise
profonde et d'une réclamation de changement. Le message qu'elle porte
est souvent adressée à l'autorité compétente. C'est
pourquoi elle revêt le caractère d'une liberté
fondamentale et fini par bénéficier de la protection juridique.
Section
2. La recherche de la fondamentalité du droit de manifester
Il nous paraît indiqué d'aborder le débat
général sur la fondamentalité des droits et
libertés avant de revenir sur la liberté de manifestation.
Dans plusieurs systèmes juridiques, la notion de droit fondamental ou de liberté
fondamentale renvoie aux droits et libertés situés au sommet de l'ordre juridique.
La fondamentalité se limite alors à la légiconstitutionnalité,dans
d'autres, la fondamentalité est une propriété qui n'est
pas réductible à une source déterminée.164(*)Dans l'identification de la
fondamentalité, le juge peut opposer les normes constitutionnelles, qui
sont toutes fondamentales, et les normes infra-constitutionnelles, dont
certaines seulement peuvent présenter ce
caractère ».165(*)
Parmi les critères de fondamentalité, on peut
retenir les critères formels et non formels, matériels et non
matériels.
§1.
La fondamentalité est-elle liée à une source ?
Plusieurs juristes publicistes attachent la
fondamentalité d'un droit ou d'une liberté à sa
source166(*). Ainsi la
fondamentalité se réduit à un niveau normatif
précis : le niveau constitutionnel ou conventionnel. Dans
l'expression « droit fondamental » indique M. Capitant,
« le caractère constitutionnel, est exprimé par le mot
« fondamental » qui ne signifie rien de
plus »167(*).
Dans la doctrine française, les partisans de l'approche formelle
associent également la fondamentalité à un rang normatif
déterminé : le niveau supralégislatif. Pour le juge
français des référés en revanche, la
fondamentalité n'est pas liée à une source
déterminée168(*).La fondamentalité ne se réduit pas
à un niveau donné de la hiérarchie des normes.
Les libertés fondamentales reconnues trouvent leur
origine soit dans la Constitution, soit dans la loi ordinaire. Cette
idée peut s'affirme en droit congolais lorsque la loi n° 11/023 du
24 décembre 2011 portant principes fondamentaux relatifs à
l'organisation et à la promotion des activités physiques et
sportives en RDC, en son article 2, dispose : « la pratique des
activités physiques et sportives est un droit fondamental pour
tous »169(*).Les obligations juridiques qualifiées de
liberté fondamentale sont issues de normes se trouvant à des
niveaux variés de celle-ci. Ainsi, la fondamentalité, loin de se
limiter à une source de droit déterminée, constitue une
propriété d'une liberté ou d'un droit.
§2.
La fondamentalité est une propriété
L'essence de la fondamentalité n'est pas liée
à la valeur juridique de la norme qui porte la liberté. Celle-ci
n'est certes pas indifférente (du moins si elle est constitutionnelle)
mais elle ne représente pour le juge qu'un indice. « Elle agit
comme un révélateur de fondamentalité. Rien de plus. La
hiérarchie des normes n'intervient pas en tant que telle dans
l'identification de la fondamentalité »170(*). Ce qui caractérise
cette propriété, c'est l'importance ou l'essentialité
d'une norme. Comme l'affirme Gilles Bachelier, « ce qui compte c'est
le caractère éminent de la liberté ou du droit en
cause »171(*).
Ce qui fait le caractère fondamental d'une liberté, c'est son
caractère essentiel.
Pour apprécier la fondamentalité d'une
liberté, le juge administratif doit mesurer l'attachement que lui vouent
les citoyens. Il est aidé, dans cette tâche, par plusieurs
critères ou indices qui permettent de limiter la subjectivité
inhérente à une telle opération. Le critère
principal et presque exclusif est celui de la valeur juridique suprême.
Par hypothèse, « les règles de valeur constitutionnelle
sont toutes formellement et matériellement
fondamentales »172(*). « A l'inverse, les normes
infraconstitutionnelles ne sont pas fondatrices d'un ordre juridique,
c'est-à-dire formellement fondamentales »173(*). Si certaines d'entre-elles
peuvent le cas échéant s'avérer fondamentales, c'est
uniquement en raison de leur importance, donc exclusivement d'un point de vue
matériel ou substantiel.
Ainsi, il ressort de la jurisprudence une opposition, non pas
entre les normes « disponibles » (législatives ou
infralégislatives) et les normes « indisponibles »
(supralégislatives), mais entre les normes constitutionnelles (qui sont
toutes et nécessairement fondamentales) et l'ensemble des autres normes
(dont certaines seulement sont fondamentales)174(*). La source constitutionnelle prévaut sur
toutes les autres sources de découverte des libertés
fondamentales. Les autres sources ne jouent qu'un rôle subsidiaire,
supplétif. En raison de l'importance que revêt l'activité
sportive, la loi régissant l'exercice du sport en République
Démocratique du Congo qualifie ledit exercice d'un droit fondamental en
raison notamment de son essentialité.
La vocation prioritaire de la Constitution dans la
détermination de la fondamentalité s'explique par une
considération simple : l'attachement des citoyens à un droit
ou à une liberté est directement formalisé dans la loi
fondamentale. Cela étant, les citoyens peuvent également
manifester un attachement à un droit ou à une liberté sans
que celle-ci ne figure dans la Constitution. Enoncée simplement par une
norme infraconstitutionnelle, elle peut néanmoins être
essentielle, c'est-à-dire présenter un caractère
matériellement fondamental. Ainsi, source principale des libertés
fondamentales, la Constitution n'en représente pas le gisement exclusif.
La source constitutionnelle recèle nécessairement la
fondamentalité ; les sources infraconstitutionnelles ne sont
susceptibles de la révéler que de façon exceptionnelle.
Cette place privilégiée de la Constitution.
1. La
constitutionnalité comme indice de fondamentalité
La constitutionnalité n'est pas une condition de la
fondamentalité mais elle est plus qu'un indice. Elle n'est pas
nécessaire, dans la mesure où des normes non constitutionnelles
peuvent se voir reconnaître un caractère fondamental. Toutefois,
elle est plus qu'un indice puisqu'elle suffit, à elle seule, à
qualifier une norme de fondamentale. Il s'agit d'un critère et
même du critère qui est, de loin, le plus important, car il est
à lui seul suffisant pour caractériser la fondamentalité
d'une norme.
Il est le critère par excellence de
fondamentalité. Les normes constitutionnelles bénéficient
d'une présomption de fondamentalité. Elles correspondent aux deux
acceptions du terme « fondamental » ? D'une part,
elles présentent un caractère essentiel, ce qui justifie leur
consécration dans un texte placé hors des majorités
parlementaires. D'autre part, elles sont au fondement de notre ordre juridique
et politique. Par-là, la constitutionnalité est par essence
révélatrice de fondamentalité.
Les normes constitutionnelles sont formellement
fondamentales ; elles sont même les seules normes formellement
fondamentales. Comme l'a indiqué Robert Alexy, « Les normes de
droits constitutionnels sont formellement fondamentales comme résultat
de leur place au sommet de la hiérarchie du système juridique
(...) »175(*),
« la base indispensable des normes juridiques qui règlent la
vie de la collectivité »176(*). » L'unité et la cohérence
d'un ordre juridique se forment autour de sa loi fondamentale. Celle-ci, en
raison notamment de la stabilité particulière qui la
caractérise, représente le fondement et la fondation d'un ordre
juridique »177(*) ; elle en établit les assises. Elle
représente le fondement de validité de toutes les autres
normes178(*).
A mesure que l'on s'élève dans la
hiérarchie des normes, la procédure d'adoption et de modification
des actes normatifs devient plus lourde, c'est-à-dire requiert des
formalités plus contraignantes et des consentements plus difficiles
à obtenir : la stabilité des règles et principes
constitutionnels bénéficient d'une stabilité remarquable.
« Les règles de droit contenues dans le bloc de
constitutionnalité sont beaucoup plus assurées d'une performance
ou d'une pérennité que celles contenues dans les lois ordinaires.
Le droit donc a un coefficient de sécurité beaucoup plus grand
lorsqu'il est de rang constitutionnel que lorsqu'il est de rang
législatif ordinaire (...) »179(*).
L'ordre juridique étant conçu comme une pyramide
de normes hiérarchiques180(*), les normes infraconstitutionnelles doivent
respecter les prévisions de la Constitution. Dans les conditions
fixées par les textes et la jurisprudence, une disposition
conventionnelle, législative ou administrative pourra voir sa
validité contestée devant le juge constitutionnel ou le juge
ordinaire181(*). En cas
de contrariété avec la loi fondamentale, la norme
infraconstitutionnelle se trouvera, selon les cas, annulée ou
privée d'effet. En tant qu'ils figurent parmi les normes de valeur
constitutionnelle, autrement dit qu'ils représentent la base du
système juridique, les droits et libertés constitutionnels sont
ipso facto fondamentaux.
Les normes constitutionnelles sont aussi matériellement
fondamentales. Norme du consensus182(*), la Constitution représente en effet, le
siège des valeurs et des libertés essentielles.183(*)« le moment
constitutionnel » est par définition le moment de la
coopération générale : « Dans les moments
constituants, les volontés politiques des sujets politiques s'accordent
dans un but commun : établir les principes qui dominent les
intérêts particuliers de chacun pour permettre la vie en commun de
tous184(*) »
Dès lors, c'est dans la Constitution que l'on est censé trouver
les libertés les plus importantes.
Les droits qui y sont énoncés sont en effet,
jugés suffisamment primordiaux ou essentiels pour devoir être mis
hors de portée des majorités parlementaires. Ils correspondent
à « des positions auxquelles on attribue une telle importance
que la décision concernant leur acceptation ou non-acceptation ne peut
être confiée à la simple majorité
parlementaire »185(*). Et de fait, un lien étroit unit depuis
longtemps Constitutions et libertés186(*). En France, le principe d'une définition
constitutionnelle des droits et libertés s'est imposé dès
la Révolution187(*). Les constitutions qui se succèdent depuis
1791 comportent en principe une liste de droits et libertés.
« Même les constitutions les plus autoritaires contiennent au
moins une garantie explicite des principales
libertés »188(*).
La constitutionnalité emporte de plein droit la
fondamentalité. Les normes constitutionnelles sont toutes fondamentales
du fait de la conjonction, en ce qui les concerne, des deux acceptions du terme
fondamental. Rien ne peut affecter la fondamentalité d'un droit.
Notamment, les restrictions législatives apportées à
l'exercice de droit constitutionnel n'en suppriment nullement le
caractère fondamental. Cela étant, le juge administratif
considère qu'une norme peut également être fondamentale
d'un point de vue strictement substantiel. Si la Constitution épuise la
fondamentalité formelle, elle n'épuise nullement la
fondamentalité matérielle.
En ce qui concerne la liberté de manifestation, sa
fondamentalité est hors de toute contestation tant en fonction de son
essentialité que de sa prise en charge par la constitution du 18
février 2006. Si le débat n4est plus permis sur la
fondamentalité de la liberté de manifestation au regard de
précédents développements, il est admis que certaines
libertés consacrées par des normes infra-constitutionnelles sont
aussi fondamentales.
2. La
fondamentalité des libertés infra-constitutionnelles
En ce qui concerne la consécration d'une liberté
fondamentale à partir d'une disposition législative, celle-ci
n'est pas dépourvue de risque au regard des caractères
précaires et subordonnés qui sont aujourd'hui ceux de la loi. Non
seulement la loi peut toujours être privée d'effet pour
inconstitutionnalité ou inconventionnalité mais elle peut en
outre être abrogée par le parlement à tout moment. Pour
autant, l'importance de ce risque doit être relativisée.
En ce qui concerne son identification, la
fondamentalité d'une norme infraconstitutionnelle s'évalue
à l'aune d'un critère purement matériel. C'est sur ce
point qu'apparaît la différence majeure entre les normes
constitutionnelles et les normes infraconstitutionnelles. Alors que le
critère de la valeur juridique suprême est à lui seul
suffisant pour reconnaître la fondamentalité d'une norme
donnée, une disposition de rang infraconstitutionnel ne sera
fondamentale que si elle présente un caractère éminent ou
essentiel.
Section
3. La proximité sémantique impliquant une précaution de
langage dans l'usage de certains concepts
Promouvoir les droits fondamentaux et les protéger
renvoient à deux notions juridiques distinctes nonobstant la tendance un
peu répandue à les confondre. Il convient dans cette section, de
préciser la cloison entre les concepts « promotion »
et celui de « protection » (§1.) en vue de mettre en
lumière l'intérêt scientifique de cette
différenciation.
Cet intérêt nous amènera à examiner
la portée de l'ordre public en ce qu'il constitue l'argument principal
des pouvoirs publics pour justifier la défaillance de protection de la
liberté de manifestation. Par ailleurs, l'ordre public et l'espace
public méritent pareillement d'être différenciés
(§2), au motif que l'occupation de celui-ci est de nature à porter
atteinte à celui-là.
§1.
La distinction entre la promotion et la protection
Avant de différencier les deux concepts, promotion et
protection, il nous paraît indispensable d'abord de les définir
séparément. Ainsi, au premier point il sera fait un
dégagement conceptuel du mot promotion et protection.
1.
Définition des concepts promotion et protection
Les deux concepts sont parmi les concepts les plus
utilisés en matière de droits fondamentaux au point de se
confondre mutuellement. Pour certains la promotion est synonyme de protection.
Que sont-ils ? Et que signifient-ils exactement ?
A.
Promotion
Le mot promotion vient du latin promotio qui signifie
avancement. Selon le dictionnaire Larousse, le mot promotion vient du verbe
promouvoir, du latin « promovere » qui signifie faire
avancer.189(*) Le mot
signifierait aussi favoriser le développement ou l'essor de quelque
chose ou encore mettre en oeuvre. Dans le cadre de cette recherche, c'est le
deuxième sens du mot qui sera plus rapproché de notre objectif de
recherche. Nous pouvons ainsi définir la promotion comme étant
une action de vulgarisation ou d'éducation aux droits fondamentaux.
L'emploi de ce concept dans cette étude risque
d'être révélateur d'un optimisme exacerbé dans la
mesure où nous avons indiqué plus haut que l'affirmation de la
jouissance effective du droit de manifester demeure encore sujette à
caution en République Démocratique du Congo. Peut-on promouvoir
une liberté fondamentale là où maints observateurs nient
son existence ?
B.
Protection
Le concept protection tire ses origines du mot latin «
protectio » qui signifie protéger, arbitrer, défendre,
ou soutenir quelque chose ou quelqu'un. Il est donc un soin préventif
face à un éventuel risque ou problème. Le concept
protection se définit comme étant de bien être dont devrait
jouir tout individu. Pour le dictionnaire Larousse, la protection doit
être appréhendée comme un ensemble de mesures
destinées à assurer quelqu'un contre un risque, un danger, un
mal190(*).
Par garantie de protection des droits de l'homme, l'on entend
l'ensemble des mécanismes organiques et procéduraux prévus
par le Droit en vue d'assurer la sauvegarde, quelque fois la promotion, des
prérogatives reconnues à la personne humaine contre
d'éventuels atteintes qui proviendraient de toutes parts ou de n'importe
qui.
En droit des droits de l'homme, ces mécanismes sont
soit d'origine nationale, soit d'origine internationale. Si les
mécanismes internationaux sont les plus souvent connus, aidés
pour cela par la « diplomatie des droits de l'homme » et
relayés tant par les médias que par l'action des associations de
défense des droits de l'homme, il n'en est pas souvent le cas des
mécanismes nationaux, surtout ceux institués par la
Constitution.
Le phénomène a pris de l'ampleur en
République Démocratique du Congo non seulement à cause de
la prolifération des associations de défense des droits de
l'homme dont la majorité » est financée par des fonds
extérieurs mais surtout à cause de l'ignorance par la population,
voire du mépris par les autorités, de la Constitution dans la vie
courante.
2.
Intérêt de la distinction
Les concepts promotion et protection sont des plus
utilisés en matière de droits fondamentaux. En même temps
ils sont pris pour synonymes l'un pour l'autre. Dans ce cadre une
précision du langage s'impose en vue d'éviter l'arbitraire et la
confusion dans le langage.
A. Une
exigence doctrinale
Plusieurs instruments juridiques internationaux et nationaux
reprennent les mots promotion et protection sans préciser leurs sens en
termes de définition. Pour en savoir plus, il faut ainsi recourir aux
lexiques et divers dictionnaires. Si ces derniers les définissent, ils
n'établissent pas pour autant leurs divergences. Dans ce cadre, le
recours à la doctrine de vient sans aucun doute une préoccupation
de chercheurs.
Certainsauteurs semblent dans leurs écrits confondre la
promotion à la protection des droits fondamentaux, car, ils utilisent
l'un pour l'autre. Une pareille utilisation peut ouvrir une porte à
l'arbitraire. D'où la nécessité d'établir les
bornes, tout en déterminant préalablement leurs possibles
compénétrations.
B. Une
précision terminologique
Le droit est un énoncé, un discours que l'on
construit à base des concepts. Toute anarchie dans la définition
des concepts employés dans le discours juridique constitue une menace
pour les fondements mêmes de la discipline et la science juridique risque
d'en perdre son rayonnement. C'est dans ce contexte qu'il sied de constater la
difficulté de théorisation à laquelle sont
généralement confrontés les chercheurs en sociales en
général et en droit en particulier.
Ainsi, mettre en lumière la cloison qui sépare
les deux concepts se révèle non seulement comme une
démarche noble dans son essence, mais d'un apport scientifique non
négligeable.
§2.
L'ordre public matériel et immatériel
Dans ce paragraphe, il sera défini successivement les
concepts « ordre public » dans toutes ces dimensions.
1. La
conception retenue de l'ordre public
Définir l'ordre public constitue une tâche
épineuse. La doctrine souligne de manière constante les
difficultés à cerner juridiquement les contours de cette notion,
au contenu insaisissable191(*). L'ordre public est une vaste conception de
l'ensemble de vie en commun sur le plan politique et juridique.192(*) Son contenu varie
évidemment du tout au tout selon les régimes.193(*) A l'ordre public s'opposent,
d'un point de vue dialectique, les libertés publiques et les droits
fondamentaux des citoyens.
Les prémices de l'ordre public remontent au VIeme
siècle, où il est assimilé aux « lois
publiques » puis au « droit public » au sein du
Digeste194(*). A la fin
du XVIIIème siècle, le projet de Code civil de l'an IV
fait référence à la notion d' « ordre
social », tandis que celui de l'an XII évoque de nouveau le
« droit public »195(*). De fait, sous l'Ancien Régime, la puissance
souveraine est considérée comme l'auteur, la garante et la
bénéficiaire de l'ordre social196(*). Dans les provinces, l'intendant constitue le
« garant de la sécurité, de l'ordre social et de
l'ordre public »197(*).
De manière explicite, l'expression « ordre
public » émerge à la Révolution
française. L'essoufflement des structures de l'Ancien Régime
conduit la bourgeoisie à repenser le pouvoir et à formaliser le
pacte social198(*). La
notion d'ordre public figure ainsi dans les deux instruments phares de la
« modernité juridique »199(*) que sont la
Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789200(*) et le Code civil de
1804201(*).
Depuis, l'ordre public surgit à chaque degré de
la hiérarchie des normes et se retrouve dans l'ensemble des branches du
droit202(*). La
pluralité des ancrages de l'ordre public dans l'ordre juridique
illustre, à elle seule, son caractère essentiel. Il s'analyse
comme une norme inhérente au Droit203(*). Cependant, cette notion ne fait pas l'objet de
définition légale, c'est-à-dire d'un énoncé
en droit positif204(*).
A l'image du constat dressé par Georges Vedel à propos du droit,
l'ordre public serait « indéfinissable mais
présent »205(*).
Dans le même sens, Wachsmann soutient que « le
discours de la liberté et celui de l'ordre public sont fondamentalement
contradictoires, sourds l'un à l'autre (...) »206(*). Si au cours des
siècles, les deux notions étaient antinomiques, il n'en demeure
pas moins vrai aujourd'hui, qu'elles tendent à se conditionner207(*).
Il définit l'ordre public comme « l'ensemble
de valeurs dont les pouvoirs publics jugent nécessaire d'imposer le
respect à un moment déterminé »208(*). Ces valeurs sont
hétérogènes et se résumeraient, selon la doctrine
à la sécurité publique, la tranquillité publique,
la salubrité publique ainsi que la moralité publique, cette
dernière étant un complément à la trilogie
traditionnelle. La notion continue ses conquêtes et inclurait aujourd'hui
la dignité humaine, conformément à un arrêt du
Conseil d'État français. En effet, le Conseil d'État de
France, le même qui avait intégré la moralité
publique parmi les composantes de l'ordre public plus de 35 ans avant209(*), a fait de la dignité
humaine cinquième composante de l'ordre public.210(*)
A. La double acception de la notion
d'ordre public
L'indétermination de la notion d'ordre public provient
des réalités diverses auxquelles elle renvoie. De manière
générale, « est d'ordre public, ce qui est si important
qu'est mise en question l'essence de la société ou de son
droit »211(*).
Une première difficulté apparaît ici
puisque s'opposent, en doctrine, les thèses unitaires et dualistes.
Selon les premières, l'ordre public a une réelle unité
conceptuelle. Il se définit comme l'ensemble des règles que les
autorités publiques estiment indispensables pour sauvegarder la
stabilité et les valeurs de la société212(*). Au-delà de la
diversité de ses expressions dans les branches du droit, la notion
d'ordre public est considérée comme une213(*). Pour Paul Bernard, par
exemple, il s'agit « toujours d'assurer le respect d'une exigence
sociale fondamentale »214(*).
A l'inverse, les thèses dualistes considèrent
qu'il y a deux conceptions de l'ordre public215(*). L'une, procédurale ou contentieuse, fait
référence aux règles dont le caractère
impératif s'impose à tous en vue de maintenir l'ordonnancement
juridique général216(*). Il s'agit de l' « ordre des comportements
juridiques », c'est-à-dire des opérations
juridiques217(*). La
seconde, matérielle, renvoie, quant à elle, à la paix
interne, à la sécurité qui permet à un groupe
humain de former une société et donné, l'état
social dans laquelle la paix, la tranquillité et la
sécurité publiques ne sont pas
troublées »218(*). Ainsi envisagé, l'ordre public est celui
à la réalisation duquel contribue la police : il vise l'
« ordre des comportements matériels »219(*).
Cette nouvelle vision de l'ordre public traduit, de toute
évidence, le conditionnement de l'ordre public et la liberté.
Parmi les quatre composantes de l'ordre public, il y a trois premières
qui se rapportent à l'ordre public matériel, suivie de deux
dernières qui sont liées à l'ordre public
immatériel.
B. La
conception matérielle de l'ordre public
Dans le cadre de cette étude, seule l'acception
matérielle de l'ordre public sera examinée,
précisément parce que c'est sous cet aspect que l'ordre public
fait l'objet d'un renouvellement. Prise en ce sens, la notion doit là
aussi être précisée. L'ordre public peut être
défini comme l'absence de troubles au sein de la
collectivité220(*). Positivement, il signifie
« l'établissement, dans la collectivité, des
conditions qui assurent le plein épanouissement de
l'individu »221(*). L'ordre public comprend alors les buts
légalement visés par la police administrative, à savoir,
à titre principal, la sécurité, tranquillité et la
salubrité publique222(*). Il bénéficie, par ricochet, d'une
amorce de définition légale puisque ces objectifs correspondent
à ceux de la police municipale, énoncés dans la loi du 5
avril 1884223(*) et
repris par l'article L. 2212-2 du Code général des
collectivités territoriales.
D'un point de vue matériel, l'ordre public entretient
des liens étroits avec l'intérêt général,
finalité de toute activité administrative224(*). Cependant, l'ordre public
s'en distingue225(*),
dans la mesure où il ne constitue qu'une catégorie
spécifique de l'intérêt général226(*).
De plus, l'ordre public dépasse la seule police
administrative. Celle-ci « n'épuise pas l'essence de l'ordre
public »227(*). Comme le relève Jean Combacau, l'ordre
public comprend non seulement les figures de la police administrative mais
aussi la loi pénale puisque l'une et l'autre visent à mettre fin
aux troubles228(*).
L'ordre public constitue en effet un élément de définition
du droit pénal229(*). L'atteinte à l'ordre public, lors de la
commission d'une infraction, constitue le fondement de l'application du droit
pénal230(*).
Ainsi entendu, l'ordre public remplit des fonctions précises dans
l'ordre juridique.
2. Les fonctions précises de
l'ordre public
L'apparition du concept d'ordre public tient avant tout
à sa fonction dans l'ordre juridique. Il s'agit d'assurer la sauvegarde
des droits et libertés de l'individu « lorsqu'ils ne disposent
pas, par eux-mêmes, des moyens de s'auto-protéger ou de se
réaliser »231(*). En cela, l'ordre public comprend « un
ensemble d'effets juridiques, nécessaires à l'accomplissement de
sa fonction d'instrument de structuration et de cohésion
sociales »232(*). Son rôle consiste à justifier des
restrictions aux droits et libertés afin d'assurer les conditions
sociales de leur exercice. Néanmoins, l'ordre public implique de
limiter leur exercice uniquement dans la mesure où cela est
nécessaire à la protection même de l'ordre public qui
garantit ces droits233(*). Il s'agit d'un « ordre
finalisé », lié à la construction de
l'État libéral et indispensable à la garantie des
droits234(*).
L'analyse fonctionnelle de l'ordre public235(*) explique pourquoi l'ordre
public apparaît de manière concomitante à la proclamation
des droits et libertés à la fin du XVIIIème
siècle. Elle révèle, par là même, la
corrélation entre l'ordre public et les libertés236(*). Cette idée illustre
la continuité du droit237(*). Dès le début du XXème
siècle238(*), le Conseil d'État pose le principe selon
lequel les limitations apportées aux libertés par
l'autorité de police ne sont légales que si le maintien de
l'ordre public les rend nécessaires239(*), du droit de la Convention européenne des
droits de l'homme et, plus généralement, du droit international
des droits de l'homme240(*). Les droits supranationaux reconnaissent aux
États membres la possibilité de limiter les droits fondamentaux
par des impératifs d'ordre public dans stricte mesure où ceux-ci
l'exigent.
En droit constitutionnel, cette « conception
circulaire »241(*) de l'ordre public, défini comme
« norme de nécessité »242(*), découle de la
Déclaration de 1789. Elle ne s'est imposée au législateur
qu'à partir du moment où la Constitution a
bénéficié d'une garantie juridictionnelle à
même d'en sanctionner la méconnaissance. Dès ses
premières décisions, le Conseil constitutionnel impose le respect
de cette dialectique au législateur243(*).
La fonction de l'ordre public dans l'ordre juridique permet
ainsi d'expliquer pourquoi l'ordre public demeure une norme non écrite.
Il comprend « toutes les exigences considérées comme
les plus vitales au sein d'un ordre juridique »244(*). En ce sens, l'ordre public
est une notion changeante245(*). Comme le relève Nathalie Jacquinot,
« la société évolue, ses valeurs changent, ce
qu'elle ne tenait pas pour fondamental peut le devenir et l'ordre public
s'adapte en conséquence : s'il apparaît comme une notion
fixe, quasi-intemporelle, c'est précisément parce qu'il a su
évoluer avec elle »246(*).
L'ordre public matériel ou extérieur s'inscrit
dans le cadre de la trilogie traditionnelle de la notion, à savoir, la
sécurité ou la sureté publique, la tranquillité
publique et la salubrité publique. Cette conception du départ
visait le maintien des conditions de vie saines et paisibles au
bénéfice des populations d'un groupe social donné. Prise
en ce sens, la notion doit la aussi être précise. Elle peut
être définie comme l'absence de troubles au sein de la
collectivité247(*).
3. La
conception immatérielle de l'ordre public
Aujourd'hui, la trilogie traditionnelle, défendue par
Maurice Hauriou248(*)
n'est plus exhaustive. A côté de l'ordre public matériel ou
extérieur, se développe la notion de l'ordre public
immatériel ou intérieur constitué de l'ensemble des
règles juridiques et des valeurs qui s'imposent pour des raisons de
moralité ou de sécurité impératives dans les
rapports sociaux.249(*)
De plus en plus, la notion de l'ordre public immatériel refait surface
sur le champ des libertés fondamentales dont celui du droit de
manifester. En France le juge a considéré comme légitime
l'interdiction de la manifestation ayant comme mobil principal la distribution
de la soupe au cochon. Considérant que parmi les populations
françaises, il existe, celles qui ne consomment pas le cochon. Cette
manifestation était considérée comme une discrimination et
une provocation contre les musulmans et les juifs reconnus pour leur
hostilité à la consommation de la viande de porc.
CHAPITRE DEUXIEME :
L'ÉVOLUTION DES
CADRES CONTEXTUEL ET JURIDIQUE DE L'EXERCICE DE LA LIBERTÉ DE
MANIFESTATION
|
L'État Indépendant du Congo vécut
vingt-trois ans. La création et l'organisation de l'État
Indépendant du Congo, État hors-normes, furent un cocktail
d'ambitions et d'opportunités. L'adaptation aux circonstances joua un
rôle majeur dans l'évolution des ambitions
géostratégiques du roi, dans les campagnes contre les
Afro-Arabes, dans les alliances ou les conflits avec les chefs locaux. Les
attributs d'un État moderne furent fixés sur le papier : lois,
services officiels, organigrammes bureaucratiques et
hiérarchie250(*).
Le roi donna un caractère particulier à cet
État par la constitution d'un « domaine privé »
qui réservait à l'État et bientôt à des
compagnies mixtes les ressources du sol et du sous-sol. Il en alla de
même pour le « domaine de la couronne », concession
gérée par l'État et dont les revenus devaient permettre au
roi de financer des projets durables en Belgique. Avant son annexion par la
Belgique, le Congo ressemblait plus à une entreprise privée
qu'à une colonie classique. Si cette assertion passe pour
vérité, il est dès lors illusoire d'imaginer que les
manifestations publiques puissent prospérer dans une entité
gérée comme une entreprise individuelle.
En 1908, le Congo deviendra une possession coloniale belge.
Comment expliquer cette transformation d'un État en une Colonie ?
Elle ne se fit pas à l'improviste; elle ne fut pas non plus, comme on
pourrait le croire, uniquement le résultat des campagnes menées
contre le régime léopoldien. En fait, l'annexion du Congo par la
Belgique représente l'aboutissement d'un long travail de
préparation : « elle trouve son origine à la fois
dans la volonté du Souverain, dans l'aide financière capitale que
la Belgique avait en une période difficile apportée à
l'État, et dans la conscience de plus en plus grande que le
peuple belge prenait, au début de ce siècle, de ses
responsabilités devant l'oeuvre africaine »251(*).
Une succession d'événements marque les
étapes qui préparèrent cette annexion. Leur point de
départ se trouve en 1889 : cette année, Léopold II
avait fait un testament dans lequel il déclarait
« léguer et transmettre après sa mort, à la
Belgique, tous ses droits souverains sur l'État Indépendant du
Congo ». L'année suivante, la convention du 5 juillet
1890 faisait faire à la Belgique un nouveau pas en avant. Par
cette convention, l'État Belge avait consenti à l'État
Indépendant du Congo un prêt important de vingt-cinq millions de
francs ; en contrepartie de cette aide, il avait reçu une option
qui lui permettait, au bout de dix ans, de s'annexer le territoire du Congo.
Cette annexion possible n'allait pas sans conditions, notamment celle
d'éteindre par voie de confusion la dette contractée.
Une nouvelle étape fut atteinte en 1901. En effet,
à ce moment, la convention de 1890 venait à
échéance et la Belgique pouvait exercer son option.
Déjà une proposition d'annexion était
déposée au Parlement, lorsque Léopold Il, tout en
confirmant son testament et en réaffirmant le droit de la Belgique,
demanda de surseoir à l'annexion jusqu'au moment où le Congo
serait tout à fait productif. En fait, le Souverain voulait
éviter les dangers qu'aurait entraînés une annexion
précipitée, mal préparée.
Déférant au désir du Roi, le Parlement
chargea alors une commission, formée de députés
appartenant à tous les partis, de préparer un projet de loi
sur « le gouvernement des possessions coloniales de la
Belgique ». Ainsi s'annonçait la dernière phase de
l'évolution. Les campagnes déclenchées contre le
système instauré au Congo allaient contribuer à
précipiter les événements, et le 3 décembre 1907 le
projet de loi souhaité était déposé sur le bureau
de la Chambre. Ce projet consacrait la cession à la Belgique de
« la souveraineté des territoires composant l'État
Indépendant avec tous les droits et obligations qui y sont
attachés »252(*). Après de laborieuses négociations,
le Parlement votait le 20 août 1908, la loi réalisant
l'annexion du Congo.
Le 15 novembre de la même année,
l'État Indépendant cessait d'exister pour devenir « le
Congo Belge ». Le pouvoir souverain du Roi Léopold II ayant
été transféré au Royaume de Belgique, la mutation
ainsi réalisée253(*) était riche en conséquence sur le plan
de la règlementation interne : La Constitution belge de 1831
devrait s'appliquer sur le territoire de la colonie, le législateur
belge avait désormais le lourd fardeau de doter la colonie d'un arsenal
juridique conséquent susceptible d'y organiser la vie et le commerce,
dans un esprit de paternalisme assumé par les colons. Il se posera la
question de la jouissance des droits fondamentaux garantis dans la constitution
belge parmi lesquels la liberté de manifestation par les habitants de la
colonie (section I).
Cette période sera suivie par une autre, celle du
règne du président Joseph-Désiré Mobutu, qui
changera l'appellation du Congo en Zaïre et imposera une rude dictature
durant un peu plus de 32 ans. Son règne aura été
précédé par une courte durée d'un règne
latent, qui durera 5 ans, soit de 1960 à 1965. Dans ce contexte de
pouvoir autocratique, il n'est point de doute que la jouissance et l'exercice
des droits fondamentaux de la personne humaine ait connu de sérieuses
entraves. La liberté de manifestation, qui comporte en elle les germes
de la contestation du pouvoir, ne pouvait qu'être regardée avec
beaucoup de mépris sous la dictature (section II). Il n'est cependant
pas exclu que des manifestations aient été organisées
durant cette période. Elles répondaient toutefois à une
stratégie d'expression du militantisme au gré du soutien des
actions du parti unique devenu parti-État, même si certains
mouvements de contestation pouvaient être inventoriés, surtout
vers les années 90. La gestion des manifestations publiques sous les
régimes kabilistes (section III) a vendu une image sombre de la RDC, si
bien qu'au regard des atteintes multiples auxquelles le droit de manifester a
fait face, on pouvait bien conclure à un recul, ou plutôt à
une éclipse de la liberté de manifestation en RDC.
Section
1. Le Congo-Belge : l'exercice de la liberté de manifestation
dans un contexte colonial
Nous aurions voulu aborder ce chapitre avec cette
énigme tragique : qu'aurait été l'Afrique noire sans
la colonisation ? Résoudre cette énigme n'était pas
possible, non pas parce qu'il aurait été fou de vouloir embrasser
tous les changements que la colonisation a introduits dans les
sociétés africaines, non pas tant parce qu'il aurait
été insensé de vouloir appréhender la
complexité des effets d'externalités et d'équilibre
général auxquels la colonisation a donné lieu à
l'échelle du monde, mais parce que d'emblée l'Histoire nous
opposait une impossibilité radicale : aucun contrefactuel n'existe,
tous les pays africains ont été colonisés. Tous ou
presque, puisque seule l'Éthiopie a su rester indépendante
en infligeant une défaite aux Italiens à la bataille
d'Adoua en 1896, faisant de cette victoire la première d'un pays
africain sur les colonialistes.
Dans ces circonstances, il devenait impossible de
considérer l'Ethiopie comme le contrefactuel de l'Afrique avec la
colonisation. Quand tout un continent, et plus encore la plus grande partie de
l'hémisphère sud, a vécu la colonisation, les
retombées sont telles que même les pays indépendants
comme l'Ethiopie n'ont pas évolué comme s'il n'y avait
pas eu de colonisation. Nous ne saurons donc jamais ce qu'aurait
été l'Afrique sans la colonisation.
Pourtant, cette question mérite de rester
posée, car la liberté de manifestation, victime de
l'environnement liberticide colonial, a pourtant contribué, dans
certaines circonstances, à éradiquer cet horrible
phénomène. En tentant d'évaluer l'impact de long terme
de l'histoire coloniale sur le développement des
inégalités en Afrique, il convient aussi, sans en faire l'une des
préoccupations centrale de la présente recherche, de chercher
à rencontrer l'Afrique d'avant la colonisation, ses royaumes, ses
sociétés acéphales, ses régions dynamiques et ses
régions reculées, ses routes commerciales, ses villes, ses
comptoirs, ses peuples.
L'Afrique est encore aujourd'hui perçue comme un
continent qui avant la colonisation n'était « pas assez
entrée dans l'histoire »254(*). L'homme africain comme un homme « qui depuis
des millénaires, vit avec les saisons, dont l'idéal de vie est
d'être en harmonie avec la nature, ne connaît que l'éternel
recommencement du temps rythmé par la répétition sans
fin des mêmes gestes et des mêmes
paroles »255(*).
Mais l'historien Henri Brunschwig, élève de
Lucien Febvre et de Marc BLOCH, héritier de la tradition
« positiviste », émet un autre son de cloche : il
considérait l'histoire comme un travail de rigueur et de raison
fondé sur la critique des textes, à l'écart des
tumultes et des engagements. Dans son ouvrage sur l'histoire de l'Afrique
noire256(*), Henri
Brunschwig donne un éclairage très instructif sur la
période1830-1890, période décisive qui
précéda la période coloniale : « L'Afrique noire
s'ébranlait et se modifiait, tout comme l'Europe à partir
des inventions et des découvertes qui la sortirent du Moyen-Age.
(...)
Le rythme de l'évolution fut à la mesure du
Noir, libre d'accepter ou de refuser les nouveautés : l'Africain n'eut
pas le sentiment d'être contraint et dominé. Il traita en
général d'égal à égal avec l'étranger
et ne se sentit pas entraîné malgré lui sur une voie qui ne
lui convenait pas. Cette évolution aurait pu continuer. Elle fut
interrompue dans le dernier quart du XIXe siècle. (...) L'Afrique noire
était en voie d'occidentalisation lorsqu'elle fut
partagée »257(*).
Pendant quatre-vingt ans, l'histoire de la Belgique a
été celle d'une puissance coloniale. Celle-ci commence en 1885,
lorsque les grandes puissances reconnaissent la souveraineté
personnelle du Roi des Belges, Léopold II, sur l'État
Indépendant du Congo.
Cette histoire coloniale se poursuit jusqu'aux
indépendances des années 1960, en passant par la reprise formelle
de la colonie congolaise par l'État belge en 1908 et, au lendemain de la
Première Guerre mondiale, par celle des anciennes colonies allemandes
du Ruanda-Urundi. Cette période coloniale, qui concerne près de
la moitié de l'histoire de la Belgique, s'est accompagnée de la
mise en oeuvre d'une propagande raciste massive en vue de légitimer la
colonisation dans l'esprit de l'ensemble de la population belge258(*).
Dans cette société coloniale aux élans
absolutistes, la question de la reconnaissance des libertés est complexe
à aborder. Complexe à cause de la promiscuité de la
société coloniale, une promiscuité due principalement
à des disparités juridiques entre les différentes couches
sociales.
Dans son discours cependant, comme parfois dans son agir, le
pouvoir colonial se réfugie à l'ombrage d'un paternalisme qui
tend à justifier et occulte ses atrocités. Conscient de la nature
liberticide du régime implanté au Congo, la Belgique se
résigna de reconnaitre certaines libertés potentiellement
subversives aux congolais. Parmi ces libertés figurent la liberté
de réunion, la liberté de manifestation, la liberté
d'expression, pour ne citer que celles-là. Et pourtant, tous ces droits
étaient consacrés par la Constitution belge qui devrait
s'appliquer aussi dans la Colonie (§1).
Sur terrain, les atrocités commises sur les populations
autochtones du Congo frisaient un mépris total des droits garantis aux
habitants de la colonie (§2).
§1.
Le régime applicable à l'exercice de la liberté des
manifestations
La domination du colonisateur sur le colonisé
s'est accompagnée, sous le couvert du paternalisme, de la
promotion d'une vision raciste de son histoire et de son humanité. Cette
entreprise colonisatrice s'exerce dans une situation de perplexité entre
d'une part la nécessité de civiliser les populations et le vent
de promotion des droits de l'homme259(*). Du côté des colonisés, la
même perplexité de choix hantaient les esprits qui devraient
choisir entre la résignation au paternalisme et la défense de
leurs droits légitimes. Dans ce contexte précis, les populations
colonisées, à défaut d'adresser aux colonisateurs leurs
revendications par l'exercice de la liberté de manifestations publiques,
se sont vues obligées de recourir à d'autres voies d'expression
violentes tels les émeutes, les révoltes, les rebellions, etc.
1. La
résignation au paternalisme
Caractérisée par un paternalisme caricatural,
n'excluant pas une répression féroce de tout mouvement
revendicatif, l'exploitation coloniale ne pouvait qu'obtenir la
résignation des indigènes, qui ne pouvaient que s'acclimater
à cet environnement. La liberté d'expression étant
inexistante, l'opposition prit longtemps un tour religieux, sous
l'égide d'Églises syncrétiques : celle de Simon
Kimbangu, à partir de 1921, celle de la Kitawala (Watchtower), à
partir de 1923, parmi d'autres. Sans oublier les différentes
révoltes, notamment celle de Batetela et autres.
Mais le paternalisme qui régissait les rapports entre
Européens et Congolais ne résista pas à
l'émancipation des populations indigènes traduite à
travers les différents mouvements contestataires. A partir des
années 1950, l'opposition se politisa. En 1956 parut le Manifeste de
Conscience africaine, rédigé par un groupe d'«
évolués » qui réclamait l'indépendance.
L'exemple des colonies françaises qui, tels le Sénégal et,
plus près, le Gabon, accédèrent à la
souveraineté en 1960, entraîna rapidement le Congo belge dans
la bourrasque d'une indépendance qui n'avait pas été
préparée.
A. Une
consécration excluant les indigènes
La loi sur le gouvernement du Congo-belge, votée par le
Parlement belge, reconnaissait certains droits aux congolais à
l'exception de ceux inhérents à la vie démocratique. Les
articles 2 à 6 de la Charte coloniale reconnaissent aux belges, aux
étrangers et aux indigènes, se trouvant sur le territoire du
Congo, deux espèces distinctes de droits : d'une part, des droits
qui s'imposent au respect du Gouvernement, qui limitent son pouvoir
d'intervention, mais ne l'astreignent à aucun service positif, à
aucun devoir d'assistance directe. Ce sont les droits publics et civils ;
et d'autre part, des droits qui exigent de l'État une coopération
active, l'aide puissante de ses agents pour assurer aux
bénéficiaires des avantages de progrès et de civilisation.
Ce sont des droits-créances, dont les droits à l'assistance
prévus surtout par les dispositions de l'article 5.260(*)
La disposition la plus importante demeure le premier
alinéa de l'article 2 de la Charte qui est ainsi libellé :
« Tous les habitants de la colonie jouissent des droits reconnus par
les articles 7, alinéas 1er et 2, 8 à 15, 16,
alinéa 1er, 17, alinéa 1er, 21, 22 et 24 de
la Constitution belge.
Ces articles de la Constitution belge consacrent notamment la
garantie de la liberté individuelle261(*), la prescription sur le juge naturel262(*), le principe de la
légalité des peines263(*), l'inviolabilité du domicile264(*), la propriété
privée265(*), la
nullité des peines de confiscation des biens266(*) et de mort267(*), la liberté de culte
et d'opinion268(*).
C'est pourtant l'article 19 de la constitution belge qui
garantissait la liberté de culte et de manifester ses opinions en public
ou en privé.
B. La
portée libérale de cette consécration
La reconnaissance des droits et libertés aux
indigènes augure le passage d'un régime absolutiste vers une
gestion libérale de la métropole. Et pourtant, à une bonne
lecture des faits, pareille lecture de la situation du Congo-Belge serait une
grave aberration.
L'initiative que la Commission de la Chambre parlementaire
avait prise, en proposant de régler dans la Charte coloniale la
situation juridique des habitants de la colonie, est hautement louable. Aucune
incertitude ne devrait subsister au sujet des règles fondamentales qui
régiraient les droits et les devoirs des membres du nouveau groupement
social. À l'inverse, ce fut une piètre idée en ce sens
qu'elle camouflait cette velléité manifestée dans la suite
de discriminer les sujets belges sur la base de leurs origines.
Sans doute, dans la législation de l'État
indépendant du Congo, de nombreux décrets reconnaissent
isolément certains des droits dont les populations belges trouvent
affirmation dans leur Constitution nationale. Mais, dans les pays dotés
d'institutions constitutionnelles et représentatives, la situation
juridique du citoyen comprend trois séries des droits.
Le paternalisme se découvre ici par le contenu de
l'article 5 de la Charte coloniale. Le législateur belge recommande au
Gouverneur général de protéger les institutions qui
tendent à instruire les indigènes et à leur faire
comprendre et apprécier les avantages de la civilisation. A ce sujet,
les missionnaires chrétiens, les savants, les explorateurs (...) sont
l'objet d'une protection spéciale269(*).
L'autorité coloniale belge estimait que pour l'habitant
du Congo, il ne peut pas encore être de lui reconnaitre les droits
politiques. Après comme avant l'annexion, l'habitant du Congo est
resté soumis à un système de gouvernement absolu.
Après l'annexion, l'absolutisme n'est plus
exercé par une personne physique, le fondateur de l'État
indépendant du Congo, mais l'autorité, pour avoir
été transmise à une personne morale, la nation belge, n'en
a pas moins conservé son ancien caractère. Le fait
qu'après l'annexion les attributions du gouvernement sont
partagées entre un roi constitutionnel et des chambres
délibérantes n'a pas modifié pour la possession coloniale
son régime de dépendance absolue.
Cette répartition des pouvoirs est une affaire relevant
du gouvernement intérieur de la métropole qui détermine,
comme elle le juge convenable, le mode suivant lequel elle exerce sa
souveraineté. Malgré ce partage, les décisions transmises
à la colonie s'imposent sans que les arénicoles ou les
étrangers aient à contribuer à ces mesures, à les
approuver ou à les répudier. C'est cette absence totale de toute
participation des personnes gouvernées à l'exercice des attributs
du gouvernement qui caractérise le système absolutiste.
Ce système puisait son efficacité dans le
recours à la force. Raymond Betts270(*) relève qu'au-delà de la
diversité des théories et des méthodes de la domination
coloniale avancées ou appliquées dans la période de
l'entre-deux-guerres, il ne s'en dégage pas moins un modèle
très net de régime bureaucratique. À l'époque, la
domination coloniale était passée d'un contrôle
militaire à un contrôle institutionnel civil ; le recours
direct à la force, lui, tendait à être
remplacé par la persuasion administrative. Malgré ce changement,
le dernier argument du pouvoir colonial restait le canon. Comme ses plus
ardents défenseurs le faisaient volontiers observer, le pouvoir
colonial s'était établi par la force des baïonnettes et
c'était par elle qu'il se maintenait271(*).
Dans ce contexte, la réticence du législateur
belge à consacrer la liberté de réunion et d'association
(et plus loin la liberté de manifestation) se fonde sur des raisons
évidentes : ces libertés tiennent, aux yeux du Constituant
belge, des droits politiques. Leur consécration ne rimera donc point
avec un régime absolutiste. « Les lois, a dit le Ministre de
la justice, doivent être adaptées à l'état du pays
qu'elles régissent, c'est un véritable contresens de vouloir
appliquer à un pays encore barbare un régime qui n'a
été appliqué à la Belgique qu'après plus de
mille ans de civilisation. Il faut tenir compte des faits. Les proclamations
des principes théoriques ne servent à rien quand elles vont
à l'encontre des réalités272(*). Cette rhétorique ne
faisait qu'occulter la crainte des revendications populaires, et cela
apparaît clairement dans les propos du Ministre de la justice.
En face d'une tendance qui préconisait de reconnaitre
aux belges vivant au Congo tous les droits reconnus aux belges dans la
Constitution, le Ministre rétorque : « Vous voulez
empêcher le Gouvernement de disposer de tout moyen de se défendre
contre les entreprises de mauvais gré et d'empêcher
peut-être des révoltes ou des désordres ».
C'est l'imprévisibilité des soulèvements
qui intrigue les pouvoirs publics belges, et le Ministre de la justice ne prend
pas la peine de le cacher : « nous disons simplement que dans un
pays neuf le pouvoir doit être armé contre des
éventualités dont vous ne semblez pas soupçonner
l'importance »273(*).
A la différence de la liberté de la presse qui a
été entourée d'une protection spéciale, la
liberté de réunion et d'association, pourtant consacrée
par la Constitution belge, n'a pas été reconnue aux habitants de
la colonie.
Deux positions sont possibles devant ce constat. D'abord, le
principe selon lequel la liberté est le principe, avec son corollaire
« ce qui n'est pas interdit est prohibé » permet de
conclure que la liberté de réunion et d'association doit
être considérée comme existante dans la mesure où
l'article 2 de la Charte coloniale n'est pas restrictif.
Ensuite, parce que la liberté de la presse,
figurant dans la même catégorie, ne peut être
réglementée par une mesure administrative que conformément
aux lois et aux décrets qui la régissent274(*), on peut conclure a
contrario que la liberté de réunion et d'association peut, elle,
connaitre des restrictions directement par une simple décision de
l'autorité administrative.
Cette différence de traitement s'explique par la
dangerosité des réunions tumultueuses et des groupements hostiles
au pouvoir colonial, leur soudaineté et leur impact sur la paix
sociale.
2. Un
régime discriminatoire basé sur la race
Le monde colonialiste était fondé sur le
racisme, il n'y a point de doute à cela275(*). Comme P. Curtain et
d'autres l'ont souligné, « l'entrée de l'Europe en Afrique a
coïncidé avec l'apogée, aux XIXe et XXe siècles, du
racisme et du chauvinisme culturel en Europe même276(*) ».
L'examen attentif des textes des chansons qui utilisent la
veine coloniale, montre l'exploitation de la recherche d'exotisme avec ses
conséquences sur le paternalisme, la bonne conscience coloniale et le
racisme sans fard qui prévaut la plupart du temps. L'image de
l'indigène, va être au centre de ce dispositif de
légitimation de l'acte colonial, et devenir le point de cette rencontre
de nationalismes pourtant profondément distincts. En effet, par la force
des valeurs universalistes et la pression des idées nationalistes qui
vont progressivement subsumer le discours colonial, la Belgique va
graduellement créer un modèle de
l'« indigène » pour renforcer et légitimer le
discours colonial de la métropole.
On assistera ainsi à une réglementation
discriminatoire mettant en présence les citoyens belges, les
immatriculés et les indigènes non immatriculés. Il faut
noter cependant que le discours des colons était propagateur d'un
égalitarisme qui véhiculait une idée "fausse" de
l'égalité naturelle entre les hommes, alors que la
réalité faisait état d'un anti modernisme qui se
décline sous différentes facettes, une glorification du monde
rural et de la famille chrétienne, une hiérarchisation de la
société, une glorification des élites, un anticapitalisme
(souvent théorique) et un anti-intellectualisme virulent277(*), destiné à
maintenir une race sous le joug de la servitude coloniale.
L'article premier de l'Ordonnance-Loi n°25-131 sur la
Répression des manifestations de racisme ou d'intolérance
religieuse du 25 mars 1960, prévoit une peine de servitude pénale
d'un mois à un an et d'une amende n'excédant pas 3000 francs, ou
d'une de ces peines seulement, les inscriptions murales, le port
d'emblèmes, les gestes, les paroles ou les écrits susceptibles de
provoquer, d'entretenir ou d'aggraver la tension entre races, ethnies ou
confessions. Le monde colonialiste était fondé sur le racisme, il
n'y a point de doute à cela278(*).
Les effets néfastes de ce racisme sur le plan social
étaient de grande ampleur et brisait le principe. La mobilité
constante d'une population active presque entièrement composé de
migrants, son manque de qualification et le racisme
général étaient autant d'handicaps pour les
travailleurs africains qui auraient voulu réclamer à ses
employeurs capitalistes un meilleur salaire et des conditions de travail moins
pénibles.
A. La
stratification sociale
La société coloniale du Congo comportait trois
grandes catégories de personnes : les belges, les étrangers
et les indigènes. Cette stratification sociale de piètre figure
n'a pas été ménagée par Arnaud Lismond-Mertes,
lorsqu'il déclare à ce sujet que « jusqu'à la
fin, le Congo a été soumis à un apartheid de
fait ».
Les belges désignent ici, toute personne de
nationalité belge vivant dans la colonie. On peut, entre autres, citer
les autorités et autres fonctionnaires belges venus assurer la
prétendue mission civilisatrice ainsi que les religieux qui eux aussi
par l'évangile devrait contribuer à l'asservissent de l'homme
noir par l'évangile du pardon.
Les étrangers sont des personnes des diverses
nationalités vivant en République Démocratique du Congo.
On pouvait recenser, les arabes, les portugais pour ne citer que
ceux-là.
Les indigènes, sont les populations noires
constituées des autochtones. Même si parmi les noires, on
différenciait les évolués autrement appelés les
immatriculés de la première catégorie qui regroupe ceux
dont la mission civilisatrice n'avait pas encore affectés
sensiblement.
Les villes avaient été conçues pour
séparer la ville « blanche » de la ville
indigène. A 18 heures, les indigènes qui travaillaient pour les
Blancs étaient appelés à rentrer chez eux. À 21
heures, on éteignait les lumières dans la « cité
indigène ». Quand un Congolais voulait acheter un morceau de
boudin dans une servait à l'extérieur à travers une petite
fenêtre »279(*). Ce clivage social n'était sans impact
juridique. La jouissance et les catégories des droits subjectifs
étaient fonction de ce clivage social.
René Schoentjes illustrait dans son
« Schéma de la ville congolaise » que pour «
raisons d'hygiène » une « zone neutre » séparait
les quartiers « européens » et « indigènes».
D'une largeur de 500 mètres, elle correspondait, selon son concepteur,
au rayon d'action maximal d'un moustique porteur de la malaria280(*). Ce mode de vie de la
société coloniale ne peut augurer, sauf extrême
naïveté, une égalité des droits entre les membres de
la communauté dont la description venait d'être faite.
B. Une
réglementation discriminatoire
L'article 6 de la Constitution
belge de 1831 est conçu comme suit : « Il n'y a dans
l'État aucune distinction d'ordres. Les belges sont égaux devant
la loi ; seuls sont admissibles aux emplois civils et militaires, sauf les
exceptions qui peuvent être établies par une loi pour des cas
particuliers ».
Deux questions méritent d'être examinées
à la lumière de cette disposition, l'une concernant la
portée même du principe de l'égalité des belges y
consacrée, et l'autre concernant la nationalité des habitants de
la colonie, avant de revenir sur l'appréciation de cette
règlementation.
B.1. L'égalité
des Belges (de la Belgique et du Congo) devant la loi
A l'alinéa premier de
l'article 6, le constituant belge énonce que l'inexistence des ordres
parmi les belges. Cette consécration n'avait, en Belgique de 1908,
qu'une importance historique. Cette disposition avait été
introduite pour écarter la distinction féodale des trois ordres
des nobles, des villes et des campagnes, représentés, à
l'époque hollandaise, dans les États provinciaux. La
déclaration, utile au lendemain de la révolution, est devenue
superflue, voir obsolète ou tout simplement superfétatoire dans
un État acquis aux conceptions de droit public.
Cette répartition tripartite de la population du
Congo-belge découle de l'intitulé du chapitre II de la Charte
coloniale, « Des droits des belges, des étrangers et
des indigènes », même si l'écriture de
ce chapitre soulève un certain nombre de constatations :
1° L'article 2, premier article du chapitre, consacre un
égalitarisme juridique au profit de tous les habitants de la colonie,
qui sera atténué par les dispositions des autres articles dans la
suite. Sauf la liberté de la presse et la liberté de
réunion et d'association, l'article 2 de la Charte coloniale donne
à tous les habitants de la colonie belge les droits publics dont les
belges ont la jouissance sur le territoire de la métropole. Les
étrangers et les indigènes sont ainsi mis sur le même pied
que les citoyens de la mère patrie.
A l'égard des étrangers, il n'était pas
permis d'en décider autrement car, héritière de
l'État indépendant du Congo, la Belgique était tenue par
les stipulations de l'Acte général de Berlin souscrit par cet
État.
Pourtant, aux termes de l'article 5 dudit Acte, les
étrangers, dans le bassin conventionnel du Congo, « jouiront
indistinctement, pour la protection de leurs personnes et de leurs biens,
l'acquisition et la transmission de leurs propriétés
mobilières et immobilières, et pour l'exercice des professions,
du même traitement et des mêmes droits que les
nationaux ».
En plus, il est dans les idées en vogue de
considérer les garanties de la liberté et de la
propriété comme répondant aux légitimes
revendications de la nature humaine, abstraction faite de la nationalité
des personnes281(*).
À l'égard des indigènes cependant, des
débats houleux ont alimenté les travaux préparatoires de
la Charte coloniale.
2° Les droits réels et la liberté
individuelle des indigènes seront réglés par des lois.
Cette habilitation du législateur contenue dans la Charte coloniale
dénote des ambitions constitutionnelles de ses rédacteurs. Les
rédacteurs de la Charte en parlent avec le ton du constituant, comme si
la Charte coloniale était l'oeuvre d'un pouvoir constituant. Son auteur
est le parlement belge qui l'a adoptée selon la procédure
législative, et le doute n'est pas permis sur la nature
législative de la Charte coloniale, car, le Congo-Belge n'étant
pas un État, il ne pouvait pas avoir de constitution.
Même si, dans le cadre d'un État
fédéral, l'entité pouvait se doter d'une constitution,
celle-ci n'aurait pas été l'oeuvre du Parlement de la
fédération.
En outre, l'alinéa 2 de l'article 2 indique que le les
mots « la loi » mentionnés dans les articles 7,
alinéa 2, 8 à 15, 16, alinéa 1er, 17,
alinéa 1er, 21, 22 et 24 de la Constitution belge sont
remplacés, en ce qui concerne la colonie, par les mots « les
lois particulières ou les Décrets ».N'est-ce pas
là une manière sournoise de reconnaitre que la Loi sur le
gouvernement du Congo-Belge est une loi générale, prise en
application de la Constitution belge, notamment de l'article 107,
alinéa 2 ?
Il faut noter que le seul fait d'avoir été
l'oeuvre du Parlement belge demeure insuffisant pour affirmer avec force la
nature législative de la Charte coloniale. Pour avoir été
élaborée et adoptée par le Parlement belge, la loi
fondamentale du 19 mai 1960 relative aux structures du Congo n'en demeure pas
moins la première constitution du Congo indépendant.
Cependant, cette habilitation du législateur par les
auteurs de la Charte coloniale n'est pas sans avantage : elle est de
nature à préserver les droits réels et la liberté
individuelle des indigènes des interférences intempestives de
l'administration coloniale.
3° La coutume avait une place dans l'ordonnancement
juridique de la colonie. C'est l'article 4, alinéa 2 de la Charte
coloniale qui le consacre. Cette disposition, encore que se
référant expressément à la matière des
droits civils, a été interprétée comme
exprimant le principe suivant lequel le droit coutumier continue
à régir la vie des indigènes non
immatriculés.
De son côté, la législation sur les
juridictions indigènes édictait, parmi les règles de
fond applicables par lesdites juridictions : Les tribunaux
indigènes appliquent les coutumes pour autant qu'elles ne soient
pas contraires à l'ordre public universel. Dans les cas
où les coutumes sont contraires à l'ordre public
universel, comme en cas d'absence de coutumes, les tribunaux jugent
en équité. Toutefois, lorsque les dispositions
légales ou réglementaires ont eu pour but de substituer
d'autres règles à la coutume indigène les tribunaux
indigènes appliquent ces dispositions conformément à
l'article 18 tel que résultant du décret du 17 mars 1938.
Cependant, si le droit coutumier existait légalement et
était dès lors, applicable, il était tenu en
échec, ainsi qu'il ressort des textes précités,
lorsqu'il était contraire soit à la législation
écrite soit à l'ordre public.
Devait être écartée toute coutume qui
aurait été en opposition avec la législation
écrite lorsque celle-ci avait été promulguée
à l'intention même de la population indigène soumise
au droit coutumier282(*).
3. Analyse de l'Ordonnance n°
025/555 et l'Ordonnance n° 25-55 du 05 octobre 1959
La société coloniale a été
marquée par une véhémente hostilité à toute
revendication politique. Cette intolérance politique aura des
conséquences, des répressions sanglantes des manifestations qui
auront émaillées les dernières années de la
colonisation belge. Ce texte d'un article avait comme objectif principal de
réprimer toutes les manifestations racistes et de renforcer l'ordre
public colonial. Une analyse rigoureuse de cette d'ordonnance confirme sans
ambages la peur qu'éprouve le régime colonial face au
caractère dangereux et subversif que représente la
manifestation.
L'ordonnance n° 25-505 du 5 octobre 1959
réglementait les manifestations, réunions ou rassemblements en
plein air283(*).
Tout cortège, défilé, manifestation,
réunion ou rassemblement de personnes en plein air ou en lieu non
fermé ou découvert était soumis à une autorisation
préalable et écrite. Étaient dispensées de
l'autorisation préalable, si elles étaient conformes aux usages
locaux, les sorties sur la voie publique et les réunions publiques
culturelles284(*).
La demande de l'autorisation devait être écrite
et parvenir à l'autorité compétente au moins six jours
avant la date de la manifestation, réunion ou rassemblement285(*). La violation des
dispositions légales exposait son auteur à une peine de servitude
pénale de deux mois au plus et ou à une amende de deux mille
francs286(*). Bien
qu'ainsi garantie, la liberté de manifestation avait de la peine
à se traduire par un exercice réel.
§2 La manifestation et
la colonisation
Les précédents développements ont
indiqué que la législation coloniale avait consacré un
apparent égalitarisme entre les indigènes, les étrangers
et les citoyens belges vivant dans la métropole.
Cependant, ce serait faire preuve de naïveté que
d'admettre que la règle de l'article 2 de la loi sur le gouvernement du
Congo-Belge pouvait connaitre une application effective au regard du contexte
colonial même. La Charte coloniale pouvait traduire la
réalité dans le vécu quotidien des indigènes. Une
chose est la consécration d'un droit, une autre en est son
effectivité.
La société coloniale a été
marquée par une véhémente hostilité à toute
revendication politique. Cette intolérance politique aura des
conséquences des répressions sanglantes des manifestations qui
auront émaillées les dernières années de la
colonisation belge.
1.
L'intolérance politique et sociale
Le petit comité de parlementaires belges qui
prépara l'annexion du Congo jeta les bases d'un « régime
colonial modèle » qui devait être au-dessus de tout
soupçon. Il élabora un système hiérarchique et
paternaliste contrôlé par Bruxelles pour gérer la colonie
de manière efficace et économiquement autonome, se
débarrassant chaque fois que possible des tâches non
administratives (enseignement, travaux d'infrastructure, médecine).
Ce système fut aussi autoritaire : malgré la
Charte coloniale, qui fit office de constitution du Congo belge, le travail
obligatoire ne fut effectivement pourchassé qu'à partir des
années 1930. Les libertés de presse, de réunion,
d'association ne furent, elles, effectives qu'à partir de 1959. Dans les
années 1950, les idéaux de modernisation matérielle
renforcèrent la conviction que le Congo était une « colonie
modèle ». Sans mauvaise conscience, les sections consacrées
au Congo par l'Exposition universelle et internationale de 1958 communiquent un
message rayonnant d'optimisme matériel287(*).
Un peu plus avant, au cours des années 1900,
l'État Indépendant du Congo a été accusé
d'avoir toléré, sinon organisé, la mise en place d'un
vaste « système » de brutalités et d'actes de barbarie,
mutilations, actes de cannibalisme, représailles massives, etc.
A.
L'intolérance politique
Le temps qui précède l'indépendance est
une période de forte agitation politique justifiée par la
grandeur de l'enjeu : l'indépendance du Congo belge. En
prélude de cette période, plusieurs manifestations ont eu lieu.
Celles-ci visaient l'élimination de toute forme de discrimination.
Du point de vue juridique, la réglementation est
fonction de l'appartenance au clan des colons ou à celui des
autochtones. La période coloniale fut totalement négatrice de ce
droit fondamental. Mais il faut souligner qu'au cours de cinq derniers mois qui
précédaient le 30 juin date de l'indépendance plusieurs
mutations sont intervenues pour éradiquer toute forme de violence et
ainsi bannir l'intolérance. Tous les signes distinctifs sont
obligés de disparaître.
En raison de la notion de l'ordre public colonial, elle
n'avait ni permis ni facilité la jouissance de la liberté de
manifestation aux autochtones congolais. Cette période fut
caractérisée par des fortes tensions. On a enregistré
plusieurs manifestations. Certaines se sont muées en rebellions,
d'autres en mutineries ainsi que en révoltes. Toutes ces formes de
contestations traduisent la détermination des congolais de mettre fin au
système colonial et son cortège d'actes autoritaires.
Alors que la Constitution belge de 1831 disposait en son
article 14 que la liberté de culte, celle de leur exercice public ainsi
que la liberté de manifester288(*) ses opinions en toute matière
étaient reconnues. Ce texte était appliqué au Congo belge
au moyen la loi sur le gouvernement du Congo belge du 18 octobre 1908 dite
« Charte coloniale » ainsi que par des lois
particulières.
Comme il découle des précédentes
analyses, une discrimination était faite dans la jouissance de certains
droits, dont celui de manifestation, à l'égard les
indigènes et les belges vivants dans la colonie.
Pour remonter aux origines, lorsque Henry Morton Stanley a
établi l'autorité du roi en 1879 sur le pays, qui devint en 1885
l'État indépendant du Congo, propriété
privée du roi de Belgique Léopold II, il a essayé
d'introduire, à l'instar de tous les colonisateurs, les cadres
politiques et administratifs qui lui étaient familiers en Europe,
quoique sous une forme minimaliste et détournée de ses objectifs
initiaux.
Les structures administratives et étatiques furent
imposées à une population qui disposait déjà, selon
les régions, la langue et l'expérience historique, d'une grande
variété d'organisations politiques. Parmi cette population,
certains se considéraient comme descendants du royaume de Kongo, avec
une organisation politique de forme hiérarchique et des schémas
d'échanges commerciaux avec des terres lointaines ; d'autres
étaient des paysans et des commerçants qui exerçaient
leurs activités à une échelle plus réduite,
locale ou régionale ; il y avait également les marchands
d'esclaves au long cours, et enfin les sociétés acéphales
vivant de la chasse et de la cueillette et ayant peu de contacts
avec le monde extérieur289(*).
Quelle que soit l'organisation de leur société,
les sources de la légitimité de leurs dirigeants ou leurs
pratiques et leurs conduites politiques, tous ces groupes se
retrouvèrent soumis à la volonté de Léopold II et,
après 1908, à l'idée belge consistant à imposer des
structures étatiques modernes aux populations indigènes afin de
créer la civilisation ou le développement.
Les dirigeants de certains groupes se sont finalement vu
garantir le statut d'autorité autochtone alors que d'autres n'ont pas
obtenu ce statut. Tous étaient soumis la loi belge exercée par
les autorités belges290(*).
B.
L'intolérance sociale
L'administration belge tentait d'utiliser les autorités
traditionnelles comme des avant-postes pour la mise en oeuvre de ses
règles coercitives. Les tribus étaient définies et
les chefs nommés en fonction des besoins belges,
c'est-à-dire pour exercer un certain contrôle administratif,
mais les chefs servaient surtout de base locale pour la mobilisation du
travail forcé et la récolte des tributs. Les populations
locales étaient, par exemple, recrutées pour construire les
routes et livrer le caoutchouc, ce qui constituait des tentatives d'imposition
très simples291(*).
Certaines autorités traditionnelles se voyaient
garantir le statut d'autorité autochtone et étaient
censées gérer la vie quotidienne des communautés locales,
tandis que d'autres se voyaient refuser ce statut292(*).
Cette situation avait des conséquences importantes pour
l'accès à la terre. Les autochtones n'avaient pas le droit
à une terre sur une base individuelle, l'accès à la terre
ne pouvant se faire que par l'intermédiaire d'une autorité
traditionnelle qui s'appuyait sur des droits hérités des
ancêtres pour allouer la terre. Cette terre n'était accessible
qu'aux membres du groupe.
Les Congolais qui ne bénéficiaient pas d'une
autorité traditionnelle n'avaient donc pas accès à la
terre et étaient à peine tolérés sur les terres des
autres groupes. Dans le Congo de l'après indépendance, cette
situation a non seulement conduit à des conflits pour la terre,
mais a également suscité un problème de
citoyenneté, comme dérivé de la propriété
terrienne, pour certaines communautés.
Les droits liés à la propriété
privée étaient exclusivement réservés aux
propriétaires terriens blancs. Les mêmes règles
s'appliquaient aux droits afférents à d'autres sortes d'actifs.
Dans une sorte d'asphyxie totale, les indigènes de
l'époque n'avaient à portée de main aucun moyen de
revendication disponible.
2. Les
conséquences de l'intolérance
L'histoire du Congo notera l'année 1959 comme une
année ouverte par la violence des événements du 4 janvier
et la répression aveugle qui s'en est suivi. Evénement aux
conséquences politiques de grande ampleur, parce que suivi des
engagements politiques de grande taille, notamment par le roi des
belges293(*), il
s'inscrivait dans la ligne d'autres événements revendicatifs,
particulièrement ceux de Stanley ville.
A. Les
événements du 4 janvier 1959
Il convient d'exposer les faits ayant
caractérisés cet événement inédit (a) avant
de revenir sur ses retombées politiques (b).
1. Que s'est-il
réellement passé au Congo ?
À la veille de l'indépendance, les
événements du 04 janvier 1959 à Léopoldville auront
fortement marqué les esprits et l'histoire même du Congo, à
cause de la répression du meeting politique de l'ABAKO pourtant
programmé et autorisé.
La section de l'ABAKO de la Commune de Kalamu avait
projeté pour le dimanche 4 janvier une réunion. Il semble, par
ailleurs, qu'il y a eu ordre et contrordre concernant l'autorisation de la
réunion. Selon M. Van Hemelrijck, ministre du Congo belge et du
Ruanda-Urundi, la réunion de l'ABAKO se tenait « dans des
conditions irrégulières, tant au point de vue de l'occupation des
locaux de l'YMCA qu'au point de vue de l'assistance du public294(*) ».
Le public n'ayant pas été informé de
l'annulation de l'événement, « un concours de
circonstances provoque un effet boule de neige. Un match de football vient de
se terminer au stade Kalamu (aujourd'hui stade Tata Raphael). Mécontents
à cause de leur équipe favorite, excités par la
présence policière et des rumeurs « Les blancs tirent
sur les noirs », les spectateurs sortants du stade se transforment en
manifestants. La foule se regroupa devant l'entrée du local de la
Réunion. L'assistance était sous tension et de légers
incidents firent empirer la situation, qui tourna à l'émeute.
Cette situation avait entrainé trois jours d'incendie
et de pillage ; l'emploi de la force avait causé désolation,
plusieurs morts et blessés. A l'origine, un usage excessif de la
force.
La répression était d'une violence
disproportionnée, de sorte que la journée du 04 janvier est
depuis lors commémorée, en République Démocratique
du Congo, comme la journée des martyrs de l'indépendance.
2. Analyse juridique de la situation
L'évènement se déroule avant l'Ordonnance
loi n° 25-505 du 5 octobre 1959 portant la réglementation des
manifestations, réunions ou rassemblements en plein air. On
décèle au moins dans le récit qu'il existait une
règlementation sur la liberté de réunions. L'organisation
des réunions publiques était subordonnée à une
autorisation préalable, ce qui révèle le caractère
autocratique du pouvoir politique colonial dans un contexte politique tendu.
Les moyens de répression usités par les
autorités publiques renforcent cette affirmation. Ces manifestations du
4 janvier 1959 ont été réprimées avec une
extrême véhémence dans un mépris total de la vie
humaine.
3. Impacts sur le plan
politique
Le 13 janvier 1959, dans une allocution
télévisée, le roi Baudouin s'adresse à ses
« compatriotes de Belgique et du Congo ». Rappelant le but
de la présence belge sur le continent tel qu'il avait été
défini par Léopold II, le souverain affirme que la Belgique est
décidée à « conduire, sans atermoiements
funestes, mais sans précipitation inconsidérée, les
populations congolaises à l'indépendance dans la
prospérité et la paix ».
Suivra la déclaration du gouvernement belge aux termes
de laquelle « la Belgique entend organiser au Congo une
démocratie, capable d'exercer les prérogatives de la
souveraineté et de décider de son
indépendance ».
Les milieux politiques congolais n'ont pas manqué de
saisir la balle au bond. Le MNC de Patrice-Emery Lumumba et l'ABAKO, les deux
principaux mouvements réagissent diversement à ces
déclarations : pour le premier, c'est la satisfaction, les
congolais ont besoin d'être préparés et
l'indépendance doit être totale ; pour la seconde, il n'y a
pas question d'attendre, l'indépendance doit être
immédiate.
La réunion publique du 4 janvier a causé un
impact significatif sur l'indépendance du Congo.
B. Les
contestations de Stanleyville
Au lendemain des journées insurrectionnelles de janvier
1959, le message royal et la déclaration gouvernementale du 13janvier
avaient reconnu la vocation du Congo à l'indépendance. Mais six
mois plus tard, aucune précision n'était toujours apportée
par le pouvoir belge, tant en ce qui concerne la date de l'indépendance,
la constitution d'un gouvernement, que la mise en place des Assemblée
nationales. Il n'y avait pas de perspectives sûres de
l'indépendance.
Le ministre des Colonies, Van Hemelrijck qui avait la
confiance des Congolais avait été limogé. Toute cette
situation avait engendré de l'agitation sociale et la crise
d'autorité auprès des congolais qui voulaient être
associés étroitement à la solution de leurs
problèmes, et participer activement à l'élaboration des
institutions qui ne seraient plus imposées. Les Congolais ne voulaient
plus être placés devant les solutions unilatérales de fait
accompli.
C'est ce contexte que se tient le grand congrès du MNC
de Patrice Emery Lumumba du 23 au 26 octobre 1959 dans un calme relatif, avec
l'autorisation des autorités. A l'issue de cette grande réunion
et des incompréhensions croissantes entre Lumumba et les
autorités coloniales, celles-ci décidèrent son
arrestation, ce qui tourna aux troubles, opposant la foule
déchaînée et les forces de la gendarmerie et de police
tentant d'arrêter Lumumba. Un bilan de 26 morts et de plus de 100
blessés a été déploré par les
autorités.
De ce tableau de la situation à l'époque
coloniale dessine avec assez de clarté le caractère autocratique
du pouvoir. Dans ce contexte de répressions récurrentes de toute
voix contestataire, l'exercice de la liberté de manifestations publiques
ne saurait être envisagé. Cet élan s'est étendu
jusqu'après l'indépendance du Congo.
Section
2. Le Congo-Zaïre : l'exercice de la liberté de manifestation
dans un contexte dictatorial
Si dans son ensemble, le règne de Mobutu a
été régi par la Constitution du 24 juin 1967, celle-ci
avait été, d'une part, précédée par la
Déclaration de prise du pouvoir par le haut commandement militaire du 24
novembre 1965. D'autre part, cette Constitution de la deuxième
République a été révisée plusieurs fois, au
total 17 révisions, mais, dans nos analyses, nous n'allons prendre en
compte que les révisions fondamentales.
A l'invitation du Lieutenant Général
Joseph-Désiré Mobutu, commandant en chef de l'ANC, les
autorités supérieures de l'armée se sont réunies le
24 novembre 1964 en sa résidence. Après avoir fait un tour
d'horizon de la situation politique et militaire dans le pays, leur
étonnant constat faisait état de ce que si la situation militaire
était satisfaisante, la faillite était complète dans le
domaine politique.
En effet, alors que l'armée s'engageait à
rétablir l'ordre et la paix, les dirigeants politiques par contre se
sont positionnés dans une lutte stérile pour accéder au
pouvoir sans aucune considération pour le bien-être des citoyens.
La course au pouvoir des politiciens risquant de faire couler le sang des
congolais continuellement, tous les chefs militaires de l'ANC réunis le
mercredi 24 novembre 1965 autour de leur commandant en chef, ont pris, en
considération de ce qui vient d'être dit. Les droits et
libertés garantis par la Constitution du 1er août 1964
tels que prévu dans ses articles 24 à 28 sont respectés,
il en est notamment ainsi de la liberté de penser, de conscience, de
religion, d'expression, de presse, des réunions et d'association, l'ANC
s'étant tenue en dehors et au-dessus des activités politiques,
tous les détenus politiques seront libérés. Cette
décision ne s'applique pas aux membres des bandes insurrectionnelles
ayant commis une atteinte à la sûreté intérieure de
l'État.
Le président Mobutu, sous la bénédiction
d'un contexte international marqué par la guerre froide, imposera
à son « Zaïre » l'une de plus terribles
dictatures que le monde aura connues.Le grand fossé entre
consécration et jouissance effective qui caractérise le domaine
des droits fondamentaux n'a pas été absent durant cette
période, surtout lorsqu'on a en vue l'incompatibilité criante
entre l'absolutisme et les droits de la personne humaine, l'un étant la
négation des autres.
Le cadre juridique de la liberté de manifestation
n'était épargné des stigmates de la dictature (§1),
même si les tendances de démocratisation ayant sévi au
Congo avec la tenue de la Conférence nationale souveraine ont
été à la base d'un ordre juridique nouveau (§2), qui
s'est affiché comme une rupture avec le passé.
§1.
Un cadre juridique illustrant un contexte dictatorial
Avant d'aborder la période marquée par la
dictature de Mobutu, une brève analyse portant sur la situation du pays
avant 1965 s'impose. Il s'en suivra la période marquée par le
règne du Président Mobutu, lequel a connu deux moments
forts : de la Déclaration de prise de pouvoir du Haut commandement
de l'Armée nationale congolaise jusqu'à la libéralisation
politique du 24 avril 1990.
Il fera élaborer en 1967 la Constitution de la
deuxième République qui connaitra, comme indiqué plus
haut, plusieurs révisions jusqu'à devenir un costume à la
taille du chef de l'État. Il sied donc d'analyser le régime
juridique de la liberté de manifestation sous la Constitution du 24 juin
1967 et toute son évolution.
Cette Constitution est restée en vigueur au-delà
de la libéralisation de la vie politique en 1990, mais sera
remplacée, à l'issu de la Conférence nationale souveraine,
par l'Acte portant dispositions constitutionnelles relatives à la
période de la transition. Ce texte n'a pas été
promulgué par le Président de la République et sera
remplacé par la loi n° 93-001 du 02 avril 1993 portant acte
constitutionnel harmonisé relatif à la période de la
transition.
1. La
liberté de manifestation sous la constitution de 1964
La Constitution du 1er août 1964295(*) garantit, en son article 24
alinéa 4 pour toute personne, le droit de manifester sa religion ou ses
convictions seule ou en commun tant en public qu'en privé, par les
cultes, l'enseignement, les pratiques, l'accomplissement des rites et
l'état de vie religieuse, sous réserve du respect de l'ordre
public et des bonnes moeurs. Les articles 25 et 28 de cette même
constitution consacrent respectivement la liberté d'expression et la
liberté de réunions paisibles et sans armes ainsi que la
liberté syndicale. Le terme manifester contenu à l'alinéa
4 de l'article 24 de la Constitution de Luluabourg ne saurait, de notre point
de vue, être appréhendé au sens de cette étude. Si
le constituant de 1964 n'a pas précisé la nature des convictions
dont question dans cette disposition,296(*) il n'en demeure pas moins vrai que les
modalités et les moyens de le faire peuvent conduire à des
conclusions précises : toute personne peut manifester ses
convictions seul ou en commun, tant en privé qu'en public, et cela, par
les moyens qui sont limitativement énumérés dans la
constitution.
A ce niveau, il est intéressant de relever que la
liberté de manifestation est un droit individuel d'expression,
généralement collective, même s'il est admis qu'un individu
peut seul exercer sa liberté de manifestation. De plus, manifester au
sens actuel de l'article 26 de la Constitution du 18 février 2006 ne
renvoie guère à une action faite en privé. La constitution
parle clairement de la manifestation sur les voies publiques ou en plein air.
En outre, les moyens employés pour manifester ses convictions aux termes
de la Constitution de 1964 nous éloignent de l'idée de la
manifestation que nous explorons dans ce travail. Cette manifestation se fait
par les cultes, l'enseignement, les pratiques, l'accomplissement des rites et
l'état de vie religieuse, ce qui indique sans ambages qu'il s'agit bien
de l'exercice de la liberté de culte.
De la liberté d'expression telle que consacrée
à l'article 25 de la Constitution de Luluabourg il est difficile
d'inférer la liberté de manifestation publique. Les moyens
d'exercice de la liberté d'expression figurant dans cette disposition la
parole, l'écrit et l'image sont loin de traduire l'idée de la
manifestation publique telle qu'elle est consacrée en 2006 ; au
surplus, la constitution de 1964 consacre la liberté de réunion,
laquelle constitue une jumelle de la liberté de manifestation sans
aucune allusion à cette dernière.
C'est ici une illustration éloquente de l'ignorance ou
de la négation de cette liberté fondamentale par le constituant
de 1964, lequel pourtant reçoit les éloges des auteurs297(*) pour avoir été
la première Constitution véritablement démocratique avec
la réputation de promouvoir la démocratie dans le jeune
État du Congo.
2. La
liberté de manifestation avant 1967
Le pays accède à l'indépendance le 30
juin 1960. Il est régi alors par la loi fondamentale du 19 mai 1960
relative aux structures du Congo et la loi fondamentale du 17 juin de la
même année, relative aux libertés publiques, deux textes
élaborés par le Parlement belge à l'aube de
l'indépendance du Congo.
La première loi fondamentale règle
l'organisation politique de l'État, alors que dans la seconde,
l'objectif poursuivi était celui de définir la situation des
droits des peuples vivant sur le territoire du Congo. C'est en quelque sorte la
charte des droits et libertés des citoyens, constitués sous forme
d'une Déclaration des droits.
Le législateur belge, auteur de cette loi fondamentale
n'hésite pas à afficher sa détermination d'établir
un régime démocratique. Il proclame au nom de congolais,
l'indéfectible attachement de ces derniers aux droits de l'homme et aux
principes de la démocratie. Dans l'élaboration de cette
dernière, le souci d'assurer le respect de la personne humaine, sans
distinction de couleur, de sexe, de langue, de religion, de nationalité,
d'opinion politique, d'origine sociale, de fortune, de naissance ou de toute
autre situation.298(*)
Par ailleurs, la Loi fondamentale du 19 mai 1960 n'ayant pas
abrogé des dispositions légales ou réglementaires
contraires au nouvel ordre politique et juridique de l'indépendance,
certaines d'entre elles ont continué d'avoir droit de cité, elles
ont été maintenues dans le commerce juridique en dépit de
leur caractère et nature liberticides et anachroniques. Tel a
été le cas de l'Ordonnance n° 025/555 du 5 octobre 1959
prise par le Gouverneur général/Administrateur des colonies
relative à la réglementation des réunions et
manifestations publiques.299(*)
Sur le plan politique, le jeune État entre dans une
zone de turbulence, et doit faire face à plusieurs crises : la
mutinerie de l'armée, les sécessions du Katanga et du Kasaï,
la révocation mutuelle du Chef de l'État et du Premier Ministre.
Ceci conduira donc le Colonel Joseph-Désiré Mobutu à son
premier coup d'État latent par la mise en place d'un Collège des
commissaires, puis à son coup d'État définitif le 24
novembre 1960, près de 16 mois seulement après l'entrée en
vigueur de la Constitution du 1er août 1964, l'une des
constitutions de la RDC adoptée par referendum et créditée
d'être la Constitution la plus démocratique de l'histoire du
pays.300(*)Cette date du
24 novembre 1965 marquera le début d'une rude dictature imposée
au peuple du Congo qui deviendra, deux ans plus tard le Zaïre.
3. Traits fondamentaux de la Constitution du 24 juin
1967
Cette Constitution
plébiscitaire élaborée a poursuivi, avec un accent
particulièrement marqué, le chantier du renforcement
exagéré des pouvoirs du Président de la République
tout en maintenant une séparation des pouvoirs entre l'exécutif
et le législatif.
A.1. La situation des droits et libertés des
citoyens
L'exercice par les citoyens de leurs droits, sous la
Deuxième République, avait posé de sérieux
problèmes, notamment la difficulté de concilier la reconnaissance
de ces droits par la Constitution et leur effectivité dans un
système politique et administratif totalitaire ; un
véritable paradoxe entre le droit et la réalité.
Concrètement, on relève que la Constitution du 24 juin 1967 de
même que ses différents et multiples révisions, organise,
en faveur des citoyens la plupart des droits et libertés que les
États démocratiques reconnaissent à leurs citoyens :
les droits à la vie, à la propriété dont
l'expropriation doit se faire pour cause d'utilité publique moyennant
indemnité compensatoire préalable, la liberté de
mouvement, le droit à l'éligibilité et la liberté
de réunions publiques.
Cependant, toutes ces libertés publiques s'exercent
dans le cadre particulièrement verrouillé dominé par le
M.P.R., parti unique, d'abord et, ensuite, parti-État. Du coup, la
question de l'effectivité de ces droits, dont la plupart sont
demeurés de simples crédos, pseudo-droits ou
ingéniosités constitutionnelles, se pose. En effet, s'il est de
principe qu'entre le droit et la réalité la règle a
toujours été celle d'un mariage-exception, la question se pose en
des termes non identiques : ici, il s'agit d'un antagonisme difficilement
conciliable dû à un régime dictatorial qui, comme le fait
remarquer Evariste Boshab, a fait et fera, pendant longtemps encore, la honte
de l'Afrique subsaharienne.301(*) La phase de terreur qu'a traversée le
processus de décolonisation de la RDC, illustre la dérive d'un
régime qui prétend faire triompher la liberté. De temps
à autres, il inaugure des instruments dont s'inspireront les
régimes totalitaires, en particulier celui qui consiste à
assassiner et emprisonner les opposants pour les faire taire.
A.2. Le cas particulier de
la protection de la liberté de manifestation
Après les manifestations de janvier 1959, il a fallu
attendre, les débuts des années quatre-vingt-dix, de la
période dite de transition démocratique, pour que l'on assiste
à nouveau à d'autres manifestations d'une semblable envergure et
d'une comparable importance historique.
Sous le régime de la Deuxième République,
un régime qui appliquait une certaine prophylaxie sur le plan politique,
les seules grandes mobilisations populaires furent celles provoquées par
les meetings du président Mobutu, souvent tenus au Stade du 20 mai,
à N'Sele. Durant cette période de rude dictature, il était
interdit de faire entendre des voix dissidentes au régime du
maréchal. Des foules immenses, pouvant atteindre 100.000 personnes,
assistaient à ces rassemblements.
Donnant l'apparence de consulter le peuple,
c'est-à-dire, d'une démocratie dite populaire, les foules
convoquées, étaient encadrées, manipulées, mais
aussi, subjuguées et enchantées par le spectacle du pouvoir et
l'illusion d'y être associées302(*). Mais en réalité une simple
manipulation politique au service d'un Tyran. Cette sorte de démocratie
d'acquiescement caractérisée par l'absence du peuple à
toutes les instances de prise de décision.
Ici, le Gouvernement par tous reste l'un des plus grands
défis à relever, pourtant, constituant un nouveau style de
direction des États du troisième millénaire. Une analyse
sans complaisance du système de démocratie représentative
à travers l'exemple congolais, laquelle démocratie a
dévoilé ses limites dans tous les domaines de la vie à
travers le monde justifie à plus d'un titre la raison de
l'actualité de la rue. Une illusion entretenue par le dialogue que le
grand orateur noue avec la foule. Rituellement, les meetings débutent
par un échange de ce type : « Bomba
bomba ? » « Mabé ! » qui se
traduit littéralement par « Cacher la
vérité ? », «et le peuple répondait
« ce n'est pas bien ! »,
« Nasakola ? » « Sakola !» aussi
traduit par, « Dois-je parler ? » « Il faut
parler !», « Nasilisa ? »
« Silisa ! », (dois-je tout dire ? Il faut tout
dire)303(*).
Comme tout grand orateur, le président Mobutu, par le
charisme de sa personne et la magie de son verbe, fait de la foule une masse
compacte, « produit la masse et le maintien en
vie » : « L'art de l'orateur consiste à
résumer en mots d'ordre304(*) tout ce qu'il veut obtenir et à le
présenter avec force à la masse pour l'aider à se former
et à exister. »305(*)
C'est avec l'ouverture de la « transition
démocratique » que le peuple kinois redevient rebelle. La
dégradation des conditions de vie a fini par franchir ces
« limites ». Et le 24 avril 1990 le président Mobutu
a fait solennellement l'aveu de l'échec de sa deuxième
République, ouvrant la brèche au désir d'un changement
radical qui habitait sourdement la société. À quelques
mois d'intervalle, Kinshasa sera le champ de deux immenses
démonstrations de masse : les pillages de septembre 1991, la
manifestation de février 1992 appelée la « marche des
chrétiens » ou encore la « marche de
l'espoir ».
Le pays entre dans une phase particulièrement
prospère pour la liberté de manifestation, mais la
répression est rude. Deux ans plus tard, la classe politique s'organise
dans un grand forum, le plus grand que le pays a connu jusqu'à ce jour,
pour discuter sur l'avenir du pays.
B. Les
révisions de la Constitution de 1967
Au total, la Constitution du 24 juin 1967 a connu 17
révisions dont les principales demeurent celles introduites par la loi
du 23 septembre 1970. Elle consacra l'institutionnalisation du MPR, par la loi
du 15 août 1974 consacrant le mobutisme comme doctrine du MPR et la
plénitude de l'exercice du pouvoir par le Président de la
République ; par la loi du 15 février 1978
libéralisant l'exercice du pouvoir au sein du MPR en rendant tout organe
de l'État responsable par l'abandon de la plénitude de l'exercice
du pouvoir par le Président du MPR, Président de la
République.
B.1. La Loi n° 70/001
du 23 décembre 1970
Cette loi porte l'institutionnalisation du MPR et la
consécration de son rôle dirigeant. Elle avait placé sous
la dépendance du parti tous les autres organes de l'État. En
général, cette révision constitutionnelle a
consisté en une série de réformes : l'article 4 al 2
de la Constitution est supprimé au profit d'une formule qui ne retient
que le MPR comme l'unique parti et l'unique institution de l'État. C'est
le MPR parti unique. Il en est de même de l'article 19 aux termes duquel
les institutions de la République étaient fixées.
A ce stade, disons que, en dépit de
l'institutionnalisation de MPR et de la consécration de son rôle
dirigeant, il y avait encore possibilité de séparer le MPR de
l'État. Paradoxalement, le processus d'encadrement et d'envoutement des
institutions de l'État par le parti avait été ainsi
déclenché, il connaitra son paroxysme, le sommet culminant ou
le couronnement lors de la révision de 1974.
B.2. La Loi n° 74/020 du 15 août
1974
Tout est parti du congrès extraordinaire du MPR qui a
tiré un certain nombre de considérations sur
l'institutionnalisation du MPR déclenchée lors de la
révision de 1970. Plusieurs décisions y ont été
prises notamment l'impérieuse nécessité de réviser
la Constitution pour l'adapter aux réalités du moment. En effet,
en 1974, le MPR proclamé comme seule institution du pays devait exercer
son influence sur le plan idéologique par une doctrine appelée
« le Mobutisme ». Celui-ci est défini comme cet
ensemble d'actes, pensée et idées du Président Mobutu.
Quatre idées paraissent fondamentales dans la
Constitution du 15 août 1974 :
- le MPR est conçu comme une famille agrandie aux
dimensions de la nation zaïroise devient la nation zaïroise
organisée politiquement ;
- le Chef qui incarne cette famille, exerce la
plénitude du pouvoir ;
- une place spéciale est réservée au
Président fondateur du MPR ;
Le peuple élit le Président du MPR qui est en
même temps et de droit et par voie de conséquence,
Président de la République.
Tout cela pousse à la conviction selon laquelle et
à la confirmation que la loi du 15 août 1974 n'est pas une simple
révision de la Constitution comme tente de le soutenir la version du
pouvoir, mais plutôt une nouvelle Constitution pour le Zaïre.
Menacé d'asphyxie et de paralysie, après les
discours du Président du MPR, Président de la République
du 1er juillet 1977 et du 25 novembre 1977, le nouveau régime
a été contraint à la libéralisation
consacrée par la révision du 15 février 1978.
B.3. La Loi n° 78-010 du 15 février
1978
Cette loi de révision constitutionnelle vient consacrer
une sorte de libéralisation au sein des organes du MPR. Il faut
reconnaître, par ailleurs, que plusieurs facteurs extérieurs ont
concouru ensemble avec la menace de paralysie du MPR, à
l'avènement de cette libéralisation. On peut citer les deux
guerres du Shaba qui ont mis le régime en face d'une opposition
armée.
L'organisation des pouvoirs publics, laisse observer un
certain partage dans l'exercice du pouvoir. Désormais, investis des
responsabilités, les autres organes du parti devenaient des acteurs sur
la scène politique et non des simples spectateurs comme ils
étaient en 1974.
Concernant le Président du MPR, Président de la
République, les innovations suivantes ont été
introduites :
- malgré le partage du pouvoir avec les autres organes,
il conserve l'initiative des lois et de la révision constitutionnelle
concurremment avec le Conseil législatif, il légifère,
dans ce contexte, par voie d'ordonnance-loi en dehors des sessions du Conseil
législatif et cela sans une quelconque habilitation ;
- malgré l'institution du Premier commissaire
d'État, il demeure selon la forme présidentialiste de
gouvernement, le Chef de l'exécutif ;
- le mandat du Président du MPR, Président de la
République est fixé à sept ans, cette fois-ci,
indéfiniment renouvelable.
- Il cesse d'être le Président de tous les
organes, ces derniers disposent de leurs propres présidents.
A propos du Bureau politique, ses membres ne sont plus
uniquement nommés par le Président de la République :
sur les trente membres que compte cet organe, dix-huit doivent être
élus et le Président du MPR se réserve le droit de nommer
les douze autres membres dont leur Président.
Le Conseil législatif récupère sa
fonction législative et l'exerce pleinement. Il lui est reconnu en plus,
le pouvoir de contrôle sur les activités du Conseil
exécutif du Conseil judiciaire et des services publics de
l'État.
Le Conseil Exécutif n'a pas connu des changements
notables, seulement il a été institué un poste de Premier
commissaire d'État chargé d'assurer la coordination du Conseil
exécutif. Sa mission est exclusivement de veiller au respect et à
l'application par tous les Commissaires d'État des directives
présidentielles. A ce titre, il doit tenir le Président du MPR,
Président de la République pleinement informé de la
conduite des affaires de l'État.
Le Conseil judiciaire a subi une réforme importante du
fait de la création, à sa tête, d'un Président
permanent qui est un haut magistrat. Il est reconnu au Président du
Conseil judiciaire le contrôle des décisions des cours et
tribunaux, la possibilité d'en suspendre l'exécution et de les
faire reformer par la Cour Suprême de Justice, le parti au procès
entendus.
En définitive, avec cet effort de libéralisation
à l'intérieur du système en place, la loi du 15
février 1978 a institué un régime de séparation des
pouvoirs au sein du MPR. Il appert clairement que toutes ces révisions
sont provoquées dans le sens d'un durcissement du régime
plutôt que vers une démocratisation. Le contexte socio-politique a
été caractérisé par une réduction croissante
des libertés des citoyens et une répression brutale de toute voix
discordante. Toute manifestation réalisée ne l'était que
dans le cadre du soutien au régime et jamais dans le but d'exprimer une
quelconque revendication.
§2.
Les tendances de démocratisation : le régime juridique
proposé à l'issue des négociations politiques au
Zaïre
Les luttes en faveur de la démocratie et l'État
de droit ont prouvé la manière dont le pouvoir politique a
restreint le droit de manifester dans l'espace public. Dans ce cadre, la rue
aurait joué un rôle important contre le pouvoir autoritaire
instauré par le Président Mobutu au Zaïre. Durant cette
période, Étienne Tshisekedi, l'un des plus grands leaders
d'opposition qu'a connu la République Démocratique du Congo,
renonçant à une lutte armée a fait de la rue, un moteur de
démocratisation.
L'apport de l'Église catholique est aussi significatif
pour le combat contre la dictature et le régime autoritaire. Les
différentes manifestations convoquées tant par l'opposition que
par l'Église Catholique ont à coup sûr affaibli le pouvoir
de Kinshasa, alors zaïre.
1.
Multipartisme intégral et l'ouverture effective de l'espace
politique
Les luttes en faveur du respect des droits de l'homme ont mis
en évidence la manière dont le pouvoir politique durant les
dictatures a restreint la liberté de manifestation dans l'espace public.
Ces pratiques ont conduit à une réflexion juridique sur le
rôle indispensable de l'éthique dans la politique et le besoin de
repenser l'organisation constitutionnelle du pouvoir afin de canaliser
institutionnellement les conflits.
À la fin des années 1980, la démocratie
s'est installée sur tout le continent, accompagnée de deux
phénomènes : d'une part une libéralisation des
économies et le développement des privatisations des secteurs
économiques traditionnellement aux mains de l'État ; d'autre part
la consolidation d'un mouvement «
néo-constitutionaliste »2(*)28 qui repense toute la logique des rapports entre
les pouvoirs publics et les droits des citoyens. La liberté de
manifestation dans l'espace public est alors devenue un droit constitutionnel
subjectif de protection de la dignité humaine s'inscrivant dans une
dogmatique de protection et de garanties juridiques nourrie par une
rhétorique constitutionnelle2(*)29. On peut y voir une transition d'une
société dans un État national à une
société nationale catégorielle dans l'État.
A. La liberté de
manifestation au lendemain du discours du 24 avril 1990
La Conférence nationale, qui s'est ouverte le 7
août 1991, a versé immédiatement dans les querelles et la
confusion. Le 19 août, l'Union sacrée de l'opposition s'est
retirée des travaux en signe de protestation. Le 21 octobre, trois
semaines après son investiture, le premier ministre Étienne
Tshisekedi, chef de file de l'opposition, est démis de ses fonctions
par le chef de l'État. Le 4 décembre, le président Mobutu,
dont le mandat expire à minuit, se reconduit d'autorité à
la tête de l'État. Le 19 janvier 1992, le nouveau Premier
ministre, Nguz-a-Karli Bond, suspend les travaux de la Conférence
nationale.
La « marche des chrétiens »
s'inscrit directement et fondamentalement dans ce contexte : elle est une
réaction à la décision de Nguz, une mobilisation populaire
en faveur de la Conférence nationale. Si la frustration des
espérances mises dans un changement politique radical entre aussi dans
l'explication de la jacquerie-pillage des 23-24 septembre 1991, des facteurs
économiques et sociaux jouent cette fois un rôle plus
décisif. D'autres scènes de désordre et de pillage avaient
eu lieu à Kinshasa : d'une assez grande ampleur déjà
en décembre 1990, de moindre envergure en mai 1991. L'économie du
pillage va en septembre-octobre 1991 se diffuser dans l'ensemble du pays, et le
phénomène se reproduira en fin 1992 début 1993.
Il reste qu'il nous semble que pour caractériser les
pillages de septembre 1991 à Kinshasa une autre notion
développée par cet auteur est plus éclairante : celle
de « masses ameutées » (étant entendu que
pour tenter de rendre compte adéquatement d'une réalité
historique il faut toujours combiner plusieurs éléments d'une
typologie, plusieurs types idéaux). La masse ameutée, dans la
caractérisation qu'en donne Canetti, est celle qui se forme pour tuer,
celle qui se jette sur une victime et donc chaque membre participe ou cherche
à participer à la mise à mort306(*). Canetti voit dans une forme
primitive de rassemblement, la « meute de chasse »
(réunion d'une petite troupe d'hommes en vue d'abattre, se partager,
manger une proie), le modèle original dont dérive la masse
ameutée. La notion peut être transposée au
phénomène du pillage dans lequel la proie animale ou la victime
humaine deviennent butin. C'est une preuve éloquente de l'importance de
la liberté de manifestation et de son importance dans le maintien de
l'ordre public ; elle sert à éviter à la
société des débordements qu'engendrerait le
musèlement des populations dont les revendications prennent des formes
de plus en plus violentes, au regard de la fermeture de l'espace public.
B. La liberté de
manifestation dans le contexte de l'ouverture effective de l'espace
politique
L'installation de la démocratie s'est
accompagnée de changements structuraux touchant à la
liberté de manifestation.
Tout d'abord, de nouveaux partis politiques ont
été créés, les demandes de dispositifs de
participation citoyenne à la décision publique se sont
multipliées et des mécanismes de représentation
démocratique et de décentralisation ont été
consacrés. On a ainsi pu constater un renforcement de la
citoyenneté politique. En Bolivie par exemple, les grandes mobilisations
des Indiens ont produit des changements structuraux dans la
société et même au niveau de l'État.2(*)30 Les revendications de
genre et de droits catégoriels sont devenues de plus en plus fortes dans
toute l'Amérique latine et les fondements traditionnels de la
société comme la famille a commencé à
muter.2(*)31
Plus précisément, cette période de
démocratisation a été caractérisée
essentiellement par trois types de mobilisations sociales. Le premier a
visé la défense des conditions des ouvriers au moment de la crise
de l'industrialisation accélérée par des réformes
économiques d'envergure ; on peut citer en ce sens les actions
menées en Bolivie ou au Brésil avec le PT (Parti travailliste).
Un deuxième type de mobilisation sociale est lié à
l'urbanisation et au développement de secteurs informels qui ont conduit
à une augmentation des demandes de services accompagnés de
revendications de droits constitutionnels dits de troisième
génération.
Le troisième type de mobilisation sociale s'explique
par le retour des revendications des paysans et des Indiens pour
défendre leurs terres et leur culture face au processus de globalisation
du capitalisme ; on peut mentionner à cet égard les grandes
manifestations qui ont eu lieu en Colombie, en Équateur, au
Brésil et au Mexique encore marqué par le mouvement
« zapatiste »307(*).
La liberté de manifestation dans l'espace public a
ainsi cessé d'être l'expression de grandes organisations sociales
comme les syndicats autour de la question de la construction de
l'État-nation pour devenir une mobilisation de catégories, de
communautés et d'identités culturelles revendiquant des droits
subjectifs dans un État constitutionnel pluraliste.
C'est notamment la logique des revendications
féministes, des partisans du mariage homosexuel, de la
dépénalisation de l'avortement, ou encore de la
dépénalisation de la consommation de drogues, etc. Cette nouvelle
pratique constitutionnelle de la liberté de manifestation conduit
à une redéfinition et une fragmentation des partis politiques, et
plus généralement de la politique elle-même qui est de
moins en moins l'affaire partagée de tous les citoyens et davantage
l'affaire particulière de certaines catégories de citoyens
attachés à leurs droits propres.
L'incertitude quant à l'intérêt
général et la chose commune ainsi que l'atténuation de la
frontière entre l'espace public et l'espace privé deviennent des
signes distinctifs d'une liberté de manifestation qui s'inscrit
désormais dans une logique catégorielle et non plus politique et
publique. La politique au sens classique du terme semble être
remplacée par une dogmatique constitutionnelle et un droit public
subjectif qui remodèle l'État constitutionnel et accentue le
rôle des juges qui doivent l'interpréter.
Ainsi, à l'aube du XXIe siècle, la
liberté de manifestation se trouve au centre d'une dynamique de
refondation de la politique sur de nouvelles logiques d'État et de
déconstruction de la tradition constitutionnelle occidentale pour penser
juridiquement la modernité.
La République Démocratique du Congo n'est pas
restée en marge de cette évolution. La fin de la guerre froide a
soufflé, à travers le monde entier un nouveau vent impliquant la
démocratisation des pays ayant longtemps croupi sous la dictature. Le
Zaïre de Mobutu a respiré de cet air de l'ouverture
démocratique tel que décrit ci-haut. Les revendications de cette
nouvelle ère ont été à la base de la convocation du
plus grand forum politique que le Congo a connu, la Conférence nationale
souveraine.
2. Les
résolutions de la conférence nationale souveraine
La Conférence nationale souveraine tenue au Zaïre
de l'époque s'est étalée sur une année et demie,
soit du deuxième semestre de 1990 à 1992, et avait réuni
les délégués représentant toutes les couches de la
population, toutes les régions et la diaspora du Zaïre
(Congo-Kinshasa). Ce forum est restée jusqu'à ce jour la
conférence la plus longue et la plus réfléchie de
l'Afrique, mais dont les résolutions n'ont jamais été
sérieusement appliquées.
Le but de la CNS était que les citoyens du Zaïre
se mettent ensemble afin de discuter sur la situation du pays, et qu'ensemble
ils trouvent des solutions sur les maux qui rongeaient le pays. Le but a
été bel et bien atteint avec succès et de nouvelles bases
avaient alors été jetées à travers les
« Résolutions et les acquis de la Conférence nationale
souveraine ». A défaut d'une assemblée existante et
ayant une assise légale, constitutionnelle et représentative, il
a fallu organiser une conférence politique, réclamée par
l'ensemble de la société congolaise et largement
représentative de toutes les couches, catégories, provinces et
tendances politiques, idéologiques, intellectuelles et religieuses de
toute notre société. C'est cette présence qui a
conféré à la CNS une légitimité de fait
résultant de son caractère largement représentatif. Dans
une étude réalisée par National Democratic Institute
en avril 2001, 60 % des personnes interrogées étaient d'avis
qu'on devrait retourner aux acquis de la CNS308(*).
La CNS a accouché de plusieurs résolutions, mais
aussi d'un texte, l'Acte portant dispositions constitutionnelles relatives
à la période transition du 04 août 1992. Ce texte commence
par proclamer l'adhésion du peuple zaïrois à la
déclaration universelle des droits de l'Homme et à la Charte
africaine des droits de l'homme et des peuples. Même si ces textes
international et régional ne consacrent pas expressément la
liberté de manifestation309(*), cette affirmation constitue un sursaut
démocratique de grande envergure, lorsqu'on se représente le
climat politique qui a précédé ce texte.
L'article 10 de ce texte est ainsi libellé :
« La République du Congo garantit l'exercice des droits et
libertés individuels et collectifs, notamment les libertés de
circulation, d'entreprise, d'information, d'association, de réunion, de
cortège et de manifestation, sous réserve du respect de la loi,
de l'ordre public et des bonnes moeurs ».
Cet article qui ressemble à une disposition fourre-tout
parce que comportant plusieurs droits et libertés pourtant des
générations différentes, témoigne combien le
constituant en était encore balbutiant en matière des droits
fondamentaux des citoyens310(*). Quoiqu'il en soit, cette consécration a
marqué un pas de géant dans la voie de la démocratie en
République Démocratique du Congo. L'article 11 de la loi n°
93-001 du 02 avril 1993 portant Acte constitutionnel harmonisé relatif
à la période de la transition311(*) et l'article 10 de l'Acte constitutionnel de la
Transition du 9 avril 1994312(*) reprennent la même disposition.
Cet élan de démocratisation entamée
à la Conférence nationale souveraine ne s'est pas seulement
limité dans les textes, le vécu quotidien des zaïrois
pendant cette période de transition a été marqué
par des manifestations intenses.
3. Le droit de manifester sous la
constitution de la transition du 04 avril 2003
Au lendemain de la chute du régime dictatorial de
Mobutu et son remplacement par celui de l'Alliance des forces
démocratiques pour la libération, une guerre éclatera sur
plusieurs fronts et le pays sera transformé en un territoire abritant
plusieurs gouvernements dirigés par les mouvements armés.
C'est dans ce contexte que la classe politique congolaise se
réunira à Sun City en Afrique du sud en vue de trouver une
solution durable au conflit et mettre fin à la guerre. Les acteurs
politiques réunis dans ce forum ont adopté un certain nombre de
principes de la transition, parmi lesquels, la réaffirmation de leur
adhésion à la Déclaration universelle des droits de
l'homme, au Pacte international des droits civils et politiques de 1966, au
Pacte international des droits économiques et socioculturels de 1966,
à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples de l98l et
aux conventions internationales dûment ratifiées. Dans cette
perspective, elles prennent l'engagement de lutter pendant la période de
la transition pour un système respectueux des valeurs de la
démocratie, des droits de l'homme et des libertés
fondamentales313(*).
La Constitution du 04 avril 2003 a été
élaborée par les parties prenantes au Dialogue dans le but de se
doter d'un cadre juridique de la transition politique qui a duré presque
trois ans.
Ce texte consacre la liberté de manifestations
publiques en des termes identiques avec les textes issus de la
Conférence nationale souveraine. Comme les articles 10 de l'Acte portant
dispositions constitutionnelles relatives à la période de la
Transition du 04 août 1992, 11 de l'Acte constitutionnel harmonisé
du 02 avril 1993 et 10 de l'Acte constitutionnel de la Transition du 09 avril
1994. La constitution de la transition du 04 avril 2003, en son article 16 en
ces termes : « La République Démocratique du Congo
garantit l'exercice des droits et libertés individuels et collectifs,
notamment les libertés de circulation, d'entreprise, d'information,
d'association, de réunion, de cortège et de manifestation, sous
réserve du respect de la loi, de l'ordre public et des bonnes
moeurs ».
Cette disposition soulève certaines observations :
des droits de générations et de natures diverses sont
consacrés dans la même disposition, laissant ainsi la tâche
au législateur de déterminer les modalités d'exercice de
ces droits.
La jouissance de ces droits connait une triple
limitation : le respect de la loi, de l'ordre public et des bonnes moeurs.
Il sied de relever ici que la formule faisant référence à
l'ordre public et aux bonnes moeurs s'avère quelque peu
pléonastique. La notion d'ordre public, telle que
développée ci-haut comporte une dimension immatérielle qui
inclut la moralité publique comme quatrième composante de l'ordre
public. La moralité publique étant comprise dans l'ordre public,
il devient inutile de l'énumérer comme limitation au droit de
manifester à côté de l'ordre public.
Dans le contexte de cette transition, l'exercice de la
liberté de manifestation se réalisait conformément au
décret-loi de 1999 qui n'était pas incompatible avec la lettre et
l'esprit de la constitution du 04 avril 2003.
Dans la pratique, des manifestations ont eu lieu sous le
régime de cette constitution : des manifestations spontanées
des étudiants qui déploraient le silence de la MONUC face aux
événements de Bukavu et exigeaient l'application immédiate
du chapitre 7 de la charte des Nations Unies autorisant l'usage de la force
pour quiconque ne respecterait pas les accords signés lors du dialogue
intercongolais.314(*)
Les manifestations de l'union pour la démocratie et le
progrès social ont cependant débouché par certains
accrochages entre des manifestants et les forces de sécurité ont
eu lieu entre le 29 juin et le 1er juillet, faisant un mort à Kinshasa,
cinq à Tshikapa et sept à Mbuji Mayi. Plus de 400 manifestants et
représentants des partis politiques parmi lesquels de nombreux
responsables de l'UDPS ont été brièvement
arrêtés à Kinshasa et dans les Kasaï, mais ils ont
pour la plupart été relâchés dans les 24 heures.
Depuis le 30 juin, l'UDPS a manifesté le souci d'organiser ses
activités publiques en ne sortant pas de la légalité. La
manifestation politique qu'elle a organisée avec l'autorisation du
Gouvernement de transition, le 9 juillet, à Kinshasa, a rassemblé
20 000 sympathisants315(*).
Ces lignes démontrent combien la liberté de
manifestation s'exerce dans un contexte particulièrement difficile en
République Démocratique du Congo. Nonobstant le régime
auquel il est subordonné, l'exercice de cette liberté
chère à la démocratie souffre des écueils de tout
genre, si bien que les atteintes y portées présentent un bilan
macabre.
4. Le bilan des atteintes
portées sur la liberté de manifestation
Les luttes en faveur de la démocratie et l'État
de droit ont prouvé la manière dont le pouvoir politique a
restreint le droit de manifester dans l'espace public. Dans ce cadre, la rue
aurait joué un rôle important contre le pouvoir autoritaire
instauré par le Président Mobutu au Zaïre. Durant cette
période, Étienne Tshisekedi, l'un des plus grands leaders
d'opposition qu'a connu la République Démocratique du Congo,
renonçant à une lutte armée a fait de la rue, un moteur de
démocratisation.
L'apport de l'Église catholique est aussi significatif
pour le combat contre la dictature et le régime autoritaire. Les
différentes manifestations convoquées tant par l'opposition que
par l'Église Catholique ont à coup sûr affaibli le pouvoir
de Kinshasa, alors Zaïre. On ne peut pas oublier les cas d'arrestation,
les morts, et autres entraves à cette liberté dans le cadre d'un
régime reconnu pour son caractère tyrannique.
§3.
La gestion des manifestations et les vagues de démocratisation au
Zaïre
Les luttes en faveur du respect des droits de l'homme ont mis
en évidence la manière dont le pouvoir politique durant les
dictatures a restreint la liberté de manifestation dans l'espace public.
Ces pratiques ont conduit à une réflexion juridique sur le
rôle indispensable de l'éthique dans la politique et le besoin de
repenser l'organisation constitutionnelle du pouvoir afin de canaliser
institutionnellement les conflits. Ceux-ci se manifestent ici par la gestion de
ce droit fondamental par les pouvoirs publics. Il faut cependant relever que la
gestion des manifestations publiques n'a pas été la même,
selon que la dictature sévissait encore dans le pays (1) et que la vague
de démocratisation a conduit à un changement de stratégie
(2).
1. La
gestion des manifestations au plus fort de la dictature
La dictature et la liberté de manifestation s'opposent
au point qu'on peut affirmer sans risque d'être contredit, que l'une est
la négation de l'autre. Pour que cette assertion soit
vérifiée, il faut que la liberté de manifestation soit
appréhendée dans sa véritable portée
démocratique, parce que même en dictature les manifestations dans
le cadre de ce que nous avons appelé « la démocratie
d'acquiescement » peuvent bien prospérer sans que lesdites
manifestations ne répondent à l'idéal démocratique.
La culture autocratique comporte certainement une nette influence sur le droit
de manifester. Généralement dans des régimes
autocratiques, si la manipulation des textes juridiques ne réussit pas
étouffer la liberté de manifestations publiques, ce sont des
pratiques musclées de répression qui s'en occupent.
A.
L'influence de la culture autocratique sur le droit de manifester
La conception congolaise de la liberté de manifestation
est facteur du contexte politique de l'ère. La période exerce une
influence significative sur la situation de la liberté de manifestation.
Toute la législation en vigueur traduit la nature du régime.
L'article 10 de la Constitution du 24 juin 1967 est
libellé en ces termes : « Toute personne a droit à
la liberté de pensée, de conscience et de religion. Dans la
République, il n'y a pas de religion d'État. Toute personne a le
droit de manifester sa religion ou ses convictions, seule ou en commun, tant en
public qu'en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques,
l'accomplissement de rites et l'état de vie religieuse, sous
réserve de l'ordre public et des bonnes moeurs ».
Et l'article 11 de renchérir : « Tout
Congolais a droit à la liberté d'expression. Ce droit implique la
liberté d'exprimer ses opinions et ses sentiments, notamment par la
parole, l'écrit et l'image. Il trouve sa limite dans les prescriptions
de la loi et les règlements qui appliquent celle-ci ».
D'une brève analyse de ces dispositions il ressort les
considérations suivantes : d'abord, le droit de manifester sa
religion ou ses convictions, seule ou en commun, tant en public qu'en
privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques, l'accomplissement de
rites et l'état de vie religieuse peut-il être assimilé
à la liberté de manifestation telle qu'envisagée dans
cette étude ? Ce questionnement n'autorise pas une réponse
hâtive pour la simple raison que, lorsque le constituant parle de
manifester sa religion ou ses convictions, il ne détermine pas la nature
de convictions dont il s'agit. Celles-ci peuvent être religieuses,
philosophiques ou politiques. Cependant, lorsqu'on analyse les moyens
prévus par le constituant pour manifester lesdites opinions (le culte,
l'enseignement, les pratiques, l'accomplissement de rites et l'état de
vie religieuse), on se rend vite compte que la liberté de manifestation
dans le format actuel de l'article 26 de la Constitution n'est pas
concernée par cette disposition. En outre, le fait que cette disposition
se rapproche de l'article 18 de la Déclaration universelle des droits de
l'homme, et que ce dernier texte consacre le droit à la liberté
de réunion et d'association pacifiques, plus proches de la
liberté de manifestation prouve à suffisance la volonté du
constituant de 1967 d'omettre de consacrer carrément la liberté
de manifestation.
La même analyse mérite d'être
appliquée à l'article 11 de la Constitution de 1967. Les moyens
d'expression recensés ici nous rapprochent de la liberté de
manifestation : la parole, l'écrit et l'image. Mais la question de
son exercice risque de contrarier cette position. La liberté
d'expression se présente ici comme un droit d'exercice individuel alors
que la liberté de manifestation est, en principe, d'exercice
collectif.
Sous la Constitution du 24 avril 1967, les libertés
garanties aux articles 10 et 11 sont limitées par l'ordre public et les
bonnes moeurs pour la première et par les prescriptions de la loi et les
règlements qui appliquent celles-ci pour les secondes. Il est à
noter que dans un contexte d'un pouvoir autocratique, la fluidité de la
notion d'ordre public a toujours servi de prétexte réel ou
fallacieux aux pouvoirs publics pour limiter à outrance les droits
fondamentaux.
Lorsque même on aurait assimilé la liberté
d'expression ou celle de l'article 10 de la Constitution de 1967 à la
liberté de manifestation, les limitations auxquelles ces libertés
ont été astreintes rendraient leur exercice hypothétique
au regard de la réalité.
Si certaines dictatures font prospérer les droits
fondamentaux notamment économiques, sociaux et culturels pour en obtenir
la subjugation volontaire du peuple, il est admis que les dictatures
contrastent notoirement avec les droits civils et surtout politiques.
La dictature de Mobutu n'a pas exception à la
règle. Ce fut une période horrible et particulièrement
obscure pour les droits fondamentaux de la personne humaine et pour la
liberté de manifestation en particulier. Mobutu ne tolérait
aucune voix discordante ni aucune revendication.
2. Le
processus de démocratisation
L'installation de la démocratie s'est
accompagnée de changements structuraux touchant à la
liberté de manifestation.
Tout d'abord, de nouveaux partis politiques ont
été créés, les demandes de dispositifs de
participation citoyenne à la décision publique se sont
multipliées et des mécanismes de représentation
démocratique et de décentralisation ont été
consacrés. On a ainsi pu constater un renforcement de la
citoyenneté politique.
Dans le cas précis de la République
Démocratique du Congo, la jouissance de la liberté de
manifestation entre d'une part la survivance d'un cadre juridique
obsolète que l'on essayait d'adapter au contexte politique et d'autre
part la gestion des crises par des accords politiques divers.
L'année 1990 fit souffler un vent nouveau sur
l'ensemble du continent et au Congo-Zaïre en particulier. La
libéralisation des activités politiques déclenchée
à la suite du discours historique du 24 avril 1990 fut à la base
d'un multipartisme intégral aux allures d'un multipartisme sauvage au
Congo et un engouement sans précédent pour les activités
politiques, dont l'organisation des manifestations publiques.
Cependant, la constitution de 1967 était toujours en
vigueur entre 1990 et 1992. Un cadre juridique hostile à la
liberté des manifestations publiques régissant l'organisation de
l'État dans une période de réveil démocratique, il
n'y avait rien d'aussi paradoxal. Aussi fallait-il trouver des
mécanismes politiques pour adapter cet arsenal juridique devenue
obsolète au contexte sociopolitique de l'heure.
Après l'essoufflement de l'opposition politique interne
au Congo-Zaïre, c'est en 1997 que la solution viendra avec le
départ du président Mobutu à la suite de la
rébellion de l'AFDL.
La période dite de la deuxième Transition, du 17
mai 1997 au 4 avril 2003, est régie par le Décret-loi
constitutionnel n° 003 du 27 mai 1997 relatif à l'organisation et
à l'exercice du pouvoir en République Démocratique du
Congo, élaboré, à la suite de la Révolution du 17
mai 1997, par l'administration de l'A.F.D.L. Cette constitution se montre moins
bavarde en ce qui concerne les droits fondamentaux. Elle se borne à une
consécration laconique des droits sans en citer nommément un
seul. Après s'être affiché comme assez autocratique dans
l'exercice du pouvoir, c'est près de deux ans après
l'entrée en vigueur du Décret-loi constitutionnel sus visé
que sera élaboré le décret-loi n° 196 du 29 janvier
de1999 par le président de la République, alors titulaire du
pouvoir législatif, en vertu de l'article 8 du Décret-loi
constitutionnel n° 003 du 27 mai 1997, tel que modifié et
complété par le Décret-loi constitutionnel n° 180 du
10 janvier 1999.
3.
L'entrée de l'Alliance des Forces Démocratiques pour la
Libération
La plupart d'auteurs s'accordent à reconnaitre les
élans autocratiques de la gestion du pouvoir par le Président
Laurent-Désiré Kabila. Pour les uns, son règne comporte
comme marque principale, l'éclipse de l'État de droit2(*)32, les autres nient
carrément le caractère « constitutionnel » au
Décret-loi constitutionnel du 27 mai 1997, au motif qu'il ne
règlemente pas la séparation des pouvoirs et ne garantit pas les
droits fondamentaux des citoyens.
Malgré l'évidente dépendance de la
justice, réaffirmant la valeur fictive des dispositions
constitutionnelles, l'article 38 du Décret-loi constitutionnel
n°003 du 27 mai 1997 tel que modifié et complété par
les différents Décrets lois constitutionnels subséquents,
dispose que le magistrat dans l'exercice de sa mission de dire le droit, est
indépendant. Mais, il est soumis à la seule autorité de la
loi ; le pouvoir judiciaire étant lui également
indépendant des pouvoirs législatif et exécutif.
L'indépendance des juges à cette époque
est constamment menacée, et peut-être le principe le plus
bafoué. Les fréquentes interventions de l'exécutif dans le
domaine réservé au juge, dans sa mission de dire le droit, sont
de nature à servir de pont entre l'indépendance -
réalité et l'indépendance - fiction, le juge se trouvant
enchaîné en dépit de certaines de ses prises de position
demeurées malheureusement sans impact. C'est au cours de cette
même période qu'ont été révoqués 315
magistrats au mépris du droit en vigueur et des droits reconnus à
ces derniers.
Elaborée à la faveur du recours à la
violence du 17 mai 1997, le Décret- loi constitutionnel brille par son
caractère laconique, en ce qui concerne l'organisation des droits et
libertés des citoyens. Sans préambule, le texte se limite
à annoncer, en son article 2 qu'en République Démocratique
du Congo l'exercice des droits et libertés individuelles et collectives
est garanti sous réserve du respect de la loi, de l'ordre public et des
bonnes moeurs.
Cette déclaration aussi pauvre ne permet pas de
présager sur la certitude des garanties, ni sur la bonne foi des
autorités à organiser la protection ou l'exercice des droits et
libertés des citoyens. En dépit des révisions, le texte de
la Constitution, en cette matière, est resté intouchable. Il eut
été souhaitable de procéder même par une
énumération, sous forme d'une liste, des droits et
libertés que le constituant entendait reconnaître.
Cette lacune pourrait être justifiée par le
retard qu'aurait connu la République Démocratique du Congo par
rapport à l'affirmation du processus de constitutionnalisation des
branches du Droit. Le processus qui déboucherait au changement de statut
de droits humains, par, la transformation de libertés publiques aux
droits fondamentaux.
La formule de l'article 41 ainsi libellée :
« pour autant qu'ils ne soient pas contraires aux dispositions du
présent Décret-loi constitutionnel, les textes législatifs
et réglementaires existant à la date de sa promulgation restent
en vigueur jusqu'au moment de leur abrogation », fait penser à
une possible application du régime de l'Acte constitutionnel de la
Transition ou des textes antérieurs. Mais, au regard du régime
mis en place, il y a lieu de se demander s'il peut exister des textes qui ne
soient pas contraires à la forme du Gouvernement. Seule la
volonté des gouvernants en place est, dans ces conditions,
déterminante. C'est ainsi que, par déclaration du pouvoir,
l'activité des partis politiques était suspendue jusqu' à
l'élaboration du décret-loi n° 194 du 29 janvier 1999.
L'asphyxie du processus de l'État de droit se fera
rapidement remarquer par la multiplicité des mesures liberticides, le
recours à la violence politique et des violations des droits de l'homme
occasionnant ce que le professeur André Mbata qualifie de règne
d'une gestion chaotique2(*)33, assimilable à une société
dans laquelle règne la loi de la jungle, la loi de la force au lieu de
la force de la loi.2(*)34
La loi n° 001/2001 du 17 mai 2001 constituera, dans le
domaine des activités des partis politiques, un apaisement et le
dénouement de la situation : la souplesse de son régime,
l'importance des pistes de solution permettront de soutenir que le
régime s'est finalement ressaisi pour relancer le processus de la
démocratisation. A ce sujet, le professeur Evariste Boshab relève
notamment les quatre innovations ci-après : les
améliorations formelles tenant au régime d'enregistrement et au
pouvoir limité, mais non inexistant de l'exécutif, les
améliorations relatives aux droits de la défense, les
améliorations relatives à la garantie de droit et les
améliorations relatives à la paix sociale2(*)35.
En ce qui concerne la liberté de manifestation, comme
les autres libertés, son exerce est resté enfermé dans les
carcans d'un mutisme constitutionnel et légal qui aura pris fin par la
promulgation du décret-loi n° 196 du 29 janvier de1999.
3.
L'entrée en vigueur du décret-loi du 29 janvier 1999
Un texte de 12 articles, le décret-loi n° 196 du
29 janvier de1999 a vocation à régir la liberté de
manifestation en République Démocratique du Congo, en
remplacement de la règlementation en vigueur2(*)36, appelée à
céder la place en raison de son anachronisme et sa
contrariété au nouvel ordre institutionnel et
« démocratique » instauré au pays le 17 mai
1997 date de la prise du pouvoir par les révolutionnaires -rebelles sous
la conduite de Laurent-Désiré Kabila.
A.
L'économie du décret-loi
Le décret-loi consacre, au bénéfice des
congolais, le droit d'organiser des manifestations et réunions publiques
et d'y participer individuellement ou collectivement. Ici la liberté
connait triple limites : les restrictions légales, les
impératifs de l'ordre public et les bonnes moeurs.
Le législateur de 1999 définit les
manifestations et réunions publiques selon le critère du lieu de
la tenue desdites manifestations ou réunions et selon celui de
l'accès du public.
Le régime de la liberté de manifestation et de
réunion publique est hybride : déclaration préalable
avec possibilité de basculer dans le régime de l'autorisation
préalable.
Les déclarations et, éventuellement, les
autorisations préalables sont faites ou sollicitées devant les
autorités politico-administratives compétentes, qui en prennent
acte ou accordent l'autorisation selon le cas.
Le décret-loi impose aux pouvoirs publics la charge de
d'encadrement des manifestants, et institue une sorte collaboration entre les
pouvoirs publics et les organisateurs, aux fins de prévenir des troubles
à l'ordre public. La responsabilité pénale est
instituée dans le chef de quiconque organiserait des manifestations sans
déclaration ou autorisation préalable ainsi que la
responsabilité civile pour tous les dommages causés par les
participants à la manifestation ou réunion incriminée.
La structure et le contenu de ce décret-loi appellent
un certain nombre d'observations qu'il convient d'analyser à l'aune des
principes qui doivent présider à la jouissance d'un droit
fondamental, et notamment de la liberté de manifestation.
B.
Lecture critique du décret-loi
Qualifiée par le Conseil d'État français
comme le « droit d'expression collective des idées et des
opinions »2(*)37, la liberté de manifestation apparaît
consubstantielle au fait social dont elle est tout à la fois le
symptôme et l'expression2(*)38 ; elle révèle l'état
d'âme du peuple qui, conformément aux théories en vogue,
demeure le souverain.
Ce qui a poussé, ça me semble, certains à
affirmer haut et fort que « la démocratie occidentale n'a de
démocratie que la liberté de manifestation »2(*)39.C'est en cette couverture
démocratique que tous les régimes cherchent un refuge, même
les autoritaristes les plus absolus.
L'exposé des motifs du décret-loi sous examen
n'a pas manqué de recourir à cette incantation : la
réforme vise à conformer la règlementation au
« nouvel ordre (...) démocratique instauré au pays le
17 mai 1997 »2(*)40.
C'est plutôt la structure du régime et l'exercice
du pouvoir qui n'autorise pas qu'on y colle le qualificatif de
« démocratique », même si, pour le leader de
la révolution du 17 mai 1997, un relativisme s'impose quant à la
conception de démocratie.
Comme indiqué plus haut, après des atermoiements
fulgurants dans le domaine de la démocratie et des droits de l'homme, le
régime du président Laurent-Désiré KABILA s'est mis
à réaliser des légers progrès en matière de
démocratie, notamment. L'entrée en vigueur de ce texte fait
briller des lueurs d'espoirs, mais des inquiétudes subsistent.
C.
Facteur de la fragilité de la liberté de manifestation
Le décret-loi sous examen s'illustre par son
ambiguïté. Son article 4 consacre deux régimes d'exercice du
droit de manifester : les manifestations sont soumises à une
déclaration préalable auprès des autorités
administratives compétentes. Toutefois, les manifestations
organisées sur le domaine public peuvent être subordonnées
à une autorisation préalable.
La lecture de cette disposition soulève des questions
juridiques non sans importance : quelle est la portée du concept
« domaine public » employé par le
législateur ? Le décret-loi offre une possibilité
à l'autorité politico-administrative de soumettre une
manifestation au régime de l'autorisation. Il importe de s'interroger
sur la limite à franchir pour passer du régime de la
déclaration à celui de l'autorisation. La loi reste peu
parcimonieuse à ce sujet, et l'absence de tout critère
déterminant, laissant ainsi un très large pouvoir
discrétionnaire à l'administration, ce qui est périlleux
pour les droits et libertés des citoyens.
Néanmoins, une interprétation de cette
disposition est possible pour juguler toute équivocité. Le
caractère public d'une manifestation découle de trois
éléments dont deux ont trait au lieu de sa tenue : sont
considérées comme publiques les manifestations organisées
sur la voie publique ou dans les lieux publics ouverts, non
clôturés ou celles auxquelles le public est admis ou
invité.
Il en découle que, par rapport au lieu de son
organisation, la manifestation peut se tenir dans le domaine public ou
privé de l'État, et même dans les domaines des
privés. Il en est par exemple d'une manifestation sédentaire
tenue dans une concession privée, à laquelle le public est
invité. C'est une manifestation publique par l'assistance du public,
mais, se tenant sur un domaine privé, ne saurait être soumis au
régime de l'autorisation.
L'emploi du concept « domaine public »
doit être précisé ici. Le domaine public de l'État
doit être entendu comme l'ensemble de toutes les terres affectées
à un usage ou à un service public. Ce bloc comprend deux
catégories des terres : celles dont l'accès est
subordonné à l'obtention d'un titre par les pouvoirs publics et
celles dont l'accès est libres.Les voies publiques font partie du
domaine public, et, étant la chasse gardée des manifestations
publiques, sont directement visées par cette disposition.
L'autre aspect qui mérite une attention
particulière, c'est celui relatif aux modalités d'exercice de la
déclaration. Le dépôt la déclaration n'est pas
suffisant pour la tenue d'une manifestation, encore faudrait-il que
l'autorité administrative en prenne acte. Cette exigence légale
ne peut être minimisée. En effet, l'autorité administrative
saisie dispose de trois jours pour prendre acte. Dépassé ce
délai, il est supposé avoir pris acte de la déclaration.
En conséquence, lorsque l'autorité politico-administrative
reçoit la déclaration, les organisateurs sont tenus en
état. Cette période de trois jours servira cependant à
l'autorité administrative pour s'enquérir sur tous les
impératifs ponctuels de l'ordre public et prendre toutes les mesures
nécessaires à l'encadrement des manifestants.
Il est à noter cependant que ce décret laisse
non réglées plusieurs situations que suscite l'exercice de la
liberté de manifestation, lesquelles situations seront analysées
dans la suite. En outre le caractère hybride du régime laisse
l'idée du floue conduisant les autorités politico-administratives
à recourir au régime d'autorisation, que nous qualifions a juste
titre de régime d'exception ; qu'au régime de
déclaration préalable qui est un régime initialement
consacré. Ce choix qui s'apparente au régime autoritaire. Car il
empêche la jouissance d'une liberté parmi les plus essentielles.
Nous pouvons bien conclure avec Patrick Waschsmann pour qu'il ne soit pas de
démocratie authentique, c'est-à-dire de démocratie
pluraliste, si certaines libertés essentielles ne sont pas garanties.
Section 3. Les principales
atteintes portées au droit de manifester
§1. Contexte historique
Les organisations non gouvernementales tant nationales
qu'internationales avaient intensifiées les dénonciations depuis
des décennies sur les poursuites pénales politisées et les
techniques policières abusives de contrôle de la foule telles que
les arrestations de masses et l'emploi d'armes dangereuses causant ainsi pertes
en vies humaines.
Entre le 15 et le 31 décembre 2016, les
autorités congolaises ont agi pour empêcher et pour contenir la
tenue de manifestations publiques contre le maintien au pouvoir du
Président Kabila au-delà de la fin de son deuxième et
dernier mandat constitutionnel le 19 décembre.316(*) Dans les principales villes
de la RDC, les forces de défense et de sécurité, dont les
agents de la PNC, mais également des militaires des FARDC
équipés d'armes létales, ont été massivement
déployées dans le but d'empêcher et de répondre aux
manifestations publiques attendues, malgré les interdictions
imposées au préalable par les autorités317(*).
Le BCNUDH a documenté au moins 40 personnes
tuées, dont cinq femmes et deux enfants, et 147 autres blessées,
dont 14 femmes et 18 enfants, résultant d'un usage
disproportionné de la force et de l'utilisation de balles réelles
par les forces de défense et de sécurité, en particulier
l'armée, dont les soldats de la Garde républicaine et de la
Police Militaire, qui ne sont ni équipés ni entrainés pour
les opérations de gestion des foules. Avant, pendant et après les
manifestations, les forces de défense et de sécurité ont
par ailleurs procédé à des arrestations à grande
échelle de personnes suspectées de planifier ou de participer
à des manifestations, dont des membres et des militants de partis
d'opposition et de mouvements citoyens.
La période pré et post-électorale
constitue en République Démocratique du Congo, les moments forts
de la répression des droits fondamentaux en général et du
droit de manifester en particulier.
On observe en effet une intensification des mesures
d'intimidations et de répression, notamment des exécutions
extrajudiciaires, un usage disproportionné de la force contre la
population, des atteintes à la liberté d'expression et des
arrestations et détentions arbitraires d'opposants politiques, de
défenseurs des droits humains, de journalistes, notamment lors de
rassemblements politiques pacifiques318(*). Toute personne s'exprimant contre le maintien du
président Kabila au pouvoir est susceptible d'être
inquiétée par les forces armées (FARDC et Police
Militaire), la police (PNC) ou les services des renseignements (ANR). Cette
situation de musèlement de l'opposition par des procédés
musclés et liberticides s'est étendue sur plus d'une
décennie.
Pour mieux l'analyser, nous l'avons répartie en trois
étapes : la période de 2006 à 2011 entre les deux
cycles électoraux (1), celle comprise entre 2011 et 2016 (2) et enfin la
période marquée par les manifestations de l'opposition et celles
du Comité laïc de coordination de 2017 et 2018 (3).
§2.
La période de 2006-2011 : entre les deux cycles
électoraux
Les trois cycles électoraux organisés en
République Démocratique du Congo depuis l'adoption de la
Constitution du 18 février 2006 sont les moments de
rétrécissement de l'espace démocratique dans notre pays.
Les missions d'observations et les organisations non gouvernementales de
défense de droits de l'homme rapportent plusieurs cas de violations de
la liberté de réunion et de manifestation.
A. Les
manifestations pré- et post-électorales de 2006
La conception autoritaire du pouvoir affichée par le
président Kabila dès sa prestation de serment du 6
décembre 2006, conjuguée à une détention exclusive
de la force publique et à un accès privilégié
à l'argent public et privé, ont généré, au
fil des années, chez les responsables du camp présidentiel, un
sentiment de toute-puissance. Tout semble indiquer qu'encouragé par une
certaine complaisance de la communauté internationale, le pouvoir se
soit senti libre de recourir à la violence, à sa guise, à
l'occasion.
Alors qu'il s'agissait, en 2011, de confirmer la marche vers
la démocratie engagée en 2006, les partis politiques ont
transformé ces élections en un combat navrant entre politiciens
avides de pouvoir et de privilèges319(*). L'étouffement rapide de toute contestation
par un large déploiement des forces de l'ordre, au lendemain de la
publication des résultats, y compris dans Kinshasa où l'opposant
E. Tshisekedi avait recueilli 64 % des voix, prouve que cette « gestion
violente » du processus électoral par le pouvoir s'est
avérée payante, mais aussi que l'opposition n'a jamais
été en mesure de mobiliser en profondeur en faveur d'une
alternance.Ce schéma qui diffère profondément de celui de
2006, nous ramène en fait aux situations que vivent la majorité
des pays d'Afrique centrale à l'occasion de la tenue d'élections
générales320(*).
Les affiches électorales de la MP étaient en
cela assez révélatrices de l'esprit imprégnant son
leadership : pas d'éléments de programme, mais une photo de J.
Kabila avec un seul slogan : « Na Rais 100% sûr321(*) » très vite
traduit par les militants et le public en : « Sûr à 100 % de
la victoire du Chef ». La détermination à rester en place et
à ne céder aucun pouce de terrain à l'opposition
était totale ; l'emploi des forces de l'ordre, l'utilisation des medias
publics et le contrôle de l'administration électorale
étaient considérés comme des avantages « normaux
» entre les mains de la majorité en place, en application d'une
règle du jeu tacite que l'opposition se devait d'accepter, comme
c'était le cas dans la plupart des pays africains de la
sous-région
§2.
La période entre 2011 et 2016
Cette période était fortement marquée par
des turbulences liées violations systématiques de liberté
de manifestation entre la période de 2011 (A), la période de 2015
(B) et la période de 2016 (C).
A. La
période 2011
Entre le 15 et le 31 décembre 2016, les
autorités congolaises ont agi pour empêcher et contenir la tenue
de manifestations publiques contre le maintien au pouvoir du Président
Kabila au-delà de la fin de son deuxième et dernier mandat
constitutionnel le 19 décembre. Dans les principales villes de la RDC,
les forces de défense et de sécurité, dont les agents de
la PNC, mais également des militaires des FARDC équipés
d'armes létales, ont été massivement
déployées dans le but d'empêcher et de répondre aux
manifestations publiques attendues, malgré les interdictions
imposées au préalable par les autorités.
Dans ce contexte, le BCNUDH a documenté au moins 40
personnes tuées, dont cinq femmes et deux enfants, et 147 autres
blessées, dont 14 femmes et 18 enfants, résultant d'un usage
disproportionné de la force et de l'utilisation de balles réelles
par les forces de défense et de sécurité, en particulier
l'armée, dont les soldats de la Garde républicaine et de la
Police Militaire, qui ne sont ni équipés ni entrainés pour
les opérations de gestion des foules.
Avant, pendant et après les manifestations, les forces
de défense et de sécurité ont par ailleurs
procédé à des arrestations à grande échelle
de personnes suspectées de planifier ou de participer à des
manifestations, dont des membres et des militants de partis d'opposition et de
mouvements citoyens.
Entre le 15 et le 31 décembre 2015, au moins 917
personnes, dont 30 femmes et 95 enfants, auraient été
arrêtées en RDC par les forces de défense et de
sécurité. Bien que la plupart aient été
libérées, au moins 70 parmi elles ont été
condamnées pour des infractions de droit commun tels que la destruction
méchante, le pillage, la rébellion ou la participation à
un mouvement insurrectionnel et plusieurs ont été soumises
à des traitements cruels, inhumains ou dégradants lors de leur
arrestation ou pendant leur détention.
Entre le 15 et le 31 décembre 2016, en lien avec les
manifestations, le BCNUDH a documenté qu'au moins 40 personnes ont
été tuées par des agents de l'État, dont cinq
femmes et deux enfants : 17 à Kinshasa, 12 à Lubumbashi (province
du Haut-Katanga), huit à Boma et trois à Matadi (province du
Kongo Central). Au moins 38 de ces victimes ont été tuées
par balle par les forces de défense et de sécurité. Durant
la même période, au moins 147 personnes ont été
blessées par des agents de l'État, dont 14 femmes et 18 enfants :
64 à Lubumbashi, 51 à Kinshasa, 16 à Matadi et 12 à
Boma, ainsi qu'une personne dans chacune des villes de Luebo (province du
Kasaï), Kananga (province du Kasaï central), Mbuji-Mayi (province du
Kasaï oriental) et Beni (province du Nord-Kivu).
Bien que certains incidents documentés par le BCNUDH se
soient déroulés lors d'affrontements avec des manifestants
violents, les informations collectées dénotent un usage excessif
et disproportionné de la force, dont l'utilisation d'armes
létales et de balles réelles, tirées sur les parties
supérieures du corps par les forces de défense et de
sécurité congolaises en réponse aux manifestations des 19
et 20 décembre.
L'utilisation d'armes létales par des forces de
défense et de sécurité lourdement armées contre des
manifestants viole les droits garantis par le droit international ainsi que par
la Constitution congolaise et est contraire aux standards internationaux
régulant l'usage de la force et des armes à feu par les agents de
maintien de l'ordre. De plus, plusieurs victimes ont été
blessées des suites de traitements cruels, inhumains ou
dégradants lors de leur arrestation ou de leur détention, en
violation des normes internationales et du droit congolais.
A Kinshasa, par exemple, au moins 17 personnes, dont deux
femmes, ont été tuées, et au moins 51 autres, dont sept
femmes et deux enfants, ont été blessées par des agents de
l'État. La plupart des incidents documentés dans la capitale ont
commencé dans la nuit du 19 au 20 décembre 2016, lorsque les
forces de défense et de sécurité ont commencé
à tirer à balles réelles et à utiliser des grenades
lacrymogènes pour disperser la population qui était descendue
dans la rue en faisant du bruit à l'aide de sifflets et de casseroles.
Ce soir-là, un homme a été tué par balle par des
militaires des FARDC pendant que la population manifestait et sifflait dans la
commune de Masina à Kinshasa. Les violences à Kinshasa ont
continué tout au long de la journée du 20 décembre, quand
les militaires de la Garde républicaine et de la Police Militaire
procédaient à des tirs de sommation pour disperser la population.
Sur les 17 personnes tuées documentées par le BCNUDH à
Kinshasa, deux l'ont été le 19, 15 et 20 décembre.
Quinze de ces victimes ont été tuées soit
par des balles perdues, soit par des tirs directs, un homme est mort
après avoir été percuté par un camion de la PNC, et
un autre homme, arrêté le 19 décembre à Masina,
serait mort des suites de traitements cruels, inhumains et dégradants
pendant sa détention au camp militaire Kokolo. Le 20 décembre, au
moins 29 personnes ont été blessées (dont cinq femmes et
un enfant), dont au moins 16 par balle et trois à la suite de
traitements cruels, inhumains et dégradants lors de leur arrestation ou
détention par les forces de défense et de sécurité.
La plupart des personnes tuées ou blessées ont été
évacuées par des agents de la PNC vers des camps militaires tels
que les camps Kokolo et Tshatshi et vers la morgue de l'hôpital de
référence Mama Yemo. L'accès à ces lieux a
été refusé au BCNUDH.
A Lubumbashi, entre le 15 et le 31 décembre 2016, le
BCNUDH a documenté la mort de 12 personnes, et 64 blessés, pour
la plupart résultant de l'utilisation de la force létale par les
forces de défense et de sécurité, dont des agents de la
PNC et des militaires des FARDC, certains habillés en tenue civile, en
réaction à des manifestations violentes. Lors de la seule
journée du 20 décembre, neuf hommes, une femme et un enfant de 17
ans ont été tués par balle réelle lorsque les
forces de défense et de sécurité ont tiré sans
distinction sur des manifestants violents. Au moins trois de ces victimes, dont
un homme tué à bout portant dans le quartier Matshipisha, ont
été tués par des agents de la PNC et six, dont deux hommes
tués à bout portant dans les quartiers Katuba II et Kisanga, ont
été tués par des militaires des FARDC.
B. Les
manifestations de janvier 2015 contre la loi électorale
Les événements des 11,12, 19,20, 21 janvier 2015
survenus à Kinshasa en sont une nette illustration du type de violence
liée au processus électoral que risque de vivre la RDC. «
Ces événements ont occasionné plusieurs cas de morts des
innocents, des blessés, des arrestations arbitraires et
enlèvements dans le rang des manifestants ». Le Bilan des morts
varie selon la source, 42 morts selon la Fédération
Internationale des Droits de l'Homme (FIDH), et 27 morts selon le dernier bilan
du gouvernement de la RDC, sans préciser l'identité des gens
à la base de ces morts presque banalisées.
C. Les
manifestations de septembre
2016 dénommées « carte jaune »
Des manifestations de l'opposition ont été
organisées le 26 mai 2016 dans tout le pays pour protester contre le
Président Joseph Kabi a et son ambition de rester au pouvoir au terme de
son deuxième mandat.
Selon le Bureau Conjoint des Nations Unies aux Droits de
l'Homme (BCNUDH), au moins neuf manifestations ont été interdites
par les autorités municipales, et 59 personnes ont été
arrêtées pendant les manifestations322(*). Le rapport d'Amnesty
Internationale (Al), fait état d'au moins 16 villes
empêchées de manifester ou ayant connu des manifestations
dispersées323(*).
Le Gouverneur du Nord-Kivu a interdit toute manifestation dans sa
province.324(*)
Parmi les manifestations ayant été
dispersées, figurent notamment celles ayant été
organisées dans les villes suivantes : Tshikapa (Kasaï), Kananga
(Kasai-Central), Butembo (Nord-Kivu), Béni (Nord-Kivu), Goma
(Nord-Kivu), Bunia (Ituri), Kisangani (Tshopo), Kalemie (Tanganyika), Moba
(Tanganyika), Lubumbashi (Haut-Katanga), Mbujt-Mayi (Kasai-Orïental),
Mbandaka (Équateur), Matadi, (Kongo-central).325(*) Le BCNUDH indique que 101
personnes en rapport avec ces manifestations ont été
arrêtées entre le 23 et le 26 mai 2016326(*). Selon le Colonel Mwana
Mputu, porte-parole de la Police nationale congolaise (PNC), 9 personnes ont
été interpellées sur l'ensemble du territoire327(*).
Selon Human Rights Watch (HRW): « Le 26 mai 2016,
les forces de sécurité ont tiré du gaz lacrymogène
et à balles réelles alors qu'elles cherchaient à
empêcher la poursuite de manifestations à Goma, tuant au moins une
personne et en blessant au moins 11 autres, dont quatre
enfants »328(*). La manifestation a été interdite mais
les manifestants se sont tout de même regroupés. Une personne a
été tuée lors d'un accident de la route causé par
la fuite de manifestants.
Ces personnes sont membres de partis d'opposition tels que
l'UNC, le MPCR et RECO. Ils s'étaient réunis au domicile de Tex
Maybinga, membre de l'UNC, dans le quartier Ciné Palace de Matadi, pour
préparer la manifestation du 26 mai, lorsqu'ils ont été
arrêtés par la police. Ces arrestations ont suscité de
vives réactions notamment de la part de Vital Kamerhe (supra), qui a
insisté sur le fait que ces arrestations se sont produites dans un lieu
privé. L'UNC a affirmé qu'il s'agissait d'une réunion de
préparation à la manifestation du 26 mai et perçoit ces
arrestations comme une tentative d'intimidation.
La répression des manifestations a suscité de
nombreuses réactions internationales. Le 21 juillet 2016, le
Haut-Commissaire de la MONUSCO, Zeid Ra'ad Al Hussein, a exprimé ses
inquiétudes quant à la situation en RDC. Il a
dénoncé un « harcèlement croissant, (une)
répression des voix qui s'opposent au gouvernement (et des) dispersions
excessives et parfois mortelles de manifestations ». Il a en outre
souligné que « Les manifestations et réunions
organisées par l'opposition et par la société civile sont
souvent entravées ou réprimées, alors que celles
organisées par la majorité présidentielle se
déroutent généralement sans obstruction »329(*).
Dans une lettre adressée le 7 septembre 2016 au conseil
des droits de l'Hommes de l'ONU, HRW a indiqué que : « Depuis
janvier 2015, le gouvernement congolais exerce une répression brutale
à l'encontre de ceux qui se sont prononcés contre ou se sont
opposés aux tentatives de prolonger ta présidence de Joseph
Kabila au-delà de la limite constitutionnelle de deux mandats, dont le
second prend fin le 19 décembre 2016. Les forces de
sécurités et officiels gouvernementaux ont arrêté
arbitrairement des dizaines de dirigeants de l'opposition et activistes, ouvert
le feu sur des manifestants pacifiques, interdit des manifestations de
l'opposition, bloqué des médias, accusé déjeunes
activistes pro-démocratie de fomenter des actes terroristes, et
empêché des dirigeants de l'opposition de circuler librement dans
le pays. Le Bureau conjoint des Nations Unies pour les droits humains en RD
Congo a documenté 760 violations des droits humains liées
à des restrictions en matière d'espace démocratique, dont
500 intervenues en 2016»330(*).
Avant, pendant et après les événements du
19 et 20 décembre, les autorités congolaises ont conduit des
arrestations massives et des détentions de personnes suspectées
de planifier ou de participer à des manifestations, dans le but
d'empêcher toute démonstration. Entre le 15 et le 31
décembre 2016, au moins 917 personnes, dont au moins 30 femmes et 95
enfants, ont été arrêtées par des agents de
l'État sur l'ensemble du territoire de la RDC : 414 à Lubumbashi,
184 à Kinshasa, 115 à Goma, 76 à Matadi, 43 à Boma,
30 à Oicha (province du Nord-Kivu), trois à Kasumbalesa (province
du Haut-Katanga) 25 à Bukavu (province du Sud-Kivu), 12 à Luebo,
huit à Mbuji-Mayi, quatre à Beni, deux à Kalemie (province
du Tanganyika), et une à Kananga.331(*) De nombreux civils arrêtés par les
forces armées ont été conduits dans des camps militaires,
en violation des standards internationaux. Les équipes du BCNUDH se sont
vues refuser l'accès aux camps militaires et aux centres de
détention de l'ANR.
Le 26 décembre 2016, 49 personnes arrêtées
par la police à Lubumbashi pour pillage et vandalisme de
propriétés publiques et privées ont été
transférées devant le Parquet de grande instance de Lubumbashi,
et condamnées pour vol, destruction méchante, association de
malfaiteurs, rébellion et incendie volontaire par le Tribunal de grande
instance de Lubumbashi, en procédure de flagrance.
Le 28 décembre, en procédure de flagrance
également, le même Tribunal a condamné 22 manifestants
arrêtés entre le 20 et le 22 décembre à des peines
allant de 12 mois avec sursis (pour huit manifestants, qui ont ensuite
été relâchés), à trois ans de servitude
pénale principale pour rébellion et participation à un
mouvement insurrectionnel. Le Tribunal a en même temps acquitté 27
autres personnes.
Dans la nuit du 27 au 28 décembre, 102 personnes, dont
30 mineurs, ont été arrêtées par les forces de
défense et de sécurité lors d'une opération de
ratissage dans la commune de Katuba pour y rechercher les biens pillés
pendant les manifestations du 20 décembre. Parmi ces 102 personnes, 96
dont les 30 mineurs ont été relâchés du DLCC le 28
décembre. Les six autres individus ont été
transférés au Parquet de grande instance de Lubumbashi
accusés de vol qualifié.
A Goma, au moins 115 personnes, dont cinq femmes, des membres
des partis d'opposition et de mouvements de citoyens332(*), ont été
arrêtées par les forces de défense et de
sécurité dans le cadre des manifestations contre le
président Kabila restant au pouvoir. Les arrestations ont
commencé le 15 décembre, date à laquelle les agents de la
PNC ont arrêté de manière préventive 15 jeunes
sans-abris soupçonnés de vouloir participer aux manifestations du
19 décembre. Les 18 et 19 décembre, 28 personnes ont
été arrêtés au cours d'une opération de
ratissage menée par des agents de la PNC. Le 19 décembre, l'ANR a
arrêté cinq personnes et des agents de la PNC ont
arrêté 22 personnes pour avoir porté des t-shirts rouges
symbolisant un «carton rouge» donné au président Kabila
pour quitter son poste. Au moment de la rédaction du présent
rapport, sur les 115 personnes arrêtées à Goma, 102 avaient
été libérées et 13 étaient toujours en
détention.333(*)
À Matadi, au moins 76 civils, dont au moins un mineur,
ont été arrêtés par les agents de la PNC les 20 et
21 septembre, principalement dans leurs maisons, dans des magasins, des
garages, des cabines téléphoniques ou des bars et non pendant les
manifestations. Ils ont été emmenés dans des cellules du
commissariat urbain local de la PNC et à la Direction des renseignements
généraux (DRG). Parmi les personnes arrêtées,
beaucoup ont été libérées entre le 20 et le 22
décembre après le paiement d'une somme d'argent demandée
par les agents de la PNC. Treize personnes ont été
transférées au Parquet de grande instance, dont sept ont
été relâchées le 26 décembre, tandis que cinq
étaient toujours détenues à la prison centrale de Matadi
pour vol et rébellion, en attendant une audience devant le Tribunal de
grande instance de Matadi.
À Boma, entre le 20 et le 21 décembre 2016, des
agents de la PNC déployés dans toute la ville ont
arrêté 43 personnes, dont deux femmes et quatre mineurs de moins
de 14 ans. Vingt de ces personnes ont été libérées
après avoir versé diverses sommes d'argent, alors que les 23
autres ont été transférés au Boma. Parquet de
grande instance, qui a immédiatement ordonné la libération
des deux femmes et des quatre enfants et de huit personnes
supplémentaires. Au moment de la rédaction de ce rapport, neuf
personnes étaient toujours détenues dans la prison centrale de
Boma et poursuivies par le Parquet de grande instance pour rébellion,
destruction méchante et association criminelle.
Il convient de rappeler que, depuis la fin de 2015, dans la
plupart des grandes villes, les autorités locales ont continué
d'interdire les manifestations publiques, alors que dans d'autres villes, des
manifestations spécifiques ont été interdites après
que les organisateurs aient communiqué les lieux des rassemblements
prévus aux autorités.
Le 13 décembre 2016, dans un télégramme,
le commissaire général de la PNC, Charles Bisengimana, a
demandé à tous les commissaires provinciaux de la PNC d'adopter
des mesures visant à empêcher toutes les marches collectives
avant, pendant et après le 19 décembre, tout en rappelant la
nécessité de le faire dans le respect des droits de l'homme. Les
autorités locales de Goma et de Bukavu, ainsi que de la province du
Haut-Uélé, ont interdit les manifestations avant le 19
décembre de cette même année. À Kinshasa, une
interdiction générale et illimitée de toutes les
manifestations publiques, ordonnée par le Gouverneur de la Ville
après les événements du 19 septembre 2016, était
toujours en place.
Les interdictions générales de manifestations
imposées de facto ou de jure en RDC sont injustifiées et
disproportionnées au regard de la nécessité de maintenir
l'ordre public et sont contraires au droit international relatif aux droits de
l'homme et aux articles 25 et 26 de la Constitution congolaise. L'utilisation
disproportionnée de la force et de la répression contre des
manifestants pacifiques sur la base de ces interdictions devrait donc
être considérée comme contraire aux normes internationales
relatives aux droits de l'homme et aux dispositions pertinentes de la
Constitution congolaise.
Le 15 décembre 2016, l'Autorité de
Régulation des Postes et des Télécommunications (ARPTC) a
ordonné aux fournisseurs d'accès à l'internet de
restreindre l'accès à tous les réseaux sociaux à
partir du 18 décembre 2016 à 23h59. L'accès aux
réseaux sociaux a ainsi été coupé en
République démocratique du Congoen date du 20 décembre au
28 décembre 2016.334(*) Certains fournisseurs d'accès Internet ont
même dû couper entièrement la connexion en internet pendant
la même période335(*).
§3.
La période allant de décembre 2017 et janvier 2018 :
Comité Laïc Catholique de coordination
« CLC »
Le droit à la liberté de réunion
pacifique a été fortement restreint au cours de l'année
2017. Le 31 mars 2017, sur instruction du vice-Premier Ministre, Ministre de
l'Intérieur et Sécurité, toutes manifestations politiques
publiques dans l'ensemble du pays ont été interdites.336(*) Des interdictions
générales de manifester ont été formellement
imposées dans au moins 12 villes ou provinces par les autorités
locales. Par exemple, le premier avril 2017, le Gouverneur de la province du
Kongo Central a publié un communiqué officiel,337(*) interdisant l'organisation
de manifestations dans cette province. Un arrêté du Maire de la
ville de Kananga (province du Kasaï Central) du 23 novembre 2017 a
également interdit l'organisation de toutes les manifestations publiques
sur toute l'étendue de la ville « jusqu'à nouvel ordre
».338(*)
Si des restrictions raisonnables au droit de réunion
pacifique peuvent être nécessaires sous certaines circonstances,
les interdictions générales et non limitées dans le temps
imposées par les autorités de la République
démocratique du Congo sont, même lorsque des interdictions sont
invoquées, la protection de la sécurité nationale, de la
sûreté publique ou de l'ordre public, disproportionnés et
discriminatoires, car elles excluent l'examen des circonstances
spécifiques à chaque réunion proposée.339(*) Par ailleurs, en plus des
interdictions générales, les autorités locales ont
systématiquement et manifestement refusé d'autoriser les
manifestations pour lesquelles elles avaient été notifiées
conformément à laConstitution de la République
Démocratique du Congo.340(*)
Les interdictions de manifester et le déploiement
systématique des forces de défense aux côtés des
services de sécurité illustre l'hostilité des
autorités congolaises, aussi bien politico-administratives que les
services de sécurité et les forces de défense, à
l'égard des organisateurs et des participants aux rassemblements de
l'opposition et d'autres organisations de la société
civile.341(*)
CHAPITRE TROISIEME :
LA LIBERTÉ DE
MANIFESTATION EN DROIT COMPARÉ
|
D'un continent à l'autre, la liberté de
manifestation est au coeur de l'actualité. En Europe et à ses
portes : l'état d'urgence, déclaré en France, a conduit
à l'adoption de la loi du 21 juillet 2016, après les attentats de
Nice, permettant d'interdire plus facilement les manifestations. Toujours en
France, les récents épisodes des manifestations des gilets jaunes
ont été à la base de l'adoption de la loi anticasseurs. Le
mouvement des Indignés, en Espagne, a été encadré
par les autorités publiques sur le fondement de la législation en
matière électorale342(*) ; en Pologne343(*), les manifestations défendant l'avortement se
sont opposées au Gouvernement conservateur. L'Ukraine ou encore la
Turquie et l'Égypte ont également été le
théâtre de manifestations impressionnantes.
Le mouvement « Occupy » s'est répandu
sur tous les continents, aussi bien américain qu'asiatique ;
à Hong Kong, de fortes manifestations contre le projet de loi
d'extradition vers la Chine continentale se sont soldées par des
scènes de répression parfois inédites. À un autre
niveau, les mouvements des printemps « arabes », en Afrique du
Nord344(*), et «
érable », avec la grève estudiantine au Canada,
montrent la résonance de cette liberté au niveau mondial, dans
des États caractérisés par la diversité de leurs
régimes politiques et de leurs traditions juridiques. L'actualité
témoigne des fortes restrictions dont cette liberté fait l'objet,
comme un signal d'alerte de l'état de santé des
démocraties dans le monde.
Mais cette liste ne doit cependant pas donner l'impression que
l'enjeu des manifestations en question est le même partout. Les
manifestations ont joué et jouent aujourd'hui un rôle central dans
les processus de transition démocratique345(*), mais aussi dans les
démocraties plus installées où leur rôle est de
contribuer au débat d'idées.
Le contexte actuel témoigne donc de
l'intérêt d'étudier la liberté de manifestation dont
les contours sont a priori difficiles à dessiner, dans une approche de
comparaison en vue de tirer des leçons des expériences des autres
nations pour édifier un droit congolais de la liberté de
manifestation conforme aux exigences démocratiques.
Le droit de manifester cher aux textes protégeant les
droits de l'homme, revêt une importance tout à fait
particulière dans le cadre d'un État de droit346(*). Il est
considéré comme la pierre angulaire du principe de la
démocratie et des droits de l'homme et représente pour une
société démocratique l'une des conditions primordiales de
son progrès et de l'épanouissement de chacun347(*).
Alors que les ordres juridiques de certains États ont
brillé par l'ignorance des standards structurant des cadres
adaptés de protection de la liberté de manifestation ;
d'autres États ont fait preuve de maturité en cristallisant des
cadres dignes des États démocratiques. C'est le cas par exemple
de la France et de l'Espagne qui en dépit des lacunes structurelles
réussissent à instaurer des cadres plus ou moins outillés.
D'autres États, à l'image de la République
Démocratique du Congo et le Benin,348(*) consacrent des régimes juridiques astreints
à des limitations évidentes liées au déficit
démocratique caractérisant les institutions politiques. Ils
abordent la question de cette liberté avec un ton
différent : les limitations constitutionnelles à la
liberté de manifestation cèdent la place à un
régime despotique traduisant plus des volontés autoritaires.
Le contexte historique ainsi que la culture juridique de
chaque système ont marqué la conception des droits et
libertés et ; par conséquent de la liberté de
manifestation. L'histoire constitutionnelle française et le moment de
rupture qu'elle organise avec la Révolution de 1789
caractérisent une approche de la liberté de manifestation bien
différente de la façon dont elle est appréhendée
ailleurs.
Au Royaume Uni, les manifestations sont
appréhendées autrement qu'en France. Dans les États
anciennement membres du bloc soviétique, comme en RDC, les
révolutions ont également marqué la conception de la
liberté de manifestation. Cette diversité illustrant la
standardisation des cadres structurant la liberté de manifestation par
tel ou tel ordre juridique inspire la rationalisation d'autres cadres
juridiques. C'est là l'importance de la méthode comparative. Le
présent chapitre s'articule autour de l'analyse comparée du
régime juridique de la liberté de manifestation dans l'espace
européen (Section I) d'une part et dans l'espace africain de l'autre
(Section II) à la lumière du droit congolais dont les tares du
système juridique ne cessent pas d'être décriées
(Section III).
Section
1. Le cadre juridique de protection de la liberté de manifestation en
France
La question de la liberté de manifestation est au coeur
des débats en France, qualifiée de « patrie des droits
de l'homme ». L'adoption récente de la loi anticasseurs au
lendemain des manifestations des « gilets jaunes »
démontre à suffisance son actualité et l'intensité
de la surveillance dont fait l'objet cette liberté en France (§1).
En plus de l'examen de la situation française, la présente
section s'emploie à analyser les régimes juridiques de la
liberté de manifestation dans ce pays (§2) dans la perspective
d'une analyse comparative avec le droit congolais.
§1. Le droit de manifester en
France : une liberté sous les signes de méfiance
En France, la liberté de manifestation occupe une
place particulière au sein de la catégorie des libertés
fondamentales. Elle offre un visage singulier, traduisant la méfiance
des pouvoirs publics. « On n'en rappellera ici que les principes,
ceux qu'il est nécessaire de connaître pour suivre la
présente argumentation », car dans le détail, il s'agit
d'un droit complexe, finalement peu étudié, fait de pièces
successives mal emboîtées dont l'analyse exigerait un ample
développement.349(*)
Non seulement cette liberté fait l'objet d'une
consécration en demi-teinte mais, en outre, son régime semble
davantage placé sous le signe de l'ordre que celui de la liberté.
Car aucun texte ne la consacre officiellement, si ce n'est un décret sur
la sécurité publique.350(*) C'est par la jurisprudence qu'elle a
été affirmée et en suite connu son essor. Les
dernières années, la situation de la liberté de
manifestation s'est positivement améliorée au point de la
classée parmi les libertés les mieux protégées.
C'est à travers l'instauration de la procédure de
référé-liberté permettant en toute
célérité d'arrêter toutes formes de violations des
droits fondamentaux par un contrôle rapide des restrictions
portées contre les libertés par le juge administratif.351(*)
1. La protection
inachevée
Si la liberté de manifestation est certes reconnue
à un niveau supralégislatif, les textes et jurisprudences qui la
consacrent ne parlent pas de liberté de manifestation ni même de
manifestation. Dans l'ordre constitutionnel, la liberté de manifestation
ne bénéficie pas d'une consécration textuelle352(*). Aucun élément
du bloc de constitutionnalité ne reconnaît expressément une
telle liberté. Un article en ce sens figurait dans le projet de
Constitution du 19 avril 1946mais ce projet ne fut pas adopté.353(*)Il a fallu attendre une
décision de 1994 pour voir le Conseil constitutionnel consacrer un
timide « droit d'expression collective des idées et des opinions
»354(*), qui
revient à reconnaître la liberté de manifester sous la
forme d'une définition.
Le texte dont ce droit est issu n'est pas mentionné par
le Conseil. Il paraît peu probable qu'il ait entendu le créer
totalement sans aucune assise textuelle car telle n'est pas l'orientation de sa
jurisprudence355(*). En
cas de création d'une nouvelle norme constitutionnelle, le Conseil
s'efforce toujours de la rattacher à un texte, serait-ce de façon
artificielle. Dans le cas du droit à l'expression collective des
idées et des opinions, le texte correspond, selon la plupart des
auteurs356(*), à
l'article 10 de la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen, aux
termes duquel « Nul ne doit être inquiété pour ses
opinions (...) pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public
établi par la Loi ».357(*) L'énoncé évoque la notion de
manifestation d'une opinion. Il s'avère suffisamment large pour inclure
la notion de manifestation au sens de défilé. Un rattachement aux
articles 2 et 4 de la DDHC serait également envisageable.
Le même constat d'une reconnaissance en demi-teinte
s'impose au niveau international. Là encore, sont absentes tant les
notions de manifestation que de liberté de manifestation. L'article 11
de la convention européenne reconnaît un droit « de
réunion pacifique ». L'article 21 du Pacte international relatif
aux droits civils et politiques parle du « droit de réunion
pacifique ». La Charte des droits fondamentaux de l'Union
européenne retient une formule proche en évoquant « la
liberté de réunion pacifique ».358(*)L'expression «
liberté de manifestation » n'est pas expressément359(*) utilisée, comme si
elle suscitait une certaine méfiance. Ce sentiment se trouve
conforté par l'analyse de son régime.
2. Un régime placé sous le signe de
l'ordre public et méfiance
Par rapport aux autres libertés (notamment la
liberté d'association et la liberté de réunion, qui comme
elles ont en commun d'amener des personnes à se rassembler), la
liberté de manifestation peut être qualifiée de
liberté « surveillée » au sens où son
régime est placé sous le signe de la sécurité.
Cela est d'autant évident que le régime qui
l'organise trouve sa place non pas dans une loi sur la liberté de
manifestation ou dans le code des relations entre le public et les
administrations mais dans le code de la sécurité
intérieure.360(*)
De façon significative, elle figure dans un Chapitre premier
intitulé « Prévention des atteintes à l'ordre public
lors de manifestations et de rassemblements ». Ce choix n'est pas anodin
et révèle une certaine perception de la liberté de
manifestation.
Cette orientation n'est d'ailleurs pas nouvelle et existe
depuis la consécration de cette liberté. Le premier texte qui
l'organise, à savoir le décret-loi du 23 octobre 1935,
codifié en 2012 dans le code de la sécurité
intérieure,361(*)
s'intitule décret-loi « portant réglementation des mesures
relatives au renforcement du maintien de l'ordre public »362(*). La philosophie et les
inspirations sont différentes de « grandes lois » relatives
aux libertés sous la troisième République, loi sur la
presse, loi sur la liberté d'association, loi sur la liberté
syndicale.363(*) Cette
différence s'explique par le contexte dans lequel ce texte a
été édicté. Adopté en réaction aux
affrontements du 6 février 1934,364(*) il visait, dans l'esprit des rédacteurs, non
pas à consacrer une liberté publique ou à
reconnaître un droit de manifester mais plutôt à garantir
l'ordre public. L'idée sous-jacente est la suivante : les manifestations
représentent un risque, il faut le contenir.
L'orientation « sécuritaire » de la
liberté de manifestation, c'est-à-dire le fait qu'elle soit, plus
que d'autres, placée sous le signe de la sécurité se
comprend et n'apparaît en tout état de cause pas anormale. En
effet, un usage dévoyé de cette liberté est porteur d'un
danger plus important et plus immédiat que d'autres libertés.
Plus important car il provoquera des blessés voire des morts. Plus
immédiat car les dégâts, pertes humaines, blessures,
dégradations sont instantanés. La dangerosité potentielle
de cette liberté se situe incontestablement un cran au-dessus d'autres
libertés : si l'on prend le cas de la liberté d'association, un
usage dévoyé de celle-ci aboutira, dans le pire des cas, à
la constitution de groupements ayant un objet contraire à l'ordre public
(s'il y a lieu, l'association sera dissoute). Un usage dévoyé de
la liberté d'expression conduira à un outrage, une injure, une
diffamation ou, dans le pire des cas, un appel à la haine ou à la
violence. Même dans ces cas de figure, le risque ou la dangerosité
n'est ni immédiat ni instantané.365(*) La plus grande
dangerosité potentielle de la liberté de manifestation, par
rapport à d'autres libertés, justifie qu'elle fasse l'objet d'une
surveillance plus étroite.
Au demeurant, il convient de relativiser la prégnance
de l'ordre dans le régime de la liberté de manifestation. Et ce
pour trois raisons : primo, son exercice est soumis à un
régime de déclaration et non pas d'autorisation,366(*)un arrêté
soumettant les manifestations à la délivrance d'une autorisation
préalable est illégal,367(*)secundo, certaines manifestations sont
dispensées de l'exigence d'une déclaration
préalable,368(*)tertio, en pratique, de nombreuses
manifestations ne sont pas déclarées,369(*)contrairement à ce que
prescrit la loi et le fait d'organiser une manifestation sans
déclaration, alors même qu'il est puni par la loi370(*), ne donne quasiment jamais
lieu à poursuites371(*). De même, la puissance publique ne donne pour
ainsi dire jamais l'ordre de disperser des manifestations non
déclarées ou interdites, estimant que le trouble à l'ordre
public qui en résultera risquerait d'être plus important que celui
résultant du non-respect de la loi.372(*) Cela signifie, et c'est incontestablement un signe
de libéralisme, que l'autorité publique laisse se dérouler
ces rassemblements qui, de fait, ne se trouvent même pas soumis à
l'exigence d'une déclaration mais relèvent du régime
d'exercice des libertés le plus favorable, à savoir le
régime répressif : la liberté s'exerce sans autorisation
ni même déclaration.373(*)
Il résulte de ce qui précède que
l'orientation « sécuritaire » de la liberté de
manifestation mérite d'être relativisée. En outre, dans une
perspective dynamique, il est particulièrement notable que la protection
juridictionnelle dont elle bénéficie soit passée au cours
des dernières années du néant à
l'effectivité.
§2. Le régime juridique
de la liberté de manifestation en France
La manifestation est en France soumise au régime
relativement libéral de la déclaration et non au régime de
l'autorisation préalable.374(*) La déclaration sera faite à la mairie
de la commune ou aux maires des différentes communes sur le territoire
desquelles la manifestation doit avoir lieu, trois jours francs au moins et
quinze jours francs au plus, avant la date de la manifestation. A Paris et pour
les communes du département de la Seine, la déclaration est faite
à la préfecture de police. Elle est faite au préfet ou au
sous-préfet en ce qui concerne les villes où est instituée
la police d'État. La déclaration fait connaître les noms,
prénoms et domiciles des organisateurs, et est signée par trois
d'entre eux, faisant élection de domicile dans le département.
Elle indique le but de la manifestation, le lieu, la date et l'heure du
rassemblement des groupements invités à y prendre part et, s'il y
a lieu, l'itinéraire projeté. L'autorité qui reçoit
la déclaration en délivre immédiatement un
récépissé375(*). L'autorité publique ainsi informée ne
peut interdire sous le contrôle du juge la manifestation que s'il y a une
menace grave et précise pour l'ordre public.
Le droit et la jurisprudence opèrent ensuite une
distinction appuyée entre l'organisateur d'une manifestation et le
« simple » manifestant. L'organisateur commet un
délit s'il ne déclare pas la manifestation qu'il organise, ou
s'il fait une fausse déclaration, par exemple sur la date ou
l'itinéraire ou encore s'il poursuit la préparation d'une
manifestation interdite. Par contre, il n'y a, pour celui qui n'a pas
organisé la manifestation, aucun délit à participer
à une manifestation quand bien même celle-ci n'aurait pas
été déclarée, voire aurait été
interdite (la jurisprudence est constante), et tout du moins tant que la force
publique n'enjoint pas à se disperser376(*).
Toujours en droit, il est nécessaire également
d'opérer une distinction stricte entre la manifestation sur la voie
publique ou encore tous cortèges, défilés et
rassemblèrent de personnes.377(*)En droit, les textes qui s'appliquent aux
manifestations et aux attroupements sont complètement
indépendants, ils ne renvoient aucunement l'un à l'autre.
Juridiquement, une manifestation interdite ou une
manifestation non déclarée, ou encore une manifestation qui ne
suit pas l'itinéraire prévu ou qui ne se disperse pas à
l'appel de ses organisateurs ne devient pas par cela même un
attroupement. Mais faute d'une définition légale de
l'attroupement, le rassemblement de manifestants sur la voie publique,
dès lors que les conditions du décret-loi de 1935 ne sont plus
respectées, est souvent considéré comme constituant un
attroupement. Cet artifice juridique, fréquemment employé par
l'administration et parfois récusé par la jurisprudence, permet
de dissiper par la force l'attroupement, notamment s'il y a risque d'atteinte
à la tranquillité publique.
En ce cas, il n'y a plus lieu de distinguer entre ceux qui
provoquent l'attroupement (on ne parle pas ici
« d'organiser » un attroupement) et ceux qui le composent,
tous seront également dispersés après les sommations
réglementaires décrites avec un grand luxe de détails par
le Décret n° 60-898 du 24 août 1960 modifiant le code de
procédure pénale.
En vertu des normes internationales, la déclaration
préalable a pour seul objectif de permettre aux autorités de se
préparer afin que le rassemblement en question puisse se dérouler
dans les meilleures conditions, tant pour les participants que pour les autres
personnes. Elle ne doit donc pas être obligatoire si aucune
préparation n'est nécessaire de la part des autorités, par
exemple pour les petits rassemblements. Par ailleurs, les procédures
administratives pour la déposer ne doivent pas être excessivement
lourdes, longues ou coûteuses.
Section 2. La positivité de
la liberté de manifester en droit espagnol
La Constitution espagnole de 1978 contient une longue
déclaration des droits et des libertés et de leurs garanties
d'exercice, énoncée dans l'esprit de la plupart des textes
constitutionnels postérieurs à 1945 et intégrés
à la tradition de l'État social de droit.
Le droit de manifester est prévue à l'article 21
qui prévoit que « 1. Le droit de réunion pacifique et sans
armes est reconnu. L'exercice de ce droit n'exigera pas une autorisation
préalable. 2. Les autorités seront informées
préalablement des réunions devant se dérouler dans des
lieux de manifestation publique et de circulation ; elles ne pourront les
interdire que si des raisons fondées permettent de prévoir que
l'ordre public sera perturbé mettant en danger des personnes ou des
biens »378(*). Par
injonction du constituant, cette disposition a fait l'objet d'une mise en
oeuvre législative, la jurisprudence apportant, notamment, des
précisions quant aux caractères de la liberté de
manifestation et déterminant, à la suite des textes, les
composantes de cette liberté.
L'histoire constitutionnelle espagnole a connu diverses formes
de limitations du droit de réunion et de la liberté de
manifestation, oscillant en la matière jusqu'en 1978 entre diverses
conceptions (1). C'est à une conception libérale que le
constituant de 1978 s'est finalement rangé (2), même si on observe
que ce choix est loin d'avoir éteint toutes les interrogations et les
affrontements autour de ce droit, ainsi que le met en lumière
l'actualité (3).
§1. Le parcours historique du
droit de manifester en Espagne
La protection de ce que la doctrine a coutume de
désigner comme la « liberté de manifestation » n'est
qu'un acquis tardif de l'ordre juridique espagnol.379(*) En effet, pendant longtemps,
en Espagne, la liberté de manifestation, associée ou non à
la liberté ou au droit de réunion, n'a fait l'objet d'aucune
consécration, ni législative ni a fortiori constitutionnelle. Si
ce ne sont les codes pénaux de 1822 et de 1848, qui répriment les
associations et les réunions illicites, cette liberté est tout
simplement ignorée et cette considération limitée aux
seules associations et réunions illicites en dit assez long sur
l'idée que l'époque se fait du droit de réunion.380(*) Comme il a été
perçu en droit français, le droit de manifester est jugée
en Espagne comme un élément potentiellement subversif qui doit
être fortement contrôlé et, lorsque le droit envisage de
s'en saisir, c'est surtout pour lui appliquer un régime «
sanctionnateur »381(*).
Certes, si quelques réunions ont bien lieu, un grand
nombre sont en réalité interdites sans que soit exigée une
motivation particulière et, évidemment, sans qu'un contrôle
des mesures d'interdiction ne soit prévu. De sorte que durant une grande
partie du XIXème siècle, le droit de se réunir, et plus
encore le droit de manifester, ne sont pas appréhendés en Espagne
en tant que droits des individus mais ont beaucoup plus à voir avec un
régime de police discrétionnaire, tout se passant comme si la
restriction de la liberté de réunion était dans l'ordre
naturel des choses382(*).
À partir de la Constitution de 1869, les choses
évoluent nettement puisque son article 18 reconnaît positivement
le droit de réunion, rapproché des libertés d'expression
et d'association ainsi que du droit de pétition.383(*) Poursuivant même ce
mouvement, la loi accueille le droit de réunion et de manifestation.
D'une part, le Code pénal de 1870 liste les réunions et
manifestations non pacifiques et donc illicites, d'où il ressort que les
réunions et manifestations non incluses dans cette liste sont pacifiques
et licites, et méritent à ce titre la protection de l'ordre
juridique.384(*)
D'ailleurs, des sanctions sont prévues à
l'encontre des fonctionnaires qui empêcheraient une réunion
pourtant licite. Et bien que la liste des réunions interdites reste fort
longue, un pas sérieux est incontestablement franchi par le Code
pénal dans le sens d'une meilleure reconnaissance de la liberté
de réunion. D'autre part, cela ressort de manière plus
évidente encore de la loi du 15 juin 1880 portant
précisément sur l'exercice de(s) réunion(s)
publique(s)385(*).
Conformément à la Constitution de 1869, la
réunion est bien présentée comme un droit ; mieux, les
conditions prévues pour jouir de ce droit s'avèrent même
libérales puisque, pour pouvoir organiser une réunion ou une
manifestation licite, il suffit de porter par écrit à la
connaissance du représentant du gouvernement l'objet, le site, le jour
et l'heure de la réunion.386(*) Toutefois, ce régime de déclaration
préalable assez respectueux des libertés se trouve
tempéré par le fait que certaines réunions, même
licites, exigent une autorisation préalable ; il s'agit de toutes celles
qui sont célébrées dans les rues, sur les places et les
allées, ou autres lieux de circulation. Il s'agit ici d'un régime
hybride combinant information et autorisation préalables, assimilable
à celui qu'a connu la RDC sous l'empire du décret-loi de 1999. Il
faut relever cependant que le régime espagnol de 1869 se
révèle plus restrictif que le régime congolais de 1999 au
motif que le droit espagnol de l'époque subordonnait toutes les
manifestations et réunions dans l'espace public à l'autorisation
préalable alors qu'au Congo en 1999, toutes les manifestations dans
l'espace public n'étaient pas concernées par l'autorisation
préalable. Autant dire que les manifestations sont, en Espagne de
l'époque, davantage suspectées de poser problème, le
législateur privilégiant souvent à leur encontre un
régime plus rigoureux.
Pour autant, le droit de réunion et de manifestation
sort grandi d'une législation qui, dans les années 1870-1880, est
dans une certaine mesure avant-gardiste. D'abord, par les formules
employées : il n'est plus question par exemple de réunions
à l'air libre mais de réunions sur des lieux de circulation, ce
qui a pour conséquence de concrétiser plus clairement le
caractère public des sites de réunions. Ensuite, le juge n'est
pas écarté du processus puisque, dès que des sanctions
sont envisagées contre les organisateurs de la réunion ou de la
manifestation, il est seul autorisé à les prononcer.387(*) Enfin, et plus
généralement, avec le Code pénal de 1870 et la loi sur les
réunions de 1880 c'est un vent libéral, à la suite de
l'élan imprimé par la Constitution de 1869, qui souffle sur des
libertés jusque-là particulièrement malmenées, une
« oasis au milieu des dispositions qui asphyxiaient les libertés
publiques au XIXème siècle ».388(*) Cet état d'esprit
bienveillant à l'égard du droit de réunion et de
manifestation ne sera pas surpassé avant 1978, c'est-à-dire avant
l'entrée en vigueur de l'actuelle Constitution du Royaume d'Espagne.
On peut s'en étonner au regard de la Constitution de
1931, qui institue la seconde République espagnole, dans la mesure
où ce texte exprime une forte réaction à la dictature du
général Miguel Primo de Rivera qui a sévi de 1923 à
1930 avec la complicité du Roi Alphonse XIII.389(*) L'esprit libéral qui
a présidé à l'élaboration de ce nouveau texte
constitutionnel laissait donc à penser que les libertés publiques
allaient, à l'image de la France qui fait alors figure de modèle,
connaître leur âge d'or. D'ailleurs, pour ce qui est de la
liberté de réunion, l'espoir est d'autant plus fort que l'article
38 lui ménage une place propre, indépendante par rapport aux
libertés classiques comme la liberté d'expression ; cela exprime
le caractère nouveau donné à cette liberté, plus
seulement conçue comme une liberté individuelle mais
également comme une liberté sociale, par laquelle chaque individu
peut être et se montrer comme manifestation de la réalité
sociale et comme figure de la société390(*). Pourtant, l'espoir fait
long feu car le régime n'arrive pas à faire face à la
désagrégation du système politique espagnol, aux
problèmes sociaux et à la question religieuse. À
l'inverse, particulièrement après l'arrivée au pouvoir du
Front populaire en 1936, il se confronte à des coups d'État et
bientôt à la guerre civile391(*). Autant dire que, quelles qu'aient été
les bonnes intentions des constituants en faveur d'une démocratie
libérale, les conditions n'étaient en réalité pas
réunies pour pouvoir assurer un développement favorable des
libertés. Le régime de la liberté de réunion reste
ainsi, sur le principe tout au moins, à quelque chose près le
même que sous l'empire des lois de 1870 et de 1880.392(*)
La situation va évidemment fortement évoluer
avec la victoire du franquismeen 1939.393(*) En mal bien sûr, particulièrement
à l'endroit de la liberté de réunion et de manifestation
qui va être, comme toujours dans le cadre d'un régime autoritaire,
l'une des premières cibles du nouveau régime, considérant
que cette liberté présente un potentiel de subversion
avéré à l'encontre du nouvel ordre politique et social. Il
suffit de se référer à la circulaire édictée
par le Sous-secrétaire de l'intérieur du 20 juillet 1939 pour
observer la bascule complète. Dans l'exposé des motifs, on peut
lire qu'en vertu des principes hiérarchiques du régime, la
liberté de réunion est soumise à la Haute direction
politique de l'État, ce qui, en d'autres termes, laisse imaginer
l'état particulièrement précaire auquel va être
réduite cette liberté. Concrètement, la circulaire ordonne
que toutes les réunions et manifestations, sans exception, fassent
l'objet d'une autorisation préalable par l'autorité
gouvernementale. De plus, les autorités administratives disposent
elles-mêmes, et non plus le juge, de la possibilité de sanctionner
les organisateurs de manifestation récalcitrants394(*). La motivation des refus
révèle à elle seule, si besoin en était, le
caractère liberticide du régime à l'endroit du droit de
réunion puisque, selon les consignes rappelées par la loi d'ordre
public de 19598, son exercice ne sera autorisé qu'à partir du
moment où les fins qu'il poursuit sont les mêmes que celles
défendues par l'idéologie et les valeurs du régime
franquiste. Cet épisode sombre pour les libertés prendra fin avec
la mort de Franco en 1975 et la restauration du régime
démocratique, donnant lieu à l'adoption de la Constitution de
1978. La période, agitée, qui sépare la Constitution de
1869 et la Constitution de 1978, livre beaucoup d'enseignements sur la
conception que l'ordre juridique espagnol se fait aujourd'hui de cette
liberté composite.
§2. Les acquis
consolidés en droit positif
Avant toute chose, relevons que la consécration
constitutionnelle de la liberté de réunion et de manifestation ne
se suffit pas à elle seule, dans la mesure où les dispositions
constitutionnelles restent concises et générales ; en
particulier, aucune définition de la liberté de réunion
n'est donnée. De sorte que cette liberté apparaît comme un
concept englobant, qui recouvre tout à la fois le droit de se
réunir dans un endroit de manière statique et le droit de
manifester, qui suppose également une réunion d'individus mais de
manière mouvante. Surtout, le manque de précisions appelle des
lois de mise en oeuvre, afin de préciser l'objet de la liberté et
ses modalités d'exercice. La loi de 1880 est, à cet égard,
exemplaire et servira sans doute de modèle lointain au
législateur contemporain.
La Constitution espagnole de 1931, quant à elle,
prévoyait expressément une loi spéciale de
régulation du droit de réunion à l'air libre395(*) mais, pour les raisons
rappelées, celle-ci n'a jamais vu le jour. La Constitution de 1978
n'innove donc pas en invitant, sans le dire, le législateur à
intervenir. Une loi organique de 1983 sur le droit de réunion a ainsi
été adoptée pour développer les préceptes
constitutionnels. Comme elle l'indique dès son premier article, «
le droit de réunion pacifique et sans armes, reconnu à l'article
21 de la Constitution, s'exercera conformément aux dispositions de la
présente loi organique »396(*). À la Constitution les grands principes,
à la loi organique les conditions précises d'exercice ou, comme a
pu le dire le Tribunal suprême espagnol, « le contenu propre du
droit de réunion »397(*).
Au regard de l'histoire constitutionnelle espagnole, trois
régimes principaux de restriction à la liberté de
manifestation sont concevables, classés en fonction du degré
d'atteinte à la liberté. De ce point de vue, tout d'abord, le
régime le plus attentatoire est celui de l'autorisation
préalable, c'est-à-dire celui en vertu duquel pour manifester ou
se réunir, il faut y être autorisé par l'administration.
Par nature, contraire à l'idée même de liberté,
puisqu'on est libre seulement si on est autorisé à l'être,
ce régime peut s'aggraver en fonction de son champ d'application,
autrement dit en fonction des types de réunions qui en sont
frappées, s'aggraver aussi s'il n'existe par ailleurs aucun
contrôle juridictionnel de la décision de l'administration
refusant l'autorisation. Sous Franco, toutes les réunions publiques ou
les manifestations devaient être autorisées et il n'y avait pas
d'intervention possible d'un juge398(*). Le pouvoir discrétionnaire de
l'administration était par conséquent préalable et sans
limites si bien que la liberté de réunion n'existait pas en
réalité399(*). Le pouvoir était plus que
discrétionnaire, il était arbitraire. Ensuite, le régime
dit de déclaration préalable - en Espagne, l'expression est celle
de « communication préalable » - est celui posé par la
loi de 1880 à propos des réunions publiques400(*).
La structure complexe de la liberté de manifestation
apparaît d'un triple point de vue, en ce qu'il s'agit d'un droit
instrumental, de caractère politique, à la fois individuel mais
aussi collectif et social. En outre, elle suppose, pour être
identifiée, la réunion de trois éléments, temporel,
finaliste et objectif. Quant à son caractère instrumental,
relevons tout d'abord que la liberté de réunion et de
manifestation produit des effets par lui-même en ce que sa vocation
première est de permettre à un groupe d'individus de se
réunir ou de manifester, autrement dit de se réunir de
manière mouvante. Mais, à s'en tenir à cette conception
étroite, on passe à côté de ce qui fait l'âme
de la liberté de réunion et de manifestation, c'est-à-dire
l'instrument, le support, le vecteur offrant un terrain d'épanouissement
à d'autres libertés. La réunion ou la manifestation sont
en effet des canaux d'extériorisation, au premier chef de la
liberté d'opinion et d'expression, mais au second plan d'autres droits
fondamentaux, tels que les droits politiques ou la liberté syndicale.
Ainsi que l'a souligné le Tribunal suprême, le droit de
réunion se révèle être « un instrument de la
liberté d'expression », « une technique qui a comme
finalité d'exprimer des idées, d'extérioriser des
problèmes et de défendre des intérêts
»401(*). Ce droit
figure ainsi, dans une large mesure, le « point de rencontre des
libertés individuelles»402(*).
Ce droit403(*) présente, ensuite et au surplus, un
caractère politique, qui souligne son instrumentalisation. De ce point
de vue, cette dernière est d'autant plus marquée que la
liberté de réunion et de manifestation opère plus
particulièrement dans le champ politique. Elle permet l'expression
politique et dans une certaine mesure la participation politique en offrant aux
individus la possibilité de manifester une idée, une opinion, qui
prendra souvent la forme d'une revendication ou d'une contestation à
l'endroit du pouvoir politique. C'est pourquoi, comme a pu le préciser
le Tribunal constitutionnel, « la reconnaissance du droit de
réunion par la Constitution 1978 manifeste la volonté de
consacrer un élément déterminant de l'État
démocratique et de l'État de droit »404(*). Reconnaître le droit
de réunion et de manifestation, c'est reconnaître un pilier
indispensable au système démocratique qui impose la
liberté d'expression et la liberté des supports d'expression.
À travers l'échange d'idées et d'opinions qu'il offre, le
droit de réunion permet à l'ensemble social d'exprimer une
position ou une revendication et, par conséquent, d'influencer la prise
de décision par le pouvoir politique.
Enfin, le droit de réunion comporte une double face :
« c'est un droit individuel quant à ses titulaires et un droit
collectif quant à son exercice »405(*). C'est, en effet, en premier lieu, une
liberté d'ordre individuel, reconnue comme droit subjectif de la
personne, et un droit qui est donc opposable. Le titulaire du droit est, prima
facie, la personne, entendue concrètement, qui dispose d'un
droit-liberté aussi classique que précieux dans une
société démocratique. Cependant, dans son exercice, le
droit est aussi, en second lieu, une liberté d'ordre collectif puisque,
évidemment, on ne peut se réunir ou manifester seul. Il importe
qu'il y ait un minimum de participants à l'acte de réunion ou de
manifestation. Le nombre minimum de participants a, d'ailleurs,
été fixé à 20 personnes par la loi organique de
1983406(*), sans que le
Tribunal constitutionnel ne trouve à y redire. Et parce que la
liberté de réunion ou de manifestation permet une expression
collective, elle revêt aussi un caractère social, fortement
souligné à l'occasion de l'instauration de la Seconde
République en 1931407(*).
Perçue de nouveau sous son angle instrumental, la
réunion ou la manifestation joue une fonction sociale en étant
support d'une opinion ou d'une revendication partagée et
renforcée grâce à l'expression collective, en structurant
aussi le mouvement collectif, apparaissant comme un marqueur social
particulièrement visible. Sous cet angle, s'éclaire à
nouveau la méfiance naturelle du pouvoir politique à
l'égard de la liberté de réunion, qui sera d'autant plus
forte que le régime sera autoritaire. Expression collective et
revendicative, la réunion, et plus encore la manifestation,
représente une arme potentiellement déstabilisante pour le
pouvoir en place. Beaucoup de dirigeants ont reculé face au pouvoir de
la rue, et la frontière entre l'expression collective pacifique et
l'expression collective belliqueuse peut s'avérer poreuse ; les
souvenirs d'une manifestation se transformant en émeute, voire en
insurrection, alimentent cette crainte. Dans les régimes autoritaires,
la suspicion permanente, le contrôle rapproché et la censure
systématique deviennent le mode de fonctionnement ordinaire pour
éviter qu'un mouvement collectif contestataire ne mette en cause le
régime et ses dignitaires.
§3.
La conception espagnole de la liberté de manifestation
Outre son
caractère tout à la fois individuel, collectif et social, le
droit de réunion se compose de trois éléments principaux,
temporels, finalistes et objectifs.408(*) L'élément temporel, en premier lieu,
découle du fait que le regroupement de personnes doit avoir un
caractère temporel, transitoire à la différence du droit
d'association. Autrement dit, la réunion ou la manifestation implique un
regroupement momentané de personnes qui poursuivent une même
finalité409(*).
À cet égard, l'élément finaliste, en
deuxième lieu, ressort de ce que la réunion ou la manifestation
présente comme objectif essentiel la défense
d'intérêts, l'exposition et l'échange d'opinions et
d'idées, et/ou une expression contestataire. Elles ne sont pas une
simple agglomération spontanée de personnes. Elles supposent une
fin et une proposition qui, pour ce qui concerne les réunions publiques
en tout cas, se formaliseront à travers une demande d'autorisation ou de
communication préalable, la réunion ou la manifestation devant
avoir en particulier un caractère licite. L'élément
objectif, en troisième et dernier lieu, fait référence au
lieu de célébration qui est déterminant pour identifier le
type de réunion et le régime applicable.
En définitive, s'agissant de la configuration du droit
de réunion, le Tribunal constitutionnel en a donné la
définition suivante, synthétisant sa structure complexe.
« Le droit ou la liberté de réunion a été
reconnu par ce Tribunal comme une manifestation collective de la liberté
d'expression réalisée à travers une association temporaire
(transitoria), de personnes qui opère de manière instrumentale au
service de l'échange et de l'exposition des idées, de la
défense des intérêts ou de l'expression de problèmes
et de revendications, dont les éléments constitutifs sont [les
éléments] subjectif (regroupement de personnes), temporel
(durée), finaliste (licéité) et réel (lieu de
célébration) ».410(*)
Cette affirmation expose le flanc à la critique :
l'on doit s'interdire de rabattre purement et simplement la liberté de
manifestation sur la liberté d'expression combinée à la
liberté de réunion. En effet, tout manifestant sait bien que s'il
« descend dans la rue », ce n'est pas pour exposer ses
idées, ni pour en débattre avec d'autres. Il n'entend pas
discourir, mais agir. Il ne cherche pas à convaincre, mais à
peser. On manifeste pour obtenir la démission d'un gouvernement, le
retrait d'un projet de loi, la prise en compte de valeurs ou
d'intérêts négligés, c'est-à-dire pour amener
les représentants du peuple (ou d'autres types de dirigeants) à
changer le cours de leur action (il en est par exemple des
indépendantistes catalans). La manifestation étant moins
l'expression d'une opinion que celle d'une volonté, ce qui compte n'est
pas ce que disent les manifestants, mais ce que dit leur simple présence
dans la rue : « notre présence collective prouve que nous avons la
faculté de nous exprimer, même si tout ce que nous disons, c'est
que nous existons ».411(*)
A côté de ces précisions apportées
par la jurisprudence, observons que l'article 21 de la Constitution espagnole
ne définit pas ce qu'il faut entendre par réunion, à une
exception importante près. Le droit de se réunir est reconnu de
manière générale, sauf s'il s'agit de réunions non
pacifiques et avec armes. Cette limitation est classique puisqu'elle se
retrouve dans la Constitution de 1931, qui elle-même faisait écho
à la loi de 1880, laquelle admettait seulement les réunions
pacifiques. Aussi, convient-il avant toute chose d'opérer une summa
divisio, tenant au champ d'application du droit, entre les réunions
licites et les réunions illicites. Pour l'essentiel, ces
dernières, qui sont traitées par les lois pénales,
ressortent des réunions non pacifiques ou avec armes et ne disposent pas
de la couverture constitutionnelle. Elles sont, par conséquent, hors
champ de protection constitutionnelle et il restera, ce qui n'est pas une mince
affaire, à définir ce que l'on entend par réunions non
pacifiques et avec armes, tâche qui revient à la loi pénale
et à la jurisprudence412(*).
Au-delà, il importe d'établir une distinction
entre les réunions qui ne sont soumises à aucune contrainte
particulière et celles qui se voient appliquer un régime
spécifique organisé par la loi organique de 1983 sur la base de
l'article 21 de la Constitution. Les premières réunions sont
celles qu'on pourra, de manière générale, qualifier de
privées. Elles sont entièrement libres et peuvent
évidemment se revendiquer directement de la protection de l'article 21
de la Constitution. Il s'agit, pour l'essentiel, des réunions : au
domicile des personnes concernées ; organisées pour des raisons
familiales ou amicales ; organisées par les partis politiques, les
syndicats, les entreprises et les autres entités de ce genre
(associations, corporations, fondations, etc.).
Le second type de réunions concerne celles qui sont
soumises au régime spécifique prévu par la Constitution
(alinéa 2 de l'article 21) et détaillé dans la loi
organique de 1983. Il s'agit de réunions se tenant dans des lieux
publics identifiés, la Constitution espagnole utilisant l'expression
« lieux publics de circulation et de manifestation »,
c'est-à-dire pour l'essentiel le « foro público »,
représentant « le domaine public partagé pour l'exercice des
libertés publiques »413(*). Par ailleurs, on aura remarqué que le droit
de manifester n'est pas distingué du droit de réunion. La
manifestation figure, par conséquent, l'une des formes d'exercice du
droit de réunion visé par le texte constitutionnel. C'est
seulement au niveau de la loi organique que sont mentionnées
distinctement « les réunions et les manifestations ». Mais le
régime est en définitive le même.
Dans une telle hypothèse, les organisateurs doivent
déclarer préalablement la manifestation auprès de
l'administration et ce n'est qu'après déclaration que
l'administration peut intervenir. Encore que, on l'a vu, la loi de 1880 variait
les plaisirs puisque certaines réunions publiques, en particulier les
manifestations, étaient soumises à une autorisation
préalable. Le régime peut donc être mixte et relever de
divers mécanismes. À cela s'ajoute la possible intervention du
juge pour contrôler le bien-fondé du refus ou de l'interdiction
prononcée par l'administration. Enfin, le régime le plus
libéral est le régime répressif ou judiciaire ; dans ce
cas, la faculté d'interdire une réunion ou une manifestation ne
relève que de la compétence du juge, soit par
l'intermédiaire de l'administration à qui la réunion ou la
manifestation a été préalablement déclarée,
soit à travers une action exclusivement répressive en ce sens que
le juge réprimera a posteriori les infractions commises à
l'occasion de la réunion ou de la manifestation. Si l'intervention du
juge a bien été imaginée ou consacrée dans les
périodes libérales de l'histoire constitutionnelle espagnole, il
semble n'avoir jamais été question de tout transférer
entre les mains de celui-ci seul, a fortiori de manière exclusivement
répressive.414(*)
A cet égard et sans surprise, le choix du Constituant
de 1978 a été d'opter pour un régime respectueux de la
liberté de réunion en disposant, dès l'alinéa
premier de l'article 21, que : « L'exercice de ce droit ne
nécessitera pas d'autorisation préalable ». La
réunion et la manifestation sont donc en principe libres. Toutefois,
quelle que soit l'importance que le Tribunal constitutionnel accorde à
la liberté de réunion et de manifestation, il a bien
insisté sur le fait que cette liberté, comme la grande
majorité des libertés, n'était pas absolue et qu'elle
pouvait par conséquent connaître des limites. À ce propos,
observons que deux niveaux de limitation peuvent être distingués.
Il y a, d'une part, on l'a évoqué, les réunions et
manifestations qui sont par principe interdites parce qu'elles sont
jugées illicites.
Ce point renvoie directement à l'identification
constitutionnelle des réunions licites de manière
générale, à savoir les réunions pacifiques et sans
armes. Toutes les réunions non pacifiques et/ou avec armes sont
prohibées et il appartient au législateur pénal d'en
établir la liste. A vrai dire, le champ de l'illicéité
paraît plus entendu puisque la loi de 1983 de régulation du droit
de réunion indique, dans son article 1-3, que : « Les
réunions illicites sont celles qui sont qualifiées comme telles
par les lois pénales », ce qui, au-delà de la
problématique des réunions non pacifiques ou armées,
laisse indiscutablement une marge de manoeuvre au législateur. Il
reviendra au juge constitutionnel de veiller à ce que le seuil de
l'illicéité ne soit pas trop attentatoire à la
liberté de réunion et de manifestation.415(*)
Il y a, d'autre part, selon l'alinéa 2 de l'article 21
de la Constitution, le cas des réunions sur les lieux de circulation
publique et de manifestations pour lesquelles il est demandé une
communication préalable à l'autorité administrative, qui
pourra les prohiber seulement quand il existe « des raisons
sérieuses et fondées d'altération de l'ordre public, avec
un danger pour les personnes ou pour les biens ».416(*)
La loi organique de 1983 se charge de préciser ce
régime de déclaration. En particulier, son article 8 dispose que
: « La célébration des réunions dans les lieux de
circulation publique et de manifestations devra être communiquée
par écrit à l'autorité gouvernementale compétente
par les organisateurs ou les promoteurs417(*), dans un délai de dix jours ouvrables minimum
et de trente jours maximum ». Ce régime général est
complété d'un régime particulier au titre duquel, toujours
selon l'article 8 de la loi organique : « Quand existent des motifs
extraordinaires et graves qui justifient l'urgence de la convocation et de la
célébration de réunions dans des lieux de circulation
publique et de manifestations, la communication (...) pourra se faire dans un
délai minimum de vingt-quatre heures ».418(*)
L'article 10 de la loi organique s'intéresse, quant
à lui, au fond du problème puisqu'il énonce les conditions
dans lesquelles l'autorité administrative peut s'opposer à la
réunion ou la manifestation. Il dispose ainsi que « si
l'autorité (gouvernementale) estime qu'il existe des raisons
sérieuses qu'une altération de l'ordre public puisse se produire,
avec un danger pour les personnes ou pour les biens, elle pourra interdire la
réunion ou la manifestation ou, le cas échéant, proposer
la modification de la date, du lieu, de la durée ou de
l'itinéraire de la réunion ou de la manifestation. La
décision devra être motivée, et notifiée dans le
délai maximum de soixante-douze heures suivant la communication
(préalable) ». Enfin, l'article 11 de la loi organique
prévoit qu'en cas de décision défavorable, les
organisateurs pourront « exercer un recours contentieux
(administratif) devant le Tribunal compétent, dans le délai de
quarante-huit heures ».
D'autre part et surtout, la déclaration
préalable donne la possibilité aux autorités
administratives d'évaluer l'atteinte et la dangerosité que la
réunion ou la manifestation emporte à l'encontre des droits et
libertés des tiers en présence (liberté de circulation,
liberté de conscience, sécurité des personnes et des
biens, etc.). C'est à cette seule condition qu'il sera possible pour la
puissance publique de soumettre la mise en oeuvre effective du droit
fondamental en cause à des modifications ou à des
aménagements, pouvant aller jusqu'à l'interdiction pure et
simple419(*).
Effectivement, comme tout droit fondamental, la liberté
de manifestation peut faire l'objet de limitations. Au titre de ces
dernières, l'interdiction figure expressément à
l'alinéa 2 de l'article 21. Cette dernière ne peut intervenir
qu'en cas de risque d'altération de l'ordre public mettant en danger des
personnes ou des biens, mais aussi, plus généralement,
lorsqu'apparaît la nécessité d'« éviter qu'un
exercice sans limites de ce droit ne porte atteinte à d'autres valeurs
constitutionnelles, ce qui se déduit de l'article 10, alinéa 1,
de la Constitution »420(*). Ainsi, le juge constitutionnel espagnol a-t-il
indiqué que « dans les hypothèses où il existe des
raisons fondées permettant de penser que les limites
précitées ne vont pas être respectées,
l'autorité compétente peut exiger que le rassemblement ait lieu
tout en respectant lesdites limites constitutionnelles ou même, s'il
n'existe aucun autre moyen de s'assurer de leur respect, en
l'interdisant ». La référence aux « raisons
fondées permettant de penser » renvoie alors un
impératif de motivation effective et précise de sa
décision par l'autorité administrative421(*).
C'est presqu'une évidence en démocratie mais,
explicitant son raisonnement, le juge constitutionnel espagnol a pris soin de
rappeler, pour expliquer cette conception, que « le contenu des
idées liées aux revendications », que les manifestants
entendent exprimer ou défendre par le biais de l'exercice de la
liberté de manifestation, ne peut faire l'objet de « contrôle
d'opportunité » ou d'un « contrôle politique. Puisque
dans une société démocratique, l'espace urbain n'est pas
seulement un lieu de circulation mais qu'il est aussi une sphère de
participation des habitants à la vie publique, il est normal d'y laisser
une place pour l'expression d'opinions.422(*) Dès lors, très concrètement,
pour interdire une manifestation, il faudra, par exemple, démontrer
l'obstruction totale des voies de circulation, interdisant tout accès
à des zones déterminées ou des quartiers de la ville, sans
possibilité d'avoir recours à des routes alternatives,
c'est-à-dire une altération certaine de l'ordre public mettant en
danger les personnes ou les biens, les services essentiels de
sécurité ne pouvant alors être assurés.
Le juge constitutionnel espagnol est, d'ailleurs, allé
jusqu'à indiquer, de manière assez précise, que des
difficultés de circulation ne pourront justifier une restriction de la
liberté de manifestation lorsque des mesures préventives
s'avèrent impossibles à adopter ou sont impuissantes à
atteindre le but fixé - par exemple, parce qu'elles ne permettent pas
l'accès à la zone concernée, ou sont
disproportionnées par exemple, lorsque les itinéraires
alternatifs envisageables supposent des retards ou des détours
irraisonnables ».423(*) Dans le même sens, toujours à propos de
l'interruption du trafic automobile du fait de l'organisation d'une
manifestation, le Tribunal constitutionnel a jugé qu'une telle
« perturbation ne pouvait pas être à elle seule de
nature à justifier une interdiction car elle n'est pas assimilable
à une atteinte à l'ordre public mettant en danger des personnes
ou des biens ».424(*)
Par conséquent, la référence à la
seule perturbation du trafic automobile, sans autre détail,
c'est-à-dire sans référence ni démonstration allant
au-delà de la pure et simple constatation d'une interruption de la
circulation pendant 45 minutes est insuffisante à justifier une atteinte
à la liberté de manifestation, car cette perturbation est, «
en quelque sorte, accessoire ».425(*) Il faut comprendre par là que le Tribunal
constitutionnel interprète le concept de perturbation de l'ordre public,
mettant en danger les personnes ou les biens, à la lumière des
principes de l'État de droit social et démocratique ; ce qui
explique qu'il considère que les valeurs qui fondent et assurent la
cohérence de l'ordre social ne peuvent pas être utilisées
comme paramètre du contrôle opéré par
l'autorité administrative426(*).
Par ailleurs, cette garantie de l'exercice de la
liberté de manifestation doit être assurée conjointement
avec le respect du principe d'égalité, ce qui interdit bien toute
discrimination en fonction du contenu du ou des messages que les promoteurs de
la manifestation entendent transmettre. Et cette conception, certes rigoureuse,
du véritable danger pour l'intégrité des personnes et des
biens, ne verse pas pour autant dans l'excès car elle n'est pas
nécessairement synonyme d'un recours à la violence par celles et
ceux qui participent à la manifestation, dans la mesure où de
telles manifestations ne relèvent pas de l'alinéa 2 de l'article
21, ce dernier ne visant que des rassemblements pacifiques. De ce point de vue,
l'alinéa 2 ne délimite pas le contenu de la liberté de
manifestation mais établit une limite à son exercice et
confère aux pouvoirs publics la faculté de déterminer les
mesures adéquates afin de garantir le bon exercice de la liberté
en cause.
Outre qu'elle devra donc être précisément
motivée427(*),
l'éventuelle décision de l'autorité administrative devra
être proportionnée. Il n'y a là rien de surprenant, la
jurisprudence constitutionnelle espagnole jugeant, de manière
très orthodoxe, que la disproportion entre la fin poursuivie et les
moyens mis en oeuvre pour y parvenir fait l'objet d'un contrôle, y
compris devant le juge constitutionnel, aboutissant à sa censure chaque
fois que ce défaut de proportion implique « un sacrifice excessif
et non nécessaire des droits garantis par la Constitution
»428(*).
En matière de liberté de manifestation, cette
appréciation de la proportionnalité met en oeuvre trois
éléments : tout d'abord, l'adéquation de la mesure
restrictive à l'objectif poursuivi, ensuite la nécessité
de la mesure elle-même, en ce sens qu'il ne devait pas exister d'autre
moyen moins attentatoire à la liberté permettant de parvenir au
même but et, enfin, sa proportionnalité au sens strict,
c'est-à-dire l'appréciation des avantages susceptibles d'en
découler au regard des dommages qu'elle suppose.429(*) C'est ici que,
comparativement à ce qui se produit dans les autres démocraties
continentales, l'application du principe « favor libertatis »
qui suppose de favoriser la liberté de manifester, expliquant la
nécessité d'une motivation sérieuse d'éventuelles
décisions de la puissance publique restreignant les conditions
d'exercice de ce droit.430(*)Il s'ensuit que la communication tardive de la
décision par l'autorité publique aux organisateurs de la
manifestation est susceptible de censure devant le juge ordinaire ;elle
peut également faire l'objet d'un grief soulevé devant la
juridiction constitutionnelle dans le cadre du recours d'Amparo.431(*)
Section
3. L'exercice de la liberté de manifestation au Bénin
Le droit de manifester est un droit fondamental des
citoyens au Bénin. Au-delà de sa protection juridique par les
textes nationaux et internationaux, il est consolidé au Bénin par
sa protection par la constitution. Ainsi, la liberté de manifestation
jouit d'une large protection juridique au Bénin contrairement à
d'autres États comme la France où elle n'est pas reconnue par la
Constitution et c'est la jurisprudence qui s'est contentée de lui donner
un caractère constitutionnel.432(*)
Depuis quelques années, on observe que les
manifestations font l'objet d'un filtrage politique soit pour permettre
à un groupe donné d'exprimer ses opinions et d'empêcher les
groupes dissidents. Les groupes d'opposition au Bénin sont
régulièrement interdits de manifester et on peut se demander s'il
existe des textes juridiques réglementant l'exercice du droit de
manifester au Bénin.433(*) Il en découle que même si la
liberté de manifestation bénéficie d'une reconnaissance au
Bénin (§1), son encadrement est quelque peu dévoyé
par les pratiques politiques (§2).
§1. La reconnaissance de la
liberté de manifester au Bénin
La liberté de manifestation, à l'instar d'autres
libertés, jouit d'une protection juridique en droit béninois.
Cependant, il existe des libertés dont l'exercice pourrait entrer en
collision avec l'exercice d'autres droits. C'est en effet les droits qui
constituent les libertés fondamentales qui appellent ces
difficultés. Il est un fait que la liberté de manifestation
pacifique ne figure pas parmi les droits faisant partie du noyau dur des droits
fondamentaux. Cela induit qu'elle peut être sujette à des
limitations.
Au Bénin, le droit de manifester est un droit
suffisamment reconnu (1) même si sa conciliation paraît
pénible (2) compte tenu des intérêts des tiers et de
l'ordre public.
1. Le cadre juridique de la
reconnaissance de la liberté de manifester
Le droit de manifester est aussi bien garanti par les textes
internationaux reconnus par le Bénin que par les textes nationaux.
Plusieurs textes internationaux ont fait de la liberté de manifestation,
explicitement ou implicitement, un droit que les États doivent
protéger. La plupart de ces textes ont été analysés
ci-haut, ce qui rend superfétatoire leur analyse. Nous mettons cependant
un accent particulier sur une réalité juridique singulière
constatée dans la Constitution béninoise : la
constitutionnalisation des droits et devoirs proclamés et garantis par
la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples adoptée en 1981
par l'Organisation de l'Unité Africaine, et ratifiée par le
Bénin le 20 janvier 1986, lesquels, sur pieds de son article 7, font
partie intégrante de la Constitution et du droit
béninois.434(*)
Deux constats peuvent être réalisés
à partir de cette disposition : premièrement, étant
une réaffirmation d'une idée force du préambule de la
Constitution, cet article de référence fait mesurer le
degré d'attachement du constituant à cet instrument panafricain,
mis en annexe à la Constitution, dont il fait partie intégrante
et ses dispositions constituent des normes supérieures à la loi
interne et ce aussi conformément à l'article 147 de la
Constitution. La diffusion et l'enseignement de cette Charte sont prescrits par
l'article 40 de la Constitution. En second lieu, nombre de décisions de
la Cour constitutionnelle435(*) se réfèrent non seulement à
l'article commenté, mais aussi directement à des dispositions de
la Charte.
Au niveau interne, c'est l'article 25 de la Constitution
béninoise qui consacre la liberté de manifestation en ces
termes : « L'État reconnaît et garantit, dans les
conditions fixées par la loi, la liberté d'aller et venir, la
liberté d'association, de réunion, de cortège et de
manifestation ». De cette consécration constitutionnelle on
peut relever les observations suivantes : différemment de la RDC
où un article entier de la Constitution du 18 février 2006 est
consacré à la liberté de manifestation, celle-ci fait
l'objet d'une consécration vague à côté d'autres
droits et de manière laconique ; comme le constituant congolais, le
constituant béninois habilite le législateur à fixer les
conditions d'exercice de la liberté de manifestation.
La lecture combinée et croisée de ces deux
dispositions fait ainsi de ce domaine une réserve de compétence
législative. Le juge constitutionnel béninois a affirmé
avec force cette idée en précisant par exemple que « la
liberté d'association, de réunion, de cortège et de
manifestation est constitutionnellement garantie et que la loi peut en
règlementer l'exercice, voire la limiter.
En revanche, elle ne saurait en aucun cas la supprimer ou
l'annihiler, fût-ce même temporairement [...] que le
pouvoir exécutif ou règlementaire ne peut donc s'immiscer dans ce
domaine, si ce n'est seulement pour préciser les modalités
d'application de la loi »436(*). Ainsi, les raisons possibles de limitation doivent
se fonder sur un intérêt public légitime et les
inconvénients de la limitation doivent être strictement
proportionnels et absolument nécessaires pour les avantages à
obtenir. Ce qui est plus important, une limitation ne doit jamais
entraîner comme conséquence le fait de rendre le droit
lui-même illusoire.
2. L'exercice de la
compétence législative au Bénin
Le législateur béninois a ainsi la charge de
tracer le cadre juridique de la liberté de manifestation
conformément à l'injonction de la Constitution et de la Charte
africaine des droits de l'homme et des peuples ; mais c'est la
référence au décret-loi de 1935 qui est observée au
Bénin. Ce décret-loi français du 23 octobre 1935
s'appliquait au Bénin pendant la période coloniale, et, comme
dans d'autres pays colonisés, continue à s'appliquer au
Bénin indépendant.
Comme expliqué plus haut concernant la France, ce
décret place les manifestations plus sous le signe de l'ordre public que
d'un droit fondamental. Et puisque c'est surtout le recours à la voie
publique qui fait la spécificité de la manifestation, sa
régulation fait ainsi appel aux autorités communales. Ainsi, la
loi n° 97-029 du 15 janvier 1999 portant organisation des communes en
République du Bénin réglemente l'exercice de la
liberté de manifestation au Bénin par le rôle qu'il assigne
aux autorités communales. Son article 76 dispose que « Le Maire est
chargé de la police administrative dans la commune. Il sollicite pour ce
faire, le concours des services compétents de l'État. Les actes
de police du Maire ont pour objet d'assurer l'ordre, la tranquillité, la
sûreté et la salubrité publique. Ils comportent: 1- Tout ce
qui intéresse la sureté et la commodité de passage dans
les rues, places, quais et voies publiques; 2- Le maintien d'ordre dans les
endroits où il se fait de grands rassemblements tels que les foires,
marchés, réjouissances et cérémonies publiques,
spectacles, jeux, lieux de culte et autres lieux publics »437(*).
Dans le même sens, on peut faire référence
au Décret 2005-377 du 23 juin 2005 portant réglementation du
maintien de l'ordre qui prévoit que « le maintien de l'ordre a pour
objet de prévenir les atteintes à l'ordre public et de prendre
les mesures propres à le rétablir ». Ce Décret
participe aussi à la réglementation du droit de manifester. En
effet, c'est pour empêcher les dérives et surtout les troubles
à l'ordre, que le Décret de 2005 peut être examiné
comme organisant l'exercice du droit de manifester au Bénin438(*). Le maintien de l'ordre
appellerait ainsi à la réglementation de la manifestation. Il
existe donc un encadrement juridique de la manifestation par ces deux textes
qui protègent l'ordre public.
En même temps qu'il faut protéger le droit de
manifester, il importe de préserver le droit des autres personnes qui ne
participent pas à la manifestation et partant, l'ordre public, ce qui
est souvent difficile à concilier. Sous prétexte de garantir
l'ordre public et l'intérêt général, les
autorités béninoises exercent un pouvoir discrétionnaire
anticonstitutionnel. Dans sa volonté de moderniser sa législation
pénale, le législateur béninois a introduit une
restriction abusive de la liberté de réunion et de manifestation
en prévision des troubles qui découleraient de la publication des
résultats des élections législatives contestées par
l'opposition politique.
La Cour constitutionnelle du Bénin n'a jamais
défini ce qu'elle entendait par ordre public mais, à la lecture
de ses décisions439(*), il est facile de comprendre ce à quoi elle
fait référence. Cependant, le Décret 2005-377 du 23 juin
2005 portant réglementation du maintien de l'ordre au Bénin donne
une définition de l'ordre public par son objet. En effet, le maintien de
l'ordre public consisterait à «assurer la sécurité,
la tranquillité et la salubrité publique ». Ainsi, le
maintien de l'ordre public a pour objet « de prévenir les atteintes
à l'ordre public et de prendre les mesures propres à le
rétablir lorsqu'il est troublé ».440(*) Aussi, lorsqu'on se
réfère à la loi n° 97-029 du 15 janvier 1999 portant
organisation des communes en République du Bénin on peut noter
une définition de l'ordre public par son contenu.
Ainsi, « le Maire est chargé de la police
administrative dans la commune. Il sollicite pour ce faire, le concours des
services compétents de l'État. Les actes de police du Maire ont
pour objet d'assurer l'ordre, la tranquillité, la sûreté et
la salubrité publics ». Ils comportent : 1- Tout ce qui
intéresse la sureté et la commodité de passage dans les
rues, places, quais et voies publiques ; 2- Le maintien d'ordre dans les
endroits où il se fait de grands rassemblements tels que les foires,
marchés, réjouissances et cérémonies publiques,
spectacles, jeux, lieux de culte et autres lieux publics441(*).
§2. Un encadrement
déformé
L'encadrement de la manifestation au Bénin
apparaît orienté vers un choix politique. En effet, afin
d'organiser une manifestation, il est indispensable d'en faire la
déclaration (1) aux autorités compétentes qui peuvent
autoriser ou empêcher la manifestation. La qualité de
l'autorité devant permettre la manifestation n'étant pas sans
incidences sur l'autorisation ou non de la manifestation. On aboutit ainsi
souvent à une autorisation de manifestation strabique (2).
1. Le régime de la
liberté de manifestation au Bénin
Le droit de manifester est une liberté fondamentale.
Néanmoins, l'exercice de ce droit est soumis à un formalisme qui
va jusqu'à son interdiction. Il s'agit en fait d'une simple
déclaration qui s'est transformée en demande d'autorisation dans
la pratique au Bénin. Le traitement sélectif des dossiers
relativement aux autorisations de manifestation, sur base des critères
fondés sur l'appartenance politique (II) est favorisé par
l'ambiguïté de son régime juridique (I).
A. L'ambiguïté du
régime juridique béninois de protection
Comme toute liberté publique, la liberté de
manifestation est définie par trois éléments cumulatifs.
Il y a d'abord sa proclamation par une norme solennelle, ensuite son
aménagement par le droit qui définit les conditions de son
exercice et enfin sa protection par des sanctions juridiques. Chaque
liberté est dotée d'un régime propre d'exercice. On
distingue en effet trois modes d'exercice des libertés.
D'abord, il y a le régime répressif, qui
paradoxalement à son intitulé, permet de laisser se
développer l'activité humaine et n'intervient que pour en
réprimer pénalement les excès. Il est le régime le
plus libéral442(*). Ensuite, il existe le régime
préventif qui soumet l'exercice d'une liberté à une
autorisation préalable donnée par les pouvoirs publics et enfin
le régime de la déclaration préalable qui impose aux
citoyens de faire connaître à l'administration leur intention
d'exercer une liberté. Ce dernier régime est celui qui est
prévu443(*) pour
régir la liberté de manifestation au Bénin.
La manifestation est donc soumise à déclaration
préalable au Bénin. Ainsi, tous cortèges,
défilés et rassemblements de personnes, et, d'une façon
générale, toutes manifestations sur la voie publique, à
l'exception des sorties sur la voie publique conformes aux usages locaux,
doivent faire l'objet d'une déclaration444(*). La déclaration doit
se faire à la Mairie qui couvre le territoire sur lequel la
manifestation doit avoir lieu où bien au préfet La
déclaration doit indiquer les noms, prénoms et domiciles des
organisateurs, le but de la manifestation, le lieu, la date et l'heure du
rassemblement et l'itinéraire projeté, Elle doit être
signée par les organisateurs.
L'autorité administrative se borne à
délivrer immédiatement un récépissé à
ceux-ci. Ce formalisme a deux buts. D'une part, il permet d'informer
l'administration afin qu'elle prenne des mesures adéquates pour le bon
déroulement de la manifestation. D'autre part, la déclaration
préalable permet de situer les responsabilités en cas de trouble
à l'ordre public observé pendant la manifestation.
Pourtant, on constate que l'administration ne se borne pas
simplement à délivrer le récépissé. Car en
effet, cette même autorité administrative est investie du pouvoir
de maintien et de rétablissement de l'ordre public. Dès lors,
elle peut interdire la manifestation si elle estime qu'elle est de nature
à troubler l'ordre public. Ainsi, observe-t-on le danger du
régime de déclaration préalable qui peut entrainer un
glissement insidieux vers un régime d'autorisation. A l'origine,
l'institution du régime de déclaration préalable devrait
permettre la prévention des perturbations possibles des manifestations
afin de garantir la sécurité des manifestants et le bon
déroulement de la manifestation.
Mais, la défense de l'ordre public confiée aux
autorités administratives les autorise à restreindre le droit de
manifester afin de préserver l'ordre public. On observe le glissement du
régime de la déclaration préalable vers le régime
préventif d'autorisation dans lequel l'autorité publique est
appelée à prévenir les troubles à l'ordre public en
autorisant ou en refusant les manifestations compte tenu des troubles
éventuels à l' ordre public.
Cette remise en cause insidieuse du régime de
déclaration est davantage cautionnée par le juge constitutionnel
du Bénin qui a accepté de statuer à plusieurs reprises sur
les cas de limitation de la liberté de manifestation en décidant
dans certains cas que le refus par l'autorité administrative d'exercice
de la liberté de manifestation est conforme à la Constitution du
Bénin445(*). Il
résulte de l'analyse des décisions de la Cour constitutionnelle
que, de la conciliation du droit de manifester, un droit fondamental et de
l'ordre public, ce dernier prévaut446(*). Cependant, il est difficile d'évaluer le
risque de troubles à l'ordre public et dans les faits, on assiste
à un filtrage politique.
B. Une instrumentalisation
politique pour museler l'opposition
La question qui se pose ici est celle de savoir si le
mécanisme de la déclaration préalable, institué par
le Décret-loi de 1935, assortie de la faculté reconnue à
l'autorité de police de prendre immédiatement un
arrêté d'interdiction motivé par la protection de l'ordre
public ne constitue pas une source de déviance politique.
Depuis quelques années au Bénin, on observe la
recrudescence des manifestations. La grève des travailleurs
accompagnée de vive manifestation, les manifestations estudiantines et
les manifestations politiques se décuplent. Toutes ces manifestations
font souvent l'objet de déclaration assortie de la faculté de
refus pour l'autorité administrative. Le régime de
déclaration préalable nové en régime
préventif est susceptible de beaucoup de dérives.
D'abord, l'autorité administrative qui doit
délivrer l'autorisation peut disposer d'une compétence
liée ou d'un pouvoir discrétionnaire. Dans le premier cas,
lorsque la personne qui fait la déclaration de manifester remplit un
certain nombre de critères prédéfinis, il est certain de
jouir de son droit. Ce système lui garantit une certaine
sécurité juridique car le comportement de l'administration est
prévisible. Dans le second cas, 1'administration peut disposer d'un
pouvoir discrétionnaire qui est « le pouvoir de choisir entre deux
décisions ou deux comportements également conformes à la
légalité »447(*). En matière d'autorisation préalable
de la manifestation, le pouvoir discrétionnaire de l'administration
permet à celle-ci d'accorder ou de refuser la manifestation selon des
critères qu'elle définit elle-même. C'est un pouvoir
exorbitant qui lui est conféré. C'est en vertu de ce pouvoir que
les autorités apprécient le trouble à l'ordre public.
Au Bénin, le régime actuellement applicable
à la liberté de manifestation est le régime
préventif. Celui-ci se double du pouvoir discrétionnaire dont
jouit l'autorité administrative. La délivrance de
récépissé transformée en autorisation comporte
ainsi assez d'arbitraires compte tenu de l'influence politique de
l'autorité administrative. En effet, le pouvoir d'appréciation de
l'autorité peut manquer de neutralité et dénoter par
conséquent d'une certaine coloration politique. On se trouve ainsi dans
un régime de filtrage politique de la liberté de manifestation.
Il ressort de tout ceci que même en reconnaissant que la
liberté de réunion et manifestation pacifiques peut être
limitée, il a été défini d'une part, les raisons
exhaustives de justification de cette limitation et d'autre part, les
conditions d'autorisation ou d'encadrement de cette restriction. Ainsi, la
restriction de la liberté de réunion et de manifestation
pacifiques n'est pas absolue.
2. Une protection vicieuse
Les interdictions des manifestations visent parfois
l'orientation vers un choix politique donné. Ainsi, on observe qu'il y a
certaines manifestations qui sont principe au service de la diffusion de la
politique gouvernementale (I) et on assiste à la marginalisation de
l'opposition politique (II).
A. La manifestation au service de
la diffusion d'une politique gouvernementale
Il n'est point aberrant d'affirmer avec le juge K. Mbaye que
« la grande majorité des gouvernements africains n'admettent en
effet, du moins en politique, qu'une opinion : celle du parti au pouvoir et de
son leader448(*).
Cependant, la démocratisation des régimes politiques à
partir des années 1990 a changé ne serait-ce qu'un peu, cette
donne. Les attitudes, comportements ou discours peuvent normalement être
remis en cause à tout moment sans affecter pour autant le fonctionnement
normal des institutions qui ne les intègrent pas. La manifestation est
l'une des méthodes normalement les plus usitées pour faire des
protestations collectives.
Néanmoins, depuis quelques années au
Bénin, on observe le recul des manifestations l'opposition avec le
regain des manifestations dites « de soutien des actions du gouvernement
». Ces manifestations, au lieu de faire des revendications à
l'endroit du pouvoir en place, se bornent à faire les éloges du
gouvernement, ce qui constitue un usage dénaturé de la
manifestation. Pendant que certains groupes d'opposition font la demande d'une
autorisation qui leur est en général refusée449(*), la manifestation de soutien
des actions du gouvernement n'est jamais interdite. Ce fait interpelle à
plus d'un titre. C'est en réalité que la classe dirigeante
n'accepte pas d'opinion dissidente et les manifestations «
normales » sont interdites.
Le Maire, le préfet ou le Ministre de
l'Intérieur sont des autorités politiques et leurs
décisions ne sont pas souvent neutres. Ils peuvent, dans certaines
circonstances, être influencés par une politique donnée. La
manifestation n'est donc plus un outil de revendication au Bénin. De
plus, certains actes de violences policières accompagnant les
manifestations au cours des dernières années ont toutefois
suscité des préoccupations quant à l'attachement du
gouvernement à protéger le droit de manifester pacifiquement au
Bénin. Ainsi, une série d'interdiction de manifestation fait
réfléchir.
B. Le musèlement de
l'opposition
En octobre 2010, le Ministre de l'Intérieur avait
interdit toutes les manifestations exigeant des renseignements sur la
disparition de Pierre Urbain Dangnivo, un fonctionnaire du Ministère des
Finances qui avait disparu en août de la Blême année. Ces
manifestations et protestations ont été motivées par les
soupçons d'une possible implication des autorités
gouvernementales dans cette affaire. Le 21 février 2011, la police avait
lancé des bombes lacrymogènes pour disperser des manifestants de
l'opposition qui protestaient contre des listes électorales
incomplètes pour le scrutin présidentiel du 6 mars. Suite
à l'affichage de la liste électorale provisoire, trois semaines
auparavant, les partis d'opposition s'étaient plaints de l'omission de
près d'un tiers des électeurs admissibles. En visant l'article 43
alinéa 2 de la loi n° 2010-33 du 07 janvier 2011 portant
règles générales pour les élections en
République du Bénin, le Ministre de l'Intérieur et de la
Sécurité publique a, par un communiqué, interdit certaines
manifestations pendant la période électorale. C'est ainsi que les
militants de l'opposition qui ont voulu marcher devant la Cour
constitutionnelle afin de remettre en cause la Liste Electorale Permanente
Informatisée (LEPI) ont été dispersés.
On a également assisté à la bastonnade et
à la mise aux arrêts des députés par les forces
armées pendant les manifestations organisées par les groupes de
l'opposition. Le 21 mars 2011 à Cotonou, la police avait lancé
des bombes lacrymogènes, pour disperser des jeunes qui manifestaient
contre les résultats de la réélection du Président
Boni YAYI.
Tout récemment en 2019, de vives manifestations
ont été organisées pour protester contre l'exclusion des
partis politiques de l'opposition des élections législatives.
L'avènement des dispositions du nouveau Code
pénal pour la restriction de la liberté de réunion et de
manifestation pacifiques n'est pas anodin, ni isolé. En effet,
l'entrée en vigueur du nouveau Code pénal est consécutive
à celle des nouvelles lois électorales qui étaient
déjà vivement critiquées pour avoir posé un terreau
fertile à l'exclusion des partis politiques de l'opposition aux
législatives du 28 avril 2019.
Il s'agit des lois n°2018-23 du 17 septembre 2018 portant
charte des partis politiques en République du Bénin et
n°2018-31 du 09 octobre 2018 portant Code électoral en
République du Bénin. Pour rappel, l'entrée en vigueur du
nouveau Code pénal date du 28 décembre 2018. La suite
consécutive évoquée supra est bien établie ce
faisant.
Avec les restrictions portées aux partis politiques de
l'opposition par les nouvelles lois électorales, il était
prévisible qu'ils n'allaient pas rester passifs et allaient
inéluctablement exprimer leur mécontentement au moyen de
manifestations pacifiques se fondant sur la liberté fondamentale
d'association et de manifestations pacifiques.
Des manifestations organisées le 4 avril 2019 à
l'appel de plusieurs partis de l'opposition béninoise pour protester
contre leur exclusion des élections législatives prévues
à la fin du mois ont été interdites et dispersées
à Cotonou450(*).
Début mars, la Commission électorale nationale autonome (CENA)
avait estimé que seuls deux partis membres de la mouvance proche du
président Patrice Talon avaient rempli les conditions requises par le
nouveau code électoral - adopté l'an dernier et durcissant les
règles qui régissent les partis politiques pour pouvoir
présenter des listes, excluant de facto toute l'opposition.451(*) Dans ce même contexte,
Amnesty International a dénoncé la vague d'arrestations
arbitraires de militants politiques et de journalistes et la répression
des manifestations pacifiques qui, selon son constat, ont atteint un niveau
alarmant au Bénin, à l'approche des élections
parlementaires prévues pour le 28 avril 2019.452(*)
De ces quelques cas d'interdiction des manifestations, on
constate que des opinions qui tentent d'aller à l'encontre du
gouvernement sont fortement réprimées. Le régime ambigu de
la liberté de manifestation est de ce point de vue le socle de toutes
les dérives observées. En somme, la protection de l'ordre public
est le fondement du dévoiement de l'encadrement de la liberté de
manifestation. Cependant, il n'existe pas une définition assez
précise de la notion d'ordre public dont l'appréciation de
l'éventualité de trouble est laissée à
l'appréciation du pouvoir discrétionnaire de l'autorité
administrative.
De toutes les façons, selon les textes applicables
à la liberté de manifestation au Bénin, une manifestation
même interdite peut être organisée. Elle pourra, par la
suite, être dispersée par les forces de l'ordre et les
responsables pourront en répondre devant le juge.453(*) Malheureusement, il n'existe
jusqu'à nos jours, aucune décision du juge administratif sur le
droit de manifester au Bénin. Cette absence du juge administratif dans
ce domaine peut, dans une certaine mesure, être révélatrice
de la conception générale de la justice administrative au
Bénin.
CONCLUSION PARTIELLE
Liberté, comme la démocratie est, un de ces mots
qui chantent plus qu'ils ne parlent et au nom desquels beaucoup de crimes ont
été commis.454(*) C'est un concept à géométrie
variable, au champ sémantique vaste et multidimensionnelle. Dans sa
dimension juridique, elle prend le sens d'une prérogative prise en
charge par ces normes et protégée par des institutions
établies à cet effet, notamment par le protecteur le plus
attitré, le juge. D'où elle se rapproche davantage de la notion
de droit fondamental, mais sans s'y ramener. Nous faisons nôtre le choix
doctrinal de ne pas opérer une distinction entre un droit ou une
liberté.
Certains auteurs ont choisi en effet de ne retenir aucune
distinction entre libertés et droits fondamentaux455(*), droits et libertés
fondamentaux456(*), ou
encore en évoquant un droit des libertés fondamentales457(*). Il ne s'agit pas,
dès maintenant, d'invalider la dichotomie notionnelle entre un droit et
une liberté. Celle-ci existe à l'évidence, quoiqu'elle
soit tout à fait discutée sur le plan du droit positif.458(*) On a
caractérisé cette dichotomie en tenant compte du degré de
latitude laissée aux titulaires de droits fondamentaux.459(*) « Les droits sont des
libertés strictement pré-orientées (ou
prédéterminées).
Leur contenu n'est ni variable ni même négociable
au gré des personnes en relation. Quant aux libertés, elles
« sont des droits largement pré-orientés (ou
prédéterminés), de telle façon que leurs titulaires
possèdent, au sein de cette zone préfixée, une
capacité d'autodétermination »460(*), dans les limites qu'impose
la coexistence des membres du groupe social, lesquelles limites sont
portées par les lois et règlements ainsi que par d'autres
principes reconnus. Ainsi en est-il de la liberté de manifestation qui,
comme d'autres libertés, est censée connaître des
limitations liées à l'ordre public, au respect des droits
d'autrui, etc.
La norme qui porte cette liberté doit cependant
être effective. Cette exigence de l'effectivité requiert que la
norme soit adoptée selon les canons démocratiques qui en assurent
un maximum de légitimité. En outre, la sanction de la norme
constitue un facteur déterminant de son effectivité. Dans ce
contexte, le juge joue un rôle central dans la conquête de
l'effectivité de la norme.
A l'aune de ces conditions, l'évolution de la norme
garantissant les droits fondamentaux, en général et la
liberté de manifestation, en particulier, révèle que cette
liberté n'a toujours pas prospéré en RDC, au regard des
contextes politiques et juridiques qui ont marqué l'histoire du pays.
C'est cette donne qui commande que soit mises à profit les
expériences des autres pays, par la comparaison, pour tenter de combler
les lacunes de notre droit positif.
DEUXIÈME PARTIE :
LA PROTECTION DU DROIT DE
MANIFESTER DANS L'ESPACE PUBLIC : PROSPECTIVES CONGOLAISES
|
Introduction
La consécration ou la production d'un droit fondamental
est une chose, sa protection en est une autre. Nous avons recouru plus haut au
droit international des droits de l'homme pour explorer le contenu de la notion
de « protection d'un droit garanti »461(*).
La protection d'un droit fondamental consiste à la mise
en place des mécanismes normatifs et institutionnels pour mettre ledit
droit fondamental à l'abri des atteintes de tous acteurs, publics ou
privés, internes comme externes. La protection prend ainsi pour cible
tous faits et actes susceptibles d'entraver la pleine jouissance d'un droit
fondamental. Le cauchemar de la liberté de manifestation, c'est de
devoir être protégée par ceux-là mêmes contre
qui cette liberté s'exerce le plus souvent.
La démocratie est un régime qui a pour
substantialité l'exercice de certaines libertés dont la
liberté de manifestation offre l'exemple le plus concret. Pourtant, si
le droit de manifester connait aujourd'hui une très forte
actualité, et ce dans le monde entier, elle doit subir de très
fortes limitations aussi bien dans les pays en transition démocratique
que dans les pays occidentaux longtemps considérés comme exemple
de la démocratie. Cette triste réalité a ainsi
donné lieu à ce qu'on a qualifié de démocratie
d'acquiescement, marquée par l'exclusion de citoyens de la gestion de la
chose publique, une gestion censée lui revenir.
Si l'éclipse des droits fondamentaux en
général et du droit de manifester en particulier peut être
déclarée au regard des pratiques étatiques actuelles, il
n'apparaît pas juste de généraliser une telle affirmation.
Aurélie Duffy suppose qu'il n'apparaît pas justifié
d'affirmer que la liberté de manifestation subit actuellement une
éclipse en droit français462(*). D'une part, si les textes définissent un
régime d'exercice relativement strict, celui-ci ne connait pas un
durcissement au cours de la période contemporaine. Bien au contraire,
précise-t-elle, la pratique sur le long terme se caractérise par
un certain libéralisme, ainsi qu'en témoigne le nombre des
manifestations se déroulant sans avoir été
déclarées463(*). D'autre part, alors que cette liberté ne
bénéficiait auparavant d'aucune protection juridictionnelle
effective, la réforme des référés a permis de
soumettre les restrictions dont elle peut faire l'objet à un
contrôle rapide et efficace du juge administratif. Au regard de cette
évolution, il est possible d'affirmer que l'histoire récente de
la liberté de manifestation est marquée par le progrès et
non la régression.464(*)
La situation française se rapproche-t-elle de la
réalité congolaise sur la liberté de manifestation ?
La réponse à cette question ne peut dériver que de
l'analyse des mécanismes de protection de la liberté de
manifestation prévus par le droit positif congolais (Chapitre IV) pour
évaluer le degré de protection de cette liberté et,
éventuellement le niveau d'écart que pourrait enregistrer la RDC
avec les pays cibles de notre étude.
L'utilité d'un bon diagnostic se révèle
lorsqu'on est en mesure de proposer une thérapie appropriée,
susceptible d'obvier à ces tares qui ne cessent de barbouiller une
démocratie chancelante en République Démocratique du
Congo. De ce point de vue, il faut noter que la liberté de manifestation
souffre cruellement des incohérences du système juridique
l'organisant en RDC (Chapitre V). Les perspectives d'une jouissance effective
de la liberté de manifestation vont ainsi boucler cette seconde partie
et, partant, cette étude (chapitre IV).
CHAPITRE QUATRIEME :
UNE ARCHITECTURE VIRTUELLE
DE PROTECTION DU DROIT DE MANIFESTER APPAREMMENT
COHÉRENTE
|
La seule existence d'un catalogue de droits et
libertés, aussi complet soit-il, ne saurait suffire à assurer
l'exercice des droits reconnus à la personne humaine465(*). Il faut reconnaitre avec
Dimitri Lohrer que ce n'est qu'à partir du moment où les droits
et libertés se trouvent assortis de mécanismes de protection de
nature à garantir leur effectivité qu'ils peuvent se
réaliser.466(*)
Dans le même sens, le professeur Pierre Bon estime que la simple
proclamation de droits et libertés « les laisse à
l'état virtuel 467(*)», c'est-à-dire sans aucune garantie
d'effectivité et donc à l'état platonique
représentant de simples voeux ou chapelets de bonnes intentions sans
aucune volonté de les réaliser. « Pour qu'il s'agisse
de droits réels et effectifs et non pas de droits formels et virtuels,
il faut que la Constitution définisse un certain nombre de règles
juridiques et mette sur pied un certain nombre de mécanismes
destinés à en garantir le respect ».468(*) De ce constat découle
la conclusion selon laquelle « les libertés ne valent en
pratique que ce que valent leurs garanties ».469(*)
La protection de la liberté de manifestation est
confiée à plusieurs institutions de la République. Elle
bénéficie de la protection la plus énergique et la plus
redoutée, celle du juge (section 1), mais elle comporte une dimension
non-juridictionnelle ; le pouvoir législatif, appelé
à légiférer et à contrôler l'action de
l'exécutif, le pouvoir exécutif lui-même ainsi que d'autres
structures publiques et/ou privées sont généralement mise
à contribution dans cette oeuvre de protection (section 2). Toutefois
l'on ne peut ignorer que la mise en jeu de la responsabilité des acteurs
contribue efficacement à la protection du droit de manifester (section
3). Ainsi, il nous paraît impérieux d'analyser leur
effectivité au regard de la liberté de manifestation.
Section
1. Les mécanismes non-juridictionnels de protection de la liberté
de manifester
Si le juge se présente comme le gardien
privilégié des droits fondamentaux, la RDC, le Bénin, la
France et l'Espagne, à l'image de la plupart des systèmes
démocratiques, disposent également de mécanismes
traditionnels de garantie intervenant hors de l'organisation juridictionnelle.
C'est par exemple le cas de la protection politico-parlementaire (§1).
Commune à la France, le Bénin et l'Espagne notamment, cette
protection, de nature politique, est susceptible de contribuer activement
à la sauvegarde des droits fondamentaux. Elle s'inscrit en
complémentarité de l'action du juge et, de ce fait, favorise un
système institutionnel de garantie relativement complet de nature
à alimenter les interrogations, s'agissant de la nécessité
contemporaine d'un ombudsman spécialisé. La RDC n'est pas en
marge de cette évolution. D'autres organismes interviennent
intensément dans cette entreprise de protection. C'est le cas des
organes du pouvoir exécutif de l'État ; il en est de
même de l'ombudsman espagnole ou du Médiateur de la
République français et béninois ou encore de la Commission
Nationale des droits de l'homme congolaise créée par la loi
organique n° 13/011 du 21 mars 2013 portant institution, organisation et
fonctionnement de la Commission Nationale des Droits de l'Homme (§2).
En face de cet arsenal de mécanismes non
juridictionnels de protection de la liberté de manifestation, il
convient d'examiner la part des institutions de sécurité dans la
protection de cette liberté (§3).
§1. La protection politico-parlementaire de la
liberté de manifestation
Outre que le principe
constitutionnel de la réserve de loi érige le législateur
en pièce maîtresse du processus de concrétisation des
droits fondamentaux, le Parlement, non seulement participe activement à
la sanction des atteintes portées aux droits et libertés de
valeur supra législative (1), mais permet de surcroît, un
règlement extrajudiciaire des litiges relatifs aux droits fondamentaux
par l'intermédiaire du droit de pétition (2). Dans les deux
hypothèses, l'intervention du Parlement, de nature essentiellement
politique, s'effectue selon des modalités sensiblement
différentes de celle du juge et, ce faisant, se présente comme
une source de complémentarité potentielle de la garantie
juridictionnelle des droits fondamentaux. A ce sujet, la création par
l'Assemblée Nationale de la RDC d'une Commission Permanente en charge de
la protection des droits fondamentaux participe de cette
nécessité.
1. La
protection par la sanction des atteintes portées aux droits
fondamentaux
La capacité du Parlement à sanctionner les
atteintes portées aux droits fondamentaux, rendue possible par ses
prérogatives de contrôle de l'action gouvernementale et sa
participation à la procédure législative, s'exerce aussi
bien vis-à-vis du pouvoir exécutif (A) que du pouvoir
législatif (B). Dans ces deux hypothèses, le rôle de
l'opposition politique s'avère généralement décisif
car cette dernière, soucieuse d'accéder au pouvoir,
n'hésite pas à dénoncer tout agissement du gouvernement et
de sa majorité parlementaire potentiellement attentatoires aux droits
des individus. L'activité particulière de l'opposition politique
dans la protection des droits fondamentaux en général et de la
liberté de manifestation en particulier se justifie par le fait que la
liberté de manifestation constitue, pour l'opposition politique
congolaise en l'occurrence, le moyen privilégié d'expression de
leur revendication470(*).
A. La protection par la
sanction des politiques gouvernementales liberticides
Dès le XIXe siècle, John Stuart Mill soulignait
: « Le véritable office d'une Assemblée
représentative n'est pas de gouverner, elle y est radicalement impropre
; mais bien de surveiller et de contrôler le gouvernement, de mettre en
lumière tous ses actes, d'en exiger l'exposé et la justification
[...] »471(*). Or,
cette fonction de contrôle de l'action gouvernementale,
expressément prévue par les Constitutions congolaise,
française, espagnole et béninoise472(*), peut avoir une influence
décisive dans la sauvegarde des droits et libertés, notamment de
la liberté de manifestation. Elle permet au Parlement d'évaluer
les politiques publiques entreprises par le pouvoir exécutif afin de
s'assurer que le gouvernement et son administration font une correcte
application des lois de développement des droits fondamentaux et,
surtout, n'y portent pas atteinte. En somme, « une analyse scientifique
visant à [...] contrôler la bonne application des lois, la
rapidité de mise en oeuvre du gouvernement, ainsi que les effets
réels de la nouvelle législation»473(*).
En République Démocratique du Congo, comme en
France et en Espagne, le gouvernement peut demander au parlement l'adoption
d'une déclaration de politique générale.474(*) Celle-ci est un
exposé de grandes orientations du programme de gouvernement, les
principales réformes et mesures qu'il veut mettre en place. Le parlement
a la faculté de rejeter la déclaration de politique
générale (le programme du gouvernement) lorsqu'il comporte des
aspects liberticides et infliger ainsi la sanction suprême au
gouvernement.
Par ailleurs, dans l'hypothèse où une atteinte
aux droits fondamentaux est constatée, le Parlement détient
plusieurs moyens pour y mettre un terme. Le moyen le plus direct est la mise en
jeu de la responsabilité politique du gouvernement par l'adoption d'une
motion de censure. Toutefois, outre que ce mécanisme classique des
régimes parlementaires est quasiment tombé en
désuétude,475(*) sous l'influence notamment du
phénomène majoritaire, le Parlement dispose de mécanismes
incitatifs plus efficaces et plus redoutables.
Le relais médiatique des débats parlementaires,
la publicité des auditions effectuées par les commissions
d'enquête ou, encore, la publication des rapports remis par ces
dernières, sont autant de moyens de pression conduisant
généralement le gouvernement à mettre un terme à
l'atteinte constatée. De surcroît, les techniques parlementaires
d'information et d'investigation participent d'une dynamique de
prévention des atteintes aux droits fondamentaux. Les organes
exécutifs, se sachant surveillés par les parlementaires,
cherchent effectivement à accomplir leurs responsabilités avec la
plus grande diligence476(*). Le contrôle opéré par le
Parlement s'inscrit ici en complémentarité de la garantie
juridictionnelle dont les spécificités rendent la
prévention des atteintes aux droits fondamentaux beaucoup plus
délicate. Cette complémentarité se double d'une
collaboration en matière de sanction des atteintes aux droits
fondamentaux commises par le législateur.
B. La mise en échec
des lois liberticides
Principalement deux moyens s'offrent au Parlement pour
sanctionner une disposition législative portant atteinte aux droits
fondamentaux. Tout d'abord, un moyen direct consistant à faire obstacle,
au cours de la procédure législative, à un projet ou une
proposition de loi considérée comme liberticide. Le Parlement, de
sa propre initiative, rejette ou modifie en intégralité ou
partiellement un texte contraire aux droits fondamentaux. En somme, ce
procès fait au projet ou à la proposition de loi n'attend [...]
pas la saisine du juge constitutionnel. En droit français, ce rejet peut
intervenir à la suite d'une exception d'irrecevabilité
soulevée avant la discussion des articles. Cette motion a pour «
objet [...] de faire reconnaître que le texte est contraire à une
ou plusieurs dispositions constitutionnelles »477(*). Son adoption conduit au
rejet pur et simple du texte, à charge pour le gouvernement de proposer
un nouveau texte ou de l'abandonner478(*). Or, le recours à ce mécanisme a
régulièrement pour finalité de dénoncer une
atteinte aux droits fondamentaux.
Ensuite, un moyen indirect conduisant à saisir la Cour
constitutionnelle d'une loi adoptée par le Parlement malgré
l'existence de doutes quant à sa conformité à la
Constitution. Le Parlement joue alors un rôle d'activation de l'organe de
contrôle de la constitutionnalité des lois, expression d'une
collaboration entre les institutions parlementaire et juridictionnelle dans le
domaine des droits fondamentaux.
En Espagne, la saisine du Tribunal constitutionnel d'un
recours a posteriori est ouverte à cinquante députés ou
cinquante sénateurs,479(*) soit un septième de la chambre basse et un
cinquième environ de la chambre haute. En France, depuis la
révision constitutionnelle du 29 octobre 1974, soixante
députés ou soixante sénateurs480(*) sont habilités
à saisir le Conseil constitutionnel dans le cadre de son contrôle
abstrait a priori de la loi. En RDC, aux mêmes fins d'examen de la
constitutionnalité, les lois peuvent être
déférées à la Cour constitutionnelle, avant leur
promulgation, par (...) le dixième des députés ou des
sénateurs481(*).
Plus souple et plus libéral, le système béninois reconnait
à tout député le droit de saisir la Cour constitutionnelle
en inconstitutionnalité des lois avant leur promulgation482(*). Or, ainsi ouverte à
une minorité qualifiée de parlementaires ou à tout
parlementaire, c'est-à-dire à l'opposition politique, la saisine
de la juridiction constitutionnelle permet au Parlement de participer
activement à la protection des droits fondamentaux contre l'action du
législateur. Elle présente comme un ultime moyen pour les membres
de l'opposition de mettre en échec une loi oppressive.483(*)
2. La
protection par voie de pétition
Parmi les pays étudiés, seules les constitutions
congolaise, française et espagnole484(*) consacrent le droit de pétition. La formule
utilisée par le constituant congolais précise, mais de
manière assez vague les destinataires des pétitions individuelles
ou collectives en ces termes : « tout Congolais a le droit
d'adresser individuellement ou collectivement une pétition à
l'autorité publique qui y répond dans les trois mois ».
En l'absence d'une loi relative au droit de pétition et à
défaut d'une interprétation judiciaire, les contours du concept
« autorité publique » risque de donner libre cours
à multiples interprétations.
Quoiqu'il en soit, parmi ces autorités, l'institution
parlementaire occupe une place privilégiée485(*). En effet, en tant qu'organe
de représentation des citoyens doté de la plus grande
légitimité démocratique, le Parlement se présente
non seulement comme le premier destinataire des pétitions mais, de
surcroît, se révèle en mesure, par l'intermédiaire
des pétitions qui lui sont adressées, de proposer une
résolution extrajudiciaire des litiges opposant une victime d'une
violation de ses droits à une personne publique.486(*) Il s'agit d'« une
procédure plus informelle, plus simple, moins longue et moins
coûteuse [...] parfois préférée à l'action
judiciaire487(*) »
et, de toute évidence, susceptible de s'inscrire en
complémentarité de la garantie juridictionnelle des droits
fondamentaux.
Schématiquement, les pétitions adressées
au Parlement sont dans un premier temps renvoyées devant une commission
parlementaire pour faire l'objet d'une instruction.488(*) Dans un second temps, la
commission, si elle considère la pétition recevable, peut, entre
autres, la soumettre à l'assemblée ou la renvoyer au ministre
responsable du service concerné afin qu'il réponde au
pétitionnaire. Cette dernière option, couramment choisie, peut
conduire le ministre à ordonner une enquête et à adopter
les mesures nécessaires pour mettre un terme à l'atteinte
constatée. Sachant qu'en Espagne, lorsque la pétition est
renvoyée au gouvernement, les chambres peuvent exiger de celui-ci qu'il
s'explique sur son contenu.489(*) En France, si le ministre n'a pas répondu
dans un délai de trois mois à la pétition qui lui a
été renvoyée par la commission, celle-ci peut
décider de soumettre la pétition à la Chambre en
séance publique490(*).
Somme toute, le Parlement, par le biais des pétitions
qui lui sont adressées, est en mesure de proposer une résolution
des litiges relatifs aux droits et libertés selon des modalités
sensiblement différentes de celles du juge. On doit noter que l'exercice
de la liberté de manifestation génère pas mal de
situations des frustrations d'ordre politique surtout lorsque les
répressions empêchent toute action citoyenne.
C'est là le signe d'une certaine
complémentarité de la protection parlementaire en matière
de droits fondamentaux. A une résolution souple et amiable des litiges,
d'un côté, s'oppose, d'un autre côté, une
résolution plus formaliste et contraignante, caractérisée
par le prononcé d'une sanction. Il en résulte un système
de garantie relativement complet ne laissant a priori aucune place pour un
ombudsman spécialisé. L'identification d'autorités
administratives indépendantes sectorielles spécialisées
dans la protection des droits fondamentaux conduit à douter
définitivement de l'opportunité d'une telle institution.
§2. Autres organismes
nationaux de protection des droits fondamentaux
Les droits fondamentaux en général et la
liberté de manifestation en particulier jouissent d'une protection plus
large et pluridimensionnelle incluant même les organes du pouvoir
exécutif, lesquels, par un engagement réel ou simulé,
mobilisent un département ministériel entier à la question
(1). A côté du ministère, il existe une structure
indépendante, la Commission nationale des Droits de l'Homme (2).
1. Le
pouvoir exécutif
Le Président de la république est le Chef de
l'État est Chef de l'exécutif. Il est chargé par le
constituant de veiller au respect de la constitution491(*), en même temps qu'il a
prêté serment de ne se laisser guider que par
l'intérêt général et le respect des droits de la
personne humaine492(*).
Il est dès lors, le premier protecteur des droits humains et des
libertés fondamentales, et, en tant que tel, il dispose d'un droit de
regard vigilant sur toutes les institutions de la République et peut
user de son pouvoir pour les empêcher d'attenter aux droits des citoyens.
En matière de promotion et protection des droits fondamentaux, chaque
ministère est appelé à intégrer dans son action les
politiques favorisant l'exercice des droits fondamentaux. Cependant, il
s'avère important de scruter l'expérience du département
des droits et libertés du citoyen de triste mémoire, avant
d'examiner l'action du ministère des droits humains.
A. Le Département des
droits et libertés du citoyen
Barthélémy Omeonga analyse le Département
des droits et libertés du citoyen de la deuxième
République comme une sorte d'ataraxie d'un système judiciaire
orné d'un parfum d'anxiété493(*). Effectivement, il
s'agit d'une révolution dans le régime de la protection des
droits des administrés, instituant un recours de nature
particulière, un recours politico-administratif dans le but
d'anéantir les décisions judiciaires, précisément
celles de la Cour Suprême de Justice prises en violations de droits
fondamentaux des citoyens.
Le 24 juin 1985, le Chef de l'État, soucieux de
redresser l'image du régime à la suite des contre-performances
enregistrées dans le domaine des droits de l'homme, lance l'idée
de mettre en place un organisme, l'oeil du peuple ayant pour mission
« de recueillir et d'examiner les recours et plaintes de tout citoyen
injustement et irrégulièrement lésé dans ses droits
ou atteint dans ses libertés par l'administration publique ou par
décision de justice ou par toutes les autres voies de fait. Lorsque
toutes les voies de recours légalement autorisées auront
été soit épuisées, soit inefficientes et que
l'injustice dénoncée s'avère
flagrante ».494(*) Ainsi sera créé le département
des droits et des libertés du citoyen par Ordonnance n° 86/268 du
31octobre 1986.
Le texte reconnait à tout citoyen injustement et
irrégulièrement lésé dans ses droits et atteint
dans ses libertés, de saisir le ministère, après
épuisement de toutes les voies de recours légales. Des termes
bien choisis pour non seulement justifier la nature extraordinaire du recours
devant cet organisme, mais aussi l'emprise de son action sur les
décisions administratives et judiciaires.
Quant aux effets attachés à la décision
de cet organisme, précisons qu'il s'agit des arrêtés
départementaux qui rétablissent généralement le
citoyen lésé dans ses droits. En des termes simples, ils
anéantissent les décisions de la CSJ, puisqu'il est facile de
comprendre que l'épuisement des voies de recours légalement
établies dont il est question, vise les arrêts de la plus haute
juridiction de l'État.
Barthélémy Omeonga voit dans cette architecture
une double conséquence : l'anarchie dans l'ordonnancement juridique
en place et l'enfermement du système dans un cercle
vicié495(*).
L'anarchie dans l'ordonnancement juridique résulte de ce pouvoir dont
dispose désormais un recours administratif d'anéantir les
décisions de justice ; il faut préciser que
l'autorité de la chose décidée gagnait la primauté
sur l'autorité de la chose jugée. La conséquence la plus
irréductible consiste en ce que les décisions de la CSJ sont
entreprises et cassées par une décision d'une autorité du
pouvoir central, un arrêté départemental qui, à son
tour, peut faire l'objet d'un recours en annulation devant la même CSJ.
Ainsi, à chaque arrêt de la Cour, le département serait
à mesure de répliquer par un arrêté
départemental qui, à son tour, par la riposte de la Cour,
encourant annulation,496(*) et ainsi de suite.
B. Ministère des
droits humains
Si tous les membres du gouvernement ont, dans le cadre de la
politique générale, une part de responsabilité dans la
protection des droits fondamentaux du citoyen, il reste tout à fait
indiquer que le Ministère des droits humains, comme son nom l'indique, a
reçu, la priorité, partant du décret n° 03/027 du 16
septembre 2003 et de l'ordonnance n°07/018 du 16 mai 2007, jusqu'à
l'Ordonnance n° 17/025 du 10 juillet 2017 fixant les attributions des
ministères. Il est chargé de promouvoir et de garantir aux
citoyens, la protection de leurs droits reconnus par la Constitution et les
lois de la République.
En effet, le dernier texte, soit l'Ordonnance n° 17/025
du 10 juillet 2017 fixant les attributions des ministères, qui est
encore en vigueur au moment de la rédaction de ces lignes, reconnait au
Ministère des droits humains les attributions suivantes : la
promotion et la protection des Droits de l'Homme et des libertés
fondamentales, diffusion et vulgarisation des Droits de l'Homme, le suivi du
respect des Droits de l'Homme, l'examen des cas flagrants de violation des
Droits humains par des mécanismes appropriés tels que la
médiation en matière de Droits de l'Homme et la Commission de
Contrôle sans se substituer aux Cours et tribunaux ni aux
procédures administratives prévues par la loi, la collaboration
avec le Haut-Commissariat aux Droits de l'homme, avec la Commission Africaine
des Droits de l'Homme et des Peuples, et avec d'autres Institutions Nationales,
Régionales et Internationales en matière des Droits de l'Homme,
la défense des intérêts de la République
Démocratique du Congo devant les instances internationales et
régionales des droits de l'homme, notamment le Conseil des Nations Unies
pour les Droits de l'Homme et la Commission Africaine des Droits de l'Homme et
des Peuples, la conception et la diffusion des rapports périodiques
destinés aux comités de surveillance des traités
internationaux et régionaux des droits de l'homme.
Ce texte reconnaît plusieurs attributions dont
l'exercice peut se heurter à des écueils de tous ordres. L'examen
des cas flagrants de violation des Droits humains par des mécanismes
appropriés tels que la médiation en matière de Droits de
l'Homme ne fait pas du ministère des droits humains un médiateur
de la République. Solidarité gouvernementale oblige, l'animateur
de cette institution ne pourra s'opposer ouvertement à un autre membre
du gouvernement qui serait impliqué dans des violations des droits
humains, toutes les résolutions étant discutées en conseil
des ministres. En outre, lorsqu'il s'agit de défendre les
intérêts de la République Démocratique du Congo
devant les instances internationales et régionales des droits de
l'homme, il est impossible d'attendre d'un membre du gouvernement dire autre
chose que l'apologie de son équipe. Il appert clairement qu'il existe
une antinomie entre la défense des intérêts de la RDC (la
défense de son gouvernement) et le suivi du respect des Droits de
l'Homme par ce même gouvernement qui est enclin à les violer. Il
s'agit, comme l'a si bien relevé Barthélémy Omeonga, d'une
structure politique et administrative de l'État qui ne peut
émerger en marge de la politique gouvernementale. Empêché
dans la solidarité gouvernementale, le médiateur de la
République accuse une regrettable faiblesse, celle d'être juge et
partie, accusateur sur le banc des accusés497(*).
Même s'il joue, dans une certaine mesure, le rôle
du médiateur de la République, consistant à amener les
autorités administratives et judiciaires à rétablir les
plaignants dans leurs droits, en aucun cas, l'action du Ministère des
droits humains ne se substituera à celle des cours et tribunaux.
Cette ambiguïté fait que le ministère soit
impuissant de sanctionner les pratiques et actes violeurs des droits de l'homme
dont sont auteurs les différents services de sécurité, la
police et l'armée, plus enclins à privilégier
l'impératif sécuritaire au détriment même des
libertés fondamentales, tombant ainsi dans ce que Jean Rivero appelle
l'humainement incapable ou l'humainement injustifiable.498(*)
2. La
Commission Nationale des Droits de l'Homme
Afin de répondre à la perplexité des
administrés sur les capacités de l'administration à agir
de manière efficace et respectueuse des libertés, la RDC s'est
engagée depuis les années 1990 dans un vaste mouvement de
création d'autorités administratives indépendantes. «
Tel un oxymore juridique »499(*), les autorités administratives
indépendantes présentent la spécificité
d'appartenir à l'appareil administratif étatique tout en
bénéficiant d'une véritable indépendance
vis-à-vis du pouvoir exécutif. Caractérisée par
l'absence de tutelle ou de pouvoir hiérarchique à leur
égard, cette indépendance organique, permettant de mener dans les
secteurs concernés une action soustraite aux influences du pouvoir
politique,500(*) se
trouve renforcée à l'échelle fonctionnelle par
l'adéquation des moyens de chaque autorité à ses missions.
Ces moyens, proches de ceux d'un ombudsman, favorisent une protection des
droits et libertés imprégnée de souplesse, principalement
animée par une volonté de « direction juridique non
autoritaire des conduites »501(*).
La CNDH est la troisième autorité administrative
indépendante après la Commission Electorale Nationale
Indépendante et le Conseil Supérieur de l'Audiovisuel et de la
Communication en droit positif congolais. Elle a succédé à
l'Observatoire Nationale des Droits de l'Homme, issu de la Transition politique
qui a prévalue en République Démocratique du Congo entre
avril 2003. Aux termes de l'article 1 et 3 de la Loi organique adoptée
par l'Assemblée Nationale en septembre 2012, la Commission nationale des
Droits de l'Homme (CNDH) est une institution d'appui à la
démocratie.502(*)
Il est loisible d'analyser la composition et les attributions
de cette institution avant de mettre en lumière les pesanteurs
institutionnelles qui sont de nature à entraver son oeuvre.
A. La
composition
La CNDH est composée de neuf membres,
représentant neuf composantes de la société civile. Parmi
ces dernières, l'on trouve le représentant des organisations non
gouvernementales des droits de l'homme ; le représentant des ordres
professionnels ; le représentant des syndicats ;1e
représentant des universitaires ;1e représentant des
confessions religieuses ;1e représentant des personnes avec
handicap ; le représentant des organisations non gouvernementales
des droits spécifiques de la femme ;1e représentant des
personnes vivant avec le VIH/SIDA désignés par l'Assemblée
Nationale et nommés par une ordonnance du Président de la
République. Il nous faudra revenir sur le portrait de chacun des membres
pour expliquer le dysfonctionnement ou la faiblesse de cette institution qui
d'ailleurs auraient suscité beaucoup d'espoirs.
B. Les
compétences
La commission nationale des droits de l'homme a pour mission
de veiller au respect des droits de l'homme et des mécanismes de
garantie des libertés fondamentales. Elle émet des avis et dresse
des rapports sur toutes les questions de portée générale
relevant de ses prérogatives. Elle formule à l'intention du
gouvernement et de toute autre institution des conseils, propositions et avis
dans les domaines des droits de l'homme, du droit international humanitaire et
de l'action humanitaire.503(*)
En outre, elle est chargée de faire connaitre aux
citoyens leurs droits fondamentaux. Concourir à la promotion de
l'éducation civique et de la culture des droits de l'homme pour une
meilleure conscience citoyenne504(*). Renforcer les capacités d'intervention
des associations de défense des droits de l'homme, veiller à
l'application des normes juridiques nationales et des instruments
régionaux et internationaux relatifs aux droits de
l'homme dûment ratifiés par la RDC505(*). Formuler des
recommandations pour la ratification des instruments juridiques
régionaux et internationaux des droits de l'homme, promouvoir et veiller
à l'harmonisation de la législation, des règlements et des
pratiques nationaux avec les instruments internationaux relatifs aux droits de
l'homme dûment ratifiés par la RDC506(*). De dresser des
rapports sur l'état d'application des normes nationales et des
instruments juridiques internationaux en matière des droits de
l'homme, contribuer à la préparation des rapports que la RDC
présente devant les organisations internationales, en application de ses
obligations conventionnelles dans les domaines des droits de l'homme507(*) ; d'examiner la
législation interne relative aux droits de l'homme et faire des
recommandations pour son ordonnancement législatif508(*).
Contrairement à d'autres organisations et des
institutions de défense et de protection des droits de l'homme qui
disposent d'un pouvoir normatif, la nouvelle commission nationale des droits
de l'homme constitue un organisme technique de nature consultative,
chargé de la promotion et de la protection des droits de l'homme ;
son action s'étend sur les activités des personnes physiques ou
morales tant publiques que privées se trouvant sur le territoire
national ou à l'étranger, victimes, auteurs de violations des
droits de l'homme.509(*)
Ses attributions fixées aux termes de l'article 6 de la
loi font de cette institution d'appui à la démocratie, un
mécanisme citoyen de promotion et de protection des droits de
l'homme510(*) disposant
d'un pouvoir de sanction qu'elle exerce notamment à travers la
publication des rapports mais sans un réel pouvoir de contrainte.
Dans ce cadre, la CNDH publie chaque année un rapport
d'enquête sur la situation des droits de l'homme consécutive
à la situation globale des droits de l'homme. Les manifestations
publiques du 19 et 20 septembre 2016 dans la ville de Kinshasa ont
été mentionnées dans un rapport publié par la CNDH.
La bonne lecture dudit rapport permet d'appréhender la faiblesse de
l'institution, l'implication ou l'influence politique, voire le déficit
de personnalité de ses animateurs. Outre ces problèmes, il faut
noter les difficultés d'ordre financier, comme le décrit
constamment son président, la dotation actuelle en termes de capital
humain, les défis budgétaires représentent les obstacles
majeurs à son efficacité. D'ailleurs, même en
dénonçant les pertes en vies humaines, les cas de
détentions illégales sont restés toujours le moins
alarmant, alors même que la flagrance de faits l'exigerait.
Le caractère quasi-juridictionnel de cette institution
« ressort très clairement des principales attributions que la
loi lui assigne ainsi que de la procédure qu'elle est appelée
à mettre en oeuvre dans la protection des droits fondamentaux511(*). La CNDH peut être
considéré, à plusieurs égards, comme un
ombudsman.
C. La
CNDH, un ombudsman à la congolaise ?
Le modèle classique de l'ombudsman a été
bâti autour des préoccupations réelles qui se sont
progressivement élargies. Revêtu, de manière plus ou moins
explicite, d'une mission principale de surveillance de l'activité
administrative en vue de prévenir ou de corriger les éventuels
dysfonctionnements susceptibles d'affecter cette dernière, le
modèle classique de l'ombudsman entretient un rapport on ne peut plus
étroit avec la maladministration,512(*) cette pathologie affectant l'action de l'appareil
administratif étatique.513(*) Toutefois, en dépit des divergences entourant
la notion de « maladministration », un élément ne
fait guère de doute : cette dernière ne saurait se confondre avec
la problématique des droits fondamentaux.514(*) En effet, bien que certains
dysfonctionnements de l'appareil administratif se révèlent
susceptibles de porter atteinte aux droits de la personne humaine, la plupart
du temps, la « maladministration » renvoie davantage
à des incorrections administratives, sources de
désagréments pour les usagers, qu'à de véritables
violations des droits et libertés constitutionnellement garantis. Par
ailleurs, si l'on devait s'efforcer de dépasser les clivages doctrinaux
et nationaux, il conviendrait de retenir une approche relativement large de la
« maladministration », comme « comprenant
l'illégalité tout en la dépassant »515(*), étant donné
que cette acception est celle qui se rapproche le plus de la mission poursuivie
par le modèle originel de l'ombudsman.
De même, le Médiateur de la République,
compétent pour s'assurer du correct fonctionnement des services publics
administratifs,516(*)
est habilité, afin de mener à bien cette mission, à
exercer un contrôle relativement poussé des agissements de
al'administration, fondé à la fois sur le droit et sur
l'équité.517(*)Appréhende la « maladministration »
comme « le contraire de la nomocratie ». Pour ce dernier, elle
apparaîtrait lorsque se produit une inadéquation de l'action
administrative avec la règle de droit, à l'origine d'un
fonctionnement défectueux de la démocratie au sein de l'appareil
administratif.518(*) Ce
faisant, un lien étroit est établi par l'auteur entre
« maladministration » et illégalité. Pour autant,
les deux notions ne sauraient se confondre, parce que selon Paul Sabourin,
« l'illégalité cesse d'être du domaine de la
''maladministration'' dès que le juge s'est emparé de
celle-ci ». Par conséquent, la « maladministration »
désignerait seulement les illégalités dont le juge n'est
pas amené à connaître. Séduisante, une telle
approche est cependant loin de faire l'unanimité.519(*) En particulier,
considère qu'elle recouvre trop largement l'illégalité.
Aussi préfère-t-il associer la « maladministration »
à « tout comportement qui sans être fondamentalement
contraire au droit n'est cependant pas exempt de critiques ». Pour
l'auteur espagnol, la « maladministration » se distingue de
l'inopportunité et de l'illégalité pour se rapprocher de
l'injuste, de l'irrationnel et de l'inique.520(*)
Mais la situation de l'ombudsman espagnol mérite une
attention particulière. A l'origine de vives discussions lors des
débats constituants, la teneur exacte de la fonction attribuée au
Défenseur du Peuple fait l'objet de nombreux rebondissements à
l'occasion du processus d'élaboration de la Constitution espagnole de
1978.521(*) Sur la base
d'un avant-projet de Constitution prévoyant une fonction unique de
protection des droits et libertés garantis par le titre premier du texte
constitutionnel, un certain nombre d'amendements sont effectivement
déposés afin d'élargir la compétence de
l'institution à la surveillance du correct fonctionnement de
l'activité administrative stricto sensu1. Acceptés par la
Commission constitutionnelle, ces amendements donnent lieu à la
rédaction d'un nouvel article, inséré au Projet de
Constitution, attribuant au Défenseur du Peuple une double fonction,
d'une part, de protection des droits fondamentaux garantis par le titre premier
de la Constitution, d'autre part, de surveillance de l'activité de
l'administration afin de garantir l'effectivité des principes de
l'État de droit. Mais, finalement, la rédaction donnée
à l'article 54 de la Constitution par la commission mixte, dont la
teneur littérale ne laisse place à aucun doute, abandonne cette
conception dualiste au profit d'une vision fonctionnelle moniste, postulant que
le Défenseur du Peuple est appelé à remplir une fonction
unique de défense des droits fondamentaux.
C'est ici que la différence entre l'ombudsman et la
CNDH congolaise commence à s'estomper. Cette institution a vocation
d'être un ombudsman avec le constat réel que la CNDH congolaise
manque l'aura des médiateurs de la République, sans doute
à cause du contexte peu démocratique dans lequel elle
évolue.
D. Les
pesanteurs fonctionnelles
L'opinion espérait qu'une composition collégiale
allait garantir la bonne gestion de la commission Nationale des Droits de
l'Homme. À l'inverse, les autorités collégiales
présentent davantage des garanties d'équilibre, les membres
étant nommés par de cette méthode n'empêche
cependant pas des nominations plus ou moins politiquement marquées. Ceci
est autant plus plausible lorsque doit intervenir l'Assemblée Nationale
avant l'ordonnance du Président de la République. Dans la
pratique, les personnes désignées doivent avoir le parrainage de
l'un des dignitaires du régime.
La CNDH exerce uniquement un pouvoir d'influence, une
magistrature morale au service d'un
« contrôle-évaluation », ce qui a parfois
conduit à contester leur capacité d'accorder ou de favoriser aux
citoyens une jouissance effective des droits et libertés fondamentaux.
Cette capacité d'influence dépend très largement de la
personnalité assumant les fonctions (expérience, rapports avec le
pouvoir étatique...). Bien que disposant de pouvoirs d'investigation,
son action prend la forme de recommandations non exécutoires, de
rapports qui, si la CNDH est crédible sont généralement
pris en considération par l'administration. Il faudrait s'appuyer sur
l'opinion publique tant nationale qu'internationale pour pouvoir consolider son
action.
Outre les conditions de nomination des membres et les
garanties statutaires variables dont ils bénéficient, deux
éléments sont fréquemment soulignés afin de
contester l'indépendance de la CNDH. Premièrement, ces actes sont
susceptibles d'être contrôlés par un juge. Cet argument doit
pourtant être relativisé puisque le juge est lui-même
indépendant et qu'il garantit au contraire la légalité des
actes examinés. Deuxièmement, il est souvent regretté que
budgétairement la CNDH soit dotée d'un budget insuffisant
dépendant totalement de la bonne foi du Gouvernement, avec le risque de
réduire les ressources d'une autorité trop entreprenante. Cette
éventualité ne doit en effet pas être
négligée, même si cette pratique serait sans doute
politiquement dangereuse pour le gouvernement ou le Ministre qui s'y
essaierait.
Au regard de la difficulté d'imposer les sanctions de
violations des droits fondamentaux aux pouvoirs publics ou aux animateurs des
institutions de l'État, plusieurs États ont envisagé de
recourir aux mécanismes non juridictionnels poursuivant à juste
titre la recherche de la persuasion, comme pour appuyer ce point de vue de
Pierre-Gilles de Gennes, Prix Nobel de physique 1991, qui disait que
« la persuasion est beaucoup plus efficace que n'importe quelle
procédure autoritaire ».522(*)
A l'évidence, l'affirmation du Prix Nobel ne manque pas
de surprendre. Contrairement à un acte d'autorité dont le propre
est d'imposer, par voie de commandement, une volonté à autrui,
l'acte de persuasion, parce qu'il consiste à obtenir quelque chose du
persuadé sans recours à la contrainte, laisse, en effet, celui-ci
libre de suivre la conduite préconisée et, par conséquent,
encourt le risque permanent de demeurer sans effet. Surprenante, l'affirmation
l'est d'autant plus dans le cadre d'une étude juridique, a fortiori
lorsque celle-ci a trait aux droits fondamentaux.
Ainsi que le rappelle le professeur Bénédicte
Delaunay, les droits fondamentaux, selon la doctrine allemande,
« doivent être protégés par un système de
recours à procédure contentieuse susceptibles d'aboutir à
des sanctions ».523(*) Aussi leur effectivité est-elle
généralement associée à la protection offerte par
les organes juridictionnels, dont la spécificité est de prononcer
des décisions revêtues de l'autorité de la chose
jugée s'imposant à leurs destinataires.
L'engouement contemporain pour les voies non juridictionnelles
de garantie, notamment dans le domaine des droits fondamentaux, impose pourtant
de nuancer sensiblement le propos. Privilégiant le recours à des
mécanismes incitatifs de direction des conduites pour remplir leur
office, les instances de garantie non juridictionnelle se proposent
effectivement de garantir l'effectivité des droits et libertés
par la voie du dialogue et de la persuasion, c'est-à-dire en dehors de
tout pouvoir coercitif. A ce titre, leur développement attesterait d'une
insuffisance de la protection juridictionnelle dont le caractère
juridiquement contraignant ne saurait être aussi efficace qu'une
première approche peut le laisser penser. En ce sens que la protection
offerte par le juge, aussi indispensable soit-elle, ne permettrait pas
toujours, compte tenu, notamment, de son manque de souplesse, de garantir une
protection optimale des droits fondamentaux et, par conséquent,
justifierait l'instauration d'organe de garantie destinés à
défendre les droits et libertés par le biais de moyens
incitatifs.
En somme, le développement constant de la garantie
juridictionnelle en RDC et dans d'autres pays confirme l'aptitude du juge
à protéger les droits fondamentaux et, de ce fait, la place
centrale occupée par ce dernier en la matière. Fort de ce
constat, il est légitime d'exprimer certains doutes quant au besoin
contemporain de recourir à l'institution de l'ombudsman.
Mais, de tels organes, étant en mesure de combler
certaines carences affectant les traditionnelles voies de recours,
favoriseraient, en somme, l'émergence d'un système institutionnel
de garantie des droits et libertés complet et, partant, attesteraient du
caractère incontournable de la protection non juridictionnelle des
droits fondamentaux au sein de nos systèmes juridiques contemporains,
même si les institutions de sécurité n'ont pas toujours un
bon regard des droits fondamentaux en général et de la
liberté de manifestation en particulier.
§3. Les institutions de sécurité et
l'exercice de la liberté de manifestation
Les services de sécurité jouent dans un
État de droit un rôle non négligeable dans la protection du
droit de manifester. Il suffit pour s'en rendre compte, de lire les instruments
juridiques portant organisation et fonctionnement de la Police nationale
Congolaise, des Forces armées de la RDC et de l'Agence nationale de
renseignements. L'avant-dernier alinéa de l'article 45 de la
Constitution de la RDC fait obligation à l'État
« d'intégrer les droits de la personne humaine dans tous les
programmes de formation des forces armées, de la police et des services
de sécurité ».
C'est ainsi que chacun des instruments juridiques
régissant ces services exprime la volonté d'instaurer un
état de droit en République Démocratique du Congo en
faisant référence aux droits et libertés fondamentaux
parmi lesquels le droit de manifester occupe une place de choix.
1. La police nationale
congolaise
La Police Nationale Congolaise est régie en premier
lieu par les dispositions des articles 91, alinéa 3 et 182 à 186
de la constitution du 18 février 2006 ; ensuite la loi organique
n° 11/013 du 10 août 2011 portant organisation et fonctionnement de
la Police nationale congolaise et la loi n° 13/013 du 1er juin
2013 portant statut du personnel de carrière de la police nationale.
Dans son exposé des motifs, la loi organique associe
à la Police la mission de la protection des personnes et de leurs biens,
la préservation des droits de l'individu, socle de la démocratie
dans un pays. Dorénavant la PNC est un service public, apolitique,
soumis à l'autorité civile, au service de la nation toute
entière et chargée d'assurer la protection des personnes, des
biens et du maintien de l'ordre dans le strict respect de la Constitution.
L'organisation et le fonctionnement de la police nationale
congolaise a pris en considération sa double mission à savoir le
maintien de l'ordre public et le rétablissement des droits des
personnes. Au regard de cette situation, la loi organique a engagé une
réforme pour répondre au pressant besoin de doter la
République d'une police républicaine, unifiée, efficace,
civile, apolitique et professionnelle susceptible de fonctionner
véritablement au-delà de toute conjoncture et soubresaut
politiques524(*).
L'action de la police au regard des manifestations dans un
État de droit démocratique peut être
appréciée à 3 niveaux : avant les manifestations,
pendant les manifestations et dans l'application des principes de maintien de
l'ordre public.
A. L'action
de la police avant les manifestations
Soumise à l'autorité civile, la police ne peut
s'inviter à une manifestation sans une réquisition
préalable. L'ordre d'intervention de la Police doit être
donné par voie de réquisition.525(*) Son action consiste à prendre contact avec
l'autorité civile, à se renseigner sur sa nature et les objectifs
de la manifestation (politiques, sociaux, religieux etc.), repérage de
l'itinéraire proposé (marche, lieu, etc.), contact avec les
organisateurs (objectifs, service d'ordre interne, identification des
éléments extrémistes ou plus radicaux, etc.). Cette
première phase est préventive et doit conduire les services de
police à faire une analyse correcte de la situation de façon
à pouvoir anticiper les difficultés à prévoir et
procéder dans la mesure du possible à envisager des mesures
préventives à l'encadrement de la manifestation en coordination
avec les organisateurs.
La police est avertie à ne pas faire une
interprétation extensive de la notion d'ordre public qui conduit souvent
sous couvert de la sécurité publique, à commettre de
graves violations du droit de manifester. Sauf en cas d'urgence ou de force
majeure, toute réquisition doit être écrite. Pour permettre
à l'exécutant d'apprécier la légalité de
l'ordre reçu, la réquisition reprend la disposition légale
en vertu de laquelle elle est faite.
B. L'action de la police
pendant les manifestations
La police doit toujours de garder à l'esprit que
manifester est un droit, de surcroit constitutionnel. Et qu'en
conséquence les manifestants ont la pleine liberté de se
réunir sans la crainte des représailles ou entraves de quelque
nature que ce soit. Dans ce cadre une réquisition de dispersion ne peut
être justifiée que s'il existe des troubles graves à
l'ordre public. Les troubles ne peuvent pas être présumées,
elles doivent se présenter de manière claire et qui n'invite
aucun doute possible et la dispersion doit se réaliser
conformément aux principes de maintien de l'ordre public.
C. Les quatre principes du
maintien de l'ordre public
L'action de la police doit toujours obéir aux principes
ci-dessous, concernant la question du maintien de l'ordre public. Il s'agit de
entre autres : la conformité légale, l'interdiction de
l'excès (le principe de la proportionnalité et de
l'adéquation entre la mesure à prendre et le degré de la
menace à craindre).
C.1. La conformité
légale
Les actes de contrôle, doivent se fonder sur la loi,
doivent être mesurés et respectueux des procédures
individualisées et du contenu défini par la loi,
indépendamment de la nature de ces mesures. Ils pourront ressortir des
règlements des autorités de police, des décisions de
l'autorité politico-administrative (autorisation, interdictions, ordres,
etc.), des mesures de coercition (utilisation de la force, emploi d'armes non
létales), ou même de simples opérations de surveillance.
Toutes les procédures de police doivent reposer sur la prévision
de la loi et être soumise au principe de la conformité
légale.
Ce principe est consacré par l'article 10 de la loi
organique portant organisation et fonctionnement de la Police Nationale
Congolaise qui dispose que « la police vérifie
systématiquement la légalité des opérations qu'elle
se propose de mener ». La conformité au droit étant la
préoccupation centrale de l'État de droit, l'inclusion de ce
principe dans la loi organique confirme l'option levée par le
Constituant congolais de 2006 de faire de la RDC un État de droit et
démocratique.
C.2. L'interdiction de
l'excès : le principe de la
proportionnalité
Toutes les mesures de police doivent obéir aux
conditions de la nécessité, de l'exigibilité et de la
proportionnalité, cela veut dire que le rôle de la police doit
être strictement indispensable à assurer l'intérêt
public en cause, sacrifiant au minimum les droits des citoyens. L'excès
doit donc être entendu comme toute action de la police, non
indispensable, contre la tenue d'une manifestation.
C.3. L'adéquation
entre la mesure à prendre et le degré de la menace à
craindre
Les agents de l'autorité, dans l'exercice de leurs
activités de contrôle devant une situation concrète,
devront toujours chercher à établir un relatif équilibre
entre les objectifs à défendre et les coûts de la mesure
à adopter pour les atteindre. L'on peut donc affirmer que, la mesure
restrictive doit constituer un moyen approprié pour atteindre les
objectifs visés par la loi.
C.4. Hiérarchies de
valeurs entre la liberté et les risques éventuels
Les mesures de police doivent toujours se justifier par une
stricte nécessité. Le recours aux mesures plus importantes n'est
pas recommandé quand des mesures objectives peuvent s'atteindre par
d'autres méthodes ou d'autres formes moins contraignantes.
Le rôle de la police est de défendre la
légalité démocratique, de garantir la
sécurité interne et les droits des citoyens, l'article 182,
Constitution de la RDC, sachant que les mesures de police sont prévues
dans la loi, elles ne doivent donc pas être utilisées en dehors du
strictement nécessaire.
On doit avoir toujours présent que : Une
réunion ou une manifestation ne peut avoir lieu que si la loi est
appliquée, les indications légales des autorités
politico-administratives et les mesures de la police sont respectées,
défense de la légalité démocratique, garantie de la
sécurité interne et de la défense des droits des citoyens
de manière à éviter que les objectifs de
l'événement ne soient pas contraires à ceux définis
par la loi.
L'action de la police doit être toujours soumise au
principe de la proportionnalité et de l'interdiction de l'excès,
principes qui régissent toute l'administration publique dans ses trois
dimensions : adéquation, nécessité et
proportionnalité. L'usage de la force doit toujours avoir une nature
résiduelle et subsidiaire, de manière à s'intégrer
dans la logique de l'accomplissement d'un devoir de l'État et de ses
organes.
2. La
protection par les forces armées congolaises
Malgré la mobilisation systématique des
militaires des FARDC lors de missions de maintien de l'ordre public, la loi
organique portant organisation et fonctionnement des Forces Armées de la
République démocratique du Congo,
« FARDC »526(*) ne comporte aucune disposition restreignant le
recours légitime à la force. Cette loi fait cependant la
distinction entre l'emploi des militaires pour des missions de police et de
maintien de l'ordre ou leur emploi dans des opérations purement
militaires, notamment dans un contexte de conflit armé. Elle rappelle
ainsi l'obligation aux militaires de respecter certains droits fondamentaux
pendant la guerre et donc a fortiori dans un contexte de paix où ils
exercent des missions de police et de maintien ainsi que rétablissement
de l'ordre public face à des manifestants non armés et
généralement pacifique.527(*) En outre, la Constitution congolaise dispose que nul
n'est tenu d'exécuter un ordre manifestement illégal ou contraire
au respect des droits de l'homme et des libertés publiques.528(*)
Telle qu'adoptée par le Parlement en décembre
2015, la proposition de loi fixant les mesures d'application de la
liberté de manifestation prévoit l'imposition aux forces de
l'ordre responsables des opérations de gestion des rassemblements
publics de l'obligation de ne faire usage de la force que de manière
proportionnelle, non létale et uniquement en cas de
nécessité.
3.
L'Agence nationale des renseignements
Chargée de la recherche, la centralisation,
l'interprétation, l'exploitation et la diffusion des renseignements
politiques, diplomatiques, stratégiques, économiques, sociaux,
culturels, scientifiques, et autres intéressant la sûreté
intérieure et extérieure de l'État,529(*) l'Agence Nationale de
Renseignement joue un rôle très important en matière de
protection du manifester. Organe technique auprès de la police
administrative, c'est elle qui donne un avis à l'autorité
administrative afin de doit répondre à une demande d'autorisation
ou d'information selon le cas. C'est toujours elle qui doit connaitre si oui ou
non la manifestation projetée peut donner lieu aux actes de violences et
ainsi conseiller l'autorité et le cas échéant donner un
avis favorable ou défavorable.
Malheureusement, ce service d'intelligence, comme pour la
Police et l'Armée ont cessé d'être au service de la nation,
pour servir les individus au pouvoir. Le caractère potentiellement
subversif de la manifestation lui vaut toute l'hostilité de la part des
agents commis à ce service. Ainsi pour protéger non pas
l'institution Président de la République mais l'individu, l'ANR
préfère sacrifier cette liberté en mettant à l'abri
l'autorité politique de tout risque qui découlerait de l'exercice
du droit de manifester.
Il faudrait donc, plaider pour que l'ANR, redevienne un
service d'utilité nationale et revêtue de toutes les vertus
républicaines et que son action s'inscrive dans le cadre de strict
respect du Décret-Loi n° 003-2003 partant création et
organisation de l'Agence nationale de renseignements. Aux termes de l'article 4
du décret ci-dessus, l'ANR a pour mission la protection de
l'environnement politique garantissant l'expression normale des libertés
publiques conformément aux lois et règlements.530(*) Il me semble que d'autres
missions l'emporteraient sur celle lui conférée par l'article
précité. Au-delà des cas de détention que l'on ne
cesse de condamner, son application dans les différents cas
d'interdiction mérite d'être signalée.
Sans aucun doute, elle est héritière et le
reflet de la culture autocratique dont le pays a hérité de 32 ans
de dictature. Placée sous l'autorité du Président de la
République, l'ANR fonctionne en violation des lois et règlements
et constitue un handicap à la promotion du droit de manifester. Il est
difficile qu'un Gouverneur, un Bourgmestre ou toute autre autorité
agissent violation ou encore en contradiction avec son avis.
§4. Les acteurs paraétatiques et
interétatiques
Ces garanties sont liées à la capacité de
réaction de la société elle-même et à
l'apparition des autorités administratives indépendantes. A
l'origine du pacte social que les individus concluent avec le pouvoir, se
trouve en général l'obligation pour l'État de respecter
les droits et libertés. Conformément à ce que Locke a
avancé, toute attitude contraire ouvre à la société
un droit de résistance. Ce principe essentiel qui donne une grande
partie de sa valeur au contrat social a été repris, non sans
débat, dans la Déclaration des droits de l'homme531(*). Bien que dépourvu de
portée en droit positif, cet article et surtout la conscience qu'en ont
les populations font que la société est la première
à pouvoir se prémunir des atteintes à ses libertés.
En effet, la résistance à l'oppression
n'implique pas nécessairement l'action violente ; elle passe aussi par
des réactions individuelles ou collectives. La résistance a pris
ces dernières années la forme des « lanceurs d'alerte »
capables de transgresser des obligations de secret ou de discrétion
professionnelle afin de faire cesser des agissements faisant peser un risque
pour autrui.
Comme le corps humain, la société a la
faculté de produire ses propres anticorps lorsqu'elle considère
que ses libertés sont menacées ou violées. Il s'agit alors
de s'opposer aux ingérences du pouvoir en recourant à des
ressources qui ont prouvé leur efficacité. Ainsi, la presse est
traditionnellement présentée comme un contre-pouvoir capable de
faire fléchir des gouvernements. La liberté de manifestation
joue, elle aussi, un rôle majeur, comme en témoignent les
résultats obtenus, notamment, à la suite des
événements du 04 janviers 1959 à Léopoldville et
les émeutes de Stanley Ville, à la suite desquelles, le droit de
manifester fut consacrée au profit des populations congolaises.
De même l'opposition à la remise en cause de
l'école libre France, la grève n'est pas non plus
dépourvue d'intérêt. En outre et depuis Tocqueville, on
sait que la vitalité du tissu associatif est un élément
essentiel, favorisant le regroupement des énergies et agissant au
quotidien sur le terrain. A ce titre, la commission nationale consultative des
droits de l'homme (loi 2007-292 du 5 mars 2007) permet aux associations de
bénéficier d'un relais significatif auprès des pouvoirs
publics. Elle éclaire, au moins en théorie, le Premier Ministre
et les Ministres concernés sur les questions de portée
générale intéressant les droits de l'homme et l'action
humanitaire.
Poussé à son extrémité, le droit
de résistance atteint parfois le seuil de la violence. Toute la
difficulté est alors de savoir quand se termine l'action légitime
et où commence l'action terroriste. La distinction entre la
résistance et le terrorisme est sans doute l'une des plus subjectives
à opérer, comme la France en a fait la cruelle expérience
avec l'apparition de l'OAS durant la guerre d'Algérie.
Enfin, la société dispose de la
possibilité (formelle ou informelle) d'exprimer son
mécontentement par l'intermédiaire de pétitions
adressées au pouvoir532(*). Longtemps craint par les autorités qui
assimilaient la pétition à un dangereux moyen de pression, ce
droit a recouvré une relative vigueur avec la révision
constitutionnelle du 28 mars 2003 et plus encore avec celle de 2008 en France.
1. Les
Organisations Non Gouvernementales de protection des droits de l'homme
Les organisations non gouvernementales telles qu'Amnesty
international, Human Right Watch et plusieurs autres contribuent d'une
manière significative à la protection et la promotion des droits
fondamentaux, particulièrement de la liberté de manifestation.
Plusieurs cas de violations ou d'entraves à la liberté de
manifestation sont connus à travers les rapports et les
déclarations de condamnation élaborés533(*). Elles font les rapports qui
influencent la politique gouvernementale. Ne disposant pas de moyens de
contrainte ou de sanction sur les auteurs de violations, constitués en
grande majorité des personnalités politiques et
administratives.
2. La protection internationale du
droit de manifester
L'Afrique est au coeur des travaux de l'ONU, que ce soit dans
les domaines des droits de l'homme, du développement ou de celui de la
paix et de la sécurité. Le rôle historique des Nations
Unies vis-à-vis de l'Afrique est souvent négligé. Il
remonte au début de la création de l'Organisation lors de
l'élaboration de la Charte de l'ONU dont les principes et les buts ont
créé un environnement favorable à la lutte pour
l'indépendance de nombreux pays africains. En matière des droits
fondamentaux en général et de la liberté de manifestation
en particulier, l'ONU s'active intensément en RDC (II), sans omettre
l'apport des instances africaines dans la protection des droits fondamentaux
(III).
A côté de l'ONU, la contribution de l'action
internationale bi et multilatérale dans la défense des droits de
l'homme n'est pas à négliger (I). Il s'agit du contrôle ou
de la défense du droit de manifester par les organismes de la
société civile internationale et l'action diplomatique par voie
de condamnation des violations. Par ce que certains appellent ou
considèrent comme la diplomatie des droits de l'homme, la soumission de
l'État au droit est exigée par les institutions
financières internationales pour accorder leur aide au
développement des États du tiers monde. Dans ce contexte, chaque
État se trouve dans l'obligation de se conformer non seulement à
sa propre législation au sens le plus large de ce terme, mais
également aux standards internationaux communément admis qui
régissent la protection des droits fondamentaux des citoyens.
De ce point de vue, les déclarations faites par un
groupe d'ambassadeurs, respectivement des États-Unis, du Canada et de la
France qui auraient facilité l'organisation des manifestations de
septembre et novembre 2016 pouvaient être citées comme
exemple.534(*) On peut
aussi noter qu'au motif que les autorités congolaises ont
rétréci l'espace démocratique, en voulant taire toute
dissidence leur aurait couté cher car mettant en péril certaines
relations diplomatiques.
A.
L'action internationale en faveur de la protection de la liberté de
manifestation
Certains organismes internationaux jouent un rôle majeur
dans la protection des droits fondamentaux. Cela pourrait être
vérifié lorsqu'on analyse l'action des Nations Unies et des
organismes comme Amnesty international, Humains Right Watch à travers
leurs déclarations, on peut vite se rendre compte de leur impact pour la
protection et la promotion du droit de manifester.
A.1. Les garanties
mondiales
Comme dans les États, les individus disposent d'un
pouvoir de réaction à l'échelle planétaire. Au
même titre que les associations nationales, les organisations non
gouvernementales prennent directement ou indirectement part active à la
protection des libertés. En République Démocratique du
Congo, Amnesty International et les pays de l'Union européenne, ainsi
que le Gouvernement des États -Unis d'Amérique ont fait à
travers leurs déclarations de condamnations contre les diverses
restrictions dont le droit de manifester constitue une forme de garantie.
Les organisations internationales sont elles aussi très
actives. Ainsi, dans le prolongement du Pacte international relatif aux droits
civils et politiques, l'ONU dispose d'un Comité des droits de l'homme,
entré en fonction en 1977. Ses dix-huit membres élus par les
États membres rédigent des rapports et observations
adressés aux États. Le Comité travaille sur la base
d'informations fournies par ces derniers. Il agit aussi à la suite de
plaintes. Dans cette hypothèse, la plainte (« communication »)
émane d'un État pour en viser un autre. Le Comité engage
alors une procédure de règlement amiable. De manière plus
originale, la plainte peut également venir d'un particulier ayant
épuisé toutes les voies de recours internes, à condition
que l'État ait accepté cette possibilité. Le Comité
informe alors l'État visé et lui demande de fournir des
explications, puis il rend ses décisions dépourvues de
portée contraignante. Bien que produisant des résultats
quantitatifs notables, ce mécanisme est fortement affaibli par l'absence
de sanction et de pouvoir d'investigation.
Parallèlement au Comité des droits de l'homme,
l'ONU a abrité une Commission des droits de l'homme dont la mission
était de centraliser les informations relatives aux droits de l'homme
dans le monde. Elle a toutefois perdu toute crédibilité en
s'abstenant de relever des violations gravissimes des droits de l'homme ou en
violant son obligation d'impartialité dans le conflit entre Israël
et les Palestiniens. À cause de ce constat et dans le contexte d'une
timide réforme des Nations Unies amorcée en 2005, la Commission a
laissé la place à un Conseil des droits de l'homme composé
de 47 membres désignés à la majorité absolue des
États composant l'Assemblée Générale. L'une de ses
premières décisions symboliques a été de
créer, à compter de février 2008, un mécanisme
d'examen périodique universel devant permettre de rendre les
contrôles plus objectifs. La crédibilité de cette structure
est toutefois discutée en raison des modalités de
désignation des membres dont la qualité d'État
démocratique n'est pas garantie en dépit de la création
d'une procédure de suspension par l'Assemblée
Générale en cas de violation flagrante.
On peut également citer l'action du Haut-Commissariat
des Nations Unies aux droits de l'homme, créé en 1993, et qui
siège à Genève. Son rôle est de renforcer par
l'éducation et le dialogue la protection des droits de l'homme dans les
États.
A.2. La contribution de
l'Organisation Internationale de la Francophonie à la protection d'un
État de droit
La justice est un attribut fondamental de l'État
moderne. Elle assure, dans une société démocratique, la
sauvegarde de l'édifice normatif ainsi que la protection des droits et
libertés. Une justice indépendante et efficace est un symbole de
l'État de droit. Elle révèle la réalité de
la séparation des pouvoirs et consacre le règne du droit. Mais
l'efficacité de tout appareil judiciaire dépend de la nature et
de l'ampleur des moyens dont il dispose. Or, dans nombre d'États
francophones, le système judiciaire connaît de nombreuses
faiblesses, liées tantôt aux avatars des processus de
stabilisation démocratique, tantôt aux situations plus fragiles de
sortie de crise. La question du renforcement des capacités des
institutions judiciaires se trouve ainsi posée. Et c'est sur cette base
que l'Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) a investi, depuis
une trentaine d'années, le champ de la coopération juridique et
judiciaire.
Ayant inscrit la promotion de la démocratie au coeur de
son action politique, la Francophonie a pris des engagements forts et
développé, en s'appuyant sur ses réseaux institutionnels,
des programmes destinés à accompagner ses États membres
dans le renforcement des capacités de leurs systèmes de justice.
Cet engagement est perceptible dans le corpus normatif de l'Organisation. Il
marque la ferme volonté des États francophones d'ancrer leurs
relations dans un cadre de coopération, attaché à la
protection des droits fondamentaux et à la régulation des
pouvoirs majoritaires. La justice est donc désormais
érigée en priorité dans le champ des préoccupations
francophones. Elle y est saisie tant aux niveaux national et international que
dans sa dimension transitionnelle.
B. La protection par les sanctions
ciblées de l'UE et les USA
Les mesures européennes et américaines dites
sanctions ciblées ne font pas l'objet d'une réception moins
contestée dans le paysage politique et scientifique congolais. Elles
font l'objet des controverses tant sur le plan doctrinale que politique.
Certains trouvent en celles-ci une pratique néo-colonialiste ; pour
d'autres, ces mesures permettent de suppléer les insuffisances et les
faiblesses de nos systèmes judiciaires dépourvus de toute
indépendance et qui fonctionnent sous le soubresaut du politique.
Dans cette partie, il sera donc question de répondre
à une double interrogation, d'abord celle de savoir, en quoi consistent
ces différentes mesures dites sanctions ciblées ? Et ensuite,
quelle en est de l'effectivité de ces sanctions ?
B.1. La portée des
mesures dites sanctions ciblées
Le 23 juin et le 28 septembre 2016, l'Administration
américaine, à travers son Ministère des finances, agissant
par le Bureau de contrôle des actifs étrangers, a annoncé
dans un communiqué avoir inscrit sur sa très
célèbre liste des sanctions, le Général Kanyama,
Commissaire provinciale de la Police de Kinshasa, la Capitale de la RDC et deux
autres généraux, entre autres Amisi Kumba dit Tangofort et John
Numbi535(*).
Dans le même sens, l'Union Européenne a pris des
sanctions contre quelques personnalités congolaises
soupçonnées d'être à l'origine de l'intimidation,
harcèlement à l'encontre de l'opposition, de la
société civile et de médias536(*). L'Union européenne
n'a pas oublié non plus ceux qui, pour elles, entravent le processus
démocratique, à commencer par le visage médiatique du
pouvoir congolais, Lambert Mende Omalanga, Ministre de la Communication et
Medias et Porte-parole du Gouvernement congolais, Emanuel Ramazani Shadary,
Vice-premier ministre, Ministre de l'Intérieur et autre ténor du
régime.
L'organisation régionale européenne
considère le Ministre des medias comme le porte-parole de la politique
répressive du gouvernement vis à vis des médias537(*). « Une politique qui
viole le droit à la liberté d'expression et d'information et
compromet une solution consensuelle et pacifique en vue de la tenue des
élections », estime l'UE dans un communiqué. Toutes ces
personnalités sont désormais visées par une interdiction
de pénétrer sur le territoire de l'Union européenne, un
gel de leurs avoirs ainsi que par l'interdiction de percevoir des fonds de
quelqu'un en Europe. En même temps les banques commerciales oeuvrant en
République Démocratique du Congo décident d'appliquer
à la lettre ces mesures à une seconde prête538(*).
L'idée des Européens, c'est aussi de remettre un
coup de pression pour faire avancer la transition en panne depuis janvier 2015.
Et faire en sorte que le pays aille bien aux élections d'ici la fin de
l'année comme il s'était engagé à le faire en
décembre dernier. « Le processus électoral reste l'enjeu
principal des prochains mois », insiste l'UE dans son
communiqué.539(*)
Arrivée à Kinshasa, une délégation
diplomatique de haut rang, qui comprenait entre autres dans ses rangs, le
Ministre des Affaires étrangères angolais, Georges Chikoti.
Celui-ci représente, les pays voisins puisque l'Angola présidait
la CIRGL, la Conférence internationale sur la région des Grands
Lacs, et fait partie de la Commission Défense et Sécurité
de la SADC et de la Communauté de développement de l'Afrique
australe.
Selon Georges Chikoti, les sanctions européennes sont
« un peu précipitées ». Il se demande « si l'UE
n'est pas un peu trop détachée des réalités de la
RDC »540(*). Pour
les membres qui composaient cette délégation, il faut laisser au
nouveau gouvernement qui vient d'être nommé, le temps aux choses,
écouter les congolais et leur donner la possibilité de travailler
pour sortir de cet imbroglio »541(*).
Parlant des sanctions américaines, Augustin Mampuya
démontre que les sanctions au sens du maintien de la paix et de la
sécurité internationales, que prétendraient prendre
unilatéralement des États ou des organisations internationales
autres que l'ONU, sans l'implication du Conseil de sécurité, sont
contraires à la Charte des Nations-Unies et donc,
illégales542(*).
Retenons que la RDC appartient au groupe des Etats Africains,
des Caraïbes et du Pacifique (ACP) qui sont associés à
l'Union Européenne par les conventions de Lomé (I, II et III) et
de Cotonou. L'article 36 de cette Convention conditionne l'accès aux
mécanismes d'aide des Etats du Tiers-Monde au respect des droits de
l'homme. La RDC étant signataire de ces accords, il est tenu de les
respecter sous peine d'être sanctionnée. Il faut préciser
qu'au départ, les sanctions étaient dirigées contre les
Etats, et se sont révélées sans effets dissuasifs sur la
conduite des dirigeants. L'UE a suspendu la coopération structurelle
avec la RDC en 1990 pour cause de violation des droits de l'homme.
En ce qui concerne les Etats-Unis, seuls les Etats respectueux
des droits de l'homme peuvent accéder au titre
préférentiel au marché américain. La RDC a
été exclue pour non-respect des droits l'homme. Ce sont les
mêmes sanctions qui sont aujourd'hui dirigées contre les individus
afin de créer un effet dissuasif.
Sans ignorer les contestations que suscitent les sanctions
dites ciblées, en République Démocratique du Congo, tant
sur le plan de leur régularité que de leur effectivité, il
importe de signaler qu'elles restent dans le contexte congolais, l'une des
rares qui puissent été prises visant l'effectivité du
droit de manifester.
B.2. L'effectivité
des sanctions dites ciblées prises au travers les mesures
américaines et européennes
La réaction de certaines personnalités
visées par les sanctions européennes et américaines
risqueraient de faire croire que celles-ci ne sont que diffuses et par ricochet
dépourvues de toute effectivité. C'est en tout cas l'impression
que donne la réaction faite à chaud par le Général
Olenga, l'une des personnalités congolaises reprises sur la très
célèbre liste des américains543(*). Considérant
l'habitude depuis longtemps adoptée par les politiques africains
consistant à investir à l'étranger, cette position
mérite d'être relativisée. En outre, lorsqu'on sait que
chacune de ces personnalités possèdent au moins un compte en
banque, soit un compte salaire ou privé, il est aussi possible
d'affirmer qu'elles atteindront d'une manière ou d'une autre toutes les
personnes visées.
Pour justifier ces nouvelles sanctions, l'UE évoque de
graves violations des droits de l'homme, des rapports faisant état de
l'usage disproportionné de la force par les services de l'État,
en particulier les forces de sécurité. Face à une
situation qui se détériore, l'Union européenne devait
envoyer un signal au pouvoir544(*).
Toutes ces personnalités sont désormais
visées par une interdiction de pénétrer sur le territoire
de l'Union européenne, un gel de leurs avoirs ainsi que par
l'interdiction de percevoir des fonds de quelqu'un en Europe. En même
temps les banques commerciales oeuvrant en République
Démocratique du Congo décident d'appliquer ces mesures545(*).
« La personne, qu'elle soit physique ou morale si elle
est sanctionnée la conséquence immédiate : c'est le
gel des avoirs. Donc, ses comptes sont bloqués. Cette position des
Américains est justifiée par le fait qu'on parle dollar
américain [...], c'est leur monnaie », a expliqué M.
Cuypers546(*).
Si les banques commerciales n'appliquent pas les sanctions
décidées par les Américains, elles seraient
elles-mêmes immédiatement frappées. « Si vous
n'appliquez pas la sanction, vous allez vous-mêmes être
sanctionné. Ça veut dire que vous ferez partie de ces listes sur
lesquelles il y aura des restrictions soit des interdictions. Et s'il y a
interdiction, vous ne pourrez plus faire des transactions en dollar
américain», a redouté la même source547(*).
Une banque placée dans l'impossibilité de faire
des compensations en dollar, a précisé Yves Cuypers, «c'est
évidemment un coup dur» pour elle, dans la mesure où elle
perdrait ses correspondants en dollars.
Ces sanctions permettront-elles de changer la donne ? Rien
n'est moins sûr tant la communauté internationale semble
elle-même divisée sur la question. L'Union africaine pense ainsi
que la méthode forte n'est pas la bonne et plaide plutôt pour un
dialogue politique discret548(*). L'ONU de son côté, tiraillée
entre ses différents États membres, n'est pas parvenue à
ce jour à une position commune et claire sur la RDC. Enfin, sans
l'Église catholique pour assurer la médiation entre pouvoir et
opposition, les relais semblent de plus en plus limités pour faire
pression sur les autorités.
3. La
protection onusienne (MONUSCO, BCNUDH)
Depuis plus d'une décennie, la MONUSCO et le Bureau
Conjoint des Nations pour les droits de l'homme, ont contribué d'une
manière non négligeable à la protection du droit de
manifester. Le BCNUDH a une unité spéciale qui fait un monitoring
des abus des droits humains, y compris en matière de la liberté
de manifestation. Ces organismes exercent une fonction de vigilance qui a un
effet dissuasif sur la police administrative.
Ils documentent les cas de violations du droit de manifester.
Disposant de moyens financiers conséquents et d'un réseau
important d'enquêteurs, leurs rapports reprennent avec plus de certitude
les cas d'atteintes à cette liberté. Il faut aussi souligner que
ces rapports ne sont sans conteste par les organisations gouvernementales.
Néanmoins, quelque soient les contestations du gouvernement portant
généralement sur le nombre de morts, les rapports de la MONUSCO
et du BCNUDC demeurent les plus fiables possibles et permettent de rendre
compte de l'effectivité de la situation en République
Démocratique du Congo549(*).
Dans un communiqué rendu public le 14 novembre 2017 la
MONUSCO a appelé et exhorté les autorités congolaises
à respecter les libertés fondamentales telles que
stipulées dans la constitution congolaise et les instruments juridiques
internationaux dont la liberté de réunion et de manifestation et
à instruire les forces de la défense et sécurité
à respecter les principes, de proportionnalité et
légalité conformément aux normes internationales550(*). La MONUSCO a rappelé
aussi aux citoyens que le droit de manifester implique de s'abstenir de
recourir à la violence sous toutes ses formes551(*). C'est par ces
recommandations et condamnations que la M0NUSCO parvient à dissuader les
autorités congolaises et les décourager d'adopter toute attitude
attentatoire aux droits et libertés fondamentaux.
4. Les
garanties assurées par les instances africaines
L'union Africaine et autres organisations régionales et
sous régionales contribuent elles aussi à la protection des
droits fondamentaux en général et du droit de manifester en
particulier.
A. La
protection par voie diplomatique : Déclaration des gouvernements
africains
Par la voie diplomatique, les gouvernements et les pays
africains contribuent également à la protection de la
liberté de manifester. Surtout en période de crise, les
ambassadeurs et chefs des missions diplomatiques facilitent la jouissance et
l'exercice des droits fondamentaux. Cela aurait été vécu
particulièrement en 2016 et 2017 en RDC. Durant cette période un
groupe d'ambassadeurs a fait le tour des institutions, pour exhorter les
autorités congolaises à laisser s'exprimer les partis
d'opposition et la société civile. En cas de violences ou de
répression des manifestants, les appels à la retenue, sont
généralement lancés pour permettre l'expression des
idées démocratiques.
B. La
protection devant Cour africaine des droits de l'homme et des peuples
La Cour est née avec le Protocole à la Charte
africaine des droits de l'homme et des peuples portant création de la
Cour africaine des droits de l'homme et des peuples : adopté le 9 juin
1998 à Ouagadougou (Burkina Faso), entrée en vigueur le 25
janvier 2004 soit trente jours après le dépôt de
l'instrument de ratification des îles Comores. Cette quinzième
ratification exigée par l'article 34 alinéa 3, s'est
ajoutée à celle de l'Afrique du Sud, de l'Algérie, du
Burkina Faso, du Burundi, de la Côte d'Ivoire, de la Gambie, du Lesotho,
de la Lybie, du Mali, de l'Ile Maurice, de l'Ouganda, du Rwanda, du
Sénégal et du Togo552(*). En annexe, les États qui ont ratifié
le protocole.
En janvier 2006, les Chefs d'État et de gouvernement de
l'Union Africaine réunis à Khartoum ont élus les 11 Juges
de la Cour africaine. Le statut de la Cour est en cours d'élaboration. A
ces jours la Cour n'exerce pas encore ses fonctions. Son siège sera
établi à de Arusha (Tanzanie) dans les installations de l'ancien
TPIR. Conformément à l'article 25 le siège doit être
établi dans un État membre et peut être
déplacé vers un autre État membre sur décision de
la conférence des chefs d'États et des gouvernements après
avis de la Cour. La Cour peut organiser des audiences dans d'autres pays
membres sur décision de sa majorité et avec l'agrément de
l'État concerné.
La Cour est composée de 11 membres, ressortissants des
États membres de l'OUA aujourd'hui UA, élus à titre
personnel parmi des juristes jouissant d'une très haute autorité
morale, d'une compétence et expérience juridique, judiciaire ou
académique, reconnue dans le domaine des droits de l'homme des droits de
l'homme et des peuples. La Cour ne peut avoir deux juges de même
nationalité. Toute fois l'État peut présenter
jusqu'à trois candidats, pourvu que les deux autres n'aient pas sa
nationalité. Les juges sont élus au suffrage secret en veillant
à la représentation adéquate des deux sexes, la
répartition géographique équitable ainsi que les grands
systèmes juridiques. Les juges sont élus pour un mandat de six
ans renouvelable une seule fois (art. 15). On peut regretter que le protocole
n'ait pas prévu un mandat unique pour épargner les juges de
conditionnement électoralistes.
Section
2. Les mécanismes juridictionnels de protection de la liberté de
manifester
Selon Véronique Champeil-Desplats, « le fait que
l'effectivité des droits ne puisse être dans tous les cas
assurée par le juge ne réduit contrairement à ce qui est
parfois soutenu -, ni la « juridicité » (ou «
normativité ») des droits, ni la possibilité d'obtenir leur
effectivité par d'autres moyens. La qualité de norme juridique ne
dépend pas de la possibilité d'invoquer la norme devant le seul
juge. Elle dépend bien plus de l'adoption de la norme par une
autorité compétente dans un système juridique
donné »553(*). L'affirmation ne semble souffrir d'aucune
contestation, même s'il est unanimement admis que l'intervention du juge
s'avère nécessaire pour l'effectivité de la norme ainsi
consacrée. En effet, il est classiquement admis en droit positif qu'une
norme, entendue comme « la signification d'une proposition indiquant un
modèle de conduite sur un mode impératif »554(*), obtient la qualité
de règle de droit en raison de sa seule appartenance au système
juridique555(*). Soit
que cette norme ait été directement édictée par
l'État, en vertu de son pouvoir normatif, soit que, bien
qu'extérieur à l'État, elle ait été
adoptée sur le fondement d'une norme Étatique556(*).
Ce soutènement n'exclut pourtant pas cette assertion
qui est devenu un truisme dans la réflexion juridique : que le
droit et la loi n'acquièrent leurs véritables signification et
force qu'à l'instant où ils trouvent à leur disposition un
juge en vue de leur réalisation. En tant que permissions juridiques de
valeur supralégislative557(*), les droits fondamentaux ne sauraient par
définition exister sans la présence d'un organe juridictionnel
habilité à sanctionner les atteintes qui leur sont
portées558(*),
leur caractère fondamental résidant précisément
« dans l'existence d'un contrôle juridictionnel permettant de faire
prévaloir le droit sur la loi »559(*). Plus qu'un corollaire indispensable560(*), la justiciabilité se
présente, dès lors, comme un élément constitutif
des droits fondamentaux.
Le constituant congolais de 2006 se place quelque peu dans
cette ligne en établissant ce lien essentiel entre les droits
fondamentaux et la garantie juridictionnelle561(*), même si d'aucuns persistent à affirmer
que l'existence d'un tel droit est liée à son inscription dans
une norme alors que l'existence d'un mécanisme de contrôle n'est
que le garant de son effectivité »562(*). En ce même sens, Anne
Weber considère que « le ''test judiciaire'' constitue moins une
condition de l'existence des droits de l'homme que de l'efficacité
maximale de ces droits »563(*).
En somme, il est possible d'affirmer avec le professeur
Frédéric Sudre qu'« il n'y a droit [fondamental] que par
l'intervention du droit positif, lorsqu'un régime juridique est
organisé tel que le droit soit protégé par une action en
justice »564(*).
Traduction de l'idée selon laquelle la seule proclamation des droits et
libertés ne saurait suffire à en assurer l'exercice, les droits
fondamentaux, en raison leur place spécifique au sein de la
hiérarchie des normes, se présentent ainsi comme des droits
nécessairement justiciables. Indissociables de la garantie
juridictionnelle, le lien étroit qu'ils entretiennent avec le juge,
spécialement constitutionnel, conduit à ériger celui-ci en
condition déterminante de leur existence. C'est là un premier
indice du rôle privilégié du juge en matière de
protection des droits fondamentaux. Pour autant, ces derniers ne sauraient se
contenter de n'importe quel juge. Leur effectivité tient pour beaucoup
à l'existence d'une justice de qualité. Or, le
développement constant de la garantie juridictionnelle, tant en RDC que
dans des pays ciblés, s'inscrit dans cette perspective.
Magnifié par la doctrine, le juge, tel qu'il a
été souligné, est classiquement présenté
comme l'institution la mieux armée pour garantir l'effectivité
des droits fondamentaux. Or, de cette croyance exacerbée dans la figure
du juge, il en découle, trop souvent, une tendance à
l'abstraction des lacunes affectant cette forme de protection565(*).
Dans la plupart des systèmes, c'est au juge qu'est
dévolu l'essentiel de la mission de protéger les libertés
contre les atteintes susceptibles de les affecter.566(*) Le droit congolais s'inscrit
dans cette tradition, mais non sans paradoxe. Les lacunes inhérentes
à la protection des libertés par le juge, qui tiennent à
ce que celui-ci intervient presque toujours longtemps après les faits,
ont conduit à une réflexion sur les ressources susceptibles
d'apporter la protection juridictionnelle des libertés, selon diverses
modalités.567(*)
Si la protection effective des droits fondamentaux est une condition
inhérente à leur statut, il serait vain de tenter de circonscrire
ce rôle à une juridiction unique. De ce fait, l'identification du
juge des droits fondamentaux congolais trouve sa base à l'article 150 de
la constitution du 18 février 2006 qui dispose que « le
pouvoir judiciaire « le garant des libertés individuelles
et des droits fondamentaux des citoyens »568(*). Ledit pouvoir judiciaire a
été dévolu « aux Cours et Tribunaux qui sont :
la Cour constitutionnelle, la Cour de cassation, le Conseil d'État, la
Haute Cour militaire, les cours et tribunaux civils et
militaires »569(*). Les instances judiciaires sont réparties en
deux ordres de juridiction à côté de la Cour
constitutionnelle.
On examinera ainsi successivement la protection du droit de
manifester par les différents juges, judiciaire, administratif et
constitutionnel (§1).
Aussi convient-il de s'en référer à
l'oeuvre du juge pour évaluer la réalité de la protection
du droit de manifester (§3).
§1. La protection de la liberté de
manifestation : quelles garanties par le juge ?
L'organisation judiciaire actuelle de la RDC impose que nous
examinions tout à tour la protection de la liberté de
manifestation par le juge judiciaire (1), par le juge administratif (2) et par
le juge constitutionnel (3).
1. Le juge judiciaire, protecteur
de la liberté de manifestation
L'ordre judiciaire comprend les juridictions civiles et
pénales, les cours et tribunaux militaires, les tribunaux de commerce et
les tribunaux de travail. N'ayant pas figuré parmi les juridictions de
l'ordre judiciaire énumérées à l'article 6 de la
loi organique portant OFCJOJ, la place des tribunaux pour enfant demeure un
sujet de controverse à laquelle nous n'allons pas plonger dans le cadre
de cette étude.
La liberté de manifestation, parmi les droits
fondamentaux, constitue à la fois un droit-liberté et un
droit-créance. En tant qu'un droit-liberté, elle procure à
ses titulaires le pouvoir d'exprimer une opinion sous une forme
particulière ; à ce titre, elle impose une abstention
verticale et horizontale : verticalement, la manifestation ne peut
être interdite par les pouvoirs publics que dans les conditions ayant
trait au maintien de l'ordre public ; horizontalement, les atteinte
à la liberté de manifestation par tout citoyen doivent être
sanctionnées. En tant que droit-créance, la liberté de
manifestation impose aux pouvoirs publics une prestation, l'encadrement et la
sécurisation des manifestants. Ainsi, le juge répressif comme le
juge civil ont, chacun en ce qui le concerne, la charge de la protection des
droits fondamentaux.
A. Le juge pénal congolais et la protection de
la liberté de manifestation
L'exercice du droit de manifester semble être
placé dans beaucoup de régimes sous les signes du droit
pénal. La responsabilité pénale concerne tant les agents
publics que les personnes privées. Pour les cas des agents publics, les
poursuites ne sont pas automatiques. Elles sont souvent paralysées par
des privilèges de poursuite et d'autres immunités.
Il est désolant que parmi les six incriminations
prévues dans la loi, cinq visent les manifestants et une seulement vise
directement la protection du droit de manifester. L'entrave à la
liberté de manifestation est punie de sept à soixante jours de
servitude pénale lorsqu'elle consiste au refus de réception d'une
déclaration préalable par l'autorité
compétente ; fait pour quiconque de gêner, de perturber ou
d'empêcher délibérément une manifestation, les
peines variant dans ce cas de un à cinq ans de SPP et de 500.000
à 5.000.000 FC, selon les circonstances ou les auteurs570(*).
L'écriture de cette disposition appelle les
observations suivantes :
- En cas de refus de réception d'une déclaration
de manifestation, la responsabilité de l'autorité
compétente est engagée ; la question pratique qui peut se
poser est celle de savoir lequel de l'agent commis à la réception
ou de l'autorité va engager la responsabilité ? seront-ils
pris en corréïté ? Certes, l'agent qui justifie son
comportement par l'ordre de sa hiérarchie de ne pas recevoir la
déclaration n'est pas, aux termes de la loi, responsable d'entrave
à la manifestation, la loi ayant prévu la responsabilité
de l'autorité compétente et non celle du
préposé. Il en serait autrement s'il est attesté qu'aucun
ordre de ne pas recevoir n'a été intimé.
- Le législateur punit plus sévèrement le
fait de gêner, de perturber ou d'empêcher
délibérément une manifestation que le refus de
réception d'une déclaration préalable ; en effet, le
refus de réception de la déclaration étouffe la
manifestation dans l'oeuf et les auteurs commettent un abus de pouvoir
répréhensible. En outre, les peines encourues par l'auteur d'un
refus de réception de la déclaration nous semblent
dérisoires ; une amende de 100.000 ou 200.000 FC infligée
à un gouverneur n'aurait aucun effet dissuasif ou expiatoire.
- L'entrave à la manifestation relève du
Tribunal de paix, sauf lorsque les faits sont commis par les
privilégiés de juridiction.
Les privilèges de poursuites dont
bénéficient les auteurs potentiels de l'entrave à la
manifestation rendent illusoire la protection pénale de cette
liberté. Les réalités judiciaires de notre pays
renseignent que des considérations d'ordre politique militent souvent en
faveur de l'impunité. Seule une culture des droits fondamentaux
ancrée dans nos juges peut favoriser une protection pénale
efficace de la liberté.
Le juge répressif intervient également lorsqu'il
s'agit de sanctionner les comportements délinquants commis à
l'occasion des manifestations publiques.
B. La protection par le juge
civil
La responsabilité civile découlant des
manifestations publiques sera développée dans la section
suivante. Il importe cependant de préciser que ladite
responsabilité doit être engagée par les organisateurs
d'une manifestation ou par des tiers à la manifestation avec
préméditation, devant le juge judiciaire selon les principes
tirés du code civil congolais livre III. En revanche, le juge
administratif sera compétent lorsqu'il s'agit de la
responsabilité de l'administration.
2. La protection de la
liberté de manifestation par le juge administratif
La révolution opérée par la Constitution
du 18 février 2006 a favorisé l'institution d'un ordre de
juridictions administrations détachées désormais des
juridictions judiciaires dans un système d'unité de juridiction
et de spécialisation de contentieux571(*). Il existe à ce jour un ordre de juridictions
administratives constitué du Conseil d'État, des
différentes cours administratives d'appel et de différents
tribunaux administratifs572(*).
En règle générale, le juge administratif
protège les droits fondamentaux des citoyens en général
par deux procédés, le contrôle de la légalité
et la réparation du préjudice causé par un acte de
l'administration. Les deux procédés demeurent d'une grande
importance en ce qui concerne la liberté de manifestation.
A. La recherche de la
conformité légale
L'aspect le plus original de la protection des libertés
fondamentales par le juge administratif consiste dans l'annulation d'un acte
administratif illégal. Cette compétence est reconnue au juge
administratif tant par la Constitution du 18 février 2006573(*) que par la loi organique
n° 16/027 du 15 octobre 2016 portant organisation, compétence et
fonctionnement des juridictions administratives. Les trois degrés de la
juridiction administrative correspondent ainsi à l'architecture de
l'administration territoriale de la RDC construite à trois
niveaux : l'administration centrale, l'administration provinciale et
l'administration locale. Chaque niveau de juridiction a la charge de
contrôler le niveau de l'administration correspondant. Mises à
part les autres compétences leur reconnues par la constitution et les
lois, le Conseil d'État contrôle l'administration centrale, les
Cours administratives d'appel les administrations provinciales et les tribunaux
administratifs les administrations locales.
Le contrôle de la légalité implique celui
de l'application des principes prévus par la loi pour la gestion des
manifestations publiques. Il emporte donc le contrôle de la
nécessité d'une interdiction, de l'opportunité ; le
contrôle de la proportionnalité des moyens employés pour la
dispersion. Ici, la loi portant modalités d'application de la
liberté de manifestation et celle portant organisation et fonctionnement
de la police sont des références privilégiées du
contrôle de la légalité.
B. La réparation du
préjudice causé par l'administration
Lors des dispersions des manifestations, la possibilité
ou même, dans le contexte congolais, la prévisibilité des
abus susceptibles de causer des préjudices aux tiers, abus
entraînant la responsabilité civile de l'administration comme
commettant. De même, l'État engage sa responsabilité sans
faute pour des troubles découlant des manifestations publiques. C'est le
cas de la réparation du préjudice exceptionnel. Dans ce point,
nous nous focalisons sur la responsabilité découlant des actes
d'interdiction des manifestations.
Généralement la réparation du
préjudice par l'administration prend deux formes : la
responsabilité pour faute et la responsabilité sans faute ci-haut
évoquée.
La question est de savoir si les organisateurs d'une
manifestation possèdent le droit de procéder par un recours de
plein contentieux devant le juge administratif pour solliciter du juge
administratif l'annulation de la décision d'interdiction et, en
même temps, la réparation du préjudice causé elle.
Dans le cas où le juge administratif aurait annulé une
décision d'interdiction alors que la date de la manifestation est
dépassée, les organisateurs, qui auraient dépensé
temps, argent et ressources diverses pour mobiliser les manifestants, ne
peuvent être privés du droit à la réparation.
3. L'action de la Cour
constitutionnelle dans la protection de la liberté de manifestation
La Cour constitutionnelle instituée aux termes de
l'article 157 de la Constitution du 18 février 2006 exerce, selon les
termes de Paul-Gaspard Ngondankoy, une protection directe et indirecte des
droits fondamentaux.
La protection directe consiste en l'ouverture laissée
à tout citoyen de saisir cette juridiction en
inconstitutionnalité de tout acte législatif ou
règlementaire. Cette ouverture est reconnue aux alinéas 2 et 3 de
l'article 162 de la Constitution. Cette disposition permet à tout
citoyen pourvu qu'il y ait intérêt de s'en référer
à la haute juridiction en vue d'intenter un procès à tout
acte législatif (loi, ordonnance-loi, édit) ou
réglementaire qu'il estimerait contraire à la constitution. Il
s'agit ici principalement de pouvoir censurer tout acte précité
qui violerait les droits fondamentaux constitutionnels.
Si la doctrine congolaise reste encore divisée sur la
question du contrôle de constitutionnalité des actes
administratifs, la Cour constitutionnelle béninoise a maintes fois
contrôlé la constitutionnalité des actes
administratifs574(*). Il
faut ici relever que l'ouverture consacrée par le système de la
RDC est insuffisante au regard des autres systèmes
étudiés. En effet, dans le système congolais, la saisine
du juge constitutionnel contre un acte administratif n'est justifiée que
dans la mesure où ledit acte est un acte règlementaire. Il en
découle que la Cour constitutionnelle congolaise est incompétente
pour connaitre du contrôle de la constitutionnalité des actes de
portée limitée, comme par exemple la décision
d'interdiction de la manifestation de telle date organisée par tel parti
politique, cet acte n'étant pas un acte règlementaire. Il en est
autrement lorsque la décision consisterait en une interdiction de toutes
les manifestations limitée ou non dans le temps, auquel cas on serait en
présence d'un acte règlementaire censurable par le juge
constitutionnel sur pied de l'article 162, alinéa 2. Dans le
système béninois et espagnol notamment, la Cour constitutionnelle
et le tribunal constitutionnel peuvent être saisis contre un acte
administratif non règlementaire. Ainsi, la Cour constitutionnelle
béninoise a été saisi et s'est prononcé contre
l'arrêté n° 8/0056/DEP-LIT/SG/SCAD/SA du 13 mars 2018 portant
suspension de toutes activités relatives à la sortie des
«égoun-goun?? dans le département du Littoral575(*).
Toujours dans le cadre de la protection directe des droits
fondamentaux, l'article 49 de la loi organique portant organisation et
fonctionnement de la Cour constitutionnelle, le procureur général
près cette Cour la saisit d'office pour inconstitutionnalité des
actes législatifs et règlementaires ainsi que les traités
internationaux dûment ratifiés et publiés au Journal
officiel, lorsque ces actes portent atteinte aux droits fondamentaux de la
personne humaine ou aux libertés publiques.
La Cour constitutionnelle peut protéger le droit de
manifester indirectement par diverses autres compétences qui lui ont
été reconnues. Cette protection est indirecte en ce sens que les
droits fondamentaux ne constituent pas l'objet de l'instance, mais sa
conséquence. Il en est ainsi du contrôle de la
constitutionnalité des textes juridiques sur saisie des autorités
de la République. Dans la mesure où les droits fondamentaux sont
consacrés par la constitution, leur violation par un texte entraine
l'annulation dudit texte et le droit fondamental visé en sort mis
à l'abri des atteintes, donc protégé.
Le contentieux électoral et référendaire
et le règlement des conflits de compétence participent tout aussi
de la protection des droits fondamentaux constitutionnels en ce que le premier
garantit la jouissance des droits politiques les plus sacrés et le
second protège le droit au juge consacré à l'article 19 de
la Constitution. La Cour constitutionnelle, comme juge pénal du
président de la République et du premier ministre, sanctionne les
actes constitutifs d'infractions politiques et des infractions de droit commun
commises par ces autorités. L'infraction de haute trahison comporte
entre autres comme élément constitutif le fait pour ces
autorités d'être reconnues auteurs, co-auteurs ou complices de
violations graves et caractérisées des Droits de Homme576(*).
L'arsenal juridique congolais est amplement
équipé pour assurer la protection de la liberté de
manifestation par le juge.
Reste à vérifier si cette protection est
réelle dans la dynamique jurisprudentielle d'ici et d'ailleurs.
§2. La dynamique
jurisprudentielle de protection de la liberté de manifestation
La seule organisation de voies de recours au juge, aussi
perfectionnées soit-elles, ne saurait suffire pour conclure à
l'effectivité de la protection juridictionnelle des libertés
fondamentales. Car, à la vérité, celle-ci dépend
tout autant, si ce n'est plus, de l'attachement du juge aux droits de la
personne humaine. Or, le discours arboré par le juge laisse
transparaître que chacune de ses décisions s'inscrit « [...]
dans la logique d'une jurisprudence protectrice et la jurisprudence dans la
perspective d'ensemble de l'histoire du progrès continu des droits et
libertés ».577(*) C'est ainsi que, en Espagne, le Tribunal
Constitutionnel a gagné ses lettres de noblesse en s'érigeant,
dès les premières années de fonctionnement du
régime démocratique, en véritable gardien des droits
fondamentaux consacrés par le titre premier de la Constitution578(*). En atteste sa jurisprudence
du 14 juillet 1981, confirmée à plusieurs reprises, selon
laquelle au sein de l'ordonnancement juridique espagnol la liberté et la
démocratie ne sauraient être dissociées. Ou, encore, les
nombreuses décisions affirmant que l'ensemble de l'ordonnancement
juridique doit être interprété conformément aux
valeurs constitutionnelles supérieures prévues par l'article 1.1
de la Constitution espagnole que sont la « liberté », la
« justice », « l'égalité » et le «
pluralisme politique ».
Afin d'appréhender plus amplement cet attachement du
juge aux droits de la personne humaine, deux observations liminaires
méritent d'être apportées.
En premier lieu, il convient de préciser que les
modalités jurisprudentielles de protection des droits fondamentaux
divergent sensiblement selon le système juridique
considéré. En Espagne notamment, la jurisprudence
développée par le juge trouve un fondement solide à
travers un ensemble de règles constitutionnelles « de
compétence, de procédure ou de fond qui doivent jouer dès
lors que les droits constitutionnels sont en cause ». En France, en
revanche, l'indifférence du texte constitutionnel à la notion de
droits fondamentaux se répercute dans une large mesure sur le terrain du
régime juridique applicable à cette catégorie de droits.
Dans un tel contexte, c'est le juge lui-même qui, la plupart du temps,
précise ce régime juridique en vue d'asseoir la suprématie
des droits fondamentaux au sein de l'ordre juridique interne.
En second lieu, l'on doit considérer l'ampleur de la
jurisprudence relative à la protection des droits fondamentaux. D'une
part, la priorité sera donnée à la jurisprudence
constitutionnelle compte du fait que les droits fondamentaux, en tant que
droits de valeur supralégislative, intéressent essentiellement la
juridiction constitutionnelle. D'autre part, parce qu'une étude de la
jurisprudence constitutionnelle spécifique à chaque droit
fondamental conduirait à sacrifier l'analyse au profit d'une
exhaustivité présentant finalement que peu
d'intérêt579(*), seront privilégiées les grandes
lignes de ce mouvement jurisprudentiel finalement très peu prolixe en
RDC.
En RDC, le comportement des juges dans la gestion de la
liberté de manifestation dénote une carence inquiétante de
la culture des droits fondamentaux. Les violations récurrentes et
systématiques des garanties procédurales par les acteurs
judiciaires sont devenues pathologiques en RDC. En ce qui concerne la
liberté de manifestation, la gestion judiciaire des manifestations des
mouvements citoyens en donnent une macabre illustration. Ceux-ci sont victimes
d'une attitude des pouvoirs publics consistant à
« l'utilisation de cadres juridiques, de stratégies et
d'actions politico-judiciaires dans l'intention d'appliquer un traitement
d'illégitimité ou d'illégalité » à la
défense, la promotion et la protection des droits humains. L'objectif
final étant d'agresser les Défenseurs des Droits de l'Homme et/ou
d'entraver leur travail580(*). Le cas de la Lucha expose clairement la
manière dont les pouvoirs et les autorités publiques cherchent
à restreindre la capacité d'action du mouvement, soit par la
criminalisation de ses membres et par la création d'un discours
stigmatisant le mouvement et visant à empêcher leurs actions de
protestation et de défense des droits et des libertés581(*).
Il apparaît clairement que les pouvoirs publics,
principalement des branches de pouvoir exécutif et législatif,
sont l'acteur principal de la criminalisation des membres de la Lucha, en
créant des normes légales pour obstruer le travail de la Lucha et
d'autres mouvements citoyens.
Sur le plan spécifique du droit pénal, les
militants de la Lucha sont soumis à une criminalisation primaire50
liée aux normes légales existantes dans le Code Pénal
Congolais51. Dans la plupart des cas, des militants de la Lucha ont
été poursuivis pour les infractions suivantes se trouvant dans le
Code Pénal : incitation à la révolte (Art 135 bis),
association des malfaiteurs (Art 156), outrage aux autorités (Art 136),
rébellion (Art 133), destruction méchante (Art 110). Moise
Monidela, le bâtonnier Muyambo, président national du parti
politique SCOD et tant d'autres ont payé le prix de la liberté de
manifestation.
Il faut soutenir ici la position prise par le Tribunal de paix
de Kananga, qui protège le droit de manifester en refusant de condamner
les membres d'un mouvement citoyen et pour des motifs très
démocratiques.
Le 23 janvier 2018, le Tribunal de paix de Kananga (Kasaï
Central) a acquitté 10 militants des mouvements citoyens Lucha, Debout
congolais, bâtissons et Filimbi, arrêtés le 29
décembre 2017 en préparation d'un rassemblement pacifique. Le
Tribunal a motivé sa décision en invoquant les dispositions de
l'article 26 de la Constitution, garantissant le droit à la
liberté de manifestation et consacrant un régime de notification,
et non d'autorisation préalable. Le Tribunal a renforcé sa
décision en appliquant l'article 28 de la Constitution consacrant le
droit de refuser d'exécuter tout ordre manifestement illégal
reconnu à tout individu et à tout agent public.
Les autorités n'ont pas défini le contexte qui
aurait pu justifier les interdictions de manifester, ni le cadre légal
de l'intervention nécessitant l'emploi cumulé des services de
sécurité et des forces de défense, ni même leurs
relations de subordination. Au contraire, pour appliquer les interdictions de
manifester imposées à l'opposition et/ou aux organisations de la
société civile, le déploiement des services de
sécurité et des forces de défense a été
ordonné dans le but d'intimider ou de réprimer les
manifestations.
La situation se révèle autre au Bénin.
L'exemple de la décision DCC 03-134582(*) du 21 août 2003 est révélateur
de l'apport du juge constitutionnel béninois à la protection de
la liberté de manifestation. Le requérant devant la Cour,
Monsieur Pierre Badet exposait que, par Lettre n° 287/CUC/CAB-SP du 29
avril 2002, le chef de la Circonscription urbaine de Cotonou (CCUC) a interdit
la marche pacifique que se propose d'organiser le parti «La Renaissance du
Bénin » (RB). Il évoquait en guise de motif que « les
expéditeurs de la lettre de déclaration ne forment pas un groupe
constitué » et que « l'un des signataires avait tenté
d'organiser une marche malgré l'interdiction de celle-ci ». La Cour
a tiré de la Lettre n° 268/CUC/SG/SGA/DAPSC-C du 23 avril 2002 qui
interdisait ladite marche pacifique du RB l'idée suivante :
l'auteur considérait que dans la lettre de déclaration, les
termes utilisés « ne laissent pas présager qu'il s'agit
d'une marche pacifique, mais plutôt d'une déclaration de
guerre que l'autorité investie des pouvoirs de police doit
pouvoir prévenir et prendre les décisions qui s'imposent »
; que le chef de la Circonscription urbaine de Cotonou conclut que lesdits
termes laissent entrevoir « des troubles à l'ordre public
que ne sauraient contenir les forces de sécurité publique...
» et qu'il lui est revenu de « sources concordantes et dignes de foi
que les manifestants se sont réellement apprêtés pour
troubler l'ordre public... ». Après confrontation d'arguments, la
Cour a conclu que l'analyse de la correspondance de la Renaissance du
Bénin ne révèle aucun élément susceptible
de faire craindre des troubles à l'ordre public ; que les raisons
invoquées sont sans rapport avec l'exception d'ordre public et
l'effectif suffisant d'agents de Force de sécurité publique
disponible ; que dans ces conditions, la Cour doit faire droit
à la demande du requérant en déclarant contraire
à la Constitution la Lettre n° 287/CUC/CAB-SP querellée.
Le juge constitutionnel espagnol est, d'ailleurs, allé
jusqu'à indiquer, de manière assez précise, que des
difficultés de circulation ne pourront justifier une restriction de la
liberté de manifestation lorsque des mesures préventives
s'avèrent impossibles à adopter ou sont impuissantes à
atteindre le but fixé par exemple, parce qu'elles ne permettent pas
l'accès à la zone concernée, ou sont
disproportionnées par exemple, lorsque les itinéraires
alternatifs envisageables supposent des retards ou des détours
irraisonnables »583(*). Dans le même sens, toujours à propos
de l'interruption du trafic automobile du fait de l'organisation d'une
manifestation, le Tribunal constitutionnel a jugé qu'une telle
perturbation ne pouvait pas être à elle seule de nature à
justifier une interdiction car elle n'est pas assimilable à une atteinte
à l'ordre public mettant en danger des personnes ou des biens. Par
conséquent, la référence à la seule perturbation du
trafic automobile, sans autre détail, c'est-à-dire sans
référence ni démonstration allant au-delà de la
pure et simple constatation d'une interruption de la circulation pendant 45
minutes est insuffisante à justifier une atteinte à la
liberté de manifestation, car cette perturbation est, « en quelque
sorte, accessoire »584(*).
En France, le juge a estimé qu'« une
manifestation ne peut être interdite que si elle constitue une menace
pour l'ordre public. Ce motif d'interdiction est le seul admis, une
manifestation ne pouvant pas être interdite pour un motif autre que le
risque d'atteinte à l'ordre public. Ainsi, le fait qu'une manifestation
(d'opposition à la visite d'un chef d'État étranger)
puisse « porter atteinte aux relations internationales de la
République » ne constitue pas un motif légal585(*). A l'occasion de la visite
du chef de l'État chinois en France, le préfet a
considéré par un arrêté que la tenue d'une
manifestation allait impacter négativement sur les relations
diplomatiques de la France et l'a interdite. Le Conseil d'État a
affirmé « que si l'arrêté litigieux était
également motivé par le fait que les manifestations
envisagées pouvaient "porter atteinte aux relations internationales de
la République", un tel motif, qui ne fait pas référence
à des risques de troubles à l'ordre public, n'était pas,
en lui-même, de nature à justifier l'arrêté litigieux
». De même, le fait que des fonctionnaires risquent de
méconnaître leurs obligations déontologiques à
l'occasion d'une manifestation ne peut être pris en compte pour interdire
celle-ci dans la mesure où cette considération est
étrangère à l'ordre public. La Cour d'appel de Paris a
considéré que « que si les arrêtés
litigieux étaient également motivés par le fait que la
manifestation envisagée était "susceptible de donner lieu
à des actes et propos de nature à porter le discrédit sur
la fonction policière", un tel motif tiré de la
méconnaissance éventuelle par les fonctionnaires des services de
police de leurs obligations statutaires ne pouvait fonder légalement les
arrêtés pris par l'autorité administrative investie des
pouvoirs de police en vue d'assurer la protection de l'ordre public
»586(*).
Il est dès lors communément admis que les
risques de troubles de l'ordre public constitue le seul motif d'interdiction
d'une manifestation publique, sans omettre que l'exercice de cette
liberté peut se traduire par des actes qui appellent la
responsabilité des acteurs.
Section
3. Le régime de responsabilité découlant de la
liberté de manifestation en droit comparé
Les conditions posées pour la régularité
de la manifestation ainsi que l'existence des sanctions pénales, civiles
et administratives infligées en cas de contravention à la loi
traduisent clairement le souci du législateur d'endiguer l'exercice de
la liberté de manifestation afin d'éviter qu'elle vire au
libertinage. Un équilibre délicat a donc été
recherché entre la liberté et l'autorité, entre le
régime libéral et le régime restrictif, bref, entre
l'individu et l'État, dans un pays où, somme toute, la conscience
citoyenne et démocratique n'est que très faiblement ancrée
dans les moeurs. Cet équilibre se réalise par la mise en jeu de
la responsabilité des acteurs. C'est ce que témoigne la pratique
qui en est faite depuis l'existence dudit dispositif juridique.
Le concept « responsabilité » est
ici usité au sens de « l'obligation de répondre de son
acte ou de son fait ». Dans la théorie générale
de droit, il existe une diversité des responsabilités :
pénale, civile (laquelle peut être contractuelle ou
délictuelle), politique, sociale, disciplinaire, professionnelle,
administrative et même internationale.
Dans le contexte précis de cette étude, seules
les dimensions de la responsabilité pénale (§1), civile
(§2), disciplinaire et politique (§3) seront prises en compte.
§1. Mise en oeuvre de la responsabilité
pénale
La liberté absolue est une liberté impossible.
Toute liberté est sujette à des limitations et à des
restrictions qu'impose la coexistence des membres d'un groupe social. Ainsi,
à l'occasion de l'exercice d'un droit, fut-il fondamental, certains
comportements attentatoires à l'ordre public sont susceptibles d'appeler
une réponse pénale de la société dans la mesure
où lesdits comportements sont réprimés par la loi
pénale.587(*) De
même, sont réprimés certains comportements tendant à
obstruer à la pleine jouissance du droit de manifester par ses
titulaires.
Pour sanctionner les normes qu'elle édicte, la
puissance publique a notamment recours à un système
répressif. Le droit répressif comporte les normes ayant pour
fonction de « punir » le non-respect d'une norme primaire588(*) ; Selon Jacques
Mourgeon, la punition permet ainsi d'éviter la violation d'une norme,
« soit a priori, par l'effet intimidant qu'elle produit, soit a
posteriori, en réduisant les possibilités de la renouveler
»589(*). Le droit
répressif s'inscrit en cela dans la perspective plus
générale des sanctions, dans la mesure où sa fonction de
punition, in fine de dissuasion, contribue au respect de la norme590(*). Par conséquent, pour
ce qui concerne les obligations imposées aux personnes
privées591(*),
les sanctions répressives sont une condition juridique de
l'effectivité.
La responsabilité pénale en matière de la
liberté de manifestation peut être envisagée tant dans le
chef des manifestants et organisateurs qu'au niveau des autorités
administratives impliquées dans le circuit de son exercice. De ce point
de vue, elle mérite d'être examinée sous deux angles, celui
du droit pénal ordinaire comme celui du droit pénal
administratif592(*).
1. Les infractions visant les
manifestants
En droit français, la répression concerne la
participation délictueuse à un attroupement ou manifestation, les
entraves à l'exercice des libertés d'expression, du travail,
d'association, de réunion ou de manifestation. L'entrave à ces
libertés constitue une infraction plurale régie par l'article
431-1 à 2 du Code pénal. La sanction infligée est d'un an
d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende593(*). Lorsque le fait est aggravé par le recours
à des « coups, violences, voies de fait, destructions ou
dégradations », l'auteur subira le triple des peines
d'emprisonnement et d'amende594(*).
Les personnes physiques coupables de l'une des infractions
prévues par l'article 431-1 parmi lesquelles l'entrave à la
liberté de manifestation encourent également les peines
complémentaires suivantes :
1) L'interdiction des droits civiques, civils et de famille,
suivant les modalités prévues par l'article 131-26595(*) ;
2) L'interdiction, suivant les modalités
prévues par l'article 131-27596(*), d'exercer une fonction publique ou d'exercer
l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à
l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise
;
3) L'interdiction de détenir ou de porter, pour une
durée de cinq ans au plus, une arme soumise à
autorisation597(*).
En ce qui concerne la participation délictueuse,
après avoir défini l'attroupement comme « tout
rassemblement de personnes sur la voie publique ou dans un lieu
public susceptible de troubler l'ordre public », le
législateur français punit d'un an d'emprisonnement et de 15 000
€ d'amende, « le fait, pour celui qui n'est pas porteur d'une
arme, de continuer volontairement à participer à un attroupement
après les sommations »598(*).
Deux constats se dégagent de cette disposition. En
premier lieu, cette définition légale de l'attroupement est
critiquable. Tout rassemblement de personnes sur la voie publique ou
dans un lieu public susceptible de troubler l'ordre public ne peut pas
être considéré comme un attroupement. Toute manifestation
est de nature à « troubler » dans une certaine
mesure l'ordre public. L'itinéraire emprunté par les manifestants
demeurera certainement impropre à la circulation, obligeant ainsi les
citoyens à choisir de voies de communication alternatives ; en cas
de rassemblements sédentaires, les lieux occupés seront salis,
etc. Ces « troubles » de l'ordre public ne transforment
pourtant pas ce rassemblement en un attroupement. De cette définition
légale de l'attroupement se pose la question de savoir si une
manifestation, dès lors qu'elle est interdite, ou qu'elle se
déroule sans autorisation préalable, ne devient pas ipso facto un
attroupement. Les juridictions répondent par la négative, en
considérant, par exemple, qu'un rassemblement calme et pacifique,
même s'il est susceptible de gêner la circulation, ne peut
être qualifié d'attroupement. L'attroupement devrait se
définir par sa spontanéité.
En second lieu, la simple participation à un
attroupement n'est pas constitutive d'infraction, encore faudrait-il que cette
participation soit délictueuse. Le caractère délictueux de
la participation consiste pour celui qui n'est pas porteur d'arme dans le fait
de demeurer sourd à deux sommations de se disperser restées sans
effet adressées dans les conditions et selon les modalités
prévues par l'article L. 211-9 du code de la sécurité
intérieure599(*).
C'est lorsque la provocation directe a des attroupements est
suivie d'effets que la peine peut être réévaluée au
paiement d'une somme s'élevant à 100.000 euros.
Quant à la responsabilité pénale, elle
repose, pour l'essentiel, sur six infractions prévues et punies par la
loi de la manière suivante :
En droit français, issu de la loi du 10
vendémiaire en IV, modifiée par la loi municipale du 05 avril
1884, puis par celle du 16 avril 1914 ; ce régime,
énoncé aux articles 133-1 à 133-8 du Code des communes,
rendait ces dernières « civilement responsables des
dégâts et dommages résultant de crimes et délits
commis à force ouverte ou par violence. Ces crimes sont donc
perpétrés sur leur territoire, par des attroupements ou
rassemblements armés ou non armés, soit envers des personnes,
soit contre des propriétés publiques et
privées », la demande d'indemnité relevant de la
compétence judiciaire. Soulignons cependant que les rassemblements de
jeunes, pour la plupart issus desdites cités, sont
particulièrement la cible de l'activisme législatif pénal
de ces toutes dernières années avec la création
d'infractions telles que le délit d'embuscade (art. 222-15-1 CP, loi du
5 mars 2007) ou d'une variante de l'association de malfaiteurs aux contours
encore plus imprécis puisque une « participation temporaire »
suffit (art. 222-14-2 CP, loi du 2 mars 2010). Curieuse association,
baptisée groupement et tenant autant de la réunion que de
l'attroupement, érigée en un délit inséré
dans le livre II du code pénal relatif aux infractions contre les
personnes600(*).
Un grand nombre de législations spéciales ont
été modifiées ou enrichies de nouvelles interdictions
administratives pénalement sanctionnées ces dernières
années : code rural (traque de chiens présumés dangereux)
ou loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des
gens du voyage dont certaines dispositions ont reçu les honneurs du code
pénal (art. 322-4-1 CP). Mais aussi réglementation serrée
relative aux activités commerciales sur la voie publique, dont les
ventes dites « à la sauvette » ; la loi du 18 mars 2003 pour
la sécurité intérieure a érigé en
délit, passible d'une amende de 3750 € d'amende, le non-respect
d'un arrêté de fermeture administrative visant ces petits points
de ventes mobiles de restauration rapide où sont assemblés et
préparés sur place des aliments pour remise immédiate au
consommateur (art. L. 2215-6 et L. 2512-14-1 du code général des
collectivités territoriales). Constitue une contravention de
4e classe, « le fait, sans autorisation ou déclaration
régulière, d'offrir, de mettre en vente ou d'exposer en vue de la
vente des marchandises ou d'exercer toute autre profession dans les lieux
publics en violation des dispositions règlementaires sur la police de
ces lieux ». Seule échappe aux foudres administratives et
pénales la vente du fragile muguet pendant la journée du
1er mai.
L'attroupement armé fait l'objet d'une
répression plus sévère, puisque la provocation directe
à ce type d'attroupement est incriminée en tant que telle (art.
431-6 al.1 CP) ; suivie d'effet elle fait encourir une peine d'emprisonnement
de 7 ans et une amende de 100 000 €. De plus, outre les traditionnelles
peines complémentaires touchant aux armes, sont encourues les
interdictions des droits civiques, civils et de famille, de séjour, et
d'interdiction du territoire français même à titre
définitif.
L'exercice de ces grandes libertés publiques est un
intérêt protégé pénalement. Comme
relevé ci-haut, le fait d'entraver cet exercice, de manière
concertée et en usant de menaces, est un délit puni d'un an
d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende (art. 431-1CP). Les peines sont
portées à trois ans d'emprisonnement et 45 000 € d'amende en
cas de violences contre les personnes ou de destructions et dégradations
de biens. Ensuite, des incriminations spécifiques correspondent à
l'absence de respect des formalités administratives (manifestation
illicite), à un exercice s'accompagnant d'actes délictueux
(participation délictueuse à une manifestation ou à une
réunion publique ou à un attroupement) ou encore venant troubler
la tranquillité publique et empêchant l'exercice d'autres droits
ou libertés (entrave à la circulation). Ces incriminations se
trouvent aussi bien dans le code pénal que dans des lois annexes et leur
inventaire n'est pas toujours aisé. En outre, elles se doublent
d'interdictions administratives, souvent préfectorales, dont la
violation est pénalement sanctionnée601(*).
L'organisateur commet un délit s'il ne déclare
pas la manifestation qu'il organise, ou s'il fait une fausse déclaration
(par exemple sur la date ou l'itinéraire) ou s'il poursuit la
préparation d'une manifestation interdite. Par contre, il n'y a, pour
celui-ci qui n'a pas organisé la manifestation, aucun délit
à participer à une manifestation quand bien même celle-ci
n'aurait pas été déclarée, voire aurait
été interdite (la jurisprudence est constante), et tout du moins
tant que la force publique n'enjoint pas à se disperser602(*).
La manifestation illicite (art. 431-9 du Code Pénal
français), punie de 6 mois d'emprisonnement et de 7500 € d'amende,
concerne les organisateurs de la manifestation. Soit ces derniers auront omis
de faire une déclaration préalable ; soit ils auront passé
outre une interdiction de la manifestation ; soit ils auront fait une
déclaration incomplète ou inexacte de nature à tromper sur
l'objet ou les conditions de la manifestation. Participer à une
manifestation autorisée, ou se trouver aux abords de cette
manifestation, peut, depuis le décret du 19 juin 2009, constituer une
contravention de 5e classe ; il suffit pour cela d'avoir
dissimulé volontairement son visage afin de ne pas être
identifié dans des circonstances faisant craindre des atteintes à
l'ordre public (art. R. 645-14 CP). A bas les « capuches » et autres
foulards, devenus des signes distinctifs des présumés «
casseurs » ! Bon exemple de prévention répressive603(*).
En droit congolais, le respect des droits de l'homme et des
libertés fondamentales consacrés dans la Constitution s'impose
aux pouvoirs publics et à toute personne604(*). Appliquée à
la liberté de manifestation, cette disposition doit être comprise
comme imposant double abstention, verticale et horizontale : les
interdictions, les restrictions et la dispersion des manifestations
régulières par les agents de l'ordre ne doivent se faire que
selon les limites strictes et conformément à la règle de
mesure ; les contre-manifestations ou d'autres comportements
orchestrés dans l'intention d'entraver la bonne tenue des manifestations
doivent être interdites et réprimées pénalement, par
les organes étatiques qui ont la charge de protéger les droits
fondamentaux de ses citoyens.
2.
L'entrave à la liberté de manifestation
En droit français, la loi n° 107 sur la
répression des manifestations illicites incrimine les entraves à
l'exercice de liberté de manifestation. Ses articles 431-1 et 431-2 en
donne l'économie. Il en est de l'article 431-1 qui considère le
fait d'entraver, d'une manière concertée et à l'aide de
menaces, l'exercice de la liberté d'expression ; du travail [...]
ou d'entraver le déroulement des débats d'une assemblée
parlementaire est puni d'une amende de 15000 euros. Cette disposition ajoute
dans son deuxième alinéa un autre aspect lié à la
violence à travers des voies de fait, des coups et blessures, des
destructions et dégradations. La violence aggrave ainsi la peine
à la hauteur de trois ans de servitude pénale et 45000 euros.
Cette disposition concerne un groupe ou plusieurs personnes agissant de
manière concertée.
C'est l'article 431-2 qui punit individuellement ce
comportement. Cette disposition stipule : « Les personnes
physiques coupables de l'une des infractions prévues par l'article 431-1
encourent également des peines complémentaires suivantes :
- L'interdiction des droits civiques, civils et de famille,
suivant les modalités prévues par l'article 131-26 ;
- L'interdiction suivant les modalités prévues
par l'article 131-27, d'exercer une fonction publique ou d'exercer
l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à
l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a
été commise ;
- L'interdiction de détenir ou de porter, pour une
durée de cinq ans au plus, une arme soumise à
autorisation ».
3.
S'agissant des organisateurs et des manifestants
En droit français la responsabilité
pénale des manifestants se fonde sur l'article 431-9 de la loi du 22
juillet 1992 portant réforme du Code pénal qui
stipule : « constitue le délit de manifestation
illicite l'organisation d'une manifestation interdite ou même non
déclarée, mais aussi le fait d'y participer avec une
arme »605(*).
En droit congolais, le fait de continuer volontairement une
manifestation violente après trois sommations légales, qui est
puni de un à trois ans de SPP et d'une amende de 500.000 à
3.000.000 Franc congolais ou de l'une de ces peines seulement606(*).Le fait de participer
à une manifestation avec arme ou de continuer volontairement à y
participer avec arme après trois sommations légales, puni, selon
le cas, de deux à cinq ans de SPP et d'une amende de 2.000.000 à
5.000.000 Francs congolais et de trois à dix ans de SPP + une amende de
3.000.000 à 10.000.000 Francs congolais ou de l'une de ces peines
seulement607(*).
Le fait d'organiser une manifestation sur les voies publiques
ou en plein sans faire de déclaration préalable est puni en droit
congolais. Il en va aussi du fait d'organiser une manifestation sur les voies
publiques ou en plein en violation de la décision de concertation
convenue avec l'autorité administrative ainsi que. Un autre aspect de la
pénalisation du droit de manifester tient sur le fait d'établir
une déclaration préalable incomplète ou inexacte de nature
à tromper sur l'objet de la manifestation ou sur les conditions de la
déclaration préalable. Ces trois faits distincts sont punis de un
à six mois de SPP et d'une amende de 100.000 à 500.000 Francs
congolais608(*).
Cette gamme d'infractions ne satisfait guère Mfuamba
Lobo qui penche pour la responsabilité pénale
renforcée609(*).
§2. La responsabilité civile découlant des
manifestations publiques
La tenue des manifestations publiques est susceptible de
causer, tant soit peu, des dommages aux membres du groupe social, lesquels
peuvent résulter des différents acteurs desdites manifestations
(les manifestants ou les forces de l'ordre). Le régime de
responsabilité civile diverge cependant selon que les dommages
causés aux personnes physiques ou morales résultent des faits de
l'administration de ses préposés donc ou des manifestants
eux-mêmes.
1. La
responsabilité civile de l'État des dommages causés par
les manifestants
La responsabilité civile de l'État ou des
pouvoirs publics a été pendant longtemps dominée par les
principes de droit public dont notamment la séparation des pouvoirs pour
la simple raison que l'étude de cette question de droit était
rattachée au droit constitutionnel et au droit administratif. Depuis le
5 novembre 1920, la Cour de Cassation belge610(*) a fait rentrer sous l'empire du droit civil
l'État qui tentait constamment d'en sortir et de ne pas être
régie par lui611(*).
2. Justification de la
responsabilité civile de l'État
Face aux risques sociaux que constituent les attroupements et
rassemblements sur la voie publique - on rappellera que selon l'article 431-3
du code pénal français, « constitue un attroupement
tout rassemblement de personnes sur la voie publique ou dans un lieu public
susceptible de troubler l'ordre public » le législateur a
souhaité une responsabilité collective assumée par
l'État. Cette définition du législateur français
expose le flanc à la critique. Tout rassemblement dans la voie publique
est de nature à troubler l'ordre public. Il obligera naturellement les
paisibles citoyens à changer d'itinéraire, des slogans
accompagnant l'événement entraineront à coup sûr des
pollutions sonores, etc. L'attroupement devrait être défini par sa
spontanéité. Avant que la loi du 22 juillet 1992 portant
réforme du Code pénal ne définisse enfin les notions
d'« attroupement » et de « rassemblement », les juges
judiciaires tout d'abord, administratifs ensuite après 1986 avaient
défini les notions susmentionnées et, postérieurement
à cette loi, le précisent encore, à l'aide des
caractères inorganisé, spontané, de l'explosion de
violence collective, quelles qu'en soient les causes (politiques, religieuses,
socio-professionnelles ou même ludiques) ou le lieu de déroulement
(voie publique, voie privée ouverte au public). Toutefois, la
responsabilité de l'État ne sera engagée que sous
certaines conditions.
3. Les conditions de la
responsabilité civile de l'État
Les caractères évoqués ci-haut excluent
les dommages résultant d'attentats, d'actes isolés ou
d'opérations de commando préméditées , encore que
la distinction ne soit pas toujours évidente, les dommages
résultant d'occupation de locaux par des grévistes entrant le
plus souvent dans le champ d'application de la loi ; l'autre
élément à prendre en compte est le caractère
prévisible (l'autorité de police aurait dû prendre ses
précautions).
A titre de conditions de la responsabilité, l'on doit
retenir le lien de causalité, direct et certain, entre les crimes ou
délits perpétrés à cette occasion et le dommage
allégué ; le nombre de personnes concernées, même
si, depuis quelque temps, le juge paraît moins exigeant, se contentant du
caractère public, non contesté, de l'attroupement et du lien
direct de causalité susmentionné.
La mise en oeuvre de ce régime spécial est
toutefois très encadrée et subordonnée à la
réunion de quatre conditions cumulatives : l'existence d'un
attroupement ou d'un rassemblement, c'est-à-dire un groupe agissant de
manière collective et spontanée, la commission d'un crime ou d'un
délit au sens pénal ; l'usage de la violence ou de la force
ouverte ; un préjudice direct et certain.
En droit congolais, cette tentation n'est pas moins
présente, du moins à lire le texte qui régit
spécialement la responsabilité civile des pouvoirs publics en cas
de trouble. Dès lors, il devient indiqué d'examiner les deux
régimes juridiques. En effet, la réparation des dommages
causés par les troubles (émeutes, pillages, grèves et
attroupements) peut être envisagée soit selon le droit commun de
la responsabilité civile (articles 258 à 260 du code civil livre
III), soit selon le régime spécifique de la responsabilité
des pouvoirs publics en cas de troubles.
En France, le régime de responsabilité à
raison des dommages résultant d'attroupements et rassemblements est
celui de la responsabilité sans faute de l'État, désormais
codifié à l'article L. 211-10 du code de la
sécurité intérieure : « L'État est
civilement responsable des dégâts et dommages résultant des
crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des
attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre
les personnes, soit contre les biens. Il peut exercer une action
récursoire contre la commune lorsque la responsabilité de
celle-ci se trouve engagée ».
Le principe posé en droit congolais est que
l'État est civilement responsable des dégâts et dommages
causés aux personnes et à leurs biens par quiconque lors d'une
manifestation déclarée, quitte à ce qu'il use de son
action récursoire contre les organisateurs612(*). Pour les juristes
formés à l'école du Droit civil, il s'agit là d'une
exception notable au sacrosaint principe de la responsabilité civile
individuelle posé par l'article 258 du Code civil, livre III, et qui ne
se justifie ici que par des considérations d'ordre public qui entourent
la liberté de manifestation.
La règlementation introduit cependant une limite,
mieux, une condition préalable pour que la responsabilité civile
de l'État soit retenue : la manifestation en cause doit avoir
été préalablement déclarée
conformément aux exigences rappelées plus haut. C'est ce que
prévoit implicitement, l'alinéa 1er de l'article
21 en édictant que « L'État est civilement
responsable des dégâts et dommages causés aux personnes et
à leurs biens lors d'une manifestation préalablement
déclarée »613(*).
C'est là que réside, pour les organisateurs
d'une manifestation, l'intérêt de la déclaration
préalable614(*).
Celle-ci n'est pas qu'un devoir imposé par la loi ; c'est aussi une
garantie contre les risques encourus en cas de dégâts et de
dommages provoqués par la manifestation. Car, comme le précise la
loi, en cas de non-déclaration de la manifestation ou dans d'autres cas
à préciser (sic), cette responsabilité civile incombera
aux organisateurs615(*).
Il y a là, donc, un régime de transfert de responsabilité
de l'État vers les organisateurs de la manifestation. En dehors de cette
hypothèse cependant, la responsabilité civile de l'État
demeure de principe, pourvu que la manifestation publique ait été
préalablement déclarée616(*).
Selon notre appréhension, ce conditionnement est
sous-tendu par l'idée qu'il n'est pas raisonnable de reprocher à
l'administration de n'avoir pas encadré une manifestation dont elle
ignorait complètement l'organisation ou la tenue. Ce fondement est
pourtant fragile : en sa qualité de garante de l'ordre public ayant
à sa disposition les services de sécurité617(*) et de renseignement,
l'administration est censée, sinon anticiper, s'enquérir des
faits et évènements ayant une incidence sur l'ordre public. A ce
sujet il a été jugé que « l'administration
(pouvoirs publics) commet une faute toutes les fois qu'elle manque à son
devoir général de prudence que l'administré est en droit
d'attendre d'une administration normalement diligente (...). Elle est en faute,
pour avoir omis de prendre les mesures nécessaires destinées
à éviter que se produise une situation préjudiciable,
qu'elle est chargée d'empêcher »618(*).
Qu'en est-il de la responsabilité civile de
l'État pour des dommages causés lors d'une manifestation qui,
bien que préalablement déclarée, a été
interdite et que les manifestants ont bravé l'interdiction ?
L'administration est-elle en droit de tirer prétexte de la mesure
d'interdiction pour décliner toute responsabilité ? Nous
parions pour la négative pour des raisons évoquées
précédemment. D'ailleurs, pour les cas des manifestations
interdites, l'inattention des pouvoirs publics est inexcusable au motif
qu'ayant été informée, l'administration manquera
cruellement à ses devoirs si elle ne prend pas les précautions
nécessaires pour faire respecter la décision d'interdiction ou,
en cas de tenue de la manifestation interdite, pour prévenir les
débordements.
Retournant au droit français, on doit noter que la
responsabilité sans faute de l'État peut ainsi être mise en
cause pour des dommages résultant des crimes et délits commis,
à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements
armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les
biens. Néanmoins, sa mise en oeuvre est de plus en plus restrictive et
revient souvent à faire supporter aux collectivités victimes
l'intégralité du préjudice, sur la base d'une distinction
aléatoire entre faits « spontanés »619(*) et faits
« prémédités620(*)».
4. La responsabilité civile
pour les dommages causés par les tiers à la manifestation
La question la plus délicate est celle de l'origine des
dommages, qui ne doivent pas résulter d'une action
préméditée mais spontanée, dans le feu de l'action.
Ainsi, dès lors que ces dommages sont le fait de casseurs agissant en
marge de la manifestation, ou résultent d'actions
délibérées et organisées des manifestants, ils ne
peuvent entrer dans le champ de ce régime de
responsabilité621(*). Étendre le régime de
responsabilité sans faute à tous les dommages survenant lors d'un
attroupement ou d'un rassemblement, y compris ceux ayant pour origine des
groupes d'individus n'ayant aucune volonté de manifester mais ayant pour
seul objectif de casser ou piller en marge de la manifestation, remettrait en
cause les fondements mêmes des objectifs de ce régime de
responsabilité. Ceci vise donc la prise en charge par l'État d'un
risque social bien identifié et pour lequel l'administration dispose en
principe de moyens de police administrative pour l'empêcher ou le
limiter.
En droit congolais, la situation ne semble pas être la
même concernant les tiers. En effet, l'article 23 de la loi
sus-évoquée consacre la responsabilité des tiers,
c'est-à-dire les personnes non-participantes à une manifestation,
lorsque celles-ci « ... entravent une
manifestation » ; elles répondent civilement des
préjudices causés à quiconque dans les mêmes
conditions que les organisateurs ». L'écriture de la loi
semble entretenir de l'amalgame en ceci que la responsabilité des
organisateurs est subordonnée à une condition préalable,
le défaut de déclaration. Et Ngondankoy de s'interroger si la
dernière incise de l'article 23 signifie que la manifestation en cause
pour les tiers doit avoir été, ici aussi, affectée d'un
tel vice622(*).
Il relève qu'« a priori, une telle condition
n'est pas requise puisque, tout simplement, elle ne peut s'appliquer aux tiers.
En effet, comment veut-on que les tiers, qui sont vraiment tiers,
déclarent une manifestation à l'égard de laquelle ils
n'ont aucun lien ! A l'opposé, comment veut-on que les victimes des
dégâts et dommages causés par des tiers lors d'une
manifestation soient privés d'un recours parce que la manifestation a
été ou non préalablement déclarée ?
N'ont-elles pas, précisément, intérêt à
poursuivre les tiers, même quand la manifestation a été
déclarée ? »
En outre, la condition de déclaration préalable
a été instituée comme fondement du transfert de la
responsabilité des auteurs des faits ayant causé préjudice
vers l'administration. Dans la mesure où l'administration ne sera pas
tenue pour responsable des dégâts causés par les tiers,
rien ne justifie le conditionnement de cette responsabilité par une
quelconque déclaration.
De l'avis de Ngondankoy, nous considérons que la
dernière incise de l'article 23 de la loi ne peut, logiquement, renvoyer
à la condition de la déclaration préalable prévue
par l'article 21. Cet article ne peut renvoyer qu'aux conditions
générales de la responsabilité civile telles qu'elles sont
posées par l'article 258 du Code civil, livre III. C'est, du reste, ce
que prévoit l'article 22 de la même loi qui, à propos des
organisateurs de la manifestation, soumet la rétention de leur
responsabilité civile aux « conditions prévues par le
droit commun ».
Il en résulte que les tiers ne sont pas soumis à
la condition préalable et implicite de la déclaration de la
manifestation pour que leur responsabilité civile soit engagée.
Que la manifestation soit déclarée ou pas, ils engagent leur
responsabilité civile dès lors que les conditions de l'article
258 du Code civil, livre III, sont réunies. Néanmoins, lorsque
les tiers auteurs des dégâts ne sont ni identifiés ni
identifiables et que les préjudices sont énormes,
l'administration doit endosser sa responsabilité pour défaut de
précaution. Il doit en être autant en cas d'insolvabilité
avérée des auteurs des dégâts.
En somme, qu'il s'agisse de l'État, des tiers ou des
organisateurs et que la manifestation soit déclarée ou pas, la
responsabilité civile organisée par les articles 21 à 23
de la loi reste soumise aux conditions ordinaires du « droit
commun » : la faute, le préjudice et le lien de
causalité entre les deux. Autant dire que l'organisation d'une
manifestation publique comporte un coût en RDC, à la fois pour
l'État, les organisateurs et les tiers. D'où
l'intérêt de sa réglementation.
En France, la responsabilité des communes serait
engagée, celles-ci pouvaient se retourner contre les auteurs ou
complices du désordre. De même, étaient prévues
diverses hypothèses de partage de la réparation du
préjudice avec l'État : soit, « en vertu du risque
social », celui-ci contribuait pour moitié au paiement ;
soit, « si la municipalité (avait) manqué à ses
devoirs par inertie ou connivence avec les émeutiers ». Il
pouvait exercer un recours contre la commune à concurrence de 60% des
sommes ainsi mises à sa charge ; soit enfin si, au contraire,
« la position de la police locale ni de la force armée, ou si
elle (avait) pris toutes les mesures en son pouvoir à l'effet de
prévenir ou de réprimer les troubles », l'État
prenait à sa charge le paiement des frais et
dommages-intérêts623(*).
Encore fallait-il que le dommage résulte de la
« manifestation » elle-même, et non pas d'un
« groupe d'individus détachés de la masse des
manifestants et auxquels celle-ci ne s'était pas
associée »624(*), et que la victime n'ait pas elle-même
participé à une manifestation interdite, la responsabilité
de l'État n'étant alors engagée devant le juge
administratif qu'en cas de faute lourde des forces de police ayant
rétabli l'ordre625(*).
Lorsque ces conditions sont remplies s'applique un
régime spécial de responsabilité sans faute de
l'État, plus favorable encore aux victimes que le régime de droit
commun de la responsabilité sans faute dans la mesure où il n'est
pas exigé que le préjudice présente un caractère
« anormal et spécial »626(*). Enfin, faute de
précision législative627(*), il est aujourd'hui admis que le préjudice
commercial né de l'occupation de gares ou de péages d'autoroutes
par des attroupements peut aussi être indemnisé.
§3. Responsabilité disciplinaire et politique
En ce qui concerne la responsabilité administrative,
elle venait d'être développée au paragraphe
précédent. On va relever ici que les agents de l'administration,
titulaires du pouvoir public, doivent insérer leur action dans un cadre
légal précis sous peine de répondre disciplinairement
devant la hiérarchie civile ou militaire. Les abus de plus en plus
nombreux entraînent souvent la responsabilité au plus haut sommet,
débouchant par des interpellations et même par la
déchéance de certaines autorités suprêmes.
1. La responsabilité
disciplinaire résultant des manifestations publiques
La police nationale tient par la constitution et la loi la
charge d'assurer la sécurité des personnes et de leurs biens,
sous la direction de l'autorité civile. Aux termes de l'article 182 de
la constitution du 18 février 2006, « la Police nationale est
chargée de la sécurité publique, de la
sécurité des personnes et de leurs biens, du maintien et du
rétablissement de l'ordre public ainsi que de la protection
rapprochée des hautes autorités ». L'article 2 de la
loi organique n° 11/013 du 11 août 2011 portant organisation et
fonctionnement de la Police Nationale Congolaise reproduit les mêmes
termes à quelque différence près. La même loi
organique inscrit la police dans la logique de l'État de droit en
l'astreignant au respect de la constitution, des droits humains et
libertés fondamentales de l'individu ainsi que des lois et
règlements de la République628(*). Tout en imposant le respect de la dignité
humaine par la police629(*), elle lui fait de même obligation de
vérifier systématiquement la légalité des
opérations qu'elle se propose de mener630(*). L'usage de la force est de même
réglementé, mais en des termes de nature à favoriser un
imbroglio ou un flou favorable à des violations intenses631(*). Cette situation a
été décriée par Mfuamba Lobo et ne devrait pas
laisser indifférent le juriste publiciste.
En face de ce décor législatif perfectible
certes toute pratique policière qui se distance du cadre légal
est constitutif de faute disciplinaire conformément aux articles 168 et
suivants de la loi n° 13/013 du 1er juin 2013 portant statut du
personnel de carrière de la police nationale. La procédure est
enclenchée par le chef hiérarchique direct du policier mis en
cause, sans préjudice des dispositions pertinentes des articles 202 et
suivants de la loi organique n° 13/013 du 1er juin 2013.
2. La responsabilité
politique
Les titulaires du pouvoir public peuvent toujours être
appelés à répondre de leur gestion des manifestations
publiques. Cette responsabilité peut revêtir une forme
légale organisée par le droit positif, comme elle peut être
inédite lorsque le titulaire du pouvoir souverain décide de
prendre en mains son destin et en recourant notamment à la contestation.
Les assemblées délibérantes jouent un
rôle déterminant dans la sanction des atteintes aux droits
fondamentaux. La fonction de contrôle leur permet d'étendre leur
compétence d'information, mais aussi le champ de la
responsabilité des organes exécutifs, au respect des droits
fondamentaux. La fonction de représentation, quant à elle,
crée un lien direct entre les assemblées et les victimes des
violations de leurs droits, en lui donnant une compétence dans la
résolution extrajudiciaire des litiges632(*).
Espagne633(*) existe le droit d'interpellation, défini
comme des « questions adressées au gouvernement sur des
matières de caractère général ou d'une importance
politique particulière provoquant généralement l'ouverture
d'un débat se terminant, éventuellement, par la votation d'une
motion par laquelle la Chambre fixe sa position relative au sujet
débattu »634(*). Le mécanisme existe également en
France mais, dans la mesure où il est indissociable de la
procédure de la motion de censure en vertu de l'article 156 du
Règlement de l'Assemblée nationale, il n'est pratiquement jamais
utilisé635(*). Il
se distingue des questions au regard du caractère plus large des
problématiques abordées. Portant sur des matières de
politique générale ou de politique sectorielle, l'interpellation
permet de mettre en cause un dysfonctionnement des services placés sous
l'autorité du gouvernement.
Le droit de créer des commissions d'enquête est
également commun à la France et à l'Espagne636(*). Les commissions
d'enquête peuvent être définies comme des
« organes parlementaires collégiaux et temporaires [...]
chargés de vérifier et analyser une question
d'intérêt général en vue d'exiger la
responsabilité politique ou d'aider à l'épuration d'une
éventuelle responsabilité juridique »637(*).
En droit congolais, la responsabilité politique est
organisée à tous les trois niveaux de l'organisation
administrative du pays : à l'échelon national, les articles
138, 146 et 147 de la Constitution du 18 février 2006
réglementent le contrôle parlementaire et la responsabilité
politique du gouvernement central. Aux termes de ces dispositions,
« sans préjudice des autres dispositions de la présente
Constitution, les moyens d'information et de contrôle de
l'Assemblée nationale ou du Sénat, sur le Gouvernement, les
entreprises publiques, les établissements et services publics sont : la
question orale ou écrite avec ou sans débat non suivi de vote, la
question d'actualité, l'interpellation, la commission d'enquête,
l'audition par les Commissions.
Ces moyens de contrôle s'exercent dans les conditions
déterminées par le Règlement intérieur de chacune
des Chambres et donnent lieu, le cas échéant, à la motion
de défiance ou de censure, conformément aux articles 146 et 147
de la présente Constitution. (...) Le Premier ministre peut,
après délibération du Conseil des ministres, engager
devant l'Assemblée nationale la responsabilité du Gouvernement
sur son programme, sur une déclaration de politique
générale ou sur le vote d'un texte.
L'Assemblée nationale met en cause la
responsabilité du Gouvernement ou d'un membre du Gouvernement par le
vote d'une motion de censure ou de défiance. La motion de censure contre
le Gouvernement n'est recevable que si elle est signée par un quart des
membres de l'Assemblée nationale. La motion de défiance contre un
membre du Gouvernement n'est recevable que si elle est signée par un
dixième des membres de l'Assemblée nationale.
Le débat et le vote ne peuvent avoir lieu que
quarante-huit heures après le dépôt de la motion. Seuls
sont recensés les votes favorables à la motion de censure ou de
défiance qui ne peut être adoptée qu'à la
majorité absolue des membres composant l'Assemblée nationale. Si
la motion de censure ou de défiance est rejetée, ses signataires
ne peuvent en proposer une nouvelle au cours de la même session.
Le programme, la déclaration de politique
générale ou le texte visé à l'alinéa
1er est considéré comme adopté sauf si une
motion de censure est votée dans les conditions prévues aux
alinéas 2 et 3 du présent article.
Le Premier Ministre a la faculté de demander au
Sénat l'approbation d'une déclaration de politique
générale.
Lorsque l'Assemblée nationale adopte une motion de
censure, le Gouvernement est réputé démissionnaire. Dans
ce cas, le Premier ministre remet la démission du Gouvernement au
Président de la République dans les vingt-quatre heures.
Lorsqu'une motion de défiance contre un membre du Gouvernement est
adoptée, celui-ci est réputé
démissionnaire ».
A l'échelle provinciale, c'est la loi n° 08/012 du
31 juillet 2008 portant principes fondamentaux relatifs à la libre
administration des provinces qui consacre pareillement tous les moyens
d'information et de contrôle prévus au niveau national et
susceptibles d'être appliqués dans les rapports entre les
assemblées provinciales et les gouvernements provinciaux.
Au niveau local enfin, la loi n° 08/016 du 7 octobre 2008
portant composition, organisation et fonctionnement des entités
territoriales décentralisées et leurs rapports avec l'État
et les provinces, institue pour chaque entité territoriale
décentralisée deux organes : un organe
délibérant et un organe exécutif. Elle établit les
mêmes mécanismes de contrôle de l'exécutif pouvant
déboucher par les mêmes effets, c'est-à-dire les motions de
censure et de défiance. Dans la mesure où le maintien de l'ordre
public dans sa juridiction relève de l'organe exécutif local,
c'est ce dernier qui est fondé à recevoir les déclarations
de manifestations et, partant, de procéder à d'éventuelles
interdictions, sans compter que la gestion desdites manifestations lui
incombe.
En 2008, après que la police ait mené au mois de
mars une attaque préventive en prévisions des manifestations de
la secte politico-religieuse Bundu dia Kongo (BDK), le ministre de
l'intérieur de l'époque, le général à la
retraite Denis Kalume Numbi fut convoqué à l'assemblée
nationale. Ce ministre est passé à côté d'une motion
de défiance dont il a été sauvé de justesse par la
Majorité parlementaire dont il relevait.
Il faut noter que cette interpellation a été
favorisée par le poids de l'opposition politique notamment l'opposition
institutionnelle et le fracas causé par les évènements du
Bas-Congo.
Cette illustration est manifestement moindre et les
élus devraient redynamiser le contrôle de l'action gouvernementale
au-delà des clivages politiques pour jouer pleinement son rôle
dans la consolidation de l'État de droit et dans la promotion du
constitutionnalisme en RDC.
L'autre dimension de la responsabilité politique qui
mérite d'être explorée, c'est la responsabilité
devant le peuple souverain. Non organisée en ce sens qu'il n'existe pas
de dispositions juridiques qui précisent sa portée réelle,
cette responsabilité n'est pas moins évidente. Si d'autres types
de responsabilité trouvent leur fondement dans les instruments
juridiques divers, la responsabilité politique peut être
considéré comme une responsabilité aléatoire et
incertaine. En droit congolais elle trouve l'un de ses fondements dans les
dispositions de l'article 64 de la Constitution. Le premier alinéa de
cet article est ainsi libellé : « Tout Congolais a le
devoir de faire échec à tout individu ou groupe d'individus qui
prend le pouvoir par la force ou qui l'exerce en violation des dispositions de
la présente Constitution ». Le contenu de cette disposition
suscite la curiosité scientifique et des questions que nous avons choisi
d'escamoter dans la cadre de la présente étude. Il sied seulement
de relever que le peuple peut procéder par des manifestations publiques
pour réclamer la fin d'un régime.
Si la République Démocratique du Congo n'a pas
de recette en termes de responsabilité politique devant le peuple, on
peut en trouver autant dans les exemples égyptiens, tunisiens,
sud-soudanais et burkinabés. Parmi les griefs retenus en charge des
anciens dirigeants notamment de ces trois pays, nous pouvons citer la violence
contre les manifestants ou autres comportements constitutifs d'entrave au droit
de manifester pacifiquement. Dans le cas burkinabé notamment, la
revendication originaire des manifestants portait sur le projet de
révision de l'article 37 de la Constitution du Burkina Faso qui
était en débat au parlement tendant à faciliter une
nouvelle candidature de Blaise Compaoré. C'est la violence de la
répression qui a excité l'ire des manifestants ; ceux-ci
exigeront le départ immédiat du président Compaoré,
ce qui débouchera sur la révolution du 30 octobre 2014.
.
CHAPITRE CINQUIEME :
CONTRADICTIONS,
AMBIGUÏTÉS ET INADAPTATIONS PRATIQUES DU SYSTÈME JURIDIQUE
CONGOLAIS DE PROTECTION DE LA LIBERTE DE MANIFESTATION
|
L'État est un système juridique global et
complet. Phénomène juridique à part entière, il se
veut être un ensemble normatif cohérent au sommet duquel
trône la Constitution. La constitution a vocation d'être la
créatrice de l'ordre juridique, la norme-mère de laquelle toutes
les autres normes tirent leur validité. C'est pourquoi il lui a valu,
l'appellation de la norme fondamentale. La consécration d'un droit dans
la constitution lui confère la plus haute sécurité
juridique et le met à l'abri des atteintes ordinaires de niveau
inférieur, pourvu que la hiérarchie des normes, gage de leur
effectivité (Section 1), soit respectée. C'est au nom de cette
hiérarchie que le législateur congolais est tenu de
déférer à l'obligation constitutionnelle de mettre en
oeuvre la liberté de manifestation (Section 2) en conformité, non
seulement avec les principes constitutionnels de l'article 26, mais aussi avec
le dispositif conventionnel en vigueur en République Démocratique
du Congo (Section 3).
Section
1. La hiérarchie des normes : une exigence de l'effectivité
de la liberté de manifestation
Kelsen affirmait déjà que « le droit
est un certain ordre, une certaine organisation de la force »638(*). Cet ordre postule que les
normes au sein du système obéissent à une certaine
hiérarchie fondée sur les autorités qui en sont auteurs.
L'ordre juridique est « l'ensemble, structuré en
système, de tous les éléments entrant dans la constitution
d'un droit régissant l'existence et le fonctionnement d'une
communauté humaine »639(*). Les normes sont ainsi organisées à
l'intérieur de l'ordre juridique. Ce dernier forme un tout dont les
normes sont les parties. Dès lors, la cohérence de l'ordre
juridique peut être définie comme l'« harmonie, (le) rapport
logique, (l') absence de contradiction dans l'enchaînement des parties de
ce tout »640(*). Un ordre juridique cohérent est donc celui
dans lequel il existe une harmonie des rapports entre les normes et surtout une
absence de contradiction entre elles.
L'absence de contradiction entre les normes constitue une
condition juridique de l'effectivité de la norme641(*). Celle-ci peut en effet
être menacée par une contradiction entre cette norme et une norme
inférieure car, le cas échéant, les effets de l'une
contreviendront à ceux de l'autre, au risque d'une neutralisation
réciproque de leurs effets respectifs, voire d'une domination de la
norme inférieure sur la norme supérieure642(*). En principe, les
critères de validité retenus dans le cadre de l'ordre juridique
doivent permettre d'assurer sa cohérence, et ainsi de préserver
l'effectivité de la norme. En organisant l'absence de contradictions
entre les normes, la cohérence de l'ordre juridique contribue à
préserver l'effectivité de la norme, elle en est donc l'une des
conditions juridiques643(*).
Le modèle d'organisation de l'ordre juridique
proposé par Hans Kelsen, fondé sur une hiérarchie entre
les normes de cet ordre, semble en principe en mesure d'assurer sa
cohérence. Il repose sur une « norme fondamentale »
supposée644(*),
distincte de la Constitution, qui unifie l'ensemble des normes de l'ordre
juridique. Le principe suivi par Kelsen, déduit de la loi Hume, est que
« la validité d'une norme ne peut avoir d'autre fondement que la
validité d'une autre norme »645(*). De cette norme fondamentale découle,
théoriquement, la validité de l'ensemble des normes d'un ordre
juridique, formant ainsi une hiérarchie. Ainsi, l'ordre normatif n'est
pas « un complexe de normes en vigueur les unes à côté
des autres, mais une pyramide ou hiérarchie des normes qui sont
superposées, ou subordonnées les unes aux autres,
supérieures ou inférieures »646(*).
Le modèle kelsénien a fait l'objet de nombreuses
objections théoriques647(*). Cependant, il propose une structure
cohérente de l'ordre juridique. Organisé sur la base du principe
de la hiérarchie, il est théoriquement à même
d'éviter les contradictions entre les normes. « Cette structure
rigoureusement hiérarchisée de l'ordre juridique (...) contribue
puissamment à maintenir la cohésion de l'ordre juridique
»648(*). Par
conséquent, il peut être retenu comme hypothèse de
référence permettant de comprendre en quoi la cohérence de
l'ordre juridique constitue une condition de l'effectivité.
En outre, la confrontation du modèle théorique
de Kelsen au droit positif peut permettre d'évaluer l'influence de la
cohérence de l'ordre juridique sur l'effectivité. L'analyse du
droit positif montre en effet la relativité de la cohérence de
l'ordre juridique. Paul Amselek a ainsi mis en évidence que « la
réalité (...) est beaucoup plus complexe, plus
enchevêtrée que le schéma kelsénien ne le laisse
paraître »649(*). Le pluralisme juridique contemporain renforce la
pertinence de cette critique. Il semble établi que la hiérarchie
des normes « ne permet assurément pas d'appréhender le
pluralisme juridique régnant aujourd'hui »650(*) de sorte que ce pluralisme
est susceptible de perturber la cohérence de l'ordre juridique. Par
conséquent, le dépassement, par le droit positif651(*), du modèle
kelsénien, constitue probablement un facteur d'incohérence de
l'ordre juridique et in fine une menace sur l'effectivité de la
norme.
Il faut affirmer avec
Raphaël Paour652(*)
que « la représentation du droit comme étant
constitué d'un ensemble de normes hiérarchisées
confère certaines des ressources dont ils disposent. Celles-ci doivent
être identifiées et leur efficacité évaluée
afin de déterminer dans quels cas il existe effectivement une
corrélation entre la place d'une norme dans la hiérarchie et le
pouvoir de son auteur ». Léon Odimula considère que
« la pensée juridique est dominée par la
représentation du système juridique comme étant une
structure hiérarchique, linéaire et arborescente. Ce
système est hiérarchique en tant que ses organes et normes sont
placées dans une situation de supériorité ou de
subordination, les uns par rapport aux autres653(*) ».
L'État, création juridique par excellence,
repose essentiellement sur l'existence de cet ordre juridique cohérent.
La République Démocratique du Congo ne déroge pas à
cette règle chère au constitutionnalisme et à
l'idée d'un État de droit démocratique.
Théoriquement, l'ensemble du système juridique de la RDC est
constitué d'un corps de règles hiérarchisées au
sommet desquelles trône la Constitution du 18 février 2006. Cette
affirmation trouve tout son fondement lorsque le constituant de 2006 pose le
principe de la purge automatique et celui de la nullité de plein droit
de tout acte déclaré non conforme à la constitution aux
articles 221 et 168, alinéa 2. Par la volonté du constituant, la
Constitution du 18 février 2006 est hissée au sommet de l'ordre
juridique congolais et ne tolère, du moins sur le plan du principe,
aucune rébellion de l'une ou de l'autre norme654(*).
C'est cette arborescence qui est mis en exergue par
Léon Odimula lorsqu'il affirme que les différents maillons [du
système juridique] dérivent d'une même source, ou mieux
s'engendrent à partir d'un foyer de création originelle
unique655(*). La
Constitution du 18 février 2006 qui constitue ce foyer de
création au cas congolais, renforce le régime de reconnaissance,
de protection et de promotion des droits fondamentaux, ainsi que celui de
l'exercice des libertés publiques. Elle consacre plus de 50 de ses
articles aux droits et libertés fondamentaux656(*). Le législateur est
investi par le constituant soit de déterminer les mesures d'application
des certains droits spécifiques, soit de fixer les règles
concernant les droits civiques et les garanties fondamentales accordées
aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques657(*).
Section 2. La liberté de
manifestation : un droit constitutionnel dont les modalités
d'exercice postulent l'intervention du législateur
Le constituant congolais de 2006 recourt, à l'instar de
ses prédécesseurs, à la formule traditionnelle de
proclamer l'adhésion et l'attachement du peuple congolais à la
Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, ainsi qu'aux instruments
juridiques internationaux des droits de l'homme, manifestant ainsi sa ferme
détermination à instaurer un régime démocratique.
Son action sera concrétisée au titre II de la Constitution qui
organise les droits humains, les libertés fondamentales et les devoirs
du citoyen et de l'État. Une véritable charte sociale de plus de
50 articles, qui se fonde sur une répartition trilogique reprenant les
droits civils et politiques, les droits économiques, sociaux et
culturels et les droits collectifs comportant souvent des
innovations.658(*)
Dans le chapitre relatif aux droits civils et politiques, le
constituant s'est en premier lieu inspiré de la Déclaration
Universelle des Droits de l'Homme et du Pacte International relatif aux droits
civils et politique659(*), en retenant la quasi-totalité des droits y
consacrés. Mais, il réserve la jouissance des droits politiques
aux seuls congolais, sauf, exceptions établies par la loi. La
Constitution du 18 février 2006 innove également en instituant la
parité homme-femme dans les institutions nationales, provinciales et
locales. Si la consécration constitutionnelle de cette révolution
est un problème résolu, son respect demeure une autre question
à laquelle le temps permettra de répondre. En effet, notre
constat est que même au sein d'organisations féministes, la
culture féministe semble encore étrangère, le zèle
féministe disparaît chaque fois au contact
d'événements660(*).
La consécration de la liberté de manifestation
en République Démocratique du Congo semble diviser la doctrine
voir les acteurs. Prévue par l'alinéa 4 de l'article 26 de la
Constitution congolaise, la loi portant mesures d'application ressemble
à un messie dont la venue semble controversée. Pour certains,
elle doit d'être considérée comme déjà
promulguée et ce en vertu de l'article 140 de la même Constitution
qui recommande de considérer qu'à défaut de promulgation
de la loi par le Président de République dans les délais
constitutionnels, la promulgation est de droit. Plusieurs personnes
sembleraient être de cet avis. À leur nombre figure Paul-Gaspard
Ngondankoy qui ne cesse d'évoquer les différentes dispositions
contenues dans la très célèbre « loi-proposition
de loi ».
Par ailleurs, les autorités publiques recourent
constamment au même texte de loi. C'est le cas du Gouverneur de Kinshasa
qui convoque les organisateurs de la manifestation et autres services
afférents des réunions de préparation, conformément
à une disposition contenue ladite « loi-proposition de
loi ». Il faut souligner que, même en recourant à ce
texte, seules les dispositions favorables au Régime sont
appliquées.661(*)
Un autre courant suggère par contre, d'attendre sa
promulgation formelle par le Président de la République et, dans
l'entre-temps, le recours au Décret-loi du 29 janvier 1999 sur les
manifestations publiques, conformément à l'article 221 de la
Constitution qui prévoit que « pour autant qu'ils ne soient
pas contraires à la présente Constitution, les textes
législatifs et réglementaires en vigueur restent maintenus
jusqu'à leur abrogation ou leur modification ».
§1. La consécration législative : un
vide à combler par une loi portant mesures d'application de la
liberté de manifestation
La liberté de manifestation a été une
conquête du constitutionnalisme du XIXe siècle, le
constitutionalisme africain ayant pris la Déclaration française
des droits de l'homme et du citoyen de 1789 comme modèle d'organisation
politique de l'État662(*). La plupart des constitutions du continent
étudiées réservent au législateur et à lui
seul, le pouvoir de prendre les mesures nécessaires à l'exercice
de la liberté de manifestation663(*).
1. La consécration constitutionnelle de la
liberté de manifestation
En République Démocratique du Congo, la
Constitution promulguée depuis treize ans a habilité le
législateur à déterminer les mesures d'application de la
liberté de manifestation. Législateur ne s'est malheureusement
pas acquitté de ce devoir constitutionnel durant près de 7 ans.
Ce mutisme du législateur congolais devant une habilitation
constitutionnelle, a été de nature à maintenir le flou et
par conséquent obstruer à l'exercice de la liberté.
Pourtant, la liberté de manifestation affirmée par l'article 26
de la Constitution matérialise l'esprit libéral ayant
animé le constituant congolais de 2006 devrait être inscrite parmi
les priorités de l'agenda du parlement.
2. La proposition de loi portant modalités
d'exercice de la liberté de manifestation
En 2013, une proposition de loi portant mesures d'application
de la liberté de manifestation a été déposée
sur le bureau du Président de l'Assemblée nationale. Le destin de
cette initiative législative est malheureusement très
controversé, par ce qu'elle connait un parcours législatif
très complexe. D'abord, elle connaitra un retard dans le processus de
son adoption, parce que plusieurs fois programmée lors de l'ouverture de
sessions parlementaires, mais sans faire l'objet d'examen, ensuite,
déposée pour promulgation au Cabinet du Président de la
République, elle ne sera pas promulguée et sera renvoyée
pour une seconde lecture au Parlement, en violation de l'article 140 de la
Constitution664(*).
Depuis son adoption et sa transmission après la seconde
délibération, la proposition de loi n'a jamais été
promulguée, nonobstant le dépassement du délai
constitutionnel.
Si les juristes à l'instar de Paul-Gaspard Ngondankoy
considèrent que cette proposition de loi est promulguée de plein
droit665(*), il faut
qu'une telle considération trouve un mécanisme juridique
d'accompagnement pour qu'une loi ayant connu une telle trajectoire soit
effective. Par son acte, l'autorité de promulgation lance un mot d'ordre
à toutes les administrations de l'État d'appliquer la norme et
confère à celle-ci la force obligatoire. Cette prérogative
est réservée à l'exécutif dans tous les
États modernes. A partir de 1795 en France, le chef de l'État
recourt à son pouvoir de promulgation pour pouvoir empêcher
l'entrée en vigueur des lois qui méconnaissent la Constitution en
la forme. Cette dimension de la formalité promulgatoire a
été clairement mise en lumière par le Constituant de l'an
III, puisque celui-ci a expressément subordonné son
accomplissement au constat de « l'observation des formes prescrites
»666(*).
A l'aune du droit positif congolais, cette idée ne
repose pas sur un fondement solide en ce sens que le chef de l'État ne
peut utiliser son pouvoir de promulgation comme un veto contre l'oeuvre du
législateur. La navette législative prévue par la
constitution permet au Président de la République de
dénoncer les inconstitutionnalités dont seraient entachées
les lois.
En effet, la Constitution du 18 février 2006 n'est pas
la première à consacrer des mécanismes atypiques de
promulgation des lois. Le pouvoir de promulgation a longtemps été
utilisé par le Chef de l'État pour bloquer les textes de loi qui
lui paraissent défavorables. C'est cette triste expérience qui
conduira le constituant de 1994 à consacrer la promulgation par le
pouvoir législatif667(*). Il se pose ici la question de la publication du
texte promulguée par l'organe législatif, le journal officiel
relevant du Président de la République. Pour une réforme
complète en cette matière, le Constituant aurait dû
étendre l'influence de l'organe législatif sur le journal
officiel en vue d'assurer la publication des lois promulguées par le
législatif.
L'abandon de la solution du constituant de 1994 par le
constituant de 2006 au profit de la promulgation de plein droit pose plus de
problèmes qu'il n'en résout. Il sied de relever que depuis le
XVIIIe siècle, la promulgation semble se justifier par le souci du
constitutionnalisme d'assurer la prééminence formelle de la
Constitution, de façon à éviter l'arbitraire, outre de
l'exécutif, du législatif. Cette considération a pu
être occultée par le principe de séparation des pouvoirs,
sur lequel la promulgation s'est trouvée fondée au XIXe
siècle668(*).
Mais, au travers de ce principe, c'est bel et bien la Constitution qu'il
s'agissait de faire respecter : puisque, historiquement, la séparation
des pouvoirs n'a elle-même d'autres finalités que d'éviter
le despotisme des gouvernants, en leur imposant le respect des principes
fondamentaux inscrits dans le texte suprême669(*).
Dans ce contexte, la promulgation ne saurait être
détournée de sa fonction originale de servir de garantie de la
prééminence formelle de la Constitution pour satisfaire les
appétits politiciens insatiables des acteurs politiques.
Parce qu'il s'agit d'une oeuvre législative, nous
suggérons que des réformes soient opérées dans le
sens de reconnaître au parlement en cas de dépassement du
délai constitutionnel de promulgation la possibilité de
transmettre une loi adoptée qu'il estime avoir respecté le
parcours normal conformément à la Constitution et aux lois de la
République, au Journal Official, pour publication, en vue de son
exécution et de son opposabilité aux citoyens.
A défaut d'une telle démarche, une
référence à la Cour Constitutionnelle peut aussi amener
à régler la question. Il suffit pour cela que les
présidents des chambres reçoivent la compétence de saisir
la Cour constitutionnelle aux fins de constater la carence législative
et la promulgation de droit, s'il y a dépassement du délai
constitutionnel de promulgation. La Cour constitutionnelle ainsi saisie devra
rendre un arrêt constatant la promulgation de droit et ordonner la
publication de la loi concernée au journal officiel.
Le constituant béninois a adopté la même
solution. On peut lire au sixième alinéa de l'article 57 de la
loi n° 90-32 du 11 Décembre 1990 portant Constitution de la
République du Bénin : « (...) Si après ce
dernier vote, le président de la République refuse de promulguer
la loi, la Cour constitutionnelle, saisie par le président de
l'Assemblée nationale, déclare la loi exécutoire si elle
est conforme à la Constitution ». Parmi les 4 pays
étudiés dans cette thèse, les clauses de suspicion
n'existent que dans les constitutions africaines alors que les vieilles
démocraties ne s'en servent pas. L'on ne peut s'empêcher de
constater que ces clauses de suspicion sont symptomatiques d'une carence
démocratique et démentent l'euphorie démocratique de
certains États africains.
En ce qui concerne la saisine de la Cour constitutionnelle par
les présidents des chambres parlementaires, le contexte congolais me
semble tout à fait particulier, du fait de la coïncidence de deux
majorités, parlementaire et présidentielle. Dans
l'hypothèse de coïncidence de majorités, il faut retenir
qu'il est difficile de voir aboutir une initiative de dissidence à la
volonté du Président de la République. D'où la
nécessité que cette compétence des présidents des
chambres s'exercent en dehors de tout conflit. Après les
élections du 30 décembre 2018, la configuration politique a connu
une mutation : même si une large majorité a été
constituée entre le CACH et le FCC, le rafistolage de ladite
majorité s'est réalisé non sans peine. Le président
de la République aujourd'hui ne peut se targuer d'une majorité au
parlement, la majorité dans la majorité lui étant, si pas
hostile, non acquise.
Revenant à la loi de mise en oeuvre de l'article 26 de
la Constitution du 18 février 2006, le vide législatif
créé délibérément par les pouvoirs publics
congolais depuis 2006 mérite une réflexion.
§2. Le déni de législation en
matière de liberté de manifestation : une carence fautive
dépourvue de sanction
La consécration constitutionnelle d'un droit
fondamental s'accompagne parfois d'une imposition expresse à
l'État à tous les pouvoirs publics670(*) de certaines obligations.
Celles-ci s'analysent en termes, non plus de restrictions, mais au contraire de
garanties au profit du droit auquel elles sont reliées. Dans les
États fédéraux, ce sont également les organes des
collectivités fédérées en charge des
matières qui sont concernées par ces obligations.
1. La nécessaire
intervention du législateur
Les pouvoirs publics doivent agir pour les droits
fondamentaux. L'article 23 de la Constitution belge, dont l'insertion date de
1994, ne dit pas autre chose lorsqu'il impose aux législateurs le
législateur fédéral et les législateurs
fédérés de garantir les droits économiques, sociaux
et culturels, afin de permettre à chacun de « mener une vie
conforme à la dignité humaine »671(*). L'article 22 bis,
inséré en 2000 impose à ces mêmes
législateurs de garantir la protection du droit de chaque enfant
« au respect de son intégrité morale, physique,
psychique et sexuelle ». Quand l'article 11 bis, inséré
en 2002, il entend que les législateurs « garantissent aux
femmes et aux hommes l'égal exercice de leurs droits et libertés,
et favorisent notamment leur égal accès aux mandats
électifs et publics ». L'adoption récente de ces
dispositions montre clairement qu'il y va d'une tendance constitutionnelle
moderne.
La formulation retenue est parfois plus étendue. Ainsi,
en vertu des articles 39 et suivants de la Constitution espagnole, ce sont
« les pouvoirs publics » qui sont tenus, par exemple,
d'assurer la protection sociale, économique et juridique de la famille,
de créer les conditions favorables au progrès social et
économique, de poursuivre une politique de formation et de
réadaptation professionnelles, d'encourager et de protéger
l'accès de tous à la culture ou encore de veiller à
l'utilisation rationnelle de toutes les ressources naturelles. En Italie, les
articles 29 et suivants de la Constitution imposent à « la
République », par exemple, de reconnaître les droits de
la famille, de protéger la santé, de créer des
écoles publiques, ou encore d'encourager l'épargne sous toutes
ses formes.
Cette situation suscite de nombreuses questions. Ainsi, dans
la perspective d'une conception objective des droits fondamentaux, ne doit-on
pas admettre que la consécration constitutionnelle de ces droits de tous
ces droits emporte par elle-même pour l'État, et
spécialement le législateur, le devoir de mettre en oeuvre des
actions positives et concrètes en faveur de leur protection
effective ? C'est l'idée que l'État, et surtout le
législateur, doit agir pour promouvoir les droits fondamentaux, tous les
droits fondamentaux et pas seulement les droits économiques, sociaux et
culturels. C'est l'idée que chaque droit fondamental est par
lui-même l'expression d'une valeur qui, parce qu'elle est reconnue par la
Constitution, ne peut rester platonique et, par conséquent, ne peut
laisser les pouvoirs publics indifférents. Cette valeur doit être
concrétisée. Elle doit « irradier l'ordre
juridique », selon l'expression de la Cour constitutionnelle
fédérale allemande. C'est d'ailleurs en Allemagne que cette
tendance à l'objectivisation des droits fondamentaux a donné lieu
aux développements les plus pénétrants.
Les obligations imposées par la Constitution aux
autorités étatiques impliquent généralement que
celles-ci procurent à tout ou partie des droits fondamentaux un effet
horizontal, en les étendant aux rapports entre individus. Par-là,
elles renvoient à une vision des droits fondamentaux conçus
« non seulement comme une protection de l'individu contre
l'arbitraire public, mais aussi comme une protection contre l'arbitraire
privé qui n'en est pas moins redoutable »672(*). Il arrive que le
Constituant y consacre une disposition spécifique. C'est ainsi que
l'article 35, §3, de la Constitution suisse dispose que « les
autorités veillent à ce que les droits fondamentaux, dans la
mesure où ils s'y prêtent, soient aussi réalisés
dans les relations qui lient les particuliers entre eux »673(*).
2. La situation en droit
congolais
Depuis l'entrée en vigueur de la Constitution le 18
février 2006, l'attitude du législateur congolais mérite
un examen particulier sur le plan juridique. L'alinéa 4 de l'article 26
de la Constitution rappelle le principe de la réserve de
compétence législative en matière des droits
fondamentaux674(*) en
général et de la liberté de manifestation en particulier,
parce que, en l'occurrence, il affirme que la détermination des mesures
d'application de la liberté de manifestation relève du pouvoir
législatif.
L'expression « mesures d'application »
nous semble, non seulement imprécise, mais aussi inappropriée.
Cette imprécision a été mise en exergue par le professeur
Ngondankoy qui voit dans l'expression toutes sortes de mesures à
caractère général et impersonnel, prises par le
législateur [pour] rendre effectifs la jouissance et l'exercice de la
liberté affirmée par la constitution675(*). Il s'agit manifestement de
mesures positives permettant à la liberté de manifestation de se
concrétiser dans la vie démocratique. Inappropriée, cette
expression l'est en ce qu'elle tend à entretenir un imbroglio
sémantique quant au concept « application ». Il nous
semble impropre d'affirmer que la loi fixe les mesures d'application de la
liberté de manifestation. En effet, dans les dispositions
précédentes, le constituant parle des modalités
d'exercice, expression appropriée pour les droits fondamentaux676(*). Il en aurait
été autrement si le constituant avait fait allusion à la
disposition elle-même, plutôt qu'à la liberté de
manifestation, en relevant que « la loi fixe les mesures
d'application de cette disposition ou de cet article », plutôt
que de parler des « mesures d'application de la liberté de
manifestation ».
C'est plutôt l'inaction du législateur qui
préoccupe le chercheur. Il nous semble que le législateur
congolais n'a pas tiré toutes les conséquences de la Constitution
du 18 février 2006, qui l'habilite à fixer les règles
concernant [entre autres] les droits civiques et les garanties fondamentales
accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés
publiques677(*). En plus
de cette recommandation que nous qualifions de compétence
générale du législateur dans la règlementation des
droits fondamentaux, le constituant commet de manière
particulière le législateur à réglementer certaines
libertés spécifiques, dont la liberté de manifestation.
La bonne jouissance et l'exercice effectif de cette
liberté impliquent nécessairement l'intervention du
législateur, celle-ci étant le résultat d'une injonction
constitutionnelle. L'expression « La loi en fixe les mesures
d'application », bien que formulée à l'indicatif, vaut
impératif à l'égard du législateur678(*). Cette omission du
législateur n'est pas satisfaisante. Le rôle du juge est
très limité à cause d'un régime de limitations
imprécis favorisant l'arbitraire ou le recours à un texte
obsolète parce qu'inconstitutionnel.
Ce silence coupable du législateur a été
qualifié par Constantin Yatala Nsomwe Ntambwe679(*) de déni de
législation, expression sans doute inspirée du déni de
justice qu'il sied d'explorer brièvement.
En France, la loi n° 2007-1787 du 20 décembre 2007
sur la simplification du Droit a caractérisé le déni de
Justice par la circonstance que les juges ont refusé de répondre
aux requêtes ou ont négligé de juger les affaires en
état et en tour d'être jugées. Ce même texte
précis que l'État est civilement responsable des condamnations en
dommages et intérêts qui sont prononcées à raison
des faits de déni de justice sauf son recours contre les juges qui s'en
sont rendu coupables680(*). Le déni de justice constitue donc un vide
juridictionnel intentionnel681(*) et fautif. Il trouve son fondement dans la violation
d'un droit fondamental, consacré tant dans les instruments
internationaux des droits de l'homme682(*) que dans la Constitution du 18 février
2006683(*), le droit
à ce que sa cause soit entendue dans un délai raisonnable par un
juge compétent.
C'est le fruit d'une sorte d'analogie ou d'une transposition
qui justifie l'expression « déni de
législation » ou plus loin, « déni
d'administration », lorsque le législateur ou le pouvoir
règlementaire, tenu d'adopter des normes de mise en oeuvre,
d'exécution ou d'application de la Constitution, s'abstient de le
faire.
Le déni de législation entraine une carence
fautive et, par ricochet une obstruction à l'exercice d'une
liberté fondamentale, en même temps qu'il viole l'un des droits
fondamentaux de la Constitution, celui d'être appliquée ; en
l'espèce, la jouissance ou l'exercice de certaines libertés
garanties dans la Constitution ne requièrent aucune action positive des
pouvoirs publics684(*),
lesquels interviennent a posteriori pour en sanctionner les violations.
D'autres, en revanche, nécessitent une action de l'autorité
publique dont le défaut entraîne une paralysie de la jouissance ou
de l'exercice de la liberté concernée. L'indice de ces
libertés c'est l'habilitation constitutionnelle à fixer les
règles organisant les modalités de leur exercice ; la
liberté de manifestation est de cette catégorie.
Comme le déni de justice, le déni de
législation est constitutif de faute. Cependant, la création d'un
recours en responsabilité du législateur pour carence fautive
semble prématurée au regard de l'évolution des
idées constitutionnelles d'une part et de l'âge de notre
démocratie et de notre Cour constitutionnelle de l'autre. L'idée
d'une pareille responsabilité va se heurter à des écueils
quasi insurmontables liés à la difficulté d'imaginer la
teneur et le degré de gravité de la faute sur laquelle fonder
cette responsabilité, mais aussi la complexité des
mécanismes de sanction à infliger au Parlement pour omission
coupable. Les réformes seraient d'une ampleur
insoupçonnée.
Ce qui pourrait être envisagé en droit congolais,
c'est la consécration par le législateur organique de
l'inconstitutionnalité par omission, un contrôle négatif
visant le respect de l'obligation constitutionnelle de
légiférer685(*). Pour Brigitte Henry-Menguy, « lorsque la
norme fondamentale contient des objectifs, c'est au législateur que
revient la lourde tâche de les réaliser par l'adoption de
lois »686(*).
Florence Galletti687(*)
déduit de l'incompétence négative du législateur un
fondement de l'obligation de légiférer qui pèse sur le
législateur. Elle reconnait au départ que « nulle part
n'est explicitement mentionnée l'existence d'une obligation
générale de légiférer à la charge du
Législateur »688(*) ; elle renchérit que
« celle-ci naît indirectement, de certaines dispositions
constitutionnelles, d'une part, de la politique jurisprudentielle du Conseil,
d'autre part »689(*). Faute de constitutionnaliser une obligation
positive, le Conseil constitutionnel français, au gré de
déclarations d'inconstitutionnalité des dispositions
attaquées, fournit une sanction tout à fait effective à
cette obligation encore en filigrane qu'est, pour le Législateur,
l'obligation de compétence législative-obligation de
législation.
Aujourd'hui la sanction constitutionnelle qui empêche un
futur texte législatif est le meilleur argument en faveur de l'existence
d'une obligation de légiférer. Comprise différemment
suivant les auteurs, comme un veto690(*), ou comme une technique permettant à la
majorité gouvernementale et parfois à une minorité
parlementaire de mieux exprimer la volonté générale en
l'expurgeant d'une inconstitutionnalité691(*), elle est, en tout cas, la
sanction effective d'une obligation de légiférer en filigrane.
Ceci devient de plus évident lorsque, à la suite d'un
contrôle de constitutionnalité d'une loi à promulguer,
celle-ci est retournée au parlement pour un nouveau vote. Le parlement
est ainsi placé devant l'obligation de légiférer ou, pour
être plus précis, « l'obligation de bien
légiférer ».
Une question s'impose à ce niveau : l'obligation
de légiférer, parce qu'elle existe, est-elle assortie d'une
exigence temporelle ? En clair, le législateur est-il tenu
d'adopter la loi dans un timing précis ? A contrario, peut-il
attendre une éternité pour adopter une loi de mise en oeuvre d'un
droit fondamental ? Ce questionnement interdit toute réponse
hâtive dans la mesure de l'effet immédiat des droits fondamentaux
d'une part, et de la complexité des procédures parlementaires
ainsi que du volume de travail de l'autre.
En tout état de cause, les droits fondamentaux
comportent un effet immédiat et les titulaires ne sont pas tenus
d'attendre la loi pour exercer leur droit garanti dans la constitution ou dans
un traité international. A ce sujet, le PIDESC accordait aux
États un délai de deux ans à dater de la ratification pour
appliquer la gratuité et l'obligatoriété de l'enseignement
primaire consacré par ladite convention. Cette position du Pacte est
compréhensible au regard des impératifs budgétaires
inhérents à la mise en oeuvre de certains droits
économiques, sociaux et culturels. Quant aux droits civils et politiques
dont la mise en oeuvre n'impose pas de charge budgétaire
particulière à l'État, aucun délai n'est
nécessaire. Ceci n'empêche cependant pas de prendre en compte
l'immensité de la charge législative. Les organes de
l'État, en l'occurrence le législateur, ne seront pas en mesure
de tout embrasser à la fois. L'adoption des lois de mise en oeuvre des
droits fondamentaux devrait ainsi s'opérer dans un délai court et
raisonnable.
En ce sens, le législateur qui ne
légifère pas commet une faute, celle-ci étant comprise
comme le manquement à une obligation juridique préexistante. Ce
manquement porte atteinte à l'exercice des droits fondamentaux
constitutionnellement garantis et constitue nettement une
inconstitutionnalité dont le juge constitutionnel pourrait être
saisi.
Le droit de l'union européenne organise le recours en
manquement contre l'absence de transposition d'une directive de l'Union
européenne dans le droit national des États membres. Mais le
droit comparé offre des exemples intéressants en matière
de l'inconstitutionnalité par omission.
Tout d'abord, la Constitution portugaise692(*) organise un recours
spécifique qui a directement pour objet la mise en oeuvre de la
Constitution. Ainsi, au terme de son article 283 est ainsi
libellé : « La Cour constitutionnelle contrôle et
constate l'inconstitutionnalité par omission des mesures
législatives nécessaires à l'application des normes
constitutionnelles, sur la saisine du Président de la République,
du Médiateur de la République ou, lorsque les droits des
régions autonomes sont remis en cause, des présidents des
assemblées législatives des régions autonomes. Quand la
Cour constitutionnelle constate d'une inconstitutionnalité par omission,
elle en informe l'organe législatif compétent ».
Comme on peut le constater, sur le plan des
conséquences de l'inconstitutionnalité par omission, la Cour
constitutionnelle se limite « à vérifier et déclarer
que l'omission existe, ne pouvant ni se prononcer sur le mode de suppression du
défaut, ni se substituer aux organes législatifs
compétents693(*).
Ensuite, la Hongrie a connu un recours en
inconstitutionnalité pour manquement. Il est moins directement
focalisé sur la « mise en oeuvre » de la Constitution. Pour
autant, « la Cour constitutionnelle peut constater qu'une situation
inconstitutionnelle est créée du fait du manquement du
législateur à légiférer. (...) En cas de
constatation de manquement, l'organe législatif est tenu de satisfaire
à l'invitation de la Cour constitutionnelle à
légiférer »694(*).
Enfin, le paragraphe 2 de l'article 103 de la constitution
brésilienne695(*)
édicte le principe ci-après :
« Lorsque l'inconstitutionnalité est
déclarée par défaut de mesures devant rendre effective une
norme constitutionnelle, il en est donné connaissance au Pouvoir
compétent pour qu'il prenne les mesures nécessaires ; lorsqu'il
s'agit d'un organe administratif, il est tenu de le faire dans un délai
de trente jours ».
Il en découle que le Brésil connaît une
action directe en « inconstitutionnalité par omission
»696(*) et cette
dernière est aussi examinée par le juge constitutionnel espagnol,
sans qu'il y ait de recours spécifique prévu à cet
effet697(*).
Néanmoins, tout comme il n'existe pas en droit de
régime de responsabilité du fait des lois contraires à la
Constitution698(*), il
n'existe pas encore non plus de régime de responsabilité du fait
de l'absence de mise en oeuvre législative des dispositions
constitutionnelles.699(*) Dans ce cadre, l'exemple qu'offre la Colombie me
semble satisfaisant. En Colombie, la constitution ordonne le vote d'une loi
statutaire sur la liberté de manifestation pour pouvoir la limiter. Pour
sa part, la Cour constitutionnelle colombienne a depuis l'arrêt T-456/92
fait injonction au législateur d'adopter ladite loi, mais celui-ci ne
l'a pas fait.700(*) Une
compétence toujours affirmée par les constitutions et la
jurisprudence, mais dont la sanction de la carence ou de l'incompétence
législative n'a pas été organisée.
Le droit congolais peut tirer profit de ces droits
étrangers pour organiser, dans le cadre des réformes à
intervenir, le recours en inconstitutionnalité par omission. La
situation que connait la proposition de loi portant mesures d'application de la
liberté de manifestation mériterait de trouver une solution plus
affirmée pour la mise en application effective d'une loi censée
obtenir une promulgation de droit.
De notre point de vue, la situation de l'incohérence du
système juridique dans laquelle se trouve plongée la protection
du droit de manifester ne vise qu'entretenir son ineffectivité. Dans une
forme de conjuration institutionnelle, le régime et ses dignitaires
redoutent qu'une action subversive les emporte. Déjà, le doute
émis depuis 1908 lors de l'élaboration de la Charte coloniale en
raison du caractère subversif du droit de manifester, inspirent les
régimes des pays à forte culture autocratique ou dictatoriaux.
§3. Entre
autorégulation du système juridique et opposabilité de la
proposition de loi
Comme l'indique Paul-Gaspard Ngondankoy, la disposition du
décret-loi de 1999 qui institue un régime d'autorisation
préalable facultative est manifestement contraire à l'article 26
de la Constitution du 18 février 2006701(*), et, conformément au prescrit de l'article
221 de la même Constitution, ne peut trouver application sous aucun
prétexte en République Démocratique du Congo.
Cependant, cette option n'est pas automatique. Par quel
mécanisme une disposition peut-elle être privée d'effet
pour contrariété avec la constitution ? Qui doit constater
cette contrariété ?
Cette charge revient à tous les pouvoirs de
l'État, lesquels sont astreints au respect de la constitution. Il existe
des mécanismes permettant d'extraire un acte juridique de
l'ordonnancement juridique, en vertu du principe de la mutabilité.
Lorsque le contexte social ou juridique connait une évolution, le
dynamisme s'impose à la règle de droit qui ne peut demeurer
statique. L'entrée en vigueur d'une nouvelle constitution exige que
l'ordonnancement juridique tout entier connaisse un réaménagement
tendant à se conformer au nouvel ordre constitutionnel en vigueur. Une
oeuvre utile peut être réalisée par les mécanismes
de l'abrogation et du retrait.
Lorsque ni l'abrogation expresse, ni le retrait n'ont
été appliqués à l'égard d'un texte contraire
à la constitution, l'interrogation demeure de savoir comment la purge
peut s'opérer. L'article 168 in fine de la Constitution dispose que
« tout acte déclaré non conforme à la
constitution est nul de plein droit ». Cette nullité de plein
droit doit être précédée d'une déclaration de
non-conformité à la constitution. Et pourtant, en matière
de constitutionnalité, le monopole de la Cour constitutionnelle n'est
pas sujet à discussion. La conclusion la plus plausible en
l'espèce, c'est que le texte ne sera privé d'application que si
la Cour constitutionnelle, saisie par un recours en
inconstitutionnalité, le déclare non conforme à la
Constitution.
Plus de dix ans après l'entrée en vigueur de la
Constitution du 18 février 2006, le système juridique continue
à accuser des incohérences notables qui répugnent à
l'idéal de l'État de droit constitutionnel. Quelle attitude
adopter en face d'une telle situation ?
Il y a lieu de relever que, depuis 2006, les organisateurs des
manifestations n'ont jamais songé à actionner les
mécanismes juridiques dans le but de faire extraire de l'ordonnancement
juridique congolais le décret-loi de 1999 dont la
contrariété à la constitution n'a pas cessé
d'être clamée. C'est l'occasion de constater la nonchalance du
congolais face à la violation de ses droits fondamentaux. La
défense des droits et libertés fondamentaux requiert pourtant un
engagement citoyen multidimensionnel, privilégiant l'exercice de son
droit au juge dans la conquête des libertés.
Le contrôle de constitutionnalité et l'exception
d'inconstitutionnalité constituent des pistes privilégiées
de solution. La conception pyramidale de l'ordre juridique implique une
dimension horizontale, qui complémente cette hiérarchie.
L'existence même des normes présuppose la possibilité de
leur violation, conçue en tant que comportement anti-normatif. C'est la
raison pour laquelle un contrôle est établi par le biais de
sanctions ayant un effet réparateur702(*). En fait, l'exception d'inconstitutionnalité
n'est qu'une des modalités du contrôle de
constitutionnalité, par voie d'exception. Elle permet, en droit
constitutionnel général, d'écarter l'application d'une
disposition de la loi ou du règlement à une affaire
déterminée. En tout cas, si on s'en tient à
l'alinéa 4 de l'article 26 de la Constitution, c'est au
législateur que l'on imputerait la lourde responsabilité en ce
qui concerne ce vide législatif. Ce qui peut faire croire que l'on est
en présence d'une forme d'incompétence négative, comme
relevé plus haut. Laquelle donne lieu à une
inconstitutionnalité par omission.
Section 3. La liberté de
manifestation : la nécessité de la cohérence du
système juridique de protection
Nous référant à l'article 221 de la
constitution comme principe et au fonctionnement du système juridique,
nous en déduirons l'application en droit congolais du principe selon
lequel la règle inferieure dépend de la conformité
à la norme supérieure qui lui confère
légitimité, le système tout entier reposant sur la
constitution. Celle-ci comporte, elle aussi, des valeurs universelles
auxquelles aucune nation ne devrait déroger, lesquelles valeurs
conditionnent la validité de toute constitution.
§1. La conformité des
normes à la Constitution et aux conventions internationales des droits
de l'homme : principal indice de la cohérence du système
juridique
La suprématie de la Constitution dans l'ordre juridique
interne est devenue aujourd'hui un truisme si bien qu'on ne peut se donner la
peine de le démontrer ; celle-ci véhicule les valeurs
fondamentales, lesquelles se sont universalisées. La Déclaration
française des droits de l'homme et du citoyen de 1789 l'affirme avec
vigueur lorsqu'en son article 16 il est déclaré que
« toute société dans laquelle la garantie des droits
n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs
déterminée, n'a point de constitution » ; la
légitimité de la constitution, produit du pacte social, est
subordonnée à la garantie des droits. La garantie englobe deux
actions, celle de reconnaître et celle de protéger703(*). Mais la constitution n'a
pas le monopole de garantie des droits fondamentaux. Ceux-ci sont aussi
consacrés par les traités internationaux.
1. Les traités
internationaux dans l'ordre juridique de la RDC
En droit international des droits de l'homme, la ratification
par un État du Pacte international relatif aux droits de l'homme fait
naître, à charge dudit État, une triple obligation :
de respecter, de protéger et de mettre en oeuvre les droits contenus
dans le Pacte ; par obligation de respecter, l'État partie s'engage
à ne pas troubler, par son fait, la pleine jouissance des droits
garantis ; l'obligation de protéger s'analyse en termes d'un
engagement de l'État partie à empêcher que les faits de
tous autres acteurs ne puissent entraver la pleine jouissance des droits
consacrés dans le Pacte ; enfin, l'obligation de mettre en oeuvre
impose à l'État partie de prendre toutes les mesures
nécessaires pour assurer la pleine jouissance desdits droits.
Il y a lieu de se poser la question sur la place du
traité dans l'ordonnancement juridique congolais, notamment en rapport
avec la Constitution. Cette question a soulevé des débats
passionnants entre les camps des publicistes qui tirent chacun la couverture de
son côté.
Le système juridique congolais de la 3e
République est qualifié de moniste, au sens où les
traités sont intégrés à l'ordre juridique existant.
Dans un système dualiste au contraire, on distingue le droit interne du
droit international, les traités et accords internationaux ne concernent
alors que les rapports entre les personnes de droit international (État
ou organisation) et ne pénètrent dans la sphère du droit
interne que moyennant l'adoption d'une loi704(*).
La Constitution du 18 février 2006 prévoit en
son article 215 que « les traités et accords internationaux
régulièrement conclus ont, dès leur publication, une
autorité supérieure à celle des lois, sous réserve
pour chaque traité ou accord, de son application par l'autre
partie ». Elle prévoit, en outre, en son article 216 que
« si la Cour constitutionnelle (...) déclare qu'un
traité ou accord international comporte une clause contraire à la
Constitution, la ratification ou l'approbation ne peut intervenir
qu'après la révision de la Constitution ».
Le rang des normes internationales au sein de la
hiérarchie est donc clairement défini par la Constitution du 18
février 2006 : elles sont subordonnées à la
Constitution, puisqu'elles ne peuvent produire d'effet juridique si elles lui
sont contraires, mais elles ont une valeur supérieure à la loi,
dès lors qu'elles ont été ratifiées ou
approuvées par l'exécutif et qu'elles sont appliquées par
les autres États signataires (clause de réciprocité).
Certes, le droit international interdit à un
État de se prévaloir de sa Constitution pour échapper aux
obligations qu'il aurait contractées suite à un traité ou
à un accord. Mais dans l'ordre juridique interne du droit congolais, la
Constitution reste supérieure aux traités. En France, La
jurisprudence confirme cette caractéristique :
- CE, 1998, Sarran et Levacher et C. Cass., 2000, Pauline
Fraisse constatent en termes identiques la primauté de la Constitution
sur les traités dans l'ordre interne ;
- CC, 2004, Traité établissant une Constitution
pour l'Europe : dans cette décision relative au traité
établissant une Constitution pour l'Europe, le Conseil constitutionnel
place la Constitution « au sommet de l'ordre juridique
interne ».
Les partisans du droit international public tirent de la
possibilité de ratifier la constitution pour intégrer un
traité l'argument de la supériorité du traité sur
la constitution. Selon cette thèse, c'est la règle
inférieure qui est tenue de se conformer à la règle
supérieure et, en l'espèce, la Constitution au traité. Les
faiblesses de cet argument ne sont pas difficiles à percevoir :
d'abord on ne saurait comparer la vigueur de la constitution à un
traité non encore ratifié et donc ne faisant pas encore partie de
l'ordonnancement juridique, la comparaison pèche par sa
prématurité ; aussi faudrait-il ici souligner que l'article
43 de la loi organique n° 13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation
et fonctionnement de la cour constitutionnelle soumet un traité
ratifié au contrôle de constitutionnalité par la Cour
constitutionnelle. Etant soumis au contrôle de la
constitutionnalité, le traité est indubitablement
inférieur à la constitution, il se place en dessous d'elle dans
la hiérarchie des normes. En second lieu, il faut retenir que le droit
international résulte, non d'un transfert intégral de la
souveraineté, mais d'un abandon partiel705(*) de celle-ci. La majestueuse
constitution, expression de la souveraineté nationale intégrale,
ne peut aucunement courber l'échine devant un traité
international, quel qu'il soit.
D'ailleurs, dans sa décision du 22 août 2019, la
Cour constitutionnelle béninoise venait opérer une grande
révolution, affirmant la supériorité conditionnée
du règlement communautaire sur la loi nationale. Elle considère
ainsi que le droit communautaire dérivé doit plier devant la loi
nationale lorsque celle-ci crée des droits acquis au
bénéfice des citoyens706(*). Reste à présent à examiner la
place de la liberté de manifestation en droit des droits de l'homme.
2. La
liberté de manifestation en droit international des droits de
l'homme
Longtemps négligée par la doctrine707(*) et tardivement reconnue
par les gouvernants708(*), la liberté de manifestation est revenue sur
le devant de la scène essentiellement du fait de ses manifestations
empiriques. Les mouvements sociaux et politiques induits par les printemps
arabes comme la circulation massive des images et des idées par le biais
des réseaux sociaux ont permis de révéler à la fois
la puissance et les enjeux de l'exercice d'une telle liberté publique.
Dans le même temps, ils ont mis au jour les difficultés de
conceptualisation et de mise en oeuvre de ce droit, sa singularité par
rapport aux autres droits et libertés et son enracinement profond dans
les fondements mêmes des sociétés modernes.
L'appréhension del'encadrement des libertés
publiques à l'échelle du droit international concerne
principalement le droit international des droits de l'Homme.La liberté de manifestation fait l'objet d'une
reconnaissance ferme et généralisée en droit international
des droits de l'Homme, principalement à travers la liberté de
réunion qui l'englobe. Cette affirmation se manifeste sans
équivoque dans les grands instruments internationaux qui la consacrent,
qu'il s'agisse de conventions générales ou spéciales. Mais
la liberté de manifestation fait encore l'objet d'une attention
particulière de la part de certains organes, qui s'attachent à en
détailler les modalités de mise en oeuvre et d'articulation avec
les autres droits protégés. Partant, pour mesurer l'ampleur de la
consécration de la liberté de manifestation en droit
international seront successivement envisagées ses proclamations
conventionnelles (A), son affirmation juridictionnelle ou
quasi-juridictionnelle (B).
§2. La protection conventionnelle de la liberté
de manifestation
La liberté de manifester est principalement
protégée au niveau international à partir de la
liberté de réunion. Elle fait à ce titre l'objet d'une
consécration particulièrement généralisée
qui démontre son universalité parmi les libertés
publiques. Ce droit figure au sein de la totalité des instruments
internationaux de protection des droits de l'Homme, qu'il s'agisse des
conventions « générales », au sens des grands
textes protecteurs des droits civils et politiques, ou des conventions
« spécialisées », axées autour de la
protection d'une catégorie de personne ou de garanties.
L'établissement d'un état des lieux de ces consécrations
conventionnelles s'impose par conséquent pour confirmer l'étendue
de la protection internationale de la liberté de manifestation.
Au chapitre des conventions générales tout
d'abord, la Déclaration universelle des droits de l'Homme (DUDH)
protège elle-même en son article 20 le droit de toute
personne « à la liberté de réunion et
d'association pacifiques709(*) ». Ce texte, adopté le
10 décembre 1948 par l'Assemblée Générale
des Nations Unies n'a pas per se de valeur contraignante, mais
il est à l'origine de bon nombre de conventions ultérieures et a
inspiré le développement du droit international des droits de
l'homme. Dans la lignée de cette première proclamation
internationale, le Pacte international relatif aux droits civils et
politiques710(*),
adopté en 1966 sous l'égide, là encore, des Nations Unies,
fait figure de première consécration contraignante à
l'échelle universelle des droits de l'homme dits de première
génération711(*). Parmi les droits et libertés classiques, il
énonce en son article 21 que :
Le droit de réunion pacifique est reconnu. L'exercice
de ce droit ne peut faire l'objet que des seules restrictions imposées
conformément à la loi et qui sont nécessaires dans une
société démocratique, dans l'intérêt de la
sécurité nationale, de la sûreté publique, de
l'ordre public ou pour protéger la santé ou la moralité
publiques, ou les droits et les libertés d'autrui.
La consécration de la liberté de manifestation,
à travers la liberté de réunion, se retrouve quasiment
à l'identique dans les conventions régionales. La convention
américaine relative aux droits de l'homme712(*) énonce dans son
article 15 que :
Le droit de réunion pacifique et sans armes est
reconnu. L'exercice de ce droit ne peut faire l'objet que des seules
restrictions qui, prévues par la loi, sont nécessaires dans une
société démocratique dans l'intérêt de la
sécurité nationale, de la sûreté et de l'ordre
publics ou pour protéger la santé ou la moralité
publiques, ou les droits ou les libertés d'autrui.
L'article 11 de la Convention européenne de
sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales la
protège en des termes légèrement différents. Il
proclame en effet le droit de toute personne à la liberté de
réunion et d'association, mais y adjoint le droit de fonder et de
s'affilier à des syndicats. C'est toutefois au stade des restrictions de
ladite liberté que le texte européen se distingue davantage des
autres instruments de protection puisqu'il prévoit que :
L'exercice de ces droits ne peut faire l'objet d'autres
restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures
nécessaires, dans une société démocratique,
à la sécurité nationale, à la sûreté
publique, à la défense de l'ordre et à la
prévention du crime, à la protection de la santé ou de la
morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. Le
présent article n'interdit pas que des restrictions légitimes
soient imposées à l'exercice de ces droits par les membres des
forces armées, de la police ou de l'administration de l'État.
Le continent européen bénéficie
même d'une double proclamation puisque la Charte des droits fondamentaux
de l'Union européenne consacre également en son article 12.1
le droit de toute personne à la liberté de réunion
pacifique et aÌ la liberté d'association « aÌ
tous les niveaux, notamment dans les domaines politique, syndical et civique,
ce qui implique le droit de toute personne de fonder avec d'autres des
syndicats et de s'y affilier pour la défense de ses
intérêts713(*) ».
La Charte africaine des droits de l'Homme714(*) et des peuples n'est
pas en reste et protège en son article 11 le droit de toute
personne à « se réunir librement avec
d'autres », tout en rappelant que « [c]e droit s'exerce
sous la seule réserve des restrictions nécessaires
édictées par les lois et règlements, notamment dans
l'intérêt de la sécurité nationale, de la
sûreté d'autrui, de la santeì, de la morale ou des droits
et libertés des personnes ».
Certaines conventions spécialisées assurent
également la protection de la liberté de manifestation à
partir de la proclamation de la liberté de réunion. C'est le cas
notamment de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de
discrimination raciale, en son article 5, qui prohibe la discrimination
dans l'exercice de la liberté de réunion et d'association
pacifique715(*). C'est
encore le cas de l'article 15 de la Convention internationale relative aux
droits de l'enfant716(*), qui reconnaît à ce sujet
spécifique la jouissance des libertés d'association et de
réunion pacifique. On peut encore citer, au titre des conventions
spécialisées, l'exemple de la Déclaration sur le
droit et la responsabilitéì des individus, groupes et organes de
la société de promouvoir et protéger les droits de l'homme
et les libertés fondamentales universellement reconnus717(*). Son article 5
énonce en effet qu'« [a]fin de promouvoir et protéger
les droits de l'homme et les libertés fondamentales, chacun a le droit,
individuellement ou en association avec d'autres, aux niveaux national et
international [...] de se réunir et de se rassembler
pacifiquement ».
La reconnaissance de la liberté de manifestation en
droit international, dans la mesure où elle découle de la
liberté de réunion pacifique, ne fait par conséquent aucun
doute. Elle figure au sein du catalogue des droits civils et politiques
garantis depuis la fin de la seconde guerre mondiale, tant dans des instruments
à vocation générale (régionaux comme universels)
que dans des textes dédiés à une problématique
spécifique. En ce sens, l'ancrage de la liberté de manifestation
dans le droit international des droits de l'Homme est profond et ancien,
confirmant, du moins d'un point de vue théorique, la reconnaissance de
son caractère fondamental pour l'établissement d'une
démocratie véritable. Cette affirmation est par ailleurs
renforcée par la pratique des organes de contrôle juridictionnels
et quasi juridictionnels chargés de l'application de certaines de ces
conventions, dont les activités ont participé à asseoir
cette consécration unanime.
Dès son accession à l'indépendance, la
RDC s'est ouvert aux préoccupations internationales relatives à
la protection des Droits de l'Homme, elle a adhéré sans
réserve à la Déclaration universelle des droits de
l'Homme et de la même manière ratifiée le Pacte
international relatif aux droits civils et politiques ainsi que le Protocole
facultatif s'y rapportant718(*). De même aussi, elle est membre de l'Union
Africaine et partie à la Charte africaine des droits de l'Homme et des
peuples.
CHAPITRE SIXIEME :
PROSPECTIVES POUR UNE
PROTECTION PLUS EFFICACE ET PLUS EFFECTIVE DU DROIT
DE MANIFESTER EN RDC
|
Le silence du législateur congolais sur la
liberté de manifestation n'a pas rendu service à la
démocratie. Les élans autoritaires des pouvoirs publics congolais
n'ont été que confortés par cet imbroglio favorisant le
recours à un régime contraire à la Constitution du 18
février 2006 durant plus d'une décennie. Jusqu'à ce jour
où la loi Sesanga devrait être considérée comme
déjà promulguée, le recours continu aux
procédés du décret-loi de 1999 est déploré
à longueur des journées. Certes, l'adoption de la loi Sesanga a
fait franchir à la République un grand pas en la matière,
mais l'impérieuse nécessité de réformer le
système congolais de la liberté de manifestation demeure une
actualité (section I). En outre, parce que la légitimité
d'une norme en est une caractéristique essentielle qui lui permet
d'assurer sa fonction de direction (section II), le processus de naissance de
la norme comporte un impact réel sur son effectivité.
C'est l'absence de contradiction entre les normes qui permet
d'assurer leur effectivité. Suivant cette vision, l'ordre juridique
n'est pas un système de normes composite, c'est-à-dire un
système où les normes seraient toutes placées au
même rang719(*).Il
importe cependant de relever que tant la structure du système juridique
que l'ensemble des droits qu'il protège sont garantis pas le juge qui en
constitue une digue de protection. Ainsi, la protection de la liberté de
manifestation ne peut prospérer en RDC qu'en présence d'un
service public de la justice de qualité (section III) capable de
subjuguer l'Administration et de mettre en mouvement tous les recours garantis
aux citoyens par la Constitution et les lois de la République.
Il sied aussi que les débiteurs des devoirs
constitutionnels soient interpellés si le non accomplissement de ces
devoirs obstrue à la jouissance de la liberté de manifestation
par ses titulaires (section IV).
Section
1. La nécessité de reformer le système juridique congolais
de protection de la liberté de manifestation
La cohérence et la sanction de la norme sont intimement
liées en ce sens que celle-là conditionne celle-ci.
§1. La recherche de la cohérence du
système juridique
L'État de droit constitutionnel repose sur le postulat
selon lequel l'ensemble de l'ordre juridique de l'État est
subordonné à la constitution qui exerce une sorte
d'hégémonie sur toutes les autres règles. De cette norme
fondamentale découle, théoriquement, la validité de
l'ensemble des normes d'un ordre juridique, formant ainsi une
hiérarchie. Ainsi, l'ordre normatif n'est pas « un complexe de
normes en vigueur les unes à côté des autres, mais une
pyramide ou hiérarchie des normes qui sont superposées, ou
subordonnées les unes aux autres, supérieures ou
inférieures »720(*). Dans ce même sens, Jacques Chevalier
considère qu'« en tant que système721(*) l'ordre juridique se
caractérise par les deux principes essentiels de cohésion et de
hiérarchie : unies par des liens : unies par des liens
d'interdépendance, les normes juridiques se voient assigner en son sein
une place différenciée et inégalitaire.
1. Position du problème
Appliqué à l'ordre juridique, le principe de
cohésion se traduit par les exigences de compatibilité, de
non-contradiction et de complétude : il implique que les normes qui
composent l'ordre juridique ne s'excluent pas mutuellement, que leurs
énoncés ne soient pas antinomiques et qu'elles ne comportent pas
des lacunes flagrantes, des blancs interstitiels, de nature à paralyser
leur efficacité722(*).
L'absence de contradiction entre les normes constitue une
condition juridique de l'effectivité de la norme. Celle-ci peut en effet
être menacée par une contradiction entre cette norme et une norme
inférieure car, le cas échéant, les effets de l'une
contreviendront à ceux de l'autre, au risque d'une neutralisation
réciproque de leurs effets respectifs, voire d'une domination de la
norme inférieure sur la norme supérieure. « En
principe, les critères de validité retenus dans le cadre de
l'ordre juridique doivent permettre d'assurer sa cohérence, et ainsi de
préserver l'effectivité de la norme. En organisant l'absence de
contradictions entre les normes, la cohérence de l'ordre juridique
contribue à préserver l'effectivité de la norme, elle en
est donc l'une des conditions juridiques »723(*).
Il faut pourtant aller plus loin. Un système ne se
réduit pas à un simple jeu d'interactions entre des
éléments unis par des rapports d'interférence et de
complémentarité : le propre d'un système est au contraire
de former une unité complexe, une totalité, dotée de
propriétés nouvelles et gouvernée par une logique
d'ensemble. Cette « totalité » est à la fois
plus et moins que la somme des parties : si le système possède
des « qualités émergentes », inconnues des
composantes, il pèse en retour sur elles comme contrainte, en limitant
le champ de leurs possibilités, en bridant certaines de leurs
potentialités724(*). Du fait de leur agencement en système, les
normes juridiques ne peuvent plus être considérées
isolément, sans référence à l'unité du tout
leur sens est surdéterminé par la logique d'ensemble qui gouverne
l'ordre juridique dans lequel elles se trouvent insérées.
C'est en cela que l'ordre juridique constitue, au sens propre
du terme, un ensemble « rationnel » : il existe en effet
à la base de l'ordre juridique, comme de tout système
organisé, un principe d'ordre, une logique même si elle n'est pas
de type formel, qui lui donne ses caractères propres et garantit sa
cohésion. Cette logique contribue à la fois à cristalliser
l'identité spécifique de l'ordre juridique vis-à-vis de
l'extérieur et à réaliser son unité positive sur le
plan intérieur. Elle constitue la clé qui détermine
l'appartenance à l'ordre juridique et le ciment qui lie entre eux les
éléments constitutifs, en assurant la cohérence de leur
articulation et la transparence de leur signification ;
intégrées au même ordre, les normes juridiques se trouvent
du même coup placées sous l'empire d'une logique commune,
exclusive et totalisante, ne tolérant pas la contradiction, qui les
imprègne et modèle leurs rapports725(*).
Le modèle d'organisation de l'ordre juridique
proposé par Hans Kelsen, fondé sur une hiérarchie entre
les normes de cet ordre, semble en principe en mesure d'assurer sa
cohérence.
Il repose sur une « norme fondamentale »
supposée429, distincte de la Constitution, qui unifie l'ensemble des
normes de l'ordre juridique. Le principe suivi par Kelsen, déduit de la
loi Hume, est que « la validité d'une norme ne peut avoir d'autre
fondement que la validité d'une autre norme »726(*).
L'absence de contradiction entre les normes constitue une
condition juridique de l'effectivité de la norme. Celle-ci peut en effet
être menacée par une contradiction entre cette norme et une norme
inférieure car, le cas échéant, les effets de l'une
contreviendront à ceux de l'autre, au risque d'une neutralisation
réciproque de leurs effets respectifs, voire d'une domination de la
norme inférieure sur la norme supérieure. En principe, les
critères de validité retenus dans le cadre de l'ordre juridique
doivent permettre d'assurer sa cohérence, et ainsi de préserver
l'effectivité de la norme. En organisant l'absence de contradictions
entre les normes, la cohérence de l'ordre juridique contribue à
préserver l'effectivité de la norme, elle en est donc l'une des
conditions juridiques727(*).
2. Nos propositions
Si l'incohérence du système juridique demeure un
vice congénital qui affecte la bonne jouissance de la liberté de
manifestation, il faut admettre qu'une thérapie adaptée peut bien
y remédier. Nous avons ainsi suggéré que, de lege ferenda,
pour éviter que le silence du législateur n'attente constamment
à la jouissance d'autres droits comme il a été le cas avec
la liberté de manifestation, d'une part les réformes puissent
compléter le mécanisme de l'article 140 de la Constitution en
reconnaissant à la Cour constitutionnelle la possibilité de
constater la promulgation de droit d'une loi ayant
réalisé un parcours législatif régulier en
l'occurrence la loi Sesanga et d'enjoindre au Journal officiel de la publier en
vue de son opposabilité ; d'autre part, au regard du caractère
immédiat et contraignant des droits fondamentaux, la Cour
constitutionnelle, saisie par le Procureur général ou par toute
personne, devrait déclarer l'inconstitutionnalité par omission du
législateur dans un domaine donné relatif aux droits
fondamentaux ; cette déclaration devant avoir pour effet
l'inscription prioritaire de la question à l'ordre du jour de la session
en cours ou de la prochaine session de l'Assemblée nationale.
§2. Le renforcement des sanctions comme condition
d'effectivité
« Une règle n'est pas juridique parce qu'elle est
sanctionnée ; elle est sanctionnée parce qu'elle est juridique
»728(*). Ainsi, la
sanction n'est pas le critère qui permet d'identifier une obligation
juridique729(*) mais
elle est une norme dont la fonction est d'assurer le respect d'une autre norme.
En assurant le respect de cette autre norme, elle contribue aussi à son
effectivité.
1. Position du problème
S'appuyant sur la distinction opérée par H.L.A.
Hart entre les normes primaires et les normes secondaires730(*), Norberto Bobbio a
montré que l'apparition des sanctions, en tant que normes secondaires,
était la manifestation du passage d'un système juridique simple
à un système juridique complexe. Ainsi, l'établissement de
sanctions juridiques est rendu nécessaire par l'insuffisance des
sanctions sociales dans les systèmes juridiques « simples » et
marque ainsi le passage à un système
« complexe »731(*). Il s'en suit que la fonction de la sanction est
bien d'assurer le respect des normes primaires. On admet ainsi
traditionnellement que la menace de la sanction « constitue un des moyens
les meilleurs et les plus simples d'assurer le respect effectif des obligations
»732(*), ou encore
que la sanction « a pour fonction d'assurer la réalisation de la
règle juridique »733(*). Dès lors que le respect de la norme
contribue en principe à son effectivité, il est possible de
retenir, comme Denys de Bechillon que « la promesse d'une punition, quelle
qu'en soit la teneur, vise bien à assurer l'effectivité de la
norme »734(*).
Néanmoins, la contribution de la sanction à
l'effectivité de la norme dépend de la façon dont elle
assure sa propre fonction. Ainsi, une sanction relative a nécessairement
une influence relative sur l'effectivité. Pour tenter d'évaluer
la contribution des sanctions à l'effectivité de la norme, il
convient d'abord d'identifier les différentes catégories de
normes secondaires qui assurent un rôle de sanction dans l'ordre
juridique. Dès lors que l'on retient une approche fonctionnelle de la
sanction, celle-ci peut être définie comme une norme juridique
secondaire dont la fonction est d'assurer le respect d'une norme juridique
primaire735(*). Sur la
base de cette définition, trois catégories de sanction peuvent
être identifiées.
La première est constituée par le droit
répressif, c'est-à-dire les normes secondaires ayant pour
fonction de « punir » le non-respect d'une norme primaire736(*). Selon Jacques Mourgeon, la
punition permet ainsi d'éviter la violation d'une norme, « soit a
priori, par l'effet intimidant qu'elle produit, soit a posteriori, en
réduisant les possibilités de la renouveler »737(*). Néanmoins, si l'on
en adopte une définition large, la sanction ne se limite pas à la
répression.
La seconde catégorie est constituée par le droit
de la responsabilité, c'est-à-dire les normes secondaires
traduisant l'« obligation de répondre d'un dommage devant la
justice et d'en assumer les conséquences »738(*). Si la responsabilité
a pour fonction principale la réparation, elle contribue au respect de
la norme. Les normes établissant un système de
responsabilité s'attachent, au-delà de la réparation,
« à établir les conséquences de la violation des
normes primaires »739(*). Néanmoins, cela n'est en principe le cas que
des mécanismes de responsabilité fondés sur la violation
d'une norme primaire, ce qui implique d'exclure ceux qui ne le sont pas,
notamment les régimes de responsabilité sans faute740(*).
La troisième catégorie regroupe un ensemble de
procédés dont la fonction est d'invalider des normes contraires
à celles qui leurs sont supérieures. Ainsi, la nullité
« sanctionne l'irrégularité originelle d'un acte juridique
par une décision juridictionnelle »741(*). En droit public interne,
c'est par exemple l'annulation qui remplit en principe cette fonction.
Le droit public connaît chacune de ces trois
catégories mais l'obligation juridique y présente certaines
spécificités. L'État est à la fois la source et
sujet de l'obligation juridique. Cela impose de distinguer, pour l'étude
de la sanction en droit public, deux situations : celle où l'État
sanctionne et celle où il est lui-même sanctionné.
En premier lieu, un des attributs essentiels de la puissance
publique est d'imposer des obligations et, par conséquent, d'infliger
des sanctions en cas de conduite contraire. Cela est essentiellement l'objet du
droit répressif742(*). Selon Beccaria, l'idée de la
répression est inhérente à la nature humaine743(*).
En second lieu, la puissance publique peut elle-même
être sanctionnée si elle ne satisfait pas à ses
obligations. L'ordre juridique est en effet « source de contrainte,
d'obligation, pour les organes de l'État »744(*). Néanmoins, « la
sanction du droit public est plus difficile à organiser, car ici
l'État est en cause et il ne sera pas enclin à se condamner
lui-même »745(*). En effet, l'État étant
l'administrateur du droit répressif, il ne saurait s'auto-sanctionner,
comme en témoigne l'irresponsabilité pénale des personnes
morales soutenue en droit congolais746(*). Pour autant, si la « répression »
envers l'État reste exclue, sa personnification permet de lui infliger
certains types de sanctions. Les normes qu'il adopte peuvent être
invalidées et il peut voir sa responsabilité engagée.
Sur le plan théorique, la sanction de la norme
contribue en principe à son respect et, par ce biais, à son
effectivité. En tant que norme secondaire, sa fonction est d'inciter au
respect d'une norme primaire747(*). En droit public, cette fonction est occupée,
directement ou indirectement, par la répression, l'invalidation et la
responsabilité748(*). Or, le respect de la norme lui permet en principe
de produire des effets sur la société. La sanction constitue donc
une condition juridique de l'effectivité de la norme.
Néanmoins, « loin de nous offrir l'image d'un
système parfaitement ordonné, l'ensemble des sanctions
consacrées par le droit se présente sous la forme d'un
réseau diversifié aux articulations multiples et complexes
»749(*) et la place
de l'État au centre du droit public complexifie ce schéma. D'un
côté, la répression du non-respect des normes de droit
public à l'égard des personnes privées n'est pas toujours
dissuasive. De l'autre, aucune « répression » n'est
appliquée à l'État. Seuls des moyens indirects de sanction
permettent d'assurer le respect des normes de droit public par la puissance
publique.
La fonction de sanction de l'invalidation de la norme et de la
responsabilité de la puissance publique n'est que secondaire, leurs
fonctions primaires étant respectivement le contrôle de la «
légalité » au sens large et la réparation des
préjudices. Les conséquences de l'absence de validité
d'une norme sont parfois faibles et les conditions d'engagement de la
responsabilité en limite logiquement la fonction de sanction.
Cette dimension du problème mérite aussi
d'être examinée à l'aune, non seulement du droit congolais,
mais aussi des réalités quotidiennes dans les plusieurs secteurs
de la vie publique. La Constitution congolaise du 18 février 2006 a pris
une position non équivoque en faveur du respect dû aux
décisions de justice. Cependant, la force de la sanction de la norme
s'en trouve fragilisée lorsque l'exécution des décisions
judiciaires est souvent entravée par le pouvoir exécutif.
A plusieurs reprises, les décisions de la Cour
constitutionnelle réhabilitant les gouverneurs de province déchus
par des motions de censure irrégulières et celles du Conseil
d'État infirmant des décisions des Cours d'appel ont
manqué de recevoir exécution parle vice-premier ministre et
ministre de l'intérieur et par la Commission électorale nationale
indépendante, pour des raisons inavouées.
Par conséquent, la « rareté » et le
« caractère souvent non dissuasif de la sanction » font
que « le couple prescription-sanction n'a rien de constant (...). Dans la
réalité les non-applications ou les violations du droit ne sont
pas toutes sanctionnées »750(*). La contribution de la sanction de la norme à
son effectivité est donc relative. Le lien entre sanction et
effectivité n'est pas un rapport d'implication strict mais il est au
contraire souple. Ainsi, si la sanction « constitue un moyen
irremplaçable de réalisation du droit »751(*), elle « n'est pas une
condition suffisante d'effectivité »752(*). L'effectivité de la
norme est aussi fonction de sa légitimité.
2. Notre proposition
La loi Sessanga prévoit plus d'incriminations contre
les manifestants que contre les autorités publiques reconnues pour leurs
attitudes hostiles à la liberté. Des recherches
précédentes sur le contentieux administratif ont
déjà suggéré la pénalisation du refus
d'exécuter la décision de la juridiction administrative753(*). Au regard des attitudes
souvent réfractaires des autorités administratives face aux
libertés fondamentales, pareille suggestion ne ferait que vivifier
l'État de droit en RDC.
Cependant, la spécificité de la liberté
de manifestation et les contraintes temporelles de son exercice exigent une
mise en oeuvre systématique des poursuites pénales contre les
autorités administratives pour rébellion et pour refus
d'obtempérer. Ce recours systématique aux mécanismes
pénaux devrait être facilité par une activité
intense des organisateurs des manifestations et des parquets civils qui
seraient tenus de réagir, sous peine de sanction, devant toute
dénonciation par voie de presse. En outre, nous pensons qu'il faille
décourager les interdictions intempestives des manifestations publiques
par la déchéance de l'autorité administrative
récidiviste.
En clair, la mesure viserait toute autorité
administrative dont au moins trois décisions consécutives
d'interdiction seront annulées par le juge administratif à
l'occasion du contrôle de la légalité, de la
nécessité, de l`opportunité ou de la
proportionnalité. Ce renforcement de sanctions pourra permettre aux
libertés publiques de connaitre leur âge d'or et ainsi parvenir
à leur effectivité.
§3. La mise en place de voies
de recours juridictionnels adaptées à la protection des droits
fondamentaux
A côté des garanties juridictionnelles ordinaires
visant la protection de la liberté de manifestation, il existe en droit
français, espagnol comme en droit béninois, des recours
spéciaux en la matière (1). Le droit congolais comporte lui aussi
des pareils recours, perfectibles toutefois à l'aune du droit
comparé (2).
1. Analyse comparée des
recours juridictionnels spéciaux en matière de protection de la
liberté de manifestation
La Cour constitutionnelle est comme toute autre juridiction de
l'ordre judiciaire et de l'ordre administratif considérée comme
première protectrice des libertés individuelles et des droits
fondamentaux des citoyens, parmi lesquels on peut citer le très
célèbre droit de manifester754(*). Cependant, elle est juge de tout acte
administratif, règlementaire ou non, susceptibles de porter atteinte aux
droits fondamentaux de la personne humaine ou aux libertés
publiques.755(*) Ce sont
celles qui résultent du contrôle juridictionnel des lois que les
juridictions constitutionnelles peuvent exercer, à la différence
des juridictions ordinaires et cela sous les différentes formes
possibles : contrôle abstrait (a priori et a posteriori),
contrôle concret sur renvoi du juge ordinaire.
La pauvreté de la jurisprudence constitutionnelle en
matière de protection de la liberté de manifestation en
République Démocratique du Congo incite à une
référence au droit comparé pour comprendre l'impact du
juge en l'occurrence constitutionnel dans l'affirmation du droit de
manifester.
L'importance attachée aux droits fondamentaux au sein
des démocraties libérales contemporaines a conduit la France,
l'Espagne, Bénin et la République Démocratique du Congo
à mettre en place des voies de recours spécialement
aménagées pour en assurer l'effectivité. Ces recours
témoignent de la place privilégiée du juge en
matière de défense des droits et libertés, existent non
seulement devant le juge ordinaire, c'est-à-dire judiciaire et
administratif (A) mais aussi devant le juge constitutionnel (B).
A. Les procédures d'urgence
spécialisées dans la protection des droits fondamentaux devant le
juge ordinaire
Définies par Maria Fernanda Maçãs comme
« des procès principaux, autonomes et indépendants [...]
dont le dénominateur commun réside dans le besoin urgent
d'obtenir une décision »756(*), les procédures d'urgence ne se limitent pas
exclusivement au domaine des droits fondamentaux. Au contraire, la plupart de
ces procédures existent en dehors de toute finalité de protection
des droits et libertés, même si elles peuvent faire
bénéficier à ces derniers de leurs avantages757(*). Les systèmes
juridiques contemporains ont toutefois tendance à consacrer des voies de
recours reposant sur des principes de célérité et de
simplicité dont la fonction exclusive est la protection des droits de la
personne humaine contre l'action de l'administration. C'est par exemple le cas
de l'Espagne où la Constitution758(*)« consacre le droit, pour toute personne
détenue, à comparaître dans les plus brefs délais
devant la justice et à bénéficier de l'appréciation
impartiale d'un juge quant à la légalité de sa privation
de liberté ».
En revanche, il existe, en France et sur la péninsule
ibérique, des procédures d'urgence présentant un champ
d'application beaucoup plus étendu puisque susceptibles de
protéger, sinon l'ensemble des droits fondamentaux, au moins une grande
majorité d'entre eux. Ces procédures permettent à tout
justiciable estimant que l'un de ses droits fondamentaux a été
violé de saisir le juge ordinaire afin que celui-ci adopte, le plus
rapidement possible et lorsque l'urgence le justifie, les mesures
nécessaires en vue de faire cesser l'atteinte constatée.
De tels dispositifs se révèlent être de
précieux instruments de protection des droits fondamentaux car, si les
mécanismes de garantie ordinaires permettent de sanctionner les
atteintes portées aux droits et libertés, ces derniers se
distinguent généralement par une procédure complexe et
relativement lente, si bien que la protection est souvent octroyée avec
un certain retard759(*).
Or, en matière de droits fondamentaux, les conséquences d'un
retard excessif sont souvent désastreuses, ne serait-ce qu'en raison du
fait que le rétablissement de la liberté à laquelle il a
été porté atteinte est parfois impossible. En Espagne
notamment, cette voie de droit spécifique prend le nom de
procédure sommaire et prioritaire, en France elle répond à
l'appellation de référé-liberté fondamentale qui a
été copié en RDC.
A.1. La procédure
sommaire et prioritaire espagnole
En Espagne, « lorsque l'on a, à affaire à
un droit de premier rang et seulement dans ce cas, l'article 53-2 de la
Constitution dispose que le plaignant a le droit de demander protection au
juge ordinaire en utilisant une procédure spéciale fondée
sur les principes de priorité et d'urgence »760(*). Spécialement
aménagée pour protéger les droits et libertés
consacrés par les articles 14 à 29 de la Constitution761(*), cette procédure
d'urgence, également dénommée recours d'amparo ordinaire,
a longtemps fonctionné sur la base d'un système «
transitoire »762(*)organisé par la loi du 26 décembre 1978
relative à la protection juridictionnelle des droits fondamentaux de la
personne763(*).
Actuellement, ce sont les lois régulatrices de chaque ordre
juridictionnel qui en règlementent l'exercice. De sorte qu'il n'existe
pas une procédure sommaire et prioritaire commune à l'ensemble
des contentieux mais une procédure spécifique pour chaque ordre
juridictionnel envisagé. Pour s'en tenir à la matière
administrative, le recours juridictionnel spécialisé est
organisé par les articles 114 à 122 de la loi de
régulation de l'ordre juridictionnel contentieux-administratif764(*). Caractérisée
par l'urgence, la procédure mise en place déroge largement aux
principes directeurs du droit administratif. La règle du recours
administratif préalable obligatoire est écartée, les
délais de procédure sont pour la plupart écourtés
et, une fois l'instruction terminée, le tribunal dispose de cinq jours
pour rendre sa décision. Sa finalité est de permettre à
toute personne, estimant qu'une action ou une inaction de l'administration
porte atteinte à l'un de ses droits fondamentaux, de saisir le juge afin
que celui-ci, dans les délais les plus brefs, constate
l'illégalité et adopte toutes les mesures nécessaires au
rétablissement ou à la préservation de la permission
altérée765(*).
Au Portugal, la création d'une procédure
d'urgence spécialisée dans la protection des droits fondamentaux
a été rendue possible grâce à la révision
constitutionnelle du 20 septembre 1997766(*). Cette dernière ajoute un cinquième
alinéa à l'article 20 de la Constitution ainsi libellé :
« Afin de défendre les droits, libertés et garanties
personnelles, la loi assure aux citoyens des procédures judiciaires
caractérisées par leur rapidité et leur priorité,
en vue d'obtenir la tutelle effective et en temps utile des tribunaux contre
des menaces ou violations de ces droits ». Cette
célérité dans les procédures les rapproche au
référé-liberté français.
A.2. Le
référé-liberté commun à la France et
à la RDC
Consacré à l'article L. 521-2 du Code de justice
administrativefrançaispar la loi du 30 juin 2000767(*), le
référé-liberté fondamentale768(*)est à l'origine d'un
bouleversement de taille car, pour la première fois au sein de l'ordre
juridique français, apparaît une procédure juridictionnelle
dont la fonction principale et permanente est la protection des droits et
libertés qui relèvent de la catégorie des libertés
fondamentales. Certes, la voie de fait, théorie jurisprudentielle
dégagée en 1935 par le Tribunal des conflits769(*), constitue également
une voie de recours spécifique destinée à protéger
les droits et libertés770(*). Toutefois, apparue sous l'ère de
l'État légal, « les libertés visées [par cette
théorie] étaient celles protégées par le
législateur et les atteintes censurées celles de
l'administration. Le contexte de la voie de fait est donc celui de la
défense des libertés publiques et non celui des droits
fondamentaux »771(*).
En revanche, avec l'introduction du
référé-liberté fondamentale, c'est un
mécanisme de garantie spécialement aménagé pour la
protection des droits de la personne humaine qui est mis en place. Ce dernier
prévoit la possibilité pour toute personne physique ou morale,
française ou étrangère, de droit privé ou de droit
public d'obtenir, dans un délai record de quarante-huit heures, la
sanction d'une atteinte grave et manifestement illégale portée
par l'administration à l'une de ses libertés fondamentales. Pour
ce faire, il suffit de faire état d'une situation d'urgence. Sachant
que, sur ce point, le juge administratif des référés fait
preuve d'une grande souplesse puisque, le plus souvent, la reconnaissance d'une
atteinte grave et manifestement illégale à une liberté
fondamentale vaut reconnaissance de l'urgence772(*). Susceptible d'ordonner « toutes mesures »
nécessaires à la sauvegarde de la liberté, le juge dispose
de pouvoirs particulièrement étendus. Il peut se limiter à
la suspension de la décision contestée, mais également
prononcer des injonctions, au demeurant assorties d'astreintes773(*). Ce faisant, le
référé-liberté fondamental, à l'identique
des procédures d'urgence ibériques, favorise un renforcement
sensible de la protection des droits fondamentaux offerte par le juge.
Renforcement intensifié en Espagne et en France par l'existence d'un
recours constitutionnel spécialisé dans la protection des droits
et libertés constitutionnellement garantis.
En RDC, le référé-liberté est
consacré pour la première fois dans la loi organique n°
16/027 du 15 octobre 2016 portant organisation, compétence et
fonctionnement des juridictions administratives. En son article 283, le
législateur organique indique que « Lorsqu'une décision
administrative porte gravement atteinte et de manière manifestement
illégale à une liberté publique et/ou fondamentale, le
juge des référés saisi par une demande en
référé-liberté peut ordonner toute mesure
nécessaire à la sauvegarde de la liberté. Le juge des
référés se prononce dans les quarante-huit heures
lorsqu'il statue sur une demande en
référé-liberté ». Jusqu'au moment de la
rédaction de ces lignes, le référé-liberté
n'est pas encore actionné dans le domaine de la liberté de
manifestation, ce qui limite notre analyse en la matière.
B. Les recours constitutionnels
spécialisés dans la protection des droits fondamentaux
L'existence d'une procédure spécialement
aménagée pour assurer la protection des droits fondamentaux n'est
pas une caractéristique commune à l'ensemble des cours
constitutionnelles. Formellement, le Tribunal constitutionnel portugais est
dépourvu de toute attribution en la matière774(*). En revanche, une telle voie
de droit existe en Espagne et en France. En Espagne, elle prend le nom de
recours constitutionnel d'amparo. En France, elle s'intitule question
prioritaire de constitutionnalité. Avec pour fonction permanente et
principale la protection des droits et libertés constitutionnellement
protégés, ces garanties spécifiques contribuent, à
leur tour, à un renforcement sensible de la garantie juridictionnelle
des droits fondamentaux.
B.1. Le recours
constitutionnel d'amparo espagnol
A l'origine d'une littérature on ne peut plus
abondante775(*), le
recours d'amparo ne saurait faire ici l'objet d'une étude
détaillée. Néanmoins, une présentation sommaire de
cette voie de droit se révèle indispensable dans la mesure
où sa mise en place par le constituant espagnol de 1978 traduit, une
fois de plus, la place privilégiée du juge dans la protection des
droits fondamentaux.
Puisant ses sources dans le droit foral du Royaume
d'Aragon776(*), l'amparo
constitutionnel, prévu par l'article 53-2 de la Constitution
espagnole3(*)88, peut
être défini comme un recours subsidiaire spécialement
aménagé pour permettre aux individus de saisir directement le
Tribunal constitutionnel en vue d'obtenir la protection de leurs droits
fondamentaux. Sa finalité essentielle, pour ne pas dire
exclusive777(*),
étant, selon les termes même du Tribunal constitutionnel espagnol,
« la protection, à l'échelle constitutionnelle, des droits
et des libertés [...] lorsque les voies ordinaires de protection se sont
avérées insuffisantes »778(*).
La recevabilité du recours, dont l'examen incombe au
Tribunal constitutionnel, repose sur la réunion de quatre conditions
traditionnelles, auxquelles s'ajoute une cinquième condition depuis la
révision de la loi organique portant sur le Tribunal constitutionnel
(L.O.T.C.), en date du 24 mai 2007779(*).
En premier lieu, l'article 53-2 de la norme suprême
précise que la protection offerte par le recours d'amparo est
limitée aux droits et libertés reconnus par l'article 14 et la
section 1 du chapitre II de la Constitution, ainsi qu'à l'objection de
conscience780(*).
En d'autres termes, il ne peut y avoir de recours d'amparo
qu'au cas de violation des droits et libertés prévus par les
articles 14 à 30 de la Constitution781(*). C'est-à-dire, pour l'essentiel, les
droits-libertés individuels et collectifs, à l'exception notable
du droit de propriété consacré par l'article 33 de la
Constitution.
En deuxième lieu, seuls les actes des assemblées
législatives ou de leurs organes propres dépourvus de valeur de
loi782(*), les actes des
organes administratifs783(*)et les actes judiciaires784(*)sont susceptibles
d'être mis en cause dans le cadre d'un recours d'amparo.
Ce faisant, sont non seulement exclus du champ d'application
de cette voie de droit les comportements des particuliers attentatoires aux
droits et libertés785(*), mais également les actes de valeur
législative786(*).
En outre, l'admission du recours est conditionnée, en
vertu de l'article 162-1, b de la Constitution, par l'existence d'un
intérêt à agir. Le recours est ainsi ouvert à toute
personne physique, nationale ou étrangère787(*), et juridique, de droit
privé ou de droit public, en mesure de faire valoir un
intérêt né, actuel et personnel788(*).
En plus, le caractère subsidiaire du recours d'amparo
conduit le Tribunal constitutionnel à vérifier que le
requérant a épuisé l'ensemble des voies de recours devant
le juge ordinaire789(*),
gardien « naturel » des droits et libertés790(*).
Enfin, la demande d'amparo, depuis la révision de la
L.O.T.C. de 2007, n'est recevable qu'à la condition que « le
contenu du recours justifie une décision sur le fond de la part du
Tribunal constitutionnel en raison de son importance constitutionnelle
spéciale »791(*).
Cette nouvelle condition, qui ne va pas sans « objectiver
» le recours d'amparo792(*), est directement liée à la
nécessité de faire face à l'afflux croissant de recours,
source d'encombrement particulièrement alarmant du prétoire du
Tribunal constitutionnel.
Lorsque l'ensemble de ces conditions sont remplies, le
Tribunal statue sur le fond par la voied'une sentence qui peut soit accorder la
protection, soit au contraire la refuser793(*). Si la protection est accordée, l'acte ayant
porté atteinte aux droits fondamentaux est annulé. Reste que la
seule annulation peut ne pas suffire pour rétablir le requérant
dans ses droits. C'est pourquoi l'article 55-1, c, de la L.O.T.C.
prévoit la possibilité pour le juge d'adopter des mesures propres
à maintenir le rétablissement du droit ou de la liberté
violée. En somme, « le Tribunal constitutionnel, par sa sentence,
doit mettre tout en oeuvre pour faire cesser l'atteinte qu'il constate [...]
»794(*).
B.2. La question prioritaire
de constitutionnalité française
Véritable serpent de mer du droit constitutionnel
français795(*),
le débat quant à la nécessité de mettre en place ce
qui est « faussement appelé ''exception
d'inconstitutionnalité'' »796(*)a pris fin le 23 juillet 2008797(*), date de la dernière
révision constitutionnelle intervenue sous la Ve République et de
l'introduction du mécanisme de la question prioritaire de
constitutionnalité au sein de notre système juridique. Faisant
suite au Rapport officiellement remis le 29 octobre 2007 au chef de
l'État, par le Comité de réflexion et de proposition sur
la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la
Vème République, cette vingt-quatrième
révision constitutionnelle consacre effectivement un article 61-1
nouveau. Aux termes desquels : « lorsque, à l'occasion d'une
instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition
législative porte atteinte aux droits et libertés que la
Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de
cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation
qui se prononce dans un délai déterminé [...]». Il en
résulte que, désormais, tout justiciable peut contester la
constitutionnalité d'une disposition législative devant le juge
administratif ou le juge judiciaire au motif que cette dernière porte
atteinte à l'un de ses droits ou libertés constitutionnellement
garanti, à charge pour le juge ordinaire de déterminer si la
question doit être transmise au Conseil constitutionnel afin qu'elle soit
examinée au fond.
L'avancée du point de vue de l'État de droit est
indéniable. S'inscrivant en réaction aux lacunes traditionnelles
du système français de justice constitutionnelle, en particulier
à l'absence de contrôle de constitutionnalité a posteriori
des lois, la mise en place de cette nouvelle voie de droit permet non seulement
aux justiciables de faire valoir les libertés qu'ils tirent de la
Constitution, mais également de purger l'ordre juridique des
dispositions inconstitutionnelles798(*). Certes, n'ouvrant droit qu'à un accès
indirect au prétoire du Conseil constitutionnel, puisque
conditionné par le filtre préalable des juridictions ordinaires,
la question prioritaire peut apparaître, notamment pour l'observateur
étranger, largement en deçà des mécanismes allemand
et espagnol de recours constitutionnel direct.
Pour autant, sa consécration met un terme à une
« éternelle exception française »799(*)dans le concert
européen de la justice constitutionnelle. En conséquence de quoi
la question prioritaire de constitutionnalité, en même temps
qu'elle offre un nouveau droit au justiciable, se veut une illustration
particulièrement éclatante du perfectionnement constant des
mécanismes juridictionnels de garantie des droits et libertés.
Précisée quant à ses modalités
d'application par la loi organique du 10 décembre 2009800(*), promulguée
après examen préalable du Conseil constitutionnel801(*), la question essentielle
entre toutes de constitutionnalité se distingue par son caractère
prioritaire802(*).
A savoir que le juge ordinaire doit, lorsqu'il est saisi d'une
question de constitutionnalité et d'une question de
conventionalité portant sur la même disposition,
privilégier la première à la seconde. L'objectif
étant d'assurer une revalorisation de la norme constitutionnelle par
rapport à la place croissante occupée par le droit
européen au sein de l'ordonnancement juridique interne803(*). Si le Conseil
constitutionnel est saisi c'est lui qui se prononce dans un délai de
trois mois, à la suite d'un débat contradictoire, sur la
constitutionnalité de la disposition contestée. Dans
l'hypothèse où cette dernière est déclarée
inconstitutionnelle, elle « est abrogée à compter de la
publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date
ultérieure fixée par cette décision »804(*).
Sur le plan pratique, il est évidemment un peu
tôt pour dresser un bilan critique sur cette nouvelle voie de droit.
Toutefois, les premiers enseignements s'avèrent globalement
positifs805(*).
En dépit d'une certaine résistance de la Cour de
cassation806(*), les
juridictions ordinaires, notamment administratives807(*), jouent leur rôle de
filtre et de transmission des questions sans faire part d'une rétention
excessive. Et, auprès du justiciable, la question prioritaire se trouve
à l'origine d'un succès, certes mesuré en comparaison du
mécanisme de recours direct offert par l'amparo espagnol, mais
évident808(*). Ce
faisant, l'attribution de cette nouvelle compétence au Conseil
constitutionnel contribue, sans nul doute, au renforcement de la garantie
juridictionnelle des droits fondamentaux et confirme, par là-même,
le statut privilégié du juge au sein du système
institutionnel de garantie des droits de la personne humaine.
2. Perspectives pour la
République Démocratique du Congo
Thème de prédilection des manuels de droit des
libertés fondamentales, voire de droit constitutionnel
général, la question des recours juridictionnels de garantie des
droits fondamentaux est d'un grand classicisme. Son étude se
révèle néanmoins indispensable car les voies de recours
actuellement existantes en République Démocratique du Congo et
ailleurs semblent, nonobstant des petites tares, on ne peut plus
adaptées aux exigences des droits fondamentaux et, de ce fait,
conduisent à douter de l'insuffisance du juge pour assurer
l'effectivité des droits de la personne humaine. La République
Démocratique du Congo s'est efforcée de tirer les enseignements
des critiques régulièrement adressées par la doctrine
à l'égard des lacunes affectant son système de justice
administrative et, surtout, constitutionnelle, et, à l'issu de
l'entrée en vigueur de la Constitution du 18 février 2006, a
opéré des réformes de grande envergure dans le domaine
judiciaire809(*). De
sorte que, aujourd'hui, la RDC peut se prévaloir, à l'image
d'autres pays, d'un système juridictionnel de garantie des droits et
libertés relativement complet.
En effet, il sied de noter que les procédures
classiques de contrôle de la constitutionnalité des normes
concourent de manière déterminante à la protection des
droits fondamentaux. Ce contrôle constitue, à n'en point douter,
un facteur de subordination de la loi au respect des droits
constitutionnellement garantis. Le contrôle de constitutionnalité
des lois, en tant qu'il permet de censurer toute disposition législative
liberticide, se présente comme un instrument particulièrement
adapté à la protection des droits fondamentaux810(*). Toute déclaration
d'inconstitutionnalité prononcée dans le cadre d'un
contrôle a priori ou a posteriori est normalement revêtue de
l'autorité de chose jugée et conduit à l'annulation erga
omnes de la disposition législative censurée.
Ce faisant, on comprend aisément que les
procédures de contrôle de la constitutionnalité des lois
soient susceptibles de contribuer à la protection des droits
constitutionnellement garantis contre l'action du législateur.
Toutefois, « la pleine effectivité des droits et libertés ne
se satisfait pas du contrôle de conformité de la loi à la
Constitution »811(*). Encore faut-il que les autres autorités
normatives soient soumises au respect des droits fondamentaux. Or, les
procédures de contrôle de la constitutionnalité des normes
instaurées RDC permettent également de satisfaire à une
telle exigence.
Le législateur n'est pas la seule autorité
susceptible de méconnaître les droits fondamentaux, loin s'en
faut. Les particuliers, le juge et, surtout, l'administration, de par ses
prérogatives de puissance publique et son intervention quotidienne dans
la vie des administrés, constituent autant de sources d'atteintes
potentielles aux droits et libertés des individus. Par
conséquent, la mise en place de mécanismes juridictionnels
propres à sanctionner les violations de la Constitution par ces
autorités normatives est tout aussi essentielle que l'institution d'un
contrôle de la constitutionnalité des lois.
C'est dans cette idée que le constituant congolais de
2006 érige le pouvoir judiciaire en général en garant des
libertés individuelles et des droits fondamentaux des citoyens et que
les lois de la République organisent des voies de recours à
même de subordonner les actes de valeur infralégislative au
respect des droits et libertés constitutionnellement garantis.
Aux termes de l'article 162, alinéa 2 de la
constitution, même les actes règlementaires sont soumis à
la censure du juge constitutionnel. Le juge administratif est compétent
pour censurer les actes de l'administration violant la loi.
Quant au contrôle de la conformité des actes
juridictionnels à la Constitution, la compétence n'en a pas
été expressément reconnue à la Cour
constitutionnelle dans la loi organique n° 13/026 du 15 octobre 2013
portant son organisation et son fonctionnement. Néanmoins, les articles
76 in fine et 83 alinéa 2 de la loi n° 023/2002 du 18 novembre 2002
portant code judiciaire militaire812(*) prévoient que les recours pour violation des
dispositions constitutionnelles par les juridictions militaires (y compris par
la Haute Cour Militaire) sont portés devant la Cour Suprême de
Justice agissant comme Cour Constitutionnelle. Ces dispositions, prises avant
l'avènement du nouvel ordre constitutionnel en vigueur en RDC, risque de
connaitre des difficultés d'application dans la mesure où la Cour
constitutionnelle instituée par la Constitution du 18 février
2006 n'a pas été reconnue compétente, ni par la
Constitution ni par la loi organique, pour connaitre la
constitutionnalité des actes juridictionnels.
Cette prise de position du constituant s'explique par le fait
que la Cour de cassation, instituée aux termes de l'article 153 de la
Constitution, connait de la cassation des actes juridictionnels qui violent les
traités internationaux dûment ratifiés et les lois de la
République. Il faut noter que dans la pratique judiciaire en
matière de cassation, l'expression loi est utilisée à son
sens large incluant aussi la Constitution.
Cependant, les abus de plus en plus nombreux par les
juridictions plaident en faveur d'un contrôle de
constitutionnalité des décisions judiciaires, comme dans certains
systèmes ou son exercice incombe, du moins en dernier ressort, à
la Cour suprême de l'organisation judiciaire ou de l'ordre juridictionnel
au sein duquel la décision de justice a
été adoptée.
Section 2. La
légitimité de la norme de protection de la liberté de
manifestation et la nécessité de sa mise en oeuvre
L'institution des normes aux fins de régenter les
rapports sociaux demeure une tâche ardue et complexe. Non seulement la
norme qui régit le groupe social doit refléter un certain
idéal et bénéficier d'une adhésion
quasi-automatique de ses destinataires c'est qui fonde sa
légitimité (§1), mais aussi les autorités publiques
à différents niveaux doivent en faciliter la mise en oeuvre,
éventuellement par l'adoption des mesures d'application
nécessaires à son effectivité (§2).
§1. La bonne réception de la norme par ses
destinataires
La théorie du droit aborde généralement
la question de la légitimité de la norme sous l'angle de la
validité813(*).
Nous partageons la position du positivisme juridique selon laquelle elle n'est
pas une condition de la validité814(*). En revanche, la légitimité de la
norme favorise son effectivité, pareillement « la
légitimité du pouvoir est le fondement (du) devoir
d'obéissance »815(*) des sujets de droit. Or, la légitimité
du pouvoir passe largement par celle des normes juridiques. Au-delà,
comme l'exprime Michel Troper, « dire d'une institution qu'elle est
"légitime", c'est dire qu'il est juste qu'elle existe et qu'on doit lui
obéir »816(*). Par le vecteur de l'obéissance et de
l'adhésion à la norme, sa légitimité constitue une
condition de son effectivité.
1. Aperçu du
problème
Alors que le positivisme kelsénien a mis de
côté l'étude de la légitimité817(*), « il faut insister sur
le fait que ce concept est nécessaire à l'explication du
fonctionnement des règles de droit car la légitimité est
un facteur important de l'effectivité »818(*). Surtout, le droit positif a
lui-même cherché à promouvoir la légitimité.
En effet, certaines normes secondaires positives ont pour finalité de
renforcer la légitimité des normes primaires. Il est donc non
seulement possible, mais aussi nécessaire, d'étudier l'apport de
ces normes secondaires tournées vers la légitimité sur le
plan de l'effectivité de la norme.
Dans cette perspective, il convient de repartir de la
pensée de Max Weber sur la légitimité. Celui-ci en a
identifié les fondements. Parmi eux, il y a selon lui
« l'autorité qui s'impose en vertu de la «
légalité », en vertu de la croyance en la validité
d'un statut légal et d'une « compétence » positive,
fondée sur des règles établies rationnellement, en
d'autres termes l'autorité fondée sur l'obéissance qui
s'acquitte des obligations conformes au statut établi »819(*). Ainsi, la
légitimité peut notamment revêtir un «
caractère rationnel, reposant sur la croyance en la
légalité des règlements arrêtés et du droit
de donner des directives qu'ont ceux qui sont appelés à exercer
la domination par ces moyens (domination légale) »820(*). C'est la
légitimité légale-rationnelle821(*). Selon cette approche,
l'ordre juridique a « pour effet de contribuer à produire une forme
de légitimité indépendante des systèmes moraux et
politiques »822(*).
Pour autant, cela implique simplement que « la domination s'exerce
à l'aide de ce principe de
légitimité »823(*). Cela ne signifie pas que la légalité,
la validité d'une norme est suffisante pour qu'elle soit
légitime. Il convient par conséquent de dépasser la
légitimité légale-rationnelle pour identifier d'autres
facteurs de légitimité. Il ne s'agit pas de contester les
conclusions de Max Weber, mais simplement d'admettre que « la
légalité ne peut résumer à elle seule l'exercice du
pouvoir et faire de la conformité au droit l'unique source de
légitimité»824(*).
On doit paraphraser Beccaria « lorsqu'il affirme que
toute loi qui ne sera pas établie sur la base des sentiments
ineffaçables du coeur de l'homme, rencontrera toujours une
résistance à laquelle elle sera contrainte de
céder »825(*).
Si la mobilisation de la norme par ses destinataires est
indispensable pour que celle-ci puisse déployer ses effets, elle n'est
pas suffisante. L'essentiel se joue une fois que l'action en justice a
été admise. La réception de la norme par le juge
revêt alors une grande importance.
L'interprétation n'est certes pas le monopole du juge.
Celle qui en est faite par les autorités en charge de l'application de
la norme et par ses destinataires est en effet importante. Ainsi la norme
peut-elle produire des effets en dehors de toute saisine du juge et par
conséquent en dehors de toute interprétation du juge. Cependant,
l'interprétation qui est délivrée par le juge s'impose en
principe sur celle qui est effectuée aussi bien par l'auteur de la norme
que par les autorités en charge de son application ou par ses
destinataires.
Au stade de la réception de la norme, trois rapports
d'implication entre un élément du système juridique et
l'effectivité de la norme peuvent être mis en évidence.
Tout d'abord, l'accès à la justice qui est conféré
aux destinataires de la norme leur permet de jouer un rôle actif sur le
plan de la primauté du droit sur le fait et in fine de
l'effectivité. En mobilisant la norme devant le juge, ils permettent
à ce dernier de lui donner effet. L'accès à la justice
constitue donc indirectement une condition de l'effectivité. Ensuite,
une fois soumise au juge, la norme fait l'objet d'une interprétation qui
influence directement son effectivité. Par cette interprétation,
le juge est en mesure de déplacer le curseur des effets de la norme, du
moins dans le cadre de son application contentieuse. L'interprétation
constitue ainsi également une condition de l'effectivité. Elle
est d'ailleurs d'autant plus remarquable qu'elle agit directement sur le
degré d'effectivité. Enfin, l'effectivité est aussi
conditionnée par les pouvoirs dont dispose le juge pour assurer la
portée pratique de son interprétation.
Néanmoins, ces trois rapports d'implication ne sont pas
stricts. En effet, les trois conditions ici mises en évidence sont
imbriquées, si bien que les limites de l'une affectent la portée
des autres. La capacité de l'interprétation à influencer
le degré d'effectivité est doublement conditionné, d'un
côté par l'accès à la justice, de l'autre par les
pouvoirs du juge. Le juge ne peut pas interpréter une norme s'il n'est
pas préalablement saisi et son interprétation peut demeurer
purement théorique s'il ne dispose pas des pouvoirs nécessaires
pour en assurer la portée concrète sur la réalité.
Les limites qui affectent l'accès à la justice et les pouvoirs du
juge tendent ainsi à conférer une souplesse certaine aux trois
rapports d'implication mis en évidence. L'accès à la
justice, l'interprétation et les pouvoirs du juge sont ainsi des
conditions relatives de l'effectivité.
Ainsi convient-il d'élargir l'assise
démocratique de la norme et, une fois celle-ci appliquée, d'en
évaluer l'impact social c'est-à-dire mettre en évidence
des résultats, escomptés ou constatés, de la norme.
La légitimité démocratique des normes
composant un ordre juridique résulte traditionnellement, dans un
régime démocratique, de la participation de tous à la
définition de la volonté générale. En effet, «
le pouvoir politique, les règles qu'il édicte ne peuvent avoir
d'autre fondement légitime que la volonté des individus
»826(*). L'article
5 de la Constitution congolaise du 18 février 2006 tente une combinaison
des deux principales conceptions de la souveraineté populaire et
nationale en précisant que « la souveraineté nationale
appartient au peuple. Tout pouvoir émane du peuple qui l'exerce
directement par voie de référendum ou d'élections et
indirectement par ses représentants ».
Ce régime de démocratie semi-directe laisse
cependant une large part aux mécanismes de représentation. En
dehors des rares cas dans lesquelles les normes résultent du
référendum, leur légitimité repose sur des
mécanismes de représentation. Ces derniers présentent
cependant d'importantes limites qui conduisent à relativiser leur
capacité à fonder la légitimité des normes. Outre
la marginalisation des autres mécanismes démocratiques827(*), ils présentent un
risque de confiscation du pouvoir par les représentants. Les limites des
mécanismes représentatifs sont cependant suffisamment connues
sans qu'il soit besoin de s'y étendre davantage.
L'élargissement de l'assise démocratique de la
norme ne passe pas par l'abandon des mécanismes représentatifs,
mais par un double mouvement : leur renforcement d'une part, et leur
dépassement d'autre part.
L'évaluation des normes vise à mesurer leurs
résultats. Il s'agit ainsi de savoir si les objectifs fixés sont
susceptibles d'être atteints c'est l'évaluation a priori ou s'ils
ont été atteints - c'est l'évaluation a posteriori.
L'évaluation normative se rapproche ainsi de la mesure de
l'efficacité des normes sur la société. Elle peut
être définie comme « l'ensemble des analyses basées
sur l'emploi de méthodes scientifiques et portant sur la mise en oeuvre
et les effets d'actes législatifs »828(*). Il en va de même pour
les autres variétés de normes.
En principe, l'évaluation porte en premier lieu sur les
effets juridiques de la norme. Son entrée en vigueur, l'adoption de ses
actes d'application, son contenu déontique, la jurisprudence y
afférant, sa cohérence globale, sa pratique, sont passés
au crible. La doctrine a insisté sur l'importance de ce type
d'appréhension. Ainsi, « une évaluation de l'application
pratique de règles juridiques passe d'abord par un travail de
description et d'analyse de leur contenu, de leurs articulations internes et
avec les autres composantes de l'ordre juridique d'appartenance, des
opérations ou situations qu'elles tendent à ou peuvent autoriser,
favoriser, dissuader »829(*). Dans ce contexte, une évaluation de
l'article 26 de la constitution du 18 février 2006 s'impose. Il y a plus
d'une décennie que la liberté de manifestation a
été consacrée, sans que la loi portant mesures
d'application ne soit formellement promulguée. Cette carence favorise
une imprécision persistante sur la portée de l'information
écrite préalable à toute manifestation sur les voies
publiques ou en plein air instituée par le constituant de 2006, avec
comme conséquence une faiblesse de production jurisprudentielle ;
la cohérence globale s'en sort affectée notamment par les
difficultés d'interprétation de la règle de l'article 26
tant par le juge, par l'administration que par les citoyens, le tout
débouchant par une confusion dans la pratique des manifestations
publiques en RDC.
En second lieu, sont évalués les effets de la
norme sur la société dans son ensemble, pas seulement ses effets
à l'intérieur de l'ordre juridique. C'est la partie la plus
délicate. Il s'agit d'évaluer les effets budgétaires,
économiques, sociaux ou encore environnementaux d'une norme. En
l'espèce, il s'agit des réparations civiles incombant à
l'État à l'issu de l'exercice par les citoyens de leur
liberté de manifester.
Après l'élargissement de l'assise
démocratique de la norme, l'évaluation constitue donc un second
gisement de légitimité. En effet, « on ne peut plus
désormais ignorer que le pouvoir trouve aussi sa justification dans ses
réalisations »830(*), au point « de faire de
l'efficacité un critère de légitimité (...). On
n'obéit pas seulement pour ce que sont les règles qui
conditionnent l'action, mais aussi pour ce qu'on pense que sont les
résultats de cette même action »831(*). Certains auteurs affirment
même que « désormais, ce n'est plus la comparaison avec les
termes de la loi qui légitime l'action de l'État, mais c'est le
différentiel mesuré entre le but visé par une politique
publique et les effets observés dans la réalité du terrain
»832(*).
Ainsi, la légitimité « ne réside
plus dans la seule légalité de la norme ni dans les valeurs
qu'elle incarne, mais bien dans l'efficacité de ses effets
»833(*). C'est une
des conditions pour « remporter l'adhésion »834(*). La mesure de
l'efficacité de la norme, de ses résultats, influence sa
légitimité et in fine son effectivité.
La France a connu une « institutionnalisation tardive et
inachevée »835(*) de l'évaluation des décisions
publiques. En République Démocratique du Congo, pareil
mécanisme n'a pas encore vu le jour. A notre connaissance, aucun
dispositif général de l'évaluation normative n'existe dans
notre système juridique, ce qui constitue un vide que des
réformes futures pourraient bien combler.
2. Prospectives congolaises :
une éducation au droit de l'homme et au constitutionnalisme
populaire
Les lois sociales ont leurs consommateurs ; ce sont tant
les citoyens dont elles régissent les rapports sociaux que les pouvoirs
publics qui sont chargées d'appliquer lesdites lois au quotidien ;
pour une population constituée d'environ 80 % d'analphabètes
alors que les lois sont rédigées et publiées en
français, l'accès au contenu des lois par la majeure partie des
citoyens demeure encore sujet à caution. Cette inadéquation entre
les pouvoirs publics, les lois et l'un de principaux acteurs qu'est le peuple,
est de nature à semer un terrible imbroglio et l'ineffectivité
des normes de l'État.
Nous considérons que la démocratie en RDC
suppose un peuple ayant reçu une éducation constitutionnelle et
qui saura se détourner d'un déposte. Certes, la Constitution de
la RDC impose aux pouvoirs publics le devoir de promouvoir et d'assurer, par
l'enseignement, l'éducation et la diffusion, le respect des droits de
l'homme et des libertés fondamentales du citoyen qu'elle énonce.
Elle impose pareillement aux mêmes pouvoirs publics le devoir d'assurer
la diffusion et l'enseignement de la Constitution et des autres instruments des
droits de l'homme836(*).
Mais, cette éducation faite par l'État ne sera
pas utile à la cause de la liberté tant l'État aura la
tentation de l'instrumentaliser au service de sa propre autorité. Dans
le contexte de la RDC, l'ignorance des droits fondamentaux est plutôt de
nature à profiter aux pouvoirs publics qui, non seulement seront
réticents à déférer à cette injonction
constitutionnelle, mais aussi seront portés à orienter ladite
éducation au mépris de la liberté.
Ainsi, la vraie éducation constitutionnelle doit
être l'oeuvre des partis politiques et des organisations de la
société civile. Les premiers sont chargés de par la
constitution de contribuer au renforcement de la conscience nationale et
à l'éducation civique et peuvent de ce fait, procurer
l'éducation constitutionnelle à ses membres ; les secondes,
en tant que destinataires des droits fondamentaux, ont tout
intérêt à mettre en place une stratégie
d'auto-défense contre les atteintes à leurs droits fondamentaux,
par l'application des garanties constitutionnelles et des lois de leur mise en
oeuvre.
§2. Les mesures d'application de la norme
La mise en oeuvre est définie en science politique
comme « toutes les étapes post-parlementaires d'une politique
publique prise en charge par l'administration »837(*). Mais envisager la mise en
oeuvre dans un contexte strictement juridique implique d'ajuster cette
définition838(*).
Il faut ainsi restreindre la définition à ses seuls aspects
juridiques. Ainsi, en droit, la mise en oeuvre représente « tout ce
qui contribue à la concrétisation de la règle de droit
»839(*). Dans le
contexte du droit public interne, la mise en oeuvre renvoie principalement aux
moyens juridiques par lesquels les normes constitutionnelles,
législatives et réglementaires sont
concrétisées.
La mise en oeuvre de la norme implique d'une part l'adoption
des dispositions inférieures nécessaires à son application
et d'autre part, la pertinence de la mise en oeuvre, et ainsi la
réalisation des effets de la norme, est conditionnée par le choix
des instruments utilisés.
Pour Kelsen, « l'application d'une norme juridique
consiste soit à créer une autre norme, soit à
exécuter l'acte de contrainte prévu par une norme
»840(*). La
première branche de cette alternative implique l'adoption des normes
visant à l'application de normes supérieures correspond à
ce que la doctrine anglo-saxonne dénomme l'« implémentation
». Ainsi, « relève de l'implémentation toute mesure
utile à la mise en oeuvre de la règle juridique »841(*). Si l'on s'en tient à
l'ordre juridique interne, la situation est contrastée selon que l'on
s'intéresse à la mise en oeuvre de la Constitution ou des lois et
règlements. La mise en oeuvre des lois et règlements constitue la
mission classique du pouvoir exécutif et le droit administratif en a
fait depuis longtemps une obligation juridique. En revanche, alors que celle-ci
peut sembler aller de soi, la mise en oeuvre de la Constitution ne fait pas
l'objet d'une obligation juridique explicite.
Plusieurs constitutions ne consacrent pas clairement
l'obligation de mettre en oeuvre la Constitution à travers des normes
d'application. Si l'adoption des lois organiques permet de préciser le
fonctionnement des institutions, les droits fondamentaux constitutionnels
demeurent parfois dépourvus de mesures d'application. Le juge comme la
doctrine congolaise demeurent encore silencieux sur cette question pourtant de
grande importance en droit constitutionnel. Une problématique pareille
mérite d'être soulevée en droit administratif concernant la
mise en oeuvre des dispositions législatives par l'administration.
La question est celle de savoir s'il existe formellement une
obligation pesant sur le législateur de mettre en oeuvre une disposition
constitutionnelle. La réponse peut être tirée de l'analyse
des articles 122, point 1 de la constitution du 18 février 2006 ainsi
d'autres dispositions dont l'article 26. Il ressort de ces dispositions que le
constituant habilite expressément le législateur à fixer
les règles permettant aux citoyens la jouissance et l'exercice de leurs
droits fondamentaux consacrés par la constitution.
L'obligation de légiférer peut ainsi être
inférée d'un double argument : d'abord, il est admis tant
par la doctrine que par la jurisprudence que l'emploi de l'indicatif correspond
à l'impératif. L'emploi de l'indicatif à l'alinéa 4
de l'article 26 doit être appréhendé comme une injonction
faite par le constituant au législateur d'adopter la loi portant
« mesures d'application » de la liberté de
manifestation. Cet impératif est de nature à
générer une obligation842(*) dans le chef du législateur ; ensuite,
le conseil constitutionnel français a, par plusieurs décisions,
été amené à examiner le texte de loi, et à
apprécier s'il y a eu incompétence négative du
Législateur. Ce faisant, il trace les contours d'une obligation pour le
Législateur, celle d'exercer sa compétence, donc de
légiférer. C'est un développement jurisprudentiel un peu
singulier car cette obligation ne ressortait pas complètement du texte
constitutionnel français. Cette percée jurisprudentielle du juge
français jette les bases d'une réflexion sur une possible
obligation pesant sur les épaules du législateur de mettre en
oeuvre la Constitution.
Section
3. L'exigence d'un service public de la justice de qualité
Pierre angulaire de l'État de droit, le juge, eu
égard à son indépendance, son impartialité et,
surtout, sa capacité à prononcer l'annulation des actes portant
atteinte aux droits fondamentaux, est classiquement appréhendé
comme « le mode de contrôle le plus abouti et le plus efficace
»843(*). Parce que,
sans sa présence, les droits et libertés sont menacés de
rester platoniques, le juge est ainsi érigé au rang de
pièce maîtresse du système institutionnel de garantie. Loin
de demeurer purement théorique, cette conception du juge gardien
privilégié des libertés fondamentales est largement
corroborée par le droit positif congolais, du moins en
théorie.
La réalité se dessine autrement en RDC. Victimes
des exactions de toutes sortes de la part tant des détenteurs du pouvoir
politique que du pouvoir économique pour ne citer que ceux-ci, la
plupart des congolais ne peuvent malheureusement pas compter sur la justice
officielle pour être rétablis dans leurs droits. Le nombre
insuffisant des institutions judiciaires, leur mauvaise répartition sur
le territoire national et le dysfonctionnement des audiences foraines, ... font
de cette justice un luxe réservé à quelques citadins.
Encore faut-il que ceux-ci non seulement aient une bonne connaissance du droit,
qu'ils disposent des moyens conséquents pour satisfaire les
appétits insatiables du personnel judiciaire et qu'ils n'aient pas
à faire à des procédures complexes ou qui trainent
indéfiniment en longueur. Tout cela ne garantit pas cependant
l'exécution des décisions judiciaires qui pourraient être
prononcées en leur faveur. Il y a là autant de raisons à
la base de la persistance des juridictions de droit coutumier et de
l'exploration des modes alternatifs des règlements des conflits.
Pourtant, dans un système administratif comme celui de
la RDC où l'exigence de la démocratie à la base requiert
également le recours constant aux pratiques démocratiques,
l'exercice de la liberté de manifestation devrait être
regardée comme l'affaire de tous et à tous les niveaux.
Si la justice est rendue en RDC au nom du peuple par des
organes étatiques institués à cet effet, la qualité
du service qu'ils rendent en cette matière n'est pas à l'abri des
critiques les plus virulentes (§2) ; et pourtant, c'est par le droit
fondamental au juge que se mesure l'effectivité d'un droit ou d'une
norme qui la consacre (§1), ainsi que le démontrent les sursauts
réalisés dans les droits positifs des autres pays. Cette
modalité de protection a fait l'objet de développements
constants, traduction d'une recherche d'effectivité toujours plus grande
des droits de la personne humaine, par la mise en oeuvre des recours
spéciaux devant le juge (§3) ; nous allons explorer tant les
recours spéciaux prévus dans les pays de la comparaison que celui
consacré récemment en droit positif congolais. En outre, le juge,
à travers son oeuvre, est appelé à intervenir efficacement
dans l'exercice de la liberté de manifestation (§4).
§1. La recherche
d'effectivité de la garantie juridictionnelle par le prisme du droit
fondamental au juge
Classiquement appréhendé comme le «
Corollaire indispensable de l'État de droit »844(*), le « droit des droits
»845(*) ou, encore,
le « bouclier des autres droits fondamentaux »846(*), le droit au juge847(*) constitue la pierre
angulaire de l'édifice des droits fondamentaux848(*). Parce que sans son
affirmation les droits et libertés courent le risque de se retrouver
orphelins de toute protection, celui-ci « devient le premier des droits
fondamentaux dont l'effectivité doit être à son tour
assurée »849(*).
Certes, le droit au juge, de par sa vocation à
structurer l'ensemble de l'ordonnancement juridique850(*), ne se limite pas au seul
domaine des droits de la personne humaine851(*). Il demeure néanmoins incontestable que son
apport en la matière se veut particulièrement prononcé
dans la mesure où l'existence des droits fondamentaux est
conditionnée par la présence d'un juge susceptible de sanctionner
les atteintes qui leur sont portées. C'est pourquoi la
consécration du droit à un recours juridictionnel effectif, en
même temps qu'elle confirme le rôle décisif du juge au sein
du système institutionnel de protection des droits et libertés,
constitue un élément à part entière du processus de
développement de la garantie juridictionnelle des droits
fondamentaux.
Cette thèse n'entend pas épuiser la
problématique du droit au juge. Il s'agit seulement de démontrer
que ce droit, de par sa reconnaissance unanime (a) et son contenu
particulièrement extensif (b), traduit une volonté
évidente d'effectivité de la protection juridictionnelle des
droits fondamentaux.
1. Une reconnaissance unanime
Explicitement consacré par la Déclaration
universelle des droits de l'homme de 1948, le droit fondamental au juge fait
également l'objet d'une reconnaissance sans équivoque à
l'échelle régionale et nationale852(*). A cet endroit, il importe
toutefois de préciser que la situation française étonne
considérablement par rapport à celle de l'Espagne et du
Bénin. Ces pays consacrent explicitement le droit à une
protection juridictionnelle effective tant au sein de leur texte
constitutionnel que par la progression de la jurisprudence. En RDC, l'article 19 de la constitution du 18
février 2006 consacre, sans équivoque, le droit au juge. Or,
cette reconnaissance unanime de ce droit participe sans nul doute d'une
recherche d'effectivité de la protection juridictionnelle des droits de
la personne humaine.
En effet, ainsi consacré au rang de norme
supralégislative, le droit à un recours juridictionnel se voit
placé hors de portée des majorités politiques et, ce
faisant, jouit du même régime de protection que les autres droits
fondamentaux853(*). Les
différentes déclinaisons du droit au juge,
précisées par les jurisprudences nationales, offrent à ce
droit fondamental un champ d'application particulièrement large, source
de confirmation de la recherche d'effectivité de la protection
juridictionnelle.
2. Un champ d'application
large
Postulant « la possibilité d'avoir accès
à un juge de qualité, c'est-à-dire le droit à une
protection juridictionnelle effective à tous les stades du procès
»854(*), le droit au juge repose sur un triptyque
selon lequel tout individu doit pouvoir librement accéder à un
tribunal répondant à certains standards de bonne justice et dont
les décisions sont effectivement exécutées855(*). De cette acception
particulièrement étendue du droit au juge découle une
volonté de consolidation de la garantie juridictionnelle et, par
là-même, de l'ensemble des droits et libertés. Puisque,
dès l'instant où la protection juridictionnelle se trouve
renforcée, les droits fondamentaux, dont la concrétisation est
largement conditionnée par la capacité du juge à en
sanctionner les atteintes, ne peuvent que gagner en
effectivité856(*).
Le droit d'accès à un juge et le droit à
une bonne justice tombant sous le coup des sens, ne feront pas l'objet d'amples
développements. Notre attention va se focaliser sur l'impérieuse
nécessité de l'exécution des décisions de justice
comme composante indispensable du droit au juge.
3. Le droit à
l'exécution des décisions de justice
Conscient que « le droit d'accès à un
tribunal serait illusoire si l'ordre juridique interne d'un État
contractant permettait qu'une décision judiciaire définitive et
obligatoire reste inopérante au détriment d'une partie [...]
»857(*), le juge
européen considère, depuis son arrêt Hornsby c.
Grèce du 19 mars 1997, « [...] que la notion de procès
équitable couvre non seulement l'accès au juge et le
déroulement de l'instance, mais également la mise en oeuvre des
décisions judiciaires »858(*). Autrement dit, il découle de l'article
6§1 de la Convention européenne une obligation pour les
autorités étatiques d'exécuter les décisions de
justice rendues contre elles.
Cette position de principe, loin d'être
spécifique à la Cour de Strasbourg, se trouve au contraire
relayée par les juridictions nationales. Le Tribunal constitutionnel
espagnol considère par exemple que le droit fondamental à un
recours juridictionnel effectif implique, au-delà du droit à une
décision, soit-elle favorable ou défavorable859(*), le droit à son
exécution et à son intangibilité860(*). Dans un sens similaire, le
juge constitutionnel portugais précise qu'à partir du moment
où la décision du tribunal est prononcée, le justiciable
est en droit de revendiquer son exécution et son
effectivité861(*). Et si la jurisprudence française semble
moins aboutie sur ce point, le Conseil constitutionnel a tout de même
donné une force particulière au droit à l'exécution
des décisions de justice lors de l'examen de la loi relative à la
lutte contre les exclusions. Il a effectivement affirmé que seules
« des circonstances exceptionnelles tenant à la sauvegarde de
l'ordre public » sont susceptibles de permettre une dérogation
à la règle selon laquelle tout jugement peut donner lieu à
une exécution forcée862(*).
La Constitution congolaise du 18 février 2006 n'est pas
restée en marge de cette évolution. Les alinéas 1 et 2 de
l'article 151 tendent à donner un contenu au principe de
l'indépendance du pouvoir judiciaire en ces termes :
« Le pouvoir exécutif ne peut donner
d'injonction au juge dans l'exercice de sa juridiction, ni statuer sur les
différends, ni entraver le cours de la justice, ni s'opposer à
l'exécution d'une décision de justice. Le pouvoir
législatif ne peut ni statuer sur des différends juridictionnels,
ni modifier une décision de justice, ni s'opposer à son
exécution ».
De l'analyse de cette disposition on peut inférer que
le droit à l'exécution des décisions de justice est
consacré au bénéfice des citoyens en République
Démocratique du Congo. On relève cependant dans les faits des
obstructions récurrentes - ouvertes ou voilées - à
l'exécution des décisions justices dont se rendent coupables les
autorités relevant tant du pouvoir exécutif et du pouvoir
législatif que du pouvoir judiciaire lui-même.
Quoi qu'il en soit, cette extension du droit fondamental au
juge s'inscrit, une fois de plus, dans une perspective de renforcement de la
protection juridictionnelle des droits fondamentaux étant donné
qu'elle tend à s'assurer que les décisions de justice, dont
celles touchant au domaine des droits et libertés, ne demeurent pas
purement déclaratoires et théoriques. L'objectif ici poursuivi
est on ne peut plus clair : permettre au justiciable de jouir effectivement de
la protection des droits fondamentaux offerte par le juge. Car, à quoi
bon affirmer le droit à recours juridictionnel, aussi respectueux
soit-il des exigences que sont celles d'une justice de qualité, si les
décisions rendues par le juge ne sont pas respectées.
Animé par le souci d'assurer l'effectivité de la
protection juridictionnelle des droits et libertés, le droit au juge, de
par ses différentes déclinaisons que sont la possibilité
d'accéder à tribunal, le droit à un « bon » juge
et l'obligation d'exécution des décisions de justice, favorise
non seulement le libre accès des individus à un tribunal, mais
également le développement d'une justice de qualité. En
cela, l'accession de la garantie juridictionnelle au rang de droit fondamental
contribue à asseoir un peu plus encore le statut
privilégié du juge au sein du système institutionnel de
protection des droits fondamentaux.
Avec un ton sévère, Omeonga Tongomo clame la
gravité de la non-exécution des décisions de justice. Cet
auteur suggère que soit engagée la responsabilité
pénale de l'agent public réfractaire à l'autorité
de la chose jugée par la juridiction administrative. Il s'inscrit dans
un schéma de criminalisation de tout refus d'une autorité
administrative d'exécuter la décision rendue par le juge
administratif863(*).
Dans le contexte de la liberté de manifestation en RDC, cette suggestion
reste d'une redoutable validité. En effet, l'expérience
récente du contentieux des élections des gouverneurs et
vice-gouverneurs du Sankuru et du Sud-Ubangi démontre à
suffisance la réticence des agents publics à
déférer aux injonctions du juge administratif. Certes, cette
attitude des autorités de la CENI a été quelque peu
sous-tendu par l'inoffensivité de la décision administrative
à l'égard de l'auteur d'un acte litigieux. Des poursuites
pénales à l'encontre des auteurs de pareils actes sont de nature
à dissuader avec efficacité.
§2. Les défis d'une
bonne administration de la justice en RDC
« La justice reste infectée par plusieurs
maux », déclarait le ministre de la justice Alexis Thambwe
Mwamba devant le Conseil supérieur de la magistrature au cours d'une
cérémonie officielle864(*). L'un d'eux c'est la lenteur des procédures.
Une étude menée par AFRIMAP et Open Society Initiative for
Southern Africa (OSISA)865(*) va nous servir de référence pour
mettre en exergue les principaux d'entre eux.
1. Les défis liés
aux structures de la justice
Un des principaux obstacles à l'accès à
la justice est l'insuffisance des tribunaux. En plus de leur nombre
réduit, les tribunaux sont mal repartis sur le territoire national.
L'organisation des audiences foraines permettant aux tribunaux de siéger
dans les localités situées en dehors du lieu habituel de leur
audience était censée répondre au problème
d'éloignement et de la mauvaise répartition géographique
des tribunaux. Les audiences foraines font cependant face à
d'énormes difficultés d'organisation et de respect des principes
de procès équitable.
A. Insuffisance des
juridictions
Véritable sous-continent de 2.345.000 kilomètres
carré et plus de 60.000.000 d'habitants, la RDC ne compte guère
que 230 juridictions et offices de parquet, soit une juridiction et office de
parquet pour environ 10.196 kilomètres carré et 285.714
habitants448. Le nombre d'institutions judiciaires disponibles dans ce pays est
très bas au regard des besoins et des standards internationaux en la
matière estimés, selon le Ministre de la justice et des droits
humains, à une institution judiciaire pour 3000 kilomètre
carré449. Dans la pratique, l'insuffisance des institutions judiciaires
en RDC se traduit dans la vie de la majeure partie de la population par une
sorte de vide judiciaire. Pour ne citer que cet exemple, selon Marc Dubois,
ancien coordonnateur du projet relatif à la Restauration de la Justice
au Congo (Rejusco), il a fallu que ce programme financé par notamment
par la Commission européenne organise des audiences foraines pour que
« certaines populations qui n'avaient plus vu un juge depuis
l'époque coloniale » puissent porter leurs affaires devant la
justice866(*).
B. Mauvaise répartition des
juridictions
Un des paramètres qui devra être pris en compte
au moment de l'élaboration du plan d'installation de nouvelles
juridictions est la répartition de ces juridictions sur l'étendue
du territoire national. A ce jour, en effet, la répartition des
juridictions sur le territoire national n'est pas de nature à favoriser
l'accès à la justice pour tous. A titre d'exemple, du fait que
les sièges de la Cour constitutionnelle, la Cour de cassation et du
Conseil d'État sont situés à Kinshasa, au nord-ouest du
pays constitue un obstacle non négligeable à l'accès
à la justice constitutionnelle pour la plupart des populations du Sud et
de l'Est du pays situées parfois à plus de 2000 kilomètres
de cette ville.
De manière générale, les sièges de
toutes les juridictions sont situés aux chefs-lieux des circonscriptions
administratives. Il s'en suit beaucoup de difficultés d'accès
auxdites juridictions par les populations habitant loin de ces chefs-lieux.
Dans la province du Nord Kivu, par exemple, tant le siège de la Cour
d'appel que celui du Tribunal de grande instance de Goma sont situés
à Goma.
C. Dysfonctionnement des audiences
foraines
L'organisation régulière des audiences foraines
aurait pu atténuer les effets négatifs de l'éloignement
des juridictions. Ces audiences sont malheureusement confrontées
à plusieurs défis. Selon le professeur Bayona ba Meya : « il
a été constaté qu'à l'intérieur du pays,
là où ont été installés les tribunaux de
paix, les activités juridictionnelles de ces tribunaux se limitent aux
seuls chefs-lieux de communes, laissant l'arrière-pays sans justice de
paix, l'itinérance ne pouvant s'effectuer dans l'ensemble du ressort de
ces tribunaux, faute de moyens de transport que le pouvoir exécutif ne
met pas à leur disposition867(*) ».
A ce jour, grâce au concours des partenaires en
développement, quelques audiences foraines peuvent être
recensées, particulièrement dans les provinces de l'Est du pays.
Sans vouloir mettre en doute la contribution apportée par lesdites
audiences à l'accès effectif à la justice par les
congolais, nous ne pouvons-nous empêcher de déplorer un certain
nombre de faiblesses qui les caractérisent. En premier lieu, ces
audiences ne sont organisées que dans certaines provinces,
essentiellement de l'Est au détriment d'autres, notamment au Kasaï
Occidental, Bandundu ou Equateur. Il y a donc là une espèce de
discrimination géographique. En deuxième lieu, il est
arrivé que la tenue des audiences foraines se réalise au prix de
la paralysie des sièges des juridictions qui les organisent et ce au
mépris de l'article 47 de la loi organique portant organisation,
compétence et fonctionnement des juridictions de l'ordre judiciaire qui
dispose, que « l'itinérance ne peut empêcher le
fonctionnement de la juridiction au siège ordinaire ». Au Maniema,
par exemple, il a été signalé qu'un prévenu
bénéficiaire d'une décision d'acquittement est
resté en détention pendant près de trois mois avant d'en
être notifié au retour à Kindu, localité de
détention, des juges du tribunal de grande instance de Kindu partis en
audience foraine. Troisièmement, il nous semble que des dispositions ne
sont pas prises pour que la République Démocratique du Congo
assume progressivement ses obligations en matière judiciaire en se
dotant d'un plan d'organisation des audiences disciplinaires tenant
dûment compte des besoins en présence et en mobilisant, dans son
budget annuel, les ressources financières nécessaires à la
mise en oeuvre dudit plan. A défaut, il suffira que les partenaires en
développement mettent fin à leur aide pour que les justiciables
tombent dans une situation plus grave que celle qui prévalait avant
l'organisation des audiences foraines. Tel nous semble le cas, du moins de
manière relative étant donné que quelques partenaires
essaient quand même tant bien que mal d'assumer la relève, dans
les provinces du Nord et du Sud-Kivu ainsi que dans l'Ituri aux lendemains de
la fermeture de REJUSCO et en attendant son remplacement par Uhaki Safi. Il ne
sert à rien, en effet, de susciter des besoins auxquels l'on n'est pas
en mesure de satisfaire.
Ce qui risque d'être le cas des audiences foraines qui
peuvent contribuer, lorsqu'elles sont bien menées, à faciliter
l'accès à la justice.
2. Les défis liés au
fonctionnement de la justice
L'un de grands défis liés au fonctionnement de
la justice en RDC demeure la lenteur de l'appareil judiciaire congolais. Pour
autant, la seule existence des organes juridictionnels ne saurait suffire
à assurer l'exercice des droits et libertés. Ce qui importe
également c'est l'existence de voies de recours susceptibles de
satisfaire aux besoins des droits fondamentaux et aux attentes de leurs
bénéficiaires. Les systèmes juridictionnels congolais et
ceux des pays ciblés par cette recherche semblent répondre
à cette exigence dans une large mesure.
§3. L'instauration d'un contrôle rigoureux de la
limitation des droits fondamentaux
Il est classiquement admis que les droits fondamentaux ne sont
pas des droits absolus mais des droits limitables868(*), « soit que ces limites
résultent expressément de la Constitution, soit qu'elles n'en
résultent que de façon médiate et indirecte dès
lors qu'elles se justifient par la nécessité de protéger,
non seulement d'autres droits constitutionnels, mais aussi d'autres biens
constitutionnellement protégés »869(*). Pour autant, la limitation
des droits fondamentaux ne saurait être, elle-même,
illimitée parce que, si tel était le cas, elle conduirait
à leur disparition. C'est pourquoi, s'agissant de la liberté de
manifestation, le juge est appelé à contrôler les actions
préventives (1) et répressives (2) de l'autorité
publique ; généralement, les limitations par le
législateur doivent être interprétées de
façon restrictive. Cette problématique classique de « la
limitation des limites »870(*) conduit le juge à vérifier que
l'intervention du législateur ou de toute autorité normative est
nécessaire et proportionnelle et, surtout, ne dénature pas les
droits constitutionnellement garantis.
1. Le
contrôle des actions étatiques préventives
Dans l'exercice de la police administrative, l'action de
l'autorité administrative est susceptible de porter atteinte au droit de
manifester. Il s'avère dans ce cadre, une nécessité de
contrôler son comportement pour une meilleure protection.
A. Le contrôle de la
déclaration préalable
Certains États - dont la République
Démocratique du Congo - ont mis en place un régime de
déclaration préalable, qui se traduit classiquement par
l'obligation d'avertir la police avant la manifestation, selon un délai
fixé par la loi. Le contrôle des restrictions à la
liberté de manifester suppose une appréciation rigoureuse de leur
« nécessité ». Cette restriction est
nécessaire si elle permet aux autorités de s'assurer du
caractère « pacifique » du rassemblement871(*).
Aujourd'hui, il est bien établi que « subordonner
la tenue d'une réunion sur la voie publique à une
procédure d'autorisation préalable ne porte pas atteinte en
principe à la substance du droit de réunion pacifique
»872(*). Le droit
de manifester de manière spontanée ne peut primer l'obligation de
notifier au préalable la tenue d'un rassemblement que dans des
circonstances spéciales, notamment s'il est indispensable de
réagir immédiatement à un événement par une
manifestation873(*).
B. Le contrôle des
interdictions
Pour la Cour européenne des droits de l'homme874(*), les menaces pour la
sécurité ou l'ordre public doivent être suffisamment
caractérisées pour justifier une interdiction. La «
nécessité » de l'interdiction s'apprécie au regard
d'un « besoin social impérieux », qui rend impossible
l'exercice de la liberté de manifester. Le caractère légal
ou illégal de la manifestation dans le droit interne de l'État
concerné n'entre pas en considération. La Cour refuse de se
laisser enfermer par la qualification par le droit interne. C'est ainsi que le
fait, pour les autorités turques, de requalifier une conférence
de presse tenue par des militants kurdes en manifestation interdite n'a pas
pour effet de faire sortir ce rassemblement du champ d'application de l'article
11 de la Convention875(*). Au contraire, des mesures radicales d'interdiction,
en l'absence de violence, desservent la démocratie, voire la mettent en
danger876(*).
Si les risques de troubles à l'ordre public ne sont pas
établis, dès lors que la manifestation s'annonce pacifique,
l'interdiction sera jugée non conventionnelle, parce que sa
nécessité ne sera pas prouvée.
La Cour européenne a considéré que la
décision du Maire de Varsovie d'interdire un défilé visant
à protester contre les discriminations à l'égard des
minorités homosexuelles ne reposait pas sur une nécessité.
La mairie justifiait cette interdiction par le fait que les organisateurs du
rassemblement n'avaient pas fourni de « plan d'organisation de la
circulation », et que les manifestants risquaient de se heurter à
d'autres militants défendant des idées opposées.
La Cour rejette chacun de ces arguments et observe qu'aucun
« plan d'organisation de la circulation » n'était exigé
des organisateurs de rassemblement. Il appartenait aux autorités de
police de garantir l'ordre public lors d'une manifestation dont rien ne
laissait supposer le caractère non pacifique877(*). En outre, elle a
appliqué de manière combinée les articles 11 et 14 de la
Convention, pour juger qu'est discriminatoire ce refus opposé par le
maire à une association militant en faveur des homosexuels, d'organiser
un défilé et des rassemblements, en vue de protester contre les
discriminations878(*).
Dans le même sens, la Russie a été
condamnée pour avoir interdit des manifestations au soutien de la cause
homosexuelle. Le Maire de Moscou avait régulièrement interdit
l'organisation de « gay pride » au motif que l'homosexualité
serait contre-nature, invoquant des risques de troubles entre les manifestants
et leurs opposants c'est-à-dire le contre manifestants. La Cour a
rappelé que la liberté de réunion s'exerce même si
elle risque de « gêner ou offenser des personnes opposées aux
idées ou revendications », exprimées lors de la
manifestation. S'agissant des troubles, le risque de violence était
réduit et donc insuffisant pour justifier une interdiction879(*).
En ce sens, les autorités excèdent leur marge
d'appréciation, lorsque l'opposition à une réunion
pacifique ne repose pas sur « un véritable risque prévisible
d'action violente, d'incitation à la violence ou de toute autre forme de
rejet des principes démocratiques »880(*). Le placement en
détention de deux hommes, durant plus de cinq jours pour les
empêcher de manifester contre la tenue d'un sommet G8, alors qu'ils
n'encouraient aucune poursuite pénale, constituait une violation, tant
de leur droit à la sûreté, qu'à leur liberté
de réunion pacifique881(*).
La Hongrie a également été
condamnée sur le fondement de la violation de l'article 11 au sujet de
l'interdiction d'une manifestation projetée par un groupe de 20
personnes en vue d'afficher leur mécontentement face au non-paiement de
leurs créances par une société privée, devenue
insolvable882(*). Les
vingt participants projetaient de rester alignés en silence sur le
trottoir devant la maison du Premier ministre, lieu suffisamment vaste pour
laisser passer les autres piétons pendant la manifestation.
Compte tenu des circonstances de l'espèce, il n'est pas
certain que les manifestants aient effectivement gêné le trafic
routier ou la circulation des bus et rien ne permet de dire qu'ils auraient
été violents ou présentaient un danger pour l'ordre
public. La Cour rappelle que l'interdiction des manifestations peut poursuivre
le but légitime de prévenir le désordre et de
protéger les droits d'autrui, mais ici l'interdiction était
disproportionnée et n'était pas nécessaire.
Les positions de la Cour démontrent à suffisance
combien les troubles à l'ordre public constituent le seul motif valable
d'interdiction d'une manifestation. Le contrôle des interdictions ne
trouve sa vraie substance que lorsqu'il consiste en un contrôle des
motifs de l'interdiction. Le juge constitutionnel béninois est
très actif en cette matière, de même que le tribunal
constitutionnel espagnol et le juge administratif français. Le juge
administratif et constitutionnel congolais devraient suivre l'exemple de leurs
homologues d'autres pays pour jouer véritablement leur rôle de
vivier de la démocratie et du constitutionnalisme en RDC.
2. Le
contrôle des actions répressives
Si les autorités nationales jouissent d'une certaine
marge d'appréciation pour estimer les risques d'atteinte à
l'ordre public, il n'en demeure pas moins que les actions répressives,
comme les actions préventives, soient examinées à l'aune
de leur nécessité, de leur proportionnalité et de leur
caractère raisonnable.
A. Le contrôle des
poursuites engagées
Les menaces pour la sécurité ou l'ordre public
doivent être suffisamment caractérisées pour justifier les
poursuites pénales et judiciaires engagées contre les
participants et les sanctions qui leur sont infligées. Dans
l'arrêt Ezelin883(*), la sanction disciplinaire infligée à
un avocat qui avait participé à une manifestation a
été jugée contraire à l'article 11, une telle
restriction au droit de manifester ne présentant aucun caractère
de « nécessité ». Pour apprécier la
proportionnalité de la mesure, la Cour européenne des droits de
l'homme prend en considération la nature des manifestations. Elle met en
balance les impératifs de l'ordre public et « ceux d'une libre
expression par la parole, le geste ou même le silence, des opinions de
personnes réunies dans la rue ou d'autres lieux publics ». Elle se
livre à un contrôle approfondi des mesures d'interdiction,
estimant que les idées politiques qui contestent l'ordre établi
par des moyens pacifiques doivent pouvoir s'exprimer, tant par la
liberté de réunion que par d'autres moyens légaux.
En revanche, il est possible d'interpeller un chauffeur
routier qui bloque la circulation dans le cadre d'une opération «
escargot ». Dans l'arrêt du 5 mars 2009 Barraco contre France", il a
été jugé que la condamnation du requérant constitue
« une ingérence des autorités publiques dans son droit
à la liberté de réunion pacifique, qui englobe la
liberté de manifestation ». Pour autant, l'ingérence a une
base légale (art. L. 412-1 du Code de la route) et est ainsi «
prévue par la loi » au sens de l'article 11, §2, de la
Convention. Cette ingérence poursuivait l'un des buts
énoncés à l'article 11 : à savoir la protection de
l'ordre et la protection des droits et libertés d'autrui. La
condamnation pénale du requérant n'apparaît pas
disproportionnée au regard des buts poursuivis. Pour la Cour, «
l'obstruction complète du trafic va au-delà de la simple
gêne occasionnée par toute manifestation sur la voie publique
».
Une même solution sera apportée, quelques
années plus tard, dans l'arrêt de Grande chambre du 15 octobre
2015, Kudrevicius et a. contre Lituanie884(*). Cinq agriculteurs avaient été
condamnés pour émeute à une peine privative de
liberté de 60 jours avec sursis pour avoir organisé le blocage
des trois autoroutes pendant quarante-huit heures. Soulignant que la
liberté de réunion est « un droit fondamental dans une
société démocratique » et rappelant son lien
étroit avec la liberté d'expression, la Cour, classiquement,
examine les griefs sous l'angle de l'article 11, qui est la lex specialis. Elle
estime que les requérants, qui ont été condamnés
pour atteintes à l'ordre public causées par les barrages routiers
et non pour des actes de violence, peuvent se prévaloir de la protection
de l'article 11. Elle observe que leur condamnation constitue bien une
ingérence dans leur droit à la liberté de réunion,
qui poursuivait le but légitime de « la protection des droits et
des libertés d'autrui », spécialement du droit de circuler
sans contrainte sur les voies publiques, mais elle va considérer que
cette ingérence est proportionnée au but poursuivi.
Dans le prolongement de l'arrêt Barraco, cet arrêt
marque la frontière entre la gêne occasionnée par toute
manifestation pacifique sur la voie publique, notamment par la perturbation de
la circulation, que les autorités nationales doivent tolérer pour
ne pas vider de son contenu la liberté de manifestation, et son
débordement constitué par un blocage complet de la circulation,
que les autorités peuvent réprimer885(*). En l'espèce, la Cour
relève que les agriculteurs avaient été autorisés
à manifester dans des lieux déterminés et que le
déplacement des manifestations vers les autoroutes a constitué
une violation flagrante des autorisations données.
Lorsque les perturbations intentionnelles dépassent par
leur ampleur celles qu'implique l'exercice normal de la liberté de
réunion pacifique, elles peuvent être considérées
comme des « actes répréhensibles », justifiant des
sanctions, y compris pénales. Ainsi, « le blocage quasi total de
trois autoroutes importantes, au mépris flagrant des ordres de la police
et des intérêts et droits des usagers de la route, s'analyse en un
comportement qui, tout en étant moins grave que le recours à la
violence physique, peut être qualifié de
répréhensible. Les sanctions prises étaient
justifiées par des motifs pertinents et suffisants. La condamnation des
requérants pour émeute a donc ménagé un juste
équilibre entre les buts légitimes de la défense de
l'ordre et la protection des droits et libertés d'autrui d'une part, et
les impératifs de la liberté de réunion d'autre part, et
n'a pas méconnu l'article 11.
La Cour européenne des droits de l'homme fournit ainsi
beaucoup de recettes au droit congolais relativement à la liberté
de manifestation. Les poursuites et sanctions disciplinaires engagées
contre les fonctionnaires pour avoir pris part à une manifestation
publique sont récurrentes en RDC. Pareilles décisions doivent
connaitre la censure du juge administratif, pourvu que les victimes de ces
traitements en saisissent le juge compétent.
B. Le contrôle de la
dispersion d'une manifestation
La dispersion d'une manifestation peut concerner les
manifestations autorisées, comme celles non autorisées.
D'ailleurs ces dernières ne doivent pas nécessairement être
dispersées. Dans le cas, par exemple, où une réponse
immédiate à un événement peut justifier une
manifestation spontanée, les mesures prises pour disperser cette
manifestation, au seul motif qu'il n'y a pas eu de notification
préalable, alors que les participants n'ont commis aucune infraction,
constituent une restriction disproportionnée à l'article
11886(*). La Cour
d'Appel de Paris a considéré « que si les
arrêtés litigieux étaient également motivés
par le fait que la manifestation envisagée était "susceptible de
donner lieu à des actes et propos de nature à porter le
discrédit sur la fonction policière", un tel motif tiré de
la méconnaissance éventuelle par les fonctionnaires des services
de police de leurs obligations statutaires ne pouvait fonder légalement
les arrêtés pris par l'autorité administrative investie des
pouvoirs de police en vue d'assurer la protection de l'ordre public
»887(*).
3. Les troubles de l'ordre
public : seul motif valable d'interdiction
La limitation de la liberté de manifestation ne doit se
justifier que par l'existence avérée d'une menace sérieuse
et inéluctable à l'ordre public. Le caractère
sérieux de la menace se traduit dans le fait que les troubles de l'ordre
public ne se présument pas, l'autorité administrative doit
asseoir la décision d'interdiction sur les éléments de
fait, objectivement attestés. La menace doit être
inéluctable. Ce critère, qui doit être cumulatif avec le
premier, prescrit que, même en cas de menace sérieuse de troubles
de l'ordre public, l'interdiction ne peut se justifier que si le dispositif
d'encadrement dont dispose l'administration ne suffit pas pour contenir la
menace.
La Cour constitutionnelle béninoise a jugé non
seulement que « la nature des revendications ne peut être une
cause de limitation de ce droit », mais aussi que
« l'effectif suffisant d'agents de Force de sécurité
publique disponible » ne justifiait pas une décision
d'interdiction888(*).
Ainsi, le motif évoqué par le gouverneur de la ville de Kinshasa
- évoquant la sacralité de la date du 30 juin - pour interdire la
manifestation projetée par la coalition Lamuka pour le 30 juin 2019
constitue une illustration patente des atteintes au principe de la
liberté de manifestation. Triste est de constater que devant pareille
bavure juridique de l'autorité provinciale, les organisateurs ont choisi
la résignation et sombré dans un mutisme déconcertant au
lieu de saisir le juge en référé-liberté pour
paralyser cette décision. Nous pensons que la responsabilité de
la faillite des droits fondamentaux en général et de la
liberté de manifestation en particulier est à partager entre les
débiteurs et les créanciers des droits fondamentaux. La
nonchalance des congolais face à l'arbitraire des pouvoirs publics ne
peut qu'aggraver les violations. Nous pensons que la mise en oeuvre
systématique de l'éducation constitutionnelle et la propagation
par tous moyens de la culture démocratique contribueront à la
promotion de la liberté de manifestation en RDC. Dans cette entreprise,
le rôle des partis politiques et des acteurs de la société
civile devrait être renforcé.
Le juge déclare illégales les interdictions
lorsque les risques générés par la manifestation auraient
pu être contenus par des effectifs de police.
À propos d'une manifestation d'opposition à la
visite en France du président Chinois, le Conseil d'État affirme
« que s'il appartenait au préfet de police de prendre toutes
mesures appropriées, notamment aux abords de l'ambassade de Chine, pour
prévenir les risques de désordres susceptibles d'être
occasionnés par les manifestations envisagées (...), il ne
pouvait prendre un arrêté d'interdiction générale
qui excédait, dans les circonstances de l'espèce, les mesures qui
auraient été justifiées par les nécessités
du maintien de l'ordre public à l'occasion de cette visite
»889(*). La
décision préfectorale d'interdire la manifestation est
illégale dans la mesure où l'ordre public aurait pu être
maintenu par la mobilisation de forces de police aux abords de l'ambassade.
De même, s'agissant d'une manifestation d'inspecteurs de
police à Paris (de la place Joffre au ministère de
l'Intérieur), le juge administratif affirme « qu'il ne ressort pas
des pièces versées au dossier que, eu égard à son
caractère limité (...), ladite manifestation ait
été de nature à menacer l'ordre public dans des conditions
telles qu'il ne pouvait être paré à tout danger dans le
quartier considéré par des mesures de police appropriées
»890(*).
CONCLUSION DE LA DEUXIEME
PARTIE
La recherche d'effectivité maximale des droits
fondamentaux, a conduit les états à la création des
mécanismes de protection des droits fondamentaux. Parmi lesquels, nous
avons d'une part, les mécanismes non juridictionnels ou persuasifs et
des mécanismes juridictionnels qualifiés de dissuasifs en raison
de leur force coercitive d'autre part. Le primat des droits fondamentaux au
sein des démocraties contemporaines conduit le juge à adopter un
discours contribuant à leur développement constant. Soucieux
d'assurer une protection maximale des individus, le juge, par
l'intermédiaire de sa jurisprudence, s'érige, en effet, en
promoteur des droits fondamentaux, avec en ligne de mire une recherche
d'effectivité toujours plus grande de ces derniers.
Pour ce faire, il importe, en premier lieu, de souligner que
le juge confronté à la problématique de la force juridique
contraignante des droits fondamentaux, s'efforce de préciser que les
droits dont l'effectivité est conditionnée par l'intervention du
législateur sont revêtus d'un caractère obligatoire et
immédiat.
Sans négliger l'apport combien louable apporté
par les mécanismes non juridictionnels à la protection de la
liberté de manifester, le juge s'est affirmé dans bien des cas,
comme le meilleur protecteur de la liberté de manifestation publique.
Il est donc important que le juge congolais puisse s'inspirer
du discours de ses homologues béninois, français et espagnole
pour rendre cohérent notre système juridique de protection du
droit de manifester. La responsabilité de la carence jurisprudentielle
mérite d'être partagée entre les citoyens et le juge.
D'où la nécessité d'instaurer une éducation
constitutionnelle.
CONCLUSION
GÉNÉRALE
Descendre dans la rue pour exprimer une revendication, un
refus, une émotion, c'est exercer un droit qui, dans une
démocratie, va de soi. S'exprimant dans le contexte du Royaume-Uni,
Céline Roynier rappelle que l'élaboration d'un droit positif de
la manifestation a été perçue comme la simple
consécration d'une liberté qui, dans l'opinion publique,
était acquise de longue date : le « constitutionalisme populaire
»conçoit le droit de manifester comme inhérent à la
qualité de citoyen. De ce fait, il est aujourd'hui largement admis que
la manifestation est nécessaire au fonctionnement des régimes
démocratiques. C'est ainsi que Jürgen Habermas estime qu'il n'est
guère plus possible d'obtenir ou de maintenir l'État de droit
sans la démocratie radicale.891(*)
La question de la protection du droit de manifester est au
coeur d'un paradoxe qui devrait nécessairement conduire les juristes
à s'interroger sur le rôle des pouvoirs publics en tant que
premiers débiteurs des droits fondamentaux. Dans le même ordre
d'idées, cette question doit les conduire à
réfléchir, de même, sur la fonction que remplirait la norme
juridique en tant qu'instrument de conduites humaines. Si cette liberté
connaît aujourd'hui une forte actualité, et ce partout dans le
monde, ellesubit cependant, en même temps, de fortes limitations etde
grands revers aussi bien dans les pays en transition démocratique que
dans les pays occidentaux, pourtant toujours considérés comme les
vieilles démocraties.
D'un système juridique à l'autre, si la
définition de la manifestation et le statut de la liberté de
manifester connaissent d'importantes variations, il est frappant de constater
que les valeurs ou les raisons mobilisées au soutien de cette
liberté sont partout du même ordre. Tous les juges [...] admettent
que les manifestations sont des formes éminentes d'expression, de
participation et de gouvernement démocratique892(*). D'où,
peut-être, la difficulté liminaire à laquelle nous nous
sommes heurté, au cours de nos recherches, sur l'examen comparé
des droits positifs français, espagnol, béninois et congolais.
Car il ne suffit pas d'affirmer qu'une liberté est en quelque sorte
immanente à l'ordre juridique démocratique pour apprécier
la conformité à la Constitution des règles qui, hic et
nunc, en organisent l'exercice. Si les manifestants exercent
collectivement un droit, il faut pouvoir en identifier les fondements, le
contenu et les limites.
Dans les pays de notre comparaison, cette liberté
s'analyse beaucoup plus sous l'angle du droit pénal ou sous le signe de
l'ordre public. En République Démocratique du Congo, le
système de garantie et de protection de la liberté de
manifestation a longtemps souffert d'une incohérence
caractérisée. Ce vice affecte également d'autres droits
fondamentaux dont l'immédiateté n'est devenue qu'une simple
incantation. En effet, pour donner corps à leur
immédiateté, la jouissance des droits fondamentaux conviendrait
avec une obligation de légiférer qui incomberait au
législateur pour leur effectivité. La situation de la
liberté de manifestation durant cette dernière décennie en
est une parfaite illustration.
Si l'on considère comme promulguée à ce
jour la « loi Sessanga », on ne peut cependant pas
s'empêcher de reconnaitre l'imperfection du mécanisme
constitutionnel de promulgation de plein droit prévu à l'article
140 de la Constitution. Nous pensons qu'il faille parfaire ce mécanisme
en reconnaissant à la Cour constitutionnelle le pouvoir de constater la
promulgation de plein droit d'une loi déjà adoptée au
Parlement et d'ordonner au Journal officiel d'en assurer la publication dans un
délai précis.
La carence de la jurisprudence face aux ambiguïtés
et contradictions caractérisant le système de protection de la
liberté de manifester ne permet pas d'avoir des précisions
juridiques claires sur cette liberté. La doctrine a ainsi la charge de
se saisir de ce débat en vue d'apporter l'éclairage
nécessaire sur les contours de cette liberté aux fondements
multiples.
Aucun des systèmes juridiques étudiés ne
réduit la manifestation à un défilé sur la voie
publique. Si le cortège qui traverse la ville avec banderoles, chants et
slogans, occupe une place de choix dans la culture politique de certains pays,
d'autres privilégient des formes plus statiques. La manifestation n'est
pas nécessairement un cortège, même si son caractère
mobile ou statique, posé comme un indicateur du degré de
perturbation qu'elle risque d'entraîner, justifie, dans certains pays,
des variations dans le régime juridique des rassemblements.
Ce qui définit la manifestation n'est pas sa forme,
mais son but. Pour qu'un rassemblement relève de la catégorie
« manifestation », il faut qu'il ait une visée expressive. Les
manifestants se réunissent pour rendre publique l'opinion ou la cause
qui leur est commune. Ils exercent donc à la fois leur liberté de
réunion (parfois renforcée par la liberté d'association)
et leur liberté d'expression (parfois spécifiée en
liberté d'expression religieuse, syndicale ou « des
minorités »).
La liberté de manifestation ne se laisse pas si
aisément appréhender comme une déclinaison de la
liberté d'expression, pour deux raisons majeures. La première
tient à ce que toute manifestation porte en elle la négation
même du discours, qui est la violence. Violence des manifestants,
guettés par l'ivresse de l'action collective ; violence des forces de
l'ordre, que les démocraties les plus avancées ne parviennent pas
toujours à contenir. La manifestation est, par nature, perturbatrice
puisqu'elle subvertit la fonction des lieux publics dans lesquels elle se
déploie893(*).
Dans tous les pays étudiés, la liberté de
manifestation s'est révélée, sans surprise, largement
dominée par des considérations de maintien de l'ordre. Celles-ci
conduisent partout à imposer un régime de déclaration, ou
même d'autorisation préalable, parfaitement dérogatoire au
droit commun de la liberté d'expression. Elles orientent le
contrôle juridictionnel qui pèse sur l'encadrement administratif
des rassemblements sur la voie publique, partout organisé autour de la
question de la capacité de l'autorité de police à
conserver à la manifestation son caractère pacifique.Elles
expliquent, peut-être, les variations du contenu de la catégoriede
la manifestation d'un ordre juridique à l'autre: le régime de la
manifestation ne s'applique pas ouplus libéralement.
Une seconde raison interdit de rabattre purement et simplement
la liberté de manifestation sur la liberté d'expression,
combinée à la liberté de réunion. Il est de
notoriété publique que celui qui descend dans la rue ne le fait
pas pour exposer ses idées, ni pour en débattre avec d'autres. Il
n'entend pas discourir, mais agir. Il ne cherche pas à convaincre, mais
à s'imposer. On manifeste pour obtenir la démission d'un
gouvernement, le retrait d'un projet de loi, la prise en compte de valeurs ou
d'intérêts négligés, c'est-à-dire pour amener
les représentants du peuple (ou d'autres types de dirigeants) à
changer le cours de leur action. La manifestation étant moins
l'expression d'une opinion que celle d'une volonté, ce qui compte n'est
pas ce que disent les manifestants, mais ce que dit leur simple présence
dans la rue : notre présence collective prouve que nous avons la
faculté de nous exprimer, même si tout ce que nous disons, c'est
que nous existons894(*).
Manifestent ainsi ceux qui sont ou se sentent exclus des
mécanismes de représentation politique, mais aussi ceux qui
entendent rappeler à leurs représentants que la démocratie
est le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. Ainsi que
l'affirment A. Peters et I. Ley, « les manifestants s'expriment en
rendant le corps politique présent (par opposition à la
représentation) ».895(*)
La concrétisation législative de l'ordre public
sur l'exercice et la portée des droits fondamentaux constitutionnels
invitent à réfléchir sur l'encadrement normatif de la
limitation des droits et libertés en général et de la
liberté de manifestation en particulier. En effet, ordre public et
libertés sont souvent perçus par le pouvoir politique comme
étant antinomiques, en ce sens que la poursuite du premier ne pourrait
se concrétiser que par des restrictions apportées à
l'exercice des secondes. Or, l'étude du processus de limitation, mais
aussi les menaces qui pèsent sur l'exercice du droit de manifester,
incitent à dépasser cette dichotomie. Deux voies principales
peuvent être envisagées.
Comme nous l'avons dit plus haut, une manifestation ne peut
être interdite que si elle constitue une menace pour l'ordre public. Ce
motif d'interdiction est le seul admissible, une manifestation ne
pouvant pas être interdite pour un motif autre que le risque
d'atteinte à l'ordre public. Le juge administratif doit contrôler
l'existence de la menace à l'ordre public et, si celle-ci n'est pas
avérée, censurer la mesure d'interdiction. Plusieurs
critères doivent être pris en compte par le Juge pour
apprécier la réalité de la menace qui ne peut être
supposée. Parmi ces critères, on peut retenir les circonstances
du moment, l'itinéraire ou le lieu de la manifestation, notamment si
elle rend difficile l'emploi des forces de police, l'appel des organisateurs
à commettre les infractions, le précédent historique d'une
organisation896(*).
Comme dans plusieurs pays, l'espace public de la manifestation
en RDC est quadrillé par un réseau assez dense d'interdictions,
d'autorisations et de contrôles.La pratique est sévère et
généralement en contradiction avec les garanties juridiques en
vigueur - la manifestation, feu follet du droit des libertés,
incarnation sporadique du peuple souverain, échappe toujours peu ou prou
à cet encadrement. Tous les pays de notre comparaison l'ont
démontré : dans cette matière, la règle est dure,
mais la pratique est molle. Prenant acte de cet écart structurel entre
le droit et le fait, qui exprime, mieux que de longs discours, « la
fonction de soupape assurée par la manifestation, la Cour
européenne des droits de l'homme s'oppose même à ce que
soient réprimées des manifestations non déclarées,
voire interdites, sauf si elles risquent de tourner à
l'émeute ».897(*) Car on n'interrompt pas les battements d'un coeur au
motif qu'il lui arrive, parfois, de s'emballer898(*).
Pour préserver le libre exercice d'une
citoyenneté active et l'intégrité physique de ceux qui la
défendent, il est nécessaire d'assurer un contrôle ferme et
démocratique de l'action du pouvoir policier qui semble souvent donner
libre cours à son interprétation, quelque peu originale, de la
législation en vigueur, avec pour effet de museler le droit sous les
signes du droit pénal.Ce contrôle multidimensionnel des actions
étatiques préventives et répressives est un vivier de la
démocratie.
Traditionnellement, dans les systèmes
étudiés, le juge administratif était incapable d'assurer
une quelconque protection de la liberté de manifestation. Faute
d'être doté de procédures d'urgence efficace, il
intervenait des mois, voire des années après une mesure
d'interdiction prise par l'autorité de police. Si l'interdiction
était illégale, l'annulation intervenait après coup, ne
produisant ainsi qu'un effet purement platonique. La manifestation aurait
dû se tenir ; elle n'avait pu se dérouler faute
d'intervention du juge en temps utile.
La situation a radicalement changé avec les
réformes ayant introduit les procédures d'urgence. La
liberté de manifestation ayant la nature d'une
« liberté fondamentale tant du point de vue formel que
matériel, le juge des référés peut intervenir dans
un délai très rapide, de quelques jours, voire, de quelques
heures, pour prononcer une mesure de sauvegarde. Il est ainsi en mesure
d'intervenir en temps utile pour, le cas échéant, suspendre une
interdiction illégale et permettre, ce faisant, la tenue de la
manifestation. Dans certains cas, la seule saisine du juge et la crainte qu'une
mesure de sauvegarde soit prononcée, suffit à ce que
l'Administration lève d'elle-même l'interdiction899(*) ou s'empêche
d'interdire. Si le litige conserve un objet au jour où il statue, le
juge apprécie la légalité de la mesure prise en
procédant à un double contrôle de nécessité
et de proportionnalité.
Cependant, en République Démocratique du Congo,
la réforme intervenue en 2016 à l'occasion de l'adoption de la
loi organique portant organisation, compétence et fonctionnement des
juridictions de l'ordre administratif n'a pas apporté d'effet positif
sur l'amélioration des conditions d'exercice de la liberté de
manifestation. Car aucune juridiction administrative ne s'est prononcée
sur une affaire relative au droit de manifester. Ce vide jurisprudentiel ne
facilite pas la maîtrise de l'application de ces procédures
d'urgence en matière de liberté de manifestation. Ainsi, nous
souhaitons que la liberté de manifestation soit affranchie de son exil
doctrinal et jurisprudentiel permettant ainsi aux tribunaux d'y accorder un
poids aussi important qu'aux impératifs de sécurité de la
société.
Pour ce faire, un double contrôle sur la
nécessité de l'interdiction et la proportionnalité de la
restriction devrait être organisé afin d'imposer l'exigence de
modération.Il est ainsi évident qu'une obligation d'encadrement
et de protection des manifestants et de la liberté de manifestation
pèse sur l'autorité publique. Toutefois, il ne pèse pas
sur elle une obligation de résultat, mais seulement une obligation
de moyens900(*).
Concrètement, car c'est sur ce point que semble se jouer
l'appréciation, l'autorité de police va être tenue de
mettre à disposition un nombre raisonnable de forces de police. Si le
danger est trop élevé et nécessite de mettre un policier
derrière chaque manifestant pour le prévenir, alors
l'interdiction pure et simple n'apparaît pas disproportionnée.
L'effectivité de l'institution du
référé-liberté devrait bien permettre de soumettre
les restrictions dont cette liberté peut faire l'objet à un
contrôle rapide et efficace du juge administratif. En clair, le
référé-liberté, en cas de liberté de
manifestation, ne comporterait pas l'exigence de l'article 287, point 1 de la
loi organique sur les juridictions administratives est ainsi
libellé : « Outre les mentions prévues à
l'article 135 de la présente loi organique, la requête aux fins
des mesures en référé contient la justification de
l'urgence des mesures sollicitées ». De lege ferenda, le
législateur est censé reconnaitre l'urgence à toute
requête en référé-liberté de manifestation au
regard de la nature même de la manifestation qui lui confère le
caractère urgent, son organisation ne s'étendant que sur une
durée relativement courte.
En dehors des hypothèses tout à fait
exceptionnelles, l'autorité de police ne peut interdire de façon
générale l'organisation des manifestations publiques sur une
durée indéterminée. Ainsi, était illégal
l'Arrêté du Gouverneur de la ville de Kinshasa différant
l'organisation des manifestations publiques sur toute l'étendue de la
ville de Kinshasa à un délai indéterminé. De
même, l'autorité de police ne peut pas s'opposer, de façon
générale, absolue et systématique, à toutes les
manifestations publiques projetées par une association.Dans ce cas, le
juge administratif doit censurer l'existence d'une disproportion entre
l'intensité de la menace et l'étendue de la restriction901(*).
En présence d'une manifestation présentant un
risque pour l'ordre public, l'autorité administrative ne dispose pas
moins de moyens alternatifs, moins attentatoires aux libertésque
l'interdiction. Elle peut procéder, d'une part, par l'interdiction
ciblée (limitée à telle ou telle rue) et, d'autre part,
par la mobilisation des forces de police pour assurer la sécurité
de l'évènement et contenir d'éventuels
débordements.
Dans le cas où l'utilisation de la force est
considérée comme nécessaire, le droit international exige
que celle-ci soit utilisée de manière proportionnelle à la
gravité de l'infraction et à l'objectif légitime à
atteindre, de manière à causer le minimum de dommages à
l'intégrité physique des personnes. Face à un
rassemblement au cours duquel certains individus se livrent à des actes
de violence, l'utilisation de la force peut être considérée
comme nécessaire lorsqu'elle est inévitable pour assurer la
sécurité des personnes et des biens ou à rétablir
l'ordre public. Mais, cette utilisation devrait intervenir seulement en dernier
recours. Dans de telles situations, le principe de la proportionnalité
exige que les dommages pouvant découler de l'utilisation de la force
soient justifiables par rapport à l'objectif légitime poursuivi.
Par ailleurs, l'usage d'armes à feu pour disperser les rassemblements
ponctués d'actes de violence n'est permis que si le recours à des
moyens moins dangereux est impossible, dans les limites du minimum
nécessaire et dans des cas où leur usage est nécessaire en
cas de légitime défense ou pour la défense des tiers
contre une menace imminente de mort ou de blessures graves.902(*)
La violence dans le chef de certains manifestants ne fait pas
d'une manifestation toute entière un rassemblement non pacifique.
Dès lors, les agents responsables de l'application des lois ne doivent
cibler que les individus violents, en les distinguant des manifestants
exerçant légitimement leur droit des réunions
pacifiques903(*). Les
tirs indiscriminés sur la foule ou les manifestants sont contraires
à l'interdiction absolue de privation arbitraire du droit à la
vie et ne peuvent être justifiés904(*). Le recours aux armes à feu doit uniquement
être autorisé face à une menace imminente de mort ou de
blessure grave pour soi-même ou pour autrui. Par ailleurs, le
matériel ne permettant pas un recours différencié à
la force, tel que les gaz lacrymogènes, ne doit être
utilisé quede manière exceptionnelle, dans des situations de
violence généralisée et uniquement lorsque le niveau de
violence a atteint un seuil tel que les menaces ne peuvent être
traitées en ciblant uniquement les personnes violentes905(*).
Au regard des atteintes portées contre la
liberté de manifestation, certains chercheurs comme Aurélie
Duffit et Jacques Djoli estiment que les droits fondamentaux en
général et le droit de manifester en particulier sont en train de
connaître leur éclipse. Cette affirmation mérite bien
d'être tempérée ou de ne pas être
généralisée dans la mesure où l'action du juge par
les procédures dites d'urgence permet de rêver d'un âge
d'orde ces libertés.
C'est ici que trouve toute son utilité la thèse
que nous soutenons. En effet, la protection de la liberté de
manifestation passe nécessairement par le renforcement des sanctions des
entraves à cette liberté. La dérision, l'obsolescence et
le caractère non dissuasif des sanctions prévues par la loi
Sessanga donnent l'impression d'un droit sans peine.Ceci nous a
conduit à imaginer une sanction supplémentaire dont la teneur
touche directement à la personne de l'autorité de police et non
à l'organe.Ainsi, nous proposons l'institution de la
déchéance de l'autorité administrative dans deux
situations : la rébellion à la décision du juge et la
récidive. Cette dernière renvoie à la situation d'une
autorité administrative dont la décision serait annulée
deux fois par le juge.
BIBLIOGRAPHIE
I. TEXTES OFFICIELS
A. TEXTES CONGOLAIS
1. Les textes constitutionnels
1. Constitution de la République Démocratique du
Congo de 18 février 2006, telle que modifiée le 20 janvier 2011,
in Journal Officiel de la République Démocratique du Congo,
52ème année, numéro spécial, 5
février 2011.
2. Constitution de la transition du 4 avril 2003, in Journal
Officiel de la République Démocratique du Congo, n°
spécial, 5 avril 2003.
3. Décret-loi constitutionnel n° 003 du 27 mai
1997 portant organisation et exercice du pouvoir en République
démocratiques du Congo, in Journal Officiel de la République
Démocratique du Congo, numéro spécial mai 1997.
4. Acte constitutionnel de la Transition du 09 avril 1994, in
Journal Officiel de République du Zaïre, numéro
spécial du 09 avril 1994.
5. Acte constitutionnel harmonisé relatif à la
période de Transition du 2 avril 1993, in Journal Officiel de
République du Zaïre, numéro spécial du 2 avril
1993.
6. Acte portant dispositions constitutionnelles relatives
à la période de Transition du 4 aout 1992 dir, Mukendi (E.) et
alli., in constitution. les constitutions de la République
Démocratique du Congo de 1908 à 2011, collection juridoc,
Kinshasa, 2010.
7. Loi n° 88-004 du 27 janvier 1988 portant
révision de certaines dispositions de la Constitution, in Journal
Officiel de la République du Zaïre, n° spécial, 31
janvier 1988.
8. Loi n° 80-012 du 15 novembre 1980 modifiant et
complétant quelques dispositions de la Constitution, in Journal Officiel
de la République du Zaïre, n°1 du 1er janvier
1980.
9. Loi n° 80-007 du 19 février 1980 portant
révision de la Constitution, in Journal Officiel de la République
du Zaïre, n° 5 bis du 1er mars 1980.
10. Constitution du 24 juin 1967, in Moniteur congolais, 15
juillet 1967, n° 14.
11. Constitution de la République Démocratique
du Congo du 1er août 1964, in Moniteur congolais, n°
spécial, 5 octobre 1965.
12. Loi Fondamentale du 19 mai 1960 relative aux structures du
Congo, in Moniteur Congolais, 27-28 mai, 1960.
13. Loi du 18 octobre 1908 sur le Gouvernement du Congo-Belge
(« Charte Coloniale »), B.O. 1908, p.65.
14. Constitution belge de 1831 (annexe in Res Publica, 1968,
numéro spécial).
2. Les textes légaux
1. Loi organique n° 16/027 du 15 octobre 2016 portant
organisation, compétence et fonctionnement des juridictions de l'ordre
administratif, in Journal Officiel de la République Démocratique
du Congo, 57ème année,Numéro
spécial,....
2. Loi organique n°13/011 du 21 mars 2013 sur la
Commission Nationale des droits de l'homme, in Journal Officiel de la
République Démocratique du Congo, 54ème
année, Numéro spécial 7 du 1er avril 2013.
3. Loi organique du 11 août 2011, portant organisation
et fonctionnement de la Police Nationale Congolaise, in Journal Officiel de la
République Démocratique du Congo, 52ème
année, Numéro spécial du 23 aout 2011.
4. Décret-Loi du 11 janvier 2003 portant
création et organisation de l'Agence Nationale de Renseignements. Le
texte n'a pas été publié au regard de la nature
sécuritaire du Service.
5. Décret-loi n° 196 du 29 janvier 1999 portant
règlement des manifestations et des réunions publiques, in
Journal Officiel de la République Démocratique du Congo,
40ème année, Numéro spécial,
février 1999.
6. Décret du 30 janvier 1940 portant Code pénal
congolais, in Journal Officiel de la République Démocratique du
Congo, 45ème année, Numéro spécial 57 du
30 novembre 2004.
3. Les actes administratifs
1. Ordonnance n°17/050 du 17 juillet 2017 portant
nomination dans la catégorie de commissaire divisionnaire de la Police
Nationale Congolaise, in Journal Officiel de la République
Démocratique du Congo, 58ème année,
Numéro 14 du 15 juillet 2017.
2. Ordonnance n°17/052 du 17 juillet 2017 portant
nomination d'un Commissaire général et des Commissaires
généraux adjoints de la Police Nationale Congolaise, in Journal
Officiel de la République Démocratique du Congo,
58ème année, Numéro14 du 15 juillet 2017.
3. Ordonnance n°86/268 du 31 octobre 1986 portant
création du département des droits et libertés du citoyen,
in Journal Officiel du Zaïre, 27ème année,
Numéro 2 du 1ernovembre1986.
4. Décret n° 05/026 du 6 mai 2005 portant plan
opérationnel de sécurisation du processus électoral, in
Journal Officiel de la République Démocratique du Congo,
58ème année, Numéro 10 du 15 mai 2005.
5. Arrêté urbain n°3073/04/2017 portant
mesures d'interdiction de manifestations publiques dans la ville de Kananga (23
novembre 2017).
B. TEXTES DE DROIT COMPARÉ ET DU DROIT
INTERNATIONAL
1. Constitution française du 05 octobre 1958 telle que
modifiée et complétée par la loi n°2008-724 du 23
juillet 2008, in Journal Officiel du 24 juillet 2008.
2. Loi constitutionnelle n°2008-724 du 23 juillet 2008 de
modernisation des institutions des institutions (M1) de la
Vème République française, in Journal Officiel
du 24 juillet 2008.
3. Loi n°90-23 du 11 décembre 1990 portant
Constitution de République du Benin.
4. Décret 2005-377 du 23 juin 2005 portant
réglementation du maintien de l'ordre au Bénin.
5. Décret-loi du 23 octobre 1935 portant
réglementation des mesures relatives au renforcement du maintien de
l'ordre public, in Journal Officiel français.
6. Pacte international relatif aux droits civils et
politiques, New York, 16 décembre 1966,in Journal Officiel de la
République Démocratique du Congo, 40ème
année, Numéro, Avril 1999.
7. Pacte international relatif aux droits
économiques,sociaux et culturels, New York, 16 décembre 1966, in
Journal Officiel de la République Démocratique du Congo,
40ème année, Numéro, Avril 1999.
8. Déclaration universelle des Droits de l'Homme, New
York, 10 décembre 1945, in Journal Officiel de la République
Démocratique du Congo, 40ème année,
Numéro, Avril 1999.
9. Charte africaine des Droits de l'Homme et des peuples,
Nairobi, 21 octobre 1986, in Journal Officiel de la République
Démocratique du Congo, 40ème année,
Numéro, Avril 1999.
10. La Déclaration française des droits de
l'Homme et du citoyen de 1789.
11. Charte des droits fondamentaux de l'Union
européenne », in Journal officiel des Communautés
européennes, 30 mars 2010.
II. JURISPRUDENCE
1. C.S.J., Section judiciaire, jugement avant dire droit du 22
mars 1995, dit Arrêt BAVELA.
2. CC, 18 janv.1995, n° 94-352 DC, Loi d'orientation et
de programmation relative à la sécurité, cons. n°
16.
3. CC, 18 janvier 1995, déc. n° 94-352 DC, Loi
d'orientation et de programmation relative à la sécurité,
Rec., cons. n° 24.
4. CC, déc. n° 94-352 DC du 18 janvier 1995, Loi
d'orientation et de programmation relative à la sécurité,
cons. 16.
5. CC., décision 98-403 DC du 29 juillet 1998, Loi
d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, Rec. p. 276,
J.O. du 31 juillet 1998.
6. CC, Décision n° 94-352 DC du 18 janvier
1995.
7. CC, décision 79-105 DC du 25 juillet 1979, Droit de
grève à la radio et à la télévision, Rec. ;
8. DCC 03-134 du 21 Août 2003 et décision DCC
06-045 du 05 avril 2006 de la Cour constitutionnelle du Bénin sur la
liberté de manifestation.
9. DCC 01-097 du 07 novembre 2001 où le juge
constitutionnel déclare conforme à la Constitution
l'arrêté préfectoral interdisant toute manifestation.
10. DCC 02-058 du 04 juin 2002, FAVI Adèle, Recueil,
2002, p. 243 ;
11. DCC 05-015 / 2005-02-17.
12. Arrêt 115/1985 du 11 octobre 1985, Tribunal
Constitutionnel espagnol.
13. Arrêt de la section du C.E. (France), Affaire
Société « Les films Lutétia » du 18
décembre 1959.
14. CAA Nantes, 03.05.1995, Ministère de
l'Intérieur ;
15. CE, 06.12.1999, M. Ouizille.
16. CE, 15 mai 2002, Baudouin, n°239487.
17. CE, 1er févr. 1939, Asso. « La Lyre
mascaréenne », Lebon.
18. CE, ord. 10 juillet 2002, Boulenia, n°248422.
19. CE, ord. 12 janvier 2001, Hyacinthe, Lebon.
20. CE, ord. 12 novembre 2001, Commune de Montreuil-Bellay,
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21. CE, ord. 16 février 2004, Benaissa, Lebon T.
22. CE, ord. 16 juillet 2001, Feuillatey, Lebon.
23. CE, ord. 16 juillet 2002, Feuillatey, Lebon.
24. CE, ord. 19 août 2002, Front National et Institut de
formation des élus locaux (IFOREL), Lebon.
25. CE, ord. 19 janvier 2005, M. Laurent X, Lebon.
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c/Consorts Marcel, Lebon.
27. CE, ord. 2 mai 2001, Ministre de l'intérieur cl
Dziri, Lebon.
28. CE, ord. 23 mars 2001, Société Lidl,
Lebon.
29. CE, ord. 25 novembre 2003, Ministre de l'Intérieur,
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c/Nikoghosyan, Lebon T.
30. CE, Ord. 26 juillet 2014, Pojolat, n°383091,
inédit ; RFDA 2015.
31. CE, ord. 27 mars 2001, Ministre de l'Intérieur
c/Djalout, Lebon.
32. CE, ord. 29 septembre 2004, Ministre de l'Intérieur
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c/Aubame, n°271584.
33. CE, ord. 3 avril 2002, Ministre de l'Intérieur
à Kutarici, Lebon T.
34. CE, ord. 31 oct. 2013, Association Droit au logement Paris
et environs, req. n° 1315396/9.
35. CE, ord. 5 mars 2002, Fikry, Lebon.
36. CE, ord. 8 septembre 2005, Ministre de la Justice c/Bunel,
Lebon.
37. CE, Sect. 18 janvier 2001, Morbelli, maire de la Commune
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38. CE, Sect. 30 octobre 2001, Ministre de l'Intérieur
c/Tliba, Lebon.
39. CE., ord. 5 janvier 2007, min. de l'intérieur
c/Assoc. « Solidarité des Français »,
n°300311.
40. Tribunal administratif de Lille, ord. 5 févr. 2016,
n° 1601013, inédit.
41. Tribunal des conflits, 07.06.1982, Préfet du
Pas-de-Calais c/TGI de Boulogne-sur-Mer et 13.02.1984,
42. Tribunal des conflits, 15 janvier 1990,
Chamboulive et autre c/Commune de Vallecalle, n° 02607, Rev. Fr.
Droit adm. 7 (4), juillet-août 1991.
43. Tribunal suprême, 3ème Chambre, 26
juin 1991.
44. CEDH, 15 nov. 2007.Galstyan c. Arménie, req.
n° 26986/03, § 95. - Ou, au sujet de la liberté
d'association.
45. CEDH, 15 nov. 2012, Celik c. Turquie, req. no
34487/07.
46. CEDH, 19 novembre 2012, Berladir contre Russie,
n° 34202, §45.
47. CEDH, 1er décembre 2011, Schwabe et M.G.
c. Allemagne, req. no 8080/08 et 8277/08.
48. CEDH, 2 oct. 2001, Stankov c. Bulgarie, req. no
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49. CEDH, 21 juin 1988, Plattform « Ärztefürdas
Leben » c. Autriche, req. n° 10126/82, série A n° 139,
§ 32.
50. CEDH, 21 oct. 2010, Alekseyev c. Russie, req.
no 4916/07 ;
51. CEDH, 25 mai 2016, Suleyman Çelebi et autres c.
Turquie, req. n° 37273/10
52. CEDH, 27 nov. 2012, Disk et Kesk c. Turquie, req. n°
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53. CEDH, 25 sept. 2012, Trade Union of the Police in the
Slovak Republic c. Slovaquie, req. n°11828/08, préc.
54. CEDH, 26 avril 2016, Novikova and others v. Russia, req.
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promulgue dans les délais définis ci-dessus : A
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132. Allocution de M. Nicolas Sarkozy, Président de la
République française, prononcée à
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141. Communiqué de presse publié le 15 novembre
2017, le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme a
qualifié ces commentaires d'extrêmement alarmants et a
appelé les autorités congolaises à « oeuvrer pour
désamorcer les tensions au lieu de créer les conditions
favorisant la répression, la confrontation et la violence ».
142. Communiqué n° 090/BIS/CAB.GOUV/KC/002/2017
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143. Conseil de sécurité des Nations Unies,
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144. Déclaration du 8 septembre 2000 des Chefs
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l'Assemblée générale des Nations Unies, 13 septembre
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site de l'ONU, http://www.un.org, p. 2, I-§ 6.
145. Déclaration sur le droit et la
responsabilitéì des individus, groupes et organes de la
société de promouvoir et protéger les droits de l'homme et
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147. Les rapports de la MONUSCO et du BCNDH et autres
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- URL:
http://journals.openedition.org/revus/2755.
DOI : 10.4000/revus.2755.
TABLE DES
MATIERES
ÉPIGRAPHIE
I
DÉDICACE
II
REMERCIEMENTS
III
PLAN SOMMAIRE
V
PRINCIPAUX SIGLES, ABRÉVIATIONS ET
ACRONYMES UTILISÉS
VII
INTRODUCTIONGÉNÉRALE
1
1. CONTEXTE DE
L'ÉTUDE
4
2. ÉTAT DE LA
QUESTION ET REVUE DE LA LITTÉRATURE
7
3.
PROBLÉMATIQUE
13
4. HYPOTHESES DE
TRAVAIL
14
5. JUSTIFICATION DE
L'ÉTUDE
14
5.1. Une question d'actualité
délaissée par la doctrine
15
5.2. L'indispensable besoin de protection de la
liberté de manifester
16
5.3. Choix des États, objet de la
comparaison
17
6. INDICATIONS
MÉTHODOLOGIQUES
18
7. DÉLIMITATION DU
CHAMP DE LA RECHERCHE
22
PREMIERE PARTIE :
Introduction
25
CHAPITRE
PREMIER :
LA FONDAMENTALITÉ DU DROIT DE
MANIFESTER DANS UN ÉTAT DÉMOCRATIQUE
27
Section 1. Le principe de liberté,
fondement substantiel de la liberté de manifestation
28
§1. Les fondements de la liberté
de manifestation
28
1. Liberté comme
prérogative
29
2. Un concept à controverses
30
A. Leconflitentrela
libertédu sujet et la liberté de tous
34
B. La collision des libertés antagonistes
35
§2. La liberté de manifestation
sur la voie publique en question
38
1. Le sens de la liberté de manifestation
39
A. La diversité des formes de
manifestation
41
B. Ce que une manifestation publique n'est pas
43
B.1. L'attroupement et le soulèvement
populaire
43
B.2. La contre-manifestation
44
2. La liberté de manifestation :
composantes et corollaires
45
§3. Le lien entre la liberté de
manifestation et les autres droits et libertés
46
1. Une liberté articulée avec la
liberté d'expression
46
2. Une liberté découlant de la
liberté des réunions pacifiques
46
3. Une liberté se rapprochant de la
liberté d'association
48
Section 2. La recherche de la
fondamentalité du droit de manifester
48
§1. La fondamentalité est-elle
liée à une source ?
49
§2. La fondamentalité est une
propriété
49
1. La constitutionnalité comme indice de
fondamentalité
51
2. La fondamentalité des libertés
infra-constitutionnelles
54
Section 3. La proximité
sémantique impliquant une précaution de langage dans l'usage de
certains concepts
54
§1. La distinction entre la promotion
et la protection
54
1. Définition des concepts promotion et
protection
55
A. Promotion
55
B. Protection
55
2. Intérêt de la distinction
56
A. Une exigence doctrinale
56
B. Une précision terminologique
56
§2. L'ordre public matériel et
immatériel
57
1. La conception retenue de l'ordre public
57
A. La double acception de la notion d'ordre
public
59
B. La conception matérielle de l'ordre
public
60
2. Les fonctions précises de l'ordre
public
61
3. La conception immatérielle de l'ordre
public
63
CHAPITRE
DEUXIEME :
L'ÉVOLUTION DES CADRES CONTEXTUEL ET
JURIDIQUE DE L'EXERCICE DE LA LIBERTÉ DE MANIFESTATION
64
Section 1. Le Congo-Belge :
l'exercice de la liberté de manifestation dans un contexte colonial
67
§1. Le régime applicable
à l'exercice de la liberté des manifestations
69
1. La résignation au paternalisme
69
A. Une consécration excluant les
indigènes
70
B. La portée libérale de cette
consécration
71
2. Un régime discriminatoire basé sur
la race
73
A. La stratification sociale
75
B. Une réglementation discriminatoire
75
B.1. L'égalité des Belges (de la
Belgique et du Congo) devant la loi
76
3. Analyse de l'Ordonnance n° 025/555 et
l'Ordonnance n° 25-55 du 05 octobre 1959
78
§2 La manifestation et la
colonisation
79
1. L'intolérance politique et sociale
79
A. L'intolérance politique
80
B. L'intolérance sociale
81
2. Les conséquences de
l'intolérance
82
A. Les événements du 4 janvier
1959
82
1. Que s'est-il réellement passé au
Congo ?
82
2. Analyse juridique de la situation
83
3. Impacts sur le plan politique
83
B. Les contestations de Stanleyville
84
Section 2. Le Congo-Zaïre :
l'exercice de la liberté de manifestation dans un contexte
dictatorial
85
§1. Un cadre juridique illustrant un
contexte dictatorial
86
1. La liberté de manifestation sous la
constitution de 1964
86
2. La liberté de manifestation avant 1967
87
3. Traits fondamentaux de la Constitution du 24 juin
1967
88
A.1. La situation des droits et libertés des
citoyens
89
A.2. Le cas particulier de la protection de la
liberté de manifestation
89
B. Les révisions de la Constitution de
1967
91
B.1. La Loi n° 70/001 du 23 décembre
1970
91
B.2. La Loi n° 74/020 du 15 août 1974
91
B.3. La Loi n° 78-010 du 15 février
1978
92
§2. Les tendances de
démocratisation : le régime juridique proposé à
l'issue des négociations politiques au Zaïre
93
1. Multipartisme intégral et l'ouverture
effective de l'espace politique
94
A. La liberté de manifestation au lendemain
du discours du 24 avril 1990
94
B. La liberté de manifestation dans le
contexte de l'ouverture effective de l'espace politique
95
2. Les résolutions de la conférence
nationale souveraine
97
3. Le droit de manifester sous la constitution de la
transition du 04 avril 2003
98
4. Le bilan des atteintes portées sur la
liberté de manifestation
100
§3. La gestion des manifestations et
les vagues de démocratisation au Zaïre
100
1. La gestion des manifestations au plus fort de la
dictature
101
A. L'influence de la culture autocratique sur le
droit de manifester
101
2. Le processus de démocratisation
103
3. L'entrée de l'Alliance des Forces
Démocratiques pour la Libération
104
3. L'entrée en vigueur du décret-loi
du 29 janvier 1999
106
A. L'économie du décret-loi
106
B. Lecture critique du décret-loi
107
C. Facteur de la fragilité de la
liberté de manifestation
107
Section 3. Les principales atteintes
portées au droit de manifester
109
§2. La période de
2006-2011 : entre les deux cycles électoraux
110
A. Les manifestations pré- et
post-électorales de 2006
110
§2. La période entre 2011 et
2016
111
A. La période 2011
111
B. Les manifestations de janvier 2015 contre la loi
électorale
114
C. Les manifestations de septembre
2016 dénommées « carte jaune »
114
§3. La période allant de
décembre 2017 et janvier 2018 : Comité Laïc Catholique
de coordination « CLC »
118
CHAPITRE TROISIEME :
120
LA LIBERTÉ DE MANIFESTATION EN DROIT
COMPARÉ
120
Section 1. Le cadre juridique de protection
de la liberté de manifestation en France
123
§1. Le droit de manifester en
France : une liberté sous les signes de
méfiance
123
1. La protection
inachevée
123
2. Un régime
placé sous le signe de l'ordre public et
méfiance
125
§2. Le régime juridique de la
liberté de manifestation en France
127
Section 2. La positivité de la
liberté de manifester en droit espagnol
129
§1. Le parcours historique du droit de
manifester en Espagne
129
§2. Les acquis consolidés en
droit positif
133
§3. La conception espagnole de la
liberté de manifestation
136
Section 3. L'exercice de la liberté
de manifestation au Bénin
142
§1. La reconnaissance de la
liberté de manifester au Bénin
143
1. Le cadre juridique de la reconnaissance de la
liberté de manifester
143
2. L'exercice de la compétence
législative au Bénin
144
§2. Un encadrement
déformé
146
1. Le régime de la liberté de
manifestation au Bénin
146
A. L'ambiguïté du régime
juridique béninois de protection
147
B. Une instrumentalisation politique pour museler
l'opposition
148
2. Une protection vicieuse
149
A. La manifestation au service de la diffusion d'une
politique gouvernementale
149
B. Le musèlement de l'opposition
150
CONCLUSION PARTIELLE
153
DEUXIÈME PARTIE
:
LA PROTECTION DU DROIT DE MANIFESTER DANS
L'ESPACE PUBLIC : PROSPECTIVES CONGOLAISES
155
INTRODUCTION
156
CHAPITRE
QUATRIEME :
UNE ARCHITECTURE VIRTUELLE DE PROTECTION DU
DROIT DE MANIFESTER APPAREMMENT COHÉRENTE
158
Section 1. Les mécanismes
non-juridictionnels de protection de la liberté de manifester
159
§1. La protection
politico-parlementaire de la liberté de manifestation
160
1. La protection par la sanction des atteintes
portées aux droits fondamentaux
160
A. La protection par la sanction des
politiques gouvernementales liberticides
161
B. La mise en échec des lois
liberticides
162
2. La protection par voie de pétition
163
§2. Autres organismes nationaux de
protection des droits fondamentaux
165
1. Le pouvoir exécutif
165
A. Le Département des droits et
libertés du citoyen
165
B. Ministère des droits humains
166
2. La Commission Nationale des Droits de l'Homme
168
A. La composition
169
B. Les compétences
169
C. La CNDH, un ombudsman à la
congolaise ?
171
D. Les pesanteurs fonctionnelles
173
1. La police nationale congolaise
175
A. L'action de la police avant les
manifestations
176
B. L'action de la police pendant les
manifestations
177
C. Les quatre principes du maintien de
l'ordre public
177
C.1. La conformité légale
177
C.2. L'interdiction de l'excès : le
principe de la proportionnalité
177
C.3. L'adéquation entre la mesure à
prendre et le degré de la menace à craindre
178
C.4. Hiérarchies de valeurs entre la
liberté et les risques éventuels
178
2. La protection par les forces armées
congolaises
178
3. L'Agence nationale des renseignements
179
§4. Les acteurs paraétatiques et
interétatiques
180
1. Les Organisations Non Gouvernementales de
protection des droits de l'homme
181
2. La protection internationale du droit de
manifester
181
A. L'action internationale en faveur de la
protection de la liberté de manifestation
182
A.1. Les garanties mondiales
182
A.2. La contribution de l'Organisation
Internationale de la Francophonie à la protection d'un État de
droit
183
B. La protection par les sanctions ciblées de
l'UE et les USA
184
B.1. La portée des mesures dites sanctions
ciblées
184
B.2. L'effectivité des sanctions dites
ciblées prises au travers les mesures américaines et
européennes
186
3. La protection onusienne (MONUSCO, BCNUDH)
188
4. Les garanties assurées par les instances
africaines
189
A. La protection par voie diplomatique :
Déclaration des gouvernements africains
189
B. La protection devant Cour africaine des droits de
l'homme et des peuples
189
Section 2. Les mécanismes
juridictionnels de protection de la liberté de manifester
190
§1. La protection de la liberté
de manifestation : quelles garanties par le juge ?
193
1. Le juge judiciaire, protecteur de la
liberté de manifestation
193
A. Le juge pénal congolais et la
protection de la liberté de manifestation
193
B. La protection par le juge civil
195
2. La protection de la liberté de
manifestation par le juge administratif
195
A. La recherche de la conformité
légale
195
B. La réparation du préjudice
causé par l'administration
196
3. L'action de la Cour constitutionnelle dans la
protection de la liberté de manifestation
196
§2. La dynamique jurisprudentielle de
protection de la liberté de manifestation
198
Section 3. Le régime de
responsabilité découlant de la liberté de manifestation en
droit comparé
203
§1. Mise en oeuvre de la
responsabilité pénale
203
1. Les infractions visant les manifestants
204
2. L'entrave à la liberté de
manifestation
208
3. S'agissant des organisateurs et des
manifestants
209
§2. La responsabilité civile
découlant des manifestations publiques
210
1. La responsabilité civile de l'État
des dommages causés par les manifestants
210
2. Justification de la responsabilité civile
de l'État
210
3. Les conditions de la responsabilité civile
de l'État
211
4. La responsabilité civile pour les dommages
causés par les tiers à la manifestation
214
§3. Responsabilité disciplinaire
et politique
216
1. La responsabilité disciplinaire
résultant des manifestations publiques
216
2. La responsabilité politique
217
CHAPITRE
CINQUIEME :
CONTRADICTIONS, AMBIGUÏTÉS ET
INADAPTATIONS PRATIQUES DU SYSTÈME JURIDIQUE CONGOLAIS DE PROTECTION DE
LA LIBERTE DE MANIFESTATION
221
Section 1. La hiérarchie des
normes : une exigence de l'effectivité de la liberté de
manifestation
222
Section 2. La liberté de
manifestation : un droit constitutionnel dont les modalités
d'exercice postulent l'intervention du législateur
226
§1. La consécration
législative : un vide à combler par une loi portant mesures
d'application de la liberté de manifestation
227
1. La consécration constitutionnelle
de la liberté de manifestation
227
2. La proposition de loi portant
modalités d'exercice de la liberté de manifestation
228
§2. Le déni de
législation en matière de liberté de manifestation :
une carence fautive dépourvue de sanction
230
1. La nécessaire intervention du
législateur
231
2. La situation en droit congolais
232
§3. Entre autorégulation du
système juridique et opposabilité de la proposition de
loi
238
Section 3. La liberté de
manifestation : la nécessité de la cohérence du
système juridique de protection
240
§1. La conformité des normes
à la Constitution et aux conventions internationales des droits de
l'homme : principal indice de la cohérence du système
juridique
240
1. Les traités internationaux dans l'ordre
juridique de la RDC
240
2. La liberté de manifestation en droit
international des droits de l'homme
242
§2. La protection conventionnelle de la
liberté de manifestation
243
CHAPITRE
SIXIEME :
PROSPECTIVES POUR UNE PROTECTION PLUS
EFFICACE ET PLUS EFFECTIVE DU DROIT DE MANIFESTER EN RDC
247
Section 1. La nécessité de
reformer le système juridique congolais de protection de la
liberté de manifestation
248
§1. La recherche de la cohérence
du système juridique
248
1. Position du problème
249
2. Nos propositions
251
§2. Le renforcement des sanctions comme
condition d'effectivité
251
1. Position du problème
252
2. Notre proposition
256
§3. La mise en place de voies de
recours juridictionnels adaptées à la protection des droits
fondamentaux
256
1. Analyse comparée des recours
juridictionnels spéciaux en matière de protection de la
liberté de manifestation
256
A.1. La procédure sommaire et prioritaire
espagnole
258
A.2. Le référé-liberté
commun à la France et à la RDC
259
B. Les recours constitutionnels
spécialisés dans la protection des droits fondamentaux
261
B.1. Le recours constitutionnel d'amparo
espagnol
261
B.2. La question prioritaire de
constitutionnalité française
265
2. Perspectives pour la République
Démocratique du Congo
269
Section 2. La légitimité de la
norme de protection de la liberté de manifestation et la
nécessité de sa mise en oeuvre
271
§1. La bonne réception de la
norme par ses destinataires
271
1. Aperçu du problème
272
2. Prospectives congolaises : une
éducation au droit de l'homme et au constitutionnalisme populaire
276
§2. Les mesures d'application de la
norme
277
Section 3. L'exigence d'un service public de
la justice de qualité
279
§1. La recherche d'effectivité
de la garantie juridictionnelle par le prisme du droit fondamental au
juge
280
1. Une reconnaissance unanime
281
2. Un champ d'application large
281
3. Le droit à l'exécution des
décisions de justice
282
§2. Les défis d'une bonne
administration de la justice en RDC
284
1. Les défis liés aux structures de la
justice
284
A. Insuffisance des juridictions
284
B. Mauvaise répartition des juridictions
285
C. Dysfonctionnement des audiences foraines
285
2. Les défis liés au fonctionnement de
la justice
286
§3. L'instauration d'un contrôle
rigoureux de la limitation des droits fondamentaux
287
1. Le contrôle des actions étatiques
préventives
287
A. Le contrôle de la déclaration
préalable
287
B. Le contrôle des interdictions
288
2. Le contrôle des actions
répressives
290
A. Le contrôle des poursuites
engagées
290
B. Le contrôle de la dispersion d'une
manifestation
292
3. Les troubles de l'ordre public : seul motif
valable d'interdiction
293
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
295
CONCLUSION GÉNÉRALE
296
BIBLIOGRAPHIE
304
TABLE DES MATIERES
338
* 1MORIN (J.-Y.),
Libertés et droits fondamentaux dans les constitutions des
États ayant le Français en partage, Paris, Bruylant/AUF.,
1999, p. 1.
* 2Idem, p. 13.
* 3 Différemment des
textes constitutionnels précédents qui rattachaient la
liberté de manifestation à la liberté d'expression et de
réunion, la Constitution congolaise du 18 février 2006 autonomise
la liberté de manifestation en lui consacrant une disposition
entière, l'article 26 lequel est réparti en 4 alinéas.
Cfr. art. 26, Constitution de la République démocratique du
Congo, telle que modifiée par la loi n°11/002 du 20 janvier 2011
portant révision de certains articles de la Constitution de la
République démocratique du Congo, in J.O.RDC., n°
spécial, 20 janvier 2011.
* 4 DUFFY (A.) et PERROUD
(Th.) (dir) et alii, « La liberté de manifester et ses
limites: perspective de droit comparé », France, 11, 2017, in
Revue des Droits de l'Homme,
https://revdh.revues.org/2956.
, p. 1.
* 5Arrêt 115/1985 du 11
octobre 1985, Tribunal Constitutionnel espagnol, cité par ALCARAZ (H.)
et LECUCQ (O.),« La liberté de manifestation dans l'espace
public en Espagne », in DUFFY (A.) et PERROUD (Th.) (dir), et
alii, Op. cit, p. 8.
* 6DENIZEAU (Ch.),
La liberté de manifestation en droit européen, in DUFFY
(A.) et PERROUD (Th.) (dir) et alii, Op. cit, p. 20.
* 7NGONDAKOY NKOY-ea-LOONGYA
(P-G), Cours de libertés publiques (polycopié),
Université de Kinshasa, D.E.S en Droit de l'Homme, 2018-2019, p. 39.
* 8ALCARAZ (H.) et LECUCQ
(O.), Op. cit, p. 7.
* 9 FRAISSE (R.), « Le
Conseil constitutionnel exerce un contrôle conditionné,
diversifié et modulé de la proportionnalité », in
Les figures du contrôle de proportionnalité en droit
français, Actes du colloque de la Faculté de Droit et
d'Économie de la Réunion, du 4 au 5 juin 2007, LPA n°
spécial du 5 mars 2009, pp. 74-85, spéc. p. 98.
* 10Idem.
* 11SAIN SAULIEU (G.), Op.
cit, pp. 50.
* 12BERTRAND (P.) et LATOUR
(X), Libertés publiques et droits fondamentaux, 5eme
éd., Mesnil-sur-l'Estrées, Studurama, 2014, p. 1.
* 13 NGONDANKOY
KOY-ea-LOONGYA (P.-G.), Introduction générale au
droit, partie II : Droit public, Op. cit., p. 1.
* 14 Ici c'est
l'essentialité, l'importance ou l'attachement que lui vouent les
citoyens au-delà de l'intervention des pouvoirs.
* 15 LÖHRER (D.),
La protection non juridictionnelle des droits fondamentaux en droit
constitutionnel comparé. L'exemple de l'ombudsman
spécialisé portugais, espagnol et français,
Thèse de doctorat en droit public, Faculté de Droit, d'Economie
et de Gestion École Doctorale, de l'Université de Pau et des Pays
de l'Adour, 2013, p. 41.
* 16RIVERO (J.),
Libertés publiques, tome I, Paris, 9e édition
mise à jour, PUF, 2003, p. 5.
* 17Article 64 de la
Constitution de la République Démocratique du Congo de 18
février 2006, telle que modifiée le 20 janvier 2011,
J.O.R.D.C., 52e année, numéro spécial,
5 février 2011, pour faire échec à un régime
soupçonné d'exercer le pouvoir en violation de la
Constitution.
* 18 SAIN SAULIEU (G.),
Op. cit, pp. 16-17.
* 19 L'incise
« sous réserve du respect de l'ordre
public » est généralement détournée
de sa vraie portée et s'utilise comme prétexte dans les pays de
tendance autoritaire pour interdire les manifestations publiques. La
précision contenue dans le Décret-loi français sur la
liberté de manifestation manque en République Démocratique
du Congo, à savoir que « la menace à l'ordre
public doit être grave et précise » et que les
troubles ne doivent être supposés.
* 20 Depuis l'approche de la
fin du mandat du Président Kabila, initialement prévue en
décembre 2016, les seules manifestations de l'opposition
accordées sont celles organisées dans la périphérie
de Kinshasa, dans la Commune de N'djili, à l'espace Saint
Thérèse. Certaines analyses démontrent que ce comportement
visait essentiellement à éloigner le risque du renversement du
régime par les effets spontanés que peut provoquer un
rassemblement à proximité de son siège.
* 21 Selon SAIN SAULIEU
(G.), Op. cit. p. 18.
* 22 Expression
employée par Paul-Gaspard NGONDANKOY NKOY-ea-LOONGYA dans l'étude
menée sur Le contrôle de constitutionnalité en
République Démocratique du Congo. Etude critique d'un
système de justice constitutionnelle dans un Etat à forte
tradition autocratique, Thèse de doctorat, Université
catholique de Louvain, 2007-2008, p. 35.
* 23 Lire le rapport
conjoint de la MONUSCO et du BCNDH respectivement pp. 18-25. Informations
disponibles sur
https://www.radiookapi.net,
consulté le 12 avril 2018 à 19h 36'.
* 24 NGONDANKOY
NKOY-ea-LOONGYA, Le contrôle de constitutionnalité en
République Démocratique du Congo. Etude critique d'un
système de justice constitutionnelle dans un Etat à forte
tradition autocratique, Op. cit. p. 45.
* 25 Une lecture minutieuse
des textes constitutionnels antérieurs permettra d'avoir une idée
juste.
* 26 DUFFY-MEUNIER (A.) et
PERROUD (Th.), Op. cit, p. 1.
* 27 Article 26 de la
Constitution de la République Démocratique du Congo du 18
février 2006, Op. cit.
* 28NGONDANKOY
NKOY-ea-LOONGYA (P.-G.), La liberté de manifestation à
l'épreuve des faits, op. cit, p. 66.
* 29 Dans l'affaire Hubbard
c. Pitt, le Tribunal Suprême espagnol, 3ème Chambre, 26
juin 1991. Citée par Hubert Alcaraz, Op. cit.,p. 2.
* 30 Décret-loi
n° 196 du 29 janvier 1999 portant règlement des manifestations et
des réunions publiques, in JORDC, 40e année,
numéro spécial, février 1999.
* 31 Article 221 de la
Constitution du 18 février 2006 de la République
Démocratique du Congo, Op. cit.
* 32 ODIMULA LOFUNGUSO (L.),
La justice constitutionnelle et la juridicisation de la vie politique en
République Démocratique du Congo, Kinshasa-Paris,
l'Harmattan RDC, 2016, p. 76.
* 33 WASCHSMAN (P.),
Libertés publiques, 4ème éd., Paris,
Dalloz, 2002, p. 66.
* 34 Jus Politicum Vol. III,
Revue de droit politique, « Mutation ou crépuscule des
libertés publiques ? », Paris, Dalloz, 2001, p. 25.
* 35 WASCHSMAN (P.), Op.
cit., p. 66.
* 36BETAILLE (J.), Les
conditions juridiques de l'effectivité de la norme en droit public
interne, illustration en droit de l'urbanisme et de l'environnement,
Thèse, Faculté de Droit et des Sciences Economiques de
l'Université de Limoges, 2012, p. 191.
* 37 ENCINAS DE MUNAGORRI
(R.), Introduction générale au droit, 3ème
éd., Paris, Flammarion, 2011, p. 217.
* 38 L'article 140 de la
Constitution du 18 février 2006 est ainsi libellé :
« Le Président de la République promulgue la loi dans
les quinze jours de sa transmission après l'expiration des délais
prévus par les articles 136 et 137 de la constitution.
* 39 NGONDANKOY NKOY
(P.-G), La liberté de manifestation à l'épreuve des
faits, Annales de la Faculté de Droit, Actes de journées
scientifiques sur le Thème Droit et
Société « ubi societas, ibi jus : ubi jus,
ibi societas », du 06 au 07 février 2017, Kinshasa, Ed. DES,
octbre 2017, p. 1.
* 40 BABINEAU
(G.), « La manifestation : une forme d'expression
collective », Les Cahiers de droit, 53(4) pp. 761-792.
* 41 L'accès au juge
et la certitude de son issu sont le gage de l'effectivité du droit de
manifester. Dans ce cadre, la nécessité d'une citoyenneté
active s'impose.
* 42 BENDOUROU (O.), Les
publiques libertés entre Constitution et législation,
exposé lors d'une conférence à la Faculté de Droit
de Souissi-Rabat, 2016.
* 43 L'approche top down ou
descendante consiste, comme son nom l'indique, en un processus d'analyse
évoluant de haut en bas ; en l'espèce l'approche va
consister, dans l'analyse de certaines notions, à partir du droit
international vers le droit interne.
* 44 DENIZEAU (Ch.), Op.
cit., p. 25.
* 45 L'embrasement de la
situation à travers toutes les régions du monde exige un regard
global et postule à une étude comparative pour une meilleure
explication du phénomène.
* 46 In concreto, il
s'agissait de démontrer l'incohérence du système juridique
de protection du droit de manifester au regard de l'esprit libéral
imprimé par la nouvelle Constitution promulguée le 18
février 2006.
* 47 YATALA SOMWE, La
liberté de manifestation et le régime d'information dans la
constitution congolaise, Consulté sur
www.droitcongolais.info,
Cité par ODIKO LOKANGAKA (C.), Mémoire de DES, Faculté de
droit, Université de Kinshasa, 2014, p. 6.
* 48 LUNGUNGU KIDIMBA (Tr.),
L'exercice de la liberté de manifestation en République
Démocratique du Congo, Mémoire de spécialisation en
droits de l'Homme, CRIDHAC-UNIKIN, 2012, p. 25.
* 49 La pénalisation
ici doit être comprise comme étant un mécanisme de
renforcement des sanctions, consistant, à l'adoption de sanctions plus
fortes et dissuasives comme la révocation ou la déchéance
d'une autorité pour entrave à la liberté de
manifestation.
* 50 DENQUIN (J.-M.),
Des droits fondamentaux à l'obsession sécuritaire...remarques
conclusives, inJus Politicum, Mutation ou crépuscule des
libertés publiques ? Revue de droit politique, Volume III, Paris,
Dalloz, pp. 95-100.
* 51 NGONDANKOY
NKOY-ea-LOONGYA (P.-G.), La liberté de manifestation à
l'épreuve des faits, Op. cit., p. 1.
* 52 FAVRE (P.),
Op. cit., p. 195.
* 53DUFFY-MEUNIER et PERROUD
(Th.), Op. cit., p. 1.
* 54 IZORCHE (M.-L.), «
Propositions méthodologiques pour la comparaison »,
R.I.D.C., 2001, pp. 291-292. Dans un sens similaire, Marie-Claire
Ponthoreau précise que « ce sont les objectifs qui
déterminent ''l'espace de pertinence'' de la comparaison »
(op. cit., p. 19).
* 55DUFFY-MEUNIER et PERROUD
(Th.), Op. cit., p. 1.
* 56idem
* 57 Lire l'article 21 de la
Constitution espagnole 1978. En ligne sur :
https:/www.congreso.es.cons.
* 58 PAMATCHIN SORO
(S.-Gh.), L'exigence de conciliation de la liberté d'opinion avec
l'ordre public sécuritaire en Afrique subsaharienne francophone
(Bénin-Côte d'Ivoire-Sénégal) à la
lumière des grandes démocraties contemporaines
(Allemagne-France), Droit, Université de Bordeaux, 2016, p. 44.
* 59RIVERO (J.) et MOUTOUH
(H.), Libertés publiques, tome I, 9e édition
mise à jour, PUF, 2003, p. 21.
* 60Idem.
* 61 NGONDANKOY
NKOY-ea-LOONGYA (P.-G.), Droit congolais des droits de l'homme,
Bruxelles, Academia Bruylant, 2004, p. 97.
* 62 COMBACAU (J.) et Alii,
Droit international public. Thèmes/Exercices corrigés,
1ère édition, Paris, PUF, 1998, p. 374.
* 63KAMUKUNY MUKINAY (A.),
Contribution à l'étude de la fraude en droit constitutionnel
congolais, Thèse de doctorat en Droit Public, Faculté de
Droit, Université de Kinshasa, 2009, p. 34.
* 64 BURDEAU (G.), Droit
constitutionnel et institutions politiques, Paris, LGDJ, 1999, p. 6.
* 65 ODIMULA LOFUNGUSO (L.),
La justice constitutionnelle à l'épreuve de la juridicisation
de la vie politique en droit positif congolais, Op. cit., p. 24.
* 66 CASSIN (R.),
« Droits de l'homme et méthode comparative »,
R.I.D.C., 1968, p. 453. Dans un sens similaire, MARTY (G.), Droits
de l'homme et droit comparé, in René Cassin Amicorum
Discipulorumque liber, tome IV, Pédone, Paris, 1972, p. 270.
* 67 DELPEREE, (F.), Le
droit constitutionnel de la Belgique, Bruxelles, Paris, Bruylant, LGDJ,
2000, p. 40.
* 68 CASSIN (R.), «
Droits de l'homme et méthode comparative », Op. cit., p.
453. Dans un sens similaire, Étienne Picard écrit : « le
droit comparé permet de mieux comprendre non pas seulement les autres
droits, mais bien son propre droit, et même le droit en
général », « L'état du droit comparé
en France, en 1999 », in BLANC-JOUVAN (X.) et alii, L'avenir
du droit comparé. Un défi pour les juristes du nouveau
millénaire, Société de législation
comparée, Paris, 2000, p. 161.
* 69SAIN SAULIEU (G.), Op.
cit., p. 50.
* 70 NGONDANKOY
NKOY-ea-LOONGYA (P.-G.), « La liberté de manifestation en
droit positif congolais, Communication faite lors de la Journée de
sensibilisation des acteurs politiques (Majorité -
opposition », Organisée par la Commission Nationale
des Droits de l'Homme, Kinshasa, décembre 2016, p. 4.
* 71 TERCINET (M.-R.),
« La liberté de manifestation en France »,in
RDP, 1979, p. 1009.
* 72 MPONGO BOKAKO
BAUTOLINGA (E.), Institutions politiques et droit constitutionnel, ,
Théorie générale des institutions politiques de l'Etat,
Tome I, Kinshasa, EUA, 2001, p. 23.
* 73CORNU (G.),
Vocabulaire juridique, 12ème édition, Paris,
PUF, 2018.
* 74 FAVOUREU (L.) et alii,
Droit constitutionnel, 15e édition, Paris, Dalloz,
2013, p. 5.
* 75 Article 4 de la
Déclaration française des droits de l'Homme et du citoyen de
1789, disponible sur
https://www.conseil-constitutionnel.fr/le-bloc-de-constitutionnalite/declaration-des-droits-de-l-homme-et-du-citoyen-de-1789,
consulté le 26 mars 2019 à 12 heures 04'.
* 76 OMEONGA TONGOMO (B.),
Manuel de droit des libertés fondamentales, Kinshasa, L'Eduque,
2018, p. 6.
* 77 NIRMAL NIVERT,
Intérêt général et droits fondamentaux,
Thèse, Faculté de Droit, Université de la Réunion,
2012, p. 10, Inédit.
* 78 Voir la
Déclaration du 8 septembre 2000 des Chefs d'État et de
gouvernement adoptée par une résolution de l'Assemblée
générale des Nations Unies, 13 septembre 2000,
résolution n° A/RES/55/2, texte disponible sur le site de
l'ONU, http://www.un.org, p. 2, I-§ 6.
* 79 Voir POIROT-MAZERES
(I.), Toute entreprise d'immortalité est contraire à
l'ordre public ou comment le juge administratif appréhende... la
cryogénisation, Droit administratif, juillet 2006, pp.
6-12, spéc. p. 8.
* 80 AGULHON (M.), La
conquête de la liberté, Pouvoirs, 1998/1, n°
84, p. 5-13, spéc. p. 6.
* 81 Préambule de la
Constitution du 18 février 2006 de la République
Démocratique du Congo telle que révisée par la loi du 20
janvier 2011, in JORDC, numéro spécial, 18
février 2006.
* 82 WASCHSMANN (P.),
Op. cit., p. 2.
* 83Idem, p. 1.
* 84WASCHSMANN (P.), Op.
cit., p. 5.
* 85Ibidem.
* 86 MORIN (J.-Y.),
Libertés et Droits fondamentaux dans les constitutions des
États ayant le Français en partage, Bruxelles, Bruylant
/AUF., 1999, p. 11.
* 87En ce sens, lireLe
nouveau Petit Robert de la langue française, Paris, Dictionnaires
Le Robert - SEJER, 2009, p. 1452.
* 88 RICOEUR (P.),
Liberté, préc., pp. 979-980. ;. Le nouveau Petit
Robert de la langue française, Op. cit., p. 1452).
* 89 SAINT-JAMES (V.),
La conciliation des droits de l'homme et des libertés en droit public
français, Paris - Limoges, PUF, Coll. Publications de la
Faculté de Droit et des Sciences Économiques de
l'Université de Limoges, 1995, p. 5.
* 90Lire le nouveau
Petit Robert de la langue française, op. cit., p. 1452.
* 91Lire le nouveau
Petit Robert de la langue française, op. cit., p. 1452.
* 92Idem
* 93 En ce sens, cet
éclairage de RICOEUR (P.), Liberté, Op. cit, p.
980 « moins contraint » ».
* 94 NGONDANKOY
NKOY-ea-LOONGYA (P.-G.), La liberté de manifestation en droit
positif congolais, Op. cit., p. 3.
* 95 LAUPIES (F.), La
liberté, Paris, PUF Coll. Que sais-je ?, 2004, p. 5.
* 96 Idem, p. 6.
* 97 SEGUR (P.), La
dimension historique des libertés et droits fondamentaux, in
CABRILLAC (R.), FRISON-ROCHE (M.-A.), REVET (T.), (dir.), Libertés
et droits fondamentaux, Paris, Dalloz, 11ème éd.,
2005, pp. 7-26, spéc. p. 7. Quant à l'émergence des droits
de l'homme dans l'espace social, MOURGEON (J.), Les droits de l'homme,
Op. cit., pp. 21-29.
* 98Idem.
* 99 LE GUYADER (A.),
La question philosophique d'un noyau dur des droits de
l'Homme, in MAUGENEST (D.), POUGOUE (P.-G.), (dir.), Droits de
l'Homme en Afrique centrale, Op. cit., pp. 249-265, spéc.
p. 259.
* 100 RIVERO (J.), MOUTOUH
(H.), Libertés publiques, t. 1, Paris, PUF, Coll.
Thémis, 9ème éd., 2003, pp. 5-6.
* 101 RICOEUR (P.),
Liberté, Op. cit., p. 979.
* 102 ROUSSEAU (J.-J.),
Du contrat social,Op. cit., p. 69.
* 103 ZOLLER
(É.), Introduction au droit public, Op. cit., p. 2.
* 104 TRUCHET (D.),
Les fonctions de la notion d'intérêt
général dans la jurisprudence du Conseil
d'État, Paris, L.G.D.J., 1977, p. 176.
* 105 ZOLLER (É.),
Op. cit., p. 11.
* 106Idem.
* 107ZOLLER (É.),
Op. cit., p. 11.
* 108. LESCUYER (G.),
Histoire des idées politiques, Coll. Précis,
14ème éd.,Paris, Dalloz, 2001, p. 121.
* 109 TRUCHET (D.), Le
droit public, Paris, PUF, Coll. Que sais-je ?, 2003, p. 72.
* 110 KANT (E),
Doctrine du droit, Op. cit., in Métaphysique des moeurs, t.
II, RENAUT (A.), Paris, GF-Flammarion, 1994, p. 25-27.
* 111KANT (E.), Op.
cit., pp. 25-26.
* 112Idem, p.
26.
* 113 Ibidem, pp.
26-27.
* 114BLIBARD, Une
philosophie des droits du citoyen est-elle possible ? Réflexions sur
l'Égaliberté, RUDH 2004, p. 2-6, évoqué
par SERMET (L.), Une anthropologie juridique des Droits de l'homme.
Les chemins de l'océan Indien, Op. cit., p. 198. Voir
également, KELSEN (H.), La démocratie : sa nature, sa
valeur, traduction EISENMANN (Ch.), Paris, Sirey, 1932, p. 2.
* 115 LOCKE (J.),
Traité du gouvernement civil, traduction MAZEL (D.),
présentation GOYARD-FABRE (S.), Paris, GF-Flammarion, 1992, p. 154
§ 15 (paru pour la première fois en 1690).
* 116 LOCKE (J.),
Traité du gouvernement civil, Op. cit., p. 143. SUDRE (F.),
Droit européen et international des Droits de l'Homme, Paris,
PUF, Coll. Droit fondamental, 9ème éd., 2008, p.
269.
* 117 VONHUMBOLDT (W.),
Essai sur les limites de l'action de l'État, Traduction
CHRETIEN (H.), HORN (K.), préface de LAURENT (A.) et HORN (K.), Paris,
Les Belles Lettres, Coll. Bibliothèque classique de la liberté,
2004, p. 165.
* 118 FRAISSE (R.), Le
Conseil constitutionnel exerce un contrôle conditionné,
diversifié et modulé de la proportionnalité, in
Les figures du contrôle de proportionnalité en droit
français, Actes du Colloque de la Faculté de Droit et
d'Économie de la Réunion, 4 et 5 juin 2007, LPA n°
spécial du 5 mars 2009, pp. 74-85, spéc. p. 75.
* 119 FRAISSE (R.),
Op. cit, p. 75.
* 120 SABETE (W.),
Limitations aux droits, in ANDRIANT SIMBA ZOVINA (J.) et alii, (dir.),
Dictionnaire des Droits de l'Homme,op. cit., pp. 656-662,
spéc. p. 656. Dans le même ordre d'idées, RAWLS
(J.), Théorie de la justice, op. cit., p. 251.
C. BECCARIA, Des délits et des peines, traduction CHEVALLIER
(M.), présentation ROCHEFORT (D.), Paris, Le Monde- Flammarion, coll.
« Les livres qui ont changé le monde », n° 22, 2010, p.
54.
* 121 Articles 2 al.1
Décret n° 196 du 29 janvier 1999 portant règlement des
manifestations et des réunions publiques, in JORDC,
40e année, numéro spécial, février
1999.
* 122 Lire l'article 2 al.
2 du Décret n° 196 du 29 janvier 1999 portant règlement des
manifestations et des réunions publiques, in JORDC,
40e année, numéro spécial, février
1999.
* 123 YATALA, La
liberté de manifestation et le régime d'information dans la
constitution congolaise, cité par ODIKO (C.), Op. cit.,
56.
* 124Cour Constitutionnelle
de la République du Congo, 18 janv.1995, no 94-352 DC, Loi d'orientation
et de programmation relative à la sécurité, cons. n°
16.
* 125 TERCINET (M.-R.),
La liberté de manifestation en France,in RDP, 1979, p.
1009.
* 126 La faillite des
états et le décalage de plus en plus criant entre la
volonté du peuple et la conduite des élus ne peuvent que mettre
en cause la démocratie directe et faire réfléchir pour un
retour à la démocratie directe. Si hier c'était l'Agora
aujourd'hui c'est dans la rue.
* 127 FORGET (P.),
Analyse des limites juridiques à la liberté de manifester
pacifiquement au Canada, thèse de doctorat,
Université McGill, Montréal, 2003.
* 128 Acteurs sociaux et
politiques parmi lesquels on compte les manifestants, l'élite politique
et économique visée par la manifestation et les observateurs (les
journalistes et les sociologues)
* 129 FRAISSE (R.), Op.
cit., p. 142.
* 130FORGET (P.), Op.
cit., p. 67.
* 131Idem.
* 132 FRAISSE (R.), Op.
cit., p. 146.
* 133 Le teach in
est plus ou moins synonyme d'éducation populaire. Il s'accomplit
souvent de manière informelle durant la manifestation. Par exemple,
lorsqu'une personnalité de la manifestation, prend un micro ou un
haut-parleur et informe les gens sur l'enjeu et la cause de la
manifestation.
* 134 FRAISSE (R.),
Op. cit., p. 90.
* 135Idem,p. 142.
* 136 Aces propos,lire la
proposition de loi en instance de promulgation à la présidence de
la République de la RDC depuis plus d'une année en violation
flagrante de la Constitution.
* 137Aces propos,lire la
proposition de loi en instance de promulgation à la présidence de
la République de la RDC depuis plus d'une année en violation
flagrante de la Constitution.
* 138 BABINEAU (G.), La
manifestation une forme d'expression collective », in Les
cahiers de droit, volume 53, numéro 4, décembre 2012, pp.
761-792.
* 139BABINEAU (G.), Op.
cit, pp. 761-792.
* 140 TERCINET (M.-R.),
La liberté de manifestation en France, in RDP, 1979,
p. 1009; STIRN (B.), Les libertés en question, Paris,
Montchrestien, 6ème édition, 2006, p. 37.
* 141 Cités par
BABINEAU (G.), La manifestation : une forme d'expression
collective, Op. cit., p. 82.
* 142 En tout cas le sens
qu'accordent bon nombre d'auteurs sur la question. Le sens renforcé par
l'article 26 de la Constitution congolaise et l'article 12, alinéa 1 et
2 de la proposition de loi fixant les mesures d'application de la
liberté de manifestation.
* 143 FAVRE (P.), La
manifestation entre droit et politique, cité par ODIKO LOKANGAKA
(C.), Op. cit. p. 254.
* 144Idem.
* 145 Lire également
BIOY (X.), Droit fondamentaux et libertés publiques, Paris,
Montchrestien, 2011, p. 695.
* 146 Article 142 code
pénal congolais de 1940.
* 147148PAUVERT (B.),
Libertés publiques et droits fondamentaux,
5ème édition, Paris, Studyrama, p. 312.
* 149 PAUVERT (B.), Op.
cit., p. 312.
* 150En France, lorsqu'il
s'agit une manifestation réalisée sans être
déclarée ou en dépit d'une interdiction. Les dispositions
de l'article 431-9 et s. du Code pénal s'appliquent alors, organisateurs
et participants pouvant faire l'objet de sévères sanctions.
* 151 Article L.211-10 du
Code français de Sécurité intérieure.
* 152 Lire à ce titre,
le Dictionnaire français, www.cnrtl.fr.
* 153 MORANGE (J.),
Droits de l'homme et libertés publiques, 5ème
édition, Paris, PUF, 2000, n° 165, p. 244.
* 154 OBERDORFF (H.),
Les libertés de réunion, de manifestation et
d'association, in La protection de libertés et droits
fondamentaux, Notre Librairie, Paris, 2011, pp. 339-349.
* 155Idem.
* 156CEDH, 26 avril 2016,
Novikova and others v. Russia, req. n°25501/07, 80153/12 et
25015/13 ; M-T. VIEL, «La délicate frontière entre
manifestation collective et libre expression individuelle», Journal
d'actualité du droit européen, juin 2016.
* 157 OBERDORFF (H.),
Op. cit, p. 234.
* 158 Lire YATALA, Op.
cit. 78.
* 159 NGONDANKOY
NKOY-ea-LOONGYA (P.-G.), Op. cit., pp. 235-236.
* 160SUDRE (F.), Droit
européen et international des droits de l'homme, Paris, PUF, 2015,
p. 808.
* 161Rapport conjoint du
Rapporteur spécial sur le droit de réunion pacifique et la
liberté d'association et du Rapporteur spécial sur les
exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires concernant la
bonne gestion des rassemblements, 31e session du Conseil des droits de l'Homme,
2 février 2016, A/HCR/31/66, § 10.
* 162Rapport conjoint du
Rapporteur spécial sur le droit de réunion pacifique et la
liberté d'association et du Rapporteur spécial sur les
exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires concernant la
bonne gestion des rassemblements, 31e session du Conseil des droits
de l'Homme, 2 février 2016, A/HCR/31/66,Op. cit. § 5.
* 163 Souvent cette
communauté prend la forme de l'association civile appelée
syndicat.
* 164Idem, pp.
171-182.
* 165Souvent cette
communauté prend la forme de l'association civile appelée
syndicat.
* 166KAMUKUNY MUKINAY (A.),
Droit constitutionnel congolais, Kinshasa, EUA, 2010, NGONDANKOY
NKOY-ea-LOONGYA (P.-G.), Libertés publiques. Notes de cours à
l'intention des apprenants en D.E.S., Année académique
2017-2019, p. 30.
* 167 CAPITANT (D.),
Les effets juridiques des droits fondamentaux en Allemagne, LGDJ,
Coll. BSCP, Tome 87, 2001, p.3.
* 168LE BOT (O.), La
protection des libertés fondamentales par la procédure du
référé-liberté, Op. cit., p. 171.
* 169 Lire l'article 2 de la
Loi portant principes fondamentaux relatifs à l'organisation et à
la promotion des activités physiques et sportives.
* 170LE BOT (O.), La
protection des libertés fondamentales par la procédure du
référé-liberté, Op. cit., p. 176.
* 171 BACHELIER (G.),
Le référé-liberté, RFDA, 2002, p.
263.
* 172Idem
* 173Ibidem
* 174 DE SILVA (I.), concl.
sur CE, Sect., 30 octobre 2001, Ministre de l'Intérieur c/Tliba,
RFDA, 2002, p. 329.
* 175 ALEXY (R.), A
theory of constitutional rights (traduit de l'allemand par RIVERS (J.),
Oxford University, Press, 2003, p.349.
* 176 VEDEL (G.),
« Les bases constitutionnelles du droit administratif »,
EDCE, 1954, p. 21.
* 177 GENEVOIS (B.), La
jurisprudence du Conseil constitutionnel. Principes directeurs, STH, 1988,
p. 189.
* 178FAVOREU (L.),
Droit et loi. Brèves réflexions d'un
constitutionnaliste, in La philosophie à l'épreuve du
phénomène juridique. Droit et loi, Colloque du 22 au 23 mai
1995, PUAM, 1987, p.13).
* 179FAVOREU (L.), Op.
cit., p.13.
* 180 KELSEN (H.),
Théorie pure du droit, Op. cit., p.99.
* 181Idem,
p.224.
* 182 STARCK (C.), La
constitution cadre et mesure du droit, Paris, Economica, 1994, p.
104.
* 183ZEGREBELSKY (M.), Le
droit en douceur (traduit de l'italien par LEROY (M.), PUAM, 2000, p.111). En
cela, La constitution est le consensus de base d'un peuple sur sa
façon de vivre, (KARPEN (U.), L'État de droit, in
La Constitution de la République Fédérale d'Allemagne.
Essai sur les droits fondamentaux et les principes de la loi fondamentale avec
une traduction de la fondamentale (KARPEN (U.), Nomos
Verslagsgesellschaft, 1996.
* 184Idem
* 185MATHIEU (B.) et
VERPEAUX (M.), Contentieux constitutionnel des droits fondamentaux,
Paris, LGDJ, 2002, p.19). Comme le relève DE BECHILLON (M.),
L'expression constitutionnelle d'une règle, quelle qu'en soit la
nature, exprime, par ceci même qu'elle se veut constitutionnelle, une
valeur fondatrice pour la société toute entière, (DE
BECHILLON (M.), Hiérarchie des normes et hiérarchie des
fonctions normatives de l'Etat, Economica PUAM, Coll. DPP, 1996, p.241.).
Dans tous les pays, « La norme fondamentale a pour rôle
primordial d'établir et de fonder un consensus politique
général, singulièrement dans le domaine des droits
fondamentaux et des libertés publiques » (BON
(P.), Les droits et libertés en Espagne. Eléments pour
une théorie générale, in Dix ans de
démocratie constitutionnelle en Espagne, éditions du CNRS,
1991, p.40). Elle est la « charte de l'organisation de l'Etat et des
valeurs fondamentales ».
* 186 GUASTINI (R.),
« Réflexion sur les garanties des droits constitutionnels et
la théorie de l'interprétation », RDP, 1991,
p.1080.
* 187 ALEXY (R.),
Idée et structure d'un système de droit rationnel, APD,
tome 33, La philosophie du droit aujourd'hui, 1988, p.32.
* 188 HEGEL,
déjà, affirmait que « Par Constitution, on doit
entendre les libertés, en général et l'organisation et la
réalisation de ces libertés » (HEGEL (G.W.F.),
Encyclopédie des sciences philosophiques, §540,
cité par SERIAUX (A.) et alii, Droits et libertés
fondamentaux, Paris, Ellipses, 1998, p.7). Comme l'a observé ARDANT
(M.), Les premiers textes à valeur constitutionnelle de
l'époque moderne, les textes anglais du XIIIème au
XVIIIème siècle : Grande Charte de 1215, Pétition des
droits de 1628, HABEAS Corpus de 1679, Bill of Rights de 1689, se
préoccupent moins des institutions que de la liberté sous
différentes formes et des procédures destinées à la
protéger. Quand, à la fin XVIIIème, les Américains
et les Français décident de mettre par écrit un ensemble
de règles concernant l'organisation et le fonctionnement du pouvoir, ils
inscrivent tout naturellement en tête de ces constitutions des
Déclarations des droits, plaçant par là en quelque sorte
l'ensemble du texte sous le signe des libertés. » ARDANT (P.),
« Les constitutions et les libertés »,
Pouvoirs, n° 84, 1998, p. 61).
* 189 Dictionnaire
Larousse Maxipoche, France, Éditions Larouse, 2011.
* 190 Dictionnaire
Maxipoche 2011, Edition Larousse, 2011, p. 1123.
* 191MALAURIE (P.), Les
contrats contraires à l'ordre public. Etude de droit civil
comparé : France, Angleterre, URSS, Reims, Éditions
Matot-Braine, 1953, p.19.
* 192 GUINCHARD (S.) et
DEBARD (T.) (Dir), Lexique des termes juridiques, Paris,
Dalloz, 2019-2020,p. 843.
* 193Idem, p.
507.
* 194 DEUMIER (P.) et REVET
(T.), L'ordre public, in ALLAND (D.) et RIALS (S.) (dir),
Dictionnaire de la culture juridique, Paris, Lamy-PUF, Quadrige, 2003,
pp.1119-1112, spéc. p.1119.
* 195Idem.
* 196 PLANTEY (A.),
Définition et principes de l'ordre public, Op. cit.,
spéc. p.27.
* 197 LECOMTE (C.),
L'intendant : sentinelle de l'ordre public (XVIIe
-XVIIIe, in DUBREUIL (C.A.) (dir)., L'ordre
public, Éditions Cujas, Coll. Actes et études, Paris, 2013,
pp.33-40, spéc, p.34.
* 198 DE TOCQUEVILLE (A.),
L'Ancien Régime et la Révolution, 1856, Paris,
rééd. Gallimard, 1967, pp.85 et s.
* 199 EWALD (F.) (dir),
Naissance du Code civil. La raison du législateur. Travaux
préparatoires du Code civil rassemblés par FENET (P.-A.),
Paris, Flammarion, 1989, p.9.
* 200 En vertu de l'article
10 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme du 10
décembre 1948, il est precisé que « Nul ne doit
être inquiété pour ses opinions, même religieuses,
pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par
la loi ».
* 201 L'article 6 du Code
civil français dispose qu' « on ne peut déroger,
par des conventions particulières, aux lois qui intéressent
l'ordre public et les bonnes moeurs ».
* 202 PICARD (E.),
Introduction générale : La fonction de l'ordre public
dans l'ordre juridique, in REDOR (M.-J.) (dir.), L'ordre public :
ordre public ou ordres publics ? Ordre public et droits fondamentaux,
Bruylant, Coll. Droit et justice, Bruxelles, 2001, pp. 17-61, spéc.
p.32.
* 203 Le droit positif
témoigne de la présence de la notion d'ordre public dans l'ordre
juridique dans l'ensemble des disciplines juridiques. Voir : REVET
(T.) (dir.), L'ordre public à la fin du XXème
siècle, Dalloz, Paris, 1996.
* 204 REDOR (M.-J.) (dir.),
L'ordre public : ordre public ou ordres publics ? Ordre public et
droits fondamentaux, Bruxelles, Bruylant, Coll. Droit et justice, 2013.
* 205 PICARD (E.),
Introduction générale : La fonction de l'ordre public
dans l'ordre juridique, Op. cit., p.36.
* 206 WACHSMANN (P.),
Libertés publiques, 4e édition, Paris,
Dalloz, p. 56.
* 207Idem.
* 208 Ibidem.
* 209Arrêt de la
section du C.E. (France), Affaire Société « Les films
Lutétia » du 18 décembre 1959.
* 210C.E. (France),
Assemblée, 27 octobre 1995, Commune de Morsang-sur-Orge, requête
n° 136727.
* 211 MENY (Y.) et DUHAMEL
(O.), Dictionnaire constitutionnel, Paris, PUF, 1992, p.683.
* 212 LEBRETON (G.),
« Ordre public », in SUDRE (F.) et alii (dir),
Dictionnaire des Droits de l'Homme, PUF, Paris,Quadrige, 2008,
pp.717-719.
* 213 MALAURIE (P.),
L'ordre public est un dans sa définition ; il est multiple dans
ses applications, these de doctorat, Ecole doctorale Droit de la Sorbonne,
Paris, 2015, p.189.
* 214 BERNARD (P.), La
notion d'ordre public en droit administratif, Op. cit.,
spéc., p.281.
* 215 RIVERO (J.),
Droit administratif, Paris, Dalloz, Coll. Précis, 1960, p.
78.
* 216 MENY (Y.) et DUHAMEL
(O.), Dictionnaire constitutionnel,Op. cit., spéc.
p.683.
* 217 COMBACAU (J.),
Conclusions générales, Op. cit., spéc.,
p.422.
* 218 CORNU (G.),
Vocabulaire juridique, Paris, Presses Universitaires de France, 2020,
p.714.
* 219 COMBACAU (J.),
Op. cit. p. 423.
* 220 BERNARD (P.), La
notion d'ordre public en droit administratif, op. cit., p. 76.
* 221Idem.
* 222 PETIT (J.), La
police administrative, in GONOD (P.) et alii, Traité de droit
administratif, Paris Dalloz, 2011, tome 2, pp. 5-44, spéc.
pp.9-10.
* 223 Article 97 de la loi
du 5 avril 1884 sur l'organisation municipale, in DUVERGIER (J.-B.), Collection
complète des lois, décrets, ordonnances, règlements et
avis du Conseil d'Etat à partir de 788.
* 224 Article 97 de la loi
du 5 avril 1884 sur l'organisation municipale, in DUVERGIER (J.-B.),
Collection complète des lois, décrets, ordonnances,
règlements et avis du Conseil d'Etat à partir de 1788, tome
84, Éditions Guyot et Scribe, Paris, 1884, pp.99-148.
* 225 BERNARD (P.), La
notion d'ordre public en droit administratif, op. cit., pp. 146-147.
* 226 Ainsi, Conseil d'Etat
dénie la qualité de mesures de police à des
décisions prises dans l'intérêt général et
non pas en vue du maintien de l'ordre public.
* 227 LINOTTE (D.),
Recherches sur la notion d'intérêt général en
droit administratif français, thèse dactylographiée,
Université de Bordeaux I, 1975, spéc. pp.164-165.
* 228 ROLAND (S.),
L'ordre public et l'Etat. Brèves réflexions sur la nature
duale de l'ordre public, in C.-A., DUBREUIL (dir), « L'ordre
public », Paris, Éditions Cujas, Coll. Actes et études,
, 2013, pp. 9-20.
* 229 COMBACAU (J.),
op. cit., p. 430.
* 230 DARSONVILLE (A.),
Ordre public et droit pénal, in C.-A. DUBREUIL (dir),
L'ordre public, Éditions Cujas, Coll. Actes et études,
Paris, 2013, pp. 287-296.
* 231 DREYER (E.),
Droit pénal général, Paris, Lexis Nexis, Coll.
Manuel, 2ème Edition, 2012, p.1.
* 232 PICARD (E.),
Introduction générale : La fonction de l'ordre public
dans l'ordre juridique, Op. cit., p.48.
* 233 DEUMIER (P.) et REVET
(T.), L'ordre public, Op. cit., pp.1119-1120.
* 234 PICARD (E.), Op.
cit., p.1165.
* 235 FRIER (P.-L.) et
PETIT (J.), Droit administratif, Paris,Montchrestien, Domat droit
public, 7ème édition, 2012, p.285.
* 236 PETIT (J.), La
police administrative, Op. cit., p.10.
* 237 PICARD (E.),
Introduction générale : La fonction de l'ordre public
dans l'ordre juridique, Op. cit., pp. 641-656.
* 238 RIVERO (J.) et
MOUTOUH (H.), Libertés publiques, Op. cit., p.164.
* 239 Selon le Commissaire
du gouvernement Corneille, « La liberté est la règle et
la restriction de police l'exception ». Voir : Concl. Corneille
sur CE, 10 août 1917.
* 240 SUDRE (E.), Droit
européen et international des droits de l'homme, Paris, PUF, Coll.
Droit fondamental, Paris, 11ème ; 2002, pp.218-241.
* 241 HAQUET (A.),
Droit pénal constitutionnel ou droit constitutionnel
pénal ?, in Constitution et pouvoirs. Mélanges en
l'honneur de Jean Gicquel, Paris, Montchrestien, Lextenson
éditions, 2008, pp.237-243.
* 242 PICARD (E.), La
notion de police administrative, Op. cit., p.543.
* 243 Voir notamment :
Décision n°85-187 DC du 25 janvier 1985, Loi relative à
l'état d'urgence en Nouvelle-Calédonie et
dépendances, Rec. p. 43.
* 244 PICARD (E.),
Introduction générale : La fonction de l'ordre public
dans l'ordre juridique, Op. cit., p.60.
* 245 MALAURIE (P.),
Rapport de synthèse, in REVET (T.), L'ordre public à
la fin du XXème siècle, Paris,Dalloz, 1996, pp.105-111.
* 246 JACQUINOT (N.),
Ordre public et constitution, thèse dactylographie,
Université d'Aix-Marseille III, 2000, p.68.
* 247BERNARD (P.), La
notion d'ordre public en droit administratif, Op. cit., p. 76
* 248HAURIOU (M.),
Précis de droit administratif et de droit public, 9e
éd., Paris, Sirey, pp. 549 et 550.
* 249Idem, p.
556.
* 250 VELLUT (J.-L.) (dir),
La mémoire du Congo. Le temps colonial, Musée royal
de l'Afrique centrale, 2005, p. 6.
* 251Idem, p. 8.
* 252 VELLUT (J.-L.) (dir),
Op. cit, p. 98.
* 253 Certains auteurs
indiquent qu'il s'agit en l'espèce de l'éclipse de l'Etat
congolais, qui réapparaîtra en 1960, lors de l'accession du pays
à la souveraineté internationale. Il en est ainsi du professeur
VUNDUAWE TE PEMAKO.
* 254Allocution de M.
Nicolas Sarkozy, Président de la République française,
prononcée à l'Université de Dakar le 27 juillet 2007, p.
8.
* 255 Idem, p.
8.
* 256 BRUNSCHWIG (H.),
L'Avènement de l'Afrique noire, Paris, Armand Colin, 1963.
* 257 Idem, pp.
212 et 177
* 258 LISMOND-MERTES (A.),
La Belgique face à son passé colonial, in
Ensemble ! Pour la solidarité, contre l'exclusion,
Trimestriel - n° 91 juin - juillet - août 2016, pp. 6-8.
* 259La Déclaration
universelle des Droits de l'Homme, adoptée par les États en 1948
en plein coeur de la colonisation, prend le contrepied de ce
phénomène aux pratiques liberticides atroces.
* 260 Art. 5 de la
Constitution belge de 1831.
* 261 Art. 7 de la
Constitution belge de 1831.
* 262 Art. 8 de la
Constitution belge de 1831.
* 263 Art. 9 de la
Constitution belge de 1831.
* 264 Art. 10 de la
Constitution belge de 1831.
* 265 Art. 11 de la
Constitution belge de 1831.
* 266 Art. 12 de la
Constitution belge de 1831.
* 267 Art. 13 de la
Constitution belge de 1831.
* 268 Art. 14 de la
Constitution belge de 1831.
* 269 Art. 5,
alinéas 2 et 3 de la Charte coloniale belge du 18 octobre 1908.
* 270 RAYMOND BETTS (F.),
Op. cit, p. 355.
* 271Idem.
* 272 HALEWYCK (M.), La
Charte coloniale .Commentaire de la loi du 18 octobre 1908 sur le
Gouvernement du Congo belge, Tome 1, M.WEISSENBRUCH, Imprimerie du Roi,
Bruxelles, 1910, p. 66.
* 273 HALEWYCK (M.), La
Charte coloniale .Commentaire de la loi du 18 octobre 1908 sur le
Gouvernement du Congo belge, Tome 1, M.WEISSENBRUCH, Imprimerie du Roi,
Bruxelles, 1910, p. 67.
* 274 Art. 2, alinéa
3 de la Charte colonial Op. cit.
* 275 Gérald Attali,
dans son Enseignement de fait colonial, l'affirme sans ambages :
« Que celle-ci [la colonisation] ait été la domination d'un
peuple par un autre, avec une pratique marquée par le racisme,
l'arbitraire, la violence nue, personne ne saurait le
nier ».
* 276 CURTIN (P.) et alii,
Africanhistory, Londres, Longman, 1978, p. 484.
* 277 BLANCHARD (P.),
Discours, politique et propagande. L'AOF et les Africains au temps de la
Révolution nationale (1940-1944), in BECKER (Ch.), SALIOU MBAYE et
IBRAHIMA THIOUB (dir), AOF : réalités et
héritages. Sociétés ouest-africaines et ordre colonial,
1895 - 1960, Dakar, Presses de la sénégalaise, 1997, p.
329.
* 278 Gérald Attali,
dans son Enseignement de fait colonial, l'affirme sans ambages :
« Que celle-ci [la colonisation] ait été la domination d'un
peuple par un autre, avec une pratique marquée par le racisme,
l'arbitraire, la violence nue, personne ne saurait le
nier ».
* 279 LISMOND-MERTES (A.),
Op. cit, p. 15.
* 280 VELLUT (J.-L.),
Op. cit, p. 34.
* 281 Le droit naturel veut
que l'homme soit propriétaire. Mais, pour John Locke, il ne s'agit pas,
ou pas seulement, de la propriété mobilière ou
immobilière. Il s'agit de tout ce que l'homme a en propre, biens
matériels ou immatériels acquis ou valorisé par
lui-même en tant que propriétaire de son corps et de son esprit.
WEIL (E.), Le droit naturel aristotélicien et les droits de
l'homme, Laval théologique et philosophique, 43(1), 49-65,
considère de son côté que les droits de l'homme sont
ainsi l'expression de la nature de l'homme, être de besoins, mais aussi
de la nature de l'homme, être libre, d'une liberté en situation,
d'une liberté qui se rend visible dans l'histoire.
* 282 HALEWYCK DE HEUSCH
(M.), Les institutions politiques et administratives des pays
africains soumis à l'autorité de la Belgique, Bruxelles,
Office de publicité, 1938, p. 15, n° 29 ; VERSTRAETE (M.),
Aperçu de droit civil du Congo belge, Anvers, Éditions
Zaïre, 1947, p. 45.
* 283 MUKADI BONYI et alii,
Cinquante ans de législation post coloniale au
Congo-Zaïre : Quel bilan ?, Kinshasa, Éd. CRDS,
2010, p. 189.
* 284 L'Ordonnance loi
n° 25-505 du 5 octobre 1959 portant la réglementation des
manifestations, réunions ou rassemblements en plein air, p. 189.
* 285 Ordonnance loi
n° 25-505 du 5 octobre 1959 portant la réglementation des
manifestations, réunions ou rassemblements en plein air, Op.
cit.
* 286Idem.
* 287 VELLUT (J.-L.),
La mémoire du Congo. Le temps colonial, Op. cit., p. 11.
* 288Lire à ce sujet
l'article 14 de la Constitution belge de 1831.
* 289 HESSELBEIN (G.),
Essor et déclin de l'État congolais. Un récit
analytique de la construction de l'État, London, Crisis States
Research Centre, 2007, p. 19.
* 290 Idem.
* 291HESSELBEIN (G.),
Op. cit., p. 24.
* 292HESSELBEIN (G.),
Op. cit., p. 24.
* 293 VERHAEGEN (B.),
L'ABAKO et l'indépendance du Congo belge. 10 ans de nationalisme
kongo (1950 à 1960), Kinshasa, Éditions Zaïre,
1973,p. 315.
* 294 Lire à cet
effet, la déclaration du Ministre du Congo-belge et du Ruanda-Urundi au
sujet des incidents de Léopoldville (à la Chambre des
représentants le jeudi 8 janvier) », Chambre des
Représentants, Annales parlementaires, Séance du jeudi 8
janvier 1959, p. 2.
* 295Moniteur
congolais, 5e année, numéro spécial du
1er août 1964.
* 296Lire l'article 25 et
28 de la Constitution congolaise du 1er août 1964.
* 297 En ce sens, OMEONGA
TONGOMO (B.), Droit constitutionnel congolais, Op. cit, p. 26 ;
KAMUKUNY MUKINAY (A.), Droit constitutionnel congolais, Op. cit, p.
87.
* 298Se
référer à cet effet, à l'article 1er de
la Loi fondamentale du 17 juin 1960 relative aux libertés publiques.
* 299 Ayant
été prise dans le but de réprimer l'engagement des
congolais à manifester en faveur de l'indépendance en instituant
le régime d'autorisation préalable de l'autorité
administrative, cette ordonnance-législative est restée en
vigueur beaucoup d'années plus tard après l'indépendance
au service des régimes autoritaires de l'époque. Même la
Cour suprême de justice, gardienne de l'État de droit et de
l'ordre juridique ainsi que protectrice des droits du citoyen, saisie d'une
exception d'inconstitutionnalité de cette ordonnance-législative,
avait préféré, dans sa stratégie d'éviter
tout contrôle, rejeter l'exception arguant le risque de vide juridique
préjudiciable et inadmissible dans un État de droit,
résultant de l'abrogation tacite des actes juridiques, en l'occurrence
l'ordonnance- législative entreprise. Cfr., C.S.J., Section judiciaire,
jugement avant dire droit du 22 mars 1995, dit Arrêt BAVELA.
* 300 En ce sens lire,
OMEONGA TONGOMO (B.), Droit constitutionnel congolais, cours
destiné aux étudiants de 2e année de Graduat
des universités congolaises, 2015, p. 25.
* 301 BOSHAB MABUDJ (E.),
« Chronique de la destruction d'un Etat (24 avril 1990-24 avril
1995) », Le Potentiel, n° 613, pp. 6-7. Egalement
BOSHAB, (E.), La République Démocratique du Congo, entre les
colombes et les faucons. Où vont les partis politiques ?, Kinshasa,
PUK, 2001, p. 9.
* 302 Dans un contexte de
mystification du Guide, l'affluence à ces manifestations du
régime et l'engouement qu'elles provoquaient pouvaient trouver d'autres
des explications tantôt le charisme du Président plutôt que
dans l'enracinement d'une idéologie politique.
* 303 De VILLERS (G.) et
OMASOMBO (J.), Quand le peuple kinois envahit les Rues..., in TREFON
(Th.) (dir,), « Ordre et désordre à Kinshasa,
Réponses populaires à la faillite de l'Etat »,
Cahiers africains, n° 61-62, 2004, pp. 213-233.
* 304 Parmi les grands mots
du mobutisme, retenons : « Retroussons les
manches ! » Un seul pays ! Un seul peuple ! Un
seul chef. Ce slogan traduit le caractère personnel du pouvoir
instauré par Mobutu.
* 305 C'est lui qui produit
la masse et la maintient en vie par un ordre supérieur. Pourvu qu'il ait
réussi cela, ce qu'il lui demandera ensuite réellement n'a
guère d'importance.
* 228 Le
néo-constitutionnalisme se présente comme une théorie du
droit qui prendrait acte qui prendrait acte de ce que l'ordre contemporain a
connu de profonds bouleversements du fait de l'introduction te de la
généralisation de catalogues de droits dans les constitutions des
États modernes.
* 229 La présence de
ces catalogues, qui font implicitement ou explicitement référence
à des valeurs, conduit à penser le droit constitutionnel dans le
prolongement de ces valeurs.
* 306 SEBALD (W.-G.),
Système et critique systémique chez Elais Canetti, in
La description du malheur, Actes du sud, 2014, article disponible sur
blogs.mediapart.fr, consulté le 24 mars 2019 à 13 heures 56'.
* 230 MENDOZA (C.), La
Bolivie : les indiens et « l'Etat
plurinational », in Centre tricontinental, 2012,
disponible sur
www.cetri.be, consulté le 28
juin 2018.
* 231 Lire à ce
sujet LERNOUX (P.), « Cry of people. The Struggle for human rights in
Latin America - the Catholic Church in conflict with US policy,
Harmondsworth », Penguin Books, 1982 et LÖWY (M.),
« Marxisme et théorie de la libération », in
Cahiers d'étude et de recherche, Institut international de
recherché et de formation d'Amsterdam, 1988.
* 307 CHAPDELAINE (M.),
La fonction démocratique du mouvement zapatiste, du
soulèvement armé à l'autre, Mémoire de Master
2 en sociologie, Université du Québec à Montréal,
2010, p. 47.
* 308National democratic
Institute for International Affairs, Les leçons à tirer de la
Conférence nationale souveraine et ses implications pour le dialogue
intercongolais, NDI, p. 37.
* 309Laquelle est
consacrée sous le couvert de la liberté d'expression.
* 310Cela tient au fait que
la Constitution du 18 février 2006 par exemple, dans la
consécration des droits fondamentaux des citoyens, les consacre par
générations tout en conférant de l'autonomie à
certains qui, au départ étaient engloutis par d'autres.
* 311Journal officiel
de la République du Zaïre, 34e année,
n° spécial, avril 1994.
* 312Journal officiel
de la République du Zaïre, 35e année,
n° spécial, avril 1994.
* 313 Accord global et
inclusif sur la transition en république Démocratique du Congo,
Journal Officiel, n° spécial du 5avril 2003, pp. 51-69.
* 314Information disponible
sur
https://www.radiookapi.net/sans-categorie/2004/06/02/manifestation-d%25e2%2580%2599etudiants-au-quartier-general-de-la-monuc-4,
consulté le 06 avril 2019 à 15 heures 33'.
* 315 Conseil de
Sécurité des Nations Unies, Dix-huitième rapport du
Secrétaire général sur la Mission de l'Organisation des
Nations Unies en République Démocratique du Congo, 2 août
2005, p. 2.
* 232 OMEONGA TONGOMO (B.),
Droit constitutionnel congolais, Op. cit., p. 64.
* 233 MBATA BETUKUMESU
MANGU (A.), « Constitutions sans Constitutionnalisme,
Démocraties autoritaires et responsabilité sociale des
intellectuels en Afrique centrale : quelle voie vers la renaissance
africaine », Communication à l'occasion du 30e
anniversaire du CODESRIA, Douala, octobre 2003, p. 3.
* 234 MONSENGWO PASIGNA
(L.), La Transition politique en République Démocratique du
Congo : un casse-tête, in Renaître,bimensuel
chrétien d'informations et d'opinion, Ve Année,
n° 22 du 30 novembre 2005, pp. 20-23.
* 235 BOSHAB MABUDJ (E.),
République Démocratique du Congo : Entre les faucons et
les colombes où vont les partis politiques ?,Op. cit.
pp. 23-44.
* 236Lire le décret
du 17 août 1959 et l'Ordonnance n° 25/505 du 05 octobre 1959.
* 237 Cour
Constitutionnelle, 18 janvier 1995, n° 94-352 DC, Loi d'orientation et de
programmation relative à la sécurité, cons. n° 16.
* 238 Arrêt Conseil
d'État français no163/2006 du 22 mai 2006.
* 239 DUFFY-MEUNER (A.) et
PERROUD (Th.), Op. cit, p. 97.
* 240JORDC,
40e année, numéro spécial du Décret-loi
n° 196 du 29 janvier de1999.
* 316Lire les rapports
d'Amnesty International (AI), Démantèlement de a dissidence,
17/09/2016, in OFPRA, Les manifestations de l'opposition, DIDR, Mars 2017;
AMNESTY International, Ils sont traités comme des criminels. La RDC fait
taire des voix discordantes pendant la période
préélectorale, novembre 2016 ; Amnesty International, Lignes
directrices pour la mise en oeuvre des principes de base des Nations Unies sur
le recours à la force et l'utilisation des armes à feu par les
responsables de l'application des lois (2015) ; HUMAN RIGHTS WATCH, 2016,
Rapport mondial 2016 : République Démocratique du Congo, (octobre
2016).
* 317Amnesty International
(AI), Démantèlement de a dissidence, 17/09/2016, in OFPRA, Les
manifestations de l'opposition, DIDR, Mars 2017, p. 48.
* 318HUMAN RIGHTS WATCH,
RD Congo: Des manifestationsont fait l'objet d'une
répressionsanglante. Il faut mettre fin auxtirs illégaux et aux
arrestationsarbitraires, 24 janvier 2015, p. 5.
* 319Rappelons que
près de 400 partis politiques avaient été
enregistrés et que 18 864 candidats étaient en compétition
pour 500 sièges de députés à l'Assemblée
nationale, soit une augmentation de 94 % par rapport à 2006.
* 320La Zambie où
l'opposant Michael Sata a succédé à Rupiah Banda en
septembre 2011 est le seul exemple contraire dans la région.
* 321« Avec un Chef
sûr à 100 % ».
* 322 BCNUDH, Recours
illégal, injustifié et disproportionne à la force lors de
la gestion des manifestations publiques en République
Démocratique du Congo de janvier 2017 à janvier 2018,
version originale, 2018, p. 20.
* 323 AMNESTY
INTERNATIONAL, Ils sont traités comme des criminels. La RDC fait
taire des voix discordantes pendant la période
préélectorale, novembre 2016, p. 38.
* 324Idem, p.
40.
* 325 Informations
disponible sur www.rfi.fr>afrique>, consulté le 12 avril
2018.
* 326BCNUDH, Recours
illégal, injustifié et disproportionne à la force lors de
la gestion des manifestations publiques en République
Démocratique du Congo de janvier 2017 à janvier 2018,
Op. cit, p. 20.
* 327 Informations
disponible sur
https://www.radiookapi.net,
consulté le 12 avril 2018.
* 328 HUMAN RIGHTS WATCH,
2016, Rapport mondial 2016 : République Démocratique du Congo,
https://www.hrw.org/fr/worldreport/2016/country-chapters/285142,
(octobre 2016).
* 329BCNUDH, Rapport
sur les violations des droits de l'homme en République
Démocratique du Congo dans le contexte des évènements du
19 décembre 2016, Op. cit, p. 16.
* 330 HUMAN RIGHTS WATCH,
« La République Démocratique du Congo au bord du
précipice, 28/09/2016 », OFPRA, « Les
manifestations de l'opposition », DIDR, Mars 2017, p. 9.
* 331Le nombre total de
personne détenues pourrait être plus important étant
donné que le personnel du BCNUDH s'est vu refusé l'accès
à plusieurs lieux de détention militaires.
* 332Ces cas sont
détaillés dans les qui suivent.
* 33312 membres du
Rassemblement et un de la LUCHA restaient en détention.
* 334 Ceci est devenu
depuis un certain laps de temps la marque de gestion autant dans les pays
occidentaux que dans les pays en transition démocratique.
* 335 Cette pratique
devient généralisée
* 336Message n°
25/CAB/VPM/MININTERSEC/ERS/067/2017 du Vice-Premier Ministre, Ministre de
l'Intérieur et sécurité (31 mars 2017).
* 337Communiqué
n° 090/BIS/CAB.GOUV/KC/002/2017 (1er avril 2017).
* 338Arrêté
urbain n°3073/04/2017 portant mesures d'interdiction de manifestations
publiques dans la ville de Kananga (23 novembre 2017).
* 339Rapport du
Rapporteur spécial sur le droit à la liberté de
réunion et d'association pacifique, A/HRC/23/39 (24 avril 2013),
para. 63.
* 340A/HRC/31/66, par. 23,
même lorsqu'un régime d'autorisation préalable est en
place, le fait d'omettre de notifier une réunion aux autorités ne
rend pas cette réunion illicite et ne devrait donc pas être un
motif de dispersion du rassemblement.
* 341Voir notamment,
l'article 88 de la loi n°024-2002 portant Code pénal militaire du
18 novembre 2002.
* 342ALCARAZ (H.) &
LECUCQ (O.), Op. cit, p. 18-19.
* 343 STEINBEIS (M.),
Freedom of Assembly in Poland: Next in Line?,
Verfassungsblog, 10 décembre 2016.
* 344 L'Algérie et
le Soudan en Afrique sont actuellement les théâtres des
manifestations aux effets tout aussi remarquables.
* 345 Le lien entre
transition démocratique et liberté de manifestation a
été exploré de façon très approfondie par
HAMILTON (M.), We, the People's Freedom of Assembly, the Rights of Others,
and Inclusive Constitutionalism, in SAJOì (A.) (dir.), Free to
Protest: Constituent Power and Street Demonstration, Utrecht, Eleven
International Publishing, 2009 et id., « Freedom of Assembly,
Consequential Harms and the Rule of Law: Liberty-limiting Principles in the
Context of Transition », Oxford Journal of Legal Studies, 27, 1,
2007.
* 346 MORIN (J.-Y.),
Op. cit, p. 1.
* 347Idem, p.
3.
* 348 Il s'agit de l'Acte
portant dispositions constitutionnelles relatives à la période de
la Transition du 4 août 1992 ; la loi n° 93-001 du 2 avril Acte
constitutionnel harmonisé relatif à la période de la
transition et de l'Acte constitutionnel de la transition du 9 avril 1994.
* 349TURPIN (D.),
Libertés publiques et droit fondamentaux, Paris, Edition du
Seuil, 2004, p. 562.
* 350Idem.
* 351Le BOT (O.), La
liberté de manifestation en France : un droit fondamental sur la
sellette ?, Op. cit., p. 33.
* 352Idem.
* 353 Article 16
Constitution du 19 avril 1946 de l'EIC, reconnaissant « le droit de
défiler librement sur la voie publique ».
* 354Cour
Constitutionnelle, décembre n° 94-352 DC du 18 janvier 1995, Loi
d'orientation et de programmation relative à la sécurité,
cons. 16.
* 355Le BOT (O.), La
liberté de manifestation en France : un droit fondamental sur la
sellette ?, Op. cit., p. 36.
* 356PICARD (E.), Op.
cit., p. 155.
* 357Article 10 de la
Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyende 1789.
* 358 Lire article 12 de la
Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, in Journal
officiel des Communautés européennes, 30 mars 2010.
* 359 Les formules
utilisées servent néanmoins de fondement à sa
reconnaissance jurisprudentielle. V. CEDH, 5 mars 2009, Barraco c/ France,
n° 31684/05, §. 39, indiquant que ce droit de réunion
pacifique « englobe la liberté de manifestation ».
* 360 Art. L. 211-1 et s du
Code de sécurité intérieure, disponible sur
http://codes.droit.org/CodV3/securite_interieure.pdf,
consulté le 23 juillet 2018 à 15 h 47'.
* 361Décret-loi du
23 octobre 1935, codifié en 2012 dans le Code de la
sécurité intérieure au Benin.
* 362 Ce qui faisait dire
à Barthélémy que « La rue est le domaine de l'ordre,
plus que de la liberté » (BARTHELEMY (J.), Précis de
droit public, 1937, rééd. 2007, Paris, Dalloz, p. 115).
* 363 Une proposition avait
toutefois été faite en ce sens en 1907. V. La proposition de loi
d'A. Lefas visant « à introduire dans les moeurs le droit de
manifestation, en s'inspirant des mesures et des précautions
législatives qui ont introduit dans nos moeurs la liberté de
réunion » (Documents parlementaires, Chambre des
députés, J.O., 1907, annexe n° 695, p. 81).
* 364 Ainsi que cela
résulte de l'exposé des motifs de la loi habilitant le
gouvernement à édicter le décret-loi, « l'ordre dans
la rue est nécessaire à la vie sociale, à la paix
intérieure et au fonctionnement normal des services publics ».
L'adoption du texte doit permettre à l'État « d'être
au courant des manifestations projetées et de prendre toutes mesures
commandées par les circonstances » (Documents parlementaires,
Chambre des députés, JO, 1935, annexe n° 4142, p. 127).
* 365 Le BOT (O.), La
liberté de manifestation en France : un droit fondamental sur la
sellette ?, Op. cit, p. 35.
* 366L'article L. 211-1 du
CSI soumet les manifestations « à l'obligation d'une
déclaration préalable ». En vertu de l'article L. 211-2,
« La déclaration est faite à la mairie de la commune ou aux
mairies des différentes communes sur le territoire desquelles la
manifestation doit avoir lieu, trois jours francs au moins et quinze jours
francs au plus avant la date de la manifestation. À Paris, la
déclaration est faite à la préfecture de police. Elle est
faite au représentant de l'État dans le département en ce
qui concerne les communes où est instituée la police
d'État. / La déclaration fait connaître les noms,
prénoms et domiciles des organisateurs et est signée par trois
d'entre eux faisant élection de domicile dans le département ;
elle indique le but de la manifestation, le lieu, la date et l'heure du
rassemblement des groupements invités à y prendre part et, s'il y
a lieu, l'itinéraire projeté. / L'autorité qui
reçoit la déclaration en délivre immédiatement un
récépissé ».
Ce régime va au-delà du standard
européen, qui admet un régime d'autorisation préalable
(Com. EDH, 10 oct. 1979, Rassemblement jurassien c/ Suisse, n° 8191/78,
§ 3).
* 367CE, Sect., 4
févr. 1938, Nicolet, Lebon, p. 128.
* 368 L'étude la
plus complète et la plus récente est celle de HUBRECHT (H.-G.),
« Le droit français de la manifestation », in La
manifestation, Presses de la F.N.S.P., 1990, pp. 181-206.
* 369 L'article L. 211-1 du
CSI dispense de l'obligation de déclaration préalable « les
sorties sur la voie publique conformes aux usages locaux ». Il s'agit en
pratique des « sorties » suivantes : processions religieuses,
défilés à caractère corporatiste ou associatif
(sapeurs-pompiers, fanfare, carnaval), manifestations mémorielles
(armistice, fête nationale).
* 370 Voir ce constat
dressé tout au long de son fascicule par Didier Perroudon,
contrôleur général de la Police nationale, in
Précis de droit pénal et de procédure
pénale, v° « Manifestations », 2010, not. n° 32
et 54, 81.
* 371 L'article 431-9 du
Code pénal incrimine « le fait : 1° D'avoir organisé
une manifestation sur la voie publique n'ayant pas fait l'objet d'une
déclaration préalable dans les conditions fixées par la
loi ; 2° D'avoir organisé une manifestation sur la voie publique
ayant été interdite dans les conditions fixées par la loi
; 3° D'avoir établi une déclaration incomplète ou
inexacte de nature à tromper sur l'objet ou les conditions de la
manifestation projetée ».
* 372 V. PERROUDON (D.),
Op. cit, souligne « que les organisateurs sont très
rarement poursuivis de ce fait.
* 373 Le BOT (O.) ;
La liberté de manifestation en France : un droit fondamental
sur la sellette ?, Op. cit, p. 36.
* 374 L'article
1er du Décret-loi du 23 octobre 1935 portant
réglementation des mesures relatives au renforcement du maintien de
l'ordre public, disponible sur
https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=LEGITEXT000006071320&dateTexte=20080410,
consulté le 23 juillet 2019 à 07 heures 04'.
* 375L'article 2 du
Décret-loi du 23 octobre 1935, Op. cit.
* 376Cette position
converge avec le principe du libre accès à l'espace public
développé ci-haut.
* 377Lire les articles 104
à 108 du Décret-loi de 1935, Op. cit.
* 378 Disponible sur
http://mjp.univ-perp.fr/constit/es1978.htm,
consulté le 15 juillet 2019, à 17 heures 47'.
* 379ALCARAZ (H.) et LECUCQ
(O.), Op. cit, p. 2.
* 380ALCARAZ (H.) et LECUCQ
(O.), Op. cit, p. 3.
* 381ALCARAZ (H.) et LECUCQ
(O.), Op. cit, p. 4.
* 382Ibidem.
* 383 DE ESTEBAN (J.),
Las Constituciones de España, Boletín Oficial del
Estado, Centro de Estudios políticos y constitucionales, Textos y
Documentos, Madrid, 2000, p. 222.
* 384 Sont
considérées comme non pacifiques les réunions suivantes :
celles qui contreviennent aux règlements de police, les réunions
ou manifestations qui ont lieu à l'air libre ou de nuit, les
réunions où les participants portent des armes.
* 385ALCARAZ (H.) et LECUCQ
(O.), Op. cit, p. 6.
* 386Ibidem.
* 387ALCARAZ (H.) et LECUCQ
(O.), Op. cit, p. 6.
* 388Idem, p.
4.
* 389Ibidem.
* 390ALCARAZ (H.) et LECUCQ
(O.), Op. cit, p. 6.
* 391Ibidem.
* 392ALCARAZ (H.) et LECUCQ
(O.), Op. cit, p. 6.
* 393Le franquisme traduit
en politique, le système politique et économique instauré
par le général Franco en Espagne, proche du fascisme italien. Il
apparaît tout à la fois comme une dictature militaire et comme le
plus civil des régimes que l'Espagne ait connus.
* 394ALCARAZ (H.) et LECUCQ
(O.), Op. cit, p. 8.
* 395 Après avoir
énoncé qu' « Est reconnu le droit de se réunir
pacifiquement et sans arme », l'article 38 de la Constitution
précisait en effet que : « Une loi spéciale régira le
droit de réunion à l'air libre et le droit de manifester ».
* 396 Ley Orgánica
9/1983, de 15 de julio, reguladora del derecho de reunión (BOE
núm. 170, de 18 de julio), modificada por la Ley Orgánica
4/1997, de 4 de agosto; por la Ley Orgánica 9/1999, de 21 de abril, por
la Ley Orgánica 9/2011, de 27 de julio y por la Ley Orgánica
8/2014, de 4 de diciembre, information disponible sur
http://seguridadmotociclistas.org/wp-content/uploads/2016/05/El-derecho-de-manifestaci%C3%B3n-y-reuni%C3%B3n.pdf,
consulté le 23 juillet 2019 à 08 heures 26'.
* 397 Tribunal
Suprême, Op. cit.
* 398ALACRAZ (H.) et
LECUCQ, Op. cit, p. 5.
* 399Ibidem.
* 400ALCARAZ (H.) et LECUCQ
(O.), Op. cit, p. 5.
* 401 Tribunal
suprême, 3ème Chambre, 26 juin 1991, cité par Arribas, p.
26.
* 402 SORIANO DÍAZ
(R.), In Comentarios a la Constitución española, tomo
II, Madrid, Edersa, 1997, op. cit.
* 403 La langue espagnole
utilise le terme « derecho » là où le
français lui préfère l'expression « liberté de
réunion ». Sans ignorer cette nuance, ni les distinctions
théoriques qu'elle peut recouvrir, par commodité nous utilisons
indifféremment les deux vocables.
* 404 Décision
déjà citée, Arrêt 115/1985 du 11 octobre 1985.
* 405 Décision
déjà citée, Arrêt 85/1988 du 28 avril 1988.
* 406Article 1-2 du
Décret, Op. cit.
* 407ALACRAZ (H.) et
LECUCQ, Op. cit, p. 5.
* 408 MASSIO GARROTE (M.
F.), in Los derechos fundamentales. La vida, la igualdad y los derechos de
libertad, Tirant lo BIanch, Valence, 2013, pp. 299 et s.
* 409ALACRAZ (H.) et
LECUCQ, Op. cit, p. 8.
* 410Idem.
* 411 SAJÓ (A.),
« Constitutional Sentiments », New Haven, Yale
University Press, 2011, p. 262.
* 412ALACRAZ (H.) et
LECUCQ, Op. cit, p. 8.
* 413 MASSIÓ GARROTE
(M.-F.), Los derechos fundamentales. La vida, la igualdad y los derechos de
libertad, Op. cit, p. 302.
* 414ALACRAZ (H.) et
LECUCQ, op. cit, p. 9.
* 415ALCARAZ (H.) et LECUCQ
(O.), Op. cit, p. 6.
* 416Idem., p. 10.
* 417 S'il s'agit de
personnes morales, la communication se fait par leur représentant.
* 418 S'agissant des
données à transmettre dans la déclaration, l'article 9
indique que doivent y figurer : le nom et le domicile de l'organisateur
(accompagné d'un document officiel d'identité) ; le lieu, la
date, l'heure et la durée.
* 419 Arrêt 124/2005
du 23 mai 2005, Op. cit.
* 420Idem.
* 421L'autorité
administrative doit fonder la décision d'interdiction sur des
motivations de fait et de droit.
* 422 Arrêt 66/1995
du 8 mai 1995.
* 423Arrêt 66/1995 du
8 mai 1995, Op. cit.
* 424ALCARZ (H.) et LECUCQ
(O.),Op.cit, p. 13.
* 425Idem.
* 426ALCARZ (H.) et LECUCQ
(O.), Op.cit, p. 13.
* 427Arrêt 195/2003
du 27 octobre 2003.
* 428Arrêt 55/1996 du
28 mars 1996.
* 429Arrêt 163/2006
du 22 mai 2006.
* 430Arrêt 236/2007
du 7 novembre 2007.
* 431Arrêt 66/1995 du
8 mai 1995.
* 432HONVOU K. (S.),
« Le droit de manifester au Bénin », Konrand
Adenauer Stiftung, RLPSSA, LEJA, Vol. 17, p. 34.
* 433Idem.
* 434Information disponible
sur
http://www.unesco.org/education/edurights/media/docs/cd9ad07158c52d423f4fb125ea5a53999323b886.pdf,
consulté le 31 juillet 2019 à 15 heures 31'.
* 435 Voir entre autres les
décisions de la Cour, celles-ci : DCC 02-058 du 04 juin 2002, FAVI
Adèle, Recueil, 2002, p. 243 ; DCC 05-015 / 2005-02-17.
* 436 Décision de la
Cour Constitutionnelle béninoise no 18/117 du 22 mai 2018, p.
15.
* 437 Disponible sur
http://conafil.org/attachments/article/8/pdf_loi_97-029.pdf,
consulté le 31 juillet 2019 à 16 heures 31'.
* 438HONVOUK. (S.), Op.
cit., p. 26.
* 439 V. les
décisions DCC 01-097 du 7 novembre 2001; DCC 03-134 du 21 Août
2003 et décision DCC 06-045 du 05 avril 2006 de la COUT
constitutionnelle du Bénin qui portent toutes sur les libertés de
manifestation.
* 440 Décret
2005-377 du 23 juin 2005 portant réglementation du maintien de l'ordre
au Bénin.
* 441L'article 72 de la loi
no97-029 du 15 janvier 1999 portant organisation des communes en
République du Bénin.
* 442 Pour une certaine
doctrine, les libertés organisées sous le régime
répressif sont les seules « libertés parfaites ».
MORANGES (G.), Contribution à la théorie
générale des libertés publiques, thèse, Nancy,
1940, p. 73.
* 443Lire le
décret-loi de 1935 en République du Benin.
* 444Idem, article
1er.
* 445 V. notamment DCC
01-097 du 07 novembre 2001 où le juge constitutionnel déclare
conforme à la Constitution l'arrêté préfectorale
interdisant toute manifestation.
* 446 Dans sa
décision DCC 06-0-17 du 05 avril 2006, la Cour constitutionnelle a
décidé qu' « il résulte des dispositions de 1'article
25 de la Constitution que la jouissance des libertés par les citoyens
doit se faire dans le respect de l'ordre public établi par la loi et les
règlements. De telles dispositions visent à éviter les
abus tant dans la jouissance desdites libertés par les citoyens que dans
leur restriction par les autorités chargées de l'administration
territoriale. En l'espèce, en n'autorisant pas la marche
projetée, le Maire n'a pas violé la Constitution.
* 447 CHAPUS (R.),
Droit administratif général, tome l, Hé
éd., 2000, p. 1033.
* 448 MBAYE (K.), Les
droits de l'homme en Afrique, Paris, Pedone, 1992, p. 180.
* 449 D'ALMEIDA (E.),
Op. cit, p. 51. L'auteur fait remarquer que « dans ces
conditions, aucune manifestation de la mouvance ne pourra être interdite.
Quand c'est l'opposition, c'est l'interdiction ».
* 450Information disponible
sur
https://www.voaafrique.com/a/l%C3%A9gislatives-b%C3%A9nin-manifestation-de-l-opposition-dispers%C3%A9e-%C3%A0-cotonou/4861848.html,
consulté le 07 juillet 2019 à 10h41'.
* 451Idem.
* 452Information disponible
sur
https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2019/04/benin-crackdown-on-protests-and-wave-of-arrests-fuel-tense-election-period/,
consulté le 07 juillet 2019 à 10h49'.
* 453 Décision DCC
03-134 du 21 Août 2003. V. L'appréciation que fait le juge
constitutionnel de l'avertissement qu'a donné M. AZANNAI Candide dans sa
correspondance au Maire.
* 454 TURPIN (D.),
Droit constitutionnel, Paris, PUF, 1997, p. 153.
* 455CABRILLAC (R.),
FRISON-ROCHE (M.-A.), REVET (T.), (dir.), Libertés et droits
fondamentaux, Op. cit., p. 98 ; PAUVERT (B.) et LATOUR (O.),
Libertés publiques et droits fondamentaux, Op. cit., p. 198.
* 456 Pour cette
terminologie, SERIAUX (A.), SERMET (L.), VIRIOT-BARRIAL (D.), Droits et
libertés fondamentaux, Paris, Ellipses, 1998, p. 232.
* 457 FAVOREU (L.) et alii,
Droit des libertés fondamentales, Op. cit., p.
2 ; OMEONGA TONGOMO (B.), Manuelde droit des libertés
fondamentales, op. cit.
* 458 La Constitution
congolaise du 18 février 2006 précitée ne confond pas ces
notions, lorsqu'elle consacre par exemple le droit à la
liberté de pensée ou encore le droit à
la liberté d'expression.
* 459 Voir SERIAUX (A.),
SERMET (L.), VIRIOT-BARRIAL (D.), Op. cit., p. 7 et s ; ainsi que ETOA
(S.), Le passage des « libertés publiques » aux «
droits fondamentaux » : Analyse des discours juridiques
français,op. cit., p. 47-48.
* 460 SERIAUX (A.), SERMET
(L.) et VIRIOT-BARRIAL (D.), Op. cit., p. 10.
* 461Voire supra, p.
253.
* 462 Article, Op.
cit., p. 42.
* 463Idem.
* 464Ibidem.
* 465 Sur cette
affirmation, v. entre autres : OMEONGA TO NGOMO (B), Manuel de droit
des libertés fondamentales, Op. cit, p. 143 ; BURDEAU (G.),
Les libertés publiques, Paris, L.G.D.J., 1972, p. 35; DRAN
(M.), Le contrôle juridictionnel et la garantie des libertés
publiques, Paris, L.G.D.J., Bibliothèque constitutionnelle et de
science politique, tome 32, Paris, 1968, pp. 3, 6 et 8 ; LEVINET (M.),
Théorie générale des droits et libertés,
2e éd., Paris, Bruylant, 2008, p. 410 ;
FERNÁNDEZ-WEBER (A.), Lesmécanismes de contrôle non
contentieux du respect des droits de l'homme, Strasbourg, thèse
dactylographiée, Université Robert Schuman, 2006, p. 17.
* 466LOHRER (D.), Op.
cit. p. 57.
* 467Cité par LOHRER
(D.), Op. cit. p. 57.
* 468Idem.
* 469Ibidem.
* 470 En janvier 2015,
l'opposition politique parlementaire a essayé sans succès de
barrer la route à la révision de la loi électorale dans
l'hémicycle, avant d'appeler la rue à sa rescousse et finalement
d'obtenir - avec l'aide de cette rue - l'extirpation de la disposition
contestée.
* 471 STUART MILL (J.),
Le gouvernement représentatif, trad. M. Dupont-White,
3ème éd, Paris, Guillaumin, 1877, p. 135.
* 472 Cette fonction est
prévue par l'article 100 de la constitution congolaise, article 24 de la
Constitution française, l'article 66-2 de Constitution espagnole et
l'article 79 de la Constitution béninoise.
* 473 XAVIER (J.), Le
renforcement du Parlement. Du Comité Balladur au projet Sarkozy,
Mémoire de Master 2 droit public fondamental, Pau, 2008, p. 100.
* 474 Ce mécanisme
est prévu aux articles 117 de la Constitution congolaise, 49 de la
Constitution française et 112 de la constitution espagnole.
* 475 ARAGÓN REYES
(M.), « Información parlamentaria y función de control,
in Instrumentos de información de las cámaras
Parlamentarias », Centro de estudios constitucionales, Cuadernos
y Debates, n° 52, Madrid, 1994, p. 24.
* 476 SANTAOLALLA
LÓPEZ (F.), Derecho constitucional, Madrid, Dykinson, S.L.,
2004, p. 337.
* 477 LÖHRER (D.),
Op. cit, p. 119.
* 478 Exception faite de
l'hypothèse où l'exception d'irrecevabilité est
adoptée par le Sénat. Dans ce cas de figure, le Gouvernement a
effectivement la possibilité de donner le dernier mot à
l'Assemblée nationale en vertu de l'article 45 de la Constitution.
* 479 Art. 162 a) de la
Constitution espagnole, Op. cit.
* 480 Art. 61 de la
Constitution française, Op. cit.
* 481Article 160,
alinéa 3 de la constitution du 18 février 2006, Op.
cit.
* 482 Article 121,
alinéa 1er de la constitution béninoise, Op.
cit.
* 483 LÖHRER (D.),
Op. cit, p. 121.
* 484 Les articles 27 de la
constitution congolaise, Op. cit, 69, alinéa 3 et 72-1 de la
constitution française, Op. cit., 77 de la constitution
espagnole, Op. cit.
* 485 À tel point
que l'article 77 de la Constitution espagnole est expressément
consacré aux pétitions adressées par les citoyens au
Parlement.
* 486 C'est en effet le
prescrit de l'article 190 du Règlement intérieur de
l'Assemblée nationale de la République Démocratique du
Congo.
* 487 BARBÉ (V.),
Le rôle du Parlement dans la protection des droits fondamentaux.
Etude comparative : Allemagne, France, Royaume-Uni, op. cit., p.
353.
* 488 LÖHRER (D.),
Op. cit, p. 124.
* 489Ibidem.
* 490Ibidem.
* 491 Article 69,
alinéa 2 de la Constitution de la RDC du 18 février 2006,
Op. cit.
* 492Idem, article
74.
* 493 OMEONGA TONGOMO
(B.), Manuel de droit des libertés fondamentales, Op. cit., p.
211.
* 494 Lire l'article 3 de
l'ordonnance n°86/268 du 31 octobre 1986 portant création du
Département des Droits et Libertés du citoyen.
* 495 OMEONGA TONGOMO
(B.), Manuel de droit des libertés fondamentales, Op. cit., p.
211.
* 496 NTUMBA MUSUKA
(Z.-R.), Rôle du juge administratif dans l'émergence de
l'État de droit, Thèse de doctorat, Faculté de Droit,
Université de Kinshasa, 2007-2009, p. 548.
* 497 OMEONGA TONGOMO
(B.), Manuel de droit des libertés fondamentales, Op. cit., p.
213.
* 498 Cité par
MWILANYA (N.), Mécanismes nationaux de promotion et de protection
des droits de l'homme, in Mandats, Rôle et Fonctions des pouvoirs
constitués dans le nouveau système politique de la
République Démocratique du Congo. Journées d'information
et de formation organisées à l'intention des parlementaires, des
députés provinciaux et de hauts cadres de l'administration
(février-juin 2007), PNUD Kinshasa, 2007, p. 287.
* 499 GÉLARD (P.),
Les autorités administratives indépendantes, Rapport
d'information n° 404 fait au nom de l'office parlementaire
d'évaluation de la législation, tome I, 2006-2007, p. 22.
* 500 GUÉDON
(M.-J.), Les autorités administratives indépendantes,
Paris, L.G.D.J, 1991, p. 24.
* 501 AMSELEK (P.),
« L'évolution générale de la technique juridique
dans les sociétés occidentales », R.D.P.,
1982, p. 275.
* 502 Disponible sur
https://www.leganet.cd/Legislation/Droit%20Public/DH/L.13.011.21.03.2013.htm,
consulté le 23 septembre 2018 à 19 heures 35'.
* 503Au terme de l'article
4 de la Loi-Organique, la CNDH est chargée de : Enquêter sur
tous les cas de violations des droits de l'homme. D'orienter les victimes
et les aider à ester en justice sur toutes les violations
avérées des droits de l'homme. Procéder à des
visites périodiques des centres pénitentiaires et de
détention sur toute l'étendue de la RDC. Veiller au respect
des droits de la femme et de l'enfant. Veiller au respect des droits des
personnes avec handicap. Veiller au respect des droits des personnes de
troisième âge, des personnes vivant avec VIH/SIDA, des
prisonniers, des refugiés, des déplacés de guerre, des
personnes victimes de calamité de tout genre et d'autres groupes
vulnérables.
* 504Au terme de l'article
4 de la Loi-Organique, Op. cit.
* 505Idem.
* 506Ibidem.
* 507 Ibidem.
* 508 Ibidem.
* 509Lire en ce sens les
articles 4 et 5 de la loi organique n° 13/011 du 21 mars 2013 sur la
Commission Nationale des Droits de l'Homme.
* 510Lire l'article 4 de la
loi organique précitée.
* 511 NGONDANKOY
NKOY-ea-LOONGYA, Libertés publiques. Notes de cours à
l'intention des apprenants en Diplôme d'Etudes Approfondies,
Année académique 2017-2019, MIVA UNIVERS, p. 105.
* 512SABOURIN (P.),
« Recherches sur la notion de maladministration dans le
système français »,A.J.D.A., 1974, p. 397.
* 513 LÖHRER (D.),
Op. cit, p. 238.
* 514 LÖHRER (D.),
Op. cit, p. 241.
* 515BOUSTA (R.), Essai
sur la notion de bonne administration en droit public, Paris, L'Harmattan,
2010, p. 133.
* 516 Selon l'ancien
Médiateur de la République Paul LEGATTE, le bon fonctionnement
s'apprécie « en termes d'efficacité, c'est-à-dire en
fonction des résultats obtenus par rapport aux objectifs fixés au
service public et en terme d'efficience, c'est-à-dire en tenant compte
de la meilleure utilisation possible des moyens dont dispose le service »
(« Le Médiateur de la République. Situation actuelle »,
R.A., 1986, p. 434).
* 517Idem.
* 518Ibidem.
* 519MALIGNIER (B.), Les
fonctions du Médiateur, P.U.F., Paris, 1ère
édition, 1979, p. 86.
* 520Antonio la
PÉRGOLA, « Ombudsman y Defensor del Pueblo : apuntes para une
investigación comparada », R.E.P., 1979, n° 7, p.
75.
* 521 Pour une approche
approfondie des débats constituants relatifs à la fonction du
Défenseur du Peuple espagnol, le lecteur pourra utilement se
référer à : ARADILLAS (A.), Todo sobre el Defensor del
Pueblo, Plaza & Janes Editores, S.A., Barcelona, 1985, pp. 40 et ss.
; GIL-ROBLES (Á.), El Defensor del Pueblo, Cuadernos Civitas,
Madrid, 1979, pp. 28 et ss. ; CAVA DE LLANO Y CARRIÓ (M.-L), «
Artículo 1 », inROVIRA VIÑAS (A.)(Dir.), Comentarios a
la ley orgánica del Defensor del Pueblo, Aranzadi, Thomson, 2002,
pp. 67-69 ; PELLON RIVERO (R.), El Defensor del Pueblo. Legislación
española y derecho comparado, Servicio Central de Publicaciones de
la Presidencia del Gobierno, Madrid, 1ère éd., 1981,
pp. 42 et ss.
* 522 DE GENNES (P.G.),
La persuasion vaut mieux que toutes les procédures,
L'Expansion management review, Groupe expansion, Paris,
décembre 1996, p.102.
* 523 DELAUNY (B.),
« Les protections non juridictionnelles des droits publics subjectifs
des administrés », in Les droits publics subjectifs des
administrés. Actes du colloque organisé les 10 et 11 juin
2010 par l'Association française pour la recherche de droit
administratif au Pôle universitaire de gestion de l'Université de
Bordeaux, 2011; Litec, Paris, p. 211.
* 524Lire à cet
effet, l'Exposé des motifs de la Loi organique du 10 aout 2011, portant
organisation et fonctionnement de la police nationale congolaise.
* 525Idem, Article
75.
* 526Loi organique n°
11/012 portant organisation et fonctionnement des Forces armées de la
République Démocratique du Congo, promulguée le 11
août 2011.
* 527Article 124 de la loi
organique n° 11/012 portant organisation et fonctionnement des Forces
armées de la République Démocratique du Congo,
promulguée le 11 août 2011.
* 528Article 28 de la
Constitution de la République Démocratique du Congo du 18
février 2006, Op. cit.
* 529Article 3 du
Décret-Loi du 11 janvier 2003 portant création et organisation de
l'Agence Nationale de Renseignements en République Démocratique
du Congo.
* 530Article 4 du
Décret-Loi du 11 janvier 2003 portant création et organisation de
l'Agence nationale de renseignements, Op. cit.
* 531Article 2 de la
Déclaration française des Droits de l'Homme et du Citoyen de
1789.
* 532 Article 27 de la
Constitution du 18 février 2006, Op. cit.
* 533 Elles exercent une
fonction de vigilance qui a un effet dissuasif sur les pouvoirs publics.
* 534 Lire en ce sens le
Communiqué conjoint des ambassadeurs des États-Unis, du Canada et
de la France, publié le 14 novembre 2017.
* 535MAMPUYA KANUNK
a-TSHIOPO (A.), Les sanctions ciblées américaines
violent le droit international. Les mesures contre les responsables
congolais, Kinshasa, PUC, 2016, p. 92.
* 536 Information
disponible sur
http://www.rfi.fr/afrique/20170529-repression-rdc-neuf-hauts-responsables-sanctionnes-ue,
consulté le 26 mai 2019 à 07 heures 58'.
* 537Idem.
* 538Ibidem.
* 539Ibidem.
* 540 Information
disponible sur
http://www.rfi.fr/afrique/20170529-repression-rdc-neuf-hauts-responsables-sanctionnes-ue,
consulté le 26 mai 2019 à 07 heures 58'.
* 541Idem.
* 542MAMPUYA (K.), Op.
cit. pp. 6-7.
* 543A ce sujet, la
Déclarations du Général Olenga peut sembler prouver le
contraire.
* 544
http://www.rfi.fr/afrique/20170529-repression-rdc-neuf-hauts-responsables-sanctionnes-ue,
consulté le 18 septembre 2019 à 20 heures 00'.
* 545
https://www.radiookapi.net/2017/06/30/actualite/economie/sanctions-des-usa-et-eu-contre-des,
consulté le 18 septembre 2019 à 20 heures 03'.
* 546 Information
disponible sur
http://www.rfi.fr/afrique/20170529-repression-rdc-neuf-hauts-responsables-sanctionnes-ue,
consulté le 26 mai 2019 à 08 heures 15'.
* 547 Information
disponible sur
http://www.rfi.fr/afrique/20170529-repression-rdc-neuf-hauts-responsables-sanctionnes-ue,
consulté le 26 mai 2019 à 08 heures 15'.
* 548Une
délégation emmenée par l'Union africaine était
d'ailleurs en ce moment-là Kinshasa.
* 549Il faut à ce
sujet reconnaitre la capacité dissuasive et persuasive de la
démarche de la MONUSCO. Sans un pouvoir de contrainte sur les parties,
l'action de cet organisme de Nations Unies mérite d'être
saluée dans la démarche tendant à rendre effectif le droit
de manifester.
* 550Il faut à ce
sujet reconnaitre la capacité dissuasive et persuasive de la
démarche de la MONUSCO. Sans un pouvoir de contrainte sur les parties,
l'action de cet organisme de Nations Unies mérite d'être
saluée dans la démarche tendant à rendre effectif le droit
de manifester.
* 551 Dans ce contexte de
transition politique, il est important que toutes les voix puissent s'exprimer
dans le calme et de façon pacifique a souligné Maman Sidikou, le
Représentant spécial du Secrétaire général
de l'ONU, tout en promettant que conformément à son mandat, la
MONUSCO se réserve le droit d'observer les événements et
de rapporter d'éventuelles violations des droits de l'homme .
* 552ATANGANA AMOUGOU
(J.L.), Avancées et limites du système africain de protection
des droits de l'homme : la naissance de la Cour africaine des droits de
l'homme et des peuples, in Revue Droits fondamentaux,
www.Droits-fondamentaux.org,
2004, cité par Présidence Ngoy Walupakah, La cour africaine des
droits de l'homme et des peuples : le problème du contrôle
juridictionnel des droits de l'homme en Afrique ; Mémoire de
licence, Faculté de Droit, U.C.B. 2007-2008, inédit.
* 553 CHAMPEIL-DESPLATS
(V.), Effectivité des droits de l'homme : approche
théorique, in CHAMPEIL-ESPLATS (V.) et LOCHAK (D.), (Dir.), A
la recherche de l'effectivité des droits de l'homme, Presses
universitaires de Paris X, 2008, p. 25, cité par LÖHRER (D.),
La protection non juridictionnelle des droits fondamentaux en droit
constitutionnel compare. L'exemple de l'ombudsman spécialisé
portugais, espagnol et français, Thèse de doctorat en droit
public, Faculté de Droit, d'économie et de gestion École
Doctorale, de l'Université de Pau et des pays de l'Adour, 2013, p.
62.
* 554 DE BÉCHILLON
(D.), Qu'est-ce qu'une règle de droit ?, Paris, Editions Odile
Jacob, 1997, p. 174. Dans le même sens, v. MILLARD (E.), Qu'est-ce
qu'une norme juridique ?, Les Cahiers du Conseil constitutionnel,
Etudes et doctrines, 2006, n° 21, p. 59.
* 555 Sur la notion de
système, OST (F.) et VAN de KERCHOVE (M.), in, De BÉCHILLON (D.),
Qu'est-ce qu'une règle de droit ?, Paris, Editions Odile Jacob,
1997, pp. 261-262. Sur celle de système juridique, v. VIRALLY (M.),
Le phénomène juridique, R.D.P., 1966, pp. 13 et
ss.
* 556 MVIOKI BABUTANA (J.),
« Quelles stratégies pour garantir l'effectivité des
droits économiques, sociaux et culturels ? », Annales
de la Faculté de droit, Actes des journées scientifiques sur
le thème Droit et société « ubi
societas, ibi jus : ubi jus, ibi societas », Kinshasa,
Éditions Droit et Société, 2017, p. 161.
* 557Idem.
* 558 PFERSMANN (O.),
Esquisse d'une théorie des droits fondamentaux, in FAVOREU
(L.)(Dir.) et alii, Droit des libertés fondamentales,
Précis Dalloz, Paris, 6e éd., 2012, pp. 63 et ss.
* 559 OMEONGA TONGOMO (B.),
Manuel dedroit des libertés fondamentales, Op.cit, p. 25 ;
REDOR (M.-J.), Garantie juridictionnelle et droits fondamentaux,
in La garantie juridictionnelle des droits fondamentaux,
C.R.D.F., 2002, n° 1, p. 93.
* 560 Les auteurs tant
congolais qu'étrangers sont quasiment unanimes pour affirmer que le juge
constitue un corollaire indispensable des droits fondamentaux. En ce sens, v.
notamment : BON (P.), La protection constitutionnelle des droits
fondamentaux : aspects de droit comparé européen, in
MAUS (D.) et BON (P.)(Dir.), La nouvelle république
brésilienne, Economica, Paris,P.U.A.M., 1991, p. 223 ; CHEVALLIER
(J.), L'État de droit, Paris, Montchrestien, 3e
éd., 1999, p. 134 ; MIRANDA (J.), Manual de direito
constitucional, tomo IV, direitos fundamentais, Coimbra Editora,
5ème éd., 2012, p. 355 ; OMEONGA TONGOMO (B.),
Manuel dedroit des libertés fondamentales, Op. cit, p. 25;
NGONDANKOY NKOY-ea-LOONGYA (P.-G.), Droit congolais des droits de
l'homme,Op. cit, p. 364.
* 561 Article 150,
alinéa 1er de la Constitution du 18 février 2006,
Op. cit.
* 562 MATHIEU (B.) et
VERPEAUX (M.), Contentieux constitutionnel des droits fondamentaux,
Paris, L.G.D.J., 2002, p. 12.
* 563 WEBER (A.), Les
mécanismes de contrôle non contentieux du respect des droits de
l'homme, Op. cit., p. 18.
* 564 SUDRE (F.), Droit
européen et international des droits de l'homme, Paris, P.U.F.,
11ème éd., 2012, p. 53.
* 565 LOHRER (D.), Op.
cit, p. 137.
* 566WACHSMAN (P.),
Libertés publiques, Op. cit., p. 114.
* 567Idem.
* 568Article 150,
alinéa 1er de la Constitution du 18 février 2006 de la
RDC, Op. cit.
* 569Article 149 de la
Constitution du 18 février 2006 de la RDC, Op. cit.
* 570Article 25 de la
proposition de loi portant modalités d'exercice de la liberté de
manifestation en République Démocratique du Congo, dite la loi
SESANGA.
* 571OMEONGA TONGOMO (B.),
Manuel de droit des libertés fondamentales, Op. cit, p. 152.
* 572Article 154 de la
Constitution du 18 février 2006 de la RDC, Op. cit.
* 573 Article 155 de la
Constitution de la RDC, Op. cit.
* 574 En guise d'exemple
les décisions de la Cour constitutionnelle béninoise
prononcée contre l'arrêté n° 8/0056/DEP-LIT/SG/SCAD/SA
du 13 mars 2018 portant suspension de toutes activités relatives
à la sortie des «égoun-goun?? dans le Département du
Littoral (DCC 18-117 du 22 mai 2018, DCC 18-227 du 15 novembre 2018).
* 575Ibidem.
* 576 Article 165 de la
Constitution du 18 février 2006 de la RDC, Op. cit.
* 577POIRMEUR (Y.), Le
Conseil constitutionnel protège-t-il véritablement les droits de
l'homme ?, Op. cit. p. 308.
* 578VILANOVA (P.),
Espagne, trente ans de démocratie : notes pour un bilan,
Pouvoirs, 2008, n° 124, p. 13.
* 579Pour de telles
études « micro-juridiques », v. par ex. : FAVOREU (L.) (Dir.)
et alii, Droit des libertés fondamentales, Op. cit.,
pp. 167-438 ; B. GENEVOIS, La jurisprudence du Conseil constitutionnel.
Principes directeurs, Les éditions S.T.H., Paris, 1988, pp. 207 et
ss. ; F. LUCHAIRE, La protection constitutionnelle des droits et
libertés, Economica, Paris, 1988, pp. 75 et ss. ; J. MIRANDA,
Manual de direito constitucional, tomo IV, direitos fundamentais,
Coimbra Editora, 3ème éd., 2000, pp. 405-542 ; F.J. Enériz
OLAECHEA, La protección de los derechos fundamentales y las
libertades públicas en la Constitución Española,
Op. cit., pp. 191-389 ; L.M. DIEZ-PICAZO, Sistema de derechos
fundamentales, Thomson Civitas, serie derechos fundamentales y libertades
públicas, Madrid, 3ème ed., 2008, pp. 193-542.
* 580 ECHEVERRÍA
(J.), Criminalización de la protesta social, Commission
internationale de juristes (CIJ), 2012, p.3; cité par Protection
International, La Criminalisation des défenseurs des droits de
l'Homme, Catégorisation du phénomène et mesures pour
l'affronter, 2015, p. 4.
* 581 Détails
disponible sur
https://www.protectioninternational.org/sites/default/files/2018-criminalisation-series-DRC-La-Lucha-web.pdf,
consulté le 01 novembre 2018.
* 582 Disponible sur
http://www.cour-constitutionnelle-benin.org/doss_decisions/0308134.pdf,
consulté le 01 novembre 2018 à 14 heures 19'.
* 583 Arrêt 66/1995
du 8 mai 1995.
* 584Arrêt 66/1995 du
8 mai 1995, Op. cit.
* 585 CE, 12 nov. 1997,
Communauté tibétaine en France, n° 169295, Lebon p. 417
(arrêt concernant l'interdiction d'une manifestation d'opposition
à la visite en France du président Chinois) : le Conseil
d'État affirme « que si l'arrêté litigieux
était également motivé par le fait que les manifestations
envisagées pouvaient "porter atteinte aux relations internationales de
la République", un tel motif, qui ne fait pas référence
à des risques de troubles à l'ordre public, n'était pas,
en lui-même, de nature à justifier l'arrêté litigieux
».
* 586 CAA Paris, 7 mars
2000, Syndicat national des officiers de police, n° 97PA00133,
inédit (arrêt concernant l'interdiction d'une manifestation
d'agents de police).
* 587 L'exercice des droits
et libertés fondamentaux dont le droit de manifester comporte une
réglementation et des restrictions dont le non-respect est
pénalement sanctionné.
* 588 La punition est la
« sanction destinée non pas à indemniser la victime, mais
à faire subir au coupable une souffrance dans sa personne ou ses biens
» (CORNU (G.), entrée punition, in Vocabulaire
juridique, op. cit., p. 745). V. DEGOFFE (M.), La sanction à
caractère punitif selon le Conseil constitutionnel, in
MALLET-BRICOUT (Bl.) (dir.), La sanction, Logiques juridiques, Paris,
L'Harmattan, 2007, p. 47.
* 589 MOURGEON (J.), La
répression administrative, Thèse, Droit, LGDJ, Paris, 1967,
p. 21.
* 590L'objectif de la
répression est indéniablement l'exécution d'une
obligation. MOURGEON (J.), La répression administrative,
thèse, droit, LGDJ, Paris, 1967, p. 201.
* 591En droit interne, le
système répressif s'adresse uniquement aux personnes
privées, exception faite de la responsabilité pénale de
certaines collectivités territoriales prévue à l'article
L. 121-2 du code pénal.
* 592Cette expression a
été utilisée par Pierre LASCOUMES, « De la
sanction à l'injonction - le droit pénal administratif, comme
expression du pluralisme des formes juridiques sanctionnatrices »,
RSC, 1988, p. 46). L'expression droit administratif pénal
renvoie quant à elle à la répression administrative
(DELMAS-MARTY (M.) et TEITGEN-COLLY (C.), Punir sans juger ? de la
répression administrative au droit administratif pénal,
Economica, Paris, 1992, p. 7.
* 593 Information
disponible sur
http://codes.droit.org/CodV3/penal.pdf,
consulté le 12 juillet 2019 à 11 heures 56'.
* 594Ibidem.
* 595Cette disposition
énumère des droits variés susceptibles de faire l'objet de
d'interdiction, comme le droit de vote, l'éligibilité, le droit
d'exercer une fonction juridictionnelle ou d'être expert devant une
juridiction, etc.
* 596 Cette disposition
fixe un régime particulier de certaines interdictions.
* 597 Information
disponible sur
http://codes.droit.org/CodV3/penal.pdf,
consulté le 12 juillet 2019 à 12 heures 11'.
* 598Voire article 431-3 et
4, disponible sur
http://codes.droit.org/CodV3/penal.pdf,
consulté le 12 juillet 2019 à 12 heures 50'.
* 599Le Code de
sécurité intérieure français.
* 600 PONCELA (P.),
« La pénalisation des comportements dans l'espace
public », Archives de politique criminelle, 2010/1
numéro 32.
* 601 PONCELA (P.), Op.
cit.p 32.
* 602 FABRE (P), Op.
cit., p. 289.
* 603 PONCELA (P.), Op.
cit p. 33.
* 604Article 60 de la
Constitution du 18 février 2006 en RDC, Op. cit.
* 605 TURPIN (D), Op.
cit, p. 562.
* 606Ibidem, p.
28.
* 607Article 25 de
la loi SESSANGA, Op.cit.
* 608Article 30 de la loi
SESSANGA, Op. cit.
* 609 MFUAMBA LOBO MUENGA
(J.-C.-F.), « De l'aléa du régime juridique de la
liberté de manifestation face aux impératifs du maintien de
l'ordre public en droit public congolais, Cahiers africains des droits de
l'homme et de la démocratie », 23e
année, numéro 062, Volume I, Janvier - Mars 2019, p. 33.
* 610 Cour de Cassation, 5
novembre 1920, Pas., I, 193. Les arrêts de cette Cour étaient de
principe pour les Cours et Tribunaux du Congo Belge et continuent d'ailleurs
à inspirer la jurisprudence congolaise d'après
l'indépendance.
* 611 DE PAGE (H.),
Traité élémentaire du droit civil belge,
Bruxelles, Bruylant, 1964, pp.1112 et s., spéc. n°1059 et
1060 ; - KALONGO MBIKAYI, Resp.civ. et socialisation..., op.
cit., pp. 159 et s., spéc., pp. 167 et s.
* 612 Art. 21 de la loi
SESSANGA, Op. cit.
* 613 Lire la loi du 24
décembre 2015 portant mesures d'application de la liberté de
manifestation, Inédite.
* 614 La jurisprudence a
contribué à éclairer ce cadre légal en jugeant, de
manière constante, qu'un acte perpétré « dans le
cadre d'une action concertée et avec le concours de plusieurs
personnes », ne pouvait pas être considéré comme
ayant été commis par un attroupement ou un rassemblement (TC,
15 janvier 1990, Chamboulive et autre c/Commune de Vallecalle,
n° 02607).
* 615 Art. 22 de la loi
SESSANGA, Op. cit.
* 616 Ainsi, un tel
régime de responsabilité sans faute pour attroupement ne peut
s'appliquer que si le dommage trouve sa source dans « des agissements
plus ou moins spontanés et inorganisés issus de mouvements de
foule. Il ne concerne aucunement des actions comme celle de la présente
espèce, froidement préméditées et soigneusement
mises au point par un petit groupe de personnes, qui constituent en
réalité des opérations de « commando », de
même nature que ces actions criminelles de droit commun couramment
désignées sous le nom de « hold up » (Concl. L.
Charbonnier, sur TC, 15 janvier 1990, Chamboulive et autre c/Commune
de Vallecalle, n° 02607, Rev. Fr. Droit adm. 7 (4),
juillet-août 1991 p. 551).
* 617Aux termes de
l'alinéa 3 de l'article 91 de la Constitution, « le
Gouvernement dispose de l'administration publique, des Forces armées, de
la Police nationale et des services de sécurité ».
* 618 Élis., 14
août 1964, R.J.C., 1965, p. 178, cité par KANGULUMBA
MBAMBI (V.), « Réparation des dommages causés par les
troubles en droit positif congolais. Responsabilité civile des pouvoirs
publics et assurance des risques sociaux (Emeutes, pillages, grèves et
attroupements) », Bruxelles, RDJA, 2000, p. 71.
* 619 Plus récemment
encore, dans l'affaire de la commune de Saint-Lô, la Haute juridiction a
constaté que les dégradations sur la voie publique commises
à l'occasion d'une manifestation présentaient un caractère
organisé et prémédité mais qu'elles avaient
été commises dans le cadre d'une manifestation sur la voie
publique convoquée par plusieurs organisations syndicales à
laquelle avaient participé plusieurs centaines d'agriculteurs. Elle a
jugé que dans la mesure où les dégradations n'ont pas
été commises « par un groupe qui se serait
constitué et organisé à seule fin de commettre des
délits », la responsabilité de l'État pour
attroupement était engagée (Conseil d'État,
7 décembre 2017, Commune de Saint-Lô,
n° 400801; Conseil d'État, 3 octobre 2018, Commune
de Saint-Lô, n° 416352).
* 620 Comme par exemple
l'interception d'un camion transportant de la viande par un groupe d'une
soixantaine de personnes, et le déversement du chargement du camion sur
un parking, arrosé de carburant et rendu impropre à la
consommation, « eu égard notamment au caractère
prémédité de ces actions » (Conseil
d'État, 26 mars 2004, Sté BV Exportslachterij Apeldoorn
ESA, n° 248623).
* 621 Toutefois,
récemment, le Conseil d'État a infléchi sa jurisprudence,
en appliquant ce régime de responsabilité à des
dégradations dont les auteurs avaient utilisé des moyens de
communication ainsi que des cocktails Molotov et des battes de base-ball et
avaient formé des groupes mobiles, conférant ainsi à leur
action un caractère organisé, « dès lors qu'il
ressortait des pièces du dossier qui lui était soumis que cet
incendie avait été provoqué par des personnes qui
étaient au nombre de celles qui s'étaient spontanément
rassemblées, peu de temps auparavant, pour manifester leur
émotion après le décès des deux adolescents »
(C.E., 30 décembre 2016, Société Covea risks,
n° 386536, mentionné dans les tables du recueil Lebon).
* 622 NGONDANKOY
NKOY-ea-LOONGYA (P.-G.), La liberté de manifestation à
l'épreuve des faits,Op. cit., p. 45.
* 623TURPIN (D.),
Libertés publiques et droits fondamentaux, Op. cit., p. 565.
* 624 C.E, sect.,
09.04.1943, Sieur Lafitte.
* 625 C.E, 16 mars 1956,
Epoux Domenech ; sect. 08 juillet 1960, Sieur Petit ; 05 octobre 1960, et al.,
renvoyant au juge judiciaire le contentieux des évènements
survenus au métro Charonne en 1962 ; cité par TURPIN (D.),
Libertés publiques et droits fondamentaux, Op. cit., p. 565.
* 626 Cour Administrative
d'Appel de Nantes, 03.05.1995, Ministère de
l'Intérieur ; CE, avis, 20 février 1998,
Sté Etudes et construction de sièges pour
l'automobile ; CE, 06.12.1999, M. Ouizille.
* 627 Et contrairement
à TC, 07.06.1982, Préfet du Pas-de-Calais c/TGI de
Boulogne-sur-Mer et 13.02.1984, Haut-Commissaire de la République c/CA
Nouméa, niant l'existence d'un lien de causalité assez direct.
* 628 Article 4,
alinéa 2 de la loi SESSANGA, Op. cit..
* 629Article 7Article de la
loi SESSANGA, Op. cit.
* 630Article 10, Idem.
* 631En effet, l'article 8
de la loi organique sous examen prévoit que la Police Nationale peut
recourir à la force en cas de nécessité absolue et
uniquement pour atteindre un objectif légitime. Il revient ainsi aux
agents de la police d'apprécier la nécessité et la
légitimité de l'objectif à atteindre par l'emploi de la
force, notamment des armes à feu. Nous trouvons dangereux et même
imprudent de laisser ce pouvoir d'appréciation à la police dans
un Etat où la culture démocratique peine à connaître
un ancrage réel.
* 632 LÖHRER (D.),
Op. cit.p. 114.
* 633 Art. 111 de la
Constitution espagnole, Op. cit.
* 634 ALONSO de ANTONIO
(J.-A.) et. ALONSO de ANTONIO (Á.-L), Introducción al derecho
parlamentario, Madrid, Dykinson, 2002, p. 206.
* 635 Sur ce point, v.
AVRIL (P.) et GICQUEL (J.), Droit parlementaire, Montchrestien, Domat
droit public, Paris, 4ème éd., 2010, p. 286.
* 636 En France, depuis la
révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, ce droit est
expressément consacré par l'article 51-2 de la Constitution. En
Espagne, il est prévu par l'article 76-1 de la Constitution.
* 637 ALONSO de ANTONIO
(J.-A.) et. ALONSO d'ANTONIO (Á.-L), Op. cit, p. 208.
* 638 KELSEN (H.),
Théorie pure du droit, 2e éd., (1960), trad.
EISENMANN (Ch.), Paris, LGDJ, - Bruylant, 1999, p. 195.
* 639 LEBEN (Ch.),
Entrée « ordre juridique » in ALLAND (D.) et RIALS (St.),
(dir.), Dictionnaire de la culture juridique, Paris, PUF, 2003, p.
1113.
* 640 LEBEN (Ch), Op.
cit., p. 1114.
* 641 BETAILLE (J.),
Op. cit, p. 69.
* 642 BETAILLE (J.),
Op. cit, p. 69.
* 643Idem p.
78.
* 644 Pour Kelsen, «
la norme qui constitue le fondement de la validité d'une autre norme est
par rapport à celle-ci une norme supérieure. Mais il est
impossible que la quête du fondement de la validité d'une norme se
poursuive à l'infini (...). Elle doit nécessairement prendre fin
avec une norme que l'on supposera dernière et suprême »
(KELSEN (H.), Théorie pure du droit, 2e éd.,
(1960), trad. EISENMANN (Ch.), Paris, Bruxelles, LGDJ, Bruylant, 1999, p. 194).
La norme fondamentale n'est pas posée, mais supposée. « En
tant que norme suprême, il est impossible que cette norme soit
posée, elle ne pourrait être posée que par une
autorité, qui devrait tirer sa compétence d'une norme encore
supérieure, elle cesserait donc d'apparaître comme suprême.
La norme suprême ne peut donc être que supposée. Sa
validité ne peut plus être déduite d'une norme
supérieure » (KELSEN (H.), ibidem, p. 194). La «
supposition » de la norme fondamentale a été
critiquée. Paul Amselek explique que « si l'on remonte ainsi les
degrés de la hiérarchie de l'ordre juridique, à un certain
moment on arrive à un échelon dernier au bord du vide »
(AMSELEK (P.), Une fausse idée claire : la hiérarchie des
normes juridiques, in Mélanges en l'honneur de Louis
Favoreu, Renouveau du droit constitutionnel, Dalloz, Paris, 2007, p. 986).
Pour Jacques Chevallier, « il est en effet paradoxal de prétendre
fonder la validité de l'ordre juridique positif, c'est-à-dire son
caractère obligatoire, sur une norme qui n'est qu'"hypothétique"
» (CHEVALLIER (J.), L'ordre juridique, in CHEVALLIER (J.) et al.,
Le droit en procès, PUF, Paris, 1983, p. 18). D'une logique
implacable, le raisonnement de Kelsen trouve ainsi ses limites une fois
arrivé au sommet de la pyramide. En revanche, pour Michel Troper, «
il n'y a (...) rien de surprenant à ce que le théoricien du droit
formule lui-même cette hypothèse » (TROPER (M.), La
pyramide est toujours debout ! Réponse à Paul Amselek,
RDP, 1978, p. 1533).
* 645 KELSEN (H.),
Théorie pure du droit, Op. cit., p. 193.
* 646Idem, p.
200.
* 647 AMSELEK (P.) et
TROPER (M.), (RDP, 1978, p. 5 et 1523) ; AMSELEK (P.s), « Une fausse
idée claire...», Op. cit., p. 983 ; « Kelsen et les
contradictions du positivisme juridique », APD, t. 28, 1983, p.
271.
* 648 CHEVALLIER (J.),
L'ordre juridique, Op. cit., p. 17.
* 649 AMSELEK (P.), «
Réflexions critiques autour de la conception Kelsénienne de
l'ordre juridique », RDP, 1978, p. 13.
* 650 ALBERTON (Gh.),
« De l'indispensable intégration du bloc de conventionalité
au bloc de constitutionnalité », RFDA, 2005, p. 258. Dans
le même sens, SIMON (D.), « De la pyramide Kelsénienne
à un pluralisme juridique ordonné ? », Europe, mai
2008, p. 2.
* 651 Sur la
hiérarchie des normes, v. QUERMONNE (J.-L.), L'évolution de
la hiérarchie des actes juridiques en droit public français,
thèse, droit, Caen, 1952 ; LACHAUME (J.-Fr.), La hiérarchie
des actes administratifs exécutoires en droit public
français, thèse, droit, LGDJ, 1966 ; DE BECHILLON (D.),
Hiérarchie des normes et hiérarchie des fonctions normatives
de l'Etat, thèse de droit, Economica, 1999.
* 652 PAOUR (P.), Les
contraintes juridiques de la hiérarchie des normes, Revus [Online],
21 | 2013, Online since 25 February 2014, connection on 11 october 2018. URL :
http://journals.openedition.org/revus/2755 ; DOI : 10.4000/revus.2755.
* 653ODIMULA LOFUNGUSO
(L.), La justice constitutionnelle et la juridicisation de la vie politique
en droit positif congolais, Paris, L'Harmattan, RDC, 2016, pp. 73-74.
* 654 ODIKO LOKANGAKA
(Ch.), La systématisation du droit de manifester dans l'espace
public en République Démocratique du Congo, in Cahiers
africains des Droits de l'Homme et de la démocratie, 23e
année, numéro 062, Volume I, Janvier - Mars 2019, p. 44.
* 655ODIMULA LOFUNGUSO
(L.), La justice constitutionnelle et la juridicisation de la vie politique
en droit positif congolais, Op. cit, p. 74
* 656Articles 6 et 11
à 61 de Constitution du 18 février 2006 de la RDC, Op.
cit.
* 657 Article 122 point 1
de la Constitution du 18 février 2006 de la RDC, Op. cit.
* 658 Il en est par exemple
de l'autonomisation de certaines libertés dont la liberté de
manifestation, de l'élimination des limitations constitutionnelles
relativement à cette liberté, etc.
* 659 MBATA MANGU (A.),
Perspectives du Constitutionnalisme et de la démocratie en
République Démocratique du Congo sous l'empire de la Constitution
du 18 février 2006, in Mélanges à l'honneur de
Marcel Antoine LIHAU, Bruxelles-Kinshasa, Bruylant - P.U.K., 2006, p. 203.
* 660Idem, p.
204.
* 661 En septembre 2016,
deux réunions étaient organisées en termes de
préparatifs aux manifestations convoquées par l'opposition. La
première a eu lieu à l'Hôtel de Ville et la deuxième
au siège des FONUS, un parti d'opposition.
* 662 SIERRA CADENA, La
liberté de manifestation dans l'espace public
latino-américain : la dimension historico-constitutionnelle,
Op. cit., p. 2.
* 663NGONDANKOY
NKOY-ea-LOONGYA (P.-G.), La liberté de manifestation à
l'épreuve des faits, Op. cit, p. 72.
* 664 Aux termes de cette
disposition, « Le Président de la République promulgue
la loi dans les quinze jours de sa transmission après l'expiration des
délais prévus par les articles 136 et 137 de la Constitution. Ces
articles prévoient les délais de 6 jours à dater de
l'adoption pour la transmission au Président de la République
d'une loi adoptée, et de 15 jours pour la promulgation ou,
éventuellement, pour le renvoi du texte à promulguer aux fins
d'une seconde délibération. En l'espèce, le texte sera
renvoyé à l'Assemblée nationale par Président de la
République plus d'une année après que le lui ait transmis
pour promulgation.
* 665NGONDANKOY
NKOY-ea-LOONGYA (P.-G.), La liberté de manifestation à
l'épreuve des faits, Op. cit, p. 72.
* 666 ANDRIEUX (T.),
cité in FENET (P.-A.), Recueil complet des travaux
préparatoires du Code civil, T. 6, Paris, éditions au
Dépôt Rue Saint-André-des-Arcs, 1827, p. 232.
* 667L'alinéa 4 de
l'article 40 de l'Acte constitutionnel de la transition du 9 avril 1994 dispose
que « Le Président de la République le promulgue dans
les délais définis ci-dessus. A défaut, la loi est
promulguée par le Président du Haut Conseil de la
République-Parlement de Transition ».
* 668 DUCROCQ (Th.), De
la formule actuelle de promulgation des lois, Revue
générale du droit, 1877, p. 6 ; THORIN (E.), Cours
de droit administratif, T. 1, Paris, 1881, p. 18, n° 21.
* 669 BOTTINI (F.), La
promulgation des lois parlementaires, in Revue française de
droit constitutionnel, 2008/4 (n° 76), pp. 761-784.
* 670VERDUSSEN (M.) et
alii, Les droits fondamentaux en droit constitutionnel comparé,
in (dir) DUMONT (H.) et alii, La responsabilité, face cachée
des droits de l'homme, Bruxelles, Bruylant, 2005, pp. 270-271. Pour autant
que de besoin, l'art. 14 de la Constitution estonienne dispose que
« le respect des droits et des libertés est un devoir des
pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, ainsi que des
autorités locales.
* 671 Texte disponible sur
https://www.dekamer.be/kvvcr/pdf_sections/publications/constitution/grondwetFR.pdf,
consulté le 19 septembre 2018 à 10 heures 17'.
* 672 RIVERO (J.),
Rapport de synthèse », in Cours
constitutionnelles européennes et droits fondamentaux, Actes du
IIe Colloque d'Aix-en-Provence (19-21 février 1981), Paris -
Aix-en-Provence, Economica - P.U.A.M., 1982, p. 523.
* 673 Disponible sur
https://www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/19995395/201801010000/101.pdf,
consulté le 19 septembre 2018 à 11 heures 34'.
* 674NGONDANKOY
NKOY-ea-LOONGYA (P.-G.), « La liberté de manifestation
à l'épreuve des faits », op. cit, p. 72.
* 675Idem,p.
73.
* 676 À l'article
21, le constituant indique que le droit de former recours est exercé
dans les conditions fixées par la loi. Le dernier alinéa de
l'article 22 est libellé « La loi fixe les modalités
d'exercice de ces libertés ». Il en est de même
à l'alinéa 3 de l'article 24.
* 677Article 122, point 1
de la Constitution du 18 février 2006 de la RDCOp. cit.
* 678 Dans sa
Décision du 17 janvier 2008, 2007-561 DC, cons. n° 17, le Conseil
constitutionnel français a considéré que, l'emploi du
présent de l'indicatif ayant valeur impérative, la substitution
du présent de l'indicatif à une rédaction formulée
en termes d'obligation ne retire pas aux dispositions du nouveau code du
travail leur caractère impératif ».
* 679 YATALA NSOMWE NTAMBWE
(C.), L'inconstitutionnalité du « déni de
législation » en droit congolais, in
https://www.droitcongolais.info/files/DENI-LEGISLATION-_3_.pdf,
consulté le 19 septembre 2018 à 11 heures 54'.
* 680 Information
disponible sur
https://www.dictionnaire-juridique.com/definition/deni-de-justice.php,
consulté le 13 avril 2019 à 10heures 57.
* 681Ce qui est de nature
à exclure les cas où la juridiction se serait
déclarée incompétente sur base de la loi, avant que le
conflit de compétence ne soit arbitré.
* 682 L'article 14 du Pacte
international relatif aux droits civils et politiques de 1966, l'article 10 de
la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme du 10 décembre
1948, l'article 6 de la Convention européenne des droits de
l'homme et 7 de la Charte africaine des Droits de l'Homme et des
Peuples.
* 683Article 19,
alinéa 2 de la Constitution du 18 février 2006 de la RDC, Op.
cit.
* 684Il en est par exemple
de la liberté de circulation ou du droit à la vie.
* 685 HENRY-MENGUY (Br.),
L'obligation de légiférer en France - La sanction de
l'omission législative par le Conseil constitutionnel,
thèse, droit, Toulouse, 2008, p. 242.
* 686Idem, p.
246.
* 687 GALLETTI (Fl.),
« Existe-t-il une obligation de bien légiférer ? Propos
sur « l'incompétence négative du législateur »
dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel Propos sur «
L'incompétence négative du législateur, dans la
jurisprudence du Conseil constitutionnel », Revue
française de droit constitutionnel, Presses Universitaires de
France, 2004/2, n° 58, pages 387 à 417.
* 688Idem.
* 689Ibidem.
* 690 EMERI (Cl.),
Gouvernement des juges ou veto des sages, RDP, 1990, p. 335.
* 691 BLACHER (Ph.),
Contrôle de constitutionnalité et volonté
générale, Paris, PUF, 2001, p. 168, rappelant la position de
ROUSSEAU (D.), « De la démocratie continue », in La
démocratie continue, Bruxelles, Paris, Bruylant-LGDJ, 1995, p.
22 ; BIDEGARAY (Ch.), EMERI (Cl.), Du pouvoir d'empêcher : veto
ou contre-pouvoir, RDP., 1994, pp. 325-352.
* 692 Disponible sur
https://www.wipo.int/edocs/lexdocs/laws/fr/pt/pt045fr.pdf,
consulté le 19 septembre 2018 à 12 heures 59'.
* 693MOREIRA (V.),
« Le Tribunal constitutionnel portugais : le « contrôle
concret » dans le cadre d'un système mixte de justice
constitutionnelle », CCC, n° 10, 2001.
* 694TAMÁS BAN,
Présentation de la Cour constitutionnelle de Hongrie,
CCC, n° 13, 2003. En outre, « la Cour constitutionnelle a
interprété dans plusieurs décisions la constatation de
l'inconstitutionnalité en manquement. Ainsi,
l'inconstitutionnalité en manquement peut-elle être
constatée par la Cour constitutionnelle non seulement au cas où
malgré l'invitation expresse de la Constitution, une certaine loi n'est
pas adoptée, mais même en l'absence d'une telle obligation si
toutes les garanties ne sont pas données pour le respect des droits
fondamentaux ».
* 695 Disponible sur
https://www.wipo.int/edocs/lexdocs/laws/fr/br/br117fr.pdf,
consulté le 19 septembre 2018 à 13 heures 01'.
* 696 FERREIRA MENDES (G.),
Questions au président du Tribunal fédéral
suprême de la République fédérale du
Brésil, CCC, n° 26, 2009.
* 697 BON (P.), La
question d'inconstitutionnalité en Espagne, Pouvoirs,
n° 137, 2011, p. 132.
* 698 BETAILLE (J.),
op. cit, p. 281.
* 699BETAILLE (J.), op.
cit, p. 281.
* 700 De J SIERRA CADENA
(Gr.), La liberté de manifestation dans l'espace public
latino-américain (II) : la dimension
juridico-constitutionnelle comparée (Argentine, Colombie, Venezueala et
Cour interaméricaine des droits de l'Homme), in DUFFY-MEUNIER (A.) et
PERROUD (Th.), (dir), Op. cit, p. 76.
* 701 NGONDANKOY
KOY-ea-LOONGYA (P.-G.), La liberté de manifestation en droit positif
congolais, Op. cit, p. 8.
* 702 OTTAVIO QUIRICO,
Le contrôle de constitutionnalité français dans le
contexte européen et international : Une question de
priorités, in European journal of legal studies - vol 3
issue 1 (2010),p. 77.
* 703 WACHSMANN (P.),
Op. cit, p. 98.
* 704Il est loisible de
signaler en passant que la frontière entre le monisme et le dualisme
s'avère quelque peu poreuse et la cloison n'est pas
étanche : en effet, de plus en plus les systèmes dualistes
connaissent l'applicabilité directe d'une certaines catégories
des normes conventionnelles alors qu'à l'opposé certains
traités internationaux et organisations internationales prévoient
que les États partie - pourtant appliquant le monisme - intègrent
les actes qu'ils édictent dans leur ordonnancement juridique moyennant
l'adoption des lois de mise en oeuvre.
* 705Article 217 de la
Constitution du 18 février 2006 de la RDC, Op. cit., Soutient
que « La République Démocratique du Congo peut conclure
des traités ou des accords d'association ou de communauté
comportant un abandon partiel de souveraineté en vue de promouvoir
l'unité africaine ».
* 706 Disponible sur
https://leportail.info/2019/08/22/decision-dcc-19-27-la-cour-constitutionnelle-rehabilite-le-magistrat-gbenameto/,
consulté le 20 septembre 2018 à 11 heures 25.
* 707 PETERS (A.) et LEY
(I.), (dir.), The Freedom of Peaceful Assembly in Europe,
Baden-Baden/Oxford, Nomos/Hart Publishing, 2016, p. 9.
* 708 ANDRIANTSIMBAZOVINA
(J.) et alii, Dictionnaire des Droits de l'Homme, Paris, PUF, 2008, p.
633.
* 709 Déclaration
universelle des droits de l'Homme, Paris, 10 décembre 1948,
Résolution de l'Assemblée Générale de l'ONU 217A
(III), U.N. Doc A/810 à 71 (1948).
* 710 Pacte international
relatif aux droits civils et politiques », RTNU, New York, 16
décembre 1966, vol. 999, p. 187.
* 711 Voir notamment, sur
la question de la classification des Droits de l'Homme, BIRBOSIA (E.) et
HENNEBEL (L.), (dir.), Classer les droits de l'Homme, Bruxelles,
Bruylant, 2004, p. 398, cité par FERRERO (J.), Op. cit.
* 712Convention
américaine relative aux droits de l'homme, RTAI, San
José, 22 novembre 1969, vol. 1144, p. 123.
* 713Charte des Droits
Fondamentaux de l'Union européenne », Journal officiel des
Communautés européennes, 30 mars 2010, C 83/239.
* 714Charte africaine des
Droits de l'Homme et des Peuples », RTNU, Nairobi, 26 juin 1981,
vol. 1520, p. 217.
* 715 Convention
internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination
raciale, RTNU, New York, 4 janvier 1969, vol. 660, p. 195.
* 716 Convention relative
aux droits de l'enfant, RTNU, New York, 20 novembre 1989, vol. 1577,
p. 3.
* 717 Déclaration
sur le droit et la responsabilitéì des individus, groupes et
organes de la société de promouvoir et protéger les droits
de l'homme et les libertés fondamentales universellement reconnus, 8
mars 1999, A/RES/53/144.
* 718 KALONGO
MBIKAYI, « Délits de presse et régimes de
responsabilité », Revue de droit congolais,
juillet-août septembre, Kinshasa, CRDJ, 1999, p. 39.
* 719 ODIMULA LOFUNGUSO
(L.), La justice constitutionnelle et la juridicisation de la vie politique
en droit positif congolais, Op. cit., p. 74.
* 720 KELSEN (H.),
Théorie pure du droit, 2ème éd., (1960), trad.
Ch. Eisenmann, Paris, Bruxelles, LGDJ Bruylant, 1999, p. 193.
* 721 Pour ARNAUD (A.-J.),
Critique de la raison juridique I. Où va la sociologie du
droit?, L.G.D.J., 1981, p.21), les concepts d'ordre et de système
ne sont pas substituables et constituent deux niveaux différents
d'approche du phénomène juridique : en parlant de
« système », on met l'accent sur le principe de
cohésion, la « raison juridique », alors que la
notion d' « ordre » implique la « conception
hiérarchique de la conformité à une même norme
fondamentale ». Cette distinction n'apparaît pas convaincante
dans la mesure où tout système quel qu'il soit est
caractérisé par un élément
d' « ordre » et par un principe d'agencement de ses
éléments constitutifs.
* 722 CHEVALLIER (J.),
L'ordre juridique, in Jacques CHEVALLIER et al., Le droit en
procès, Paris, PUF, 1983, p. 18.
* 723BETAILLE (J.), Op.
cit, p. 69.
* 724BETAILLE (J.), Op.
cit., p. 22.
* 725 CHEVALIER (J.),
Op. cit, p. 23.
* 726 KELSEN (H.),
Théorie pure du droit, Op. cit., p. 193, cité
par BETAILLE (J.), Op. cit., p. 70.
* 727 BETAILLE (J.),
Op. cit, p. 69.
* 728 MARTY (G.) et RAYNAUD
(P.), Introduction à l'étude du droit, 2e
éd., Dalloz, 1972, n° 34.
* 729 Comme l'explique
Denys de Béchillon, « Une norme juridique ne cesse pas d'être
juridique lorsqu'elle n'est pas respectée. Le crime n'abroge pas le code
pénal ». Dans le cas contraire, cela reviendrait à affirmer
que « l'effectivité de ladite règle conditionne directement
sa juridicité » (De BECHILLON (D.), Qu'est-ce qu'une
règle de droit ?, Odile Jacob, 1997, Paris, p. 61). Dans le
même sens, v. VIRALLY (M.), La pensée juridique, 1960,
Ed. Panthéon Assas, LGDJ, 1998, p. 68 ; MAMPUYA KANUNK'a-TSHIABO
(A.), Kinshasa, MEDIASPAUL, 2016, p. 138. Un autre écueil consiste
à définir la sanction par la contrainte. Or, la sanction est
avant tout une obligation juridique et ne se concrétise pas
nécessairement par la contrainte. Ainsi, « la sanction n'est pas
l'usage de la force, mais une obligation juridique qui naît d'une
obligation violée ou non exécutée » (LAQUIEZE (A.),
entrée « sanction », in ALLAND (D.) et RIALS (S.)(dir.),
Dictionnaire de la culture juridique, Paris, PUF, 2003, p. 1383). La
contrainte ne saurait dès lors définir la sanction. (V. VIRALLY
(M.), La pensée juridique, 1960,op. cit., p. 70 ; De
BECHILLON (D.), Qu'est-ce qu'une règle de droit ?, Op.
cit., p. 68. Philippe Jestaz distingue quant à lui la contrainte du
« tarif », entendu comme la sanction au sens large (JESTAZ (Ph.),
La sanction ou l'inconnue du droit, Paris, Dalloz, 1986, p. 197).
* 730 Selon Hart, les
normes primaires « prescrivent à des êtres humains
d'accomplir ou de s'abstenir de certains comportements » (H.L.A. HART,
Le concept de droit, Publications des Facultés Universitaires
Saint Louis, Bruxelles, 1976, p. 105).
* 731 BOBBIO (N.),
Nouvelles réflexions sur les normes primaires et secondaires,
1968, in Essais de théorie du droit, Bruylant LGDJ, Paris,
1998, p. 169. L'auteur décrit les sociétés primitives
comme un système simple, établissant des normes primaires sans
les assortir de sanctions juridiques.
* 732 VIRALLY (M.), La
pensée juridique, Op. cit., p. 68.
* 733 BARRIERE (L.-A.),
« Propos introductifs », in MALLET-BRICOUT (B.) (dir.), La
sanction, L'Harmattan, Paris, 2007, p. 13.
* 734 De BECHILLON (D.),
Qu'est-ce qu'une règle de droit ?, Op. cit., p. 61.
* 735 Cette
définition se rapproche d'autres définitions proposées en
doctrine. Gérard Cornu considère qu'au sens large, la sanction
est « toute mesure - même réparatrice - justifiée par
la violation d'une obligation ». Dans un sens plus large encore, il s'agit
de « tout moyen destiné à assurer le respect et
l'exécution effective d'un droit ou d'une obligation », CORNU (G.),
entrée « sanction », in Vocabulaire juridique, op.
cit., p. 845).
* 736 La punition est la
« sanction destinée non pas à indemniser la victime, mais
à faire subir au coupable une souffrance dans sa personne ou ses biens
», CORNU (G.), entrée « punition », in Vocabulaire
juridique, op. cit., p. 745). V. Michel DEGOFFE, La sanction à
caractère punitif selon le Conseil constitutionnel, in
MALLET-BRICOUT (Bl.) (dir.), Lasanction, Paris, L'Harmattan, 2007, p.
47.
* 737 MOURGEON (J.), La
répression administrative, thèse, droit, Paris, LGDJ, 1967,
p. 21.
* 738 CORNU (G.),
Entrée « responsabilité, in Vocabulaire
juridique, Op. cit., p. 821.
* 739 DUPUY (P.-M.),
Entrée « responsabilité, in ALLAND (D.) et RIALS
(S.) (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, op. cit.,
p. 1342.
* 740 Un régime de
responsabilité fondé sur la violation d'une norme, laquelle est
en général considérée comme une faute, a pour
conséquence d'alourdir les conséquences de cette violation et
contribue ainsi à sanctionner l'auteur de la violation. En revanche, la
responsabilité sans faute n'est pas, sur le plan juridique, lié
à la violation d'une norme. La seule norme dont ce régime
renforce l'effectivité est celle qui prescrit que tout dommage doit
être réparé. Au-delà de cela, la
responsabilité pour faute, du moins lorsque cette faute est
constituée par la violation d'une norme, contribue, en alourdissant les
conséquences de cette violation, à dissuader les destinataires de
la norme de la violer. Ainsi, la responsabilité contribue au respect de
la norme et donc, en principe, à son effectivité.
* 741 POUYAUD (D.),
Entrée « nullité », in ALLAND (D.) et
Stéphane RIALS (sous la dir.), Dictionnaire de la culture
juridique, Op. cit., p. 1088, cité par BETAILLE (J.),
Op. cit, p. 169.
* 742 BETAILLE (J.),
Op. cit, p. 169.
* 743BECCARIA (C.), Des
délits et des peines, traduit de l'italien par COLLIN de PLANCY,
Paris, Éditions du Boucher, 2002, p. 11. Pour cet auteur, les principes
fondamentaux du droit de punir sont à retrouver dans le coeur humain.
* 744 CHEVALLIER (J.),
L'obligation en droit public, APD, t. 44, 2000, p. 183.
* 745 TERRE (Fr.),
Introduction générale au droit, 9e éd.,
Précis, Dalloz, 2012, p. 95, BETAILLE (J.), Op. cit, p. 169.
* 746 NYABIRUNGU mwene
SONGA (R.), Traité de droit pénal général
congolais, 2e éd, Kinshasa, EUA, 2007, p. 252.
* 747 BETAILLE (J.),
Op. cit, p. 321.
* 748Ibidem.
* 749 OST (Fr.) et VAN DE
KERCHOVE (M.), De la pyramide au réseau - pour une théorie
dialectique du droit, Publ. Des Facultés universitaires de Saint
Louis, 2002, p. 221.
* 750 CUBERTAFOND (B.),
La création du droit, Paris, Ellipses, 1999, pp. 102-103.
* 751 BETAILLE (J.),
Op. cit, p. 321.
* 752 BETAILLE (J.),
Op. cit, p. 321.
* 753OMEONGA TONGOMO (B.),
Le contrôle juridictionnel de l'administration et l'État de
droit, Thèse,Op. cit., p. 370.
* 754Lire en ce sens
l'article 150 de la Constitution congolaise du 18 février 2006 de la
RDC, Op. cit.
* 755Ceci résulte de
l'interprétation de l'article 49 in fine de la Loi organique
n°13/026 du 15 octobre 2003 portant organisation et fonctionnement de la
Cour constitutionnelle et de l'article 168, alinéa 2 de la Constitution
du 18 février 2006, déjà citée.
* 756 FERNANDA MAÇS
(M.), As formas de tutale urgente previstas no código de processo
nos tribunais administrativos, in A reforma da justiça
administrativa, Coimbra editora, Boletim da Faculdade de direito,
Universidade de Coimbra, 2005, p. 211.
* 757 C'est par exemple le
cas de la procédure de sursis à exécution. Cette voie de
recours permet de protéger les droits fondamentaux dès lors que
l'acte administratif dont l'exécution est suspendue porte atteinte
à un droit ou une liberté de valeur supralégislative. Mais
ceci demeure une fonction secondaire. Pour une approche concrète de
cette problématique, le lecteur pourra se référer à
la thèse de Pierre Cambot à travers laquelle l'auteur
démontre dans quelle mesure le mécanisme du sursis à
exécution participe à la protection d'un droit fondamental
déterminé : la liberté individuelle (La protection
constitutionnelle de la liberté individuelle en France et en
Espagne, Economica, P.U.A.M., coll. droit public positif, Paris, 1998, pp.
437 et ss).
* 758 En Espagne, elle est
consacrée par l'article 17-4 du texte constitutionnel.
* 759 GARCÍA MORILLO
(J.), La protección de los derechos fundamentales, Op.
cit., p. 44.
* 760 BON (P.), Les
droits et libertés en Espagne. Eléments pour une théorie
générale, Op. cit., p. 66.
* 761 En somme, les
libertés protégés dans le cadre de la procédure
sommaire et prioritaire sont les mêmes que celles couvertes par le
recours d'amparo constitutionnel, exception faite de l'objection de
conscience qui peut seulement être invoquée en matière
d'amparo constitutionnel.
* 762 Régime
transitoire lié à l'absence de loi organique développant
la procédure spéciale prévue par l'article 53-2 de la
Constitution et conduisant la loi organique du 3 octobre 1979 relative au
Tribunal constitutionnel à affirmer que, tant que ne seront pas
développées les dispositions de l'article 53-2, la
procédure sommaire et prioritaire fonctionnera sur la base de la loi du
26 décembre 1978 relative à la protection des droits fondamentaux
de la personne. BON (P.), « La protection constitutionnelle des droits
fondamentaux : aspects de droit comparé européen », op.
cit., p. 257).
* 763 Loi n° 62-1978
du 26 décembre 1978, B.O.E. du 3 janvier 1979, p. 76.
* 764 Loi n° 29-1998
du 13 juillet 1998, B.O.E. du 15 août 1979, p. 25.
* 765 ENÉRIZ
OLAECHEA (F.-J.), La protección de los derechos fundamentales y las
libertades públicas en la Constitución Española,
Op. cit., pp. 421-422 ; MARTÍN REBOLLO (L.), Nueve puntos
sobre el procedimiento de protección de los derechos fundamentales en la
nueva Ley de la jurisdicción contencioso-administrativa, in
MONTORO CHINER (M.-J.) (Coord.), La justicia administrativa. Libro
homenaje al Prof. Dr. D. Rafael Entretena Cuesta, Atelier, Barcelona,
2003, pp. 279-289.
* 766 Loi constitutionnelle
n° 1-97 du 20 septembre 1997, D.R. série I du 20 septembre
1997, p. 5130.
* 767 Art. 6 de la loi
n° 2000-597 du 30 juin 2000 relative au référé devant
les juridictions administratives, J.O. du 1 juillet 2000, p. 9948.
* 768 Pour une approche
approfondie du mécanisme de référé liberté
fondamentale, le lecteur pourra utilement se référer à :
« Rapport du groupe de travail du Conseil d'Etat sur les procédures
d'urgence », R.F.D.A., 2000, p. 941 ; BACHELIER (G.), Le
référé-liberté, R.F.D.A., 2002, p.
261.
* 769 T.C., 8 avril 1935,
Action française, Rec. p. 1226.
* 770La voie de fait est
« constituée en cas d'atteinte grave à une
liberté ou à la propriété privée, soit
lorsqu'une décision administrative est manifestement insusceptible de se
rattacher au pouvoir de l'administration, soit en cas d'exécution
forcée d'une décision, même légale, lorsque
l'administration n'a manifestement pas le pouvoir d'y procéder »
(CANIVET (G.), « Protection juridictionnelle des libertés et
droits fondamentaux par le juge judiciaire », in RENOUX (T.-S.),
Protection des libertés et droits fondamentaux, La Doc. fr.,
Les notices, Paris, 2007, pp. 52-53).
* 771 REDOR (M.-J.),
Garantie juridictionnelle et droits fondamentaux, Op. cit, p.
95.
* 772 V. par ex. : C.E., 15
février 2002, Hadda, Rec. p. 45.
* 773 Sur ces questions, v.
BROYELLE (C.), Les mesures ordonnées en
référé, R.F.D.A., 2007, p. 73.
* 774 Formellement car,
comme le soulignent bon nombre d'auteurs, le système de contrôle
concret de la constitutionnalité des lois mis en place au Portugal
permet d'atteindre une protection semblable à celle obtenue dans le
cadre du recours d'amparo, dans la mesure où les individus
peuvent former un recours devant le Tribunal constitutionnel contre les
décisions juridictionnelles appliquant une loi inconstitutionnelle (v.
par. ex. : CARDOSO DA COSTA (M.), « La Cour constitutionnelle portugaise
face à une Constitution en changement », in Mélanges en
l'honneur de Louis Favoreu, Renouveau du droit constitutionnel, op.
cit., p. 79 ; J. Casalta Nabais, Les droits fondamentaux dans la
jurisprudence du Tribunal constitutionnel, in BON (P.) et
alii, La justice constitutionnelle au Portugal, Op.
cit., p. 215.
* 775 Sans prétendre
à aucune exhaustivité, le lecteur pourra utilement se
référer à : ALEGRE ÁVILA (J.M.), El amparo
constitucional : un asunto de nunca acabar ?, in REBOLLO (L.-M.)
(Dir.), Derechos fundamentales y otros estudios en homenaje al Prof. Dr.
Lorenzo Martín-Retordillo, vol. II, op. cit., p. 343 ; ARAULO
(J.-O.), El recurso de amparo en el ultimo proceso constituyente
espanol, R.C.G., 1998, p. 165 ; BON (P.), Amparo (recours
d'), in ANDRIANTSIMBAZOVINA (J.) (Dir.) et alii, Dictionnaire
des droits de l'homme, P.U.F., 2008, p. 31.
* 776
Catherine-Amélie Chassin précise à cet égard que
« les fueros de l'Aragon, c'est-à-dire, en quelque sorte, le
régime juridique qui était applicable dans ce pays, instituaient
un recours que l'on peut rapprocher de l'amparo constitutionnel de l'Espagne
contemporaine ». Pour une étude détaillée, v.
FAIRÉN GUILLÉN (V), Antecedentes aragones de los juicios de
amparo, Mexico, 1971. Il importe toutefois de préciser avec le
professeur Pierre Bon que « c'est avant tout dans les pays
ibéro-américains que l'institution va se développer, du
moins dans les textes : c'est ainsi que le recours d'amparo apparaît au
Mexique dès la Constitution fédérale de 1857 et est
ensuite introduit en Argentine, en Bolivie, au Chili, au Costa Rica, au Panama
et au Venezuela [...]. La Constitution espagnole de 1978 permet de boucler la
boucle en ce sens qu'elle réintroduit en Espagne une institution qui y
était née mais qui s'était surtout
développée outre Atlantique ».
* 388« Tout
citoyen pourra invoquer la protection des libertés et droits reconnus
par l'article 14 et la section 1 du chapitre deuxième [...] à
travers le recours d'amparo devant le Tribunal constitutionnel. Ce dernier
recours sera applicable à l'objection de conscience ». Sachant
que le recours d'amparo est précisé quant à ses
modalités d'exercice, d'une part, par les articles 161-1, b et 162-1, b
de la norme suprême, d'autre part, par les articles 41 à 58 de la
loi organique portant sur le Tribunal constitutionnel.
* 777 L'article 41-3 de la
L.O.T.C. précise en effet que « dans le cadre de l'amparo
constitutionnel, on ne peut faire valoir d'autres prétentions que celles
qui visent à rétablir ou à préserver les droits et
les libertés pour lesquels ce recours a été intenté
».
* 778 STC 1/1981 du 26
janvier 1981, B.O.E. du 24 février 1981.
* 779 Loi organique n°
6/2007 du 24 mai 2007, B.O.E. du 25 mai 2007, p. 22541, Op.
cit.
* 780 L'objection de
conscience est prévue par l'article 30 de la Constitution espagnole,
Op. cit.
* 781 Sachant que le
Tribunal constitutionnel est régulièrement amené à
déterminer si le droit dont la violation est alléguée
constitue bien un droit fondamental au sens de l'article 53-2 de la
Constitution (sur ce point, v. C.-A. Chassin, « La protection
juridictionnelle des droits fondamentaux à travers le recours
d'amparo constitutionnel en Espagne », op. cit., pp.
41-42). Par ailleurs, il est intéressant de noter que les deux
principaux droits fondamentaux dont la méconnaissance est la plus
souvent évoquée sont, d'une part, le principe
d'égalité (16,11 %) des recours d'amparo pour
l'année 2009, d'autre part, et surtout, le droit à un recours
juridictionnel effectif (87,90 % des recours d'amparo introduits en
2009).
* 782 Art. 42 de la
L.O.T.C, cité par ALCARAZ (H.) et LECUCQ (O.), La liberté de
manifestation dans l'espace public en Espagne, in PERROUD (Th.) et
alii, La liberté de manifester et ses limites: perspective de
droit comparé, France, 11, 2017, La Revue des Droits de l'Homme,
https://revdh.revues.org/2956.
,p. 67.
* 783 Art. 43-1 de la
L.O.T.C.
* 784 Art. 44-1 de la
L.O.T.C.
* 785 L'exclusion des actes
des personnes privées du champ d'application de l'amparo
constitutionnel résulte de l'article 41-2 de la L.O.T.C., lequel
prévoit que le recours d'amparo protège les droits et
libertés contre les violations « [...] provenant de
dispositions, actes juridiques, omissions ou simple voie de fait des pouvoirs
publics, des Communautés Autonomes et des autres entités
publiques de caractère territorial, corporatif ou institutionnel, ainsi
que de leurs fonctionnaires ou agents ».
* 786 Il importe toutefois
de préciser qu'il existe une nuance de taille pour chacune de ces deux
hypothèses. Tout d'abord, il est possible de garantir les effets
horizontaux des droits fondamentaux « par le biais de recours d'amparo
contre les décisions de justice ne protégeant pas les droits
fondamentaux des particuliers contre les menaces émanant d'autres
particuliers » (BON (P.),Présentation du Tribunal
constitutionnel espagnol, Cahiers du Conseil constitutionnel,
1996, n° 2, p. 49. Pour étayer ses propos, Pierre Bon propose
l'exemple d'un employé licencié par le chef d'entreprise à
raison de ses activités syndicales : « Si l'employé
estime qu'il a été porté atteinte à son droit
syndical, il saisira le juge ordinaire ; si ce dernier lui donne raison, il n'y
a aucun problème ; si, à l'inverse, il le déboute, son
jugement porte, à son tour, atteinte au droit syndical de
l'employé ; on a alors affaire à un acte de la puissance publique
qui lèse un droit fondamental et contre lequel il est possible
d'intenter un recours d'amparo devant le juge constitutionnel ; si le juge
constitutionnel considère qu'il y a eu effectivement violation du droit
syndical, il annulera à la fois le jugement rendu par le juge ordinaire
et ne donnant pas satisfaction au requérant et la mesure de licenciement
prise à son encontre par l'employeur »). Ensuite, «
si l'acte déféré par les citoyens à la juridiction
constitutionnelle paraît à cette dernière inconstitutionnel
parce que pris en application d'une loi inconstitutionnelle, il est possible
à la juridiction constitutionnelle de se saisir elle-même de la
loi aux fins d'un examen de sa constitutionnalité » (BON (P.),
in BON (P.) et alii, La justice constitutionnelle au
Portugal, Op. cit., p. 83). On se trouve alors en présence
de ce que la doctrine a désormais coutume d'appeler une «
auto-question d'inconstitutionnalité » (v. par. ex. : BON
(P.), « Le Tribunal constitutionnel. Etude d'ensemble », op.
cit., pp. 92 et 125.
* 787 Si l'article 41.2 de
la L.O.T.C. semble exclure du champ d'application du recours les
étrangers (« le recours d'amparo protège tous les
citoyens »), la jurisprudence du Tribunal constitutionnel admet la
recevabilité des recours déposés par les non-nationaux
(STC 141/1998 du 29 juin 1998, B.O.E. du 30 juillet 1998, FJ 1).
* 788 CHASSIN (C.-A.),
La protection juridictionnelle des droits fondamentaux à travers le
recours d'amparo constitutionnel en Espagne, Op. cit., p. 39.
* 789L'article 43-1 de la
L.O.T.C. prévoit en ce sens que les violations des droits fondamentaux
ne peuvent donner lieu à un recours d'amparo qu' « une
fois la voie judiciaire pertinente épuisée ». C'est
pourquoi le Tribunal constitutionnel a logiquement jugé que l'exercice
préalable des voies ordinaire « n'est pas une simple
formalité, mais constitue un élément essentiel du
système d'articulation des juridictions constitutionnelles et ordinaires
» (STC 239/2001 du 18 décembre 2001, B.O.E. du 16
janvier 2002, FJ 2), dont le non-respect implique l'irrecevabilité du
recours en raison de son caractère prématuré (v. en ce
sens : STC 54/1999 du 12 avril 1999, B.O.E. du 18 mai 1999, FJ 2).
Surtout, le Tribunal constitutionnel a précisé que l'amparo
ne saurait être déclaré recevable s'il existe, au
moment de la saisine du Tribunal constitutionnel, un recours pendant devant une
juridiction ordinaire (STC 225/2000 du 2 octobre 2000, B.O.E. du 7
novembre 2000, FJ 3).
* 790 A ce titre, le
professeur Isidre Molas précise que « le système
juridique espagnol prévoit que la protection des droits fondamentaux
relève de la juridiction ordinaire. L'activité spécifique
des juges et des tribunaux consiste précisément à les
favoriser. C'est la voie commune, la procédure ordinaire de leur
garantie. Mais la préoccupation du constituant pour renforcer cette
garantie l'a conduit à créer une voie particulière : le
recours d'amparo » (MOLAS (I), Derecho constitucional,
Tecnos, madrid, 1998, p. 348).
* 791 Art. 50-1, b, de la
L.O.T.C.
* 792 V. en ce sens. P.
Bon, « Tribunal constitutionnel espagnol. Importantes modifications de sa
loi organique en 2007 », in Mélanges en l'honneur du
Président Bruno Genevois, Le dialogue des juges, op. cit., p. 70.
* 793 Art. 53 de la
L.O.T.C.
* 794 CHASSIN (C-A.),
Op. cit., p. 44.
* 795Le professeur
Thierry-Serge Renoux relève en ce sens que : « Dès le 8
juillet 1958, l'idée d'une saisine du Conseil constitutionnel par le
Conseil d'Etat ou la Cour de cassation avait été avancée
par M. Aurillac lors d'une réunion du groupe de travail chargé
d'élaborer un avant-projet de Constitution puis finalement
abandonnée » (RENOUX (T.-S.), « Si le grain ne meurt...
(à propos des droits et libertés) », R.F.D.C.,
1993, n° 14, p. 285).
* 796 FAVOREU (L.), La
question préjudicielle de constitutionnalité. Retour sur un
débat récurrent, in M. Borgetto (Coord.),
Mélanges Philippe Ardant, Droit et politique à la
croisée des cultures, L.G.D.J., Paris, 1999, p. 265. L'appellation
se révèle impropre en ce sens que, dès l'origine,
l'objectif est de mettre en place un système de question
préjudicielle. C'est-à-dire un mécanisme obligeant le juge
ordinaire, en présence d'une loi susceptible de porter atteinte aux
droits fondamentaux du justiciable, à surseoir à statuer
jusqu'à ce que le Conseil constitutionnel, saisi de la question, se
prononce au fond. En aucune façon il s'est agi d'une procédure
permettant au juge ordinaire de contrôler lui-même la
constitutionnalité d'une loi à l'occasion d'un litige se
présentant devant lui, comme c'est le cas en matière d'exception
d'inconstitutionnalité.
* 797 Loi constitutionnelle
n° 2008-724 du 23 juillet de modernisation des institutions de la Ve
République.
* 798 Car, comme le
relève le Rapport du Comité de réflexion et de proposition
sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la
Ve République, « les lois antérieures à 1958 et
certains des textes adoptés depuis lors qui, pour des raisons diverses,
accidentelles ou parfois plus politiques, n'ont pas fait l'objet d'une saisine
du Conseil constitutionnel sont valides, sans qu'il soit loisible aux juges
judiciaires ou administratifs qui ont à en faire application de les
déclarer contraires à la Constitution. Sans doute cette anomalie
ne vaut-elle que pour un nombre relativement limité de textes de forme
législative. Il n'en reste pas moins qu'elle introduit dans notre
système juridique un élément de trouble, et qu'elle peut
priver les citoyens de la faculté de faire valoir la plénitude de
leurs droits». A ceci s'ajoute l'existence de lois qui, bien qu'ayant
été soumises à l'examen du Conseil constitutionnel dans le
cadre de son contrôle a priori, ont révélé
leur inconstitutionnalité une fois entrées en vigueur. Car, il
n'est pas inconnu que le contrôle a priori, par
définition abstrait, oblige le Conseil constitutionnel à
apprécier la constitutionnalité des lois de manière
empirique, en essayant d'imaginer leur logique. Or, il arrive parfois que le
Conseil n'anticipe pas convenablement les conséquences pratiques de
l'application d'une loi. A première vue constitutionnelle, ladite loi se
révèle à l'usage, en réalité, contraire
à la Constitution. En somme, c'est lors de son application
concrète qu'il est véritablement possible de dire si une loi est
ou non contraire à la Constitution. En outre, et comme le souligne le
professeur Yves Poirmeur, dans la mesure où « le droit
constitutionnel, en devenant jurisprudentiel, est devenu évolutif, et
par conséquent assez imprévisible, il est possible que la
consécration constitutionnelle de droits nouveaux ou la
redéfinition de la portée de droits anciens rendent incertaine la
constitutionnalité de lois en vigueur » ( « Le Conseil
constitutionnel protège-t-il véritablement les droits de l'homme
? », in DRAGO (G.), FRANÇOIS (B.), MOLFESSIS (N.) (Dir.),
La légitimité de la jurisprudence du Conseil
constitutionnel, coll. Etudes Juridiques, Paris, Economica, 1999, p.
335).
* 799 BERNAUD (V.) et
FATIN-ROUGE STÉFANINI (M.), La réforme du contrôle de
constitutionnalité une nouvelle fois en question ? Réflexions
autour des articles 61-1 et 62 de la Constitution proposés par le
comité Balladur, Op. cit., p. 169.
* 800 Loi organique n°
2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de
l'article 61-1 de la Constitution, J.O. du 11 décembre 2009, p.
21379. Pour un commentaire approfondi, v. entre autres. : BAGHESTANI (L.),
« A propos de la loi organique du 10 décembre 2009 relative
à l'application de l'article 61-1 de la Constitution », Petites
affiches, 2010, n° 32, p. 4 ; P. Bon, « La question prioritaire
de constitutionnalité après la loi organique du 10
décembre 2009 », Op. cit., p. 1107 ; FERRAIUOLO (P.),
La question prioritaire de constitutionnalité après la loi
organique relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution
: le point de vue du praticien, Petites affiches, 2010, n°
43, p. 3 ; B. Mathieu, La question prioritaire de constitutionnalité
: une nouvelle voie de droit. A propos de la loi organique du 10
décembre 2009 et de la décision du Conseil constitutionnel
n° 2009-595 DC, Op. cit.
* 801 Cons. const.,
décision 2009-595 DC du 3 décembre 2009, Loi organique
relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution,
Rec. p. 206, J.O. du 11 décembre 2009, p. 21381 (Sur
cette décision, v. en part. : B. Genevois, « Le contrôle
a priori de constitutionnalité au service du contrôle
a posteriori. À propos de la décision n° 2009-595
DC du 3 décembre 2009 », R.F.D.A., 2010, p.1 ; P. Jan,
« La question prioritaire de constitutionnalité », Petites
affiches, 2009, n° 252, p. 6 ; D. Rousseau, La question
prioritaire de constitutionnalité validée. La décision du
Conseil constitutionnel du 3 décembre 2009, Gaz. Pal.,
2009, n° 344, p. 4 ; J. Roux, « La question prioritaire de
constitutionnalité à la lumière de la décision du
Conseil constitutionnel du 3 décembre 2009 », R.D.P.,
2010, p. 233).
* 802 Pour une approche
approfondie : P. Cassia, « Question sur le caractère
prioritaire de la question de constitutionnalité »,
A.J.D.A., 2009, n° 40, p. 2193.
* 803 Compte tenu de
l'absence originelle de contrôle de constitutionnalité a
posteriori des lois en France, le contrôle de conventionalité
a effectivement conduit les justiciables à accorder plus
d'intérêt aux conventions internationales qu'à la norme
constitutionnelle. D'où la volonté de revaloriser la norme
constitutionnelle par l'affirmation du caractère prioritaire de la
question de constitutionnalité. Il n'est toutefois pas certain que la
question prioritaire soit suffisante pour assurer la prééminence
de la Constitution au sein de l'ordre juridique interne. En effet, la question
de constitutionnalité n'étant pas d'ordre public, elle ne peut
être soulevée d'office par le juge ordinaire (article 23-1 de la
loi organique relative à l'application de l'article 61-1 de la
Constitution). En d'autres termes, il faut impérativement que le
justiciable invoque l'inconstitutionnalité de la loi dont on veut lui
faire application. Or, il se peut très bien que ce dernier continue de
privilégier la voie du contrôle de conventionalité
plutôt que celle du contrôle de constitutionnalité. Car,
comme le met en avant le professeur Denys de Béchillon, « [...]
si les justiciables ont le choix entre la mise en jeu de la
conventionalité internationale de la loi devant un juge apte à
vider lui-même la querelle, et la mise en cause de sa
constitutionnalité devant un juge qui, lui, ne tranchera pas et lancera
- peut-être - un processus filtré, complexe, long et possiblement
très aléatoire de saisine du Conseil constitutionnel, ils
n'hésiteront pas : ils iront, dans
* 804 Art. 62 de la
Constitution.
* 805 BON (P.),
Premières questions, premières précisions,
Op. cit.98.
* 806421 A travers son
arrêt du 16 avril 2010, la Cour de cassation n'a pas hésité
à saisir la Cour de justice de l'Union européenne de la
conformité du caractère prioritaire de la question de
constitutionnalité au droit de l'Union européenne. La cour
suprême estimant que « les juridictions du fond se voient
privées, par l'effet de la loi organique du 10 décembre 2009, de
la possibilité de poser une question préjudicielle à la
CJUE avant de transmettre la question de constitutionnalité; que si le
Conseil constitutionnel juge la disposition attaquée conforme au droit
de l'Union européenne, elles ne pourront plus, postérieurement
à cette décision, saisir la CJUE d'une question
préjudicielle [...]. De même, [...] la Cour de cassation ne
pourrait pas non plus, en pareille hypothèse, procéder à
une telle saisine malgré les dispositions impératives de
l'article 267 du Traité sur le fonctionnement de l'Union
européenne, ni se prononcer sur la conformité du texte au droit
de l'Union ». (Cass. civ. 1ère, 16 avril 2010, n°
10-40002). C'est à quoi la Cour de justice a répondu, à
l'occasion de son arrêt A. Melki et S. Abdeli, en date du 22
juin 2010, que le caractère prioritaire d'une «
procédure incidente de contrôle de constitutionalité
» n'est contraire au droit de l'Union européenne que s'il
empêche les juges nationaux « d'exercer leur faculté ou
de satisfaire à leur obligation de saisir la Cour de questions
préjudicielles » (§ 57).
* 807 LEVADE (A), QPC
1, 2 et 3 : le Conseil d'Etat joue le jeu du renvoi !, D., 2010,
n° 17, p. 1061.
* 808 Au 28 février
2011, soit un an après l'entrée en vigueur de la question
prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel souligne
qu'environ 2000 questions ont été posées devant les juges
de première instance et d'appel. Sur ces 2000 questions, le Conseil
constitutionnel a enregistré 527 décisions - 124 décisions
de renvoi (59 du Conseil d'État et 65 de la Cour de cassation) et 403
décisions de non-renvoi (163 du Conseil d'État et 240 de la Cour
de cassation) - et rendu 83 décisions portant sur 102 de ces 124
affaires. Parmi les 83 décisions rendues, 56% sont de conformité,
34% de non-conformité totale (14 décisions), partielle (7
décisions) ou avec réserve (9 décisions), 10% de
non-lieux, [en ligne]. Disponible sur [www.conseil-constitutionnel.fr].
* 809L'éclatement de
la cour suprême de justice en trois juridictions autonomes et partant,
l'institution de deux ordres de juridictions à côté de la
Cour constitutionnelle, a été privilégié pour plus
de célérité dans le traitement des dossiers. L'ouverture
de la saisine de la cour constitutionnelle à toute personne (article
162, alinéa 2 de de la constitution), l'institution de la
procédure de référé-liberté dans la loi
organique sur les juridictions administratives, etc. participent de cet
élan d'amélioration du climat judiciaire en RDC.
* 810 TURPIN (D.), «
La protection par le contrôle de constitutionnalité des lois
», in Les droits de l'homme en question, La Doc. fr., Paris,
1989, p. 183.
* 811 MODERNE (F.), Le
juge constitutionnel face aux pouvoirs publics, Anuário
português de direito constitucional, Coimbra Editora, 2001, vol. I,
p. 67.
* 812Journal
Officiel - Numéro Spécial - 20 mars 2003.
* 813 TROPER (M.), Le
droit et la nécessité, Paris, Léviathan, PUF, 2011,
pp. 48 et s.
* 814Idem, p.
52.
* 815 BOBBIO (N.), Sur
le principe de légitimité, 1967, réed.,
Droits, n° 32, 2000, p. 149, cité par BETAILLE (J.),
op. cit, p. 379.
* 816 TROPER (M.), Le
droit et la nécessité, Op. cit., p. 47.
Au-delà des travaux de théorie du droit, la sociologie montre que
« l'efficacité d'une norme est fortement corrélée
avec sa légitimité », GAVINI (Chr.), L'efficacité
des normes - Enquête en contrepoint, working paper, Fondation pour
l'innovation politique, novembre 2006, p. 41).
* 817 « Pour
réagir contre les jusnaturalistes qui accordaient une place centrale
à la légitimité, critère de la validité des
normes, Kelsen a exclu la légitimité (...) à la fois du
droit comme ensemble de normes et de la science du droit » (COHENDET
(M.-A.), Légitimité, effectivité et
validité, in Mélanges Pierre Avril, La
république, Paris, Montchrestien, 2001, p. 213).
* 818Idem, p.
212.
* 819 WEBER (M.),
« Le savant et le politique », 1919, Plon, 1959,
p. 114.
* 820 WEBER (M.),
Économie et Société, 1921, Plon, 1971, Chap. 3,
cité par BETAILLE (J.), Op. cit, p. 379.
* 821 Sur les
différentes approches de la légitimité par Weber, V.
NGONDANKOY NKOY-ea-LOONGYA (P.-G.), Introduction à la science
politique, Op. cit., p. 100.
* 822 TROPER (M.), Op.
cit, p. 54.
* 823 DURAN (P.),
Légitimité, droit et action publique, L'année
sociologique, 2009, 59, p. 306, cité par BETAILLE (J), Op. cit,
p. 379.
* 824Idem.
* 825 BECCARIA (C.),
Op. cit, p. 11.
* 826 MANIN (B.),
« Volonté générale ou délibération
? Esquisse d'une théorie de la délibération
politique », Le Débat, 1985, n° 33, p. 74.
* 827 MANIN (B.),
Principes du gouvernement représentatif, 1995,
rééd., Paris, Flammarion, 1996.
* 828 MADER (L.),
L'évaluation législative - Pour une analyse empirique des
effets de la législation, Lausanne, Payot, 1985, p. 44.
* 829 JEAMMAUD (A.) et
SERVERIN (E.), Evaluer le droit, Paris, Dalloz, 1992, p. 263.
* 830 DURAN (P.),
Légitimité, droit et action publique, Op. cit.,
p. 304.
* 831Idem, p.
304.
* 832 FLÜCKIGER (A.),
« L'évaluation législative ou comment mesurer
l'efficacité des lois, Revue européenne des sciences
sociales », 2007, n° 138, p. 84.
* 833 JOUANNET (E.),
« A quoi sert le droit international ? Le droit international
providence du XXIème siècle », RBDI, 2007, p.
37.
* 834Idem, p.
38.
* 835 DELAUNAY (B.),
« Décision publique évaluée et
performance », in ALBERT (N.) (dir.), « Performance et
droit administratif », AFDA, Lexis Nexis, 2010, p. 120.
* 836 Article 45,
alinéa 5 et 6 de la Constitution du 18 février 2006 de la RDC,
Op. cit.
* 837 HASSENTEUFEL (P.),
Sociologie politique : l'action publique, Paris, Armand Colin, 2008,
p. 85, cité par BETAILLE (J.), op. cit, p. 425.
* 838 La science politique
ne peut cependant pas ignorer le rôle du droit. Ainsi, une
réflexion sur la capacité de pilotage de l'Etat ne peut ignorer
délibérément les dimensions juridiques et
institutionnelles, même si l'action publique n'est pas seulement
structurée par le droit.
* 839 ROUYERE (A.),
Recherche sur la dérogation en droit public, thèse,
droit, Bordeaux, 1993, p. 73.
* 840 Hans KELSEN,
Théorie pure du droit, Op. cit., p. 259.
* 841 TEORAN (M.),
L'obligation pour l'administration d'assurer l'effectivité des
normes juridiques, Op. cit., p. 99. Sur l'implémentation,
BLANKENBURG (E.), « La recherche de l'efficacité de la loi.
Réflexions sur l'étude de la mise en oeuvre (Le concept d'
"implementation") », Droit et Société, n°
2, 1986, pp. 74 et s.
* 842 C'est une obligation
singulière en ce sens que l'application de la sanction en cas de
manquement ne se réalise pas comme d'ordinaire.
* 843 WEBER (A.), Les
mécanismes de contrôle non contentieux du respect des droits de
l'homme, These dactylographiée, Université Robert Schuman,
Strasbourg, 2006, p. 37.
* 844 FAVOREU (L.) (Dir.)
et alii, Droit des libertés fondamentales,Op. cit., p.
377.
* 845 MOLFESSIS (N.),
Le Conseil constitutionnel et le droit privé, Paris, L.G.D.J.,
1997, p. 238.
* 846 RENOUX (T.-S.),
« Le droit au recours juridictionnel », J.C.P. G.,
1993, I, 3675.
* 847 Si parmi les
différentes expressions de nature à rendre compte de cette
prérogative juridique celle de « droit au juge » se
révèle probablement la plus opportune, car « [...] la plus
extensive et donc la plus apte à réunir l'ensemble des aspects du
sujet » (VANDERMEEREN (R.), « Permanence et actualité du
droit au juge », A.J.D.A., 2005, p. 1102), seront
indistinctement utilisées les expressions de « droit au juge »
ou de « droit à un recours juridictionnel effectif ».
* 848 DOMÍNGUEZ
MARTÍN (S.), Ejercicio racional de los derechos y garantías
fundamentales », in Introducción a los derechos
fundamentales, tome II, Ministerio de Justicia, 1998, p. 1498.
* 849 CORBION (L.),
Devoir juridictionnel et droit à la protection
juridictionnelle, jurisclasseur civil code, Publication, effets
et application des lois, art. 4, à jour au 1er décembre 2007, p.
4.
* 850 LEGER (P.), Le
droit à un recours juridictionnel effectif, in SUDRE (F.) et
LABAYLE (H.), Réalité et perspectives du droit communautaire
des droits fondamentaux, Bruylant-Nemesis, 2000, pp. 199-212 ; REDOR
(M.-J.), Garantie juridictionnelle et droits fondamentaux, Op.
cit., p. 100.
* 851 Le Tribunal
constitutionnel portugais considère en ce sens que si le droit à
un recours juridictionnel effectif est « inséré au sein du
chapitre relatif aux droits fondamentaux et se réfère
expressément à ces droits, il ne saurait pour autant se limiter
à la défense des seuls droits fondamentaux. La protection
juridictionnelle s'étend à tous les droits et
intérêts légitimes, c'est-à-dire à toutes les
situations juridiquement protégées » (Acórdão
24/1988 du 20 janvier 1988, D.R. série II du 13 avril 1988).
* 852La Charte africaine
des droits de l'homme et des peuples le consacre en son article et la
Constitution du 18 février 2006 en son article 19, alinéa 2.
* 853 SERRANO ALBERCA
(J.-M.), Las garantías jurisdiccionales como derechos fundamentales
: un anális del artículo 24 de la Constitución
española, Anuario de derechos humanos, n° 3, Ed. de
la Universidad Complutense, Madrid, 1985, p. 439 p. 449.
* 854 POLLET-PANOUSSIS
(D.), Les actes inattaquables devant le juge administratif,
Thèse dactylographiée, Université de Lille II, 2006, p.
298.
* 855 Ce triptyque est
celui proposé par le professeur Serge Guinchard à travers son
ouvrage de droit processuel (GUINCHARD (S.)(Dir.) et alii, Droit
processuel. Droit commun et droit comparé du procès
équitable, Paris, Dalloz, Précis, 5ème éd.,
2009, pp. 467-1037).
* 856 En ce sens, RENOUX
(T-S.), « La constitutionnalisation du droit au juge en France »,
Op. cit., p. 115.
* 857 C.E.D.H., 19 mars
1997, Hornsby c. Grèce, req. n° 18357/91.
* 858 SUDRE (Fr.),
Droit européen et international des droits de l'homme, Op.
cit., p. 344.
* 859 STC 37/1982 du 16
juin 1982, B.O.E. du 16 juillet 1982, FJ 1.
* 860 STC 207/2003 du 1er
décembre 2003, B.O.E. du 8 janvier 2004, FJ 2.
* 861 Acórdão
24/1988 du 20 janvier 1988, D.R. série II du 13 avril 1988).
* 862 Cons. const.,
décision 98-403 DC du 29 juillet 1998, Loi d'orientation relative
à la lutte contre les exclusions, Rec. p. 276,
J.O. du 31 juillet 1998, p. 11710.
* 863 OMEONGA TONGOMO (B.),
Le contrôle juridictionnel de l'administration, Op. cit., p.
370.
* 864 Information
disponible sur
https://www.google.fr/search?ei=zRXAXdaxKcPosAeRnq-gCA&q=les+maux+de+la+justice+congolaise&oq=les+maux+de+la+justice+congolaise&gs,
consulté le 04 novembre 2019.
* 865 KIFWABALA TEKILAZAYA,
FATAKI WA LUHINDI (D.) et WETSH'OKONDA KOSO (M.), « République
Démocratique du Congo. Le secteur de la justice et l'État de
droit. Une étude d'AfriMAP et de l'Open Society Initiative for Southern
Africa », Open society Foundation, 2013.
* 866 DUBOIS (M.) et
REJUSCO, Recueil de jurisprudence en matière pénale. La
justice restaurée, Kurudisha Upyi, Application des lois nationales
à des cas judiciaires recensés à l'Est de la RDC, GOMA,
2010, p. 23.
* 867 BAYONA BA MEYA,
« La justice de paix en République Démocratique du Congo
», Lukuni Lwa Yuma, Revue interdisciplinaire,
Vol. II, n°4, juillet-décembre 1999, p. 70.
* 868Conseil
Constitutionnel, décision 79-105 DC du 25 juillet 1979, Droit de
grève à la radio et à la télévision,
Rec. p. 33 ; STC 2/1982 du 29 janvier 1982, B.O.E. du 26
février 1982, FJ 5.
* 869 BON (P.), La
protection constitutionnelle des droits fondamentaux : aspects de droit
comparé européen », Op. cit., p. 251.
* 870Idem.
* 871Cour européenne
des Droits de l'Homme du 10 octobre 1979 dans l'affaire Rassemblement
jurassien c. Suisse, requête n° 8191/78.
* 872 Cour
européenne des Droits de l'Homme, 7 octobre 2008 dans l'affaire Eva
Molnar c. Hongrie,requete n° 10346/05, § 35.
* 873Idem, § 38
; CEDH, 7 juillet 2009, Skiba c. Pologne, req.
n°10659/03.
* 874Ibidem.
* 875Cour européenne
des Droits de l'Homme, 27 juin 2006 dans l'affaire Cetinkaya c.
Turquie, req. n° 61353/00.
* 876Cour européenne
des Droits de l'Homme, 2 octobre2001dans l'affaire Stankov c.
Bulgarie, Op. cit.
* 877Cour européenne
des Droits de l'Homme, 3 mai 2007 dans l'affaire Baczkowski et a. c.
Pologne, requête no 1543/06.
* 878Idem.
* 879 Cour
européenne des Droits de l'Homme, 21 oct. 2010 dans l'affairev Alekseyev
c. Russie, req. no 4916/07 ; L'Europe des
libertés, janv. 2011, n° 34, obs. U. Kilinc, « A propos
de l'interdiction du maire de Moscou à l'encontre de la Gaypride »
; C. Picheral, « Droit de revendiquer ouvertement son homosexualité
et de promouvoir le respect envers les minorités sexuelles »,
JCP G, 8 nov. 2011, n°45, p. 2122.
* 880Cour européenne
des Droits de l'Homme, 2 octobre 2001 dans l'affaire Stankov c. Bulgarie, req.
no 29225/95.
* 881Cour européenne
des Droits de l'Homme, 1er décembre 2011 dans l'affaire
Schwabe et M.G. c. Allemagne, req. no 8080/08 et 8277/08.
* 882Cour européenne
des Droits de l'Homme, 7 octobre 2008 dans l'affaire Patyi et a. c. Hongrie,
req. n° 5529/05.
* 883Cour européenne
des Droits de l'Homme, 26avril 1991 dans l'affaire Ezelin c. France,
Op. cit.
* 884Cour européenne
des Droits de l'Homme, 15 octobre 2015 dans l'affaire Kudrevicius et a. c.
Lituanie, req. n° 37553/05 ; F. Sudre, « Droit de la Convention
européenne des droits de l'homme », JCP G, n° 3, 18
janv. 2016.
* 885SUDRE (F.), Droit
de la Convention européenne des droits de l'homme,Op. cit.
p. 78.
* 886Cour européenne
des Droits de l'Homme, 19 novembre 2012, dans l'affaire
Berladir c. Russie, Op. cit., § 43.
* 887 CAA Paris, 7 mars
2000, Syndicat national des officiers de police, n° 97PA00133,
inédit (arrêt concernant l'interdiction d'une manifestation
d'agents de police).
* 888 Idem., p. 283.
* 889 CAA Paris, 7 mars
2000, Syndicat national des officiers de police, n° 97PA00133,
inédit.
* 890 CAA Bordeaux, 19
juill. 1999, n° 97BX01724, Assoc. rétaise des amis d'Henri
Béraud, inédit.
* 891 HABERMAS (J.), Droit
et démocratie. Entre faits et normes, Paris, Gallimard, 1997, p.
13.
* 892 SALÁT, The
Right to Freedom of Assembly: A Comparative Study, Oxford, Hart
Publishing, 2015, p. 284.
* 893HABERMAS (J.), Op.
cit., p. 13.
* 894 SAJÓ (A.),
Constitutional Sentiments, New Haven, Yale University Press, 2011, p.
262.
* 895 PETERS (A.) et LEY
(I.), Freedom of Assembly : The Politics of Presence, in PETERS
(A.) et LEY (I.) (dir.), The Freedom of Peaceful Assembly in Europe,
Baden-Baden/Oxford, Nomos/Hart Publishing, 2016, p. 12.
* 896 LE BOT (O.), La
liberté de manifestation en France : un droit fondamental sur la
sellette ?Op.cit., p. 33.
* 897 GWÉNAËLE
(C.), « La manifestation, coeur battant de la
démocratie », article disponible sur
http://juspoliticum.com/article/La-manifestation-coeur-battant-de-la-democratie-1140.html,
consulté le 09 août 2019 à 08 heures 35'.
* 898Idem.
* 899 V. par ex. le T. A de
Bordeaux, ordonnance du 28 mai 2013, Association L.214, n°1301861,
inédit : production, au cours de l'audience, d'un
arrêté retirant la mesure d'interdiction.
* 900 La jurisprudence
européenne exprime clairement ces principes dans l'arrêt de
principe du 21 juin 1988, Plattform « Ärzite fut das
Leben », n°10126/82, § 32.
* 901 Cette orientation
rejoint la jurisprudence européenne. Au regard de l'article 11 de la
convention, une restriction apportée à la liberté de
réunion pacifique doit être « nécessaire dans une
société démocratique », cette exigence
impliquant que l'ingérence corresponde à un besoin social
pressant et soit proportionnée à l'objectif poursuivi (CEDH, 19
nov. 2012, Berlardir c/Russie, n°34202, §45).
* 902 Le BCNUDH a
observé des actes de violence commis par des individus participant
à certaines manifestations et justifiant un certain degré
d'intervention par les forces de l'ordre pour rétablir l'ordre public
ou assurer la protection des personnes et des biens. Cependant, les services de
sécurité et les forces de défense congolaises ont souvent
répondu à ces violences en utilisant la force de manière
disproportionnée, y compris la force létale, quand d'autres
mesures moins radicales auraient pu être envisagées.
* 903 Lire à ce
sujet le Rapport du Rapporteur spécial sur les exécutions
extra-judiciaires, sommaires ou arbitraires, A/HRC/26/36 (le 1er
avril 2014), para.75
* 904 COMITE DES DROITS DE
L'HOMME, Projet révisé d'observation générale
n°36 sur l'article 6 du Pacte international relatif aux droits civils et
politiques, CCPR/GC/R.36/Rev.7 (juillet 2017), paragraphe 18.
* 905 AMNISTIE
INTERNATIONALE, Lignes directrices pour la mise en oeuvre des principes de base
des Nations Unies sur le recours à la force et l'utilisation des armes
à feu par les responsables de l'application des lois (2015), p. 159.
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