Conclusion et ouverture
Pour conclure, cette étude montre que les
pisciculteurs accompagnés par l'APDRA adaptent en permanence les
conseils de l'ONG et innovent à leur échelle pour répondre
aux problèmes qu'ils rencontrent et saisir les opportunités qui
se présentent à eux. Ainsi, ils adaptent les aménagements
et les techniques piscicoles recommandés par l'APDRA aux contextes de
leurs exploitations et échangent des informations ou des ressources pour
développer leurs activités piscicoles. L'accès aux
différents marchés, l'accès à l'eau et les
problèmes de vols sont des facteurs déterminants qui poussent les
pisciculteurs à innover. Les caractéristiques des exploitations
et l'accès à l'information paraissent très
hétérogènes entre les pisciculteurs accompagnés par
l'APDRA. Certains se retrouvent sur des marchés très
rémunérateurs comme la vente d'alevins à des gros
acheteurs tandis que d'autres ne trouvent pas de débouchés pour
vendre leurs poissons.
L'APDRA joue un rôle important dans les
dynamiques d'innovations piscicoles sur la Côte Est de Madagascar. En
effet, elle a participé au développement de pratiques
d'élevages innovantes pour les pisciculteurs du district de Vatomandry
comme la rizipisciculture ou encore l'élevage de carpe. Les ACP de
l'APDRA accompagnent les pisciculteurs aux quotidiens et alimentent
l'innovation en milieu paysan. Cependant, les pratiques piscicoles innovantes
ont du mal à être identifiées comme telles par les ACP et
remontées vers les équipes de coordinations de l'ONG. Il serait
intéressant de renforcer les formations au sein de l'APDRA sur le
concept et l'accompagnement de « l'innovation paysanne » et de
favoriser les échanges entre les pisciculteurs, les ACP, et l'ensemble
des acteurs de la pisciculture sur des territoires donnés.
Cette étude présente plusieurs limites.
Tout d'abord, l'échantillon n'est pas représentatif des
pisciculteurs encadrés par l'APDRA, et encore moins de tous les
pisciculteurs et les formes de piscicultures qui existent sur la Côte Est
de Madagascar. En conséquence, cette étude ne montre qu'une
partie des pratiques piscicoles innovantes existantes et susceptibles
d'enrichir les référentiels techniques de l'ONG. De plus, le
temps limité de la phase terrain ne nous a pas permis de situer la place
de la pisciculture au sein des activités globales des paysans
rencontrés. Il est important de souligner que les pisciculteurs
encadrés par l'APDRA sont avant tout des paysans. Ils ont tous des
cultures vivrières (riz, manioc, maïs), d'autres activités
d'élevages (volailles, porcins, bovins) et des cultures de rente
(poivre, vanille, girofle, cannelle, letchi), parfois en interactions directes
avec la pisciculture. Etudier ces activités permettrait de mieux
comprendre le choix des paysans quant à leur activité piscicole
(calendrier agricole, notion de coût d'opportunité).
Depuis quatre ans, la rizipisciculture est
proposée par l'APDRA aux paysans qu'elle accompagne sur la Côte
Est de Madagascar. Dans cette étude, peu d'innovations de paysans ne
pratiquant que de la rizipisciculture ont été
étudiées, car la plupart de ces paysans étaient encore peu
expérimentés en pisciculture. En effet, 73% des rizipisciculteurs
accompagnés sur la Côte Est ont commencé après le
1er octobre 2019 et 52% après le 1er janvier 2020. Nous supposons que
des innovations paysannes vont émerger dans les années à
venir grâce à l'acquisition d'expérience de ces
rizipisciculteurs. Il serait dans ce cas, très intéressant
d'étudier et d'accompagner ces dynamiques d'innovations. Cela pourrait
se faire en menant de nouvelles traques couplant simultanément
l'étude des pratiques piscicoles et rizicoles qui sont intimement
liées dans les systèmes rizipiscicoles.
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