Conclusion
Il serait vain de combattre l'ère de la
translittératie139. La conversion digitale est
omniprésente et la concurrence est rude.
Le média radio a repensé la définition
des contenus existants en se demandant lesquels seraient les mieux
adaptés, et pour quel type de support. Les stratégies
développées à France Inter ont créé
davantage d'interactions grâce aux réseaux sociaux, avec notamment
le partage d'informations. On a vu l'émergence de nouvelles
fonctionnalités telles que les podcasts natifs. Ces nouveaux contenus
amènent à repenser la manière dont la radio doit
être proposée aux publics les plus divers. France Inter a connu
des transformations technologiques et éditoriales très
importantes, des bouleversements de codes, de manières d'être et
de communiquer ont émergé.
Au terme de ce travail de réflexion, des
hypothèses de départ ont été confirmées,
d'autres non. La problématique étant « En quoi
l'apparition de la radio filmée à France Inter a-t-elle
transformé sa médiativité ? Le terme
médiativité s'est adapté à la radio en
essayant de comprendre l'ensemble des singularités de ce média.
Les nouvelles pratiques de plus en plus importantes dans l'ère du
digital ont de réels impacts sur ce média traditionnel.
Dire qu'un « média n'est pas l'autre », comme
le fait Philippe Marion dans Narratologie médiatique et
médiagénie des récits remet en question les
fondamentaux de la radio. C'est à travers l'observation
d'émissions (sur internet et à la maison de la radio) ainsi que
des entretiens avec les professionnels de France Inter, que ma réflexion
s'est enrichie et a trouvé des réponses. La radio, média
qui s'adresse à nos oreilles depuis des décennies, s'attache
à présent à capter notre regard, à l'orienter,
à le séduire, avec l'aide des nouveaux dispositifs.
France Inter, en déployant des signaux vidéos
sur des plateformes multiples, crée les complémentarités
de l'audio. Les professionnels ont su « faire face », et
développer de nouvelles pratiques. Parmi les hypothèses
avancées dans ce mémoire, il en est une qui voulait que l'image
exerce un pouvoir sur les hommes et les femmes de radio, en changeant leurs
comportements, en modifiant leur écriture ou encore la prosodie
de chacun : cette hypothèse a été en partie
vérifiée. L'évolution des métiers est un constat
indéniable. Globalement, l'introduction des caméras dans les
studios s'est faite sans hostilité. On peut même dire qu'elle a
recueilli l'assentiment d'une majorité de professionnels.
139 Thématique de recherche définie par Sue Thomas
en 2005
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L'image associée au son est une «
révolution tranquille ». Nul ne peut contester la force de l'image.
L'idée même de laisser la radio cantonnée dans l'univers du
son l'aurait condamnée à court ou moyen terme à une sorte
de « ringardisation » suivie d'une douloureuse relégation. Les
dirigeants du secteur l'ont bien compris. France Inter a pris, quand il le
fallait, le virage de la transformation numérique, et cette
stratégie a été payante. Les mesures d'audience l'ont
confirmé, le public traditionnel n'a pas décroché pour
aller « écouter ailleurs », et le gain d'auditeurs plus
jeunes, alors que ceux-ci sont généralement peu fidèles
à l'antenne publique, est sensible. Rien n'étant
définitivement acquis, dans un monde en perpétuel mouvement,
toute forme de triomphalisme serait une erreur. Mais l'espoir est permis, et
France Inter, qui sait être vigilante, peut regarder l'avenir avec
confiance et sérénité.
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