III. Vers une reforme et une redynamisation du COPAX
Les reformes du COPAX que nous venons d'énoncer
apparaissent insuffisantes, il est important de mettre un accent particulier
sur les mécanismes sous-régionaux de paix et de
sécurité afin que ceux-ci fonctionnent et remplissent leurs
missions.
III.1. La nécessité d'une
redéfinition des instruments du COPAX
La réforme du COPAX nécessite une
redéfinition de ces instruments de mise en oeuvre et par
conséquent une nouvelle architecture du COPAX.
II.1.1. Proposition d'une nouvelle architecture du
COPAX
Le COPAX a été mis en place dans un
contexte où l'Afrique centrale était une poudrière. Il
semble, selon l'ossature de cet organe de concertation
politico-sécuritaire, que depuis les prémices de la
coopération régionale, les régimes d'Afrique centrale ont
préféré traiter l'insécurité comme un
problème militaire plutôt que comme un problème de
gouvernance qui sous-tend l'insécurité. La CEEAC a alors
hérité d'une approche militaire et réactive plutôt
que politique et préventive. Ayant compris que le plus important
n'étant plus de prendre des mesure curatives, la CEEAC a
désormais mis l'accent sur le préventif. C'est ainsi qu'en dehors
des instruments traditionnels que sont le MARAC et la FOMAC, d'autres
innovations ont été apportées dans l'architecture de paix
et de sécurité de l'Afrique centrale à savoir : la
Direction de la sécurité humaine, la Direction des affaires
politique et diplomatiques. Ces directions dans leurs missions et leur
composition sont en adéquation avec les différents défis
sécuritaires auxquels l'Afrique centrale dans sa conception ceeacienne
doit faire face.
Pour notre part, nous pensons que ces apports ne
doivent pas être en marge du protocole du COPAX, qui est la pierre
angulaire des mécanismes de paix et de sécurité en Afrique
centrale. C'est la raison pour laquelle une révision des textes du COPAX
et une modification de son architecture s'avèrent nécessaires.
Ainsi, Le COPAX ne disposerait plus de deux instruments mais de quatre
instruments de mise en oeuvre : le MARAC, EMR/FOMAC, la Direction des Affaires
politiques et diplomatiques (DAPD) et la Direction de la sécurité
humaine (DSH). Les quatre instances dont les rôles et les pouvoir sont
définis dans les articles 7 à 19 du protocole, ne devraient subir
d'aucune modification, il s'agit de la Conférence des Chefs d'Etat, le
Conseil des ministres, la Commission de sécurité et de
Défense et le Secrétariat
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Général, auxquels s'ajoutera le
Comité des ambassadeurs. Celui-ci a été crée en
octobre 2009 par les chefs d'Etat dans le but d'accélérer la
discussion des problèmes sécuritaires au niveau politique et
accroître la communication à la fois entre les gouvernements et
entre ces derniers et la CEEAC. Le Secrétariat général de
la CEEAC est l'instance de gestion permanente du COPAX. Le Secrétariat
du COPAX devrait être assuré par le Secrétaire
général adjoint chargé des questions de
sécurité et de paix (SGA/DIHPSS).
En outre, il faudrait favoriser la participation des
Sociétés civiles et organiser des campagnes de communication
conjointes entre le Secrétariat général de la CEEAC et les
autorités nationales à destination du grand public pour expliquer
le rôle et l'intérêt de la CEEAC dans la sous-région.
En d'autres termes, les Etats membres devraient prendre la décision
d'ouvrir l'organisation à la Société civile. Une meilleure
participation de cette dernière devrait accroître la
légitimité et la visibilité de l'institution. Plus le
rôle de la Communauté sera compris et assimilé au sein de
son espace, plus elle bénéficiera d'un soutien réel dans
les pays concernés. Actuellement, elle reste largement une affaire de
chefs d'Etat sans l'implication d'autres acteurs nationaux (parlementaires,
corporations professionnelles, etc.) puisque jusqu'à présent, les
politiques communautaires n'ont pas fait l'objet de référendums
ou de débats publics susceptibles de mieux définir les
priorités de chaque pays. Les organisations de la société
civile doivent mener des activités visant à promouvoir des
processus électoraux et de gouvernance crédibles et transparents,
notamment à travers la sensibilisation, les ateliers de formation
à l'intention des partis politiques, des organes de gestion
électorale, des médias, des services de sécurité,
des moniteurs et observateurs électoraux. Aussi doivent-elles apporter
une assistance aux Etats membres en vue de mettre en place des
mécanismes visant à renforcer les capacités des
médias, des services de sécurité et du système
judiciaire dans le but d'assurer efficacement le contrôle
électoral, la sécurité et l'arbitrage.
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Figure 9 : Proposition d'une nouvelle architecture du
COPAX
Conférence des chefs d'Etats
Comité des Ambassadeurs
Conseil des Ministres
Commission de Défense et de
Sécurité
Pacte d'assistance mutuelle
Pacte de non agression
Programme Frontière
Convention de Kinshasa
Secrétariat
COPAX
Organisation de la société
civile
SGA / DIHPSS
M A R A C Direction des Affaires
Politiques et Diplomatiques
Direction de la sécurité
humaine
EMR / FOMAC
Zone d'observation et de surveillance de la
sous-région
Centre d'observation et de surveillance
Diplomatie préventive
Unité de médiation
Election et Bonne Gouvernance
Service Justice et Droits de l'Homme
Service de lutte contre la criminalité
Service de libre circulation des personnes
Module interarmées
Module Police
Module Gendarmerie
Module civil
Secrétariat Général de la
CEEAC
Légende
Instances du COPAX Secrétariat du COPAX
Organisation de la société civile
Textes normatifs de base Instruments du COPAX
Réalisation : Cyr Revelli MBA
ABESSOLO , 2013
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II.1.2. Le MARAC et la Direction des Affaires Politiques
et diplomatiques
Le MARAC aujourd'hui est couplé à la
Direction des Affaires politiques et Diplomatiques. La CEEAC devrait donc les
rendre autonomes. Le MARAC est une structure dont le fonctionnement est
complexe et demande d'être juste renforcer en matériel et en
ressources humaines.
II.1.2. Le MARAC et la Direction des Affaires Politiques
et diplomatiques
L'objet du MARAC est l'alerte rapide que l'on peut
mieux cerner à partir des travaux de l'Institut italien des Affaires
Internationales «Early Warning and Conflict Prevention in the Euro-Med
Area. A Research Report »143, ou des travaux de FEWER Pour qui
l'alerte rapide est « la collecte et l'analyse
systématique des informations provenant des zones de crise afin : (1)
d'anticiper l'escalade des conflits violents , · (2) de
développer une réponse stratégique à ces crises et
(3) de présenter des options aux acteurs clés (nationaux,
régionaux et internationaux) aux fins de prise de décision et
d'action préventive. »144 A suivre cet
organisme l'alerte rapide suppose tout un dispositif qui doit en principe
fonctionner de manière autonome. Au niveau de l'ONU par exemple, au sein
du Secrétariat, c'est le Département des Affaires Politiques qui
est chargé d'identifier « les zones de crises éventuelles et
d'alerter le Secrétaire Général sur les évolutions
et les situations affectant la paix et la sécurité ». En
1998, au sein de ce département a été créé
une équipe de prévention qui chaque mois étudie des cas
choisis pour lesquels des mesures préventives seraient
nécessaires à prendre. Les six divisions régionales qui
composent le département fournissent chacune des «prevention papers
», avec des cas à étudier. Il y a donc une sorte de «
dispersion des responsabilités » entre
les différentes structures onusiennes en ce qui concerne la veille et
l'alerte145. Afin de mettre fin à la dispersion des
responsabilités, certains ont proposé la création d'un
seul organe responsable de la veille et de l'alerte146. La
responsabilité de cet organe serait engagée aussi bien en cas de
non vigilance qu'en cas de
143 Voir l'Organisation Internationale de la
Francophonie, Mécanismes des Systèmes d'Alerte :
Contribution à une Comparaison Internationale,
Réunion du 5-7 Avril 2004, Centre de Recherche sur la Paix, Institut
Catholique de Paris
144 FEWER 1999. Conflict and Peace Analysis
and Response Manual. 2nd ed., London: FEWER
Secretariat.
145 Organisation Internationale de la
Francophonie, Mécanismes des Systèmes d'Alerte :
Contribution à une Comparaison Internationale,
Réunion du 5-7 Avril 2004, Centre de Recherche sur la Paix, Institut
Catholique de Paris
146 Ibid.
96
fausse alerte, mais tiendrait compte de la
difficulté de la tâche. Ce Rapport, commandé par les
Nations Unies et publié en 2000, met l'accent sur le renforcement des
moyens des Nations Unies pour assurer sa mission. Entre autres, il propose la
création d'un système centralisé d'alerte et
d'information. On peut y lire : « Le Secrétaire
général devrait créer un organe, dénommé
ci-après le Secrétariat à l'information et à
l'analyse stratégique (S.I.A.S.), pour répondre aux besoins des
membres du Comité exécutif pour la paix et la
sécurité en matière d'analyse et d'information; le SIAS
serait administré conjointement par le Département des affaires
politiques et le Département des opérations de maintien de la
paix, auxquels il rendrait compte »147 A la suite
du Rapport Brahimi, les organes de l'O.N.U. ont commencé leurs
réformes.
Pour nombres de spécialistes, l'organe en
charge du système d'alerte ne doit pas avoir en même temps
l'obligation de proposer des options d'intervention, mais seulement la
faculté de le faire148. De cette façon, le
système d'alerte s'assure une meilleure rapidité tout en gardant
la possibilité de fournir des propositions pour la prévention des
conflits tout au long du processus. Cela s'observe par exemple au niveau de la
méthodologie adoptée par CEWARN (Mécanisme d'alerte rapide
et de réaction aux conflits) de l'Autorité intergouvernementale
pour le développement (IGAD). Celle-ci implique la collecte
d'informations, l'analyse, la formulation des meilleures/pires/plus
vraisemblables scenarii et moyens d'action, et la communication de ces
données aux décideurs149.
Ces dispositions peuvent servir à revisiter le
fonctionnement du MARAC devrait privilégier une collaboration effective
avec le Département des Affaires Politiques et Diplomatiques et la
Direction de la Sécurité Humaine en tant que de besoin, dans
l'analyse des données et la préparation des rapports et
compte-rendu destinés aux décideurs. Le MARAC doit assurer la
coordination de la circulation de l'information sur les crises auxquelles sont
confrontées les missions de la CEEAC sur le terrain.
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