1.2. Problématique
La microfinance représente aujourd'hui un des axes de
nombreuses politiques de développement ; pourtant, la nature et
l'ampleur exacte de l'impact qu'on peut en attendre ne sont pas toujours aussi
établies que ce qui est parfois affirmé dans les forums
internationaux (Marc LABIE, 1999). Par ailleurs, il s'agit
d'un secteur extrêmement diversifié. En matière de
microfinance, cela concerne fondamentalement deux types d'institutions : les
organisations à « logique coopérative2 » et
les ONG. Il n'est donc ni possible ni souhaitable de résumer l'ensemble
de la microfinance autour d'un schéma unique qui serait le seul à
légitimer. Au contraire, il s'agit de faire preuve de nuance et de voir
ce que chaque type d'institution peut apporter au champ de la microfinance. Par
ailleurs, il est important de ne pas ni surestimer ni sous-estimer ce que la
microfinance peut apporter en matière de lutte contre la
pauvreté. Certains affirment que non seulement la microfinance peut
servir les plus pauvres mais qu'il doit s'agir là d'une de ses
priorités
2 On peut citer ici les coopec, caisses
villageoises, mutuelles etc....
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absolues. D'autres, au contraire, pensent que tenant compte
des caractéristiques de ce type de service, il n'est probablement pas
destiné aux plus pauvres des plus pauvres mais bien à ceux qui
disposent de projets susceptibles d'engranger une rentabilité suffisante
pour supporter le coût de ce type de service (J.
Morduch, 1999).
Il sera par ailleurs important de rappeler ce point de vue qui
est souvent négligé mais auquel on doit accorder une importance
particulière à savoir la définition de la pauvreté.
On a longtemps considéré que la pauvreté résultait
d'un manque de revenus. Or, grâce notamment aux travaux de
Amartya Sen3, on a mieux compris que la
pauvreté est en fait un phénomène multidimensionnel (qui
attaque l'environnement, la santé, l'éducation, etc....). La
question n'est donc pas seulement de savoir si un individu a, ou non, un revenu
suffisant mais bien plus, de savoir, s'il a ou non, accès à une
série de biens et services essentiels par exemple en matière de
santé ou d'éducation. Si on accepte cette approche, on comprend
donc aisément qu'il est pour le moins exagéré de
prétendre que la mise en place de systèmes de microfinancement
est, à elle seule, susceptible de lutter contre la pauvreté.
Naturellement, les avis divergent : pour certains auteurs, la
micro finance ou le microcrédit est une stratégie capable de
relever le défît ou une alternative sérieuse aux diverses
politiques de développement. Pour d'autres, les microcrédits
assurent la survie et non l'émergence, ils n'ont pas réussi
à bâtir le capital des micros entreprises viables. Cependant, nous
savons, pour notre part, que « l'argent appelle l'argent dit un
proverbe,... Si vous en avez un peu, vous pouvez en avoir beaucoup. Le plus
difficile, c'est d'avoir ce peu là... ».
Or, la problématique de la pauvreté au Cameroun
s'apparente au manque de ce peu là. La population dispose d'immenses
atouts et est pleine d'initiatives dont la mise en oeuvre est handicapée
par le manque de capital et le manque d'accès au marché
financier. L'insuffisance d'institutions bancaires ou leur inexistence pure et
simple dans plusieurs localités du pays, le dysfonctionnement de ce
circuit et l'impossibilité d'y accéder pour la majorité de
la population camerounaise est une réalité qui aggrave
l'état de la pauvreté devenue un phénomène de masse
au Cameroun.
3 Prix Nobel d'Economie
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En recherchant les solutions de survie, les populations
camerounaises pauvres et plus particulièrement en zone rurale se lancent
dans des activités du secteur informel tels que : call box, petit
commerce, commerce ambulant, artisanat, agriculture, élevage, ben skin,
coiffure, couture, etc. Ces activités n'ayant aucun soutien ni de
l'Etat, ni de tout autre organisme, c'est alors que va apparaitre la
microfinance sur ce terrain qui parait fertile comme une panacée qui
pourrait venir en aide aux populations exclues. Les hommes, les femmes et
même les enfants s'y livrent parfois sans réflexion, comme
poussés par cette croyance populaire qui stipule : « qui ne risque
rien n'a rien ». Mais malheureusement, la mesure du risque n'est pas
toujours faite de manière suffisante. C'est ainsi que nous pouvons
constater que, malgré la prolifération des EMF au Cameroun, la
pauvreté de masse semble dicter toujours sa loi.
Et c'est parce que l'engouement est réel et même
mondial, avec la consécration de l'année 2005 comme
l'année internationale du microcrédit, qu'il nous importe de nous
poser la question de recherche suivante : « les services financiers
offerts par le réseau MC2 de la Menoua sont-ils suffisamment
adaptés aux besoins réels des populations
bénéficiaires ? » De façon plus simple :
- Les microcrédits octroyés par les
MC2 améliorent-ils les conditions de vie des populations
bénéficiaires ?
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