L'abà¢à¢, corps de garde et espace de communication chez les Fang d'Afrique centrale. Une préfiguration des réseaux sociaux modernes.( Télécharger le fichier original )par Gérard Paul ONJI'I ESONO Université de Yaoundé II Cameroun - Master 2015 |
3. La dimension symbolique de l'AbââL'Abââ n'est pas seulement ce bâtiment commun de réunions. C'est aussi un élément hautement symbolique à travers lequel un clan (ndà bôt) est identifié. C'est par le truchement de ce dernier que « le Fang est saisi isolé en tant qu'individu, par l'étranger... comme un homme attaché à un clan. L'Abââ constitue une cellule de différenciation... C'est dans cette cellule fondamentale que toutes les décisions, quel qu'en soit le domaine, étaient élaborées, mûries et prises par le conseil des anciens »51(*). Dans la même lancée, l'on se référera aux propos d'AZOMBO, cité par P. NGUEMA-OBAM, qui présentent l'Abââ en tant que lieu de rencontre où tous les hommes s'assemblent pour arriver à élaborer une décision commune. En effet, l'Abââ est « la résidence de cet Esprit dont la vie doit animer la tribu tout entière. Se diriger vers l'Abââ, c'est se rendre à la rencontrer de cet Esprit dont la perfection est évoquée par la manière à permettre aux hommes assis de regarder à l'extérieur sans obstacle »52(*). Cette hypostasie de l'Abââ ressort sa valeur sociale et culturelle et sa dimension symbolique et philosophique, d'où prend essence la culture fang. A la base de la structuration symbolique de l'Abââ, quatre principes président à la stabilité de cette institution : 3.1. Le principe de l'autorité d'un nyambôrôEntre le droit d'aînesse qui régit les relations interindividuelles, l'unanimité de respect et de confiance que la communauté s'accorde à placer en un individu comme le guide et le garant de la sagesse, le nyambôrôauquel l'institution Abââ de chaque village est rattachée, est désigné par ses pairs. C'est lui qui représente le village en toute situation selon la tradition. Il diffère en cela du chef de village qui est beaucoup plus un auxiliaire de l'administration. C'est sur lui que toute la politique du village s'articule. Il règne de façon consensuelle et les décisions qui émanent de lui sont prises avec la participation de la communauté de l'Abââ. 3.2. Le principe de prise de décision commune Toute décision importante qui doit être prise pour le compte de la communauté ou de l'un de ses membres est sujette à une concertation ouverte. A ce titre, « l'Abâ est l'archétype qui typifie les valeurs d'un véritable village fang dans lequel l'« Abâ », c'est-à-dire le Corps de garde reste au centre des décisions prises au quotidien et au bon fonctionnement de la communauté toute entière »53(*). Chacun, sans exclusive, a le droit de donner son point de vue et les aînés s'y accordent pour arrêter une position finale. * 51LABURTHE TOLRA, Philippe, cité par AUBAME, Jean-Marie, dansLes Beti du Gabon et d'Ailleurs: tome I, Sites ; parcours et structures ; tome II, Croyances, us et coutumes ; », Journal des africanistes [En ligne], 76-2 | 2006, mis en ligne le 22 mai 2007, consulté le 02 octobre 2012. URL : http://africanistes.revues.org/898 * 52AKOMO ZOGUE, Cyriaque Simon Pierre, Parlons fang : culture et langues du Gabon et d'ailleurs, Paris ; l'Harmattan ; 2010, p. 163. * 53 MVE BEKALE, Marc, Pierre Claver Zeng et l'art poétique fang, esquisse d'une herméneutique, Paris, L'Harmattan, 2001, pp. 139-140. |
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