Les mandats des opérations de maintien de la paix de l'ONU en République Démocratique du Congo face aux réalités locales: utopisme ou réalisme?( Télécharger le fichier original )par Claude BOYOO ITAKA Université de Kinshasa - Licence 2012 |
2. Principes directeurs des OMPBien qu'il y ait eu une évolution significative dans la pratique du maintien de la paix des Nations Unies au cours des soixante dernières années, trois principes de base ont traditionnellement été utilisé et continuent à constituer la marque du maintien de la paix des Nations Unies comme outil spécifique du maintien de la paix et de la sécurité internationales. Il s'agit des principes fondamentaux tels que : le consentement des parties, l'impartialité, et le non recours à la force sauf en cas de légitime défense ou de défense du mandat.
Le consentement de l'Etat sur le territoire duquel les troupes des Nations Unies sont amenées à stationner est un principe de base qui l'emporte sur toute autre considération. Les opérations de maintien de la paix des Nations Unies se déploient avec le consentement des principales parties au conflit. En principe, cela implique l'adhésion des parties à un processus politique et leur consentement à la présence de l'opération de maintien de la paix qui est censée appuyer ce processus. L'accord des principales parties permet aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies d'avoir la liberté d'action politique et physique dont elles ont besoin pour accomplir les fonctions prévues par leur mandat. Faute de consentement, une opération de maintien de la paix des Nations Unies court le risque de se voir impliquée dans le conflit et de s'éloigner de sa vocation première qui est de maintenir la paix. Il faudrait cependant reconnaitre que le Conseil de sécurité peut autoriser une opération sans l'accord explicite des parties au conflit, s'il croit que le conflit représente une menace à la paix et à la sécurité internationales. L'intervention devient alors une opération d'imposition de la paix. Le Conseil peut également décider d'autoriser une action d'imposition de la paix pour des raisons humanitaires ou de protection, dans les cas où il n'y a pas de processus politique et la possibilité d'obtenir le consentement des principales parties au conflit sont nuls mais où les populations civiles souffrent.
Les OMP sont avant tout des forces d'interposition entre deux parties rivales après la conclusion d'une trêve ou d'un cessez-le-feu afin d'éviter la reprise des hostilités. Une opération de maintien de la paix des Nations Unies doit s'acquitter de son mandat sans faveur envers ni préjudice à l'égard de l'une ou de l'autre des parties. L'impartialité est essentielle pour préserver le consentement et la coopération des principales parties. Pour autant, elle ne doit pas se confondre avec la neutralité ou l'inaction. L'impartialité et la neutralité (avec l'humanité et l'indépendance) sont deux des principes fondamentaux de l'action humanitaire, bien qu'ils aient une signification différente dans le contexte humanitaire. Il est indispensable de tenir compte de cette distinction afin d'éviter les malentendus. Pour le Mouvement international de la Croix rouge et du Croissant rouge en particulier, l'impartialité signifie qu'on est guidé uniquement par les nécessités, sans faire de discrimination en fonction de la nationalité, de la race, du sexe, de la classe sociale ou des croyances religieuses ou politiques. La neutralité signifie en revanche que l'on ne peut participer en aucune manière aux hostilités ni s'engager, à n'importe quel moment, dans des controverses de nature politique, raciale, religieuse ou idéologique. Le personnel oeuvrant dans une opération de maintien de la paix des Nations Unies doit rester impartial dans ses relations avec les parties au conflit. Toutefois, ceci ne signifie pas qu'il doit rester neutre dans l'application du mandat de la mission. S'agissant du non recours à la force, il faudrait reconnaitre qu'étant donné l'esprit de la Charte, les Casques bleus ne sont dotés que d'armes défensives légères (en cas de légitime défense). Ils doivent à tout prix éviter d'alimenter le recours à la force. Les opérations de maintien de la paix des Nations Unies ne doivent pas recourir à la force qu'en dernier ressort, après avoir épuisé toute autre méthode de persuasion. Une opération de maintien de la paix des Nations Unies doit faire preuve de retenue dans son usage de la force. L'usage de la force sert, en fin de compte, à influencer ou à dissuader ceux qui agissent contre le processus de paix ou qui s'attaquent aux civils, non à les éliminer physiquement. L'usage de la force par une opération de maintien de la paix des Nations Unies doit toujours être calibré, précis, proportionnel et approprié, conformément au principe de la force minimale nécessaire pour atteindre l'objectif escompté, tout en maintenant le consentement à la présence de la mission et à son mandat. Il faut que l'opération de maintien de la paix reste sensible à la nécessité d'une réduction rapide du niveau de la violence et d'un retour à l'usage de moyens de persuasion non violents30(*). Mais, les contextes dans lesquels les opérations de maintien de la paix des Nations Unies sont déployées sont souvent caractérisés par la présence de milices, de bandes criminelles et d'autres fauteurs de troubles locaux qui essayent de perturber le processus de paix ou qui constituent une menace à la population civile. Plusieurs opérations de maintien de la paix des Nations Unies déployées dans ce type d'environnement ont reçu un mandat « robuste » du Conseil de sécurité les autorisant à « employer tous les moyens nécessaires» pour prévenir toute tentative de troubler le processus de paix, pour protéger les civils en cas de menace imminente d'atteinte à l'intégrité physique des personnes ou pour aider les autorités nationales à maintenir l'ordre public. L'usage proactif de la force pour défendre le mandat a permis à ces opérations de maintien de la paix d'améliorer la situation sécuritaire et à créer un environnement propice à la consolidation de la paix dans les pays où elles sont déployées. Outre ces trois principes fondamentaux qui guident les OMP, les expériences des quinze dernières années démontrent que la réussite des opérations de maintien de la paix dépend également du degré de crédibilité et de légitimité dont elles jouissent, notamment aux yeux des populations locales. L'expérience récente a également mis en relief la nécessité de promouvoir l'appropriation nationale et locale afin de contribuer à la mise en place d'une paix durable. - La légitimité : Une opération de maintien de la paix des Nations Unies tire sa légitimité du fait qu'elle est créée sur la base d'un mandat octroyé par le Conseil de sécurité des Nations Unies qui détient la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales. La manière dont une opération de maintien de la paix se conduit sur le terrain a une influence profonde sur sa légitimité apparente. La fermeté et l'impartialité dont une opération de maintien de la paix fait preuve dans l'exécution de son mandat, la circonspection dont elle fait preuve dans son usage de la force, la discipline qu'elle impose à son personnel, le respect qu'elle montre envers les us et coutumes ainsi que les institutions et les lois locaux et la manière dont elle interagit avec la population locale ont un impact directe sur la légitimité d'une opération de maintien de la paix des Nations Unies. - La Crédibilité : La crédibilité d'une opération de maintien de la paix des Nations Unies dépend directement du niveau de confiance dont elle jouit au sein de la communauté internationale et de la population locale. La crédibilité d'une mission dépend des ressources mises à sa disposition, de son efficacité et de sa capacité de gérer et répondre aux attentes. - La promotion de l'appropriation nationale et locale : Lors de la planification et la mise en oeuvre de ses programmes et activités centrales, une opération de maintien de la paix des Nations Unies doit s'efforcer de promouvoir l'appropriation nationale et locale et d'encourager la confiance et la coopération entre les acteurs nationaux. Faute d'appropriation nationale et locale, la durabilité des projets et des stratégies risque d'être remise en cause et les investissements initiaux risquent de ne pas être rentabilisés. * 30 Nations Unies, Op.cit, p.39 |
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