Ce chapitre est subdivisé en trois parties suivantes : -
La construction de l'objet de recherche ;
- Le dispositif méthodologique ;
- Les difficultés rencontrées.
1.1. Construction de l'objet de recherche
Pendant la période coloniale, le secteur minier fut
l'apanage de l`Union Minière du Sud Katanga, entreprise minière
crée en 1906. Après la colonisation, elle fut transformée
en Générale des Carrières et des Mines (Gécamines)
en 1967. Ainsi, la Gécamines et la Société de
Développement Industriel et Minière du Congo (SODIMICO)
détenaient le monopole de l'exploitation minière au Katanga.
La libéralisation du secteur minier par l'Etat
Congolais vers les années 2002 apporte des grands changements dans ce
secteur. Avant d'énoncer l'objet de recherche, nous
préférons d'abord présenter le contexte qui préside
à l'objet de recherche.
1.1.1. Contexte d'élaboration de l'objet de
recherche
Pendant plusieurs années, la Gécamines a fait
la fierté du Congo par sa grande contribution financière au
budget national à l'ordre de 70% (Ikos Rukal : 2007,159). Les
années 1990 fut la chute de cette entreprise. Soucieux pour sa relance,
le Gouvernement congolais avait pris des mesures pour le redressement du
secteur minier. Ainsi, par la loi n° 007/2002 du 11 juillet 2002, le pays
s'est doté d'un nouveau code minier comme instrument juridique de base
pour le redressement du secteur minier. La grande innovation de cette loi, est
la libéralisation du secteur minier au Congo. Des innovations ont
été apportées dans le secteur minier industriel tout comme
artisanal. Parmi lesquelles nous citons :
8
- l'autorisation des privés à acquérir des
concessions minières pour l'exploitation ;
- la libéralisation de l'exploitation minière
artisanale qui s'étend à toute substance minière.
Par ailleurs, l'exploitation minière artisanale fut
jadis limitée pour les pierres précieuses, comme prévoyait
l'article 30 de l'ordonnance-loi n° 81-013 du 02 avril 1981 portant
législation générale sur les mines et les hydrocarbures,
telle que modifiée par l'ordonnance-loi n° 82-039 du 5 novembre
1982, (J.O n° 22 du 15/11/1982, p10) : « Aux conditions
indiquées au présent chapitre, certains gisements d'or, de
diamant ou de toute autre matière ou substance concessible
déclarée précieuse, peuvent faire d'objet d'une
exploitation artisanale. Il y a exploitation artisanale, lorsque les facteurs
techniques et économiques qui caractérisent les gisements
ci-dessus décrits ne permettent pas d'en assurer une exploitation
industrielle au sens de la présente législation et de ses mesures
d'exécution ».
Mais, avec l'avènement du code minier de 2002,
l'exploitation minière artisanale ne s'arrête pas uniquement aux
pierres précieuses. Elle s'étend à toutes substances
minières (cuivre, cobalt, zinc, argent,
hétérogénite, malachite, cassitérite, coltan,
etc.). Mais, l'idée d'organiser des zones d'exploitation minière
artisanale remonte en 1981, avec l'ordonnance-loi n°81-013 du 2 avril 1981
susdite.
L'avènement de l'exploitation minière
artisanale arrive avec certaines situations (ou phénomènes) qu'on
n'observait pas avant. Il s'agit : la présence des femmes et des enfants
dans des sites miniers artisanaux et l'apparition des campements où
résident les exploitants miniers artisanaux (les creuseurs). Ce qui nous
intéresse dans la présente étude, c'est la présence
des enfants dans des zones d'exploitation minière artisanale. Cette
présence a suscité notre curiosité, ainsi, nous avons pris
l'initiative d'en faire l'objet d'étude pour ce mémoire.
1.1.2. Objet de recherche
L'objet n'est pas un donné qui existerait en soi,
à l'état naturel. C'est un construit, un produit de l'effort
intellectuel (Lupitshi : 2013, 61). Ce même auteur poursuit qu'à
la base de tout processus de recherche scientifique, on considère qu'il
y a un problème dans la société généralement
pensé en termes d'un malaise. Pour ce faire, le chercheur
intéressé se décide
9
d'amorcer une réflexion sur ce malaise (ce
problème) qui devient ainsi son objet d'étude (Lupitshi : 2013,
87). Luc Albarello (2004, 52) renchérit que « se donner un objectif
de recherche spécifique, c'est en quelque sorte exprimer sa
volonté de mieux connaitre une partie d'un champ préalablement
défini ». La présence des enfants dans des sites
d'exploitation minière artisanale a attiré notre attention.
Ainsi, nous en faisons une étude que nous nommons : Analyse
criminologique de la présence des enfants dans des sites miniers
artisanaux à Kolwezi. Comme le disent Quivy et Campenhoudt (2006, 17),
« si nous choisissons de traiter un sujet donné, c'est
forcément parce qu'il nous intéresse. Nous en avons presque
toujours une connaissance préalable et souvent une expérience
plus ou moins concrète. Peut-être même sommes
désireux de réaliser notre recherche pour mettre au jour un
problème social ».
Cette étude se fonde sur les données
empiriques, et consiste en la compréhension du phénomène
sous examen à partir de l'observation et des discours des acteurs
concernés. Notre grand souci est d'éclairer les jeux, enjeux et
logiques derrière la présence des enfants dans les zones
d'exploitation minière artisanale et ce, malgré les
arrêtés et autres mesures officielles d'interdiction de leur
présence dans ces sites.
La construction de l'objet de recherche consiste dans une
élaboration provisoire des notions ou des concepts qui vont être
au centre de l'enquête afin de circonscrire de façon la plus
judicieuse et la plus possible, de préciser un certain nombre
d'indicateurs pertinents susceptibles, de répondre aux questions qu'un
chercheur se pose (Robert, 2005, 435).
La présence des enfants dans des sites miniers
artisanaux est une situation qui pose problème dans la
société congolaise. La loi interdit leur présence dans ces
sites parce qu'ils sont des personnes vulnérables en pleine croissance.
De ce fait, ils sont protégés par les lois tant nationales
qu'internationales, que la RD Congo a ratifiées. C'est le cas de la
convention internationale des droits de l'enfant, du 20 novembre1989,
ratifiée par la République Démocratique du Congo en date
du 27 Septembre 1990, etc. En 2009, la RDC édicté sa propre loi
pour la protection de l'enfant. Il s'agit de la loi n°09/001 du 10 janvier
2009 portant protection de l'enfant. L'exposé de motif de cette la loi
déclare : la condition de l'enfant dans le monde en raison de sa
vulnérabilité, de sa dépendance par rapport au milieu, de
son manque de maturité physique, intellectuelle et émotionnelle,
nécessitant des soins spéciaux et
L'article 1 de la loi n° 007/2002 du 11 juillet 2002
portant code minier, donne toute une série des définitions dans
lesquelles nous retenons celles qui nous intéressent :
10
une protection particulière n'a cessé
d'interpeller depuis un certain temps la communauté internationale et
nationale(...).
A Kolwezi, deux arrêtés urbains du Maire de la
ville ont été pris. Il s'agit interdisent la présence des
enfants et des femmes porteuses des enfants dans des zones d'exploitation
minière artisanale. Il s'agit des arrêtés
n°2006/04/VK/B/M du 20 avril 2006 portant interdiction de la
présence des enfants mineurs dans des sites d'exploitation
minière artisanale et de l'arrêté n°007/22/VK/B/M du
15 novembre 2007 portant l'interdiction de la présence des femmes
porteuses des enfants de bas âges dans les carrières sur toute
l'étendue de la ville de Kolwezi (voir l'annexe n°7 à la
page 123 et l'annexe n°8 à la page 124). Les motivations de ces
deux arrêtés indiquent que la manière dont l'environnement
des sites d'exploitation minière artisanale est constitué, n'est
pas propice pour les enfants par rapport à leur santé,
croissance, éducation et instruction. Les enfants sont des personnes
vulnérables et méritent une protection sociale. Etant
vulnérable, les enfants méritent une protection sociale.
Le code minier de 2002 déclare à l'article 26 :
sans préjudice des dispositions de l'article 27 (...), seules les
personnes physiques majeures de nationalité congolaise peuvent
acquérir et détenir les cartes d'exploitant artisanal et les
cartes de négociant.
Malgré toutes les interdictions faites par
l'autorité administrative à travers les deux arrêtés
susmentionnés, le constat fait sur terrain montre que les enfants sont
toujours présents dans plusieurs zones d'exploitation minière
artisanale à Kolwezi.
Il convient de préciser que dans les lignes qui
suivent sont explicitées quelques concepts afin de dissiper toute
équivoque.
1.1.2.1. Quelques concepts mobilisés dans ce
travail
L'article 2 de la loi n° 09/001 du 10 janvier 2009
portant protection de l'enfant en RD Congo définit le concept «
enfant » comme étant toute personne âgée de moins
de 18 ans.
11
- Activités Minières : tous services,
fournitures ou travaux de l'art des mines directement liés à la
prospection, à la recherche, à l'exploitation minières et
aux substances minérales, y compris les travaux de développement,
de construction et d'infrastructure.
- Exploitation Artisanale : toute activité par
laquelle une personne physique de nationalité congolaise se livre, dans
une zone d'exploitation artisanale délimitée en surface et en
profondeur jusqu'à trente mètres au maximum, à extraire et
à concentrer des substances minérales en utilisant des outils,
des méthodes et des procédés non industriels.
- Minerai : toute roche contenant un ou plusieurs
minéraux possédant un ou plusieurs éléments
chimiques ayant une valeur économique.
- Opération Minière : toute activité
de recherche et/ou d'exploitation des substances minérales.
- Périmètre : une superficie
délimitée en surface et indéfiniment en profondeur sur
laquelle porte un droit minier ou un droit de carrière.
- Substance minérale : tout corps naturel inerte
ou artificiel contenant un ou plusieurs minéraux sous forme amorphe ou
cristalline, solide, liquide ou gazeuse ayant une valeur
économique.
- Zone d'Exploitation Artisanale : l'aire
géographique, délimitée en surface et en profondeur, par
le Ministre, et contenant un ou plusieurs gisements d'Exploitation
Artisanale.
- Carrière : tout gisement des substances
minérales classées en carrières exploitable à ciel
ouvert et/ou toute usine de traitement de produits de cette exploitation se
trouvant dans le périmètre de carrière pour
réaliser leur transformation en produits marchands, y compris les
installations et les matériels mobiliers et immobiliers affectés
à l'exploitation.
Par ailleurs, la réalité de terrain montre que
l'exploitation minière artisanale ne se fait pas uniquement dans les
zones d'exploitation artisanale créées par l'Etat. Les
exploitants miniers artisanaux (creuseurs) créent spontanément
des sites miniers où ils exploitent les minerais sans l'autorisation
préalable de l'autorité compétente, parfois même
dans les concessions minières appartenant aux entreprises
privées. Plusieurs concessions minières appartenant à ces
entreprises sont envahies par les exploitants miniers artisanaux. Cela est le
cas des sites où nous avons récolté les données
pour cette enquête. Tous ces sites appartiennent à la
Gécamines.
12
Quivy et Campenhoudt trouvent que la meilleure manière
d'entamer un travail de recherche en sciences sociales consiste à
s'efforcer d'énoncer le projet sous la forme d'une question de
départ. Par cette question, le chercheur tente d'exprimer le plus
exactement possible ce qu'il cherche à savoir, à élucider,
à mieux comprendre. La question de départ servira de premier fil
conducteur à la recherche (2006, 35). Lupitshi poursuit : une fois
l'objet d'étude défini et le champ d'étude circonscrit, il
importe qu'un questionnement de recherche pertinemment élaboré
cimente la base de l'étude menée (2013, 87). Il est donc
important pour nous de formuler une question claire et précise qui
oriente notre recherche : Comment expliquer la présence des enfants dans
des sites miniers artisanaux à Kolwezi ?
Une question de départ est tel que les montrent Beaud,
S. et Weber, F. (2008, 34) : basée sur un thème qui vous
parle, à propos duquel vous avez envie d'en savoir plus, de
découvrir des choses, et plus tard de les faire savoir.
La présente recherche est qualitative et s'inscrit
dans une démarche inductive. Delauriers et Kérisit, repris par
Lupitshi (2013, 62) font remarquer que dans la recherche qualitative l'objet de
recherche se construit progressivement, en lieu avec le terrain, à
partir de l'interaction des données recueillies et de l'analyse qui en
est tirée. Lupitshi poursuit que pour ces deux auteurs, il faut lire
ce que les autres chercheurs ont écrit avant nous, il faut en quelques
sorte monter sur leurs épaules de façon à voir plus
loin, et ceci, pensons-nous, quel que soit le tracé de recherche
suivi (inductif ou hypothético-déductif) (2013, 62). Ceci dit, il
importe de passer à l'étape de l'état de la question.
1.1.3. Etat de la question
Lire les travaux déjà effectués sur
l'objet de recherche que l'on veut traiter, cela permet au chercheur de se
fixer sur ce qui a déjà été dit sur l'objet en
question, s'y inspirer et faire une démarcation. Selon Paillé et
Mucchielli (2005, 38) l'homme ne naît pas seul et ne connait pas
seul. Il lui est impossible de faire l'expérience de quoi que ce soit en
l'absence d'un univers de référence, lequel forme le creuset de
son expérience. Dans ce même cadre d'idées, Lupitshi
(2013, 23) poursuit que l'état de la question ou du problème
traité permet de se rendre compte des pistes précédemment
exploitées, des aspects déjà abordés et, de relever
leurs mérites, leurs manques et éventuellement leurs limites, ce
qui aide à préciser comment les nouvelles recherche se
démarquent des précédentes dans la définition et la
construction de
13
leurs objets. Il poursuit que dans le chef des chercheurs,
deux logiques justifient donc le sens de l'état de la question : pour
certains, il faut connaître pour modifier tandis que pour d'autres, il
faut connaître pour mieux connaître. Deux types de publications sur
la problématique «enfant» sont facilement observables dans
l'environnement de notre école de criminologie. La première
catégorie est constituée des publications qui traitent « du
travail des enfants dans des sites miniers artisanaux ». Enfin, la
deuxième catégorie concerne les publications qui parlent des
enfants dits : « enfants de la rue », « enfants dans la rue
», soit « enfants en situation de la rue », ou encore « les
jeunes en situation de la rue ».
1.1.3.1. Publications portant sur le travail des enfants
dans les sites miniers
Artisanaux
Parmi ces travaux, nous relevons à titre prioritaire
:
- Le rapport du Groupe One (2007) sur la problématique
du travail des enfants dans les mines et carrières au Katanga. Ce
rapport fait état du travail des enfants dans les mines et
carrière du Katanga et démontre que les conditions de travail et
d'emploi sont mauvaises et souvent très dangereuses. Certains enfants
travaillent avec leurs parents avec lesquels ils constituent une unité
de production. Ainsi, plusieurs travaux sont exécutés par les
enfants. Il s'agit : le creusage, le ramassage, le tamisage, le lavage le
triage, le transport. Ce rapport conclu que l'exécution de tel ou tel
autre travail est fonction des tranches d'âges.
- le rapport de l'Observatoire du Changement Urbain
(2008)1 sur le travail des enfants dans les mines et
carrières du Katanga, cas du bassin minier de Kipushi, Likasi et Kambove
». Il est clairement démontré que les enfants
exécutent des travaux dans les sites miniers pour leur survie. La
proximité géographique joue un rôle important dans
l'attrait des enfants dans les carrières et les mines, poussant ainsi
les enfants à abandonner les études. L'appartenance à une
famille pauvre et aussi le fait d'avoir les proches (les amis et membres de la
famille) travaillant dans les mines et carrières attirent les enfants
à se rendre dans les carrières. Une typologie de travaux
qu'exécutent les enfants est présentée, ainsi que leurs
revenus.
1 Rapport financé par l'ONG Groupe One (Groupe
de recherche et d'action sur le développement durable et le
développement économique local).
14
- Le rapport BIT (2009) sur les questions de genre, le
travail des enfants et les pires formes du travail des enfants dans les mines
et carrières : le cas du Burkina-Faso, fait remarquer que le travail des
enfants est un fléau mondial. Il établit une typologie entre le
genre et le travail des enfants. Il poursuit que le genre joue un rôle
déterminant dans l'exécution des travaux. Ainsi, les
garçons ont un type de travaux, et les filles en ont également.
Ce rapport conclu que les enfants sont souvent très mal payés
voire pas du tout rémunérés. Les plus souvent leurs
conditions de travail dépendent entièrement de l'employeur, au
mépris de leurs droits. Ils sont privés d'écoles, des
jeux, et d'activités sociales, ainsi que du soutien psychologique de
leurs familles. Ils sont régulièrement confrontés à
la violence physique et aux abus sexuels.
- Seydou Keïta (2001), Etude sur les mines
artisanales et les exploitations minières à petite échelle
au Mali. Il affirme que même si on ne connaît pas leurs
nombres, des enfants (garçons et filles) travaillent dans de nombreux
sites au Mali. Les risques et les conditions de travail sont évidemment
différents, selon que ces activités sont exercées en
galerie, à ciel ouvert ou dans le lit des rivières. Il
établit une typologie de travaux selon les garçons et les filles
: Le travail souterrain est réservé aux hommes. Les
instructions de la police minière traditionnelle interdisent le travail
des filles et des garçons dans les mines souterraines. Par contre,
certains travaux sur les sites sont exclusivement réservés aux
jeunes garçons et aux petites filles. Il s'agit essentiellement du
transport et du traitement du minerai, les corvées d'eau et la
surveillance des bébés sur le site. Le minerai, une fois
remonté du fond des puits est transporté par les enfants sur la
tête ou sur le dos, rarement dans des brouettes ou des poussepousses.
Il poursuit que parmi les autres activités exercées par les
enfants sur les sites miniers, on peut citer :
- La préparation et la vente de repas et de
nourritures ;
- La vente ambulante ou à poste fixe de boisson, de
cigarettes, de beignets ;
- Les opérations de concassage, broyage, pilage et le
tamisage du minerai.
Il termine en disant que la précarité de la
situation alimentaire des enfants constitue un autre facteur de risque sur les
sites miniers. En effet, dans de nombreux cas, les mineurs ne mangent qu'un
léger petit déjeuner le matin avant de partir sur les sites. Le
repas de midi en général insuffisant et de qualité
très médiocre ne suffit pas pour compenser les besoins
énergétiques de la journée.
15
- Mutombo Mwasa (2011), Enjeux de l'application des
mesures interdisant la présence des enfants dans l'exploitation
minière artisanale à Kolwezi. L'auteur étudie
l'efficacité et/ ou l'inefficacité de deux arrêtés
urbains pris par le Maire de la ville de Kolwezi, portant respectivement
interdiction de la présence des mineurs et des femmes porteuses des
enfants de bas âges dans les carrières sur toute l'étendue
de la ville de Kolwezi. Il remarque que malgré toutes les mesures prises
par l'autorité locale, les enfants sont toujours présents dans
les sites miniers en train de travailler. L'étude démontre qu'il
y a des enjeux qui font que les enfants sont toujours bien présents dans
des sites miniers quand bien même que les mesures « draconiennes
» ont été prises pour les empêcher d'y accéder.
Pour ce fait, l'auteur estime même qu'une des démarches
acceptables, serait d'abord la reconnaissance du travail des enfants par le
pouvoir public, l'organisation des enfants en association pour la
défense de leurs droits, l'identification des personnes morales ou
physiques qui profitent du travail des enfants pour une contribution
conséquente aux efforts de réinsertion socioéconomique des
enfants investissant les sites miniers.
- Olivier Kahola (2008), Minings artisanaux : Quel avenir
pour les enfants mineurs à Kolwezi ? L'auteur affirme que les
enfants sont exploités dans les carrières. Leur présence
dans ces sites est une preuve éloquente que les familles n'ont plus la
capacité de contenance. L'auteur déclare : Il y a des enfants
qui ne s'intéressent plus à l'école. Cette dernière
est perçue comme un passetemps, étant donné qu'elle ne
donne aucune garantie financière pour une personne qui s'y investit.
Ainsi, ils préfèrent se lancer dans une activité
génératrice des revenus. Les carrières offrent plus
de chance aux enfants d'abandonner l'école que de continuer. Toutes les
conditions sont réunies pour que l'emprise des carrières attire
plus les enfants. Il conclut que les carrières les plus visitées
par les enfants sont celles qui sont à proximité de leurs
habitations. Ils parcourent moins de 5 Km pour atteindre leur lieu de
travail.
Toutes ces publications que nous venons de passer en revue,
traitent principalement du travail des enfants dans des sites miniers
artisanaux. Or, il n'y a pas que ça qui explique la présence des
enfants dans des sites miniers artisanaux. Ces derniers s'adonnent
également à d'autres activités sur les sites miniers.
C'est ce que ce travail tentera d'élucider.
16
1.1.3.2. Publications portant sur les enfants dits :
« enfants de la rue », « enfants dans la rue », «
enfants en situation de la rue », ou encore « les jeunes en
situation
de la rue »
Dans cette catégorie de publications, nous citons :
- Lupitshi (2013), Sortir de la rue : les trajectoires
des jeunes de Lubumbashi en RD Congo. L'auteur conclut, nous citons :
« Derrière les trajectoires de rue et de sortie de la rue
décrites se lit en filigrane la réalité sociale
congolaise. Les expériences vécues par les jeunes en familles,
dans la rue et dans les structures d'encadrement montrent que le système
social congolais en général accuse de nombreuses faiblesses
organisationnelles et fonctionnelles (...) ». Il poursuit que « la
sortie de la rue des jeunes de Lubumbashi, est un phénomène
processuel, fluide, multiforme et multifactoriel. Il y a des variables qui
entrent en compte, telles que : l'origine du jeune, la raison d'éjection
dans la rue, le genre ou le sexe du jeune, la forme d'utilisation et
d'appartenance au monde de la rue, les ressources développées par
le jeune et la voie de sortie empruntée. Leur avenir n'est pas
voué à la fatalité. Des possibilités de sortie de
jeunes de la rue sont observables ». Etant jeunes et ambitieux, leur
parcourt de vie bougent toujours.
- Malemba (2003), Enfant dans la rue, le sans et hors
famille. L'auteur déclare que le phénomène des
enfants dans la rue constitue un drame que subit sans le vouloir la population
à l'heure actuelle. Il affirme qu'il y a beaucoup d'enfants qui
travaillent mais qui ne sont pas tous visibles à cause de la
présence d'une zone d'ombre. Le phénomène « enfant
dans la rue » constitue un drame social qui interpelle l'Etat, les parents
ainsi que toute la communauté congolaise. Il émet le souhait de
pouvoir créer au Congo un environnement social pour insérer
toutes les filles et garçons qui vivent encore dans la rue. Il
suggère à l'Etat congolais de pouvoir appliquer une politique
sociale susceptible de rendre les familles capables d'encadrer leurs
enfants.
Après le passage en revue sélectif de quelques
littératures locales traitant de la question des « enfants »,
il nous est nécessaire de présenter la problématique
17
1.1.4. La problématique de la
recherche
Lupitshi (2013, 94) montre qu'il y a deux courants de
pensée dans la conceptualisation de la problématique. Le premier
voit dans la problématique l'ensemble de questions que soulève un
sujet de recherche ou plutôt un ensemble de questions justifiant la
raison d'être de la recherche menée. Les tenants de cette approche
considèrent qu'il y a justement un problème qui justifie que l'on
se penche sur tel sujet pour en faire un objet de recherche (...). Une autre
posture conçoit la problématique comme l'angle théorique
adoptée pour approcher un objet d'étude. Quoi qu'il en soit,
Quivy et Campenhoudt (2006, 75) explique que la problématique est
l'approche ou la perspective théorique qu'on décide d'adopter
pour traiter le problème posé par la question de départ.
Elle est l'angle sous lequel les phénomènes vont être
étudiés, la manière dont on va les interroger. Nous
souscrivons à cette deuxième conceptualisation.
La présente recherche est qualitative et s'inscrit
dans une démarche inductive, avec une visée compréhensive,
comme le soutient Ngoie (2008, 66) pour qui « l'émergence ou la
réémergence de nouveaux problèmes sociaux nécessite
une démarche compréhensive pour les configurer à travers
leurs diverses manifestations ou leurs faces cachées ou invisibles
». La démarche qualitative génère une connaissance
fondée sur le vécu des acteurs de terrain ou «
l'étude du quotidien et de l'ordinaire » (Deslauriers et
Kérisit : 1997, 88). Les données recueillies par l'approche
qualitative viennent d'un contexte social dans lequel se sont «
réellement » déroulés les faits étudiés
(Mason : 1996, 4). Le but de ces enquêtes, comme le formulent Deslauriers
et Kérisit (1997, 88), est « de rendre compte des
préoccupations des acteurs sociaux, telles qu'elles sont vécues
dans le quotidien ».
Nous cherchons à comprendre toute la situation
relative à la présence des enfants dans les sites miniers
artisanaux susmentionnés. Cette étude remet en cause
différentes études qui réduisent la présence des
enfants dans des sites miniers à la seule exploitation minière
artisanale. Nos observations du terrain, montrent que tout en étant dans
des sites miniers artisanaux, les enfants vaquent à plusieurs
occupations et non pas seulement à l'exploitation minière. Ainsi
dit, la partie suivante est consacrée à l'intérêt
porté sur l'objet et aux grilles de lecture des faits.
18
1.1.4.1. L'intérêt de l'objet à
l'étude
Pour nous, l'intérêt de cette étude
réside premièrement dans le fait qu'à Kolwezi, les sites
miniers artisanaux sont des endroits interdits aux enfants sur décisions
de deux arrêtés urbains susdits du Maire de la ville. Il s'agit
des arrêtés urbains n°2006/04/VK/B/M du 20 avril 2006 portant
interdiction de la présence des enfants mineurs et des femmes porteuses
des enfants de bas âges dans les carrières sur toute
l'étendue de la ville de Kolwezi. Le deuxième arrêté
urbain est celui n°2007/22/VK/B/M du 15 novembre 2007 portant renforcement
des mesures relatives à l'interdiction de la présence des enfants
mineurs et des femmes dans les carrières sur toute l'étendue de
la ville de Kolwezi. Les articles 1ère et
2ème du premier arrêté énoncent :
· Article 1 : Les travaux d'enfants mineurs et de femmes
porteuses des enfants à bas âges sont interdits dans tous les
sites et carrières d'exploitation artisanale des substances
minérales.
· Article 2 : Les opérateurs miniers qui
utiliseront cette catégorie de personnes seront passibles de peines
prévues par la loi en cette matière.
Tandis que l'article 1ère de
l'arrêté urbain n°2007/22/VK/B/M du 15 novembre 2007,
interdit les travaux des enfants et des femmes dans les sites miniers, en ces
termes : les travaux d'enfants mineurs et des femmes sont interdits dans tous
les sites et carrières d'exploitation artisanale des substances
minérales.
Le code minier congolais de 2002, conditionne l'octroi de la
carte d'exploitation artisanale à la majorité.
C'est-à-dire, pour avoir la carte d'exploitation artisanale, il faut
être majeur. Ces dispositions sont clairement définies dans
l'article 26 qui énonce : Seules les personnes physiques majeures de
nationalité congolaise peuvent acquérir et détenir les
cartes d'exploitant artisanal et les cartes de négociant. L'article 27
énumère les personnes qui ne sont pas éligibles dans
l'exploitation minière artisanale. Il s'agit de toute personne
frappée d'incapacité juridique prévue à l'article
215 de la loi n°87-010 du 01 août 1987 portant Code de la famille.
L'article 215 du code de la famille énumère en ces termes les
incapables : les mineurs, les majeurs aliénés interdits, les
majeurs faibles d'esprit, prodigues, affaiblis par l'âge ou infirmes
placés sous curatelle, etc.
19
Deuxièmement, l'intérêt de cette
étude réside dans la mesure où elle s'intéresse aux
êtres protégés par toutes les communautés humaines,
que sont les enfants. C'est comme le témoigne Malemba (2003, 9 et 50)
que chaque société humaine considère l'enfant comme
espoir de son avenir et de son devenir. L'enfant l'est grâce qu'il permet
à sa société de se régénérer et de se
maintenir en nombre d'une part, et d'autre part de trouver un agent devant
assurer la transmission de ses valeurs propres, celles qui fondent son
identité culturelle. Il poursuit qu'auprès des populations
congolaises, l'enfant représente un investissement humain qui garantit
la postérité des ancêtres. Il est également un
investissement qui potentialise le groupe social, autant qu'il
représente le goulot par lequel passent inévitablement la
prospérité économique, la stabilité morale et
l'harmonie sociale. Ces phrases montrent clairement que l'enfant a une place de
choix dans la communauté congolaise.
Troisièmement, en tant que criminologue, les enfants
qui sont dans les sites miniers artisanaux sont des acteurs appart entier. Ils
remplissent divers rôles dans les sites au même titre que les
adultes. Mutombo (2011, 88-102) définit le rôle comme étant
un comportement individuel attendu de quelqu'un par un groupe dans une
situation sociale donnée et définie par les normes sociales. Il
représente une conduite explicite et peut être
considéré comme une mise en actes du statut. Ainsi, il
présente différents rôles que remplissent les enfants dans
les sites miniers artisanaux : le rôle de sécurité, le
rôle de courroie de transmission, (enfant comme messager, enfant comme
informateur), le rôle de producteur et enfin le rôle de sauvegarde.
Les uns s'adonnent aux activités rémunératrices,
constituant ainsi une main d'oeuvre non négligeable. Les autres par
contre s'adonnent aux activités non rémunératrices dans
lesquelles ils trouvent du plaisir.
Etant vulnérables, l'environnement minier artisanal
tel qu'il se présente, n'est pas propice pour leur bonne croissance. De
ce fait, cela les met en situation dite « enfants en danger ». Jean
Audet et Jean-François Katz (2006, 111-116), expliquent que les «
enfants en dangers» sont les enfants maltraités et les enfants en
risque. Les enfants maltraités sont ceux qui sont victimes de violences
physiques, cruauté mentale, abus sexuels, négligences lourdes
ayant des conséquences graves sur leur développement physique et
psychologique. Les enfants en risque sont ceux qui connaissent des conditions
d'existence menaçant leur santé, leur sécurité,
leur moralité, leur éducation ou sans entretien mais sans qu'ils
soient maltraités. Ces deux notions sont évoquées par
rapport à certaines situations de risque qu'ils traversent et
20
certains comportements de maltraitance qu'ils subissent dans
les sites miniers artisanaux de la part des creuseurs adultes. Ils sont
exposés à plusieurs risques de par leur présence dans les
sites miniers. Certaines situations telles qu'elles se passent dans ces sites,
ne contribuent pas à la bonne éducation des enfants, par contre,
elles les exposent à l'immoralité. Ainsi, face à toutes
ces situations détaillées ci-haut, nous constatons que
l'intérêt visé par les décideurs politiques
d'interdire la présence des enfants dans les sites miniers artisanaux
afin de les protéger contre tous ces risques, ne marche pas de pair avec
l'intérêt des acteurs en question. Ils montent des
stratégies pour échapper au contrôle social et
accèdent aux sites miniers. Face à cette situation, l'idée
nous est arrivée d'en faire une étude criminologique parce que
nous constatons un écart entre les prescrits de la loi et la
réalité sociale. Notre grand souci est de comprendre, de
dégager et d'expliquer les complexités et les différentes
facettes de cette situation.
1.1.4.2. Les grilles de lecture des faits
Quivy et Campenhoudt (2006, 85), soulignent qu'opter pour
une théorie revient donc à dire par quoi l'objet va être
expliqué, c'est-à-dire à déterminer à quoi,
à quel type d'élément, le phénomène
étudié va être relié pour le rendre
intelligible. Dans le même angle d'idée, Lupitshi (2013,
95-96) renchérit qu'un même objet d'étude peut susciter
plusieurs appréhensions théoriques. C'est au chercheur qu'incombe
l'impérieuse charge de préciser, de justifier le
présupposé théorique qu'il entend privilégier dans
l'abord et la lecture des faits.
Pour mieux saisir le phénomène sous
étude afin de mieux le comprendre, les observations faites du terrain
par rapport à la question de recherche nous orientent à opter
deux grilles de lecture suivantes : la théorie d'acteur social et celle
d'interactionnisme symbolique.
1.1.4.2.1. La grille de lecture d'acteur
social
Debuyst (1990, 25-26) explique que l'acteur social est un
sujet non passif et non déterminé, un sujet qui n'est pas non
plus une abstraction mais porteur d'un point de vue qu'il revendique.
Landreville et les autres repris par Ngoie (2009, 73) explique que dans le
déroulement scénique, l'acteur social est un stratège,
doté d'un point de vue ou des
21
rationalités multiples qui justifient ses actions, le
choix des moyens pour atteindre ses objectifs, la défense de ses
intérêts et de ses valeurs.
Digneffe (1990, 360) résume en ce terme le
comportement de l'acteur social : « L'acteur poursuit la plupart du temps
des objectifs peu clairs, ambigus, voire contradictoires (...). Son
comportement est cependant actif ; même la passivité est d'une
certaine manière un choix. Le comportement de l'acteur a toujours un
sens à découvrir. Il est rationnel par rapport à des
opportunités et par rapport au comportement des acteurs. C'est un
comportement qui a toujours deux aspects. Un aspect offensif dans la saisie
d'opportunités en vue d'améliorer sa situation et un aspect
défensif qui vise au maintien et à l'élargissement de sa
capacité d'action. L'individu a les possibilités de choix, entre
plusieurs comportements, conduites ou stratégies. L'individu devient
acteur social quand il peut utiliser ses possibilités dans ses relations
avec d'autres acteurs ».
Ngoie (2009, 50) renchérit que « l'acteur social
s'engage dans une interaction avec des objectifs déclarés ou
implicites. Il est animé par certains mobiles, avoués ou non, par
des intérêts particuliers ou un désir de tirer un petit
plus des interactions (...). Il s'introduit dans un arsenal de relations dans
lesquelles il vise relativement un quelconque intérêt.
Les entretiens recueillis ainsi que les observations faites
dans le cadre de cette étude, traduisent l'importance d'usage de cette
grille de lecture, par le fait que les enfants sont évidemment des
acteurs à part entiers. Ils montent des projets, arrêtent des
stratégies visant à contourner les obstacles auxquels ils sont
confrontés. Ils jouent des rôles divers et importants dans les
sites miniers artisanaux. Ils ont leur manière de se représenter
les sites miniers artisanaux, et leur manière de vivre ces sites.
La deuxième grille de lecture d'interprétations
des faits que nous mobilisons dans cette étude, c'est la grille de
lecture d'interactionnisme symbolique, que nous présentons dans la
partie suivante.
1.1.4.2.2. La grille de lecture d'interactionnisme
symbolique
Pour Le Breton (2004, 45-56) l'individu est un acteur
interagissant avec les éléments sociaux et non un agent passif
subissant de plein fouet les structures sociales à cause de son habitus
ou de la « force » du système ou de sa culture d'appartenance.
L'individu a des
22
raisons d'agir et c'est cela que l'interactionnisme prend
en considération, tant au niveau du sujet lui-même que des
logiques sociales où il est immergé. L'interactionnisme ne prend
pas l'individu comme principe d'analyse, mais raisonne en termes d'actions
réciproques, c'est-à-dire d'actions qui se déterminent les
unes les autres. L'individu attribue du sens à ses actions, à
leurs retentissements, il interprète aussi celle des autres et il agit
en conséquence. L'interaction n'englobe pas seulement les acteurs en
coprésence, mais une multitude d'autres, invisibles, qui
imprègnent leur rapport au monde.
Miles et Huberman (1992, 22) poursuivent que
l'interprétation vient à travers la compréhension
d'actions de groupes et d'interactions. Dans les deux cas, il y a «
interprétation » inévitable des significations
réalisée tant par les acteurs sociaux que par le chercheur. Cette
approche ne conduit pas à des lois universelles mais plutôt
à une « compréhension pratique » des significations et
des actions. On tient compte du sens que les individus donnent à
leurs agissements, du fait des interactions qui naissent dans le contact entre
enfants eux même et aussi entre les enfants et les autres acteurs
évoluant dans le secteur d'exploitation minière artisanale. Il
est démontré que les sites miniers artisanaux sont des milieux
d'influences manifestes et latentes. Les individus interprètent les
réactions d'autrui pour s'y ajuster.
Pour Padioleau et Strauss cité par Ngoie (2009, 50),
« l'interaction est une situation de face à face qui met en
relation (réversible et simultanée) deux sujets qui jouent
inversement le rôle d'émetteur et celui de récepteur et qui
s'influencent directement. La succession de réactions réciproques
fait que l'interaction est toujours traversée par des flux, des vagues
et des tempêtes, des moments de convergence et des temps de divergence
entre les acteurs ».
Les interactions sont des lieux favorables d'affrontements
voire de confrontations des actions et réactions soutenues par des
logiques différentes (Ngoie : 2009, 50). Les interactions entre les
enfants et les autres acteurs dans des sites miniers artisanaux ont une grande
importance et justifient également la mobilisation de cette grille de
lecture. Ce travail s'intéresse également aux interactions entre
les enfants et les autres acteurs présents dans les sites miniers
artisanaux (parents, amis, connaissances, creuseurs, négociants, etc.)
qui sont des acteurs au processus interactif dans le secteur minier artisanaux.
Les enfants, sur les sites
23
miniers, ne sont donc pas des sujets isolés, ils
évoluent dans un faisceau des relations complexes justifiant leur
présence.
Après cette partie consacrée aux grilles de
lecture, nous entamons la partie méthodologique qui nous éclaire
sur la démarche méthodologique utilisée, les techniques
ayant servi à la récolte des données, à
l'échantillonnage et enfin au terrain ayant servi à la
récolte même des données.
1.2. Dispositif méthodologique
1.2.1. Introduction
La recherche scientifique est une praxis de bricolage
utilisant des pièces éparses, des puzzles pour
construire-déconstruire un fait étudié, décrire
et/ou expliquer un phénomène objectivable, rendre compte de la
« manière de faire » ou des résultats. Les impasses
ainsi que les aléas sont ses lots quotidiens dans une pratique
d'aller-retour théorique, épistémologique et empirique.
Généralement, elle mobilise trois moments essentiels : une
démarche exploratoire, une empirie et une analyse de données
(Ngoie : 2009, 65).
Cette partie circonscrit les outils méthodologiques
utilisés dans la recherche tant pour la collecte des données
empiriques que pour leur analyse. Comme le soulignent Miles et Huberman (1992,
49) : les questions de recherche nous disent ce que nous voulons savoir le
plus ou en priorité. Nous allons d'abord canaliser nos énergies
dans cette direction plutôt que dans la direction d'autres variables et
relations. Nous prendrons également des décisions
d'échantillonnage : nous nous intéresserons seulement à
certains acteurs, confrontés à certains problèmes, dans
certains contextes. Les questions nous disent aussi que nous allons avoir
besoins d'outils de recueil de données qui pourraient inclure des modes
spécifiques d'observation, d'entretiens, de recueil de documents, ou de
questionnaires.
Ainsi, cette partie comprend les points suivants : la
démarche méthodologique utilisée, le terrain ayant servi
d'observation, les techniques utilisées pour la collecte des
données, enfin le modèle d'analyse (d'interprétation) des
données en vue d'organiser le savoir qui émerge du terrain. Nous
rappelons de nouveau que cette étude s'inscrit dans la perspective de
l'approche qualitative, définie comme étant « un type de
recherche qui privilégie des données non numériques
recueillies dans le milieu naturel des personnes. Le chercheur tente
d'établir une
24
interaction avec les participants à l'étude
afin de dégager une compréhension riche et crédible du
sens que les participants donnent au phénomène à
l'étude » (Muchielli, 2004 ,183).
Alani et al, cités par Ngoie (2009, 67) explique que
l'approche qualitative s'inscrit dans une démarche inductive, «
c'est-à-dire qu'elle cherche à explorer le réel, sans
hypothèses de départ fortes, avec seulement un thème
d'enquête, mais sans présupposés sur les résultats
». Sous cet angle, le « réel est considéré comme
opaque, les faits ne parlent pas d'eux-mêmes a priori. Il va falloir les
explorer, les analyser, s'imprégner d'eux, puis prendre de la distance,
pour `voir' quelque chose ». Ainsi dit, passons à l'étape
méthodologique.
1.2.2. Choix méthodologique
Il est question ici de présenter l'approche
méthodologique utilisée dans cette étude. D'abord par
méthode, on entend une technique portant non seulement sur le recueil
mais également sur l'analyse de données (Duchesne et Haegel :
2009, 5). Ainsi, comme chemin emprunté pour réaliser cette
étude, nous nous sommes servi de l'approche ethnographique. Nous n'avons
pas utilisé cette approche comme le font les anthropologues dans le but
de décrire les coutumes et les traditions d'un groupe humain, connaitre
l'identité d'une communauté humaine, dans laquelle l'ethnographie
implique l'observation participante du chercheur pendant une longue
période voire même plusieurs années, il se trouve en
contact direct avec le groupe à étudier. Nous nous inspirons de
ce que dit Jamoulle (2002, 24) que réaliser une enquête
ethnographique, c'est localiser une problématique dans un lieu
clé, pour en dégager peu à peu la complexité et les
différentes facettes. Aussi, Miles et Huberman (1992, 23) poursuivent
que l'ethnographie reste proche du profil naturaliste. Permet un contact
approfondi avec une communauté donnée, attention portée
à des événements mondains et de la vie quotidienne et pour
les événements plus rares, participation directe ou indirecte aux
activités locales, avec un soin particulier apporté à la
description des particularités locales ; accent mis sur les perspectives
des individus et leur perception et interprétation de leur environnent
(...). Les méthodes ethnographiques tendent vers le descriptif. La
tâche de l'analyse est de colliger de multiples sources de données
(enregistrements, artefacts, journaux de bord) puis de les condenser avec une
préoccupation légèrement moindre pour la signification
théorique ou conceptuelle de ces observations.
25
Mucchielli (2004, 213), explicite que la méthode
ethnographique est une enquête sur terrain pour l'établissement
des monographies. Staphane Beaud (1996, 230), poursuit que dans la
méthode ethnographique, la technique la plus utilisée est
l'observation participante, l'observation directe et l'entretien (être
avec - faire avec - être immergé dans le milieu
enquêté). Lévi-Strauss repris par Tshinyama (2009, 53)
explique que la démarche ou description ethnographique suppose un
travail de collecte des données, qui exige généralement
une enquête sur le terrain avec observation directe, ce que les
Anglons-Saxons appellent `field work'. Une étude dans un milieu
« naturel », aller `voir sur place', être physiquement
présent dans la situation, la regarder se dérouler en temps
réel pour en rendre compte, voilà le privilège du
sociologue par rapport à l'historien dans l'observation des pratiques
(Arborio et Fournier repris par Tshinyama : 2009, 53). La démarche
ethnographique oblige une descente sur terrain pour la récolte des
données, tout en y restant le plus longtemps possible pour faire parler
les acteurs concernés.
1.2.3. Délimitation du terrain et
échantillonnage
Cette partie est consacrée aux points ci-après
: les formalités administratives, la présentation des sites de
recherche, et l'échantillonnage.
1.2.3.1. Les formalités
administratives
Avant de pouvoir descendre sur terrain, une procédure
administrative était obligatoire, afin d'avoir l'autorisation
d'accéder aux sites de recherche. Les sites que nous avons retenus pour
la collecte des données sont situés à Kolwezi, une ville
qui se trouve à 320 Km de Lubumbashi. La période de collecte des
données avait coïncidé avec celle du stage de recherche que
l'école de Criminologie octroi aux étudiants. Pour nous, le lieu
choisit pour y passer le stage de recherche était le SAESSCAM/Kolwezi
(Service d'assistance et d'encadrement du small scale mining). Pour s'y rendre,
nous avons utilisé notre propre moto de marque « Yamaha 175 ».
La période de recherche était d'un mois, allant du 3 septembre au
3 octobre 2012. La recommandation de stage de l'école de Criminologie
était adressée au chef de bureau SAESSCAM district de Kolwezi.
Pourquoi avoir choisi le SAESSCAM ? Parce que c'est le service étatique
qui gère les sites miniers artisanaux, en assistant et encadrant
techniquement les artisanaux. Comme les acteurs concernés par cette
étude sont les enfants que l'on retrouve dans des sites miniers
artisanaux à Kolwezi, il fallait
26
nécessairement passer le stage de recherche à
ce service. Le bureau du SAESSCAM à Kolwezi est situé sur
l'avenue « msiri » au numéro 293, quartier « biashara
» dans la commune de Dilala.
Le 2 septembre 2012, nous avons présenté la
recommandation au chef de bureau SAESSCAM, et le 3 septembre 2012 tel que
prévu, nous avons commencé le stage. Sur place, nous avons
été affecté au bureau chargé des techniques et
opérations, sous l'encadrement de monsieur Jean-Paul Kayeye, chef de
service chargé des techniques et opérations. Une semaine
après soit le 10 septembre 2012, nous avons amorcé les
décentes sur terrain pour la collecte des données. Les sites dans
lesquels nous avons récolté les données sont au nombre de
quatre et sont largement présentés dans les paragraphes qui
suivent. Le déplacement entre les sites a été facile,
parce que nous utilisions notre propre moto qui nous a même servi comme
moyen de transport de Lubumbashi jusqu'à Kolwezi.
A chaque fois, que nous voulions descendre sur terrain, le
chef de service SAESSCAM chargé des techniques et opérations,
nous mettait en contact téléphonique avec leurs agents commis
dans les sites. Une fois sur terrain, ce sont ces derniers qui nous facilitent
les contacts avec les acteurs concernés. Cette procédure a
été d'application uniquement dans les deux sites où il y a
présence du SAESSCAM. Il s'agit des sites qui sont à «
Mutoshi » et à « Kapata ». Les deux autres sites restant,
ne sont pas gérés par le SAESSCAM. Il s'agit des carrières
« 5 ans » et « GH ». Dans ces deux carrières, il n'y
a aucune réglementation. Chacun y entre et y sort comme et quand il
veut. Nous y sommes rendu sans aucune formalité ni contact.
1.2.3.2. La présentation des sites de
recherche
Avant de pouvoir présenter ce qui a été
pour nous le terrain de recherche, il sied de donner la définition du
mot « terrain de recherche ». Volvey repris par Lavie (2006, 53)
définit le terrain comme étant une entité
spatio-temporelle et une instance épistémique où se
manifeste l'attitude empirique d'un chercheur dans sa tentative
d'établissement de faits scientifiques. Le terrain de recherche exige au
chercheur une entrée et une sortie comme le souligne Cefaï (2006
:34) en ce terme: « l'un des principaux problèmes du terrain
est de l'accès au terrain, puis de l'installation durable dans le
terrain, enfin du retrait du terrain ».
27
Entrer sur le terrain suppose la définition de son
statut, la destinée des informations et parfois le cadrage de sa
recherche auprès des enquêtés.
La ville de Kolwezi a été pour nous le terrain
de recherche. Le choix de cette ville a été motivé
premièrement par le fait que la grande concentration d'entreprises
minières industrielles ainsi que les sites d'exploitation minière
artisanale se trouvent dans le district de Kolwezi. Deuxièmement, par le
fait que plusieurs rapports des Organisations non gouvernementales font mention
de la présence des plusieurs enfants dans des sites miniers artisanaux
à Kolwezi. Ainsi, le paragraphe qui suit décrit brièvement
la ville de Kolwezi, avant de présenter les sites ayant servi à
la récolte des données.
1.2.3.2.1. Brève description de la ville de
Kolwezi
D'après le rapport administratif de la mairie de
Kolwezi exercice 2008, le district de Kolwezi se présente comme suit :
La ville de Kolwezi est chef-lieu du district répondant par le
même nom. Ce district est souvent dénommé, district
urbano-rural, parce qu'il est composé de deux communes et de deux
territoires à savoir : les communes de « Manika » et de «
Dilala » ; Puis les territoires de « Mutshatsha » et de «
Lubudi ». La ville de Kolwezi est située à 320 Km de la
ville de Lubumbashi, capitale provinciale de la province du Katanga. Dans son
ensemble, le district de Kolwezi est limité : au Nord par le district du
Haut-Lomami, au Sud-est par la République de la Zambie et le district du
Haut-Katanga, à l'Est par le district du Haut Katanga et à
l'Ouest par le district du Lualaba.
Le district de Kolwezi est composé de 36.933
Km2 répartie comme suit : Commune de Dilala : 154
Km2, Commune de Manika : 59 Km2, Territoire de Lubudi :
17.861 Km2 et Territoire de Mutshatsha : 18.859 Km2. Le
sol est argilo-sablonneux et le sous-sol est riche en gisements miniers du
cuivre, du cobalt, de l'or, du zinc, de l'uranium et du radium. C'est en 1971
que la ville de Kolwezi avait obtenu son statut de ville, le 23 juillet 1971
par ordonnance n°71-177 (rapport mairie de Kolwezi : 2008, 12). Et en 1976
par ordonnance n°76-299 du 6 octobre 1976, les deux territoires de Lubudi
et de Mutshatsha, qui jadis appartenaient au district de Lualaba, ont
été rattachés à cette ville. Au départ, la
ville de Kolwezi était composée uniquement de deux communes
précitées. Le nom de Kolwezi vient du nom d'une rivière
qui tire sa source au niveau de l'actuel aéroport de Kolwezi. Les
activités économiques importantes restent l'exploitation
minière industrielle, à petite échelle et artisanale.
En
28
seconde position, viennent le commerce et l'agriculture.
C'est dans le district de Kolwezi où il y'a implantation de plusieurs
grandes entreprises minières telles que : Tenke Fungurume Mining (TFM),
Katanga Copper Company (KCC), Mutanda Mining (MUMI), Africa Mineral Barbados
(AMB), Boss Mining (BM), etc. Aussi, c'est dans ce district où il y'a un
grand nombre d'exploitants miniers artisanaux, communément
appelés « creuseurs ». A la tête de la ville, il y a un
maire de la ville, qui est l'autorité administrative. Après cette
brève présentation de la ville de Kolwezi, nous passons à
la présentation des sites ayant servi à la collète des
données.
1.2.3.2.2. Présentation des sites de
récolte des données
Quatre carrières ont servi comme sites de collecte des
données. Il s'agit des carrières ci-après :
· La carrière de Mutoshi ;
· La carrière 5 ans ;
· Les carrières Kamilombe ;
· La carrière GH du camp Gécamines
Kolwezi.
Pour faciliter la prise des coordonnées
géographiques de tous ces sites qui font l'objet de la récolte
des données, nous étions muni d'un appareil GPS de marque «
Garmin GPS 60 ». GPS veut dire «Global Positioning System », que
l'on traduit en français par « système de
géolocalisation par satellite ». Le premier site par où nous
avons commencé à récolter les données, c'est la
carrière Mutoshi.
Dans le tableau ci haut, nous ne présentons pas le
lieu de lavage du minerai, parce que la petite rivière où l'on
lave les minerais divise le site en deux et fait partie intégrante de
cette carrière. Il n'est pas éloigné comme dans d'autres
sites.
Ainsi, après la présentation
détaillée des sites ayant servi à la collecte des
données, nous passons à la présentation
l'échantillon.
1.2.3.3. Echantillonnage
L'échantillon de cette étude est qualitatif.
Cela est par rapport à cette recherche qui est qualitative. Lupitshi
explique que dans toute recherche où l'enquêteur ne sait pas
atteindre l'ensemble de la population soumise à l`étude, les
enquêtés sélectionnés et interrogés
constituent un échantillon quelle que soit la manière dont ce
groupe peut être désigné (2013, 130).
Nous optons pour un échantillon qualitatif par cas
multiples en considérant plus la qualité des acteurs que leur
représentativité. L'échantillon par cas multiples permet
de repérer et de sélectionner les acteurs pertinents
impliqués dans le phénomène sous-étude (Depelteau,
2006 : 27). Et comme souligne Mucchieli (2004, 237), l'échantillon
qualitatif ne met pas seulement l'accent sur la diversité des acteurs,
mais aussi sur la saturation.
Blanchet et Gotman (2013, 46) notent que définir la
population, c'est sélectionner les catégories de personnes que
l'on veut interroger, et à quel titre ; déterminer les acteurs
dont on estime qu'ils sont en position de produire des réponses aux
questions que l'on se pose.
34
Toute entreprise scientifique s'efforce de découvrir
quelque chose qui puisse s'appliquer à tous les «
éléments » d'un certain type en étudiant quelques
exemples, le résultat de cette étude étant toutefois
« généralisable » à tous les membres de cette
classe. Nous devons constituer des échantillons pour convaincre les gens
que nous savons quelques chose sur l'ensemble de cette classe
étudiée (Lupitshi : 2013, 130).
La détermination du nombre d'entretiens
nécessaires à une enquête particulière
dépend, en premier lieu, du thème de l'enquête et de la
diversité des attitudes supposées par rapport au thème, du
type d'enquête (...). D'autre part à partir d'un certain nombre
d'entretien les informations recueillies apparaissent redondantes et semblent
n'apporter plus rien de nouveau, on est tenté de ne point aller
au-delà (Blanchet et Gotman, 2013, 50).
Dès notre entrée sur terrain pour la
première fois, et durant toute la période que nous y
étions, la grande préoccupation était : « Comment
identifier les acteurs concernés » pour passer l'entretien, dans un
environnement comme les sites miniers artisanaux, où tout le monde vaque
à ses occupations. Pour ce faire, nous nous sommes appuyé sur
trois critères qui sont : l'âge, la classe et l'enrôlement
pour les élections de novembre 2011. Ces critères ont
été tous combinés afin de bien identifier les enfants sans
toutefois commettre d'erreurs. Ainsi, nous les avons utilisés de la
manière suivante :
- L'âge : A partir des observations faites sur
terrains, certains acteurs semblaient être mineurs au près des nos
yeux. Nous leur posions la question de savoir leur âge, parce que la loi
congolaise fixe l'âge de la majorité à 18 ans. Mais, cela
ne suffisait pas réellement pour confirmer la minorité de
quelqu'un, parce que certains d'entre eux ne savaient même pas leurs
âges. D'où l'importance de combiner avec les autres
critères de sélection.
- La classe : Nous avons jugé important de savoir
également les classes dans laquelle se trouvaient les acteurs. Parce que
d'après la législation congolaise en matière scolaire,
l'école primaire est prévue pour les enfants. Aussi une partie de
l'école secondaire, de la première année secondaire
jusqu'en 5 ème des humanités, soit de 13 à 17
ans. Mais, il y a toujours des personnes qui ont un âge avancé,
mais qui se retrouvent dans des classes plus inférieures que leurs
âges. D'où, il nous fallait nécessairement compléter
ces deux critères (l'âge et l'école) à un autre
critère.
35
- L'enrôlement : La période de récolte
des données pour la réalisation de ce travail scientifique, va du
3 septembre au 3 octobre 2012. Or, 'année 2012 fut l'année
postélectorale en RDC. Les élections présidentielles
accouplées aux législatives ont eu lieu le 28 novembre 2011.
Seules les personnes enrôlées, ne pouvaient participer aux
élections. Or pour s'enrôler, il fallait être adulte. Ainsi
nous avons considéré que le critère d'enrôlement
devait être adjoint aux deux premiers critères pour renforcer
l'identification des enfants dans les sites. Par rapport au critère
d'enrôlement, lorsque nous étions sur terrain, si un acteur nous
répond qu'il ne s'était pas enrôlé, nous lui posions
de nouveau la question suivante : « pourquoi tu ne t'es pas
enrôlé ? » Ceci, pour avoir la raison qui a milité
pour qu'il ne soit pas enrôlé. C'est seulement lorsque la
réponse est « je suis encore enfant », soit « je n'ai pas
l'âge de voter », soit encore « je ne me suis pas
enrôlé parce que je suis enfant » que l'acteur sera
identifié comme enfant et fera partie des acteurs concernés
à s'entretenir avec eux. C'est de cette manière que nous avons
identifié les acteurs concernés par cette recherche.
1.2.4. Dispositif de recueil des
données
Après avoir accompli un mois de récolte des
données tel que prévu sur la recommandation de stage de
recherche, le 6 octobre 2012, nous étions obligé de rentrer
à Lubumbashi pour poursuivre avec les cours au programme de DEA. La
période nous accordée pour la recherche, correspondait à
la période où les élèves sont en pleine
études (mois de septembre). Pour compléter les données,
nous avons changé les périodes d'observation. Ainsi, nous sommes
de nouveau rentré sur terrain, cette fois-ci pendant la saison
sèche, du 15 juillet au 22 août 2013. Cette période
correspond aux vacances scolaires. L'alternance, nous a permis d'observer
d'autres situations qu'on n'aurait pas observées pendant la
période scolaire.
La qualité et la pertinence des savoirs produits,
dépendent donc en grande partie de l'abondance et de la fiabilité
des informations recueillies sur le terrain (Yann : 2006, 24-25). Les
instruments méthodologiques sont sélectionnés
dépendamment « des références théoriques de la
recherche » (Ruquoy : 1995, 60, repris par Ngoie : 2009, 83). Par
ailleurs, les instruments de collectes des données utilisés dans
cette recherche sont l'observation et l'entretien.
36
1.2.4.1. L'observation
L'Ecole de Chicago, dont les études principales
portent sur les faits et gestes de la vie ordinaire, les manières
d'être et les modes de vie, prône l'observation des
phénomènes sociaux dans leur cadre naturel (Blanchet et Gotman :
2013, 13). L'observation directe est celle où le chercheur
procède directement lui-même au recueil des informations, sans
s'adresser aux sujets concernés. Elle fait directement appel à
son sens de l'observation (Quivy et Campenhoudt : 2006, 151). Pour autant,
cette méthode reste l'idéal type de l'enquête de terrain
(Marie : 2006, 61).
Cette technique oblige au chercheur de se déployer sur
terrain, là où il devra être en contact avec les personnes
ou les phénomènes qu'il analyse. L'observation in situ ou encore
de terrain est « un procédé de recherche procédant de
l'observation personnelle et prolongée de situations et comportements,
sans être réduit à ne connaitre ces situations et
comportements par des catégories utilisées par ceux qui les
visent (Kaminski : 2006, 58). Le choix de l'observation n'est pas un fait de
hasard. Cela se justifie par le comportement des acteurs, qui se manifeste
premièrement par plusieurs interactions et langage, lesquels
méritent une observation attentive. Deuxièmement, par la
commission d'actes qui se traduisent par les travaux, les jeux, les services et
les gestes qui obligent une observation, afin d'interpréter les sens que
les acteurs accordent à leurs pratiques.
La posture scientifique n'est nullement celle d'une objection
venant expliquer les données, mais une compréhension des
significations mises en oeuvre par les différentes parties en
présence. La tâche est de fournir une interprétation
plausible des données après la confrontation méticuleuse
au terrain. Il ne s'agit pas de se mettre à la place des autres et de
s'imaginer ce qu'ils ressentent. La sociologie n'est pas un exercice de
projection morale du chercheur, mais une enquête rigoureuse,
honnête, sur les pratiques et les représentations des acteurs. Il
s'agit toujours de saisir les significations telles qu'elles sont vécues
par les acteurs(Le Breton : 2004, 171-172).
L'observation à elle seule ne permet pas de
pénétrer les représentations de différents acteurs.
D'où il est nécessaire de la compléter et de l'enrichir
par l'entretien. Il s'agit des entretiens semi-directifs (Quivy et Campenhoudt:
2006, 174).
37
1.2.4.2. L'entretien
Le recours à l'entretien répond à la
logique de la démarche méthodologique du type ethnographique.
Pour Peretz (2004, 11) « l'entretien vice à restituer les
événements vécus par une personne pendant sa vie, une
même sélection s'opère, même si, parfois la personne
descend au niveau d'un événement particulier ». Un entretien
« est un speech event (événement de parole) dans
lequel une personne A obtient une information d'une personne B, information qui
était contenue dans La biographie de B » (Blanchet et Gotman :2013,
17). L'entretien reste donc cet outil de recherche qui permet d'avoir «
accès au point de vue des personnes, à leur expérience
vécue, au sens qu'elles donnent à leurs actions » (Desanti
et Carpon : 2007, 53).
Le choix de l'enquête par entretien permet
effectivement de faire apparaître les « processus » et les
« comment ». D'une part, grâce à cette méthode
d'enquête nous pouvons recueillir des renseignements sur les pratiques
individuelles et collectives et établir des faits (Marie : 2006, 60).
Dans l'entretien semi-directif, le chercheur dispose d'une
série des questions-guides, relativement ouvertes, à propos
desquelles il est impératif qu'il reçoive une information de la
part de l'interviewé. Mais il ne pose pas forcément toutes les
questions de la part dans l'ordre où il les a notées et sous la
formulation prévue. Autant que possible, il « laissera venir »
l'interviewé afin que celui-ci puisse parler ouvertement, dans les mots
qu'il souhaite et dans l'ordre qui lui convient. Le chercheur s'efforcera
simplement de recentrer l'entretien sur les objectifs chaque fois qu'il s'en
écarte et de poser les questions auxquelles l'interviewé ne vient
pas par lui-même, au moment le plus approprié et de manière
aussi naturelle que possible (Quivy et Campenhoudt : 2006, 174).
Tous les enfants avec qui nous nous sommes entretenus,
étaient toujours en groupes. Que ça soit les enfants en
activités rémunératrices, ou non, tous étaient
toujours en groupes. Le nombre d'enfants par groupe variait entre deux à
sept enfants. Par conséquent, tous les entretiens effectués sont
des « entretiens collectifs ». L'intérêt de l'entretien
collectif paraît alors évident : il est de saisir les prises de
position en interaction les unes avec les autres et non de manière
isolée. Il permet à la fois l'analyse des significations
partagées et du désaccord, grâce à la prise en
compte des interactions sociales qui se manifestent dans la
B. Outils ayant servi au recueil des
données
38
discussion. L'entretien collectif permet d'accéder au
sens commun, aux modèles culturels et aux normes (Sophie et Florence :
2009, 35-36). Lors ces entretiens collectifs, les enfants se
complétaient facilement les paroles et parfois discutaient entre eux de
la manière dont ils subissent certaines injustices et autres
maltraitances sur les sites. Là où un aspect pouvait être
oublié, les autres complétaient facilement. Cette situation
était très intéressante et plus avantageux de notre part.
Les enfants avaient la libre parole. De ce fait, ils parlaient sans
gènes de tout ce qui se passe sur les sites miniers leur concernant.
Mais, nous avons insisté sur les occupations qu'ils font sur les sites,
leurs expériences vécues sur l'exploitation minière
artisanale, les situations mauvaises qui leur arrivent, les aspects
socioéconomiques de leurs familles et la manière dont ils
perçoivent leur avenir. Les noms des enfants que nous présentons
dans ce mémoire ne sont pas leurs vrais noms. Nous avons respecté
l'anonymat pour les protéger leurs identités.
C'est qui fonde l'entretien, c'est la production d'une parole
sociale qui n'est pas simplement description et reproduction de ce qui est,
mais communication sur le devoir-être des choses et moyen
d'échanges entre individus. La spécificité de l'entretien
à savoir, est la production d'un savoir in situ. C'est en cela qu'il est
une situation sociale de rencontre et d'échange et non pas un simple
prélèvement d'information (Blanchet et Gotman : 2013, 15). La
situation d'entretien nécessite une mise en confiance entre
l'interviewer et l'interviewé. Chose qui était faite.