Ministère de l'Enseignement Supérieur
République du Cameroun
Ministry of Higher Education
Republic of Cameroon
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Université de Dschang Paix -
Travail - Patrie
University of Dschang Peace-
Work- Fatherland
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Faculté des Sciences Juridiques et
Politiques
Faculty of Law and Political Sciences
LA LOCATION-GÉRANCE DE L'ENTREPRISE EN
DIFFICULTÉ EN DROIT DES PROCÉDURES COLLECTIVES OHADA
Thèse en vue de l'obtention du diplôme de
Master en Droit
Option : Droit des Affaires et de
l'Entreprise
Présentée et
soutenue publiquement par :
TSAGMO TAMEKO Emmanuel
Maîtrise en Droit des Affaires et de
l'Entreprise
Sous la direction
de :
M. NGUIHE KANTE Pascal
Docteur d'État en Droit Privé
Chargé de cours à la Faculté des Sciences
Juridiques et Politiques de l'Université de Dschang
Juin 2011
Les opinions émises dans cette thèse
sont personnelles à l'auteur. L'Université de Dschang n'entend y
donner aucune approbation ni improbation.
Dédicace
Á mon papa TAMEKO Elias FOUEDONG, in memoriam ;
sois comblé outre-tombe par les oeuvres de ton fils. Á maman
DJUNE Marie et à maman NGOUANFOUO Régine qui m'ont appris
à semer sans compter, avec amour, bénédiction et sagesse,
contre vents et marées, dans l'infinie richesse du travail.
Remerciements
Au moment où s'achève ce modeste travail, qu'il
nous soit permis d'exprimer nos chaleureux remerciements au Seigneur tout
puissant et à tous ceux qui de près ou de loin ont
contribué à sa réalisation. Toute notre profonde gratitude
d'abord:
Á monsieur NGUIHE KANTE Pascal, Docteur d'État
en Droit Privé, Chargé de Cours, qui a accepté avec
disponibilité et amabilité de conduire nos premiers pas sur le
sentier de la recherche juridique.
Au Pr ANOUKAHA François, Doyen de la Faculté,
pour son souci constant d'offrir à notre formation un label de
qualité.
Nous exprimons ensuite notre gratitude aux doctorants
Joëlle MAGUEU, KEM CHEKEM Bruno, Eric MOHO, Hervé TCHABO, Patrice
KAGOU, Georges KELESE, Eddy NGUIFFEU, Gervais KOUAM, qui ont accepté,
au-delà de leurs nombreuses préoccupations, de lire nos travaux
et d'y apporter des remarques et des suggestions constructives.
Nous exprimons aussi notre sincère gratitude à
la grande famille FOUEDONG, pour le grand Amour dont elle n'a cessé de
nous combler durant l'épineux parcours qui a conduit à
l'élaboration de ce travail.
Qu'il nous soit permis également d'exprimer notre
sincère reconnaissance :
Á Monsieur & Madame TCHIMEKEM Donatien, qui n'ont
ménagé aucun effort pour notre réussite ; ce travail
est le fruit de vos précieux et constant sacrifices, soyez en
honoré.
Á la famille DOUANLA Charles à Yaoundé
qui a toujours oeuvré pour notre plein épanouissement et notre
succès académique depuis nos premiers pas à
l'Université en 2003.
Á nos frères et amis, particulièrement,
Jacques Gabriel TCHOUPOU, Elvis DJOUDA et Charly NGOUDJI, pour leur Amour et
leur soutien inconditionnel.
Pour leur soutien matériel, financier et moral, nous
tenons à remercier particulièrement :
La famille NZOMO Joseph Chrétien à
Yaoundé ;
La famille SUEBANG Romarin à Douala ;
La famille TCHINDA Gabriel à Mbouda ;
M. ELA ONDO Jean Louis, Magistrat à
Bafoussam ;
M. SENA Edmond Magloire, Magistrat à Dschang ;
Nous tenons également à remercier tous nos
amis et en particulier, Romary NGNIPA, Georges TCHOUPOU, Orphélie
TCHEBABONG, Serges MEPAH, Carlos MEFEUZA, Honoré LAFON, Eric KUETE,
Danel NYA, Joseph FEUKOUO, Judith TCHEUMO, Josiane TCHIENOU, Gaëlle
LENGUE, Patronie KAMEN, Lyselotte TSAKENG, Mireille ASOBGOUM, pour leurs
encouragements perpétuels et leurs soutiens
indéfectibles ;
Tous nos camarades de promotion et en particulier, Anitha
YIMDJO, Hermine TCHOMWA, Constant TCHOFFO, Marcellin ZEUMO, Cédric
TSAFACK, Corneille KAMLA, Aristide FOKAM, Christelle TCHOUMENE, Yvonne MAGUAFO,
Rostand TSOMEVOU, pour leur franche collaboration.
Enfin, à tous et à bien d'autres personnes dont
les noms n'ont pu être cités, recevez toute notre
reconnaissance.
Principales
abréviations
· al. : alinéa
· art. : article
· A.U : Acte uniforme
· A.U.D.C.G : Acte uniforme relatif au
droit commercial général
· A.U.P.C.A.P : Acte uniforme portant
organisation des procédures collectives d'apurement du passif
· AUS : Acte uniforme portant
organisation des sûretés
· Bull. civ: Bulletin civil
· C.A. : Cour d'appel
· Cass. com. : Chambre commerciale de
la Cour de cassation française
· Cass. civ. : Chambre civile de la
Cour de cassation française
· C.C.J.A : Cour Commune de Justice et
d'Arbitrage de l'OHADA
· C. civ. : Code civil
· C.P : Code Pénal
· C.S : Cour Suprême
· C.T : Code du Travail
· D. : Dalloz
· D.P. : Dalloz
Périodique
· éd. : édition
· ibidem : Au même
endroit
· idem : même chose
· infra : voir plus
bas
· J. Cl. : Juris-Classeur
· J.C.P. : Juris-Classeur
Périodique
· J.P. : Juridis Périodique
· L.G.D.J. : Librairie
Générale de Droit et de Jurisprudence
· n° : numéro
· obs. : Observation
· OHADA : Organisation pour
l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires
· op. cit. : opere
citatere (cité plus haut)
· P. : page
· Préf. : Préface
· P.U.A : Presses Universitaires
d'Afrique
· P.U.F : Presses Universitaires de
France
· P.U.L : Presses Universitaires
Libres
· R.J.C. : Revue de jurisprudence
commerciale
· R.T.D. civ: Revue trimestrielle de droit
civil
· s. : suivant
· S. : Sirey (Recueil)
· spéc. : spécial
· supra : voir plus haut
· t. : tome
· v. : voir
· vol. : volume
Sommaire
INTRODUCTION GÉNÉRALE 1
PREMIÈRE PARTIE : LA
LOCATION-GÉRANCE, TECHNIQUE D'ADMINISTRATION DE L'ENTREPRISE EN
DIFFICULTÉ
10
CHAPITRE I : LE SOUCI DE PÉRENNISATION
DE L'EXPLOITATION
12
Section I : L'existence des contrats en
cours : un préalable à la poursuite de l'activité
12
Section II : Les contrats indispensables
à la relance de l'activité de l'entreprise en
difficulté
19
CHAPITRE II : LE MAINTIEN SOUHAITABLE DE
L'EMPLOI
29
Section I : La modification des contrats de
travail, moyen de préservation de l'emploi.
30
Section II : Le recours aux licenciements pour
motif économique, moyen de protection de l'emploi
37
DEUXIÈME PARTIE : LA
LOCATION-GÉRANCE, MOYEN D'APUREMENT DU PASSIF DE L'ENTREPRISE EN
DIFFICULTÉ
47
CHAPITRE I : LE DÉSINTÉRESSEMENT
DES CRÉANCIERS DE L'ENTREPRISE EN DIFFICULTÉ MISE EN
LOCATION-GÉRANCE
49
Section I : Les moyens du
désintéressement des créanciers
50
Section II : L'ordre de
désintéressement des créanciers de l'entreprise en
difficulté mise en location-gérance
60
CHAPITRE II : LES RECOURS DES CRÉANCIERS
DE
L'ENTREPRISE EN DIFFICULTÉ MISE EN
LOCATION-GÉRANCE
69
Section I : Le recours contre les
débiteurs de la redevance
70
Section II : Le recours contre les organes de
la procédure
80
CONCLUSION GÉNÉRALE
93
Résumé
Le plus souvent, l'entreprise en difficulté est
exsangue, ni viable, ni solvable. Quelquefois, elle a encore des actifs et des
marchés, et seuls une gestion médiocre, un cas fortuit ou la
dureté de la conjoncture l'ont mise là où elle se
trouve.
Pour stopper l'hémorragie, le recours à la
location-gérance est intéressant car elle permettrait non
seulement d'assurer le sauvetage de tout ou partie de l'entreprise en
difficulté, mais aussi de désintéresser dans la mesure du
possible les créanciers. La location-gérance se présente
tantôt comme un mécanisme d'administration de l'entreprise en
difficulté, tantôt comme un moyen d'apurement de son passif.
La location-gérance s'avère être une
véritable technique de gestion des entreprises en difficulté
lorsqu'elle permet de pérenniser son exploitation et de maintenir les
emplois qui y sont attachés. Il faut pour ce faire, maintenir un certain
nombre de contrats indispensables à la poursuite de l'activité,
mettre en oeuvre les mesures alternatives afin que le recours aux licenciements
pour motif économique n'intervienne que de façon
exceptionnelle.
La mise en location-gérance de l'entreprise en
difficulté est motivée par le souci de son redressement. Or, pour
que celui-ci se réalise pleinement, il faut que les créanciers
soient désintéressés. Ce désintéressement
peut s'opérer soit à travers les redevances perçues, soit
par le biais de la compensation. Et selon quel ordre ? En l'absence
d'ordre de paiement des créanciers dans la procédure de
redressement judiciaire, un ordre a été suggéré
pour le désintéressement des créanciers de l'entreprise en
difficulté mise en location-gérance. Cet ordre bien que
justifié par un intérêt certain, n'est pas exempt de
critiques. Quoi qu'il en soit, lorsque la location-gérance aura
été convenablement exécutée, le passif de
l'entreprise en difficulté sera totalement ou partiellement
apuré. Dans le cas contraire, des actions doivent être
engagées. Les créanciers exerceront leur recours tantôt
contre les débiteurs de la redevance, tantôt contre les organes de
la procédure.
Afin que la pratique renseigne un peu plus sur la mise en
location-gérance des entreprises en difficulté, les parties
prenantes aux procédures collectives se doivent d'exploiter toutes les
mesures idoines permettant de sauvegarder et d'assurer le développement
de l'entreprise africaine.
Abstract
Quite often, an enterprise in difficulty is neither anaemic,
nor viable, nor solvent. At times, it will still have assets and markets, and
only a mediocre management, a fortuitous case or difficult contingency have
landed it where it is.
To stop the outflow of capital, recourse to leasing is
interesting for it would not only help to salvage all or part of the enterprise
in difficulty, but also to pay creditors to the extent it can. Leasing appears
either as a mechanism of administration of enterprise in difficulty, or a means
of discharging its liabilities.
Leasing proves to be a veritable technique of management of
enterprises in difficulty when it helps to prolong its exploitation and
maintain jobs attached to it. To do this, it is necessary to maintain certain
indispensable contracts for the pursuit of the activity, implement alternative
measures so that recourse to dismissal for economic reason only intervene
exceptionally.
Leasing an enterprise in difficulty is motivated by the
concern to redress it. Whereas, for this to be fully realised, it is necessary
that creditors be paid. This payment may be through rental charge they receive,
or through compensation. In which order? In the absence of order of payment of
creditors in the procedure of legal redress, an order has been suggested for
the payment of creditors of a leased enterprise in difficulty. This order which
justifies a certain interest is not exempted from criticisms. Whatever the
case, when leasing would have been conveniently executed, the liabilities of
the enterprise in difficulty would totally or partially be engaged. On the
contrary, actions must be engaged. The creditors would exercise their petitions
either against debtors of rental charge, or organs of the procedure.
In order for practice to inquire more on the implementation
of leasing enterprises in difficulty, the payees in collective proceedings must
exploit all fit and competent measures helping to safeguard and ensure the
development of African enterprise.
INTRODUCTION
GÉNÉRALE
« Des entreprises en difficulté, on en
trouve un peu partout en Afrique ;1(*) des entreprises qui se redressent, on en
cherche »2(*). Pourtant, ce ne sont pas des moyens de redressement
qui manquent. Encore faudrait-il que le mal soit curable3(*).
L'entreprise qui est définie comme « une
unité économique qui implique la mise en oeuvre de moyens humains
et matériels de production ou de distribution des richesses reposant sur
une organisation préétablie » 4(*), présente plusieurs
atouts identiques à ceux des êtres vivants. Á ce titre,
elle naît, vit et meurt. Si les deux premières phases de sa vie
posent moins de difficultés en raison de l'absence d'atteinte aux
différents intérêts qu'elle protège, tel ne semble
pas être le cas avec sa disparition5(*).
En effet, un tel événement est susceptible de
porter atteinte à la vie économique, sociale et politique du pays
en particulier et de la sous région en général6(*). Face au phénomène
d'entreprise en difficulté, le législateur africain ne peut pas
rester indifférent.
Droit des faillites, droit des procédures collectives,
droit des entreprises en difficultés ou des difficultés de
l'entreprise, droit de « l'entrepreneur en
difficulté »7(*) ou même droit « de la maladie ou
de la mort des entreprises »8(*), ces différentes terminologies ne traduisent
pas un simple phénomène de mode. Il s'agit d'une évolution
qui va du droit de l'échec du commerçant au droit de la
sauvegarde de l'entreprise défaillante9(*) , de l'entreprise qui rencontre des
difficultés. Mais que faut-il entendre par entreprise en
difficulté ?
La notion d'entreprise en difficulté est assez
dynamique10(*) en raison
de la diversité des modes d'analyse des défaillances ou des
différents stades de gravité de la situation, de même que
la rareté des critères permettant de les déceler et de
l'hétérogénéité de leurs causes. Concept
plus économique11(*) que juridique, la notion d'entreprise en
difficulté paraît difficile à définir. Elle n'est
pas nouvelle mais a évolué avec les mutations du droit.
En effet, avant l'Acte Uniforme portant organisation des
procédures collectives d'apurement du passif12(*) (AUPCAP) de l'OHADA13(*), on faisait recours aux
dispositions du Code de commerce de 1807 reformé dans le sens de
l'adoucissement par la loi du 28 mai 1938, de la loi française du 4 mars
188914(*) et des
décrets-lois du 8 août et du 30 octobre 193515(*). Venu modifier les objectifs
des procédures collectives, l'Acte Uniforme a tout aussi retenu deux
critères de définition de l'entreprise en difficulté. En
effet, en plus du critère traditionnel de l'état de cessation
des paiements qu'il prend soin de définir en son article 2516(*), le législateur OHADA
lui adjoint un autre : celui de situation difficile mais
irrémédiablement compromise sans toutefois le
définir17(*).
Ainsi, une entreprise se trouverait en difficulté
lorsqu'en raison de certains déséquilibres économiques,
financiers ou humains, elle ne peut pas envisager dans un futur proche,
à court et moyen termes, de poursuivre son activité de
manière normale ; ou ne le pourrait qu'en procédant à
des opérations de liquidation partielle, de transformation
économique, d'apports de capitaux permanents extérieurs ou de
licenciement d'une partie de son personnel18(*).
De ce fait, et d'après un auteur, l'entreprise en
difficulté « est une entreprise qui ne peut plus - ou qui,
à bref délai, ne pourra plus - faire face à ses
échéances. Le plus souvent, elle est exsangue, ni viable, ni
solvable. Quelquefois elle a encore des actifs et des marchés, et seuls
une gestion médiocre, un cas fortuit ou la dureté de la
conjoncture l'ont mise là où elle se trouve. Mais, qu'elle soit
définitivement terrassée ou encore en état de se
redresser, elle est, dans l'un et l'autre cas, incapable de pourvoir à
ses charges avec les produits de ses ventes et les banques comme les
fournisseurs lui refusent désormais tout nouveau crédit.
Dès lors, faute de ressources et de soutien, sa trésorerie
s'épuise, sa caisse se vide : l'entreprise ne peut qu'arrêter
ses paiements » 19(*).
Face à ces signes évidents de
dégradation de l'exploitation, l'entreprise en difficulté
risquerait à plus ou moins brève échéance, de ne
plus pouvoir être redressée et par conséquent
disparaîtra. Or le législateur OHADA soucieux de la valeur
socio-économique d'une entreprise, admet difficilement que le glas de
celle-ci puisse être facilement sonné20(*). C'est la raison pour laquelle
a été instituée à côté d'une
procédure préventive21(*) destinée à prévenir les
difficultés, une procédure de réveil de l'entreprise en
difficulté mais économiquement viable à savoir le
redressement judiciaire22(*).
Le redressement judiciaire est destiné non seulement
à permettre la sauvegarde de l'entreprise et l'apurement du passif au
moyen d'un concordat23(*)
de redressement, mais aussi et surtout le maintien de l'activité et de
l'emploi24(*). Le
législateur africain par le biais de cette procédure,
désire concilier la protection de l'emploi avec la survie de
l'entreprise malade. Comme l'a si bien écrit le Professeur ANOUKAHA,
«les procédures collectives n'ont plus seulement pour
finalité la réalisation de l'actif du débiteur pour
l'apurement du passif. Elles doivent, lorsque cela est possible, permettre le
sauvetage de l'entreprise et partant de l'emploi »25(*). Ce sauvetage sous entend
nécessairement la continuation de l'exploitation. De principe dans le
cadre de la procédure de redressement judiciaire, la poursuite de
l'activité de l'entreprise est exceptionnellement décidée
dans la procédure de liquidation des biens26(*).
La procédure de redressement judiciaire en OHADA,
à l'image de celle qui existe en droit français, est
destinée à faciliter la recherche des solutions aux
difficultés des entreprises tout en assurant le maintien de
l'activité. Il est donc nécessaire de déterminer qui
pourra assurer la poursuite de cette activité. En l'état actuel
du droit OHADA, la continuation de l'exploitation peut être
effectuée soit en gestion directe, soit en gestion
dérivée.
En droit commun27(*), la gestion directe consiste en l'exploitation
personnelle et libre par le propriétaire de son entreprise ou de son
fonds de commerce28(*). Il
n'en est pas de même en matière des procédures collectives.
Ici, seul le Juge-commissaire, dans le cadre du redressement
judiciaire29(*) ou le
tribunal en cas de liquidation des biens30(*), décide si le débiteur,
propriétaire de l'entreprise en difficulté, ou les dirigeants de
la personne morale participeront à l'exploitation et fixe leurs
rémunérations.
Dans la gestion dite dérivée, le
propriétaire, personne physique ou morale, ou le tribunal à
travers un mandataire en cas des procédures collectives, confie la
gestion à un gérant libre. Ce commerçant fait le commerce
pour son propre compte et assume les risques de l'entreprise31(*). Il est appelé
locataire-gérant et la convention par laquelle l'entreprise lui est
confiée en exploitation est le contrat de location-gérance. Ce
contrat est défini à l'article 138 de l'Acte Uniforme portant
Droit Commercial Général (AUDCG) adopté le 15
décembre 2010 comme une convention par laquelle le
propriétaire du fonds de commerce, personne physique ou morale, en
concède la location, en qualité de bailleur à une personne
physique ou morale, locataire-gérant, qui l'exploite à ses
risques et périls. C'est ce contrat qui, dans le cadre d'une entreprise
en difficulté, constitue l'objet de la présente recherche.
En effet, lorsque l'état de l'entreprise en
difficulté est dû à la défaillance des dirigeants
sans que l'outil de travail soit défectueux, n'est-il pas possible de
sauver celle-ci en remplaçant les dirigeants défaillants par
des dirigeants externes? Autrement, la gestion de l'entreprise en
difficulté pourra-t-elle être mieux assurée au cas
où elle serait confiée à une tierce personne ?
Initialement, l'exploitation du fonds de commerce par la
location-gérance est née des nécessités de la
pratique. Un commerçant met son fonds en gérance lorsqu'il se
retire des affaires ou lorsqu'il se décide à interrompre son
activité, soit par suite de maladie ou d'accident. De même, en cas
de décès d'un commerçant, lorsqu'il ne laisse que des
héritiers mineurs ou des héritiers majeurs qui ne désirent
pas continuer le commerce, la location-gérance permet d'éviter le
partage, la liquidation du fonds. L'on peut également utiliser le
contrat de location-gérance pour mettre en place un réseau de
distribution32(*). La
location-gérance peut aussi s'insérer dans une opération
de crédit-bail33(*).
La location-gérance est en outre l'un des moyens de
gestion d'une entreprise tombée en faillite. Si elle peut être
admise sans souci majeur en cas de règlement préventif ou de
redressement judiciaire34(*), on imagine mal que l'on puisse y faire recours en
cas de liquidation des biens car la continuation de l'activité de
l'entreprise n'est admise dans ce cas que de façon
exceptionnelle35(*). Elle
est une nécessité lorsque l'entreprise est en difficulté,
du fait d'une insuffisante adaptation des méthodes des dirigeants
sociaux à la dimension de l'entreprise ou lorsque leurs erreurs de
gestion sont la cause de cette situation obérée36(*). La location-gérance
permet de changer la direction du fonds de commerce et entraîne par
là une dissociation entre la propriété du fonds et son
exploitation. En cela, cette technique se distingue d'autres formes de
gestion37(*).
Aussi surprenant que cela puisse paraître, et comme le
souligne un auteur38(*),
« le droit communautaire n'a pas réglé de
façon explicite la question de la location-gérance d'entreprise.
Il semble ne reconnaître que la location-gérance du fonds de
commerce. Pourtant, la location-gérance d'entreprise est
pratiquée couramment dans les situations les plus diverses. En
conséquence, considérerons-nous que celle-ci revêt la forme
de la location-gérance de fonds de commerce et en suit le régime
juridique. Toutefois, le régime juridique applicable à ce mode
« probatoire » d'acquisition de l'entreprise, régie en droit
commun par l'Acte uniforme du 17 avril 1997 relatif au droit commercial
général, reste inapplicable aux contrats de
location-gérance passés par des mandataires de justice
chargés à quelque titre que ce soit de l'administration d'un
fonds de commerce39(*) ».
Il se pose dès lors la question de savoir quel est le
rôle de la location-gérance dans le droit des procédures
collectives. En d'autres termes, en quoi la location-gérance
contribue-t-elle au redressement de l'entreprise en difficulté ?
Faire une réflexion sur la location-gérance de
l'entreprise en difficulté est intéressant à plus d'un
titre.
Sur le plan théorique, cette étude est digne
d'attention en ce qu'elle permet de dégager l'importance de la
location-gérance comme technique de reprise des entreprises en
difficulté. En outre, elle contribue à appréhender le sens
des dispositions de l'AUPCAP concernant l'encadrement de la
location-gérance et des créanciers d'une entreprise qui se trouve
en redressement judiciaire. De même, elle contribue à
l'éclairage juridique des potentiels locataires-gérants d'une
entreprise en difficulté.
Sur le plan pratique, cette étude permet tout d'abord,
de comprendre la gestion de l'entreprise en difficulté par des tiers
avec des objectifs plus ou moins fondés sur le
« sauvetage » des emplois et surtout, la
préservation de la capacité de production de l'entreprise.
Ensuite, elle permet de noter que la location-gérance assure la
protection des intérêts des créanciers, augmente si
possible leur gage et favorise l'apurement progressif du passif grâce aux
redevances qui devront être perçues par le loueur. Á cet
effet, elle se présente comme une option viable pour le débiteur
qui élabore le concordat. Enfin, elle permet aux éventuels
locataires-gérants de mesurer l'ampleur de leurs engagements.
Traditionnellement, les études relatives aux contrats
de location-gérance distinguent les conditions des effets. Cependant,
dans le cadre de notre travail, nous n'adopterons pas cette approche parce
qu'elle ne nous permettra pas d'atteindre notre objectif. Lequel consiste
à analyser la location-gérance non seulement comme une technique
de sauvetage ou de redressement mais aussi comme un moyen permettant d'apurer
le passif de l'entreprise en difficulté. Concrètement,
d'après l'analyse de la littérature juridique et l'application
combinée d'exégèse et du droit comparé, le droit
OHADA des procédures collectives nous présente la
location-gérance d'une part, comme une technique d'administration de
l'entreprise en difficulté destiné à assurer sa sauvegarde
(Première partie) et d'autre part, comme un moyen
d'apurement du passif permettant aux créanciers de ne pas être
sacrifiés avec l'ouverture d'une procédure collective
(Deuxième partie).
PREMIÈRE PARTIE : LA
LOCATION-GÉRANCE, TECHNIQUE D'ADMINISTRATION DE L'ENTREPRISE EN
DIFFICULTÉ
La rupture brusque de l'activité d'une entreprise
dès l'ouverture à son encontre d'une procédure de
redressement judiciaire ou de liquidation des biens est susceptible de
multiples inconvénients aussi bien pour le débiteur que pour les
créanciers, les salariés et l'État. Afin d'éviter
une détérioration rapide de l'outil de production ainsi que la
mise en chômage prématurée des salariés, la loi
reconnaît au tribunal le droit d'autoriser la poursuite de
l'activité40(*) ou
même la conclusion d'un contrat de location-gérance41(*).
La conclusion d'un tel contrat est possible même en
présence d'une clause contraire dans le bail42(*).
Emprunté au droit civil, ce contrat de louage
d'exploitation43(*)
s'avère être une véritable technique de gestion des
entreprises en difficulté surtout lorsqu'il concourt d'une part,
à la pérennisation de l'exploitation (Chapitre
I) et d'autre part, au maintien de l'emploi (Chapitre
II).
CHAPITRE I : LE SOUCI DE PÉRENNISATION DE
L'EXPLOITATION
L'aboutissement du redressement judiciaire dont la
finalité est le sauvetage de l'entreprise est fondamentalement
basé sur la poursuite de l'activité du débiteur. Une telle
opération n'est normalement possible que si l'on assure à
l'entreprise le maintien de son réseau de relation contractuelle.
Poursuivre l'exploitation de l'entreprise dans la perspective
de son redressement nécessite l'existence (Section I)
et la poursuite des contrats en cours indispensables à la relance de
l'activité de l'entreprise (Section II).
Section I : L'existence des contrats en cours : un
préalable à la poursuite de l'activité
La continuation de l'activité de l'entreprise en
difficulté implique nécessairement la poursuite d'un certain
nombre de contrats. Ces contrats indispensables à l'entreprise, sont
qualifiés de « contrats en cours »44(*). L'idée n'est pas
totalement nouvelle : l'article 38 de la loi française du 13
juillet 196745(*) avait,
en effet, organisé une procédure assurant, avec certaines
difficultés et imperfections, la poursuite des relations
contractuelles46(*).
Aussi, le législateur africain n'a-t-il pas conféré au
syndic le droit de décider de la continuation ou non des contrats en
cours sans que les cocontractants ne puissent refuser en opposant le non
paiement des créanciers antérieurs au jugement d'ouverture de la
procédure collective ? Après avoir présenté
les contours de ces différents contrats (Paragraphe 1),
il conviendra d'en déterminer leur domaine d'application
(Paragraphe 2).
Paragraphe 1- La
détermination des contrats en cours
L'analyse du régime des contrats en cours
(B) sera précédée de l'étude de la
notion même de contrat en cours (A)
A- La notion de contrat en
cours
La notion de « contrat en cours »
est une notion-clé en matière de procédures
collectives47(*). Elle
constitue une des nombreuses énigmes de la matière car ne
faisant l'objet d'aucune définition. Malgré l'importance de la
notion, l'article 108 de l'AUPCAP, qui contient les dispositions
générales relatives au contrat en cours, ne comporte pas la
moindre définition de cette notion.
Le contrat en cours est souvent assimilé au contrat
à exécution successive. Comme le précise en effet un
auteur, cette notion comprend « non seulement les contrats
à exécution successive, qui sont le domaine d'élection
naturel de la notion, mais encore, les contrats à exécution
instantanée, s'ils n'ont pas encore produit leur effet principal,
c'est-à-dire si la prestation caractéristique reste à
fournir »48(*) et, plus précisément, les contrats dont
l'exécution s'inscrit dans le temps et dont la durée
s'étend au-delà du jugement d'ouverture49(*). Contrairement au contrat
à exécution instantanée qui peut n'avoir pas encore
produit ses effets, le contrat à exécution successive peut avoir
fini de dérouler ses effets avant le jugement d'ouverture. On en
déduit qu'un contrat est en cours lorsqu'il n'a pas épuisé
ses effets fondamentaux au jour du jugement d'ouverture50(*).
Les critères de cette notion clé ont dû
être affiné par la jurisprudence et la doctrine51(*) : il s'agit d'un contrat
conclu antérieurement à l'ouverture de la procédure
collective, qui est encore en cours d'existence et susceptible
d'exécution postérieure à la charge du cocontractant.
Selon une distinction traditionnelle, deux critères cumulatifs sont
requis : le contrat doit être en cours d'existence ou de formation
et il doit être également en cours d'exécution52(*).
C'est dire que, lorsque le contrat a été conclu,
même sous condition, et n'a pas disparu, de quelque façon que ce
soit53(*),
antérieurement à cette date, il sera en cours et
bénéficiera du régime qui lui est destiné.
B- Le régime des contrats
en cours
La qualification de contrat en cours entraîne
l'application de tout le mécanisme de continuation des conventions
après l'ouverture de la procédure collective, prévue
principalement par l'article 108 de l'AUPCAP. Les contrats en cours sont soumis
à l'option du syndic qui, dans la mise en oeuvre de celle-ci,
décidera du sort à donner à la convention. Il conserve
seul, quelle que soit la procédure ouverte, la faculté d'exiger
l'exécution des contrats en cours, à charge de fournir la
prestation promise à l'autre partie.
Lorsqu'il envisage donner l'entreprise en
location-gérance, le syndic est tenu d'exiger le maintien des contrats
indispensables à la conclusion de ce contrat. Sa faculté devient
dès lors une obligation. Ainsi, le syndic se doit d'être plus
diligent dans la mise en oeuvre de son option. Il n'a plus à attendre
comme l'indique l'article 108 in fine, d'être mis en demeure. Le
syndic pourra donc maintenir le contrat si celui-ci est avantageux non
seulement pour la masse et l'entreprise en difficulté à louer,
mais aussi pour éviter une éventuelle condamnation à des
dommages-intérêts. C'est notamment le cas des contrats de bail et
de louages d'objets mobiliers ou d'ouvrages.
Le contrat se poursuit tel qu'il existait lors de l'ouverture
de la procédure. Toutes ses clauses et modalités doivent
être respectées dès lors qu'aucun texte légal n'en
exclut l'application. L'on se demande si le locataire-gérant, nouvel
administrateur, est tenu de suivre ce régime ? Promptement, l'on
répond par l'affirmative car il s'agira des contrats indispensables au
fonctionnement de l'entreprise car il faut noter que la location-gérance
n'est qu'une solution à durée déterminée visant la
continuation de l'entreprise en difficulté.
Le locataire-gérant est amené à respecter
les clauses et les modalités des contrats en cours retenus pour la
pérennisation de l'exploitation de l'entreprise. Le
locataire-gérant devient responsable des dettes nées des
prestations fournies par ces contrats dès la conclusion du contrat de
location-gérance ordonnée par le tribunal54(*). Encore faudrait-il que ces
contrats entrent dans le domaine de la continuation des contrats en cours.
Paragraphe 2- Le domaine de
la continuation des contrats en cours
L'article 1134 du code civil énonce que les conventions
légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont
faites et ne peuvent dès lors être révoquées que de
leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Rien
ne peut donc entraîner la disparition de fait, l'évanouissement ou
la révocation des contrats hormis une volonté des parties ou pour
les causes prévues par la loi. Appliqué aux procédures
collectives, le principe signifie que ni la liquidation judiciaire, ni le
redressement judiciaire, ni a fortiori le règlement
préventif ne mettent fin aux contrats passés par le
débiteur.
Par ailleurs, l'article 107 de l'Acte Uniforme OHADA sur les
procédures collectives d'apurement du passif donne à la
règle du Code civil une force particulière55(*). Comparativement au droit
français56(*),
« nonobstant toute disposition légale ou toute clause
contractuelle, aucune indivisibilité, aucune résiliation ou
résolution du contrat ne peut résulter du seul fait de
l'ouverture d'une procédure collective de redressement
judiciaire » sauf cependant, les contrats conclus en
considération de la personne du débiteur et ceux que chaque
État partie aura expressément prévu. Sont donc exclus du
domaine de la continuation, les contrats conclus intuitu personae
(A) et les contrats prévus expressément par la
loi de chaque État partie (B).
A- L'exclusion des contrats
conclus intuitu personae
Contrairement à la solution retenue en droit
français actuellement, l'AUPCAP exclut du champ d'application de
l'article 107 les contrats conclus intuitu personae57(*). Les contrats intuitu
personae sont les contrats dans lesquels la considération de la
personne a été déterminante lors de la conclusion58(*). Il s'agit des contrats
conclus en considération de la personne des parties contractantes ;
de sorte que l'un et l'autre ont vu leur consentement déterminé
par cette considération. Les contrats conclus intuitu personae
implique une idée de confiance mutuelle qui y joue un rôle
prépondérant. En effet, les parties sont présumées
n'avoir fait confiance qu'au seul cocontractant. Pour qu'un contrat entre dans
cette catégorie, il doit réunir deux conditions :
- Il faut d'abord que les obligations qui naissent à la
charge du débiteur en liquidation des biens soient, par leur nature
même ou à raison de l'intention des parties, telles qu'elles ne
puissent être exécutées que par lui59(*).
- Il faut ensuite que ces obligations intéressent le
patrimoine du débiteur60(*).
Ces conditions sont spécialement réunies dans le
contrat de société de personnes et dans celui du mandat61(*). En principe, la
société de personnes prend fin par la liquidation des biens ou le
redressement judiciaire d'un associé62(*). Le mandat prend fin en cas de liquidation des biens
du mandant et du mandataire63(*). Il existe aussi d'autres catégories de
contrats considérés comme conclus intuitu personae
auxquelles cette règle peut être étendue ; tels les
cautionnements, les contrats de franchise et de concession exclusive. On peut
également y citer le contrat de commission, la convention d'ouverture de
crédit et de compte courant.
L'idée de l'exclusion des contrats conclus intuitu
personae du domaine de la continuation des contrats en cours est certes
une innovation de l'Acte Uniforme OHADA, mais elle n'est pas totalement
nouvelle. Elle existe depuis 1967 à travers la loi française du
13 juillet. En effet, fondée sur une application quelque peu extensive
de l'article 2003 du Code civil, la solution selon laquelle les contrats
conclus en considération de la personne doivent prendre fin par la
survenance du jugement déclaratif de faillite, avait été
contestée sous l'empire de la loi du 13 juillet 1967.
D'après le Professeur SAWADOGO, l'exclusion desdits
contrats, aussi nécessaires que les autres au sauvetage de l'entreprise,
peut être critiquée en ce qu'elle compromet le redressement de
l'entreprise parce qu'elle coupe l'entreprise de son environnement64(*). Cette critique n'est-elle pas
discutable ? La remise en cause de l'idée de l'exclusion des
contrats conclus intuitu personae serait fondée si et seulement
si la continuation de l'activité est faite sans changement à la
tête de l'entreprise65(*). Par contre, lorsque la continuation serait faite par
location-gérance, l'on comprendrait mal qu'un contrat conclu en
considération de la personne du débiteur soit continué par
le locataire-gérant66(*).
Ainsi, il y a lieu de louer l'innovation faite par le
législateur OHADA surtout qu'il a restreint ce domaine en laissant
également le choix aux États parties d'en prévoir d'autres
contrats.
B- L'exclusion des contrats
expressément prévus par la législation de chaque
État partie
Outre les contrats reconnus comme étant conclus
intuitu personae et dont la résiliation est de plein droit du
fait du jugement d'ouverture, les États parties peuvent prévoir
que certains contrats prennent fin en raison de l'ouverture d'une
procédure collective. Ainsi, lorsqu'un texte de loi prévoit la
résiliation d'office d'un contrat pour cause de survenance de la
cessation des paiements du contractant, le jugement d'ouverture de la
liquidation des biens ou du redressement judiciaire intervenant en cours
d'exécution de ce contrat mettra un terme à celui-ci67(*). De ce fait, ni le
débiteur ou les dirigeants de la personne morale participant à la
continuation de l'exploitation, ni le locataire-gérant ne pourront
assurer la continuation de ces contrats.
Il en est ainsi des marchés publics passés au
nom de l'État qui sont résiliés de plein droit par
l'autorité signataire et sans indemnités en cas de liquidation
des biens ou de redressement judiciaire si le cocontractant de l'administration
n'est pas autorisé par le tribunal à continuer l'exploitation de
son entreprise68(*).
S'il est vrai que les contrats conclus en considération
de la personne du débiteur et ceux qui seraient expressément
prévus par la loi de chaque État partie sont
résiliés de plein droit par le jugement d'ouverture des
procédures collectives, il n'en demeure pas moins vrai que les contrats
dans lesquels l'intuitu personae ne joue pas un rôle
prépondérant ne sont pas résiliés de plein droit et
sont indispensables à la poursuite de l'exploitation.
Section II : Les contrats indispensables à la
relance de l'activité de l'entreprise en difficulté
La poursuite de l'activité contractuelle pendant la
période de redressement judiciaire révèle une atteinte
caractérisée au droit commun des contrats. En effet, l'objectif
assigné à la procédure de redressement s'accommode mal
avec les règles traditionnelles qui régissent les contrats. La
finalité de la procédure n'est pas propice au libre cours des
relations, mécanismes ou situations contractuels69(*). Le contrat ne s'envisage donc
plus comme un simple lien entre deux parties, mais il se voit assigner un
objectif transcendant les intérêts des parties : le sauvetage
de l'entreprise.
Dès lors, de grandes libertés vont être
prises avec les principes gouvernant le droit des obligations afin de parvenir
aux objectifs fixés. Certains auteurs ont parlé de
« faillite du droit »70(*), d' « oeil du
cyclone »71(*) des procédures collectives frappant la
théorie des obligations contractuelles.
Une rupture dans l'activité, s'agissant d'une
entreprise en état de cessation des paiements, est un obstacle
insurmontable à toute mesure de sauvetage. Une telle interruption
risquerait d'entraîner une disparition de la clientèle,
généralement sensible à la permanence du fonds de
commerce, et serait mal supportée par les salariés contraints
à un chômage temporaire. Dès lors, non seulement
l'exploitation doit continuer, mais elle doit se faire dans des conditions
relativement proches de celles qui existaient avant le jugement d'ouverture. La
nécessité de maintenir la plupart des contrats en cours lors de
l'ouverture d'une procédure collective apparaît comme une
évidence. Il serait, en effet, illusoire d'envisager un quelconque
redressement de l'entreprise en difficulté si brusquement ses principaux
cocontractants lui faisaient défaut. Á ce titre, la poursuite de
certains contrats semble indispensable voire vitale à la survie de
l'entreprise. Il en va ainsi notamment de bon nombre de contrats de fournitures
et de louage d'objets (Paragraphe 2) et surtout du bail
commercial72(*)
(Paragraphe 1).
Paragraphe 1- L'exigence du
maintien du contrat de bail : une pérennité
géographique
Les entreprises industrielles et les grands magasins, en
raison de l'ampleur et de la valeur de leurs installations matérielles,
sont généralement propriétaires des locaux dans lesquelles
ils exercent. Toutefois, il arrive que le commerçant ne soit pas
propriétaire de l'immeuble dans lequel il exerce son activité. Il
en obtient la jouissance par un bail à usage commercial. Ce bail est
l'un des éléments importants, parfois le plus important du fonds
de commerce73(*) en ce
qu'il lui assure la clientèle74(*). De même, ce contrat de bail se doit d'assurer,
à l'entreprise en difficulté désireuse de se redresser,
une pérennité géographique car celle-ci doit pouvoir
disposer un local afin de poursuivre son activité. En effet, comment
espérer restaurer la viabilité d'une entreprise ne disposant plus
de local pour exercer son activité ? Inéluctablement, les
stipulations conventionnelles, librement consenties, vont être
neutralisées (A) et, les droits et actions du bailleur,
qui forment les compléments sécuritaires du contrat,
altérés par la mise de l'entreprise en location
(B).
A- La neutralisation des stipulations
contractuelles
La survie du contrat est voulue et organisée par le
législateur OHADA. Dès lors, la résiliation du bail pour
cause d'ouverture d'une procédure collective ou de conclusion d'un
contrat de location-gérance, notamment par l'effet d'une clause, ne
serait guère opportune. Le législateur africain a prohibé
toute clause de déchéance ou de résiliation du contrat de
bail du seul fait de la mise de l'entreprise en location-gérance. Le
texte de l'article 115, alinéa 2, de l'AUPCAP assure une protection
efficace du contrat de bail en prohibant toute résiliation automatique
du bail du seul fait de la conclusion d'un contrat de location-gérance
bien qu'il s'agisse d'un contrat où la considération de la
personne du cocontractant et, notamment, de sa solvabilité, est
essentielle.
Ainsi, lorsque la disparition ou la cessation
d'activité, même provisoire, de l'entreprise sera de nature
à compromettre son redressement ou à causer un trouble grave non
seulement à l'économie locale, mais aussi nationale ou
régionale dans la production et la distribution de biens et services, il
sera toujours possible que le tribunal autorise la formation d'un contrat de
location-gérance quelles que soient les stipulations du bail.
On sait à l'évidence que les clauses
résolutoires ont, en effet, pour vocation première de sanctionner
l'inexécution et, dans la majorité des cas, un défaut de
paiement. Elles permettent également de délimiter le cadre
d'application du contrat dans lequel elles sont stipulées. Le
législateur a tout simplement voulu éviter que les cocontractants
ne se prévalent, lorsque le tribunal est saisi, d'une clause
résolutoire fondée sur la formation d'un contrat de
location-gérance pour rompre le contrat et frauder ainsi à
l'article 115 de l'AUPCAP. Le bailleur ne peut arguer de la mise en
location-gérance de l'entreprise pour se délier de la relation
contractuelle et ce, quelles que soient les clauses du contrat.
Ajouté à l'article 97 de l'AUPCAP, la poursuite
du contrat de bail sera imposée en dépit du changement du mode
d'exploitation du fonds de commerce. Il y'a là atteinte totale aux
droits du bailleur. Non seulement les stipulations du contrat de bail
interdisant la location-gérance sont rendues inefficaces, mais aussi les
prérogatives du bailleur sont altérées.
B- L'altération des
prérogatives contractuelles
Un ensemble de prérogatives que la loi ou la
volonté des parties attache à la qualité de
créancier conférée par la convention, rentre dans les
attributs contractuels. En tendant à la défense des
intérêts du cocontractant, ces prérogatives contreviennent
à l'objectif de maintien de la relation contractuelle. Le bailleur, en
tant que cocontractant et créancier au même titre que les
créanciers dans la masse, est concerné par un certain nombre de
restrictions les concernant75(*). Sa marge de manoeuvre est extrêmement
réduite. « Il ne peut faire valoir la clause contractuelle
qui lui permettait de se prémunir contre les inconvénients de la
cessation des paiements, encore moins invoquer la résolution
unilatérale que lui offre le droit commun des
contrats »76(*). Le bailleur est contraint de remplir ses
obligations, après l'ouverture de la procédure, malgré
l'inexécution par le débiteur d'engagements antérieurs au
jugement d'ouverture77(*).
En outre, il se voit imposer un nouveau cocontractant :
dès l'autorisation par le tribunal de la conclusion d'un contrat de
location-gérance, le bailleur est appelé à accueillir le
locataire-gérant comme nouveau locataire de ses immeubles. Il ne pourra
retrouver son cocontractant initial, le débiteur en difficulté,
qu'à la fin de la location.
S'il est vrai que le bailleur sera considéré et
traité comme les créanciers contre la masse en ce qui concerne
les dettes nées régulièrement, après le jugement
d'ouverture de la continuation de l'activité par le débiteur ou
le syndic, il n'en est pas de même des dettes qui seront nées de
l'exploitation du locataire-gérant. Celles-ci restent exclusivement
à la charge de ce dernier sans solidarité avec le
propriétaire du fonds, débiteur78(*).
La manifestation la plus brutale et la plus
générale des restrictions des droits du bailleur réside
dans la paralysie de son action en règlement des loyers. Il en est de
même de son action en résolution du contrat de bail pour
défaut de paiement desdits loyers. Dans le cadre de la
location-gérance de l'entreprise en difficulté, si le
locataire-gérant s'avère insolvable peu après la
conclusion du contrat, le bailleur n'aura plus aucun recours à
l'encontre de son ancien locataire. Le droit des procédures
collectives, droit d'ordre public, démontre par ce fait sa
primauté sur le droit de bail commercial qui revêt aussi un
caractère d'ordre public. La raison est la suivante :
« La réglementation du bail commercial vise la protection
des intérêts d'une partie au contrat alors qu'il semble que le
droit des procédures collectives poursuit des fins apparemment
supérieures : la protection de l'entreprise et la sauvegarde des
intérêts des créanciers »79(*).
Le bail n'est pas le seul contrat indispensable au
redressement de l'entreprise en difficulté. Il existe aussi les contrats
de fournitures et de louage d'objets mobiliers.
Paragraphe 2- La
nécessité de la préservation des contrats de fournitures
et de louage d'objets
Les contrats dans lesquels l'intuitu personae ne
joue pas un rôle prépondérant et qui ne sont pas
résiliés de plein droit par l'effet de la loi sont ceux dont le
syndic, agissant au nom de la masse et dans le souci de la pérennisation
de l'exploitation, réclamera l'exécution. Le syndic offrira
d'exécuter le contrat lorsque celui-ci s'avère indispensable au
sauvetage de l'entreprise. C'est notamment le cas en plus du contrat de bail,
des contrats de louage d'objets mobiliers (A) et de certains
contrats de fourniture (B).
A- Le sort des contrats de louage d'objets
mobiliers
Quand un commerçant a pris en location certains objets
mobiliers, l'ouverture d'une procédure de liquidation des biens ou de
redressement judiciaire contre le locataire ne résilie pas de plein
droit le contrat80(*). Le
syndic a le droit de le reprendre pour le compte de la masse. Il n'est pas
toujours nécessaire que cette volonté soit expresse81(*). Elle peut donc être
tacite et résulter du fait que le syndic a continué à se
servir du mobilier loué pour les besoins de l'activité du
débiteur avant de saisir la juridiction compétente d'une demande
d'autorisation de conclusion d'un contrat de location-gérance.
Les loyers échus à partir de l'ouverture de la
procédure collective, et avant la mise en location de l'entreprise, de
même que l'indemnité pouvant être due par suite de la perte
des objets loués, survenue après le jugement d'ouverture,
constituent des dettes de la masse. Elles doivent être payées par
préférence82(*). Dès la conclusion du contrat de
location-gérance, le locataire-gérant demeure seul responsable
des dettes à naître.
Quid des contrats fournisseurs en cours ?
B- Le sort des contrats de
fournitures
Pour réaliser son programme économique, tout
commerçant et à travers lui, l'entreprise qu'il dirige, doit
conclure avec ses fournisseurs et ses clients une multitude de contrats qui
s'enchaînent et qui se conditionnent mutuellement. Ces contrats, qui
manifestent le dynamisme et la vitalité de son exploitation, forment la
trame de son activité commerciale83(*).
Aucun problème majeur ne se pose entre le
locataire-gérant et les clients de l'entreprise mise à sa
disposition. Toutefois, en ce qui concerne ses relations avec les fournisseurs,
l'on se demande s'il est tenu de les maintenir surtout que ces contrats
préexistent à la conclusion du contrat de
location-gérance. La réponse à cette interrogation varie
selon le type de contrat commercial en présence. S'il est vrai qu'il
existe des contrats fournisseurs dont la continuation dépend de la seule
volonté du locataire-gérant (1), il en est
d'autres dont la rupture entraîne ipso facto la disparition de
l'entreprise (2).
1- Les contrats de
fournitures dont la continuation dépendrait de la volonté du
locataire-gérant : le contrat de commission
Bien que moins fréquentes au XIXe siècle, les
applications du contrat de commission sont encore assez nombreuses dans la vie
des affaires. Elles ont trait tantôt à la vente des marchandises,
tantôt à leur achat.
La commission est un contrat par lequel une personne - le
commissionnaire - s'engage à accomplir une ou plusieurs
opérations commerciales pour le compte d'une autre appelée
commettant mais en son nom propre. C'est le commissionnaire et lui seul qui
s'engage envers le tiers avec lequel il traite. Il dissimule la personne du
commettant, c'est-à-dire l'entreprise pour laquelle il agit.
La question qui se pose est celle de savoir si le
locataire-gérant, nouveau dirigeant de l'entreprise en
difficulté, est tenu de continuer les affaires avec le commissionnaire
déjà en place.
Qu'il s'agisse du commissionnaire vendeur ou du
commissionnaire acheteur, l'on pense que le locataire-gérant n'est pas
obligé de rester en relation avec lui, même lorsqu'on sait qu'il
ne doit pas changer d'activité. Il peut selon sa situation
financière, se passer de la commission car, comme le déclare un
auteur84(*), le contrat de
commission permet seulement « à un commerçant de
faire des opérations commerciales en utilisant les services d'un autre
commerçant ». C'est dire que le maintien de cette
relation d'affaires dépend de la seule volonté du
locataire-gérant. Tel semble ne pas être le cas lorsque celui-ci
se trouve en face d'un réseau de commerçants
intégrés.
2- Les contrats de
fournitures dont la rupture entraînerait directement la disparition de
l'entreprise : la franchise et la concession exclusive
Les concessionnaires et les franchisés constituent les
principales catégories de commerçants intégrés dans
des réseaux de distribution.
S'agissant de la concession commerciale, on la définit
comme un « contrat liant un fournisseur à un
commerçant, auquel il réserve la vente de ses produits, à
la condition qu'il accepte un contrôle commercial, comptable, voire
financier de son entreprise et parfois s'engage à s'approvisionner, dans
ce secteur, exclusivement chez le concédant »85(*). Il ressort de cette
définition que le contrat de concession est un contrat impliquant une
activité d'achat pour revendre86(*) - assorti d'une exclusivité
d'approvisionnement87(*) -
et d'une exclusivité de fourniture88(*). Lorsque l'entreprise en difficulté fonctionne
sous ce régime, le locataire-gérant est tenu de le maintenir car
sa rupture compromettrait toute exploitation de l'entreprise voire son
redressement. Il en est de même lorsque l'entreprise en difficulté
était liée par un contrat de franchise.
De son côté, le contrat de franchise89(*) ou franchisage est un
« contrat par lequel le titulaire d'un signe distinctif,
généralement déposé à titre de marque (le
franchiseur), en concède l'usage à un commerçant
indépendant (le franchisé) auprès duquel il assume une
fonction de conseil et d'assistance commerciale, moyennant le paiement d'une
redevance sur le chiffre d'affaires du franchisé ainsi que son
engagement de s'approvisionner en tout ou en partie auprès du
franchiseur ou de tiers déterminés et de respecter un certain
nombre de normes tant pour l'implantation que pour la gestion du point de
vente »90(*). D'origine américaine, la franchise est un
contrat qui lie, au sein d'un réseau très uniformisé dans
sa présentation matérielle (devanture des magasins, achalandage)
et ses méthodes de vente, un fournisseur de biens ou services à
des commerçants appelés à offrir ces biens et services aux
consommateurs91(*). Le
franchisage se situe dans le prolongement de la concession lorsque le
franchiseur fournit ses produits au franchisé avec clause
d'exclusivité. Et c'est encore la vente qui se trouve au coeur de ce
contrat.
Le problème qui se pose est celui de savoir si les
contrats de concession et de franchise conclus intuitu personae
peuvent être librement transférés au
locataire-gérant de l'entreprise en difficulté ?
Le principe est que, le contrat de concession étant
incessible et intransmissible, il doit prendre fin en cas de transfert
d'activité, de transfert de gestion. Toutefois, il peut être fait
recours à un contrat avenant92(*) permettant au repreneur de continuer à traiter
avec le concédant. Tel semble-t-il être la procédure
à suivre lorsque l'entreprise est tombée en difficulté et
nécessite un redressement imminent ?
Etant donné que les principes ne sont que des principes
et qu'ils appellent inévitablement des correctifs, des limites, des
dérogations, des exceptions93(*), celui de l'intransmissibilité du contrat de
concession trouve difficilement application en matière des
procédures collectives qui impose une certaine
célérité. Il nous semble que le recours à l'avenant
risque de freiner ou de mettre en mal le souci de sauvetage de l'entreprise en
difficulté car il y a risque de disparition ou de cessation provisoire
d'activité.
Le contrat de franchise est un contrat conclu en
considération de la personne des cocontractants, particulièrement
de celle du franchisé. Le franchiseur doit s'assurer, dans
l'intérêt commun des parties, mais également dans celui du
réseau de franchise, que le franchisé sera apte à
exploiter une entreprise et le savoir-faire qui lui aura été
transmis. Il est légitime pour le franchiseur de se prémunir
contre toute atteinte à l'image ou à la réputation du
réseau de franchise, et de s'assurer en conséquence que
l'exploitation d'une entreprise par un nouveau membre sous l'enseigne commune
à tous les membres du réseau, ne mettra pas en danger ni le
franchisé lui-même, ni les autres membres.
Or le locataire-gérant remplit-il ces
conditions ? Pas toujours. Le franchiseur pourrait être
appelé cependant à l'admettre comme nouveau franchisé afin
de favoriser la pérennisation de l'activité de l'entreprise
malade. Ce souci remet sans doute en question l'intérêt
accordé aux contrats conclus en considération de la personne du
débiteur par l'article 107 de l'AUPCAP.
Que ce soit le contrat de franchise ou de concession
exclusive, le franchiseur ou le concédant doit se plier aux exigences
des procédures collectives afin de permettre au locataire-gérant,
nouvel employeur, nouveau franchisé ou concessionnaire, de revitaliser
en toute quiétude l'entreprise en difficulté. En effet, comment
espérer redresser une entreprise qui ne dispose plus d'activité,
de marchandises? Pour un souci de sauvetage de l'entreprise en
difficulté, l'ouverture d'une procédure de redressement
judiciaire ne doit nullement être la cause de résiliation du
contrat de concession ou de franchise.
Force est donc de constater que soucieux de la valeur socio
économique de l'entreprise, le législateur de l'OHADA n'a pas
hésité à imposer la poursuite de l'activité de
l'entreprise contre laquelle une procédure collective est ouverte.
Qu'elle soit faite par le biais d'une gestion directe ou d'une gestion
indirecte, cette poursuite de l'activité nécessite l'existence
des contrats en cours. Parmi ces derniers, il y en a qui s'avèrent
indispensables à la mise de l'entreprise en location-gérance et
par conséquent à la pérennisation de son exploitation.
On le voit, loin d'être un bien du débiteur,
l'entreprise est un maillon de la chaîne économique de
l'État et nécessite d'être protégée. Le
maintien de l'entreprise a en effet comme corollaire le maintien de l'emploi et
partant de la stabilité socio-économique.
CHAPITRE II : LE MAINTIEN SOUHAITABLE DE L'EMPLOI
Maintenir l'emploi malgré la modification dans la
situation juridique de l'employeur est le but visé par le
législateur du travail. Ainsi, l'article 42, alinéa 1 (a), de la
loi n° 92/007 du 14 août 1992 portant Code du Travail (C.T.) dispose
que : « s'il survient une modification dans la situation
juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion,
transformation de fonds, mise en société, tous les contrats de
travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel
entrepreneur et le personnel de l'entreprise »94(*).
Le souci du législateur de garantir la
sécurité de l'emploi l'a amené à conférer
à ce texte un caractère d'ordre public, ce qui interdit aux
employeurs d'en éluder l'application en introduisant, aussi bien dans le
contrat de travail95(*)
que dans la convention de transfert - quelle qu'en soit la forme - une clause
destinée à en exclure ou même en limiter
l'application96(*).
Il se pose la question de savoir si le locataire-gérant
de l'entreprise en difficulté est tenu de respecter tous ces avantages
alors qu'on sait qu'il a entre autres objectifs, la participation au
redressement de l'entreprise.
Le législateur OHADA a prévu qu'en cas de
redressement judiciaire, lorsque le tribunal aura décidé de sa
mise en location-gérance, que le maintien de l'emploi soit de principe
et les licenciements une mesure exceptionnelle car nul n'ignore que, quel que
soit son motif, le licenciement est l'acte par lequel l'employeur retire au
salarié son moyen de subsistance (Section II). C'est
ainsi qu'avant d'y recourir, cette nécessité de la
préservation des emplois recommande que des mesures alternatives soient
recherchées (Section I).
Section I : La modification des contrats de travail,
moyen de préservation de l'emploi.
Comme le souligne M. VOISSET, « le droit du
travail est, de fait, un droit instable qui doit toujours concilier deux
logiques opposées : la logique économique et la logique
sociale en fonction le plus souvent des rapports de force et qui connaît,
par conséquent, des mouvements de balancier »97(*). Ces mouvements sont
très accentués dans les entreprises en difficulté
où s'opposent de façon plus prononcée les
intérêts des salariés et ceux des repreneurs.
Si les salariés doivent se résigner à
subir des licenciements économiques indispensables au maintien de
l'activité de l'entreprise lorsque celle-ci est sous traitement
judiciaire, la situation paraît quelque peu différente
après reprise98(*).
Le locataire-gérant, nouveau maître de l'affaire, ne dispose pas
de la liberté pour procéder aux licenciements pour motif
économique99(*). Il
est tenu au respect de certaines règles et pratiques qui gouvernent le
droit du travail. Celles-ci peuvent constituer des entraves à l'action
de sauvetage de tout ou partie de l'entreprise en difficulté. Toutefois,
il peut recourir à la modification du contrat de travail. Cette
modification touche à la fois le travail (Paragraphe 1)
et la rémunération (Paragraphe 2).
Paragraphe 1- La
modification du travail proposé
Pour limiter, voire éviter les licenciements, le
locataire-gérant appelé à maintenir les emplois peut
être amené à prendre des mesures relatives au
travail100(*). Celles-ci
concernent essentiellement la réduction des horaires du travail
(A), le recours au travail à temps partiel
(B) et la mise en chômage technique
(C).
A- La réduction du temps
de travail
L'employeur est en principe obligé de respecter la
durée du travail du salarié compte tenu de son impact sur sa
santé et sa sécurité. Toutefois, les besoins de
l'entreprise peuvent obliger l'employeur à procéder aux
modifications substantielles, dans le sens d'une augmentation ou d'une
réduction du temps de travail101(*).
La réduction du temps de travail constitue certes une
atteinte grave aux droits élémentaires du travailleur dans la
mesure où elle s'accompagne d'une diminution corrélative de sa
rémunération. Afin de faciliter l'adaptation du contrat de
travail aux circonstances économiques nouvelles, qu'elles soient
générales ou propres à l'entreprise, la pratique
révèle un ajustement constant par les parties elles-mêmes,
du statut du salarié en fonction des nécessités du bon
fonctionnement de l'entreprise ou de la conjoncture102(*). La réduction du
temps de travail permet d'éviter les pertes d'emplois car il s'agit de
travailler moins pour sauver non seulement une partie de son emploi, mais aussi
l'emploi des autres.
La réduction effective du temps de travail consiste
à abaisser en deçà de la durée légale ou de
la durée fixée conventionnellement, la durée normale du
travail effectif applicable dans l'entreprise. Ce type de mesures permet de
réaliser un certain partage du temps de travail dans
l'entreprise103(*).
La réduction effective du temps de travail
évite de procéder d'office à des licenciements pour motif
économique et participe par conséquent au maintien de l'emploi
tout comme le recours au travail à temps partiel.
B- Le recours au travail
à temps partiel
Le travail à temps partiel permet de réduire
globalement le nombre d'heures travaillées pour l'adapter aux besoins de
l'entreprise en redressement judiciaire. Cette technique fait diminuer la masse
salariale sans affecter le volume global des effectifs, ni remettre en cause
l'existence des contrats de travail, sous réserve de l'acceptation de la
modification, par chaque salarié, de son contrat de travail. Le travail
à temps partiel peut constituer, pour le nouvel employeur, une mesure
alternative au licenciement économique.
Ces mesures, qualifiées de modification du contrat de
travail, permettent d'adapter les contrats de travail en cours
d'exécution au nouveau contexte économique de l'entreprise. Elles
permettent de sauvegarder au maximum l'emploi, de garantir aux employés
la stabilité de leur emploi.
Á l'instar de l'article 42, al. 1, du C.T. camerounais,
les articles 78, 71 et L 66, respectivement des Codes du Travail gabonais,
togolais et sénégalais104(*), proclament le principe du maintien de l'emploi,
même pour les entreprises faisant l'objet des procédures
collectives. Á ce titre, ils obligent les nouveaux employeurs, en
l'occurrence les repreneurs, à continuer les contrats de travail des
salariés de l'entreprise reprise. Ces dispositions fondamentales
rattachent les contrats de travail au sort de l'entreprise quel que soit le
changement dans la situation juridique de celle-ci. Un employeur s'en va, un
autre arrive, le locataire-gérant, la quasi-totalité des
salariés aspire à rester dès lors que l'activité de
leur entreprise se poursuit malgré une éventuelle mise en
chômage technique.
C- La mise en chômage
technique
Synonyme de mise à pied, mais de mise à pied
économique, le chômage technique peut être défini
comme une interruption collective du travail, totale ou partielle du personnel
de l'entreprise, interruption résultant, soit des causes accidentelles,
soit de la force majeure, soit d'une conjoncture économique
défavorable. Il constitue de ce fait une modification substantielle du
contrat de travail.
La question qui se poserait est de savoir comment et pourquoi
le locataire-gérant peut procéder à une mise en
chômage technique des employés alors qu'il disposerait de fonds
nouveaux pour la relance de l'exploitation de l'entreprise. Certes, le
locataire-gérant, repreneur de l'entreprise en difficulté,
disposerait sans doute de fonds mais ils ne lui permettent pas
nécessairement de maintenir tous les contrats en cours dans toute leur
substance. Il est à noter que comme tout commerçant, il est
appelé à faire des bénéfices car personne ne peut
accepter investir pour perdre. Pour s'en sortir, le gérant libre
peut choisir de faire recours au chômage technique.
Bien que n'ayant pas été expressément
prévu par l'AUPCAP, le chômage technique est souvent
justifié par des motifs d'ordre structurel ou conjoncturel imputables
aux difficultés économiques de l'entreprise. Il ne met pas fin au
contrat de travail. Le salarié est psychologiquement présent dans
l'entreprise puisqu'il peut être interpellé à tout moment
pour reprendre son travail. Il bénéficie d'une indemnité
compensatrice fixée par la loi.
Destiné à éviter les pertes d'emplois, le
chômage technique s'étend sur une durée maximale de six
mois. Au-delà de cette durée, il s'assimile à un
licenciement105(*). Le
législateur OHADA apporte une notion nouvelle dans l'Avant Projet de
l'Acte Uniforme sur le Droit du Travail en ce qu'à côté du
chômage technique, il a prévu le chômage
économique106(*)
dont la durée ne pourra excéder trois mois107(*).
Lorsque les différentes modifications
opérées sur le travail proposé ne permettent pas d'aboutir
à un redressement raisonnable de l'entreprise en difficulté mise
en location, le locataire-gérant peut être amené à
réviser la rémunération afin de pouvoir adapter la
situation de ses employés aux nouvelles conditions économiques de
l'entreprise.
Paragraphe 2- La
modification de la rémunération, moyen d'adaptation de la
situation des employés aux nouvelles conditions économiques de
l'entreprise mise en location- gérance
La technique de
modification des contrats de travail permet d'adapter la situation des
salariés aux nouvelles conditions économiques sans recourir
nécessairement à des licenciements pour motif économique.
Ainsi, soucieux
d'éviter autant que faire ce peut la disparition de l'entreprise en
difficulté, voire la rupture des relations contractuelles et par
conséquent, l'augmentation du taux de chômage avec toutes les
conséquences que cela entraîne socialement, le législateur
impose pour le sauvetage de l'entreprise et le maintien de l'emploi, de
recourir aux mesures touchant à la rémunération. Celles-ci
portent sur la réduction du salaire et ses accessoires d'une part
(A) et sur la remise en cause des usages d'entreprise d'autre
part (B).
A- La réduction du
salaire et le réaménagement de ses accessoires
« Le terme `salaire' signifie, quels qu'en
soient la dénomination et le mode de calcul, la
rémunération ou les gains susceptibles d'être
évalués en espèces et fixés, soit par accord, soit
par dispositions réglementaires ou conventionnelles, qui sont dus en
vertu d'un contrat de travail par un employeur à un travailleur, soit
pour le travail effectué ou devant être effectué, soit pour
les services rendus ou devant être rendus »108(*). D'un point de vue
économique, le salaire « est le prix de la force de
travail que le salarié met à la disposition de l'employeur
considérée comme une marchandise obéissant à la loi
de la valeur »109(*). Á cet effet, on distingue le salaire de
base110(*) des
accessoires de salaire111(*).
La réduction des salaires est un
succédané aux licenciements collectifs qui permet aux entreprises
de réaliser des économies grâce à la diminution
subséquente des charges du personnel. Ainsi, le locataire-gérant,
nouvel employeur, conscient de la valeur socio économique de
l'entreprise, pourra être tenu, selon ses moyens, de procéder
à la réduction des salaires afin de revitaliser ou de vivifier
l'entreprise et de préserver au maximum les emplois. La jurisprudence
est unanime sur le fait qu'en cas de difficultés menaçant la vie
de l'entreprise, les salaires pourraient être revus à la
baisse112(*).
Cette réduction se fera suite à une
négociation entre le locataire-gérant et chaque employé
car toute réduction unilatérale s'assimile à un paiement
irrégulier du salaire113(*). L'acceptation par les salariés de sacrifices
parfois importants, trouve sa justification à la fois par leur
attachement à l'entreprise et, surtout par la nécessité de
sauver de la sorte le maximum d'emplois possibles114(*).
La question qui se pose est de savoir si le
locataire-gérant, employeur, peut proposer un salaire inférieur
au SMIG115(*). Compte
tenu de la mission qui lui est reconnue, il faut noter que le consensualisme a
des limites en droit du travail116(*). Fixé par les pouvoirs publics, le SMIG est
le salaire minimum117(*)
en deçà duquel aucun salaire ne doit exister, quelle que soit
l'activité exercée. Il est à la fois d'ordre public et
général. C'est dire qu'en procédant à la
réduction des salaires, le locataire-gérant est tenu de respecter
le SMIG.
En plus du salaire, le locataire-gérant peut être
contraint par la conjoncture économique à envisager une
réduction ou un réaménagement des différents
éléments accessoires de salaire tels que les
primes118(*), les
indemnités119(*),
les avantages en nature120(*), etc.
Le locataire-gérant, nouveau gérant de
l'entreprise en difficulté, pourrait vraiment avoir intérêt
à procéder à ces réaménagements car nombre
de ces éléments alourdissent parfois les charges sociales de
l'entreprise appelée à se redresser.
Outre le salaire et les accessoires que le nouvel employeur
peut être appelé à réduire, il y a également
certains usages d'entreprise qui peuvent éventuellement être remis
en cause.
B- La remise en cause de
certains usages d'entreprise
S'il est vrai que les salaires et leurs accessoires sont le
fait de la loi, il n'en est pas de même des usages d'entreprise qui sont
le fruit d'une certaine pratique non encore codifiée. L'usage
d'entreprise se définie comme une pratique habituellement suivie dans
l'entreprise et qui prend la forme d'un avantage supplémentaire
accordé aux salariés ou à une catégorie d'entre
eux, par rapport à la loi, la convention collective ou le contrat. Il
s'agit des avantages sociaux, généralement sans base
écrite. Ces avantages, fruit de l'usage, sont des avantages
concédés volontairement et unilatéralement par l'employeur
aux salariés ou à certains d'entre eux, ou résultant d'un
certain comportement du personnel, auquel l'employeur ne s'est jamais
opposé et qui s'est consolidé avec le temps. Il peut s'agir soit
de divers avantages en nature (voiture, logement, personnel domestique, etc.),
soit de rémunérations excessives telles les allocations
forfaitaires exagérées qu'un employeur attribue à ses
employés pour frais de représentation et de
déplacement.
Les usages sont ainsi repris avec le personnel auquel ils
sont liés. Ces usages qui constituent des avantages sociaux
énormes alourdissent les charges sociales de l'entreprise et peuvent par
conséquent constituer des entraves à l'action de sauvetage de
tout ou partie de l'entreprise en difficulté. Ainsi, après
respect de la procédure formelle de dénonciation des usages
d'entreprise121(*), le
locataire-gérant pourra les remettre en cause.
Lorsque malgré les différentes modifications
opérées tant sur le travail que sur la
rémunération, le redressement de l'entreprise n'est pas certain,
le locataire-gérant peut être obligé de faire recours aux
licenciements pour motif économique.
Section II : Le recours aux licenciements pour motif
économique, moyen de protection de l'emploi
L'objectif
économique de la procédure collective est le redressement de
l'entreprise viable et le maintien de l'activité. Les licenciements des
salariés se révèlent souvent indispensables au
redressement de l'entreprise. En effet, les modifications permettant d'adapter
les contrats de travail à l'évolution de l'entreprise peuvent
s'avérer insuffisantes à elles seules pour permettre une
restructuration efficace de la situation sociale. La survie de l'entreprise
peut être subordonnée à la diminution de l'effectif du
personnel et donc au départ de certains employés de
l'entreprise.
La masse salariale formant
parfois une part importante des charges d'exploitation, est diminuée par
les licenciements. En outre, la rupture des contrats de travail de certains
salariés permet la réorganisation de l'entreprise. Toutefois, un
autre objectif de la procédure de redressement judiciaire est le
maintien de l'emploi. Le principe de protection des salariés doit
être assuré. Par ailleurs, la rupture des contrats de travail ne
doit pas affaiblir le potentiel productif de l'entreprise.
Pour
ces raisons, tout en restant nécessaires au redressement de
l'entreprise, les licenciements doivent être justifiés
(Paragraphe1) et soumis à un contrôle strict du juge-commissaire
(Paragraphe2).
Paragraphe 1- Les
caractères requis du licenciement : la nécessité du
juste motif
Le législateur
camerounais définit le licenciement pour motif
économique comme : « tout licenciement
effectué par l'employeur pour un ou plusieurs motifs non
inhérents à la personne du travailleur et résultant d'une
suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification du contrat,
consécutive à des difficultés économiques, à
des mutations technologiques ou à des restructurations
internes »122(*). Il ressort de cette définition que le motif
économique, qui doit être distingué du motif personnel, est
celui qui n'est pas inhérent à la personne du travailleur, ce qui
de manière négative exclut le motif disciplinaire, la maladie
prolongée, l'âge, l'inaptitude physique ou professionnelle
etc.123(*).
Contrairement au Code du
travail camerounais qui définit le motif économique en le
distinguant du motif personnel, le Code du travail ivoirien semble être
très original par sa précision et sa concision124(*). Ce code dispose en son
article 16-7 que : « Constitue un licenciement pour
motif économique, le licenciement opéré par un employeur
en raison d'une suppression ou transformation d'emploi, consécutives,
notamment, à des mutations technologiques, à une restructuration
ou à des difficultés économiques de nature à
compromettre l'activité et l'équilibre financier de
l'entreprise ».
D'après l'article 110, alinéa 1, de l'AUPCAP,
« lorsque des licenciements pour motif économique
présentent un caractère urgent et indispensable, le syndic peut
être autorisé à y procéder par le Juge-commissaire
selon la procédure prévue par le présent article et le
suivant, nonobstant toute disposition contraire mais sans préjudice du
droit au préavis et aux indemnités liées à la
résiliation du contrat de travail »
Il ressort de ce texte qu'au cours des procédures de
redressement, le recours aux licenciements pour motif économique est
exceptionnel. L'on ne peut y procéder que s'ils présentent un
caractère urgent, indispensable et même inévitable
125(*). Le Juge-commissaire
seul doit, en examinant la situation financière de l'entreprise et ses
perspectives d'avenir, apprécier ces caractères. Ceux-ci portent
sur plusieurs aspects :
· Le caractère urgent des
licenciements : la période de redressement judiciaire a fonction
conservatoire afin de ne pas modifier trop gravement la structure de
l'entreprise. En principe, les licenciements ne peuvent pas intervenir dans
cette période. Cependant, les licenciements prononcés en retard
peuvent compromettre le redressement de l'entreprise. Le caractère
urgent des licenciements existe lorsque le différé des
mesures est de nature à compromettre irréversiblement la survie
de l'entreprise. Il est à noter que si le licenciement est
envisagé, il y aura presque toujours urgence à y procéder
pour une entreprise en redressement judiciaire ou en liquidation des
biens126(*).
· Le critère indispensable des
licenciements : les licenciements sont considérés comme
indispensables lorsque leur intervention a une répercussion notable sur
les chances de redressement de l'entreprise, que leur refus peut
accroître les difficultés existantes et conduire à la
liquidation de l'entreprise. Le caractère indispensable du licenciement
est lié à la légitimité du licenciement et est sans
portée au stade du choix de la voie à suivre pour
licencier127(*). En
effet, il ne sera pas un élément dont la présence doit
être préalablement vérifiée pour l'ouverture de la
procédure spéciale de l'Acte uniforme128(*).
· Le caractère inévitable des
licenciements : d'après ce critère, les difficultés
économiques ne peuvent être surmontées par la
réduction des coûts autres que salariaux. Le Juge-commissaire doit
procéder à une analyse de la situation financière de
l'entreprise pour justifier que la rupture des contrats de travail de certains
salariés est la seule mesure pour diminuer la masse salariale et donc
alléger les charges d'exploitation. Le licenciement d'une partie des
salariés apparaît dès lors comme un pis allé au
sauvetage de l'entreprise.
Le licenciement économique des salariés devrait
définitivement être jugé urgent, indispensable et
inévitable lorsqu'il est justifié par une cause réelle et
sérieuse. C'est dire que les licenciements économiques doivent
aussi présenter un caractère réel, non potentiel et
sérieux. Ainsi, le tribunal ne pourrait pas remettre en cause le
caractère économique des licenciements jugés urgents,
indispensables et inévitables par le Juge-commissaire.
Dès lors qu'ils présenteront les
caractères requis, les licenciements pourront être
prononcés. Mais avant de l'être, ils doivent faire l'objet d'un
contrôle strict.
Paragraphe 2- Le
contrôle des licenciements pour motif économique des
salariés de l'entreprise en difficulté mise en
location-gérance
La protection des
salariés est un principe de droit des procédures collectives.
Bien qu'intervenant comme un élément de la sauvegarde de
l'entreprise, les licenciements ne doivent pas affaiblir le rendement de
l'entreprise. Ainsi, avant d'être autorisés par l'organe
compétent (B), les licenciements doivent faire l'objet
d'importantes communications par le locataire-gérant
(A).
A- L'obligation de
communication du locataire-gérant
La procédure de licenciement pour motif
économique fait intervenir plusieurs personnes lorsque l'entreprise est
reprise par le mécanisme de la location-gérance. Le
locataire-gérant établit l'ordre des licenciements ; les
délégués du personnel donnent leurs avis et leurs
suggestions sur les licenciements par écrit ; l'inspecteur du
travail reçoit communication de la lettre de consultation des
délégués du personnel et de leur réponse129(*).
Le locataire-gérant qui envisage de licencier les
salariés de l'entreprise en état de cessation des paiements qu'il
a en charge doit consulter sous procès-verbal les
délégués du personnel. Conjointement avec l'article 110,
al 2, de l'AU de l'OHADA sur les procédures collectives, l'article 40,
al. 6 (b), du Code du travail dispose qu'en « vue de
recueillir leur avis et leurs suggestions, l'employeur doit communiquer par
écrit aux délégués du personnel, la liste des
travailleurs qu'il se propose de licencier en précisant les
critères de choix retenus ». Les renseignements utiles
requis concernent notamment :
- la ou les raisons économiques, financières ou
techniques du licenciement ;
- le nombre de travailleurs dont le licenciement est
envisagé ;
- les aptitudes professionnelles concernées et les
critères proposés pour l'ordre des licenciements. Cet ordre doit
tenir compte, en priorité, du critère d'aptitude professionnelle
protégeant au mieux l'entreprise. Sont proposés, en premier lieu,
les licenciements des travailleurs présentant les moindres aptitudes
professionnelles pour les emplois maintenus et, en cas d'égalité
d'aptitudes professionnelles, les travailleurs les moins anciens dans
l'entreprise130(*).
- le nombre de travailleurs, permanents ou non,
employés dans l'entreprise.
Il se pose la question de savoir comment le
locataire-gérant procédera en cas d'absence ou d'inexistence de
délégués du personnel131(*). Cette préoccupation aurait pu être
apaisée si l'AUPCAP avait pris le soin de préciser, comme au
Cameroun, que l'employeur doit saisir l'inspecteur du travail du ressort afin
de faire désigner par celui-ci des représentants ad hoc des
travailleurs132(*).
En vue de recueillir leur avis et leurs suggestions, le
locataire-gérant, tout comme le syndic, doit informer, par écrit,
les délégués du personnel des mesures qu'il a l'intention
de prendre en leur fournissant la liste des travailleurs dont il envisage le
licenciement et en précisant les critères qu'il a retenus. Les
délégués du personnel doivent faire leurs observations
écrites sous huitaine133(*).
La lettre de consultation des délégués du
personnel et leurs observations, s'il y en a eu, sont communiquées
à l'inspecteur du travail par les soins de l'employeur. D'après
le Professeur TCHAKOUA, cette communication à l'inspecteur du travail
vaut simple information puisqu'on n'attend de lui ni décision, ni
avis134(*).
L'ordre des licenciements établi par le
locataire-gérant, l'avis des délégués du personnel
s'il a été donné et la lettre de communication à
l'inspection du travail, sont remis au Juge-commissaire en vue de
requérir son autorisation.
B- L'autorisation des
licenciements par le Juge-commissaire
Contrairement au droit commun où l'autorisation des
licenciements émane de l'employeur, ce pouvoir est dévolu au
Juge-commissaire lorsque l'entreprise est en redressement judiciaire ou en
liquidation des biens sauf en ce qui concerne le licenciement des
salariés protégés135(*). L'avis ou la proposition du Ministre du travail est
écarté. C'est logique car celui-ci semble ne pas être
à mesure de concilier la situation de l'entreprise et l'exigence
d'adaptation des contrats de travail et la sauvegarde de l'entreprise. La seule
prise en considération de la protection des salariés risquerait
d'entraver le redressement de l'entreprise.
Nommé par le jugement d'ouverture, le Juge-commissaire
a un pouvoir décisionnel dans les procédures de redressement
judiciaire et de liquidation des biens. Il est chargé de veiller au
déroulement rapide de la procédure et à la protection des
intérêts en présence136(*). Il a pour rôle de résoudre le conflit
opposant l'intérêt de l'entreprise à celui des
salariés. Il est l'arbitre du concours entre l'objectif de sauvegarde de
l'entreprise et le maintien de l'emploi. Il a d'ailleurs été
considéré par des auteurs avisés comme « le
chef d'orchestre de la procédure» 137(*) de redressement judiciaire.
Il joue un rôle essentiel dans les licenciements pour
motif économique. Tous les documents (ordre des licenciements, avis des
délégués du personnel, lettre de communication à
l'inspection du travail) lui sont remis pour autorisation. Il autorise en tout
ou en partie les licenciements envisagés s'ils s'avèrent
nécessaires au redressement de l'entreprise ou refuse son autorisation
s'ils ne le sont pas. Le Juge-commissaire doit considérer la protection
des salariés d'une part, et le potentiel productif de l'entreprise
résultant des licenciements d'autre part. L'ordonnance mentionne le
nombre de salariés dont le licenciement est autorisé ainsi que
les activités et catégories professionnelles concernées -
mais non la liste nominative138(*).
La décision du Juge-commissaire est signifiée
aux travailleurs dont le licenciement est autorisé. Cette
décision ne vaut pas licenciement139(*). Celui-ci n'est prononcé que par une
décision du locataire-gérant. La lettre de licenciement
précise les motifs du licenciement. Il est à noter que la lettre
de licenciement qui se limite à viser l'ordonnance du Juge-commissaire
ayant autorisé le licenciement économique d'un salarié,
est considérée comme suffisamment motivée.
Dans tous les cas, le locataire-gérant qui
procède à des licenciements pour motif économique doit
payer aux salariés licenciés les indemnités y
afférentes s'ils remplissent les conditions d'attribution140(*).
L'un des avantages dont bénéficient les
travailleurs licenciés économiquement est la priorité de
réembauchage. En effet, l'article 40, al. 9, du Code du Travail
prévoit que le travailleur licencié bénéficie,
à égalité d'aptitude professionnelle, d'une
priorité d'embauche pendant deux ans dans la même
entreprise141(*). Il
s'ensuit que si la situation de l'entreprise venait à s'améliorer
sous l'administration du locataire-gérant, le salarié
licencié pourrait être réembauché par celui-ci ou en
fin de location par le débiteur initial, la durée de la location
étant en principe initialement de deux ans142(*).
La décision du Juge-commissaire autorisant ou refusant
les licenciements, rendue en application de l'article 40 de l'AUPCAP, est
susceptible d'opposition dans les quinze jours de sa signification devant la
juridiction ayant ouvert la procédure, qui rend sa décision,
insusceptible d'appel, dans un délai de quinze jours143(*). Il se pose la question de
savoir s'il peut y avoir recours en cassation.
Contrairement à certains auteurs qui pensent qu'il
n'existe pas de pourvoi en cassation dans les procédures de redressement
judiciaire et de liquidation des biens144(*), rien n'interdit de penser que, conformément
à l'article 14 du Traité OHADA145(*), la décision de la juridiction
compétente puisse faire l'objet de pourvoi, en principe devant la Cour
Commune de Justice et d'Arbitrage (CCJA)146(*).
Soucieux d'éviter autant que faire se peut la
disparition de l'entreprise en difficulté et par conséquent la
perte des emplois, le législateur de l'OHADA a souhaité qu'en cas
de redressement judiciaire, lorsque le tribunal aura décidé de la
mise de l'entreprise en location-gérance, que le maintien des contrats
de travail soit le principe et les licenciements l'exception.
Peu importe la nature du contrat : à durée
indéterminée ou déterminée, contrat de travail
temporaire, saisonnier, etc. L'essentiel est que le contrat de travail existe
et soit en cours d'exécution et qu'il y'ait une permanence dans
l'activité de l'entreprise. Le locataire-gérant doit poursuivre
une activité de même nature car il est non seulement tenu de ne
pas modifier la destination du fonds, mais aussi de ne pas modifier ou
étendre son objet.
Conclusion de la première partie
L'examen du recours à la location-gérance comme
un mécanisme d'administration de l'entreprise en difficulté a
permis de réaliser qu'elle contribue non seulement à la
pérennisation de l'exploitation de l'entreprise, mais aussi et surtout
au maintien de l'emploi. La sauvegarde de l'entreprise et le maintien de
l'emploi constituent de ce fait les premières finalités du
redressement judiciaire.
Le souci de pérenniser l'exploitation de l'entreprise
en difficulté au moyen de la location-gérance est l'un des
objectifs visés par le législateur africain durant la
période de redressement judiciaire. Seules les entreprises viables
pourront être mises en location et par conséquent être
sauvées. La continuation de l'activité de l'entreprise, quel que
soit le mode de gestion utilisé, implique nécessairement
l'existence et la poursuite de certains contrats en cours. En effet, en cette
période de crise qu'est le redressement judiciaire, la principale-voire
l'unique-richesse de l'entreprise sont les contrats qui le lient à ses
fournisseurs, ses distributeurs, son bailleur.
Á cet effet, leur survivance traduit la volonté
manifeste du législateur OHADA d'empêcher la disparition d'une
structure indispensable à la vie économique locale, nationale,
régionale ou communautaire et de maintenir l'emploi.
En dépit de l'importance des mesures mises en place
pour garantir la stabilité de l'emploi, la résolution des
difficultés de toute entreprise exige très souvent des
restructurations qui rendent inévitables le dégraissage ou la
compression des effectifs. L'entreprise est pour le locataire-gérant,
avant toute chose, un bien qu'il doit gérer au mieux de ses
intérêts. Il gère ce bien en utilisant toutes les
facilités que lui offre le droit. Á cet égard, et
malgré la force de la liberté du travail, le système
juridique OHADA permet à l'employeur de licencier dans un souci de
gestion optimale de l'entreprise. On en veut pour preuve l'institution du
licenciement pour motif économique même si son admission n'est que
très exceptionnelle.
S'il est donc vrai que la location-gérance est un
mécanisme d'administration de l'entreprise en difficulté, il n'en
demeure pas moins qu'elle constitue également un moyen d'apurement de
son passif.
DEUXIÈME PARTIE : LA
LOCATION-GÉRANCE, MOYEN D'APUREMENT DU PASSIF DE L'ENTREPRISE EN
DIFFICULTÉ
Dans l'Acte uniforme OHADA portant organisation des
procédures collectives d'apurement du passif, le paiement des
créanciers est l'objectif premier des procédures
instituées147(*).
La distinction entre les procédures est faite selon la manière
dont elles permettent de réaliser l'apurement du passif ; celui-ci
peut être obtenu par le redressement judiciaire ou la liquidation des
biens148(*). Au moyen du
redressement judiciaire, il s'agit d'apurer le passif antérieur de
l'entreprise afin qu'elle poursuive ses objectifs sur de nouvelles
bases149(*).
Ainsi, afin de permettre à la location-gérance
de contribuer à l'atteinte de cet objectif, le législateur OHADA
l'a entouré d'un certain nombre d'exigences. Il s'agit entre autres du
respect de la durée maximale de deux ans, de l'obligation de
préservation de la consistance de l'entreprise, du paiement de la
redevance et de l'indépendance du locataire-gérant150(*). En exigeant une
indépendance réelle du locataire-gérant vis à vis
du débiteur, le législateur OHADA a probablement voulu
éviter que ce dirigeant en faillite ne puisse par personne
interposée, poursuivre l'exploitation de l'entreprise. Cependant, il
peut se poser le problème de l'étendue de cette
indépendance. Autrement dit, le locataire-gérant peut-il
embaucher le débiteur en qualité d'employé ?
Malgré le silence de l'Acte Uniforme, une réponse affirmative
devrait être envisagée. L'affirmation trouve sa justification dans
le fait que le locataire-gérant étant indépendant du
débiteur, « rien n'interdit qu'un contrat de travail soit
conclu avec le débiteur, si du moins le lien de subordination
nécessaire existe bien »151(*).
L'essentiel est que le gérant libre assure
convenablement ses engagements en facilitant le paiement des créanciers
(Chapitre I). Dans le cas contraire, plusieurs types d'actions
sont susceptibles d'être engagées par les créanciers
floués (Chapitre II).
CHAPITRE I : LE DÉSINTÉRESSEMENT DES
CRÉANCIERS DE L'ENTREPRISE EN DIFFICULTÉ MISE EN
LOCATION-GÉRANCE
La mise en
location-gérance de l'entreprise en cessation de paiements
présente de nombreux avantages. Elle fait courir moins de risques aux
créanciers. Dans la pire des hypothèses, seules les redevances,
ne seront pas payées et peut être la valeur du fonds sera
compromise. Mais le passif du débiteur ne sera pas augmenté par
une exploitation déficitaire puisque les dettes du
locataire-gérant restent à sa charge152(*). C'est dire que les
créanciers de ce dernier ne viendront jamais en concours avec les
créanciers dans la masse153(*), principaux destinataires des deniers issus de la
location-gérance. Après avoir présenté les moyens
du désintéressement des créanciers (Section
I), il conviendra par la suite de déterminer leur ordre de
paiement (Section II).
Section I : Les moyens du désintéressement
des créanciers
L'un des griefs fait aux
rédacteurs de l'ancien AUDCG était qu'en reprenant pratiquement
la définition de la location-gérance, donnée par l'article
1er de la loi française du 20 mars 1956, à l'article
106154(*), ils ont
totalement omis de mentionner la redevance que doit verser le
locataire-gérant155(*). Aujourd'hui, c'est chose faite. L'AUDCG
adopté le 15 décembre 2010 dispose en son article 138, al. 4
que : «Le locataire-gérant doit payer au bailleur du fonds
un loyer correspondant à la redevance due pour la jouissance des locaux,
et un loyer pour la jouissance des éléments corporels et
incorporels du fonds de commerce tels que décrits dans le contrat de
location-gérance ».
Il est fait obligation aux parties de déterminer
de façon séparée dans le contrat de
location-gérance les deux éléments du loyer, même si
leurs échéances sont fixées aux mêmes dates. C'est
la raison pour laquelle, en accord avec le bailleur des locaux, lorsque
celui-ci n'est pas propriétaire du fonds de commerce, le
locataire-gérant peut être dispensé de lui assurer
directement, à chaque échéance, le paiement du loyer
dû à la rémunération de la jouissance des
locaux156(*).
La
redevance constitue à côté de la compensation, moyen
indirect (Paragraphe 2), le moyen direct (Paragraphe 1) du
désintéressement des créanciers de l'entreprise en
difficulté mise en location-gérance.
Paragraphe 1- Le
désintéressement des créanciers envisagé sous
l'angle du paiement de la redevance
L'omission de mentionner
la redevance que doit verser le locataire-gérant dans la
définition de la location-gérance par le législateur OHADA
pouvait conduire à assimiler la convention de location-gérance
aux contrats de bienfaisance ou aux contrats « de
l'ami »157(*). Loin s'en faut surtout lorsqu'il s'agit de la
location-gérance de l'entreprise en difficulté. Le
caractère onéreux de la convention ne fait l'objet d'aucun
doute : la redevance que doit payer le gérant libre est le prix de
l'exploitation qu'il fait du fonds de commerce. Ainsi, elle doit revêtir
un certain nombre de caractères (A) et justifier d'un
prix amiablement fixé par les parties (B).
A- Les caractères de la
redevance
Prix de la jouissance que
reçoit le locataire-gérant, la redevance est le droit sur lequel
compte le loueur, syndic, pour apurer le passif et sauvegarder l'entreprise. De
ce fait, la redevance doit être d'une part, réelle et
sérieuse (1) et d'autre part, déterminée,
suffisante et non déterminable (2).
1- Une redevance
réelle et sérieuse
La redevance est la
contrepartie monétaire, c'est-à-dire la somme d'argent que le
locataire-gérant s'oblige à verser au loueur en contrepartie de
l'exploitation qu'il en fait du fonds. Il est de règle qu'elle doit
être non seulement réelle mais aussi sérieuse pour
permettre l'apurement du passif de l'entreprise en cessation des paiements.
Ce double caractère
tient à la nature même de la location-gérance : la
location-gérance est un contrat à titre onéreux. L'on
comprend aisément pourquoi les auteurs de l'Acte uniforme portant
organisation des procédures collectives d'apurement du passif n'aient
pas cru devoir le rappeler de façon expresse. Au surplus, il est
difficile d'imaginer que dans une location-gérance de l'entreprise en
redressement, les parties puissent convenir d'une redevance fictive ou
dérisoire alors que la matière est gouvernée par la
recherche des moyens de désintéressement des créanciers et
la sauvegarde de l'entreprise. La redevance dérisoire ou vile
équivaut à une absence de redevance. Elle doit être non
seulement réelle et sérieuse, mais aussi déterminée
pour être payable au terme convenu.
2- Une redevance
déterminée et non déterminable
Le contrat de
location-gérance ne peut être valablement conclu sans que le prix
ait été fixé dans le contrat. De plus, la juridiction
compétente n'autorisera la mise en location-gérance de
l'entreprise en redressement que si elle estime suffisantes les garanties
offertes par le locataire-gérant158(*), sans doute en matière de préservation
de la consistance de l'entreprise et de paiement de la redevance. Celle-ci doit
être déterminée et non déterminable afin de
permettre l'apurement du passif de l'entreprise en difficulté.
En l'absence de la
garantie du paiement d'une redevance déterminée et suffisante, la
juridiction compétente pourrait ne pas autoriser la conclusion d'un
contrat de location-gérance même lorsque la disparition ou la
cessation d'activité, même provisoire, de l'entreprise est de
nature à compromettre son redressement ou à causer un trouble
grave à l'économie locale, nationale ou régionale dans la
production et la distribution de biens et services. La solution peut surprendre
à priori. Elle est cependant logique en ce que la conclusion d'une
convention de location-gérance sans détermination de loyer ou
avec un loyer fictif, voire dérisoire, mettrait à mal le
redressement recherché de l'entreprise en cause.
Ce fut le cas dans un arrêt de la Cour de Cassation
française où, a été qualifié
d'irrégulier et inopportun, un contrat de location-gérance conclu
au profit de l'un des créanciers ; de même que la
gérance exercée par une société d'exploitation
à constituer. Dans ce cas, le créancier reprenait le stock
à un prix non précisé et moyennant des paiements
échelonnés devant être effectués à des dates
non indiquées. La Cour a estimé que le manque de précision
du prix et des dates de paiement ne permettait pas de déterminer quel
serait le véritable preneur et si celui-ci offrirait les garanties et
l'indépendance suffisantes à l'égard du
débiteur159(*).
Le montant de la redevance doit donc être déterminé et
fixé de commun accord par les parties.
B- La fixation et la
révision du montant de la redevance
En l'absence de
précision sur les critères de fixation du loyer de la
location-gérance tant par le droit commercial général que
par le droit des procédures collectives OHADA, nous nous
référerons aux critères prévus en matière de
bail commercial160(*) et
de la vente commerciale161(*). Après avoir étudié les
règles de fixation du montant de la redevance (1), il conviendra de
résoudre la question de sa révision (2).
1- La fixation du montant
de la redevance par les parties
Le montant de la redevance
doit être négocié par les parties en toute liberté
au moment de la conclusion du contrat (a). Toutefois, en cas de
désaccord, elles peuvent faire recours à un tiers (b).
a- La libre
négociation du montant de la redevance par les parties
La redevance est librement
calculée par les parties. Elle est généralement fixe, mais
elle peut également être proportionnelle au chiffre d'affaires et
au bénéfice réalisé. Dans ce cas, le mode de calcul
de la redevance et le contrôle du chiffre d'affaires ou des
bénéfices devront être définis avec le plus grand
soin.
La référence
au chiffre d'affaires consiste par exemple à dégager le chiffre
d'affaires annuel moyen sur la base des trois dernières années
d'exploitation de l'entreprise lorsqu'elle était in bonis et à
lui appliquer un pourcentage variable en fonction de la nature du commerce
considéré162(*).
La référence
au bénéfice quant à elle consiste, par exemple, à
considérer le bénéfice annuel moyen tel qu'il
résulte des bénéfices comptabilisés dans les trois
dernières années. Á partir de ces données, les
parties peuvent librement fixer le montant de la redevance que le
locataire-gérant devra verser. Au cas échéant, l'expertise
d'un tiers peut être requise.
b- Le recours à un
tiers
Tout comme en
matière de vente commerciale, les parties peuvent décider de
laisser la fixation du loyer à l'arbitrage d'un tiers163(*). Il peut s'agir soit d'un
groupement professionnel164(*), soit d'un expert désigné par le
Juge-commissaire ou par la juridiction compétente ayant autorisé,
sur proposition de celui-ci, la conclusion du contrat de
location-gérance.
Quoi qu'il en soit,
dès lors que le montant de la redevance est déterminé, il
est réglé soit mensuellement, soit trimestriellement entre les
mains du syndic ou directement dans le compte de la procédure ouvert
à cet effet. Le syndic est chargé de veiller au respect des
engagements du locataire-gérant et de rendre compte au Juge-commissaire
de l'exécution de ses obligations par le locataire-gérant au
moins tous les trois mois, en précisant le montant des sommes
reçues et déposées au compte de la procédure
collective165(*).
Il est à noter
qu'en sus de la redevance, lorsque le fonds est exploité dans les locaux
qui n'appartiennent pas au débiteur bailleur, le locataire-gérant
paiera pour le compte de celui-ci le montant du loyer en principal, taxes et
prestations, dû au propriétaire des lieux.
Pourra ainsi être
fixé et payé le loyer de la location-gérance de
l'entreprise en redressement judiciaire.
Quid d'une éventuelle révision de
ladite redevance ?
2- La question de la
révision de la redevance
Il se pose la question de savoir si après la signature
du contrat, l'une des parties peut demander la révision du loyer. La
mise en location-gérance ayant pour objectif le sauvetage et l'apurement
du passif de l'entreprise en difficulté, l'on se demande qui des parties
au contrat est fondé à demander la révision de la
redevance ? Le locataire-gérant pour la réduction ou le
loueur pour la hausse ? Le droit OHADA est muet sur la question.
Comme tout loyer, il est sans doute possible de
réviser le prix de la redevance de l'entreprise en difficulté
mise en location-gérance. Les parties peuvent prévoir dans le
contrat que le prix sera modifié en cas de variation de
l'indice166(*) qu'elles
auront préalablement choisi. L'indice à choisir doit
nécessairement être en relation directe avec l'activité
exercée dans le fonds. On prendra, par exemple, en considération
le dernier indice connu à la veille de chaque trimestre. Á ce
moment, un compte sera dressé par le syndic : si ce compte fait
apparaître un solde en faveur de ce dernier, la somme correspondante sera
immédiatement exigible ; si le solde est en faveur du
locataire-gérant, il s'imputera sur la mensualité suivante.
Cette analyse atténue l'idée selon laquelle,
obnubilé par la protection de l'entreprise et des créanciers, le
législateur OHADA aurait, semble-t-il, sacrifié le
locataire-gérant qui participe pourtant à l'opération de
sauvetage de l'entreprise167(*).
Tout au long de son exploitation, le gérant libre se
doit de payer régulièrement la redevance pour éviter une
éventuelle condamnation au paiement des intérêts
moratoires. En effet, les parties peuvent prévoir dans le contrat qu'en
cas de non-paiement à une ou plusieurs échéances, les
sommes produiront de plein droit intérêt au taux légal,
à compter du jour où elles seront dues, sans qu'il soit besoin
d'une mise en demeure168(*).
Le paiement de la redevance constitue le mode normal
d'extinction de son obligation par le gérant libre. Toutefois l'on se
demande s'il peut bénéficier d'autres modes d'extinction de
l'obligation à l'instar de la compensation.
Paragraphe 2- Le
désintéressement des créanciers opéré
par le biais de la compensation
On entend par
compensation, un mécanisme d'extinction simultanée de deux
obligations, de même nature, existant entre deux personnes
simultanément créancière et débitrice l'une de
l'autre. Outre l'extinction des obligations réciproques, la compensation
a une véritable fonction de garantie permettant à chaque partie
d'opposer à l'autre l'exception de compensation afin de
s'exonérer de son paiement.
Traditionnellement, pour que la compensation puisse jouer, il
n'est pas nécessaire que les deux dettes soient connexes
c'est-à-dire qu'elles soient nées d'un même rapport de
droit. Même si elles ont des causes différentes, elles peuvent se
compenser. Ce principe de droit commun des obligations trouve-t-il application
dans les procédures collectives ? La réponse est
négative. Que ce soit en période suspecte169(*) ou après le jugement
d'ouverture, la compensation n'est possible qu'en ce qui concerne les dettes
ayant un lien de connexité170(*). Les relations entre locataire-gérant et débiteur
bailleur n'échappent nullement à cette règle dans le
cadre des procédures collectives d'apurement du passif. Aussi
convient-il d'envisager ses diverses modalités (A) et ses conditions de
mise en oeuvre (B) ?
A- Les modalités de la
compensation
Pour être compensables, les dettes
réciproques existant entre les deux parties doivent être connexes.
La question de la connexité évoque une idée
d'interdépendance, de lien étroit qui unit les deux obligations
réciproques existant entre deux personnes. Elle peut s'opérer de
deux manières : d'abord sur la base d'une connexité
naturelle, celle qui naît de la commune origine des obligations en
présence, puis sur la base d'une connexité conventionnelle, celle
qui résulte de leur commune affectation par la volonté des
parties.
La connexité naturelle a toujours trouvé
son terrain d'élection dans les contrats synallagmatiques171(*). Mais, au fil des temps,
elle s'est beaucoup élargie. Elle a été admise d'abord en
présence de dettes provenant de la bonne exécution du
contrat172(*). Puis elle
a été reconnue en présence de dettes provenant tant de la
bonne que de la mauvaise exécution du contrat. Cette solution s'applique
aux dettes de restitution et de dommages intérêts qui naissent
entre les parties de la résolution ou de la résiliation de
l'accord contractuel. C'est une hypothèse de ce genre que vise l'article
109, al. 2, in fine, de l'AUPCAP.
La jurisprudence ne s'en est pas tenue là. Elle
a déclaré connexes et donc compensables deux obligations de
nature différente : la première née d'un contrat, la
seconde née d'un délit commis dans l'exécution de ce
contrat173(*). Et pour
couronner le tout, la Cour de cassation française n'a pas
hésité à accepter la connexité entre deux dettes
apparues respectivement avant et après le jugement d'ouverture de la
procédure collective174(*). En plus de la connexité naturelle au premier
degré, la jurisprudence a également fait place à une
connexité naturelle au second degré. Elle a admis à se
compenser des dettes procédant de contrats distincts mais
économiquement liés175(*). La connexité de la dette entre le
locataire-gérant et le débiteur bailleur se situerait dans ce
sillage.
En effet, tant l'Acte uniforme OHADA relatif au droit
commercial général que celui portant sur les procédures
collectives sont muets en ce qui concerne les conditions à remplir pour
prendre en location-gérance une entreprise. La voie est ainsi ouverte
à toute personne physique ou morale, même aux créanciers
dans la masse, à condition qu'elle ne soit ni entreprenante, ni
frappée d'aucune interdiction, incapacité ou
incompatibilité d'exercer le commerce176(*). Ceci dit, tant un tiers à la
procédure collective qu'un créancier dans la masse peut prendre
en location-gérance l'entreprise en difficulté. Lorsque le locataire-gérant est alors l'un des
créanciers dans la masse, ou l'est devenu par la force des
choses177(*), n'est-il
pas possible pour lui d'invoquer la compensation pour éteindre son
obligation envers le débiteur bailleur ? Rien ne l'interdit surtout
lorsque les contrats en présence sont réunis, dans la commune
intention des parties, en une opération économique globale
malgré la pluralité d'actes instrumentaires178(*).
La compensation entre le locataire-gérant et le
débiteur bailleur implique non seulement que les dettes soient connexes
mais qu'elles soient aussi compensables.
B- Les conditions de la
compensation
Pour être
compensables, les dettes en présence doivent satisfaire en principe aux
conditions qu'énumèrent les articles 1289 et 1291 du Code Civil.
Elles doivent être fongibles, réciproques, liquides et
exigibles.
La fongibilité ne soulève aucune
difficulté. Il est admis de nos jours que des dettes libellés en
monnaies différentes peuvent se compenser179(*).
La réciprocité suppose que ces dettes
existent en sens inverse entre le locataire-gérant et le débiteur
bailleur, chacune de ces personnes étant à la fois
créancière et débitrice. Le locataire-gérant est
à la fois créancier dans la masse et débiteur de la
redevance. Le bailleur, débiteur en difficulté et
créancier assisté de la redevance.
Quant à l'exigibilité, il faudra
attendre l'échéance des différentes dettes en
présence. S'agissant du locataire-gérant, créancier dans
la masse, il faut noter que sa créance, bien qu'étant
antérieure au jugement d'ouverture, ne deviendra exigible qu'à la
déchéance du terme prévu car la décision
d'ouverture ne rend exigibles les dettes non échues qu'en cas de
liquidation de biens180(*). Si une telle exigence avait été
étendue au redressement judiciaire, elle diminuerait les chances de
sauvetage de l'entreprise en difficulté.
En ce qui concerne la liquidité, on dit d'une
créance qu'elle est liquide lorsque son montant est
précisément connu, déterminé dans sa
quotité, en d'autres termes, chiffré181(*). Elle est affectée,
tout comme l'exigibilité, par les dispositions de l'Acte uniforme sur
les procédures collectives relatives aux effets de la décision
d'ouverture à l'égard des créanciers. S'il est vrai que
les dettes non échues du débiteur ne sont pas exigibles en cas de
redressement judiciaire, elles sont néanmoins chiffrées ou
déterminées182(*). Ainsi, dès l'ouverture de la
procédure collective, le montant de la créance du
locataire-gérant est connu. Celle du débiteur bailleur l'est
également car il s'agit de la redevance fixée dans le contrat.
Dès lors que les dettes en présence
seront connexes et compensables, le locataire-gérant, créancier
dans la masse pourra bénéficier de la compensation sans qu'il y
ait atteinte au principe de l'égalité qui demeure vivace dans les
procédures collectives. Le professeur MESTRE ne résumait-il pas
à ce titre parfaitement la situation en affirmant :
« Le plus sûr moyen d'être payé, lorsqu'on est
créancier d'un insolvable, reste bien d'être également son
débiteur »183(*). En effet, comment pourrait-il comprendre d'avoir
toujours à payer ce qu'il doit, sans jamais être admis à se
soustraire à « la loi du
malheur » ?
Section II : L'ordre de désintéressement
des créanciers de l'entreprise en difficulté mise en
location-gérance
Le passif né régulièrement après
l'ouverture de la procédure de poursuite d'activité fait des
créanciers nouveaux des créanciers de la masse ou contre la masse
échappant à la procédure collective. Malheureusement,
aucun classement n'a été établi pour la mise en oeuvre du
désintéressement de ces derniers (paragraphe 1).
Inévitablement, le problème de la détermination du droit
applicable se pose (paragraphe 2).
Paragraphe 1- L'absence
d'ordre de paiement dans la procédure de redressement judiciaire
De l'intitulé de l'Acte uniforme OHADA relatif aux
procédures collectives et de ses articles 1er et 2, il ressort
explicitement que toutes les procédures instituées visent
l'apurement du passif. Il en est principalement des procédures
collectives ouvertes après cessation des paiements. La distinction entre
les procédures est faite selon la manière dont elles permettent
de réaliser l'apurement du passif. Celui-ci peut s'opérer soit
à travers le redressement judiciaire au moyen du concordat soit par le
biais de la liquidation des biens.
S'il est vrai qu'en cas d'exécution des offres
concordataires l'ordre à suivre est celui prévu par le concordat,
tel n'est pas le cas lorsqu'il s'agit de la répartition des fonds issus
de la location-gérance de l'entreprise en difficulté conclue
indépendamment de la volonté du débiteur failli.
Malheureusement, contrairement à la liquidation des
biens où le législateur a expressément prévu un
ordre de paiement, rien n'a été prévu en ce qui concerne
le redressement judiciaire. Il s'agit plus précisément de la
répartition entre les créanciers, des deniers issus de la
location-gérance faite en application des articles 115 et suivants de
l'AUPCAP. S'agit-il d'un oubli ou d'une omission volontaire ? Le
législateur africain a-t-il voulu éviter de créer deux
ordres de paiement dans les procédures collectives en sacrifiant
les impératifs de célérité et de
sécurité juridique qui gouvernent le droit des procédures
collectives184(*)? Si
tel est le cas, l'ordre de répartition établi dans le cadre de
l'union est-il susceptible de s'appliquer en cas de location-gérance de
l'entreprise en difficulté?
Dans les procédures collectives de liquidation des
biens, Le paiement des créanciers se fait selon l'ordre fixé par
les articles 166 et 167 et de la manière suivante :
a) les deniers provenant de la réalisation des
immeubles sont distribués :
1° aux créanciers des frais de justice
engagés pour parvenir à la réalisation du bien vendu et
à la distribution elle-même du prix ;
2° aux créanciers de salaires super
privilégiés en proportion de la valeur de l'immeuble par rapport
à l'ensemble de l'actif ;
3° aux créanciers hypothécaires et
séparatistes inscrits dans le délai légal, chacun selon le
rang de son inscription au livre foncier ;
4° aux créanciers de la masse tels que
définis par l'article 117;
5° aux créanciers munis d'un privilège
général selon l'ordre établi par l'Acte uniforme portant
organisation des sûretés;
6° aux créanciers chirographaires.
En cas d'insuffisance des deniers pour
désintéresser totalement les créanciers de l'une des
catégories désignées aux 1°, 2°, 4°,
5° et 6° du présent article venant à rang égal,
ceux-ci concourent aux répartitions dans la proportion de leurs
créances totales, au marc le franc185(*).
b) les deniers provenant de la réalisation des meubles
sont distribués :
1° aux créanciers des frais de justice
engagés pour parvenir à la réalisation du bien vendu et
à la distribution elle-même du prix ;
2° aux créanciers de frais engagés pour la
conservation du bien du débiteur dans l'intérêt du
créancier dont les titres sont antérieurs en date;
3° aux créanciers de salaires super
privilégiés en proportion de la valeur du meuble par rapport
à l'ensemble de l'actif ;
4° aux créanciers garantis par un gage selon la
date de constitution du gage ;
5° aux créanciers garantis par un nantissement ou
par un privilège soumis à publicité, chacun suivant le
rang de son inscription au registre du commerce et du crédit
mobilier;
6° aux créanciers munis d'un privilège
mobilier spécial, chacun sur le meuble supportant le privilège
;
7° aux créanciers de la masse tels que
définis par l'article 117;
8° aux créanciers munis d'un privilège
général selon l'ordre établi par l'Acte uniforme portant
organisation des sûretés;
9° aux créanciers chirographaires.
En cas d'insuffisance des deniers pour
désintéresser totalement les créanciers de l'une des
catégories désignées aux 1°, 2°, 3°,
6°, 7° et 8° du présent article venant à rang
égal, ceux-ci concourent aux répartitions dans la proportion de
leurs créances totales, au marc le franc186(*).
Cet ordre de paiement des créanciers qui
présente tout son intérêt dans l'union ou dans la
clôture pour insuffisance d'actif aurait pu nous convaincre. Mais, il ne
faut pas perdre de vue qu'il diffère selon que les deniers proviennent
de la réalisation des immeubles ou des meubles. De plus, il prend en
compte tant les créanciers dans la masse que les créanciers
contre la masse. Or, ces derniers n'existent pas lorsque la continuation de
l'activité est le fait d'un locataire-gérant. Ce qui ne
s'accommode pas avec le redressement judiciaire car ici, il n'y a pas de
réalisation d'un bien quelconque.
La réalisation est-elle synonyme de la
location-gérance ? Loin s'en faut. La réalisation est un
acte d'aliénation alors que la location-gérance s'assimile
à un acte d'administration. Il va donc de soi que cet ordre ne
résout pas le problème. Il vaut mieux déterminer un ordre
de paiement des créanciers de l'entreprise en difficulté mise en
location-gérance.
Paragraphe 2- La
détermination d'un ordre de paiement des créanciers de
l'entreprise en difficulté mise en location-gérance
Comme cela a été constaté, l'ordre
prévu par le droit des procédures collectives OHADA ne permet pas
de désintéresser les ayants droit des fonds de l'entreprise en
difficulté donnée en location-gérance. Demeure toujours
posée la question d'un ordre de répartition des deniers issus de
la location-gérance de l'entreprise en difficulté faite
indépendamment de la volonté du débiteur failli. Si la
question de la détermination d'un tel ordre présente tout son
intérêt (A), il n'en demeure pas moins qu'elle
comporte des limites (B).
A- L'intérêt d'un
ordre de répartition entre les créanciers des deniers issus de la
location-gérance de l'entreprise en difficulté
La raison d'être de la mise en location-gérance
de l'entreprise en cessation des paiements est de sauvegarder celle-ci et de
désintéresser les créanciers. Après l'exploitation
par le locataire-gérant, il faut logiquement procéder à la
distribution des deniers qui en sont issus. Malheureusement, l'on se rend
compte que les rédacteurs de l'Acte uniforme OHADA relatif aux
procédures collectives d'apurement du passif n'ont prévu aucun
ordre de répartition de ces fonds entre leurs ayants droit. Ils se sont
seulement contentés d'établir un ordre de paiement des
créanciers du fait de l'union187(*) ou de la clôture pour insuffisance
d'actif188(*).
S'il est vrai que le législateur OHADA des
procédures collectives a opté pour une solution proche de celle
préconisée en France par le Professeur JEANTIN, il est à
noter qu'il l'a fait sous l'importante réserve que cet auteur
distinguait entre deux situations, l'entreprise en redressement judiciaire et
l'entreprise en liquidation des biens189(*). En cas de redressement judiciaire, les
créances de l'article 40190(*) priment toutes les créances, même
celles assorties d'un droit de rétention ; en cas de liquidation
des biens, les créanciers de l'article 40 sont primés par les
sûretés mobilières assorties d'un droit de rétention
ou constituées en application de la loi du 18 janvier 1951 relative au
nantissement de l'outillage et du matériel d'équipement191(*).
Force est de constater que cet auteur essayait de
résoudre le problème du classement des créanciers contre
la masse. Or cette catégorie de créanciers n'est pas
concernée par les fonds issus de la location-gérance192(*). En faisant la
synthèse des règles énoncées à propos de
chacune des différentes catégories de créanciers, il
s'ensuit que les deniers issus de la location-gérance de l'entreprise en
difficulté pourront être distribués de la manière
suivante :
1° le super privilège des salaires prime toutes
autres créances privilégiées (article 96 de
l'AUPCAP) ; ce traitement de faveur s'articule autour de la jonction de
deux types d'enjeux : économiques tout d'abord, en ce sens qu'une
entreprise ne peut pas se redresser sans le concours ou le sacrifice de ses
salariés, et sociales ensuite, parce que la nécessité de
garantir le paiement de la fraction du salaire ayant un caractère
alimentaire n'est pas discutable. De plus, on aurait tort de ne pas choyer les
salariés en ce que la réalité nous montre qu'ils ont vite
fait de monter au créneau et d'immobiliser l'entreprise, ce qui ralentit
son fonctionnement et risque d'accélérer sa perte. Au contraire,
en les payant, on favorise le maintien de leur confiance dans la
société et donc, leur productivité.
2° les créanciers garantis par un gage avec ou
sans dépossession selon la date de constitution du gage en ce sens
qu'ils sont protégés par leurs sûretés parce
qu'elles leur confèrent soit un droit de préférence de
fait, soit un droit à l'attribution judiciaire en
propriété de l'objet du gage;
3° les créanciers garantis par un nantissement,
chacun suivant le rang de son inscription au RCCM (nantissement du fonds de
commerce, de compte bancaire, des droits d'associés, de comptes de
titres financiers, des droits de propriété intellectuelle)
parce que leurs sûretés leur
confèrent également un droit de préférence, un
droit de suite et même un droit à l'attribution judiciaire en
propriété de l'objet du gage ; de plus, ces biens sont
parfois essentiels ou indispensables à l'exploitation de
l'entreprise.
De manière classique, le syndic ne peut retirer au
profit de la masse, voire de l'entreprise, le bien objet du gage ou du
nantissement constitué sur un bien du débiteur qu'après
avoir au préalable remboursé la dette.
4° les créanciers hypothécaires et
séparatistes inscrits dans le délai légal, chacun selon le
rang de son inscription au livre foncier ;
5° les créanciers titulaires d'un privilège
général ;
6° le privilège des frais de justice viendrait en
sixième lieu, dans la mesure où ces frais ont été
utiles aux autres catégories de créanciers ;
7° les créanciers chirographaires.
Au sein de ces catégories, les créanciers
devront être traités de manière égale. Tous les
salariés bénéficient du paiement de la fraction de leur
salaire sans préférence. Deux créanciers détenteurs
d'une même sûreté devront être traités de la
même manière. L'égalité est d'autant plus
présente en ce qui concerne la dernière catégorie de
créanciers. Les créanciers chirographaires sont payés de
manière égale, dans la mesure où il reste quelque chose.
On dit qu'ils sont payés au « marc le franc ».
Tant en ce qui concerne les sûretés que les
procédures de liquidation des biens, le paiement au marc le franc est la
modalité de désintéressement indiquée au
détriment du paiement au prorata. Il va de soi qu'il est
préférable de faire recours à cette modalité de
paiement pour désintéresser les ayants droit des deniers issus de
la location-gérance de l'entreprise en difficulté. C'est dire
qu'en cas d'insuffisance de deniers pour désintéresser une
catégorie de créanciers, ceux-ci concourront à la
distribution dans la proportion de leurs créances totales, au marc le
franc193(*).
Le regroupement des créanciers trouve son fondement
dans le principe d'égalité. En effet, tous s'accordent à
dire que les créanciers ne peuvent être traités de
manière similaire dès lors qu'ils se trouvent dans deux
situations juridiques différentes. Un créancier détenteur
de sûretés se doit d'être juridiquement plus
protégé qu'un créancier qui en est dépourvu. On
valorise sa vigilance, sa précaution, sa diligence.
L'égalité entre les créanciers présente un
intérêt non négligeable. En effet, il garantit aux
partenaires économiques du débiteur un minimum de
sécurité. Si les créanciers étaient clairement
traités de manière inégale, les catégories
assurées de ne pas être payées ne se risqueraient pas
à financer le débiteur. C'est alors toute la procédure
collective qui perdrait sa raison d'être. De ce fait, l'ordre ainsi
pensé est-il en voie d'assurer et le redressement de l'entreprise et
l'apurement de son passif ?
B- Les limites à l'ordre
de paiement
L'une des réserves tient à l'existence des
sommes suffisantes pour désintéresser tous les ayants droits.
Dans ce cas, il n'est plus opportun de déterminer un ordre
quelconque.
La place faite aux créanciers des frais de justice
tient de ce que ce privilège est souvent accordé aux
créanciers, dont notamment le syndic, qui ont engagé des frais
pour parvenir à la réalisation et à la distribution
elle-même du prix. Or dans le cadre de la mise en location-gérance
de l'entreprise en difficulté, il n'est pas sûr que la signature
dudit contrat ait nécessité de frais énormes de la part de
la justice. Si tel pouvait être le cas, la priorité devrait
être accordée aux créanciers dont le gage porte sur des
biens indispensables à la poursuite de l'activité de
l'entreprise.
Il est de règle que le jugement d'ouverture entraine
toujours une modification des droits individuels des créanciers. Ils
sont désormais soumis à une discipline collective de masse qui
rompt avec l'anarchie des recours individuels. Ils sont soumis à un
traitement égalitaire : la suspension des poursuites individuelles,
l'exigibilité des dettes non échues du débiteur,
l'interruption du cours des intérêts et enfin l'inscription de
l'hypothèque de la masse. Ces différentes exigences
empêchent les créanciers de conforter leurs droits et, par
là même, font obstacle à une modification du passif
antérieur qui est figé au jour du jugement d'ouverture. Tel est
l'expression de l'égalité entre les créanciers du
débiteur défaillant dès l'ouverture de la procédure
collective. le désintéressement des créanciers de
l'entreprise en difficulté mise en location-gérance ne devrait-il
pas aussi se faire de manière égalitaire ?
En restant figé sur un ordre quelconque, la
procédure collective deviendrait inutile puisqu'une part importante des
fonds serait affectée par avance au paiement d'une catégorie
donnée de créanciers. On ne peut dès lors s'empêcher
de critiquer le choix de favoriser certains créanciers. On ne peut pas
reconnaître une priorité absolue à toute créance de
salaire. En effet, les procédures collectives impliquent, par
hypothèse, une situation de pénurie. Tous les créanciers
ne pourront pas être payés immédiatement et
intégralement. Or, favoriser à tout prix tous les salariés
semble être injuste. Il s'avère que sacrifier les fournisseurs au
profit des salariés revient à sacrifier indirectement les
salariés de ces fournisseurs. De même, certains créanciers
de l'entreprise en redressement sont eux aussi des salariés dont les
économies risquent d'être englouties. Tous ces conflits
d'intérêts ont conduit la jurisprudence à s'interroger sur
la notion même de salarié dans la procédure
collective194(*).
Si le principe d'égalité semble exister, ce
n'est que dans une proportion moindre. Non seulement son application est quasi
virtuelle, en ce que beaucoup de créanciers ne seront jamais
payés, suite à l'absorption de la totalité de l'actif par
un nombre restreint de créanciers, mais on peut s'interroger au passage
quant à la cohérence du principe d'égalité. En
effet, dans le cas des créanciers gagistes, il ne s'applique même
plus au sein d'une catégorie, mais doit se subdiviser en sous
catégories ciblées. Le simple fait de parler de créanciers
« privilégiés » et « super
privilégiés » ne fait que renforcer cet aspect
inégalitaire de la procédure.
Quoi qu'il en soit, l'on pense que lorsque les fonds
recueillis au terme des deux premières années d'exploitation
seront insuffisants pour désintéresser tous les
créanciers, ceux-ci, toute catégorie confondue, devraient
concourir dans la distribution en proportion de leurs créances totales,
au marc le franc. Et ainsi de suite jusqu'à leur total
désintéressement car pourquoi payer les uns après deux ans
et les autres après quatre voir six ans en cas de renouvellement du
contrat de location-gérance.
En somme, lorsque le locataire-gérant aura
convenablement assuré ses engagements (gérer l'entreprise en bon
père de famille et payer régulièrement la redevance), le
passif de l'entreprise sera totalement apuré sinon en grande partie.
Toutefois, il peut arriver que les choses ne se passent pas comme on l'a
souhaité du fait non seulement du locataire-gérant mais aussi et
surtout des organes de la procédure. Dans ce cas, les créanciers
de l'entreprise en difficulté mise en location-gérance
doivent-ils rester indifférents?
CHAPITRE II : LES RECOURS DES
CRÉANCIERS DE
L'ENTREPRISE EN DIFFICULTÉ MISE EN
LOCATION-GÉRANCE
Pour se prémunir contre la défaillance du
gérant et par conséquent « éviter que la
location-gérance ne soit l'occasion pour des repreneurs
malhonnêtes de dépouiller l'entreprise en difficulté de ses
éléments productifs »195(*), les auteurs de l'Acte
uniforme relatif aux procédures collectives d'apurement du passif l'ont
subordonné à un régime restrictif. Le dispositif le plus
protecteur, parmi tant d'autres, est l'article 115, al. 3, de l'AUPCAP aux
termes duquel, la juridiction compétente doit refuser son autorisation
si elle n'estime pas suffisantes les garanties offertes par le
locataire-gérant ou si celui-ci ne présente pas une
indépendance suffisante à l'égard du débiteur.
Ces garanties peuvent être réelles ou
personnelles196(*).
Parmi les garanties personnelles, figure en bonne place la caution. Elle
constitue avec le gérant libre, les débiteurs de la redevance
contre lesquels les créanciers doivent faire recours en cas
d'insolvabilité de celui-ci (Section I).
Par ailleurs, il ressort des dispositions de l'article 116 de
l'AUPCAP que le contrôleur, le syndic, le représentant du
Ministère Public et le Juge-commissaire disposent d'énormes
pouvoirs lorsque l'entreprise en difficulté est mise en
location-gérance. Or, qui dit pouvoir, dit responsabilité car
comme le faisait comprendre le professeur Maurice KAMTO, « Il n'y
a pas de pouvoir sans responsabilité : ce sont deux faces d'une
même médaille »197(*). C'est dire qu'en cas de défaillance, ces
organes peuvent, tout comme le gérant libre, voir leur
responsabilité engagée (Section II).
Section I : Le recours contre les débiteurs de la
redevance
En cas de défaillance de gestion et par
conséquent de l'insolvabilité prouvée du
locataire-gérant198(*), les créanciers, à travers le syndic,
exerceront leur recours contre d'une part la caution s'il en a eu
(Paragraphe I), et d'autre part contre le
locataire-gérant (Paragraphe II).
Paragraphe 2- Le recours
contre la caution
Pour garantir l'exécution de ses obligations et la
réparation des dégâts qu'il pourrait causer pendant la
location-gérance, le bailleur exige le plus souvent du gérant
libre le versement d'une « caution »199(*). Les mots caution ou
cautionnement sont souvent utilisés dans le langage courant pour
désigner un dépôt de garantie, c'est-à-dire une
certaine somme qu'une personne dépose entre les mains de son contractant
en garantie d'une éventuelle responsabilité200(*). Juridiquement, le
mécanisme constitue un dispositif sécuritaire pour le
débiteur bailleur de l'entreprise en difficulté mise en location
en ce sens qu'il permet de récupérer les redevances non
payées par le locataire-gérant insolvable (A) même au cas
où la caution viendrait à décéder (B).
A- Le paiement de la dette par
la caution
La portée de l'obligation au paiement de la dette du
locataire-gérant par la caution diffère selon que le
cautionnement est solidaire (1) ou simple (2).
1- Le cautionnement
solidaire
L'une des caractéristiques fondamentales du
cautionnement réside dans le principe de la solidarité
consacré par le législateur OHADA pour renforcer la garantie
représentée par le cautionnement. C'est ce qui ressort de
l'article 10 de l'Acte uniforme OHADA sur les sûretés qui dispose
que la caution est réputée solidaire, sauf stipulation ou
disposition contraire expresse du contrat ou de la loi201(*). La solidarité, loin
de changer la nature du cautionnement, modifie seulement certains de ses
effets202(*).
Schématiquement, la caution solidaire est celle qui renonce à
exiger que le débiteur principal soit poursuivi avant elle et, en cas de
pluralité de cautions, à ne pas imposer au créancier de
diviser ses poursuites.
Les articles 15 de l'ancien AUS et 26 du nouvel AUS
explicitent les conséquences de ce principe de la solidarité
lorsqu'ils déclarent que « la caution solidaire est tenue
de l'exécution de l'obligation principale dans les mêmes
conditions qu'un débiteur solidaire ». En d'autres
termes, ce principe de la solidarité permet au débiteur bailleur,
assisté du syndic, de poursuivre, en cas de besoin, la caution en
paiement de la totalité de la dette du locataire-gérant. La
solidarité permet de ce fait au débiteur bailleur
d'accroître l'efficacité de la garantie car, en cas de non
paiement, celui-ci n'aura ni à multiplier les poursuites, ni à
supporter l'insolvabilité de l'un de ses débiteurs203(*). La caution poursuivie est
tenue d'assurer le paiement intégral de la dette aussi bien le principal
que les accessoires. Elle est tenue de payer une somme inférieure ou
égale au montant de la dette due par le locataire-gérant mais
dans les termes de son engagement initial204(*), quitte à elle de se retourner contre le
locataire-gérant ou les autres cautions pour ce qu'elle a
payée205(*) si
elle ne l'avait pas fait avant206(*).
Qu'en est-il du cautionnement simple ?
2- Le cautionnement
simple
Lorsque la caution est simple, le garant est un
débiteur subsidiaire. Á ce titre, il bénéficie de
deux prérogatives : le bénéfice de discussion et le
bénéfice de division.
Le bénéfice de division est la
prérogative laissée, en cas de pluralité de cautions,
à la caution poursuivie d'exiger du créancier de diviser la dette
à payer entre les différentes cautions. C'est ce qui ressort de
l'alinéa 1er des articles 17 de l'AUS et 28 du nouvel AUS.
Cet alinéa dispose que « S'il existe plusieurs cautions
pour un même débiteur et une même dette, sauf stipulation de
solidarité entre elles ou renonciation par elles à ce
bénéfice, chacune d'elles peut, sur premières poursuites
du créancier, demander la division de la dette entre les cautions
solvables au jour où l'exception est
invoquée ».
Le bénéfice de discussion quant à lui est
la latitude qui est laissée à la caution d'exiger, en cas de
poursuite, que le débiteur bailleur épuise en priorité les
moyens de droit dont elle dispose à l'égard du
locataire-gérant. C'est l'une des conséquences du
caractère accessoire et subsidiaire de l'engagement de la
caution207(*). Á
cet effet, l'alinéa 2 de l'article 16 de l'AUS et de l'article 27 du
nouvel AUS dispose que : « La caution simple, à
moins qu'elle ait expressément renoncé à ce
bénéfice, peut, sur premières poursuites dirigées
contre elle, exiger la discussion du débiteur principal, en indiquant
les biens de ce dernier susceptibles d'être saisis
immédiatement... ». Dans ce cas, le débiteur
bailleur ne poursuivra la caution qu'en cas d'insuffisance d'actifs du
locataire-gérant préalablement poursuivi.
On le voit, qu'elle soit solidaire ou simple, la caution ne
sera tenue de payer la dette qu'en cas de non paiement par le
locataire-gérant. Mais, il se pose une question. Quel est le sort de
l'engagement pris par la caution au cas où elle viendrait à
décéder ?
B- Le sort de la redevance
garantie par la caution décédée
Le caractère personnel du cautionnement est sans doute
l'une des raisons majeures de son succès. En effet, par l'acte de
cautionnement, la caution qui s'engage personnellement à exécuter
l'obligation du débiteur, engage sa personnalité, ses deniers,
l'ensemble de ses biens en garantie de son engagement208(*).
Il est de principe bien établi que, le patrimoine du
de cujus passe à son héritier après sa mort. Il en
découle que la caution transmet à son héritier l'ensemble
de ses engagements209(*). C'est ce qui ressort de l'alinéa 4 des
articles 25 de l'AUS et 36 du nouvel AUS qui
dispose que: « Les engagements de la caution simple ou
solidaire passent à ses héritiers ... ».
C'est dire que si une personne se porte caution du locataire
gérant lors de la prise en location de l'entreprise en
difficulté, son engagement passera à ses héritiers s'il
venait à mourir. Il se pose alors la question de savoir si les
héritiers de celui-ci doivent garantir le paiement de toutes les dettes
du locataire-gérant couvertes par le cautionnement, y compris celles qui
n'auraient pris naissance qu'après le décès de la caution
comme les loyers à venir ? En d'autres termes, l'obligation
transmise a-t-elle pour seul objet les dettes déjà nées au
moment du décès ?
Pendant longtemps, la chambre commerciale de la Cour de
cassation française a estimé que l'obligation des
héritiers de la caution ne se limitait pas aux dettes existantes au jour
de son décès mais s'étendait également aux dettes
nées postérieurement210(*).
Plus tard, la même chambre commerciale a
opéré un revirement complet en posant dans un arrêt de
principe que les héritiers de la caution décédée
doivent garantir le paiement des dettes du débiteur principal qui
étaient déjà nées au moment du décès
mais, en revanche, n'ont pas à garantir le paiement de celles qui
seraient nées après le décès de la
caution211(*).
C'est cette dernière position qui a été
adoptée par les rédacteurs de l'Acte uniforme portant
organisation des sûretés. En effet, en précisant à
l'alinéa 4 de l'article 25 de l'AUS et de l'article 36 du nouvel AUS
que « Les engagements de la caution (...) passent à ses
héritiers uniquement pour les dettes nées antérieurement
au décès de la caution », le législateur
OHADA a voulu explicitement exclure de l'étendue des obligations des
héritiers de la caution les dettes futures et
indéterminées.
Certes, cette position du législateur peut être
préjudiciable aux droits des créanciers dans la masse mais, elle
semble tout de même logique dans la mesure où dans le cadre d'un
cautionnement successif et général, le décès de la
caution ne devrait avoir un effet extinctif qu'à l'égard des
dettes futures non encore nées212(*).
S'il est vrai que le paiement par la caution éteint
l'obligation à la dette du locataire-gérant, il n'en demeure pas
moins que la responsabilité de celui-ci puisse être
engagée.
Paragraphe 2 : Le
recours contre le locataire-gérant
Si en politique, « tous les moyens sont bons,
pourvu qu'ils soient efficaces »213(*), en économie,
même libérale, « tous les moyens ne sont plus bons
pour réaliser des bénéfices »214(*).
On ne doit pas nuire à autrui. Quiconque viole cette
règle de morale et de justice sociale élémentaire doit
réparer le dommage qu'il a causé : c'est la
responsabilité civile215(*). Celle-ci peut provenir d'un simple fait216(*). Elle peut aussi avoir pour
origine l'inexécution ou la mauvaise exécution d'un contrat. Il
en est ainsi lorsque le locataire-gérant diminue les garanties qu'il
avait données ou lorsqu'il compromet la valeur du fonds en portant
atteinte aux éléments pris en location-gérance ou
même lorsqu'il n'exécute pas ou plus son obligation au paiement de
la redevance. Dans ce cas, sa responsabilité tant contractuelle
(A) que pénale peut être engagée
(B).
A- La responsabilité
contractuelle du locataire-gérant
La responsabilité civile contractuelle sanctionne
l'inexécution totale, partielle ou tardive d'une obligation née
d'un contrat. En vertu du principe de non-cumul de deux responsabilités,
dès lors qu'il existe un contrat, la victime n'a pas d'autre choix que
de se placer sur le terrain de la responsabilité contractuelle.
Lorsque le locataire-gérant n'exécute pas les
obligations qu'il avait souscrites, le syndic, assistant le débiteur et
représentant les créanciers, déçu de n'avoir pas
obtenu la prestation escomptée, peut demander non seulement la
résiliation du contrat217(*), mais aussi la réparation du préjudice
subi par les créanciers et le débiteur.
La réclamation du syndic insatisfait soulève
une question de responsabilité. Le locataire-gérant
s'était bien engagé volontairement à exécuter le
contrat de location-gérance mais c'est contre son gré qu'il est
tenu de réparer le préjudice causé par
l'inexécution complète ou la mauvaise exécution du
contrat. De ce fait, dès que les conditions de sa responsabilité
seront réunies (1), le tribunal prononcera la sanction
(2).
1- Les conditions de la
responsabilité contractuelle du locataire-gérant
Elles ont trait au contrat, au préjudice et à
l'exigence de la mise en demeure.
Sur le premier point, pour que la responsabilité
contractuelle soit engagée, il faut qu'un contrat existe et qu'il ait
été inexécuté. Le contrat en cause ici est le
contrat de location-gérance. L'inexécution consiste au non
respect de ses engagements par le locataire-gérant, notamment la
diminution des garanties qu'il avait données.
Sur le deuxième point, si l'inexécution du
contrat est une condition nécessaire, elle est insuffisante pour engager
la responsabilité contractuelle. Il faut qu'elle ait causé un
préjudice. Il s'agit en l'occurrence de l'insatisfaction du syndic,
agissant en lieu et place du débiteur et des créanciers, qui n'a
pas reçu la prestation promise par le locataire-gérant. Ce
dommage peut être matériel (la non préservation de la
consistance de l'entreprise par le locataire-gérant qui a porté
atteinte à la valeur du fonds) ou moral (l'inquiétude
causée aux créanciers dans la masse par le non paiement de la
redevance).
Le lien de causalité entre la faute et le dommage est
nécessaire car le dommage doit être la suite immédiate et
directe de l'inexécution de la convention de location-gérance.
C'est ainsi que le préjudice doit être certain, direct et
personnel.
Sur le troisième point enfin, il faut noter que la mise
en demeure est l'acte par lequel le créancier demande à son
débiteur d'exécuter son obligation. Elle permet de constater
officiellement et formellement, le défaut d'exécution de son
obligation par le locataire-gérant. En même temps, le
débiteur bailleur, créancier, exprime par là sa
volonté d'obtenir l'exécution. Elle a pour effet de faire courir
les intérêts moratoires ou de retard.
La mise en demeure constitue en principe une condition
préalable au déclenchement de la responsabilité sauf en ce
qui concerne les obligations de faire ou de ne pas faire, et de donner qui ne
peuvent être exécutées que dans un certain temps que le
débiteur a laissé passer218(*). Celle du locataire-gérant peut
résulter d'un acte équivalent à une sommation et
spécialement une lettre missive, dès lors qu'il en ressort une
interpellation suffisante219(*), le dernier avertissement avant que ne soit mise en
oeuvre la sanction.
2- La sanction de la
responsabilité contractuelle du locataire-gérant
L'article 1142 du C. civ. dispose que :
« Toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout
en dommages et intérêts, en cas d'inexécution de la part du
débiteur ». De même, l'article 1153 al. 4 du
même code dispose que : « Le créancier auquel
son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un
préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et
intérêts distincts des intérêts moratoires de la
créance ». C'est dire que les dommages et
intérêts ont pour fonction, la réparation du dommage
résultant de l'inexécution du contrat. Ils peuvent être
compensatoires ou moratoires.
S'agissant des dommages intérêts compensatoires,
il faut noter qu'ils remplacent l'exécution directe et en
nature220(*). En
principe, les dommages intérêts correspondent au préjudice
intégral subi par le créancier, débiteur de l'entreprise
en difficulté assisté du syndic, à cause de
l'inexécution par le locataire-gérant de ses obligations. Ils
doivent assurer l'équivalent de l'exécution en nature qui aurait
dû être ponctuellement fournie à
l'échéance221(*). Ils sont calculés en fonction de la perte
subie par le créancier et du gain qu'il a manqué222(*) et ne concernent que le
préjudice direct223(*).
En ce qui concerne les dommages intérêts
moratoires, ils ont pour fonction de réparer le préjudice par le
retard apporté par le locataire-gérant à
l'exécution de son obligation. Une exécution en nature fournie
tardivement ne répare pas cette sorte de préjudice224(*). Les
dommages-intérêts moratoires obéissent aux mêmes
règles de calcul que les dommages intérêts
compensatoires225(*).
Lorsque l'obligation inexécutée a pour objet une
somme d'argent, le syndic doit saisir les biens du locataire-gérant pour
se payer des sommes qui lui sont dus226(*). Il est aidé dans la détection de ces
biens par la caution simple en application de l'article 27, al. 2, du nouvel
Acte uniforme sur les sûretés susvisé.
Le non respect de ses engagements par le
locataire-gérant n'entraîne pas seulement sa responsabilité
contractuelle. Il peut également donner lieu à des poursuites
pénales.
B- La responsabilité
pénale du locataire-gérant
L'indélicatesse des hommes d'affaires a suscité
la crainte, la méfiance et même la défiance d'autrui dans
les relations humaines. N'est-ce pas la confiance qui a poussé la
juridiction compétente à autoriser la mise en
location-gérance de l'entreprise en difficulté ? Si tel est
le cas, n'y a-t-il pas lieu de poursuivre pour abus de confiance le
locataire-gérant véreux qui, au lieu de préserver la
valeur du fonds, la compromet plutôt ? Le prononcé par le
juge de la sanction (2) nécessite la réunion
d'un certain nombre d'éléments (1).
1- Les
éléments constitutifs d'abus de confiance par le
locataire-gérant
Classé parmi les infractions contre la fortune
d'autrui, l'abus de confiance est puni par le Code pénal camerounais en
son article 318, alinéa 1(b). Selon cet article, l'abus de confiance est
le fait pour une personne de détourner, de détruire ou de
dissiper, au préjudice d'autrui, des fonds, des valeurs, ou un bien
quelconque qui lui ont été remis et qu'elle a accepté
à charge de les conserver, de les rendre, de les représenter ou
d'en faire un usage déterminé.
L'abus de confiance suppose deux sortes de conditions :
d'une part, des conditions préalables telles que la remise d'une chose
en vertu d'un contrat de détention précaire, en l'occurrence le
contrat de location-gérance ; d'autre part, des
éléments constitutifs tels le détournement ou la
dissipation volontaire et au préjudice du propriétaire.
L'élément matériel de cette infraction
consiste donc au détournement, en la dissipation ou la destruction d'un
bien remis volontairement à titre de conservation, de restitution, de
représentation ou d'usage déterminé.
L'élément moral quant à lui est
constitué par l'intention frauduleuse. Elle résulte de
l'alinéa 2 de l'article 74 du C.P. et de l'emploi des termes
« détournement, destruction et
dissipation ». Le détournement, la dissipation ou la
destruction doit être volontaire.
En effet, l'entreprise en difficulté a
été remise, en vertu du contrat de location-gérance, au
locataire-gérant pour exploitation à charge de restituer en
l'état au terme du contrat. Malheureusement, on se rend compte à
la fin du contrat et même bien avant que celui-ci en diminuant les
garanties qu'il a données, diminue la consistance de l'entreprise et par
conséquent, compromet la valeur du fonds. Il y a là commission
d'acte de dissipation ou de destruction car l'exploitation qu'il en a faite du
fonds n'a pas été conforme à ses engagements. Il y'a donc
consommation de l'infraction d'abus de confiance et le locataire-gérant
doit être puni.
2- La sanction du
locataire-gérant pour abus de confiance
En application du Code pénal camerounais, le
locataire-gérant coupable d'abus de confiance sera puni d'un
emprisonnement de 5 à 10 ans et d'une amende de 100 000 à
1 000 000 francs227(*).
Au final, l'abus de confiance semble être l'unique
infraction existante et susceptible d'être consommée par le
locataire-gérant. Or, il ressort des dispositions de l'article 116,
alinéa 1er, de l'AUPCAP, que le syndic veille au respect des
engagements du locataire-gérant. Il peut se faire communiquer, par
celui-ci, tous les documents et informations utiles à sa mission. Le
syndic peut apparaître aux yeux du locataire-gérant véreux
comme un personnage gênant. Aussi, peut-il tenter d'empêcher le
syndic d'exercer normalement sa mission de surveillance de ses
engagements ?
Qu'adviendrait-il si le locataire-gérant refuse la
communication desdits documents ou fait obstacle au contrôle du
syndic ? Le législateur OHADA est muet sur la question car
contrairement au cas de contrôle exercé par les commissaires aux
comptes, aucune sanction pénale n'a été prévue. Il
n'est pas exclu qu'un tel comportement traduisant la mauvaise foi du
locataire-gérant donne lieu à la mise en oeuvre de l'article 116,
alinéa 2, de l'AUPCAP sans préjudice d'une éventuelle
réaction pénale du législateur africain.
Il échet de noter que dans l'espace OHADA, si les
locataires-gérants, personnes physiques, sont pénalement
responsables228(*), il
n'en est pas le cas pour leurs homologues personnes morales. Pourtant,
« les modèles ne font pas
défaut »229(*). Il s'agit d'une mise en oeuvre par le
législateur OHADA de la maxime « societas delinquere non
potest »230(*). Cette option bien que critiquée231(*), se fonde sur trois
principaux arguments : d'une part, l'argument fondé sur la fiction
juridique232(*) ;
d'autre part, l'argument tiré du principe de la
spécialité233(*) et enfin, l'argument tiré d'une
compatibilité entre les notions de peines et de groupement234(*).
Cette option peut certes, constituer une mesure incitative
vis-à-vis des personnes désireuses de réaliser des
investissements en mettant sur pied des sociétés commerciales de
« location-gérance » mais, parce que en
contradiction avec le régime réservé aux
commerçants personnes physiques, elle risque entraîner le
désintéressement de ces derniers à prendre en location
l'entreprise en difficulté. En outre, elle peut constituer non seulement
un ingrédient sérieux pour le développement d'une
délinquance d'un genre particulier, mais aussi et surtout le risque de
sacrifier plusieurs intérêts235(*).
Pour accroître les chances de redressement des
entreprises en difficulté, il est judicieux que le législateur
africain revienne sur ses premières oeuvres afin de soumettre les
personnes morales commerçantes au même régime de
responsabilité que les commerçants personnes physiques.
Comme l'on le constate, en cas de défaillance du
locataire-gérant, c'est-à-dire lorsque celui-ci ne respecte pas
ses engagements ou fait obstacle au contrôle du syndic, sa
responsabilité doit nécessairement être engagée. En
plus, lorsque l'engagement inexécuté est le paiement de la
redevance, la caution peut y être tenue soit en totalité, soit en
partie. Mais, il peut arriver que malgré le fait qu'il ait
respecté convenablement ses engagements, les créanciers ne soient
pas toujours désintéressés à cause de la
défaillance ou de la malveillance des organes chargés de les
protéger.
Section II : Le recours contre les organes de la
procédure
Il ressort de l'article 116 de l'AUPCAP que le syndic
chargé de veiller au respect des engagements du locataire-gérant,
doit rendre compte au Juge-commissaire de l'exécution de ses obligations
par le locataire-gérant et qu'à toute époque, la
résiliation du contrat de location-gérance doit être
demandée soit par le syndic ou le représentant du
Ministère Public, soit par un contrôleur, sur rapport du
Juge-commissaire lorsque par son fait, le locataire-gérant diminue les
garanties qu'il avait données ou compromet la valeur du fonds. Il en
sera probablement de même lorsqu'il aura mis obstacle au contrôle
du syndic. Cet article dote tant le syndic que le Juge-commissaire, en passant
par le contrôleur et le Ministère Public, d'importantes
obligations, voire de pouvoirs. Or, qui dit pouvoir dit responsabilité.
C'est dire qu'en cas de défaillance de ces organes, leur
responsabilité peut être engagée. Ils peuvent être
regroupés en organes non judiciaires (Paragraphe 1) et
en organes judiciaires (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Le
recours contre les organes non judiciaires
Les organes non judiciaires sont constitués du syndic
et du contrôleur. Ils sont chargés l'un comme l'autre, de
représenter les créanciers et de préserver leurs
intérêts. Ils peuvent, sur proposition du Juge-commissaire,
être révoqués par la juridiction
compétente.236(*)
Outre cette révocation237(*), ils peuvent être civilement responsables de
leurs fautes dans les termes du droit commun (A), sans
préjudice de leur responsabilité pénale
(B).
A- La responsabilité
délictuelle ou quasi-délictuelle des organes non judiciaires
La responsabilité civile quasi-délictuelle
s'oppose à la responsabilité civile délictuelle. Un
délit civil consiste à causer intentionnellement un dommage
à autrui. Le quasi-délit est le fait de causer un dommage dans
des conditions entraînant la responsabilité, sans intention de
nuire238(*). Il y a
responsabilité civile délictuelle ou quasi-délictuelle
lorsque le dommage est indépendant de toute obligation contractuelle
liant l'auteur et la victime qui sont des tiers l'un vis-à-vis de
l'autre.
Contrairement aux contrôleurs qui n'engagent leur
responsabilité qu'en cas de faute lourde et personnelle, le syndic est
responsable de ses fautes de gestion tant à l'égard du
débiteur lui-même239(*) qu'à l'égard de la masse des
créanciers240(*).
Cette responsabilité trouve son fondement à l'article 1382 du C.
civ. français de 1804 qui dispose que : « Tout
fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui
par la faute duquel il est arrivé, à le
réparer ». La mise en oeuvre de cette
responsabilité nécessite la réunion de diverses conditions
(1) qui, dès lors qu'ils permettent d'établir le
fait dommageable, entraîne réparation du dommage
(2).
1- Les conditions de la
responsabilité délictuelle ou quasi-délictuelle
La responsabilité délictuelle ou
quasi-délictuelle suppose qu'existe un dommage; qu'il soit possible de
mettre à la charge d'une personne un fait de nature à
entraîner sa responsabilité; qu'entre ce fait et le dommage existe
un lien de cause à effet.
Le dommage est la condition essentielle de la
responsabilité civile. Il peut être matériel ou moral. Le
dommage matériel est constitué par une atteinte au patrimoine, au
bien. Il pourra s'agir d'une perte ou d'un gain manqué par les
créanciers dans la masse. Comme dans la responsabilité
contractuelle, ce dommage doit être certain et direct, il doit être
personnel et justifié par un intérêt légitime.
Le dommage moral consisterait ici en l'angoisse qu'ont eue
les créanciers de n'être pas payés.
Le fait générateur de la responsabilité
consiste en la faute commise par ces organes, chacun en ce qui le concerne.
Elle découle de la responsabilité du fait personnel. La faute
suppose un comportement blâmable, qui trouble plus ou moins gravement
l'ordre social241(*).
Elle consiste en l'espèce en l'abstention d'agir en demande de
résiliation du contrat de location-gérance par le syndic ou par
le contrôleur alors qu'ils savaient que le locataire-gérant, par
ses actes, diminue les garanties qu'il avait données ou compromet la
valeur du fonds. L'article 1383 du C.civ. ne dispose-t-elle pas que :
« chacun est responsable du dommage qu'il a causé non
seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son
imprudence » ?
S'agissant du lien de causalité, il faut noter que pour
que le syndic ou le contrôleur soient, chacun en ce qui le concerne,
tenus de réparer le dommage subi par les créanciers, il faut que
leur fait fautif ait été à l'origine du préjudice.
Il s'agit ici d'une cause efficiente, un rapport de cause à effet. En
effet, si le syndic ou le contrôleur avaient saisi le tribunal en
résiliation du contrat de location-gérance lorsqu'ils avaient
constatés que par son fait, le locataire-gérant diminue les
garanties qu'il avait données ou compromet la valeur du fonds, les
créanciers n'auraient jamais subi un quelconque préjudice.
La réunion de ces conditions donne
nécessairement droit à la réparation du préjudice.
2- La réparation du
préjudice
L'action en réparation est exercée par les
créanciers qui, par une requête, doivent saisir le
Juge-commissaire. Celui-ci doit à son tour saisir le président de
la juridiction compétente, c'est-à-dire le président de la
juridiction auprès de laquelle s'est ouverte la procédure
collective.
Lorsque le fait dommageable est établi, le tribunal
évalue le dommage242(*) et condamne les organes en cause au paiement des
dommages intérêts, réparation en argent du préjudice
causé aux créanciers.
Lorsque le fait dommageable constitue une infraction
pénale, surtout lorsque ces organes ont abusé la confiance qui
leur a été faite, l'action des créanciers peut être
portée soit devant la juridiction civile, soit devant la juridiction
répressive à titre d'accessoire à l'action publique qu'ils
peuvent déclencher si le Ministère Public ne l'avait pas encore
mis en mouvement. C'est dire qu'en plus de la responsabilité civile, la
responsabilité pénale des organes non judiciaires peut être
engagée.
B- La responsabilité
pénale des organes non judiciaires
Relativement à la responsabilité pénale
des organes non judiciaires chargés de veiller à la bonne
continuation de l'activité de l'entreprise en difficulté par le
locataire-gérant, le syndic se démarque du contrôleur par
l'étendue des infractions qu'il est susceptible de commettre. Ainsi,
l'on étudiera d'une part la responsabilité pénale du
syndic (1) et d'autre part celle du contrôleur
(2).
1- La poursuite
pénale du syndic
Les infractions susceptibles d'être commises par le
syndic dans l'exercice de sa mission de surveillance de la gestion par le
locataire-gérant de l'entreprise en difficulté peuvent être
relatives soit au contrôle, soit à l'appropriation frauduleuse. Si
la détermination des infractions relatives à l'appropriation
frauduleuse est évidente (a), tel n'est pas le cas pour
ce qui est des infractions relatives au contrôle (b).
a)- Les infractions
relatives à l'appropriation frauduleuse
Organe de la procédure collective, le syndic peut se
rendre coupable de deux comportements majeurs : l'un prévu par le
droit OHADA, à savoir la malversation, l'autre issu du droit commun
appliqué aux affaires et qui est synonyme d'abus de confiance.
S'agissant du délit de malversation, il est
prévu à l'article 243 de l'AUPCAP et se justifie par
l'idée selon laquelle la « procédure est
organisée dans l'intérêt de l'entreprise et des
créanciers et non dans celui des auxiliaires de
justice »243(*). L'élément matériel de cette
infraction consiste entre autres dans le fait pour le syndic de : -
disposer du crédit ou des biens du débiteur comme des siens
propres, autrement, d'utiliser abusivement les redevances reçues du
locataire-gérant.
- dissiper les biens du débiteur, c'est-à-dire
distraire ou dissimuler les fonds issus de la location-gérance.
En ce qui concerne son élément moral, il faut
noter que le législateur OHADA n'entend pas réprimer de simples
négligences mais l'acte intentionnel du syndic.
En application de l'article 34 de la loi n° 2003/008 du
10 juillet 2003 portant répression des infractions contenues dans
certains Actes uniformes OHADA, le syndic coupable de malversation est puni
d'une peine d'emprisonnement de cinq (5) à dix (10) ans et d'une amende
de 200.000 (deux cent mille) à 5.000.000 (cinq millions) de francs CFA.
S'agissant du délit d'abus de confiance, l'article 318,
al. 1(b), du C. P. punit d'un emprisonnement de 5 à 10 ans et d'une
amende de 100.000 (cent mille) à 1.000.000 (un million) de francs, celui
qui porte atteinte à la fortune d'autrui par abus de confiance,
c'est-à-dire en détournant ou détruisant ou dissipant tout
bien susceptible d'être, et qu'il a reçu, à charge de le
conserver, de le rendre, de le représenter ou d'en faire un usage
déterminé. Est ainsi directement concerné le syndic qui,
malgré sa responsabilité en cas de retard de versement244(*), se permet de dissiper
continuellement les fonds reçus du locataire-gérant et
destinés au désintéressement des créanciers.
Quid des infractions relatives au contrôle ?
b)- La question des
infractions relatives au contrôle
D'après l'article 116, alinéa 1er, de
l'AUPCAP, « le syndic veille au respect des engagements du
locataire-gérant. (...). Il doit rendre compte au Juge-commissaire de
l'exécution de ses obligations par le locataire-gérant, au moins
tous les trois mois, en précisant le montant des sommes reçues et
déposées au compte de la procédure collective, les
atteintes aux éléments pris en location-gérance et les
mesures de nature à résoudre toute difficulté
d'exécution ». Qu'adviendrait-il si le syndic
n'exécute pas fidèlement ces obligations ? Á cette
interrogation, le législateur OHADA reste muet. Eu égard à
la quasi-identité des fonctions du syndic en matière de
location-gérance de l'entreprise en difficulté d'avec celles du
commissaire aux comptes relativement au contrôle des
sociétés commerciales in bonis, n'est-il pas souhaitable
d'étendre au premier les infractions encourues par le second ?
Relativement à la première interrogation,
« Une lecture attentive des Actes uniformes laisse un goût
d'inachevé dans la délimitation des infractions
pénales ; on n'a pas l'impression que tous les délits ont
été envisagés ; l'aspect pénal est assez
creusé dans certains Actes uniformes et dans d'autres, il est simplement
survolé »245(*). Quoi qu'il en soit, le législateur OHADA
s'est réservé le pouvoir de déterminer les incriminations
communes à l'échelle régionales dans les Actes
uniformes246(*). Au
vrai, il « a adopté en la matière une attitude
à plusieurs vitesses : tantôt, il s'est attelé
à traiter à la fois des incriminations et des sanctions,
tantôt il s'est limité à la fixation des incriminations,
laissant à chaque État membre le soin d'édicter les
sanctions correspondantes, tantôt enfin, il a ignoré
complètement l'organisation de la responsabilité pénale
d'une certaine catégorie de
commerçants »247(*).
Il convient de remarquer que, même si un Acte uniforme
n'a pas prévu des dispositions pénales, certaines infractions
peuvent être commises au cours des opérations ou des
procédures prévues par eux248(*). Et même dans les Actes uniformes qui ont
prévu de telles dispositions pénales, tous les comportements ou
manquements répréhensibles n'ont pas été pris en
compte alors qu'ils donneraient lieu à des sanctions. Il en est ainsi,
à la lecture de l'article 116 de l'AUPCAP, du syndic. Cette ignorance
par le législateur des procédures collectives de la
responsabilité du syndic en matière de contrôle de la
gestion de l'entreprise en difficulté par le locataire-gérant
est-elle synonyme d'oubli ou d'omission volontaire ?
L'on est loin de penser à une omission volontaire car
cela renverrait à une dépénalisation ou
décriminalisation. Pourquoi exclure le droit pénal comme
réaction à certaines conduites qui mériteraient une
sanction ? Á l'image du commissaire aux comptes dans les
sociétés commerciales in bonis, le syndic chargé de
contrôler l'entreprise en état de cessation des paiements n'est-il
pas susceptible de poser des actes répréhensibles lors de
l'exercice de son contrôle ? Il ne peut s'agir que d'un oubli du
législateur. De ce fait, n'est-il pas permis de souhaiter qu'il soit
étendu au syndic certaines infractions encourues par les commissaires
aux comptes ?
Relativement à la seconde interrogation, l'article 116
précité admet clairement que le syndic a pour mission de
détecter les indices révélateurs d'une défaillance
de gestion du gérant-libre de l'entreprise en difficulté. Nul
doute qu'il peut, au cours de l'exercice de cette mission, donner ou confirmer
des informations mensongères sur la situation de la
société ou ne pas révéler au Juge-commissaire les
atteintes aux éléments pris en location-gérance. Pour
éviter qu'il ne se rende complice, le législateur devrait
sanctionner rigoureusement les éventuels comportements délictuels
du syndic dont les éléments constitutifs peuvent être
clairement déterminés249(*).
Le législateur national chargé de fixer les
peines pourrait, au lieu de prendre une sanction plus rigoureuse,
procéder tout simplement par renvoi à l'article 17 de la loi
camerounaise n° 2003/008 du 10 juillet 2003 portant répression des
infractions contenues dans certains Actes uniformes. Dans ce cas, le syndic qui
se rendrait coupable de délit d'informations mensongères ou de
non révélation de faits faux pourrait être puni d'un
emprisonnement de deux (2) ans à cinq (5) ans et/ou d'une amende de
500.000 (cinq cent mille) à 5.000.000 (cinq millions) de francs.
2- La responsabilité
pénale du contrôleur
Les contrôleurs assistent le Juge-commissaire dans sa
mission de surveillance du déroulement de la procédure collective
et veillent aux intérêts des créanciers250(*). Ils ont le droit de
vérifier la comptabilité et l'état de situation
présenté par le débiteur, de demander compte de
l'état de la procédure, des actes accomplis par le syndic ainsi
que des recettes faites et des versements effectués251(*).
Ils peuvent adresser au Juge-commissaire des
réclamations tendant à la révocation d'un ou de plusieurs
syndics252(*). Ils
peuvent demander au tribunal la conclusion du contrat de
location-gérance253(*)ou sa résiliation254(*). Les contrôleurs
exercent personnellement leurs fonctions et ne sont pas
rémunérés à cet effet. Ils n'engagent leur
responsabilité qu'en cas de faute lourde et contribuent, s'ils exercent
efficacement leurs fonctions, au bon déroulement de la procédure
et à la préservation des intérêts des
créanciers. Toutefois, si au lieu de protéger ces
intérêts, ils aident ou facilitent plutôt le syndic à
dissiper les deniers de l'entreprise, ils doivent être poursuivis pour
complicité d'abus de confiance255(*).
La complicité suppose une infraction punissable
à laquelle elle emprunte sa criminalité et ses
pénalités. Elle peut être poursuivie même lorsque
l'auteur principal est resté inconnu, dès lors que le fait
justifiant la poursuite est établi. D'après l'article 98, al.
1er, du C.P. camerounais, les complices sont passibles de la
même peine que l'auteur principal. Ainsi, le contrôleur qui se rend
coupable de complicité d'abus de confiance est puni des peines
d'emprisonnement de 5 à 10 ans et d'une amende de 100.000 (cent mille)
à 1.000.000 (un million) de francs.
Ainsi analysé le recours contre les organes non
judiciaires, qu'en est-il de celui contre les organes judiciaires ?
Paragraphe 2 : Le
recours contre les organes judiciaires
Il s'agit du Juge-commissaire et du représentant du
Ministère Public256(*). Chacun d'eux est doté, en vertu de l'article
116 de l'AUPCAP, d'importants pouvoirs. Or, il n'ya pas de pouvoir sans
contrepartie. C'est dire que ces organes peuvent engager leur
responsabilité lorsque l'insatisfaction des créanciers
résulte de leur défaillance.
S'il est vrai qu'ils peuvent tous répondre civilement
et disciplinairement de leur faute (A), il est à noter
que seul le Juge-commissaire peut être poursuivi pénalement
à cause de l'irrecusabilité du Ministère Public
(B).
A- La responsabilité
civile et disciplinaire des organes judiciaires
Il convient d'étudier d'abord leur
responsabilité délictuelle ou quasi-délictuelle
(1) et ensuite leur responsabilité disciplinaire
(2).
1- La responsabilité
délictuelle ou quasi-délictuelle des organes judiciaires
Cette responsabilité résulte certainement de
l'article 116, al. 2, de l'AUPCAP qui les oblige à demander la
résiliation du contrat de location-gérance lorsque, par son fait,
le locataire-gérant porte atteinte aux éléments pris en
location-gérance. C'est dire que, s'ils ne saisissent pas le tribunal en
résiliation dudit contrat alors qu'ils savaient que, par son fait, le
preneur diminue les garanties qu'il avait données ou compromet la valeur
du fonds, ils doivent répondre de leur faute. C'est ce qui ressort des
dispositions des articles 246 à 257 du Code de procédure civile
et commerciale qui prévoient la procédure de prise à
partie contre les magistrats. Cette procédure permet entre autres
d'engager la responsabilité d'un magistrat pour faute lourde
professionnelle.
Il s'agit d'appliquer à leur égard les articles
1382 et 1383 du Code civil qui disposent respectivement que,
« Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un
dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le
réparer », « Chacun est responsable du
dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa
négligence ou par son imprudence ». Dès lors que
le fait dommageable est établi257(*), l'État est civilement responsable des
condamnations en dommages intérêts qui seront prononcées
contre ces magistrats. Il est tenu de les payer afin d'exercer l'action
récursoire contre le magistrat fautif.
Par ailleurs, des sanctions disciplinaires sont prévues
à l'encontre de ces organes pour violation de la déontologie
professionnelle.
2- La responsabilité
disciplinaire
D'après l'article 46 du décret n° 95/0048
du 8 mars 1995 portant statut de la magistrature,
« constitue une faute disciplinaire imputable à un
magistrat : tout acte contraire au serment du magistrat ; tout
manquement à l'honneur, à la dignité et aux bonnes
moeurs ; tout manquement résultant de l'insuffisance
professionnelle ».
En application de l'article 47 dudit décret, les
sanctions disciplinaires applicables au Juge-commissaire et au
représentant du Ministère Public sont : l'avertissement, la
réprimande, la radiation du tableau d'avancement, le retard à
l'avancement d'échelon pour une durée maximale de deux ans,
l'abaissement d'un ou de plusieurs échelons, le retrait de la fonction,
la rétrogradation d'un groupe ou d'un grade, l'exclusion temporaire du
service pour une durée maximum de six (6) mois, la révocation
sans suspension ou déchéance de droits à pension.
L'avertissement et la réprimande sont
prononcés, selon le cas, par arrêté du Président de
la République ou du Ministre de la Justice258(*). Les autres sanctions sont
prononcées par décret du Président de la
République259(*).
En plus de ces sanctions civiles et disciplinaires, le
Juge-commissaire peut subir des sanctions pénales.
B- La responsabilité
pénale du Juge-commissaire
Selon la formule générale retenue par l'article
39 de l'AUPCAP, le Juge-commissaire, placé sous l'autorité du
tribunal, est chargé de veiller au déroulement rapide de la
procédure et à la protection des intérêts en
présence. Dans sa mission d'assistance du tribunal, il surveille
l'activité du personnel qui participe aux opérations de la
procédure260(*).
En effet, lorsque l'activité de l'entreprise est continuée par le
locataire-gérant, le syndic est tenu, au moins tous les trois mois, de
lui rendre compte de l'exécution par le locataire-gérant de ses
obligations261(*). Il
s'agit pour celui-ci de présenter au Juge-commissaire les atteintes aux
éléments pris en location-gérance et les mesures de nature
à résoudre toute difficulté d'exécution, de lui
justifier les deniers qu'il a éventuellement recueillis et
déposés au compte de la procédure collective262(*).
Les fonds ainsi versés ne peuvent être
retirés qu'en vertu d'une décision du Juge-commissaire263(*). C'est dire que le
Juge-commissaire seul a le pouvoir de gestion sur ces fonds. Ce pouvoir peut
être abusé s'il se permet d'utiliser ces deniers dans son seul
intérêt au détriment de celui des créanciers. Cet
acte entre certainement dans la constitution des éléments
matériels de l'abus de confiance qui consiste au détournement ou
à la dissipation de tout bien reçu, à charge de conserver,
de rendre ou d'en faire un usage déterminé. Nul doute que les
fonds versés sur le compte de la procédure sont destinés
au désintéressement des créanciers. Le Juge-commissaire
qui se rendrait coupable d'abus de confiance sera puni d'un emprisonnement de 5
à 10 ans et d'une amende de 100.000 à 1.000.000 de
francs264(*).
Conclusion de la deuxième
partie
Le droit OHADA des procédures collectives d'apurement
du passif est marqué par le souci, non seulement d'empêcher la
défaillance de l'entreprise, vecteur du développement
socio-économique, mais aussi de donner, tant que cela est encore
possible, une chance de redressement à l'entreprise qui connaît
des difficultés économiques de nature à engendrer sa mort
tout en protégeant les créanciers et en assurant leur
désintéressement dans les meilleures conditions possibles.
Le désintéressement des créanciers est
garanti directement par le paiement de leurs créances et indirectement
par la possibilité pour eux d'exercer des recours contre ceux qui
mettraient en mal leurs droits.
Le paiement des créances s'effectue principalement au
moyen des redevances versées par le locataire-gérant et
accessoirement à travers la possibilité de mise en oeuvre du
mécanisme de la compensation. En ce qui concerne l'ordre de distribution
de ces deniers, en l'absence d'un ordre de distribution des deniers de
l'entreprise en redressement judiciaire, un ordre approximatif permettant de
prendre en compte tous les créanciers a été
envisagé.
En ce qui concerne les recours des créanciers, ils
peuvent être exercés soit contre les débiteurs de la
redevance, que sont le locataire-gérant et la caution, soit contre les
organes de la procédure à savoir d'une part, le syndic et le
contrôleur et d'autre part, le Juge-commissaire et le Ministère
Public.
CONCLUSION
GÉNÉRALE
Les États africains, particulièrement ceux
membres de l'OHADA, ont plus que besoin dans un environnement économique
de plus en plus concurrentiel, d'exploiter toutes les mesures idoines
permettant de sauvegarder et d'assurer le développement de leurs
entreprises. Il est, une réalité indéniable que
l'entreprise joue un rôle majeur et crucial dans la vie économique
et sociale d'un pays, d'une région ou d'un continent.
L'employeur y tire des bénéfices, les
employés des revenus, les bailleurs de fonds des intérêts
sur des prêts consentis, les usagers et les clients des biens et des
services, l'État des impôts et la création d'emplois. Sa
disparition ne peut qu'avoir des conséquences économiques et
sociales désastreuses pour les pays africains membres de l'OHADA.
Pour stopper l'hémorragie, le recours à la
location-gérance serait intéressant car elle permettrait
d'assurer le sauvetage de tout ou partie de l'entreprise en difficulté,
d'en pérenniser l'exploitation et de maintenir les emplois qui y sont
attachés, mais aussi de désintéresser dans la mesure du
possible les créanciers.
La pérennisation de l'exploitation de l'entreprise en
difficulté au moyen de la location-gérance requiert l'existence
des contrats en cours. La manipulation des contrats à l'intérieur
du droit des procédures collectives est délicate. En effet, le
législateur OHADA a marqué sa faveur pour les contrats dont le
maintien permettra de sauver l'entreprise en difficulté, notamment le
bail commercial, dont l'une des particularités tient à ce qu'il
ne s'agit pas d'un contrat comme les autres. En outre, l'on peut
également préconiser le maintien des contrats de louage d'objets
et de fourniture tels les contrats de commission, de franchise et de concession
exclusive.
Pour ce qui est des contrats de travail en cours au moment de
l'ouverture des procédures collectives d'apurement du passif, leur
exécution doit se poursuivre quel que soit le mode de continuation de
l'exploitation de l'entreprise. Malheureusement, l'on se rend compte que pour
parvenir au redressement harmonieux de l'entreprise en état de cessation
des paiements, il faille licencier pour motif économique quelques
employés lorsque le recours aux mesures alternatives s'est
avéré infructueux.
En ce qui concerne l'analyse de la location-gérance
comme moyen d'apurement du passif, le mécanisme contribue, semble-t-il,
au désintéressement des créanciers de l'entreprise en
difficulté. Les redevances versées par le locataire-gérant
devant être directement distribuées aux créanciers.
Toutefois, il peut arriver que le mécanisme de la compensation soit mis
en oeuvre, lorsque le locataire-gérant est par exemple créancier
dans la masse ou l'est devenu par la force des choses.
Malheureusement, il a été constaté que
le législateur communautaire n'a pas prévu un ordre de
distribution, entre les créanciers, des deniers issus de la
location-gérance de l'entreprise en difficulté. Face à ce
triste constat, un ordre relatif de répartition a été
préconisé.
Par ailleurs, il faut noter que le
désintéressement des créanciers de l'entreprise en
difficulté mise en location-gérance est également garanti
par la possibilité pour eux d'engager la responsabilité de ceux
qui porteraient atteinte à leurs droits. Il s'agit de la
possibilité d'exercer des recours respectivement contre le
locataire-gérant véreux et la caution, le syndic, le
contrôleur, le Juge-commissaire et le représentant du
Ministère Public.
Au demeurant, il apparaît que la faillite des
entreprises n'est pas une fatalité car des voies et moyens ont
été identifiés comme susceptibles d'en assurer leur
redressement. C'est ce que s'efforce juridiquement de faire le
législateur OHADA des procédures collectives qui envisage le
sauvetage de tout ou partie de l'entreprise en difficulté par la
location-gérance.
Cette étude aura permis d'apprécier, en cette
période de morosité économique où il existe
pourtant un marché de l'entreprise en difficulté, le rôle
majeur que peut jouer la location-gérance dans le redressement et la
restructuration des économies des pays africains membres de l'OHADA.
Á condition toutefois, que les pouvoirs publics africains reconnaissent
les fondements d'une législation des entreprises en difficulté et
d'une pratique incitative au sauvetage de l'entreprise africaine.
Les pouvoirs publics et les partenaires
socio-économiques doivent prendre conscience que la vitalité et
le dynamisme économique ne passent pas seulement par la création
d'entreprises nouvelles, mais aussi par la sauvegarde d'entreprises plus
anciennes et défaillantes. Celle-ci nécessite comme le souhaitait
un auteur265(*), la
réunion d'un ensemble de mesures homogènes spécifiques,
intégrant plusieurs disciplines aussi bien juridique, financière,
économique que commerciale. Ainsi, nul doute qu'en faisant recours
à temps à la location-gérance, il n'y aura plus lieu de
toujours chercher sans trouver, en Afrique, des entreprises en
difficulté qui se redressent.
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éd., D., 2000, 717 pages.
23) PEROCHON (F.) et BONHOMME (R.), - Entreprises en
difficulté, instruments de crédit et de paiement,
3e éd., LGDJ, 1997, 692 pages.
- Entreprises en difficulté, instruments de
crédit et de paiement, 5e éd., LGDJ, 2001, 812
pages.
24) PETEL (Ph.), Procédures collectives,
2e éd., D., cours, 1996, 235 pages.
25) RIPERT (G.) et ROBLOT (R.), par GERMAIN (M.) et DELEBECQUE
(PH), - Traité de droit commercial, 15e éd.,
t. 2, LGDJ, 1996, 1364 pages.
- Traité de Droit commercial, 17e
éd., t.2 , L.G.D.J, 2004, 1323 pages
26) SAINT ALARY - HOUIN (C.), Droit des entreprises en
difficulté, 2e éd., Montchrestien, Précis
Dalloz, 1996, 728 pages.
27) VOIRIN (P.), Droit civil, 26e
éd., t. 1, par G. GOUBEAUX, LGDJ, 1997, 709 pages.
B- Article de doctrine
1) PEDAMON (M.) : « La compensation des
dettes connexes », RJC, n° spécial, 1992, p. 72-
95.
II-SUR LE DROIT OHADA
A- Ouvrages généraux et
spéciaux
1) AKUETE PEDRO (S.) et YADO TOE (J.), OHADA, Droit
commercial général, Collection Droit Uniforme africain,
Bruxelles, Bruylant, 2002, 478 pages.
2) ANOUKAHA (F.), CISSE-NIANG (A.), FOLI (M.), ISSA-SAYEGH
(J.), YANKHOBA NDIAYE (I.), et SAMB (M.), OHADA, sûretés,
Collection Droit Uniforme africain, Bruxelles, Bruylant, 2002, 279 pages.
3) GATSI (J.), Doit des affaires, droit commercial
général, droit des sociétés commerciales, PUL,
Manuel, 208 pages.
4) GOMEZ (J.-R.), Entreprises en difficulté,
lecture de l'Acte Uniforme de l'OHADA portant organisation des
procédures collectives d'apurement du passif à la lumière
du droit français, Le Doit des Affaires en Afrique, série
Droit des affaires, Bajag-Meri, 2003, 431 pages.
5) ISSA - SAYEGH (J.) et LOHOUES - OBLE (J.), OHADA,
Harmonisation du droit des affaires, Collection Droit Uniforme, Bruxelles,
Bruylant, 2002, 245 pages.
6) KALIEU ELONGO (Y.), Les sûretés
personnelles dans l'espace OHADA, Yaoundé, PUA, Coll. Vademecum,
2006, 90 pages.
7) KONE (M.), Le nouveau droit commercial des pays de la
zone OHADA, comparaison avec le droit français, LGDJ, 2003, 416
pages.
8) MANDESSI BELL (E.), Manuel des procédures
collectives d'apurement du passif des entreprises en difficulté en
Afrique, Normes OHADA, Collection Droit OHADA, Douala,
FORM'ACTION, 1999, 386 pages.
9) MARTOR (B.), PILKINGTON (N.), SELLERS (D.) et THOUVENOT
(S.), avec la participation de ANCEL (P.), LE BARS (B.) et MASAMBA (R.), Le
droit uniforme africain des affaires issu de l'OHADA, Litec, 2004,
344pages.
10) NGUEBOU TOUKAM (J.), - Le droit commercial dans l'Acte
Uniforme OHADA, Yaoundé, PUA, 1998, 249 pages.
- Cours de droit commercial général,
Yaoundé, Cameroon University Press, 2004, 214 pages.
11) NYAMA (J.-M.), OHADA, Droit des entreprises en
difficultés, CERFOD, éd. 2004, 483 pages.
12) POUGOUE (P.-G.) et FOKO (A.), Le statut du
commerçant dans l'espace OHADA, Yaoundé, P.U.A, 2005, 263
pages.
13) POUGOUE (P.-G.) et KALIEU (Y.), L'organisation des
procédures collectives d'apurement du passif OHADA, Yaoundé,
PUA, 1999, 232 pages.
14) SANTOS (A-P.) et TOE (J.Y.), Droit commercial
général, Collection Droit Uniforme, Bruxelles, Bruylant,
2003, 478 pages.
15) SAWADOGO (F.-M.), OHADA, Droit des entreprises en
difficulté, Collection Droit Uniforme, Bruxelles, Bruylant, 2002,
n° 6, 444 pages
B- Thèses et Mémoires
1) ATSOPZE TAYO Mireille, Le concours des pouvoirs dans la
gestion des entreprises en difficulté, mémoire de DEA, FSJP,
Université de Dschang, 2002-2003.
2) BILLET (G.), Le bail commercial pendant la
période d'observation, mémoire de DEA, université de
Lille II, 2000.
3) FOSSO (Y.), Procédures collectives et voies
d'exécution OHADA, mémoire de DEA, FSJP, Université
de Dschang, juillet 2001.
4) KEM CHEKEM (B.-M.), Entreprise en difficulté et
droits de salariés dans la zone OHADA, le cas du Cameroun,
mémoire de DEA, FSJP, Université de Dschang, mars 2004.
5) KENMEUGNE KOUAM (G.), Les voies de recours dans les
procédures collectives d'apurement du passif de l'OHADA,
mémoire de DEA, FSJP, Université de Dschang, 2006-2007.
6) KENMOGNE (N.), L'intérêt
général en droit des procédures collectives,
mémoire de DEA, FSJP, Université de Dschang, 2006-2007.
7) KEUGONG WATCHO (R.), Le droit commun des contrats face
à l'émergence des droits communautaires africains,
thèse, Université de Dschang, 2009.
8) KONCHOP (H.), Le sort des dirigeants sociaux dans les
procédures collectives OHADA, mémoire de DEA, FSJP,
Université de Dschang, 2004-2005.
9) MAGUEU KAMDEM (J.-D.), Les banques et les entreprises
en difficulté, mémoire de DEA, FSJP, Université de
Dschang, 2004-2005.
10) MAYO BOUMSONG (J.-T.), Le droit à l'information
dans les procédures collectives d'apurement du passif de l'OHADA,
mémoire de DEA, FSJP, Université de Dschang, 2005-2006.
11) MOHO FOPA (E. A.), Réflexions critiques sur le
système de prévention des difficultés d'entreprises,
mémoire de DEA, FSJP, Université de Dschang, 2006.
12) MONKAM (C.), La condition juridique du salaire dans
les procédures collectives, mémoire de DEA, FSJP,
Université de Douala, 2004-2005.
13) NGUIHE KANTE (P.), Les techniques de sauvetage des
entreprises en difficulté en droit camerounais, thèse de
Doctorat 3e cycle, Yaoundé, février 1999.
14) TCHINDE (M.), La place des organes judiciaires dans
l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives
d'apurement du passif, mémoire de Maîtrise en Droit, FSJP,
Université de Dschang, 1998-1999.
15) TEPPI KOLLOKO (F.), Les délais en
matière des procédures collectives, mémoire de DEA,
FSJP, Université de Dschang, 2005-2006.
C- Articles de doctrine
1) ALILI (S.M.) : « La reprise des entreprises
en difficulté dans l'espace OHADA », Ohadata
D-06-38., p. 1-20.
2) ANAZETPOUO (Z.) : « La recherche d'un
salariat décent ou la revalorisation du SMIG par le décret
n° 2115/PM du 24 juin 2008 », In Juridis
périodique, n° 77, janvier-mars, p. 119-123.
3) ANOUKAHA (F.) : - « L'émergence d'un
nouveau droit des procédures collectives d'apurement du passif dans les
Etats africains membres de l'OHADA », in Afrique Juridique et
Politique, vol.1, janvier-juin 2002, p. 62-85.
- « L'OHADA en marche », in Annales de
la Faculté des Sciences Juridiques et Politiques de l'Université
de Dschang, t. 6. PUA, 2002, p. 7-21.
4) ASSOGBAVI (K.) : « Les procédures
collectives d'apurement du passif dans l'espace OHADA », in
Penant, n° 832, janvier-avril 2000.
5) FOKO (A.) : « Analyse critique de quelques
aspects du droit pénal OHADA », in Penant, n°
845, 2007, p. 195-239.
6) ISSA - SAYEGH (J.) : - « Présentation
des dispositions sur les procédures collectives d'apurement du
passif », Ohadata D-06-07, 27 pages.
- « Le sort des travailleurs dans les entreprises en
difficulté en droit OHADA », Ohadata D-09-41, 21
pages.
7) MASSAMBA (J.I.) : « Les entreprises en
difficultés : quelles solutions ? », in Bull.
OHADA, n° 2 octobre-novembre 2000, p. 6.
8) MARTOR (B.) : « Comparaison de deux
sûreté personnelles : le cautionnement et la lettre de
garantie », In JCP, Cahiers de Droit de l'Entreprise n°
5, p. 21-27.
9) MBONJI BILLE (G.C.) : « Les créances
nées de la poursuite de l'activité », in
l'effectivité du droit de l'OHADA, Collection droit uniforme, 2006,
p. 163-169.
10) MDONTSA FONE (A.-M.) : « A propos de
l'extension de la compétence pénale
OHADA », in Revue Africaine des Sciences Juridiques,
UYII- FSJP, vol 5, n° 1, 2008, p. 77-89.
11) MOKOKO (F.C.) : « Les
opérations sur le fonds de commerce : location-gérance et
vente », in Bull. OHADA, n° spécial 2001,
p.9.
12) MOUMI de BAKONDJI (J.) : « Banques,
crédits et dispositifs sécuritaires du droit OHADA »,
in l'effectivité du droit de l'OHADA, Collection droit
uniforme, 2006, p. 171-178.
13) NGNINTEDEM (J-C.) : « Le bail commercial
à l'aune du droit OHADA des entreprises en
difficulté », in Revue de droit uniforme, UNIDROIT,
NS Vol. XIV/2009, p. 181 ; Ohadata D-10-26.
14) NGUIHE KANTE (P.) : - « Régime
juridique de la location-gérance des stations-service de
marque », in Juridis périodique, n° 27,
juillet-septembre 1996.
- « Réflexions sur la notion d'entreprises en
difficulté dans l'acte uniforme portant organisation des
procédures collectives d'apurement du passif »,
in Annales de la Faculté des Sciences Juridiques et Politiques de
l'Université de Dschang, 2001, p. 87-103.
15) TCHAKOUA (J-M.) : - « Le licenciement pour
motif économique en droit camerounais », in Revue
africaine des sciences juridiques, vol 2, n° 1, 2001, p. 189- 211.
- « La démission et le licenciement :
une histoire de vrais faux jumeaux », in Juridis
périodique, n° 70, avril-juin 2007, p. 87-95.
16) TIGER (P.) : « Les procédures
collectives après cessation des paiements en Droit Harmonisé de
l'OHADA », in Petites Affiches, n° 205 du 13 octobre
2004, pp. 33-51.
III-CODES ET TEXTES DE LOIS
1) OHADA : Traité et Actes uniformes
commentés et annotés, 3e éd., Juriscope,
2008 ;
2) L'Acte Uniforme relatif au Droit Commercial
Général adopté le 15 décembre 2010 et entré
en vigueur le 15 mai 2011 ;
3) L'Acte Uniforme portant Sûreté adopté
le 15 décembre 2010 et entré en vigueur le 15 mai 2011 ;
4) Code Civil, Litec ;
5) Code Pénal du Cameroun ;
6) Loi n° 92/007 du 14 août 1992 portant code du
travail camerounais ;
7) Loi n° 2003/008 du 10 juillet 2003 portant
répression des infractions contenues dans certains Actes Uniformes
OHADA.
TABLE DES
MATIÈRES
DÉDICACE
ii
REMERCIEMENTS
iii
PRINCIPALES ABRÉVIATIONS
iv
SOMMAIRE
vi
RÉSUMÉ
vii
ABSTRACT
viii
INTRODUCTION GÉNÉRALE 1
PREMIÈRE PARTIE : LA
LOCATION-GÉRANCE, TECHNIQUE D'ADMINISTRATION DE L'ENTREPRISE EN
DIFFICULTÉ
10
CHAPITRE I : LE SOUCI DE PÉRENNISATION
DE L'EXPLOITATION
12
Section I : L'existence des contrats en
cours : un préalable à la poursuite de l'activité
12
Paragraphe 1- La détermination des contrats
en cours
13
A- La notion de contrat en cours
13
B- Le régime des contrats en cours
14
Paragraphe 2- Le domaine de la continuation des
contrats en cours
15
A- L'exclusion des contrats conclus intuitu
personae
16
B- L'exclusion des contrats expressément
prévus par la législation de chaque État partie
18
Section II : Les contrats indispensables
à la relance de l'activité de l'entreprise en
difficulté
19
Paragraphe 1- L'exigence du maintien du contrat de
bail : une pérennité géographique
20
A- La neutralisation des stipulations
contractuelles
20
B- L'altération des prérogatives
contractuelles
21
Paragraphe 2- La nécessité de la
préservation des contrats de fournitures et de louage d'objets
23
A- Le sort des contrats de louage d'objets
mobiliers
23
B- Le sort des contrats de fournitures
24
1- Les contrats de fournitures dont la
continuation dépendrait de la volonté du
locataire-gérant : le contrat de commission
24
2- Les contrats de fournitures dont la rupture
entraînerait directement la disparition de l'entreprise : la
franchise et la concession exclusive
25
CHAPITRE II : LE MAINTIEN SOUHAITABLE DE
L'EMPLOI
29
Section I : La modification des contrats de
travail, moyen de préservation de l'emploi.
30
Paragraphe 1- La modification du travail
proposé
31
A- La réduction du temps de travail
31
B- Le recours au travail à temps partiel
32
C- La mise en chômage technique
33
Paragraphe 2- La modification de la
rémunération, moyen d'adaptation de la situation des
employés aux nouvelles conditions économiques de l'entreprise
mise en gérance libre
34
A- La réduction du salaire et le
réaménagement de ses accessoires
35
B- La remise en cause de certains usages
d'entreprise
36
Section II : Le recours aux licenciements pour
motif économique, moyen de protection de l'emploi
37
Paragraphe 1- Les caractères requis du
licenciement : la nécessité du juste motif
38
Paragraphe 2- Le contrôle des licenciements
pour motif économique des salariés de l'entreprise en
difficulté mise en location-gérance
40
A- L'obligation de communication du
locataire-gérant
41
B- L'autorisation des licenciements par le
Juge-commissaire
42
CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE
46
DEUXIÈME PARTIE : LA
LOCATION-GÉRANCE, MOYEN D'APUREMENT DU PASSIF DE L'ENTREPRISE EN
DIFFICULTÉ
47
CHAPITRE I : LE DÉSINTÉRESSEMENT
DES CRÉANCIERS DE L'ENTREPRISE EN DIFFICULTÉ MISE EN
LOCATION-GÉRANCE
49
Section I : Les moyens du
désintéressement des créanciers
50
Paragraphe 1- Le désintéressement des
créanciers envisagé sous l'angle du paiement de la redevance
50
A- Les caractères de la redevance
51
1- Une redevance réelle et
sérieuse
51
2- Une redevance déterminée et
non déterminable
52
B- La fixation et la révision du montant de
la redevance
53
1- La fixation du montant de la redevance par
les parties
53
a- La libre négociation du montant de la
redevance par les parties
53
b- Le recours à un tiers
54
2- La question de la révision de la
redevance
54
Paragraphe 2- Le désintéressement des
créanciers opéré par le biais de la compensation
56
A- Les modalités de la compensation
57
B- Les conditions de la compensation
58
Section II : L'ordre de
désintéressement des créanciers de l'entreprise en
difficulté mise en location-gérance
60
Paragraphe 1- L'absence d'ordre de paiement dans la
procédure de redressement judiciaire
60
Paragraphe 2- La détermination d'un ordre de
paiement des créanciers de l'entreprise en difficulté mise en
location-gérance
63
A- L'intérêt d'un ordre de
répartition entre les créanciers des deniers issus de la
location-gérance de l'entreprise en difficulté
63
B- Les limites à l'ordre de paiement
66
CHAPITRE II : LES RECOURS DES CRÉANCIERS
DE
L'ENTREPRISE EN DIFFICULTÉ MISE EN
LOCATION-GÉRANCE
69
Section I : Le recours contre les
débiteurs de la redevance
70
Paragraphe 2- Le recours contre la caution
70
A- Le paiement de la dette par la caution
70
1- Le cautionnement solidaire
70
2- Le cautionnement simple
71
B- Le sort de la redevance garantie par la caution
décédée
72
Paragraphe 2 : Le recours contre le
locataire-gérant
74
A- La responsabilité contractuelle du
locataire-gérant
74
1- Les conditions de la responsabilité
contractuelle du locataire-gérant
75
2- La sanction de la responsabilité
contractuelle du locataire-gérant
76
B- La responsabilité pénale du
locataire-gérant
77
1- Les éléments constitutifs
d'abus de confiance du locataire-gérant
77
2- La sanction du locataire-gérant pour
abus de confiance
78
Section II : Le recours contre les organes de
la procédure
80
Paragraphe 1 : Le recours contre les organes
non judiciaires
81
A- La responsabilité délictuelle ou
quasi-délictuelle des organes non judiciaires
81
1- Les conditions de la responsabilité
délictuelle ou quasi-délictuelle
82
2- La réparation du préjudice
83
B- La responsabilité pénale des
organes non judiciaires
84
1- La poursuite pénale du syndic
84
a)- Les infractions relatives à
l'appropriation frauduleuse
84
b)- La question des infractions relatives au
contrôle
85
2- La responsabilité pénale du
contrôleur
87
Paragraphe 2 : Le recours contre les organes
judiciaires
88
A- La responsabilité civile et disciplinaire
des organes judiciaires
89
1- La responsabilité délictuelle
ou quasi-délictuelle des organes judiciaires
89
2- La responsabilité disciplinaire
90
B- La responsabilité pénale du
Juge-commissaire
91
CONCLUSION DE LA DEUXIÈME PARTIE
92
CONCLUSION GÉNÉRALE
93
BIBLIOGRAPHIE
97
TABLE DES MATIÈRES
105
* 1 Comme le
déclarait déjà le Professeur François ANOUKAHA,
« Tant qu'il y aura des entreprises, il y'aura des entreprises en
difficultés ». Voir ANOUKAHA (F.),
« L'émergence d'un nouveau droit des procédures
collectives d'apurement du passif dans les Etats membres de l'OHADA »
in La Revue du CERDIP, volume 1, n°1, Janvier - juin 2002, p.
85.
* 2 Cf. SAWADOGO (F. M.),
Commentaire et note sous l'Acte Uniforme portant organisation des
procédures collectives d'apurement du passif, in Traité et
actes uniformes commentés et annotés, Juriscope, 3e
éd., 2008, p. 873. Paraphrase tirée de la célèbre
formule burkinabaise relative aux chercheurs selon laquelle :
« Des chercheurs qui cherchent, on en trouve ; des
chercheurs qui trouvent, on en cherche ! »
* 3 Car contrairement au
Professeur François ANOUKAHA qui pense que « comme des
personnes physiques malades, les personnes morales ont droit à un
traitement qui peut leur permettre de guérir », il faut
noter que si après le diagnostique l'état de pourrissement de
l'entreprise est tel qu'on ne peut plus lui administrer quoique ce soit, comme
thérapie, il serait souhaitable de lui faire une euthanasie.
C'est-à-dire prononcer sa liquidation afin d'éviter qu'elle ne
contamine les autres. Comme le déclarait déjà certains
auteurs, pour que le redressement judiciaire soit prononcé, il faut que
l'entreprise soit susceptible d'être sauvée. Cf. POUGOUE (P.G.) et
KALIEU (Y.), L'organisation des procédures collectives d'apurement
du passif OHADA, Coll. Droit Uniforme, PUA, 1999, p. 7.
* 4 Cf. GUILLIEN (R.) et
VINCENT (J.), Lexique des termes juridiques, D., 16e
éd., 2007, p. 279. Ainsi définie, l'entreprise se singulariserait
de la société, laquelle s'entend d'un acte juridique par lequel
deux ou plusieurs personnes décident de mettre en commun des biens ou
leur industrie (activité, compétence) dans le but de partager les
bénéfices, les économies ou les pertes qui pourront en
résulter.
* 5 D'après
l'article 200 de l'AUSCGIE, l'entreprise pourrait aussi prendre fin :
- par l'expiration du temps pour lequel elle aurait
été constituée ;
- par la réalisation ou l'extinction de son
objet ;
- par l'annulation du contrat de
société ;
- par décision des associés aux conditions
prévues pour modifier les statuts ; ou
- pour toute autre cause prévue par les statuts.
* 6 En d'autres termes, la
défaillance d'une entreprise est un fait grave dont les
conséquences peuvent être lourdes non seulement pour les
créanciers et les débiteurs, employeurs, mais aussi et surtout
pour les salariés et l'Etat.
* 7 Cf. KONTCHOP (H.),
Le sort des dirigeants sociaux dans les procédures collectives,
Mémoire de DEA, FSJP, UDs, 2004-2005, p. 2.
* 8 Cf. SAWADOGO (F. M.),
op. cit., p. 873.
* 9 Cf. LEBEL (C.),
L'élaboration du plan de continuation de l'entreprise en
redressement judiciaire, Presses Universitaires d'AIX-MARSEILLE, 2000,
P.15.
* 10 Cf. NGUIHE KANTE (P.),
« Réflexion sur la notion d'entreprise en difficulté
dans l'Acte Uniforme portant Organisation des Procédures Collectives
d'Apurement du Passif OHADA », in Annales de la FSJP de
l'Université de Dschang, PUA, T.5, 2001, pp. 88-103.
* 11 Cf. CHAPUT (Y.),
L'inégalité des débiteurs face aux procédures
collectives, études offertes à E. de LAGRANGE, LGDJ, 1978,
p. 117, spéc., p. 125 cité par NGUIHE KANTE (P.), in article
précité, p. 89.
* 12 Adopté par le
conseil des ministres de l'OHADA à Libreville le 10 avril 1998, il est
entré en vigueur le 1er janvier 1999. S'il est vrai que
l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives
d'apurement du passif régit les entreprises en difficulté, il
faut noter qu'il ne s'agit pas de toutes les entreprises en difficulté.
Sont relativement exclues de la réglementation des procédures
collectives OHADA, la liquidation des entreprises d'assurance et des
établissements de crédit. Les premières sont régies
par le Code CIMA (Conférence Interafricaine des Marchés
d'Assurances). Les seconds quant à eux sont régis par les
conventions de la Commission Bancaire de l'Afrique Centrale (COBAC). La
liquidation des établissements de crédit est régie
à la fois par la convention de la COBAC du 16 Octobre 1990 entrée
en vigueur le 06 juillet 1992, la convention du 17 Janvier 1992 portant
harmonisation de la règlementation bancaire en Afrique Centrale et
l'Acte uniforme sur les procédures collectives OHADA. Les conventions de
la COBAC organisent les procédures de liquidation exclusives de toute
cessation des paiements et subordonnées au retrait d'agrément.
Mais la liquidation peut aussi être faite à la suite de la
dissolution ou de la cessation des paiements des établissements de
crédit. Lire à ce sujet TCHEMALIEU FANSI (M.R.),
L'application des procédures collectives aux personnes morales de
droit privé non commerçantes, Mémoire de DEA, FSJP,
Université de Dschang, 2000 - 2001, pp. 3 et s ; ATSOPZE TAYO (M.),
Le concours des pouvoirs dans la gestion des entreprises en
difficultés, Mémoire de DEA, FSJP, Université de
Dschang, 2002 - 2003, p. 37 et KEMMOGNE (N.),
L'intérêt général en droit des
procédures collectives, Mémoire de DEA, FSJP,
Université de Dschang, 2006 - 2007, p. 3.
* 13 Organisation pour
l'harmonisation en Afrique du Droit des Affaires. L'OHADA compte 17
membres : Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Centrafrique, Comores,
Congo, Côte d'Ivoire, Gabon, Guinée, Guinée Bissau,
Guinée Equatoriale, Mali, Niger, Sénégal, Tchad, Togo,
République Démocratique du Congo (adhésion
définitive au 1er janvier 2011).
* 14 Cette loi
française avait institué la liquidation judiciaire comme une
sorte de faillite aux effets atténués.
* 15 Le décret-loi
du 8 août 1935 avait fait un réaménagement des deux
procédures dont la finalité était la réalisation de
l'actif du débiteur pour apurer son passif.
* 16 Il ressort de cet
article 25 de l'AUPCAP qu'une personne est en cessation de paiement lorsqu'elle
est dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec
son actif disponible.
* 17 Il s'agit pour
monsieur NGUIHE KANTE P. d'une notion juridico-économique qui correspond
au constat de non cessation des paiements et à celui du maintien des
chances de redressement de l'entreprise en difficulté. Cf. NGUIHE KANTE
(P.), op. cit., p. 93. V. également KEM CHEKEM (B.M.),
Entreprises en difficulté et droits des salariés dans la zone
OHADA : le cas du Cameroun, Mémoire de DEA, FSJP, UDs, mars
2004, p. 3.
* 18 Idem, p. 4.
* 19 Cf. DIDIER (P.),
Droit commercial, l'entreprise en difficulté, t. 5, PUF, 1995,
p. 15.
* 20 L'entreprise en tant
qu'instrument de développement économique, pourvoyeuse d'emplois
et de revenus ne doit disparaître que lorsque ses difficultés
s'avèrent insurmontables.
* 21 Il s'agit de la
procédure de règlement préventif destinée à
éviter la cessation des paiements ou la cessation d'activité de
l'entreprise et à permettre l'apurement de son passif au moyen d'un
concordat préventif. Elle est applicable à l'entreprise qui
connaît une situation économique et financière difficile
mais irrémédiablement compromise. Il s'agit d'une mesure
préventive qui permet au débiteur qui est dispensé du
paiement de la plupart de ses dettes de préparer un plan de redressement
de l'entreprise. Voir dans ce sens POUGOUE (P.G.) et KALIEU (Y.), op.
cit., p. 6.
* 22 En plus de ces deux
procédures, il existe la procédure de liquidation des biens. Elle
a pour objectif la réalisation de l'actif du débiteur pour apurer
son passif.
* 23 Le concordat peut
être défini comme une convention conclue entre le débiteur
et ses créanciers, avec homologation de justice destinée à
garantir son sérieux. Il s'agit d'une convention par laquelle le
débiteur présente un plan de règlement du passif et de
redressement de l'entreprise qu'il exécutera une fois remis à la
tête de ses affaires. Le concordat peut prévoir soit un
règlement total mais avec des délais plus ou moins longs, soit un
remboursement partiel immédiat, soit une combinaison de ces deux
procédés.
* 24 Cf. article
1er de la loi française du 25 janvier 1985 qui indiquait
déjà qu'il est institué « une
procédure de redressement judiciaire destinée à permettre
la sauvegarde de l'entreprise, le maintien de l'activité et de l'emploi
et l'apurement du passif ».
* 25 Cf. ANOUKAHA (F.),
op. cit., p. 66.
* 26 Conformément
à l'article 113, al. 1, de l'AUPCAP, la continuation de
l'activité en cas de liquidation des biens ne sera admise par la
juridiction compétente que pour les besoins de la liquidation et
uniquement si cette continuation ne met pas en péril
l'intérêt public ou celui des créanciers.
* 27 Il s'agit de l'Acte
Uniforme portant sur le Droit Commercial Général du 17 avril 1997
modifié par celui adopté le 15 décembre 2010. Ce texte
traite du droit commun de la location-gérance en ses articles 138
à 146.
* 28 Il peut ne pas
accomplir seul tous les actes de gestion. Le propriétaire, personne
physique, peut se faire aider par un gérant salarié et le
propriétaire, personne morale, pourra se faire représenter par
ses organes. Dans tous les cas, il reste le seul maître de l'entreprise
car même s'il n'accomplit pas les actes nécessaires à la
gestion, il assume les risques de l'entreprise.
* 29 Article 114, al. 1, de
l'AUPCAP.
* 30 Article 114, al. 2, de
l'AUPCAP.
* 31 Cf. BLAISE (J. B.),
Droit des affaires : commerçant, concurrence,
distribution, LGDJ, 3e éd., 2002, n° 490.
* 32 Dans cette
hypothèse, le fabricant crée des points de vente qu'il
équipe et qu'il donne en location-gérance à ses
distributeurs. Ce phénomène est récurrent chez les
exploitants de stations-service. Lire à ce sujet NOUNENU (A. B.), La
location-gérance des stations-service, mémoire de
Maîtrise, FSJP, Uds, 1997.
* 33 Un
établissement de crédit achète le fonds et le donne en
location-gérance au commerçant, ne disposant pas de capitaux
suffisants pour s'en offrir, qui rembourse le crédit en versant les
loyers. L'établissement de crédit reste propriétaire du
fonds. A la fin du contrat, le locataire a la faculté d'acheter le fonds
en payant la partie résiduelle du fonds.
* 34 Contrairement à
ce qui se passe en cas de redressement judiciaire et en l'absence de
dispositions particulières, la mise en location-gérance de
l'entreprise en cas de règlement préventif se fait dans les
conditions de droit commun prévues par le nouvel Acte uniforme portant
sur le droit commercial général (articles 138 à 146).
* 35 Elle n'est admise dans
ce cas que pour les modalités de liquidation de l'entreprise
c'est-à-dire dans le but de réaliser les biens du
débiteur, de transformer les matières premières en produit
fini et facilement réalisable.
* 36 Cf. NGUIHE KANTE (P.),
Les techniques de sauvetage des entreprises en difficulté en droit
camerounais, Thèse doctorat 3e cycle, UYII (SOA), 1999,
n° 120.
* 37 Tout d'abord, la
« gérance salariée »,
c'est-à-dire celle qui est confiée par le propriétaire
d'un fonds de commerce à une personne en vertu d'un contrat de travail.
Le gérant salarié, employé du propriétaire, agit
pour le compte de celui-ci ; il a souvent des pouvoirs de
représentation considérables, mais il n'a pas la qualité
de commerçant.
La seconde forme de gérance est la
« gérance mandat » ou
« gérance succursaliste ». Elle est
confiée par le propriétaire d'un fonds de commerce à une
personne en vertu, non d'un contrat de travail, mais d'un contrat de mandat.
C'est par exemple, le cas du gérant de succursales, de magasins
d'alimentation. Il est plus indépendant que le
précédent ; il peut embaucher du personnel pour son compte
et acheter certains produits ; sa rémunération est souvent
indexée sur le chiffre d'affaire ou par un pourcentage sur les
bénéfices réalisés dans l'exploitation ; mais,
agissant pour le compte du commerçant, il n'est pas, tout comme le
gérant salarié, un commerçant.
La troisième forme est la
« gérance vente » qui combine une
location-gérance et une vente ou promesse de vente. C'est une
location-vente du fonds de commerce.
Il y a également le « contrat de
gestion » par lequel une entreprise donne mandat à une
société prestataire de service spécialisé d'assurer
la gestion, non pas d'un fonds de commerce, mais d'un ensemble constituant une
unité économique, moyennant une rémunération.
* 38 Cf. ALILI (S.
M.), « La reprise des entreprises en difficulté dans
l'espace OHADA », in
www.ohada.com, Ohadata
D-06-38., p. 2.
* 39 Cf. SAWADOGO (F.M.),
OHADA, Droit des entreprises en difficultés,
Collection Droit Uniforme Africain, Bruxelles, Bruylant, 2002, p.189.
* 40 Cf. TCHINDE (M.),
La place des organes judiciaires dans l'Acte Uniforme portant Organisation
des Procédures Collectives d'Apurement du Passif, Mémoire de
Maîtrise, FSJP, UDs, 1999, p. 12.
* 41 D'après
l'article 115, al. 1, de l'AUPCAP, lorsque la disparition ou la cessation
d'activité, même provisoire, de l'entreprise serait de nature
à compromettre son redressement ou à causer un trouble grave
à l'économie nationale, régionale ou locale dans la
production des biens et services, la juridiction compétente à la
demande du représentant du Ministère Public, du syndic ou d'un
contrôleur s'il en a été nommé, pourrait autoriser
la conclusion d'un contrat de location-gérance. Aux termes de l'article
27 du même Acte uniforme, le débiteur doit en même temps
qu'il fait la déclaration de cessation des paiements ou, au plus tard,
dans les quinze jours qui suivent celle-ci, déposer une offre de
concordat précisant les mesures et conditions envisagées pour le
redressement de l'entreprise. Cette offre de concordat peut comporter entre
autres, les modalités de continuation de l'entreprise telles que la
demande ou l'octroi de délais et de remise, la cession partielle
d'actif, la cession ou la location-gérance d'une branche
d'activité formant le fonds de commerce, la cession ou la
location-gérance de la totalité de l'entreprise....
* 42 Article 115, al. 2, de
l'AUPCAP. De même, « les conditions de durée
d'exploitation du fonds de commerce par le débiteur pour conclure une
location-gérance ne reçoivent pas application ici. Il s'agit
là d'une importante dérogation aux dispositions des articles 109
et 112 de l'Acte Uniforme relatif au Droit Commercial Général
(articles 141 à 144 du nouvel AUDCG). Le contrat de
location-gérance peut donc être conclu même si le
débiteur n'est pas commerçant depuis au moins deux ans et n'a pas
exploité, pendant une année au moins en qualité de
commerçant, le fonds mis en location-gérance ».
cf. NYAMA (J-M.), OHADA, Droit des Entreprises en Difficultés,
CEFORD, 2004, p. 226.
La décision statuant sur l'autorisation de la
location-gérance doit faire l'objet d'une publicité au registre
du commerce et du crédit mobilier et dans un journal d'annonces
légales (article 115, in fine, de l'AUPCAP). La soumission de
la location-gérance à des conditions strictes permet d'exclure de
ses bénéficiaires, les locataires- gérants qui ne
disposent pas de fonds propres suffisants à même de renflouer
l'entreprise et de relancer ses activités. Elle peut aussi constituer
une mesure permettant d'éviter que le débiteur malhonnête
ne reprenne son entreprise en sous-main ou ne vide la substance de
l'entreprise, autrement dit, de réduire la valeur du fonds au
détriment du paiement des créanciers ou du sauvetage de
l'entreprise.
* 43 Cf. NGUEBOU TOUKAM
(J.), Droit Commercial Général dans l'Acte Uniforme
OHADA, PUA, juillet 1998, p.5.
* 44 La notion de contrat en
cours se trouve ainsi au coeur du droit des contrats et des procédures
collectives, puisque seuls les contrats en cours peuvent faire l'objet d'une
continuation forcée au sens des articles 37 de la loi française
n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la
liquidation judiciaire des entreprises ( JO du 26 janvier 1985, p. 1097),
(BILLET (G.), Le bail commercial pendant la période
d'observation, Mémoire de DEA, Université de LILLE II, 2000,
p. 22. ), 107 et 108 de l'AUPCAP. C'est dire que dans l'intérêt
de l'entreprise, « il est impérieux de permettre une
continuation aussi large que possible des contrats et corrélativement la
paralysie la plus étendue des mécanismes du droit commun
permettant d'aboutir à la rupture du contrat »
(MACORIG-VENIER (F.) « La rupture des contrats », in Le
droit des entreprises en difficulté à l'aube de l'an 2000,
P. A., n°178 du 06 septembre 2000, n° 2 cité par KEUGONG
WATCHO (R.), Le droit commun des contrats face à l'émergence
des droits communautaires africains, Thèse, Université de
Dschang, 2009, P. 142.
* 45 Loi n° 67-563 du
13 juillet relative au règlement judiciaire, la liquidation des biens,
la faillite personnelle et les banqueroutes (JO du 14 juillet 1967, p. 7059).
* 46 Cf. JEANTIN (M.) et LE
CANNU (P.), Droit Commercial : instrument de paiement et de
crédit, entreprises en difficultés, 4e
éd., Dalloz, 1995, n° 646.
* 47 Cf. Derrida, La
notion de contrat en cours à l'ouverture de la procédure de
redressement judiciaire, RJDA 1993, Chronique, p. 399 cité par
HEMMER (A.), la résiliation du bail commercial en cas de
redressement judiciaire du locataire, Mémoire de DEA,
Université Robert Schuman Strasbourg III, 1999-2000, p. 22.
* 48 Cf. BAC (A.),
« De la notion de contrat en cours dans le cadre des
procédures collectives et de ses grandes conséquences, notamment
pour les cautions », in La Semaine juridique, E (2000), 22,
n° 1-2 cité par NGNINTEDEM (J-C.), « Le bail
commercial à l'aune du droit Ohada des entreprises en
difficulté », in Revue de droit uniforme,
UNIDROIT, NS Vol. XIV/2009, p. 181 ;
www.ohada.com, Ohadata D-10-26. p. 8.
* 49 Cf. BRUNETTI-PONS (C.),
« La spécificité du régime des contrats en cours
dans les procédures collectives », Revue trimestriel de
droit commercial (2000), 783 cité par NGNINTEDEM (J-C.), op.
cit., p. 8.
* 50 Cf. RIPERT et ROBLOT,
par DELEBECQUE (P.) et GERMAIN (M.), Traité de droit
commercial, LGDJ, t. 2, 15e éd., 1996, n° 3047 qui
citent des décisions relatives au prêt, à une vente
moyennant rente viagère et à une vente contre une dation en
paiement.
* 51 GUYON (Y.),
Entreprises en difficulté, Economica, 1985, p. 225 ; Revue de droit
bancaire, 1988, obs. F DEKEUWER, p. 136.
* 52 - Pour être en
cours, les contrats liant le débiteur à ses partenaires, à
savoir les fournisseurs, les salariés et les clients, et qui constituent
souvent un élément très important de la richesse de
l'entreprise, doivent être nés à la vie juridique
antérieurement au jugement d'ouverture et ne pas avoir pris fin à
cette date. Les contrats définitivement rompus avant la survenance de la
procédure ne peuvent en effet être poursuivis par le syndic.
- En outre, ces contrats indispensables au fonctionnement de
l'entreprise doivent être en cours d'exécution au jour du jugement
d'ouverture. En effet, lorsque les prestations principales attendues ont
été fournies avant le jugement d'ouverture, le contrat n'est plus
en cours même s'il n'a pas produit tous ses effets.
* 53 Soit par
l'arrivée du terme, soit par la résiliation, soit par la
nullité...
* 54 Le syndic reste
responsable des dettes antérieures.
* 55 Cet article 107
dispose que : « ...la cessation des paiements
déclarée par décision de justice n'est pas une cause de
résolution et toute clause de résolution pour un tel motif est
réputée non écrite ».
* 56 Loi du 25 janvier 1985
portant redressement judiciaire, article 37.
* 57 Cf. KEUGONG WATCHO
(R.), op. cit., p. 144.
* 58 La notion de contrat
conclu intuitu personae trouve son fondement à l'article 2003
du code civil qui dispose que l'obligation de faire ne peut être
acquittée par un tiers contre le gré du créancier lorsque
ce dernier a intérêt qu'elle soit remplie par le débiteur
lui-même. De même, l'article 1110, al. 2, du même code
énonce que l'erreur « n'est point une cause de
nullité lorsqu'elle ne tombe que sur la personne avec laquelle on a
l'intention de contracter, à moins que la considération
de cette personne ne soit la cause principale de la
convention ».
* 59 Sans quoi la masse
aurait la faculté de se substituer à lui dans leur
exécution. Cf. SAWADOGO (F.M.), op. cit., p. 148.
* 60 Ibidem.
* 61 Exception faite bien
sûr du mandat d'intérêt commun qui reste indifférent
à l'ouverture des procédures collectives. En effet, la
jurisprudence prévoit qu'en cas de procédures collectives,
l'administrateur peut maintenir les contrats lorsque l'entreprise en question a
pour activité une représentation professionnelle. Cf. Droit
comparé, Paris, 21 mai 1985, D., 1986, I.R., 8, 2e
espèce, note F. DERRIDA ; Civ. 30 juillet 1912, D.P., 13. I. 81
cité par NDENGOU OLLO (S.), Le contrat d'agence commercial en
OHADA, Mémoire de DEA, FSJP, UDs, 1999-2000, p. 66.
* 62 V. article 291 de
l'AUSCGIE.
* 63 V. article 2003 du
Code Civil ; Cass. Com. 12 février 1972, D. 1979, JP, p.
355 cité par NYAMA (J-M), op. cit., p. 148.
* 64 V. également
AZIBER SEID (A.), Contrats et droit O.H.A.D.A. des procédures
collectives, thèse, Toulouse I, 2007 cité par KEUGONG WATCHO
(R.), op. cit., p. 145.
* 65 Notamment lorsque le
débiteur est simplement assisté comme dans le cadre du
redressement judiciaire.
* 66 L'idée de
l'exclusion des contrats conclus intuitu personae du domaine de la
continuation des contrats en cours se justifie aussi dans la procédure
de liquidation des biens parce que dans celle-ci, il y a effectivement un
changement de la personne du cocontractant puisque le débiteur
n'intervient aucunement dans la procédure
* 67 Cf. NYAMA (J-M.),
op. cit. p. 148.
* 68 Cass. civ. 31 juillet
1912, D. 1913. 1. 81. cité par NYAMA (J-M.), op. cit. p.
148.
* 69 Cf. BILLET (G.),
op. cit., p. 15.
* 70 Cf. TERRE (F.), R.J.P.
com., 1991, p. 1, Conférence donnée au tribunal de commerce de
Paris par l'Association droit et commerce le 23 octobre 1989 ; cité
par BILLET ( G.), op. cit., p. 15.
* 71 Cf. MARTIN (D.), La
sécurité contractuelle à l'épreuve du redressement
judiciaire, J.C.P, 1986, éd. N, I, p. 80 ;
Idem.
* 72 Avec le nouvel AUDCG
adopté le 15 décembre 2010, le bail commercial est devenu le bail
à usage professionnel.
* 73 Le fonds de commerce
se définit comme un ensemble des éléments mobiliers
corporels (matériel, outillage, marchandises) et incorporels (droit au
bail, nom, enseigne) qu'un commerçant ou un industriel groupe organise
en vue de la recherche d'une clientèle, et qui constitue une
entité juridique distincte des éléments qui le composent.
Cf. GUILLIEN (R.) et VINCENT (J.), op. cit., p. 311.
* 74 La clientèle
est un ensemble de personnes, appelées clients, qui sont en relations
d'affaires avec un professionnel. Si ce professionnel est un commerçant,
la clientèle est dite commerciale. S'il exerce une profession civile et
en particulier libérale (avocat, médecin, etc.), il s'agit d'une
clientèle civile. Cf. GUILLIEN (R.) et VINCENT (J.), op. cit. ,
p. 124.
* 75 Que ce soit l'absence
de déchéance de terme, l'arrêt des poursuites individuelles
et du cours des intérêts, l'interdiction des paiements
antérieurs, la paralysie de l'exception d'inexécution, toutes ces
dispositions touchent le bailleur comme les autres créanciers de
l'entreprise.
* 76 Cf. KEUGONG WATCHO
(R.), op. cit., p. 143.
* 77 Ces engagements
n'ouvrant droit au profit du bailleur qu'après la déclaration au
passif, il sera astreint comme les autres créanciers antérieurs
à la déclaration de créances relatives aux
échéances antérieures au jugement d'ouverture.
* 78 Article 117 de
l'AUPCAP.
* 79 Cf. KEUGONG WATCHO
(R.), op. cit., p. 147.
* 80 Cf. NYAMA (J-M.),
op. cit., p. 150.
* 81 Ibidem.
* 82 Ibidem.
* 83 Cf. HOUIN (R.) et
PEDAMON (M.), Droit commercial, 9e éd., D., 1990, p.
747.
* 84 Cf. ROBLOT (R.),
Traité élémentaire de droit commercial,
13e éd., t II, n° 2635 cité par HOUIN (R.) et
PEDAMON (M.), op. cit., p. 798.
* 85 Cf. GUILLIEN (R.) et
VINCENT (J.), op. cit., p. 150.
* 86 Le concessionnaire est
un commerçant indépendant qui achète les produits du
concédant pour les revendre à ses propres clients. Il est
rémunéré par une marge bénéficiaire, non pas
par une commission.
* 87 Le concessionnaire
s'engage à ne pas vendre de produits similaires ou concurrents de ceux
du concédant. Il s'engage à ne s'approvisionner qu'auprès
de celui-ci pour la gamme de produits couverts par la concession.
* 88 Le concédant
s'engage à fournir exclusivement le concessionnaire en produits couverts
par la concession dans le secteur géographique qui lui est
attribué.
* 89 Il faut distinguer ce
contrat de la franchise elle-même car celle-ci est un ensemble de droits
de propriété industrielle portant sur des marques, un nom
commercial ou une enseigne, des desseins et modèles, ou encore un
savoir-faire, destinés à être exploités pour la
revente de produits ou la prestation de services à des utilisateurs
finaux. Dans la pratique, l'on distingue la franchise de fabrication, la
franchise de services et la franchise de distribution. Voir dans ce sens BLAISE
(J.-B.), op. cit., p. 565.
* 90 Cf. GUILLIEN (R.) et
VINCENT (J.), op. cit., p. 319.
* 91 Cf. NGUEBOU TOUKAM
(J.), Cours de droit commercial général, Cameroon
University Press, 2004, p. 16.
* 92 L'avenant est une
modification apportée à un contrat antérieur ou à
un contrat type. Il est le document constatant cette modification. Cf. GUILLIEN
(R.) et VINCENT (J.), op. cit., p. 72.
* 93 Cf. COZIAN (M.),
Les grands principes de la fiscalité des entreprises,
3e éd., Litec, 1984, p. 84.
* 94 L'utilisation dans le
texte de l'adverbe " notamment " laisse penser que
l'énumération de l'article 42, al. 1 (a), n'a pas un
caractère limitatif. C'est pourquoi, outre les cas
spécifiés dans cet alinéa, la jurisprudence vise toute
hypothèse où une entreprise est transférée,
cédée, ou a simplement changé de direction. Les contrats
doivent se poursuivre dès lors que la même entreprise continue
à fonctionner sous une direction nouvelle. De ce fait, le Code du
Travail ainsi que de nombreux textes à l'instar de la Déclaration
Universelle des Droits de l'Homme (DUDH) de 1948, de la Charte Africaine des
Droits de l'Homme et des Peuples (CADHP) et la Constitution camerounaise
proclament le droit à l'emploi comme un droit fondamental de l'homme. Il
s'agit d'une part, du droit d'accès à l'emploi et d'autre part,
du droit à la conservation de cet emploi.
* 95 Le contrat de travail
est la convention par laquelle une personne, le salarié, met son
activité professionnelle à la disposition d'une autre personne,
l'employeur ou patron, qui lui verse en contrepartie un salaire et a
autorité sur elle. Cf. GUILLIEN (R.) et VINCENT (J.), op. cit.,
p. 182.
* 96 Ayant donc pour but de
sauvegarder au maximum l'emploi et de garantir aux employés la
stabilité de l'emploi, ce texte constitue une dérogation au
principe de l'effet relatif des conventions en vertu duquel un tiers ne peut
être lié par un contrat qu'il n'a pas conclu.
Cette règle est également en contradiction avec
la tendance actuelle de la flexibilisation et de la contractualisation des
normes régissant le monde du travail. Toutefois, il n'en constitue pas
moins une pièce maîtresse dans la politique de stabilité de
l'emploi des travailleurs. Toutefois, il ne saurait être le cas en cas
de substitution de cocontractant ou de cession de contrat.
* 97 Cf. VOISSET (M.),
Droit du travail et crise, Dr. Soc., n° 6 du 6 juin 1980, p. 287
cité par ALILI (S.M.), op. cit., p. 15.
* 98 Cf. ALILI (S.M.),
op. cit., p. 15.
* 99 Cf. JEAMMAND (A.), La
notion de licenciement pour cause économique, Dr. Soc., n°
spécial Mars 1981, p. 267 ; LYON-CAEN (G.) et PELISSIER (J.),
Les grands arrêts du droit du travail, 2éme éd.,
Sirey 1980, p. 347 et s.
* 100 Il s'agit entre
autres de la réduction des heures de travail, du travail par roulement,
du travail à temps partiel et du chômage technique. Voir article
40, al. 3 du Code du Travail.
* 101 Cf. MONKAM (C.),
La condition juridique du salarié dans les procédures
collectives, mémoire de DEA, Université de Douala, FSJP,
2004-2005, p. 22.
* 102 Cf. KEM CHEKEM
(B.M.), op. cit., p 30.
* 103 Mais elle peut
entraîner la modification du contrat de travail et alors, elle suppose le
respect de la procédure applicable en la matière.
* 104 L'article 78 du Code
du travail gabonais et 71 du Code du travail togolais dispose en des termes
communs que : « S'il survient une
modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par
succession, vente, fusion, transformation de fonds, mise en
société, tous les contrats en cours au jour de la modification
subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise. Leur
résiliation ne peut intervenir que dans les formes et aux conditions
prévues par la présente section.
La cessation de l'entreprise, sauf le cas de force
majeure, ne dispense pas l'employeur de respecter les règles
établies à ladite section. La faillite et la liquidation
judiciaire ne sont pas considérées comme des cas de force
majeure.
Les parties ne peuvent renoncer à l'avance au droit
éventuel de demander des dommages-intérêts en vertu des
dispositions ci-dessus ».
L'article L 66, al. 1, du Code du travail
sénégalais quant à lui, va un peu loin et dispose
que : « S'il survient une modification dans la
situation juridique de l'employeur, notamment par succession, reprise sous une
nouvelle appellation, vente, fusion, transformation de fonds, mise en
société, tous les contrats de travail en cours au jour de la
modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de
l'entreprise ».
Cette règle prend le contre-pied du droit commun des
contrats qui pose le principe selon lequel le contrat légalement
formé crée entre les parties un lien irrévocable. Pour
plus de détails, cf. KANTE (A.), « Les transferts de
salariés en droit du travail sénégalais »,
in les Nouvelles Annales Africaines, Revue de la FSJP, n° 2/08,
p. 385 et s.
* 105 Voir TPI Ydé,
chambre sociale, jugement n° 93 du 13 juillet 1994, aff. Neme Ngono Martin
contre COOPLACA, note ANAZETPOUO Zakari, Revue des sciences Juridiques
Africaines, n° 2, 2001. Voir également C.A du littoral,
section sociale, arrêt n° 376/S du 4 juillet 1997, aff. Principal du
collège LELE contre Ngoh Simon Colbert.
* 106 Cf. article 35 de
l'avant projet de l'Acte uniforme relatif au droit du travail.
* 107 Cf. MONKAM (C.),
op. cit., p. 22.
* 108 Article 61, al. 1,
du C.T.
* 109 Cf. LYON-CAEN (G.),
Les salariés, T. 2., Dalloz, 2e éd., Paris,
1981 cité par ANAZETPOUO (Z.), op. cit., p. 119.
* 110 Le salaire de base
est le salaire dû à un travailleur qui a rendu un service ou devra
le rendre. C'est la juste contrepartie du travail fourni ou à
fournir.
* 111 On distingue les
accessoires en espèce et les accessoires en nature. Il s'agit des primes
et des différentes indemnités liées au travail.
* 112 TPI Bonanjo,
jugement n° 126/S du 8 mars 2002, aff. Tagne Joseph Talla contre
Sté PLACAM cité par MONKAM (C.), op. cit., p. 19.
* 113 Cour d'Appel de
l'Ouest à Bafoussam, arrêt n° 29/Soc du 2 décembre
1999, aff. TEKAM Norbert Rodrigue contre Sté G.P.O., Ibidem.
* 114 Cf. KEM CHEKEM
(B.M.), op. cit., p 29.
* 115 Salaire minimum
interprofessionnel garanti.
* 116 Cf. ANAZETPOUO (Z.),
op. cit., p. 120.
* 117 Au Cameroun, il est
fixé depuis le décret n° 2008/2115/PM du 24 juin 2008
à 28216 francs par mois et pour tout secteur d'activité.
* 118 Notamment les primes
d'ancienneté, de rendement, d'assiduité, de risque et de
technicité.
* 119 Notamment de
transport, de fonction, de représentation.
* 120 Tels l'eau, la
nourriture, le logement, l'électricité.
* 121 La procédure
de dénonciation de l'usage doit être régulière. Le
locataire-gérant doit préalablement procéder à une
information collective par la voie des institutions représentatives du
personnel s'il en existe ou, à défaut, par voie de note de
service affichée dans l'entreprise. Il doit aussi procéder
à une information préalable individuelle des salariés
concernés au moyen d'un courrier individualisé. Cf. ALILI (S.M.),
op. cit., p. 16.
* 122 Article 40, al. 2,
du Code du travail camerounais.
* 123 Cf. POUGOUE (P. G.),
op. cit., p. 78.
* 124 Cf. ISSA-SAYEGH (J)
et LOHOUES-OBLES (J), OHADA, Harmonisation du droit des affaires,
Collection Droit Uniforme Africain, Bruxelles, Bruylant, 2002, p. 54.
* 125 Cf. l'article L.
621-37 du Code de commerce français car contrairement à ce texte,
l'art 110, al. 1, n'a pas pris en considération le caractère
d'inévitabilité qui semble être d'une importance
particulière. Il serait vraiment judicieux qu'en plus de l'urgence et de
l'indispensabilité, les licenciements pour motif économique
présentent une certaine inévitabilité.
* 126 Cf. TCHAKOUA (J.M.),
« Le licenciement pour motif économique en droit
camerounais », in Revue africaine des sciences juridiques,
UYII-FSJP, vol. 2, n° 1, 2004, p. 205.
* 127 Ibidem.
* 128 Ibidem.
* 129 Il s'agit ici, en
l'absence de règles propres applicables au locataire-gérant,
d'une transposition des dispositions de l'art 110 de l'AUPCAP imposées
au Syndic lorsqu'il est appelé à procéder aux
licenciements pour motif économique.
* 130 Article 110, al. 3,
de l'AUPCAP.
* 131 Le code du travail
camerounais dispose en son article 122, al. 1 et 2, que :
« des délégués du personnel sont
obligatoirement élus dans les établissements installés sur
le territoire national, quelle qu'en soit la nature et quel que soit
l'employeur, public ou privé, laïc ou religieux, civil ou
militaire, où sont habituellement occupés au moins vingt (20)
travailleurs.
Lorsque le chef d'établissement a la
qualité de travailleur, il fait partie de l'effectif à prendre en
considération ». Contrairement au législateur
camerounais du travail, son homologue gabonais est plus rigide. En effet,
l'article 291 de la loi no 3/94 du 21 novembre 1994 portant Code du travail
gabonais modifiée par la loi n°12/2000 du 12 Octobre 2000
décide que : « Il est institué des
délégués du personnel dans tous les établissements
occupant habituellement plus de dix salariés ».
* 132 L'article 3 de
l'arrêté n° 021/MTPS/SG/CJ du 26 mai 1993 fixant les
modalités de licenciement pour motif économique dispose
que : « (1) conformément à l'al. 6 de
l'article 40 du Code du Travail, en vue de recueillir leurs suggestions,
l'employeur doit communiquer par écrit aux délégués
du personnel la liste des travailleurs qu'il se propose de licencier. Les
délégués sont tenus de faire parvenir leur réponse
à l'employeur dans un délai de huit (08) jours.
(2) L'employeur doit autant que possible, tenir compte de
l'avis des délégués du personnel. Le silence de ces
derniers vaut approbation.
(3) Au cas où un licenciement pour motif
économique est envisagé dans un établissement où il
n'existe pas de délégués du personnel, l'employeur doit
saisir l'Inspecteur du Travail du ressort aux fins de faire désigner par
celui-ci des représentants des travailleurs.
(4) L'Inspecteur du Travail doit procéder à
cette désignation dans un délai de huit (08) jours, après
consultation des travailleurs de l'établissement.
(5) Les représentants ainsi désignés
ne peuvent se prévaloir des prérogatives attachées aux
fonctions de délégué du personnel telles que
prévues à l'article 40, al. 6, du Code du
Travail ».
* 133 Cf. l'al. 4 de
l'article 110 de l'AUPCAP.
* 134 Cf. TCHAKOUA (J.M.),
op. cit., p. 206.
* 135 L'article 40, al. 7,
du C.T. dispose que : « les délégués du
personnel ne peuvent être licenciés que si leur emploi est
supprimé et après autorisation de l'inspecteur du travail du
ressort ».
* 136 Article 39, al. 1,
de l'AUPCAP ; v. également l'article L. 621-12 du Code de commerce
français.
* 137 Cf. DERRIDA (F.),
GODE (P.) et SORTAIS (J.P.), Redressement et liquidation judiciaires des
entreprises, D., Sirey, 2e éd., 1989, p. 28.
* 138 Cass., soc. 18 juin
1997 : Dr. soc., 1997, 983, obs. Vatinet ; RJS, 1997, 605.
* 139 Voir
également dans ce sens TCHAKOUA (J.M.), op. cit., p. 206.
* 140 Article 40, al. 5,
du C.T.
* 141 Ce délais est
d'un an au Gabon (article 60 CT gabonais) et de 6 mois au TOGO (article 75, al.
1er , CT togolais).
* 142 Article 115, al. 5,
de l'AUPCAP.
* 143 Article 111, al. 1
et 2, de l'AUPCAP. Il faut noter que devant cette juridiction,
« ne sont pas applicables les règles particulières
de composition des juridictions statuant en matière sociale. Le
très bref délai d'intervention de la décision du juge
permet de penser que ne sont pas également applicables sur le
préalable de conciliation devant l'inspecteur du travail, encore que
celui-ci ait déjà été informé de la
procédure du licenciement par les soins de l'employeur ».
Cf. TCHAKOUA (J.M.), op. cit., p. 207.
* 144 GOMEZ (J-R.),
OHADA, Entreprises en difficulté : Lecture de l'Acte Uniforme de
l'OHADA portant organisation des procédures collectives d'apurement du
passif à la lumière du droit français, éd.
Bajag-Meri, 2003, p. 348. Pour cet auteur, « le pourvoi en cassation,
n'étant pas mentionné par l'article 216 de l'Acte uniforme sur
les procédures collectives, est donc exclu » ; NYAMA
(J.-M.), op. cit., p. 99. Pour celui-ci, « aucune
disposition particulière n'étant édictée par l'Acte
uniforme sur les voies de recours extraordinaires, il y a lieu d'appliquer ici
les règles de droit commun interne, d'après les formes et
délais applicables à ce mode de recours ».
* 145 Cet article dispose
que : « ...saisie par la voie du recours en cassation, la
Cour se prononce sur les décisions rendues par les juridictions d'Appel
des États Parties dans toutes les affaires soulevant des questions
relatives à l'application des Actes uniformes et des règlements
prévus au présent traité à l'exception des
décisions appliquant des sanctions pénales.
Elle se prononce dans les mêmes conditions non
susceptibles d'appel rendues par toute Juridiction des États Parties
dans les mêmes contentieux.
En cas de cassation, elle évoque et statue sur le
fond ».
* 146 Pour un raisonnement
identique, cf. TCHAKOUA (J.M.), op. cit., p. 207. Pour cet auteur,
« il faudrait se rendre compte que certains points du
contrôle pouvant être effectué, par exemple le respect des
dispositions sur l'ordre de licenciement, ne relèvent pas exclusivement
de l'Acte uniforme. Cette situation pourrait causer des difficultés en
termes de répartition du contentieux entre la CCJA et la Cour
suprême. La solution du recours devant la CCJA doit être maintenue
même si on reproche au juge la violation d'une disposition nationale dont
l'Acte uniforme prévoit l'application. La disposition nationale
s'applique ici dans un dispositif qui est encadré par l'acte uniforme et
mérite d'être interprétée, le cas
échéant, dans l'esprit du texte communautaire dont le
fidèle interprète ne peut être que la
CCJA ». Cf. également KEMEUGNE KOUAM (G.), Les
voies de recours dans les procédures collectives d'apurement du passif
de l'OHADA, mémoire de DEA, FSJP, Uds, 2006-2007, P. 122-125, pour
qui, « Lorsque le législateur de l'OHADA des procédures
collectives arrête une liste de décisions pour lesquelles il
règlemente, de façon spécifique, certaines voies de
recours, sans se soucier du pourvoi en cassation qu'il ne supprime pas non
plus, il s'agit d'une hypothèse d'oubli ».
* 147 Cf. SAWADOGO (F.M.),
Commentaire et notes sous l'Acte Uniforme portant organisation des
procédures collectives d'apurement du passif, op. cit., p.
885 ; SAWADOGO (F.M.), OHADA, Droit des entreprises en
difficulté, op. cit., p. 3.
* 148 Ibidem.
* 149 Cf. MBONJI BILLE
(G.C.), « Les créances nées de la poursuite de
l'activité », in L'effectivité du droit de
l'OHADA, Collection droit uniforme, 2006, p. 164.
* 150 Cf. SAWADOGO (F.M.),
Commentaire et notes sous l'Acte Uniforme portant organisation des
procédures collectives d'apurement du passif, op. cit., p.
977.
* 151 Cf. NGUIHE KANTE
(P.), thèse précitée, n° 182. Il est à noter
que le dessaisissement ne s'applique pas à une nouvelle activité
professionnelle du débiteur. Celui-ci est libre de se faire employer et
même de travailler pour le compte du locataire-gérant.
* 152 Car d'après
l'article 117 de l'AUPCAP, « Toutes les dettes nées
régulièrement, après la décision d'ouverture, de la
continuation de l'activité et de toute activité
régulière du débiteur ou du syndic, sont des
créances contre la masse, sauf celles nées de l'exploitation du
locataire-gérant qui restent exclusivement à sa charge sans
solidarité avec le propriétaire du fonds ».
* 153 D'une façon
générale, les créanciers d'une procédure collective
d'apurement du passif sont classés en trois catégories pour le
traitement du paiement de leurs créances : les créanciers
dans la masse, les créanciers de ou contre la masse, et les
créanciers hors de la masse.
Sont créanciers dans la masse, ceux dont la
créance est née avant le jugement d'ouverture de la
procédure collective (art. 72 al. 2 de l'AUPCAP). C'est à ces
créanciers que le débiteur demande, dans ses propositions
concordataires, de consentir des remises et des délais pour lui
permettre de redresser son entreprise. Ce sont eux qui recevront la
distribution des deniers résultant de la location-gérance de
l'entreprise.
Sont créanciers contre ou de la masse, les
créanciers dont la créance est née
régulièrement après l'ouverture de la procédure
collective autorisant la poursuite de l'activité. Ces créanciers,
compte tenu du risque qu'ils courent en faisant crédit à une
entreprise déjà déclarée en cessation des
paiements, bénéficient de l'avantage de passer avant les
créanciers munis d'un privilège général et les
créanciers chirographaires. Malheureusement, tel n'est pas le cas
lorsque ces créances sont plutôt issues de la
location-gérance car il ressort des dispositions de l'article 117 de
l'AUPCAP que le passif découlant de l'exploitation du fonds reste
à la charge exclusive du locataire-gérant.
Enfin, sont dits créanciers hors de la masse, ceux
dont la créance est née d'une activité
irrégulière du débiteur soit avant le jugement, soit
après. Il s'agit là des créanciers
« orphelin exhérédé » de la
procédure collective car ils ne peuvent absolument pas prendre part
à la procédure collective dont ils sont exclus jusqu'à sa
clôture. Cf. ISSA-SAYEGH (J.), « Le sort des travailleurs dans
les entreprises en difficulté droit OHADA »,
www.Ohada.com , Ohadata D-09-41, p.
9 ; MBONJI BILLE (G.C.), op. cit., p. 165 et s.
* 154 La
location-gérance y était simplement définie comme une
convention par laquelle le propriétaire du fonds de commerce, personne
physique ou morale, en concède la location à un gérant,
personne physique ou morale, qui l'exploite à ses risques et
périls.
* 155 Cf. SANTOS (A. P.),
Commentaire et notes sous l'Acte uniforme relatif au droit commercial
général, in traité et actes uniformes commentés et
annotés, Juriscope, 3e éd., 2008, p. 256.
* 156 Article 138, al. 4,
in fine, du nouvel AUDCG.
* 157 Cf. LAMBERT (G.),
Cours de droit civil, 3e année, éd.
Maisonneuve, 1974 cité par CAYRON (J.), La location de biens
meubles, Presses Universitaires d'Aix-Marseille, 1999, p. 63.
* 158 Article 115, al. 3,
de l'AUPCAP. Par ces dispositions, le législateur OHADA voudrait
protéger l'entreprise ou le fonds de commerce des possibles abus des
locataires-gérants. En effet, ces derniers ne disposant pas toujours de
fonds propres suffisants, peuvent être tentés de diminuer la
consistance du fonds au détriment de la survie de l'entreprise, des
salariés et des créanciers. V. dans ce sens ALILI (S.), article
précité, p. 3. L'article 115 de l'AUPCAP se rapproche
certainement de l'article 144 du nouvel AUDCG qui dispose que : «
Les dettes du loueur du fonds donné en location-gérance
peuvent être déclarées immédiatement exigibles par
la juridiction compétente si elle estime que la location-gérance
met en péril leur recouvrement ».
* 159 Cf. C.Cass., 19
décembre 1971, JCP, 1972, n° 17284, note DELPECH.
* 160 Cf. SANTOS (A.P.) et
TOE (J. Y.), op. cit., p. 180 et s.
* 161 Cf. SANTOS (A.P.) et
TOE (J. Y.), op. cit., p. 384 et s.
* 162 Il s'agit des
méthodes de détermination du montant de la redevance
proposées par la société française de transaction
et d'affaires négociées (STAN) sur
www.stan.fr.
* 163 V. dans ce sens
SANTOS (A.P.) et TOE (J. Y.), op. cit., p. 385.
* 164 A l'instar de la
société française de transaction et d'affaires
négociées (STAN),
www.stan.fr .
* 165 Article 45 et 116,
al. 1, de l'AUPCAP.
* 166 Il est défini
comme le chiffre utilisé en économie pour mesurer les variations
d'une quantité. Cf. GUILLIEN (R.) et VINCENT (J.), op. cit., p.
352.
* 167 V. dans ce sens
ALILI (S. M.), op. cit., p. 4 pour qui, « le
locataire-gérant à qui est confié la gestion d'une
entreprise en redressement judiciaire a en principe deux ans pour s'accommoder
à l'entreprise et pour opérer les investissements propices
à la rentabilité de l'affaire. Il doit donc pouvoir jouir au
terme du contrat du fruit de ses efforts. Or il se trouve que ce contrat est
conclu lorsque le loueur est en redressement judiciaire. Dans ce cas, il est
généralement prévu que la location-gérance est
conclue pour la durée du redressement judiciaire. Or celui-ci prend
généralement fin, soit du fait de sa conversion en liquidation
des biens, soit en raison de l'homologation du concordat par le tribunal, soit
par le paiement du passif. Cette dernière hypothèse est toutefois
rare.
Si le débiteur ne présente pas un concordat
sérieux, ou ne l'obtient pas, ou si le concordat est annulé ou
résolu, le redressement judiciaire est converti en liquidation des biens
(Article 145 de l'AUPC).
La location-gérance prend alors fin et le syndic
est tenu de liquider l'entreprise pour procéder à la
répartition entre les créanciers. Bien que des
aménagements de courte durée soient possibles, il ne reste au
repreneur, qui veut continuer d'exploiter qu'une solution : le rachat du fonds.
Ce qui présente forcement un coût important qu'il ne s'attendait
à investir de sitôt.
Dans la seconde hypothèse, à savoir celle
où le jugement d'homologation du concordat est passé en force de
chose jugée, le débiteur recouvre la libre administration et
disposition de ses biens. Á défaut d'accord préalable avec
ce même débiteur, le locataire-gérant peut alors être
évincé. On peut toutefois penser que cette possibilité
d'éviction reste théorique puisque tout se fait sous le
contrôle du tribunal. Ce qui n'exclut, malheureusement, pas les risques
financiers qui pèsent sur le locataire-gérant. Á cet
effet, le repreneur se doit d'évaluer les sommes qu'il pourrait
être amené à perdre, tant en ce qui concerne par exemple le
personnel repris que pour les fournisseurs de l'entreprise désormais
méfiants ».
* 168 Ces
intérêts doivent être payés en même temps que
le principal.
* 169 C'est-à-dire
la période qui va de la cessation des paiements jusqu'au jour du
prononcé du jugement d'ouverture du redressement judiciaire ou de la
liquidation de bien (article 67, In finé, de l'AUPCAP).
* 170 Il y a
connexité entre deux dettes lorsqu'elles sont nées d'un
même rapport de droit. L'article 68-4° de l'Acte uniforme OHADA
relatif aux procédures collectives déclare inopposable de droit,
s'il est fait pendant la période suspecte, « tout paiement
de dettes échues, fait autrement qu'en espèces, effet de
commerce, virement, prélèvement, carte de paiement ou de
crédit ou compensation légale, judiciaire ou conventionnelle de
dettes ayant un lien de connexité entre elles ou tout autre mode normal
de paiement ».
De plus, il ressort des dispositions des articles 68, 102,
103 et 109 de l'AUPCAP, qu'après le jugement d'ouverture, la
compensation doit être largement admise dès qu'il y a
connexité.
* 171 C'est parce que les
obligations réciproques prennent leur source dans un tel contrat
qu'elles sont considérées comme connexes.
* 172 On cite toujours
l'exemple de l'assureur qui peut compenser l'indemnité d'assurance dont
il est tenu avec les primes que l'assuré reste à lui devoir (Civ.
25 mai 1943, D.C. 1944. 25 ; note A. Besson ; Com. 15 janv. 1968,
Bull. civ. IV, n° 20, p. 16; Civ. 13 fèvrier 1979, Bull. civ. 1,
n° 58, p. 48).
* 173 Com. 2 juillet 1973,
D. 1974. 427, note J. Ghestin.
* 174 Com. 10 mars 1987,
Bull. civ. IV, n° 66, p. 50.
* 175 Com. 9 nov. 1982,
Bull. civ. Iv, n° 343, p. 290; D. 1983. 466, note A. Honorat; Rev. trim.
Dr. Civ. 1983. 356, obs. Ph. Rémy.
* 176 Articles 6 à
12 et 138, al.3, in fine du nouvel AUDCG ; 194 à 215 de
l'AUPCAP.
* 177 Par héritage
ou par délégation.
* 178 On entend par acte
instrumentaire, un écrit destiné à prouver l'existence
d'une situation juridique, cette situation pouvant résulter d'un acte ou
d'un fait juridique.
* 179 Cf. MATTOUT
(J-L.): « Le netting », in Rev. jur. Com., nov. 1989,
n° special: La trésorerie et le financement des entreprises, p.
75.
* 180 Article 76 de
l'AUPCAP.
* 181 Cf. GUILLIEN (R.) et
VINCENT (J.), op. cit., p. 400.
* 182 L'article 77 de
l'AUPCAP énonce que « Quelle que soit la procédure,
la décision d'ouverture arrête, à l'égard de la
masse seulement, le cours des intérêts légaux et
conventionnels, de tous intérêts et majorations de retard de
toutes les créances, qu'elles soient ou non garanties par une
sûreté. Toutefois, s'agissant d'intérêts
résultant de contrats de prêt conclus pour une durée
égale ou supérieure à un an ou de contrats assortis d'un
paiement différé d'un an ou plus, le cours des
intérêts se poursuit si la décision a ouvert une
procédure de redressement judiciaire ».
* 183 RTD Civ., 1988, p.
138.
* 184 Tandis que la
célérité désigne l'absence de perte de temps, la
rapidité dans le déroulement de la procédure, la
sécurité juridique s'analyse plutôt en un besoin de
stabilité minimale des règles de droit et de situations
juridiques.
* 185 Article 166 de
l'AUPCAP.
* 186 Article 167 de
l'AUPCAP.
* 187 L'union est la
solution qui consiste dans la vente des biens du débiteur en liquidation
des biens avec répartition des sommes entre les créanciers, sans
que les biens à venir soient libérés du solde non couvert
par ces distributions. V. article 146 de l'AUPCAP. Cf. également,
SAWADOGO (F.M.), OHADA, droit des entreprises en difficulté,
op. cit., p. 271 ; GOMEZ (J-R.), op. cit., p. 350.
* 188 La clôture des
opérations pour insuffisance d'actif n'est pas une véritable
clôture de la liquidation des biens. Elle est seulement une mesure
provisoire rendue nécessaire par des circonstances, lorsque, dès
le début ou en cours de procédure, les fonds manquent pour
couvrir les frais d'administration de la liquidation des biens. V. dans ce sens
NYAMA (J-M.), op. cit., p. 279.
* 189 Cf. GOMEZ (J-R.),
op. cit., p. 390.
* 190 Cet article 40 de la
loi française de 1985 est le pendant de l'article 117 de l'AUPCAP.
* 191 Cf. JEANTIN (M.), et
LE CANNU (P.), Droit Commercial : instrument de paiement et de
crédit, entreprises en difficultés, op. cit., p.
445.
* 192 Cf. article 117,
in fine, de l'AUPCAP.
* 193 Pour plus amples
explications, cf. ISSA-SAYEGH (J.), commentaire et note sous l'Acte
uniforme portant organisation des sûretés, in Traité
et actes uniformes commentés et annotés, 3e
éd., Juriscope, 2008, p. 739 et s. ; SAWADOGO (F.M.), commentaire
précité, p. 1002 et s.
* 194 A ce sujet, voir
Cass. com. 7 juin 1988, BC IV, n°191, p.133.
* 195 Cf. JEANTIN (M.) et
LE CANNU (P.), op. cit., p. 415.
* 196 Les garanties
réelles ont pour but l'affectation d'un bien à la garantie de la
redevance. Elles consistent dans le droit du loueur de se faire payer, par
préférence, sur le prix de réalisation du bien meuble ou
immeuble à la garantie de ses obligations par le
locataire-gérant. Les garanties personnelles permettent quant à
elles au locataire-gérant d'offrir un second débiteur pour
réduire les risques de sa défaillance, de son
insolvabilité. Leur simplicité de constitution, leur souplesse de
réalisation et leur faible coût de constitution jouent en faveur
de leur grande utilisation. Cf. KALIEU ELONGO (Y.), Les
sûretés personnelles dans l'espace OHADA, Collection
Vademecum, PUA, 2006, p. 7 ; MARTOR (B.), « Comparaison de deux
sûretés personnelles : le cautionnement et la lettre de
garantie », in JCP, Cahiers de Droit de l'Entreprise n°
5, 2004, p. 21.
* 197 KAMTO (M.),
préface de l'ouvrage des magistrats EYIKE-VIEUX et YOUSSOUFA (B.),
Le contentieux pénal de la presse et de la communication
audiovisuelle au Cameroun, PUA, Yaoundé, octobre 2004.
* 198 La
défaillance prouvée du débiteur principal est un
préalable à la poursuite de la caution. D'après l'article
13 de l'AUS, la caution n'est tenue de payer la dette qu'en cas de non paiement
du débiteur. C'est la conséquence du caractère accessoire
et subsidiaire du contrat de cautionnement. La constatation de cette
défaillance résulte d'une mise en demeure de payer restée
sans effet. La mise en demeure permet de constater officiellement et
formellement, le défaut d'exécution de son obligation par le
débiteur. En même temps, le débiteur bailleur,
assisté du syndic, exprime par là sa volonté d'obtenir
exécution. De ce fait, elle a été considérée
comme une sommation, le dernier avertissement avant que ne soit mise en oeuvre
une quelconque sanction. Lire à ce sujet KALIEU ELONGO (Y.), op.
cit., p. 36.
* 199 Cf. NGUEBOU TOUKAM,
op. cit., p. 178.
* 200 Cf. KALIEU ELONGO
(Y.), op. cit., 2006, p. 9.
* 201 Article 20 du nouvel
AUS.
* 202 Cf. KALIEU ELONGO
(Y.), op. cit., p. 15.
* 203 Ibidem.
* 204 V. dans ce sens
KALIEU (Y.), « La mention manuscrite dans le cautionnement
OHADA », in Juridis périodique,
juillet-août-septembre 2003, p. 109 et s. ;
www.ohada.com, Ohadata D-03-02.
* 205 Article 21 de l'AUS
et 32 du nouvel AUS.
* 206 Article 24 de l'AUS
et 35 du nouvel AUS.
* 207 Cf. KALIEU ELONGO
(Y.), Les sûretés personnelles dans l'espace OHADA,
op. cit., p. 38.
* 208 V. dans ce sens MOUMI
de BAKONDJI (J.), « Banques, crédits et dispositifs
sécuritaires du droit OHADA », in
L'effectivité du droit de l'OHADA, op. cit., p. 174 et
s.
* 209 Cf. MEUKE (B.Y.),
« Quelques précisions sur le sort des engagements de la
caution décédée dans l'OHADA »,
www.ohada.com, Ohadata D-08-17. p.
1.
* 210 Cour de cassation,
chambre commerciale 14 novembre 1980 citée par MEUKE (B.Y.), op.
cit., p. 2.
* 211 Cass. com., 29 juin
1982 ; Juris Data 1982-701754- RTDCiv. 1983, p. 354, obs. Rémy.
Ibidem.
* 212 Cf. MEUKE (B.Y.),
op. cit., p. 2.
* 213 Cf. SARTRE (J. P.),
Les mains salles, Paris, 1980.
* 214 Cf. SOCKENG (R.),
Droit pénal des affaires, 1ère éd.,
Presses MINSI Le COMPETING, mars 2007, p. 2.
* 215 Cf. VOIRIN (P.),
Droit civil, t. I, 26e éd., par Gilles GOUBEAUX,
LGDJ, 1997, p. 428.
* 216 Par exemple, un seau
d'eau chaude qui, placé en position instable, se verse et brûle un
enfant.
* 217 Ce droit lui est
conféré par l'al. 2 de l'article 116 de l'AUPCAP.
* 218 Article 1146 C. civ.
* 219 Article 1139 C.
civ.
* 220 Cf. VOIRIN (P.) et
GOUBEAUX (G.), op. cit., p. 462 et s..
* 221 Ibidem.
* 222 Article 1149 C.
civ.
* 223 Article 1151 C.
civ.
* 224 Cf. VOIRIN (P.) et
GOUBEAUX (G.), op. cit., p. 462 et s..
* 225 Ils doivent
correspondre intégralement au préjudice causé au
créancier par le retard dans l'exécution, que celle-ci soit
fournie en nature ou par équivalent.
* 226 V. en ce sens DIOUF
(D.), commentaires et notes sous l'Acte uniforme portant organisation des
procédures simplifiées de recouvrement et des voies
d'exécution, in traité et actes uniformes commentés et
annotés, Juriscope, 3e éd., 2008, p. 798 à
813 ; BATOUM (F.P.M.), « La saisie-vente dans la
législation OHADA ou le sacre de
l'insolvabilité ? », in Juridis
Périodique, n° 74, Avril-Mai-Juin 2008, p. 74 à 83.
* 227 Article 318, al.
1(b).
* 228 Globalement en vertu
des règles de droit commun, par exemple l'article 1er du Code
pénal camerounais qui dispose que : « La loi
pénale s'impose à tous ». Cette loi consacre le
principe selon lequel tout homme sans distinction aucune, est égale
devant la loi.
* 229 Certains pays membres
de l'OHADA avaient déjà reconnu cette responsabilité soit
avant, soit concomitamment avec la France. Cf. FOKO (A.), « Analyse
critique de quelques aspects du droit pénal OHADA », in
Penant, n° 859, 2007, p. 208.
* 230 Cette maxime ne
signifie nullement que la société commerciale est un être
réel qui jouit en matière pénale d'une présomption
irréfragable d'irresponsabilité ; il est au contraire de
principe qu'en cas d'infraction à la loi pénale, ce sont les
personnes physiques qui, par leurs agissements se sont substituées
individuellement à la société commerciale, qui sont
à considérer comme auteur de l'infraction.
* 231 Sur la critique de
l'option choisie par le législateur OHADA, cf. FOKO (A.), op.
cit., p. 210 et s.
* 232 Le groupement est
considéré comme une fiction car dénué de toute
volonté personnelle, attribut des seuls individus et condition
indispensable de la responsabilité pénale.
* 233 D'après le
principe de la spécialité, la reconnaissance juridique en droit
civil des groupements suppose l'existence d'un objet social. Or, ce dernier ne
saurait consister en la commission d'une infraction.
* 234 Les auteurs de cet
argument font valoir que compte tenu de ses fonctions et de sa nature, les
peines ne peuvent correspondre qu'aux individus.
* 235 Cf. FOKO (A.),
op. cit., p. 214 et s.
* 236 Article 42 et 48,
al. 5, de l'AUPCAP.
* 237 Qui peut
s'avérer nécessaire lorsqu'ils sont peu disponibles, peu
compétents, s'ils font montre d'incurie ou commettent des malversations.
La révocation du syndic relève de la compétence de la
juridiction compétente. Elle nécessite une proposition du
Juge-commissaire découlant de sa propre initiative ou des
réclamations qui lui sont adressées soit par le débiteur
soit par les créanciers ou par les contrôleurs (article 42 de
l'AUPCAP).
La révocation du contrôleur est faite, sur
proposition du Juge-commissaire, par la juridiction compétente.
Après révocation, le Juge-commissaire nomme leurs
remplaçants (article 48, dernier al., de l'AUPCAP).
* 238 Cf. VOIRIN (P.) et
GOUBEAUX (G.), op. cit., p. 431. En bref, la responsabilité
civile délictuelle oblige l'auteur d'un dommage causé à
autrui, par sa faute ou son fait volontaire (délit) ou involontaire
(quasi-délit), à le reparer.
* 239 Cass. Com. 26 juin
1968, bull. cass. 1968.4. n° 207.
* 240 Cass. Com. 6 juillet
1971.4. n° 196.
* 241 Cf. VOIRIN (P.) et
GOUBEAUX (G.), op. cit., p. 438.
* 242 Le préjudice
doit être évalué au jour du jugement même si sa
naissance est antérieure à ce jugement.
* 243 Cf. GUYON (Y.),
Droit des affaires - Entreprises en difficulté - Redressement
judiciaire - faillite, t. 2, 6e éd., Economica, 1997,
n° 1419.
* 244 Il ressort des
dispositions de l'article 45 de l'AUPCAP qu'en cas de retard dans le versement
sur un compte bancaire, postal ou du Trésor des deniers recueillis, le
syndic doit les intérêts des sommes qu'il n'a pas
versées.
* 245 Il est assez
creusé particulièrement dans l'AUSCGIE (articles 886 à
905) et dans l'AUPCAP (articles 226 à 246) et simplement survolé
dans l'AUDCG (cf. articles 43, 68 et 187). L'Acte uniforme portant organisation
des procédures simplifiées de recouvrement et voies
d'exécution prévoit à l'article 231, al. 5 et 10,
l'obligation pour l'huissier ou l'agent d'exécution d'indiquer et de
reproduire les textes pénaux relatifs au détournement des biens
saisis. Cf. SOCKENG (R.), op. cit., p. 6.
* 246 Cf. article 5 du
Traité OHADA.
* 247 Cf. FOKO (A.),
op. cit., p. 196.
* 248 Cf. MDONTSA FONE
(A-M), « A propos de l'extension de la compétence
pénale OHADA », in Revue Africaine des Sciences
Juridiques, UYII-FSJP, vol. 5, n° 1, 2008, p. 79.
* 249 Le délit
d'informations mensongères dont il serait question découle de
l'obligation faite au syndic de rendre compte au Juge-commissaire de
l'exécution par le locataire-gérant de ses engagements. Il a
l'obligation de ne pas mentir. Il doit donner au Juge-commissaire des
informations sincères sur la gestion du locataire-gérant. Le
mensonge incriminé consisterait sur le plan matériel de
l'infraction, en toutes inexactitudes sur l'exécution par le
locataire-gérant des obligations souscrites.
Le délit d'informations mensongères est une
infraction intentionnelle car ces informations doivent être sciemment
déclarées.
En ce qui concerne le délit de non
révélation des faits délictueux, son utilité est
indéniable. Son élément matériel suppose
l'existence des atteintes aux éléments pris en
location-gérance, leur connaissance par le syndic et leur non
révélation au Juge-commissaire. Lorsque le syndic constate les
atteintes aux éléments pris en location-gérance, il doit
les révéler au Juge-commissaire. S'il ne le fait pas, il commet
l'infraction de non révélation des faits délictueux.
* 250 Article 49, al.
1er, de l'AUPCAP.
* 251 Article 49, al. 2,
de l'AUPCAP.
* 252 Article 42, al.
1er, de l'AUPCAP.
* 253 Article 115, al.
1er, de l'AUPCAP.
* 254 Article 116, al. 2,
de l'AUPCAP.
* 255 Article 97, al.
1er, du C.P.
* 256 Placé sous
l'autorité de la juridiction compétente, le Juge-commissaire
veille au déroulement rapide de la procédure et aux
intérêts en présence (Article 399, al. 1er, de l'AUPCAP).
Ses attributions à cet égard sont multiples et variées.
C'est ainsi qu'en application de l'article 116, al. 1er, de
l'AUPCAP, le tribunal ne pourra prononcer la résiliation du contrat de
location-gérance que sur rapport du Juge-commissaire. Cf. BILLONG (J.),
Le Juge-commissaire dans les procédures de faillite et de
liquidation judiciaire, mémoire de fin de formation à
l'ENAM, section magistrature, juillet 1997 cité par NYAMA (J-M.),
op. cit., p. 203.
Quant au Ministère Public, il est traditionnellement
considéré comme le gardien de la légalité et de
l'ordre public. Il participe à l'oeuvre de la justice et peut de ce fait
être rattaché aux organes judiciaires, même si sa fonction
ne consiste pas à rendre des décisions. On considère que
la sauvegarde de l'entreprise, le maintien de l'activité et de l'emploi
et l'apurement du passif intéressent les pouvoirs publics en raison de
leur impact sur d'autres entreprises et sur l'ensemble de l'économie.
En tant que défenseur de l'intérêt
général, le représentant du Ministère Public doit,
en application des articles 115, al. 1er, et 116, al. 2, de
l'AUPCAP, demander au tribunal la mise en location-gérance de
l'entreprise en difficulté ou la résiliation dudit contrat
lorsque, par son fait, le preneur diminue les garanties qu'il avait
données ou compromet la valeur du fonds. Cf. GOMEZ (J-R.), op.
cit., p. 95 ; SAWADOGO (F.M.), op. cit., p. 933.
* 257 V. supra en ce qui
concerne les conditions de mise en oeuvre de la responsabilité
délictuelle ou quasi-délictuelle des organes non judiciaires.
* 258 Article 46, al. 2,
du décret n° 95/048 du 8 mars 1995.
* 259 Article 46, al. 3,
dudit décret.
* 260 Cf. GOMEZ (J-R.),
op. cit., p. 86.
* 261 Article 116, al.
1er , de l'AUPCAP.
* 262 Article 45, al.
1er, et 116, al. 1er, de l'AUPCAP.
* 263 Article 45, al. 3,
de l'AUPCAP.
* 264 Article 318 du Code
pénal camerounais.
* 265 Cf. ALILI (S. M.), op.
cit., p. 20.
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