CONCLUSION
Tout au long de notre étude, nous avons tenté
d'analyser les interactions autour de la gestion des crises nutritionnelles au
Niger en focalisant notre attention sur le centre de récupération
de l'ONG BEFEN. Le district sanitaire de Mirriah comme terrain d'étude a
permis de saisir les mécanismes et interactions auxquels donne lieu la
prise en charge de la malnutrition infantile sévère. Ce sont donc
les pratiques d'acteurs qui ont été abordées.
L'étude a révélé que plusieurs
paramètres déterminent le processus d'installation de cette ONG
sur le terrain. Aussi plusieurs stratégies interviennent dans la
définition des critères de sélection des centres de
santé ainsi que l'appropriation des zones ciblées. Ce processus
d'installation met en exergue les capacités de l'ONG à atteindre
les populations qui ont besoin d'appui. L'intervention dans les zones
reculées exige souvent des moyens logistiques et financiers
énormes. Ce qui aboutit à une concentration des ONG(s) dans les
zones le plus favorables et crée ainsi un déséquilibre
entre ces zones et celles qui ont réellement besoin d'interventions.
De la problématique de la malnutrition dans la
région de Zinder surtout dans le département de Mirriah et des
études de bases menées par l'ONG BEFEN, il ressort qu'il existe
une forte prévalence du taux de la malnutrition (17,8%) qui frappe un
grand nombre d'enfants de moins de cinq ans. Ainsi, la situation dans le
district de Mirriah est telle que les autorités locales ne pourront
faire face seules à un phénomène de cette ampleur. En
effet, compte tenu du nombre restreint de partenaires (dans le domaine de la
nutrition) et en raison des retraits successifs de l'ONG GOAL et la section
Suisse de MSF, l'ONG BEFEN occupe à ce jour 17 des 36 CSI que compte le
département de Mirriah. C'est pourquoi, en dépit des raisons
énumérées ci-haut, notre première hypothèse
qui suggère que l'installation de l'ONG BEFEN répond
réellement aux besoins de prise en charge nutritionnelle des
enfants est confirmée.
Sur le terrain, les services déconcentrés de
l'Etat jouent un rôle d'interface entre les différentes ONG(s).
Cela conduit, à travers un cadre de concertation, à mieux
coordonner les actions. Quant aux autorités communales, locales et
coutumières, leur implication dans la prise en charge de la malnutrition
est permanente.
Par ailleurs, l'étude a montré que les
perceptions des populations s'imbriquent aux grandes définitions
scientifiques de la malnutrition. Les populations ont pu intégrer la
malnutrition comme «nouvelle maladie » parmi les
maladies qu'elles connaissent déjà.
Ces perceptions déterminent les rapports des
populations au programme de prise en charge et à l'ONG. Cependant, il y
a entre l'ONG et les populations bénéficiaires du programme un
intermédiaire qui est l'agent de santé.
Des rapports aussi bien
« négatifs » que
« positifs » entre les agents de santé et
les populations bénéficiaires ont été
relevé. Les convergences et les divergences identifiées sont
relatives à l'application des règles de prise en charge telles
que définies par le protocole national. Dans les discours, la
responsabilité d'appliquer ces règles de prise en charge incombe
plus à l'agent de santé qu'à l'ONG.
Ces rapports « négatifs »
trouvent leur essence lors de l'application des critères d'admission au
CREN. En effet, bien que la proportion ne soit pas grande, les populations
manifestent leur insatisfaction par rapport à l'application stricte des
critères d'admission surtout celles qui les ignorent (22% des
enquêtées ignorent les critères d'admission). Ainsi, il
arrive dans certains cas que l'agent de santé subisse des menaces et
injures.
Quant aux rapports « positifs »,
ils apparaissent lorsqu'il est question d'appliquer les modalités de
distribution des vivres. L'étude a montré que l'absence des
règles informelles (utilisation du réseau de connaissance pour
être mieux prise en charge) renforce le degré de satisfaction des
populations enquêtées (91% des femmes qui ne connaissent aucun
agent de l'ONG affirment être bien prises en charge sans aucune
discrimination de la part du personnel).
Pour autant et dans l'ensemble, les effets du programme sur
l'état nutritionnel des enfants ont été
évalués positivement par les populations
bénéficiaires. Etant donné que les rapports aussi bien
« négatifs » que
« positifs » entre l'agent de santé et les
populations sont déterminés par l'application des règles
de prise en charge, notre deuxième hypothèse est
confirmée.
L'étude a permis de mieux cerner les tenants et les
aboutissants du programme d'intervention de l'ONG BEFEN. Cependant, quelques
questions restent ouvertes comme des nouvelles pistes de recherche :
ü ce mode d'intervention à travers les ONG(s)
constitue-t-il une meilleure gestion du problème des crises
nutritionnelles ?
ü ces interventions ont-elles contribué à
mieux gérer les crises alimentaires et nutritionnelles ?
ü quelles seront les capacités des intervenants
dans le long terme, à gérer et créer des
opportunités futures ?
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