III.2.6. LE SAVOIR POPULAIRE
SUR LES LAMANTINS.
Les hommes ont en effet utilisé une grande
variété des ressources biologiques pour se nourrir, se loger, se
vêtir et se soigner dans des milieux divers et à travers des
techniques spécialement adaptées. Cet ensemble des comportements
constitue un patrimoine culturel qui s'est transmis de génération
en génération. Pour ce faire, le sang, les os, la graisse, la
viande et les sexes du lamantin font l'objet de beaucoup de
spéculations.
III.2.6.1. LE SANG.
Le sang du lamantin inspire la crainte pour ceux qui le mange
ou le braconnent. Lors d'une battue administrative ou clandestine, il faut
faire bouillir la chair du lamantin en vue d'extraire ou de faire coaguler le
sang. Sans cela, il sera susceptible de créer des pertes de sang
à perpétuité chez les femmes sexuellement actives qui
entreraient en contact avec le sang ou qui fouleraient au pieds les traces du
sang.
III.2.6.2. LES OS DU
LAMANTIN.
Les os du lamantin sont très respectés en milieu
moundang. Leurs effets sont pervers et nocifs. Après une battue, on doit
prendre soin d'y séparer les os de la chair car le contact de l'os et
les dents provoque la chute de celle-ci. Les os du lamantin servent aussi
à se jouer de sales tours, il suffit qu'un de vos détracteurs,
vous le jette ou passe avec le morceau d'os dans votre champ de coton, toute
productivité est comprise. L'os provoque les pertes de l'inflorescence,
des feuilles, bref instaure un paysage de désolation dans le champ. Ceci
n'est pas seulement valable pour le champ de coton mais pour tout cycle
végétatif.
Photo7:
squelette du lamantin (cliché
Béakgoubé à travers l'Internet)
![](Gestion-des-lamantins-des-lacs-de-Lere--entre-conservation-des-ressources-naturelles-et-survie-d18.png)
En dehors, de ces effets pervers, l'os du lamantin a aussi des
vertus thérapeutiques, car celui brûlé au feu à
forte température, moulu puis mélangé à son huile
permet de soigner les rhumatismes, les douleurs articulaires et les
contractions de nerfs. Ces assertions traditionnelles recueillies à
travers les sources orales n'ont aucune démonstration ou connotation
liée à la scientificité mais font parties des croyances et
des pratiques culturelles aux valeurs significatives socio anthropologiques.
III.2.6.3. LA GRAISSE ET LA
VIANDE DU LAMANTIN.
Très recherché pour sa graisse et pour sa chair,
le lamantin est encore chassé dans l'ensemble de son aire de
répartition au moyen de harpons, de pièges, de filets et de
lignes.
Au Mali, au Sénégal et au Tchad, l'huile est
utilisée à des fins médicinales et cosmétiques
(Powell, 1996). Les thérapeutes traditionnels trouvent à sa
graisse un élément clef aux problèmes de carence de
virilité de leurs patients. D'après le témoignage de
plusieurs riverains que la chair a un bon goût et rend vigoureux. C'est
ce que jadis dans certaines régions, sa chasse était hautement
traditionnelle et ritualisée ; et sa viande était
consommée localement. Un boucanier aventurier, a dégusté
la viande du lamantin et l'a trouvé meilleur morceau (BOUVEIGNES, 1952).
D'autres témoignages laissent croire que la consommation de la viande
est la cause de certaines maladies telles que : les
céphalées « t?gouari n?? bii » ayant
pour corollaire l'hémorragie nasale.
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