CONCLUSION
Il était question au cours des deux derniers
chapitres qui précèdent d'examiner les répercussions de
l'occupation anarchique de l'espace à mangrove et les
conséquences d'une éventuelle explosion démographique sur
l'espace côtier et marin de Youpwe. Nous avons ainsi relevé que la
pression sociale entraine des conséquences dangereuses sur les
ressources biologiques dans la mesure où de nombreuses activités
humaines et l'urbanisation accélérée empiète sur le
couvert végétal et participe par la même occasion à
l'extinction et à la disparition de la faune à Youpwe. Aussi
avons - nous souligné que l'occupation sauvage de l'espace à
mangrove de Youpwe est à l'origine de nombreuses contraintes socio-
économiques notamment les problèmes sanitaires, et la
flambée des prix de poisson voire même parfois des
pénuries. Par ailleurs, dans le souci de nous interroger sur l'avenir de
la mangrove et de ses diverses ressources nous avons émis des
hypothèses de projections démographiques et des tendances de la
croissance spatiale jusqu'à l'échéance 2035. Nous avons
ainsi relevé qu'à cette date précise la survie de la
mangrove serait incertaine du fait de l'urbanisation
accélérée. D'où toute l'importance des mesures
énoncées à la fin de notre travail.
CONCLUSION GENERALE
Au terme de notre étude sur la pression
sociale et la dynamique de l'espace côtier de Youpwe,
évoquons brièvement les grandes lignes qui ont sous -tendu notre
réflexion. Né il ya 32 ans, suite au recasement des populations
du lieu jadis appelé « petit village », (actuelle
base navale), le quartier Youpwe , autrefois considéré comme
un campement de pêcheurs perdu dans la forêt de mangrove s'est
progressivement développé sur le plan spatial et
démographique au point de s'intégrer dans la ville de Douala.
Mais la croissance spatiale accélérée du quartier Youpwe
s'est faite au détriment des ressources naturelles de cet espace
côtier recouvert de mangrove. Le développement de l'habitat, les
activités anthropiques telles que : le commerce du bois de feu,
l'extraction du sable et du gravier, la pêche incontrôlée et
irresponsable sont autant de causes de la perte de la diversité
biologique à Youpwe. Ainsi, la prise d'assaut de la forêt de
mangrove par les populations à Youpwe a eu des répercussions
néfastes sur le plan écologique, hydromorphologique, sanitaire et
économique. L'érosion côtière observée sur
certaines portions de Youpwe, provoquée par le ruissellement et le
piétinement intempestif des populations sont des manifestations les
plus alarmantes des risques hydromorphologiques. En outre, la recrudescence des
maladies parasitaires telles que le paludisme, la typhoïde, l'amibiase
etc. ... sont une illustration des risques sanitaires qui prévalent
à Youpwe. Enfin la flambée des prix de poisson à
Youpwe enregistrée ces dernières années est la
conséquence de l'insuffisance de l'offre du poisson par rapport à
la demande, une insuffisance elle - même liée à la
diminution voire à la disparition des ressources halieutiques suite
à l'anthropisation et à l'artificialisation
exagérée de l'espace à mangrove de Youpwe.
Au regard de ce qui précède, l'exploitation
de la mangrove à Youpwe a des retombées négatives sur
l'environnement et les populations. Bien plus, l'installation de la population
à Youpwe et la pression sociale qui en découle sont
considérées comme le facteur principal de la dégradation
de la forêt de mangrove. Par ailleurs, l'exploitation de la mangrove et
de l'espace marin et côtier sont favorisés par la faiblesse et
l'absence d'un cadre juridique relatif à la protection de la mangrove.
Même les règles coutumières et locales ne mettent pas
l'accent sur la protection de la mangrove. Cette situation témoigne
à suffisance du caractère éclaté de notre zone
d'étude qui, en réalité n'appartient à aucun groupe
ethnique et dont ne repose sur aucune légitimité
coutumière. D'où un manque de coordination et de suivi
véritable dans la gestion et la protection de la mangrove et de ses
nombreuses ressources à Youpwe. Dans le même ordre d'idée
le mépris et le non respect des lois foncières et domaniales par
les populations sont considérés comme des raisons qui laissent
libre cours à l'exploitation anarchique de la mangrove. Et pourtant la
mangrove joue un rôle très important sur la côte. Elle
empêche l'érosion des berges, ralentit les inondations, favorise
la sédimentation. La mangrove est également un lieu de refuge de
nombreuses espèces halieutiques et d'une faune ichtyologique, riche et
diversifiée.
Pour ces multiples raisons, il importe tout compte fait,
qu'une législation rigide, destinée à la protection de la
mangrove soit mise sur pied. Car jusqu'à nos jours, il n'existe pas
encore une législation expresse à la protection de la mangrove et
des zones humides dans notre pays. Même la loi n° 94/01 du 20
janvier 1994 portant sur le régime des forêts, de la faune et de
la pêche n'accorde pas d'attention spécifique à la mangrove
encore moins à la protection des zones humides. Or la découverte
scientifique des rôles et valeurs multiples des zones humides exigent une
prise de conscience politique et administrative de l'importance de ces
écosystèmes. En effet la convention de Ramsar signée en
1971 souligne la nécessité de protéger les zones humides
littorales. Les littoraux à mangroves en proie aux multiples
dégradations comme nous l'avons si bien mentionné tout au long de
notre travail de recherche demandent à être
protégés par les pouvoirs publics, les municipalités et
les populations elles -mêmes. Cette protection passe par la mise en place
des mesures stratégiques de protection et de conservation à court
et à moyen terme en collaboration avec les partenaires et les acteurs
multiformes. Il ressort de notre étude qu'une politique de la gestion et
de la préservation efficiente de la mangrove requiert à la fois
une approche pluridisciplinaire, systémique et participative.
L'intérêt de notre travail de recherche est d'avoir conduit une
étude diachronique qui montre grâce à la cartographie la
dynamique de l'écosystème de mangrove. Nous Avons mis en exergue
à la lumière des photographies aériennes les mutations de
l'espace à Youpwe entre 1978 et 2003 ; ensuite nous avons
identifié les problèmes sociaux, économiques et
environnementaux qui découlent de la conversion de cette zone humide qui
est la mangrove en lieux d'habitation. Les résultats obtenus confirment
d'abord l'artificialisation du milieu évoqué dans les
hypothèses de part. Cette artificialisation du milieu est prouvée
par la hausse constante et soutenue du pourcentage des surfaces bâties et
par la baisse des espaces plus ou moins naturels de notre zone d'étude.
Nous avons par ailleurs relevé trois logiques des acteurs qui se
déploient dans l'espace côtier de Youpwe. Ainsi nous avons
identifié une logique traditionnelle et affective qui caractérise
les populations autochtones notamment les Douala qui entretiennent des rapports
séculiers avec l'espace côtier général et
spécifiquement avec la mangrove. Ensuite nous avons relevé une
logique rationnelle en valeur incarnée par les ONG de défense de
l'environnement. Enfin nous avons identifié une logique mercantile
froide ou en calcul d'intérêt de la part des immigrants ouest
africains à Youpwe. Il faut souligner que notre étude aurait pu
être mieux affinée par une utilisation du Modèle
Numérique de Terrain (MNT), du GPS, pour localiser avec exactitude les
différents points de notre zone d'étude et par l'usage des
logiciels de cartographie plus adaptés comme Arcgis, Autocad...De
même, l'utilisation d'outils qualitatifs comme le diagramme de Venn nous
aurait permis de mieux cerner la logique des acteurs impliqués dans la
gestion et la sauvegarde de la mangrove. Nous ne saurions achever ce travail de
recherche sans mentionner que la dégradation de l'espace côtier
de Youpwe est en partie imputable au laxisme de l'Etat. Ce laxisme s'explique
par le manque d'un plan d'occupation de sol fiable qui fait force de loi. Car
ce sont aux politiques qu'appartient le privilège de déterminer
l'utilisation de l'espace.
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ANNEXES
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