II.2- Projection de la croissance
spatiale à Youpwe
La croissance démographique de Youpwe aura pour
corollaire l'extension spatiale de ce quartier. L'on pourra ainsi voir la
superficie du bâti passer de 45 hectares à 100 hectares et plupart
à 130 hectares. En effet il possible de déterminer facilement la
superficie de l'espace occupée à Youpwe à partir de notre
équation de régression qui est de y = 0,01+ 4,7.
Ainsi L'extension de l'habitat ou l'occupation de
l'espace va s'amorcer à l'ouest du quartier, c'est-à-dire au-
delà du chenal qui divise le quartier presqu'en deux. La mangrove de
cette partie du quartier qui ne fait pas encore l'objet d'une coupe
systématique pour des besoins d'urbanisation, serait
littéralement occupée. Mais l'invasion de la mangrove de ce
domaine nécessite tout d'abord que l'on mette sur pied un ouvrage qui
permette aux populations de franchir sans trop de peine les eaux d'un chenal de
la crique Docteur, qui jusqu'à présent représente le seul
obstacle qui empêche les populations d'envahir cet espace.
Après cette première phase de l'extension du
quartier le développement du bâti mettra ensuite le cap vers
l'autre rive de la crique Docteur (Voir carte 4). L'extension du bâti au-
delà de la crique Docteur marquera la fin de l'existence de la mangrove
dans les périmètres immédiats de Youpwe. Pour faire face
à cette situation qui sera lourde de conséquences, il est
indispensable de mettre sur pied des mesures à court et à terme
pour freiner le développement accéléré de l'habitat
dans ces sites stratégiques qui représentent les derniers
témoins de la forêt littorale.
Carte n°4 :
projection de l'occupation spatiale à Youpwe
III - Perspective d'une gestion rationnelle de la
mangrove à Youpwe
La diversité biologique des mangroves est
menacée à Youpwe du fait de la destruction de l'habitat naturel
et de la mauvaise exploitation des ressources. La résolution de ces
problèmes passe par la gestion rationnelle de cet
écosystème estuarien et de ses ressources. Cette gestion
rationnelle est fondamentale pour la conservation de cette zone. Pour atteindre
cet objectif le respect de la règlementation foncière doit
être renforcé. Il importe aussi de contrôler les
activités destructrices de la mangrove.
III.1-Renforcer le respect de la règlementation
foncière
Le respect de la règlementation est
la chose la moins partagée à Youpwe. Tout se passe ici en marge
des lois foncières et domaniales. L'acquisition des terrains et des lots
se font de manière informelle. Les populations se sont installées
au mépris de la loi. L'ignorance des populations mais aussi la mauvaise
foi semble être à l'origine de cette situation déplorable
car les populations ont occupées jusqu'aux rives des cours d'eaux. Et
pourtant, aux termes de l'ordonnance n°74/2 du 6 juillet 1974, le domaine
public maritime et fluvial ne peut faire l'objet d'appropriation privée.
La délivrance du titre foncier pour un certain terrain situé dans
les 50 premiers mètres à partir du niveau de la plus basse mer et
dans les 25 premiers mètres quand il s'agit d'un fleuve est interdite.
Il importe de faire respecter l'emprise maritime de l'Etat (zone de 50m). En
appliquant cette emprise maritime de l'Etat, la coupe systématique de la
mangrove sur les berges se posera avec moins d'acuité à Youpwe.
La réduction de ce phénomène contribuera à
stabiliser l'écosystème marin et côtier. Mais avant de
faire respecter la loi, encore faut- il qu'une loi claire et précise sur
la mangrove et les ressources qui lui sont associées puissent être
élaborées.
III.2 - De l'élaboration d'une
législation expresse relative à la protection de la
mangrove
La législation qui règlemente les
activités d'exploitation de la mangrove et des ressources qui lui sont
associées st très éparse au Cameroun. Cette
législation demeure fragmentée et non coercitive ; Elle ne
met pas d'accent sur la protection de la biodiversité
côtière et marine. Ainsi la loi 67LF/25 du 30 Novembre
1967 règlementant le milieu marin pour navigation, contient
quelques dispositions visant à la préservation des milieux
côtiers et marins. En outre, la loi n°89/027 du 29
décembre 1989 portant sur les déchets toxiques
dangereux, interdit le rejet des déchets sur quelques parties
que ce soit du domaine national. L'ordonnance n°90/001du 29
Janvier 1990 portant régime de la zone frange industrielle fait
état de la pollution marine d'origine industrielle dans ses articles 33
et 35.
Vu ce qui précède il ya lieu de dire que la
protection du milieu marin et côtier n'est pas régie par une
règlementation unique et précise. C'est plutôt une
législation en miette et incidente qui existe en la matière. Le
dispositif de lutte contre l'exploitation du milieu marin et côtier
apparait en définitive inadapté. Malgré la promulgation de
la loi n° 94/n°1 du 20 janvier 1994, portant sur l
régime des forets, de la faune et de la pêché et son
décret d'application n°95/413/PM du 20 Janvier 1995,
l'écosystème de la mangrove dont l'importance sur le plan
écologique n'est plus à démontrer, ne
bénéficie pas encore d'une protection juridique expresse. Cette
loi n°94/ n°1 du 20 Janvier 1994, dont l'un des objectifs est la
protection de la diversité biologique ne lui accorde pas d'attention
spécifique.
Il est donc nécessaire de mettre sur pied une
législation adaptée qui garantisse la protection de la mangrove
et de ses ressources. Il serait judicieux dans cette perspective de commencer
par faire un inventaire de la législation existante dans le domaine de
la protection des ressources marines et côtières. L'analyse de
cette législation devrait permettre d'identifier les lacunes et de
proposer des améliorations éventuelles et une adaptation au
contexte actuel. Après l'élaboration d'une législation
portant sur la mangrove et de ses ressources, il faudrait développer un
système d'exploitation de cet écosystème.
III.3- Mise en place d'un système
d'exploitation adapté des ressources marines et
côtières
La mise sur pied d'un système d'exploitation
adapté des ressources marines et côtières est
nécessaire. Il permettra d'assurer une exploitation durable de
l'écosystème de mangrove. Il conviendra par exemple en ce
concerne l'exploitation des espèces ligneuses de rationnaliser la coupe
en tenant compte du diamètre. On pourrait aussi interdire l'exploitation
des espèces en disparition. La troisième mesure consistera
à entreprendre une politique de régénération des
zones dégradées. Mais en attendant, il serait judicieux de
créer des postes forestiers à Youpwe comme c'est le cas dans
l'ensemble du pays pour ce qui concerne les forêts continentales. Car
nous avons relevé qu'il n'existe pas d'unités de
répression chargées de veiller sur l'exploitation des
forêts de mangrove sur place à Youpwe.
Quant à ce qui concerne l'exploitation des ressources
halieutiques, il importera de rationnaliser les techniques et les
méthodes de pêche artisanale ; car les méthodes
actuellement utilisées par les pêcheurs sont abusives. L'usage des
substances chimiques et d'explosifs pour la capture du poisson est à
proscrire ainsi que la violation des zones de fraie par les pêcheurs. Le
personnel du Ministère de l'élevage de pêche et de
l'industrie animale (MINEPIA) devrait être davantage averti afin de
veiller à la capture abusive des ressources halieutiques. Aussi la
capture de certaines espèces de poisson en voie de disparition à
l'instar des scianidae et des clupeidae doit être
interdite pour une certaine période. Il serait aussi indispensable
d'évaluer le potentiel d'exploitation des nouvelles ressources sans
rompre l'équilibre de la mangrove. Le développement de
l'aquaculture en cage de l'ostréiculture (élevage des huitres)
ainsi que le développement de l'écotourisme pourraient constituer
des alternatives aux activités actuelles pratiquées à
Youpwe. La promotion et la vulgarisation de ces nouvelles activités
pourraient limiter la dégradation de la biodiversité et du
milieu naturel. Car un aquaculteur est plus proche d'un agriculteur que
pêcheur parce qu'il sème et récolte. Youpwe
présente les caractéristiques physiques propices à la
pratique de l'aquaculture. Car l'espace recherché par les aquaculteurs
est soit l'estran soit les eaux peu profondes proches de la côte, les
étangs côtiers, les lagunes et les secteurs de vasières
à mangrove. L'aquaculture, si elle est pratiquée à Youpwe,
pourra pallier au déficit d'approvisionnement en produits halieutiques.
En fin, vu l'ampleur du sinistre de l'exploitation des
carrières de sable et de gravier sur le milieu, il est souhaitable de
rationnaliser cette activité. Un plan d'aménagement et
d'exploitation qui tienne compte de la flore doit être
élaboré par les pouvoirs publics. Une règlementation
adaptée aux conditions spécifiques du milieu serait la bienvenue.
Elle permettra de contrôler de manière rationnelle l'exploitation,
la restauration des zones dégradées par l'extraction du sable et
du gravier.
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