CHAPITRE VI : ANALYSE ET INTERPRETATION DES
RESULTATS
Dans ce dernier chapitre de notre mémoire nous faisons
une analyse des principaux constats qui se sont dégagés à
partir de nos résultats tout en essayant de donner un sens ou une
signification à ces différents constats. Il est structuré
en deux grandes sections : la première porte sur le niveau
d'intégration des étudiants guinéens dans leurs
universités, la deuxième traite du renforcement de leur sentiment
communautaire en rapport avec le niveau d'intégration.
Section 1. Analyse du niveau d'intégration des
étudiants guinéens en rapport avec les relations avec leurs
condisciples français
Pour déterminer le niveau d'intégration des
étudiants guinéens et tester notre hypothèse de
départ, notre démarche a consisté à saisir tour
à tour les opinions en rapport avec le nombre d'amis français de
classe avec lesquels les étudiants se fréquentent même en
dehors de l'université, mais aussi les relations qu'ils entretiennent
avec les professeurs. De même que les opinions sur la connaissance et
l'implication aux activités des organisations étudiantes au sein
de l'université qui est aussi un indicateur du niveau
d'intégration au sein de l'université.
Pour justifier cette démarche nous partons de
l'idée que : plus un étudiant étranger a d'amis
français de classe, plus il pourrait être informé sur les
activités culturelles au sein de l'université et plus il serait
sensé y participerou s'impliquer aux mouvements associatifs au sein de
l'université. Les relations avec les professeurs y vont dans le
même sens. Plus un étudiant étranger a la
possibilité de rencontrer ses professeurs pour pouvoir discuter avec
eux, plus il seraitsensé connaître le fonctionnement des
études à l'université.Le niveau d'intégration sera
alors en rapport avec l'éventail de relations que l'étudiant
étranger a avec son entourage immédiat que sont ses condisciples
français et ses professeurs.
De ce point de vue, les résultats ont montré que
les étudiants interrogés n'ont pas le même niveau
d'intégration. Pour le prouver nous avons construit une échelle
d'intégration à trois niveaux : fortement
intégré(e), moyennement intégré(e) et faiblement
intégré. Sont fortement intégrés tous ceux qui ont
quatre ou plus d'amis français de leur classe avec lesquels ils se
fréquentent, à ceux-ci on a attribué le code A ; sont
moyennement intégrés tous ceux qui ont entre 1 et 3 amis
français de leurs classes, à ceux-ci on a attribué le code
B et enfin sont faiblement intégrés tous ceux qui n'ont pas
d'amis français de leurs classes, à eux on a attribué le
code C. A partir du tableau 2.2 de nos résultats, nous avons obtenus une
représentation proportionnelle entre les trois codes qui se
présente comme suit : 12 pour C, 5 pour B et 3 pour A. on voit que
ceux qui sont faiblement intégrés constituent la plus grande
proportion. Ils représentent 60% de l'échantillon.
En croisant ce résultat au nombre d'années
passés à l'université, le constat qui se dégage est
que d'une part, c'est au niveau de la première année
d'études que des difficultés d'intégration se font plus
sentir et que d'autre part, la durée n'est pas aussi
nécessairement un facteur qui favorise l'intégration. Les
résultats ont montré quetous les étudiants qui sont
à leur première année d'inscription (ils sont au nombre de
sept) à Montpellier se retrouvent dans le code C.
L'analyse montre tout aussi qu'on peut y passer des
années sans pour autant réussir son intégration. Dans la
catégorie de ceux qui ont passé plus d'une année soit 13
étudiants, cinq se retrouvent dans le code C (au même titre que
ceux qui sont dans leur première année) et cinq dans le code B
(qui sont faiblement intégrés) contre seulement trois qui se
retrouvent dans le code A (qui sont fortement intégrés).
L'intégration à l'université à
travers les condisciples français de classe varie aussi selon les
universités. Ainsi, il apparait selon l'université que les
étudiants enquêtés de l'UM2 ont plus de condisciples
français avec lesquels ils se fréquentent que dans les deux
autres universités. Les résultats du tableau 2.1 montrent que
c'est seulement à l'UM2 où sur les neufs étudiants
enquêtés, quatre ont entre trois et six condisciples
français de classe avec lesquels ils se fréquentent. Cela
pourrait se justifier par le fait qu'à l'UM2 les offres de formations
qui relèvent toutes du domaine des sciences, exigent plus de travaux de
groupes où le mélange d'étudiants est beaucoup plus
fréquent. Et cela se voit tout aussi sur les fréquentations des
cafétérias ou bien les restaurants universitaires où la
majorité de ceux qui les fréquentent se font accompagnés
par des condisciples français et pour la simple raison qu'ils s'y
rendent le plus souvent après des séances de TD.
Dans le cadre toujours de l'impact des relations avec leurs
condisciples français sur leur intégration au sein de
l'université, il nous a semblé nécessaire de voir s'il y a
une corrélation entre le fait d'avoir des amis de classe français
et la participation aux activités des organisations étudiantes.Le
tableau 4.3de nos résultats a montré que sur les vingt
étudiants enquêtés, il n'y a que neuf parmi eux qui ont
affirmé qu'ils ne participent pas à des activités
culturelles au sein de leurs universités contre onze qui ont
affirmé qu'ils participent ( dont huit rarement et trois souvent).
Après avoir fait un croisement entre nombre d'amis et fréquence
de participation en ne s'intéressant qu'aux onze qui participent
(souvent ou rarement), on obtient : huit étudiants qui participent
ont des amis français de leurs classes avec lesquels ils se
fréquentent contre un seul qui a des amis français mais qui ne
participe pas et deux qui n'ont pas d'amis mais qui participent à des
activités culturelles au sein de leurs universités. Cela confirme
qu'avoir des amis français est un facteur qui favorise la participation
aux activités culturelles au sein de l'université.
Une analyse thématique des raisons qui font que ceux
des étudiants interrogés qui ne participent pas à des
activités culturelles au sein de l'université, fait apparaitre
deux éléments significatifs. Le premier est dû au fait
qu'ils ne sentent pas concernés. Sur ce point nous pouvons faire deux
lectures. Tout d'abord il y a un sentiment de mise à l'écart qui
est dû au fait qu'ils ne se sentent pas associéspour être
impliquer pleinement à ces activités, mais aussi un écart
lié au culturel. Ici l'étudiant ne se sent pas concerné
par ce que les activités culturelles proposées ne correspondent
pas à ses habitus. Les contenus des festivals ou des expositions au sein
de l'université ne correspondent pas à leur goût culturel.
Cela se justifie par des propos qu'on a notés ci haut tels que
« ça ne concerne qu'eux » ou
« ce qui est proposé ne m'intéresse
pas ».Cette distance culturelle se remarque tout aussi sur les
raisons qui font que certains ne fréquentent pas le restaurant
universitaire.
Le deuxième élément significatif est le
manque de temps que beaucoup ont cité comme raison. Ici par manque de
temps, il faut voir les occupations liées aux petits boulots des
étudiants. La recherche du boulot pour l'étudiant étranger
prend assez de son temps d'une part et de l'autre, quand il l'a, les
contraintes liées avec ne lui permettent pas de participer aux
activités culturelles à l'université. Sur cet aspect,
notre théorie des inégalités sociales à
l'école se justifie clairement. Une des conditions de renouvellement du
titre de séjour dû au statut d'étudiant étranger
exige que ces étudiants aient des moyens financiers suffisants pour
chaque année universitaire. Avec cette obligation, le peu de temps que
l'étudiant dispose en dehors de ses cours est consacré au boulot
quitte même à sacrifier certaines heures de cours au profit de ce
boulot, ce qui n'est pas exclu. Sur cet aspect, participer à des
activités culturelles au sein de l'université qui aide à
l'intégration de l'étudiant étranger dans ce milieu, ne
lui est pas rendu possible à cause de son statut.
Un autre constat significatif qui apparait dans nos
résultats est qu'il n'y a pas de corrélation entre avoir des amis
français de classe et obtenir des informations sur le quotidien
universitaire. Cela est dû au fait que l'essentiel des étudiants
interrogés ont affirmé que les informations concernant leur
formation (notes, absence de profs, modification de l'emploi du temps,
changement de salle de classe etc.) sont obtenues via internet mais non pas par
un quelconque ami. Ils affirment pour cela que ces informations sont obtenues
à temps. A ce niveau, ils se sentent vraiment membre de leurs
universités et non pas des exclus, car ces informations sont obtenues de
la même façon par tous les autres étudiants.
Section 2 : le niveau d'intégration en
rapport avec les relations avec les professeurs
Les résultats sur les relations étudiants
guinéens/professeurs montrent que les étudiants jugent
plutôt facile la possibilité de rencontrer leurs professeurs (voir
tab 3.2 de nos résultats). Les principales raisons de vouloir rencontrer
leurs professeurs se ramènent à des questions sur les cours et
aussi pour parler de débouchés (voir tab 3.3 de nos
résultats).Aussi dans l'ensemble, ces étudiants estiment que le
traitement est le même par rapport à leurs condisciples
français (voir tab 3.4 de nos résultats).
Si sur ces différents aspects, il ressort des
homogénéités chez les étudiants interrogés,
l'analyse laisse apparaitre quand même des différences selon les
universités. Ainsi les professeurs de l'UM1 apparaissent plus
égalitaires entre étudiants guinéens et nationaux, suivi
de ceux de l'UM2. La tendance est la même si on s'intéresse
à la possibilité de rencontrer les professeurs. Il est plus
facile pour les étudiants guinéens de l'UM1 et de l'UM2 de
rencontrer leurs professeurs que ceux de l'UM3, il en va de même du
traitement vis-à-vis de leurs condisciples français.
L'analyse de nos résultats montre tout aussi qu'il y a
une relation entre les relations avec les professeurs et le niveau de
satisfaction des études. Ainsi en croisant le niveau de satisfaction des
études chez les étudiants avec l'université
d'appartenance, on voit apparaitre que c'est à l'UM1 où les
étudiants sont plus satisfaits de leurs études (voir tab 1.6 de
nos résultats où sur les six étudiants interrogés
de l'UM1, cinq affirment être tout à fait satisfaits de leurs
études soit plus de 83%). Encore de plus, cela explique leur
volonté de finir leurs études à Montpellier qu'ailleurs
pour une raison due à la satisfaction liée à la formation
suivie.
Dans l'ensemble, on comprend que les relations avec les
professeurs n'ont pas à proprement parler un impact sur
l'intégration des étudiants étrangers au sein du milieu
universitaire au même titre que les rapports avec les condisciples
français. La conclusion qu'on peut tirer est que pour mieux
intégrer le milieu universitaire ce sont les relations avec les
condisciples français qui sont déterminants.
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