Paragraphe 2 : systèmes de production et de
commercialisation.
Ce paragraphe informe sur les caractéristiques du
système de production et celui de la commercialisation de l'anacarde.
A- Système de production:
Cette partie présente les opérations et le
calendrier de la production, les caractéristiques des exploitations
d'anacardiers, les aspects écologiques et genres de la production de
même que l'organisation des producteurs d'anacarde.
1- Opérations de production et calendrier de
production.
Au Bénin et particulièrement dans la zone
d'étude, aucun itinéraire agronomique de production n'est
recommandé aux producteurs d'anacarde, ni vulgarisé par les
agents des centres communales de promotion agricole (CeCPA). Ainsi, les
semences utilisées pour la plantation d'anacardier proviennent des
anciennes plantations. Selon le projet STDF 48 (2011), 95% des paysans
utilisent des semences « locales » provenant de leur champ
ou de celui des voisins. Le choix des semences se fait à partir des
critères comme : la grosseur des noix, des noix ne flottant pas sur
l'eau, des noix provenant des arbres à forte productivité etc.
Le semi direct est la méthode culturale dominante pour
l'installation des plantations. Les opérations d'installation qui se
déroulent de Juin à Août comprennent le
défrichement, le semi direct des noix d'anacarde, le piquetage pour
l'anacarde. Dans les premières années des plantations, les
exploitants y associent des cultures vivrières telles que le
Niébé, le Soja, le Piment, etc. Aussi, les autres
opérations de productions après l'installation des plantations
sont : l'entretien ou/ et alternativement le labour (pour une
minorité d'exploitants) et la récolte qui intervient 2 à
3ans plus tard. En effet, les opérations d'entretien qui se
déroulent de septembre à Décembre, sont : le
fauchage, le sarclage, le regarnissage, l'élagage, la coupe
d'éclaircie, le nettoyage, la fumure et le traitement phytosanitaire.
Quant à la récolte, elle se déroule de janvier à
Mai en même temps que la campagne de commercialisation qui se passe de
Mars à Juin.
Tableau n°9: Calendrier de
l'organisation des activités pour la production d'anacarde.
Période
Activités
|
Jan
|
Fév
|
Mar
|
Avr
|
Mai
|
Jui
|
Juil
|
Aoû
|
Sep
|
Oct
|
Nov
|
Déc
|
Plantation
|
|
|
|
Entretien
|
|
|
|
Récolte
|
|
|
|
Source : Adapté de JITAP
(2003).
2- Caractéristiques des exploitations
d'anacardiers.
La commune de Savalou se situe dans la zone favorable à
la production des noix de cajou avec une pluviométrie variant suivant
les années entre 864 et 1637,3 mm (ASSOGBA, 2011).
A cet effet, la superficie couverte par les plantations
d'anacardiers est estimée à 25.000 hectares (UCPA, 2011) soit
16,56% de la superficie cultivable de la commune : qui est de 151.00ha
(PDC, 2005). Si 60% des anacardiers possèdent entre 5ans et 20ans, il
n'en demeure pas moins que 40% des plantations ont atteint 30 ans et sont donc
moins productives car la durée moyenne du cycle végétal de
l'anacardier est de 30 ans. La taille moyenne des exploitations est de 5,23
(+/-4,95) ha avec des exploitations dont les tailles varient de 1 ha à
40 ha.
Par ailleurs, les densités des plantations tendent
vers 400 plants /ha au lieu de 100 plants/ ha recommandée. De
même, seuls 80,95% des producteurs entretiennent leurs plantations avec
seulement le fauchage et rarement l'élagage comme opérations
d'entretien.
Aussi, les producteurs enquêtés n'utilisent ni
intrants agricoles, ni produits phytosanitaires contre les maladies des
plantes, les fourmis rouges et les coléoptères foreurs de tiges
(Mécocorynus Loripes), qu'ils reconnaissent comme des menaces.
Ils ne disposent non plus de crédits agricoles formels.
Tous ces facteurs justifient la faible productivité des plantations
d'anacardiers dans la commune de Savalou, dont le rendement moyen est
357,43kg/ha. Ce rendement est compris entre 300 et 500kg/ha, intervalle des
rendements constatés au Bénin (ACI Bénin, 2010) quand bien
même, qu'il soit nettement inférieur au rendement de la Côte
d'Ivoire (1.000kg/ha) ou des pays asiatiques qui est de 1.500kg/ha.
Dans la zone d'étude, les outils utilisés pour
la production de l'anacarde sont : la houe, le coupe-coupe, les bassines
et des sacs. Les types de mains d'oeuvre sont : la main d'oeuvre familiale
(19,05% pour l'entretien et 60,71% pour la récolte), la main d'oeuvre
occasionnelle (78,57% pour l'entretien et 39,29% pour la récolte) et la
main d'oeuvre d'entraide (2,38%pour l'entretien et 0% pour la
récolte).
3- Aspects écologiques et genres de la
production.
Au Benin, la culture de l'anacarde se fait en grande partie
dans les zones agro-écologiques favorables à la culture du
coton et de l'igname .Ces dernières sont les deux principales
spéculations agricoles dévastatrices des sols du fait des
défrichements forestiers qu'elles nécessitent et de l'utilisation
massive de pesticides pour le cas de la culture du coton. L'anacardier reste
une plante idéale pour la reconstruction des terres
dégradées et pour la séquestration du carbone. En outre,
il existe un engagement très poussé des femmes pour certaines
opérations de la filière anacarde telles que: la récolte,
le transport, les activités post-récolte, la collecte primaire et
la transformation des noix en amandes contrairement aux hommes dont les
activités de prédilection sont l'installation des plantations
d'anacardiers, la gestion de l'entretien et de la commercialisation en gros des
noix brutes.
Tableau n°10: Degré
d'engagement aux activités de la filière anacarde et genre.
Activités
Genres
|
Plantation
|
Entretien
|
Récolte
|
Transport
|
Collecte primaire
|
Commerce en gros
|
Main d'oeuvre transformation
|
Hommes
|
****
|
****
|
*
|
*
|
****
|
****
|
*
|
Femmes
|
*
|
*
|
****
|
****
|
****
|
*
|
****
|
X=moins engagé et XXXX=plus engagé.
Source : Enquête de
terrain, Avril 2012.
4-Organisation des producteurs.
Dans les années 2000, les CARDER (actuels Centres
Régionaux de la Promotion Agricole) avec l'appui de l'ONS avaient
commencé par mettre en place des organisations de producteurs au niveau
des villages (CVPA) et des communes (UCPA). En 2009, 695 Comités
Villageois des Producteurs d'Anacarde(CVPA) et 39 Unions Communales des
Producteurs d'Anacarde (UCPA) sont crées. Mais en 2001
déjà, avec l'appui du PADFA, l'organisation pyramidale a
été complétée par le regroupement des UCPA, avec
la création de trois Unions Régionales couvrant les trois (3)
principales régions de production de l'anacarde à savoir :
URPA-Zou/Collines, URPA-Borgou/Alibori et l'URPA-Atacora/Donga. Il faudra
attendre janvier 2006 pour la création de la faitière nationale
des URPA: la Fédération Nationale des Producteurs d'Anacarde du
Bénin (FeNaPAB) dotée d'un bureau de 13 membres. Cependant,
dans la commune, seulement 24,10% des enquêtés appartiennent
à l'UCPA ou à un CVPA. Les producteurs justifient cette non
appartenance massive à un CVPA par le manque de confiance, le
manque de crédibilité, le manque d'informations concernant les
CVPA et l'UCPA, la non représentativité de l'UCPA, la gestion en
vase clos de l'UCPA et des CVPA surtout, par une minorité
privilégiant leur propre intérêt.
B-Système de commercialisation.
La commercialisation étant un ensemble
d'activités qui permettent à un produit de passer du stade de la
production à celui de la consommation, elle fait alors appelle à
une chaîne d'acheminement. Ainsi, dans cette partie, nous mettrons
l'accent sur les circuits de commercialisation, et l'organisation de la
commercialisation de l'anacarde dans la commune de Savalou.
1-Circuits de
commercialisation :
Producteurs
UCPA/URPA
Collecteurs
Coutiers
Usines de transformation
Grossistes
Marché local
Exportateurs
Exportations
Source : Enquête de
terrain, Avril 2012.
Figure n°3 : Circuits de
commercialisation des noix de cajou à Savalou.
De l'analyse de la figure n°3, il ressort que la
commercialisation des noix d'anacarde se fait à travers trois (3)
circuits à savoir :
- Un circuit de vente court où les producteurs vendent
leur production aux groupements de producteurs (UCPA et URPA) qui le revendent
aux exportateurs.
- Un circuit moyen dans lequel la vente est fait
successivement aux courtiers et aux grossistes. Les grossistes à leur
tour revendent la production aux exportateurs.
- Un circuit long qui relie tous les acteurs de la
commercialisation. Dans ce circuit, les producteurs vendent leur production aux
collecteurs qui la revendent aux courtiers employés par les grossistes.
Les grossistes la revendent ou font le point des achats (selon que le mode de
financement soit sur fonds propres du grossiste ou sur préfinancement de
l'exportateur) aux exportateurs qui en générale sont des
étrangers pour l'exportation.
Par ailleurs, depuis la rénovation des deux (2)
anciennes unités de transformations de la commune en usines de
transformation d'envergure, deux nouveaux circuits ont vu le jour à
savoir :
- Un 1er circuit où les noix brutes passent
des producteurs aux usines de transformation par le biais du groupement des
producteurs (UCPA) sur la base d'un contrat préétabli.
Après la transformation des noix brutes en amandes, les usines
commercialisent les amandes sur le marché international, une petite
proportion sera néanmoins vendue sur le marché local.
- Un second circuit dans lequel les intermédiaires
entre les producteurs et les usines de transformation sont les coutiers qui
généralement travaillent pour les usines comme agents
d'approvisionnement. Les amandes suivent le même chemin qu'au niveau du
premier circuit.
2-Acteurs de la
commercialisation :
Dans la commune de Savalou, le commerce des noix de cajou est
largement dominé par les hommes. En effet, 66,67% des
enquêtés sont des hommes contre 33,33% de femmes. De même,
d'après le Tableau n°11 portant sur la
répartition des enquêtés selon la catégorie
(voir annexe 5), les hommes s'engagent plus comme courtiers
(27,78%) que les femmes avec 11,11% de courtières. Ce pendant, les
femmes s'adonnent plus à la collecte primaire avec 22,22% de
collectrices contre 16,67% de collecteurs. Mais elles sont absentes de la vente
en gros aux exportateurs. Selon elles, les grossistes prennent plus de risques
lors de la constitution du stock, du transport vers le port de Cotonou. Aussi,
elles trouvent difficiles : la recherche de contrats auprès des
exportateurs, la recherche et la gestion des fonds de préfinancement
confiés aux grossistes par les exportateurs.
Après analyse du tableau n°12, il ressort que les
acteurs de la commercialisation sont plus instruits que ceux de la
production.
En effet, seulement 11,11% des acteurs de la fonction de
commercialisation de la filière anacarde sont analphabètes contre
41,67% chez les producteurs. Aussi, 22,22% des commerçants n'ont jamais
dépassés l'école primaire et plus de la moitié
d'entre eux ont le niveau de l'enseignement secondaire. Ce pendant, parmi ces
acteurs, il y a plus de femmes analphabètes (16,67%) ou ayant le niveau
de l'enseignement primaire (33,33%) que d'hommes analphabètes (8,33%) ou
ayant un niveau primaire (16,67%). Par ailleurs, seuls 11,11% d'entre eux,
uniquement des hommes ont un niveau universitaire.
Au total, les acteurs de la commercialisation ont un niveau
d'instruction très relevé dans l'ensemble malgré la
divergence de niveau entre les femmes et les hommes. Les résultats,
selon les différentes catégories de commerçants doivent
être nuancés. Ainsi, les grossistes ont un niveau de formation
académique plus élevé que les collecteurs et les courtiers
ce qui est normal au vu de leur niveau d'engagement en amont de la
filière anacarde.
Tableau n°12 :
Répartition des commerçants de noix de cajou selon leur niveau
d'instruction.
Sexe
Niveau d'instruction
|
Masculin
|
Féminin
|
Ensemble
|
Effectif
|
%
|
Effectif
|
%
|
Effectif
|
%
|
Analphabète
|
1
|
8,33
|
1
|
16,67
|
2
|
11,11
|
Primaire
|
2
|
16,67
|
2
|
33,33
|
4
|
22,22
|
Secondaire
|
7
|
58,33
|
3
|
50
|
10
|
55,56
|
Universitaire
|
2
|
16,67
|
0
|
0
|
2
|
11,11
|
Total
|
12
|
100
|
6
|
100
|
18
|
100
|
Source : Enquête de
terrain, Avril 2012.
3-Savoir faire des
commerçants.
S'il est vrai que le savoir faire des acteurs de la
commercialisation soit lié à leur expérience, il n'en
demeure pas moins que la maturité de ceux-ci soit un facteur important
dans leur responsabilisation et dans la confiance mutuelle entre acteurs d'une
part et entre acteurs et exportateurs d'autre part.
A cet effet, la moyenne d'âge des commerçants
enquêtés est de 42,33(+/-6,60) ans, compris entre 31 et 53 ans
chez les hommes contre 35(+/-8,87) ans, compris entre 20 et 45 ans chez les
femmes. L'âge des acteurs influence leur catégorie. Ainsi, les
grossistes sont plus âgés que les collecteurs et les courtiers.
Tableau n°13 :
Classification des commerçants enquêtés par âge, et
par année d'expérience selon le sexe.
Paramètres
|
Âge (année)
|
Année d'expérience
|
Hommes
|
Femmes
|
Ensemble
|
Homme
|
Femme
|
Ensemble
|
Moyenne
|
42,33
|
35
|
39,89
|
8,17
|
11
|
9,11
|
Mode
|
-
|
-
|
31 et 40
|
10
|
-
|
10
|
Ecart type
|
6,60
|
8,87
|
8,198
|
7,28
|
8,02
|
7,65
|
Minimum
|
31
|
20
|
20
|
1
|
3
|
1
|
Maximum
|
53
|
45
|
53
|
25
|
26
|
26
|
Source : Enquête de
terrain, Avril 2012.
L'expérience est fondamentale dans la
pérennité des activités de commercialisation. La plus
expérimentée des commerçantes à 26 ans
d'expérience et le plus expérimenté chez les hommes en a
25ans. La moyenne d'années d'expérience est de 8,17 ans chez les
hommes et de 11ans chez les femmes. Les collecteurs et les courtiers sont les
moins expérimentés contrairement aux grossistes.
4-Organisation de la
commercialisation :
Au Bénin, la campagne de commercialisation de
l'anacarde s'ouvre officiellement au cours du mois de mars et la période
officielle de l'exportation est fixée chaque année par le
gouvernement et généralement comprise entre le 15 mars et le 15
Octobre (JITAP, 2003).
Pour ce fait, la Direction Générale du Commerce
Intérieur (DGCI) du Ministère en charge du Commerce
préside une commission secteur public et secteur privé de
fixation du prix plancher de l'achat des noix aux producteurs au début
de chaque campagne. Depuis quelques années, ce prix plancher est
fixé à 200FCFA/kg de noix de cajou chaque année. La DGCI
règlemente également l'intervention des acteurs privés
(exportateurs) dans la commercialisation primaire des noix de cajou. Ainsi,
elle accorde les agréments aux grossistes pour commercer auprès
des producteurs. Le Bénin semble être le seul pays Ouest-africain
à pratiquer encore le système de prix plancher administré
(ASSOGBA et SOGLO, 2009). Cependant, dans la commune de Savalou, la
commercialisation des noix de cajou débute dans le mois de Janvier qui
coïncide avec le début de la récolte. Le prix à cette
date, dépend de la capacité financière lors des
activités d'entretien et des besoins urgents des producteurs avant et
pendant la période de commercialisation. Les producteurs pour le
remboursement des avances sur achat prises lors de l'entretien ou pour
régler leurs besoins urgents vendent leur production à des prix
allant de 100F à 150F le kilogramme en début de campagne. Par
ailleurs, l'accès à l'information sur les prix reste difficile
aux producteurs ce qui permet aux grossistes de manipuler les prix de vente
bord champs pendant la campagne de commercialisation à travers une
concurrence déloyale entre acheteurs ou une manipulation de
l'information sur les prix de vente selon leur intérêt et
créant des distorsions sur les prix de vente bord champs. Face à
la concurrence déloyale entre acheteurs, à la mauvaise
organisation de la commercialisation, à l'entrée d'individus sans
agrément dans le secteur, etc, certains acheteurs ont
décidé de faire confiance à l'Association Nationale des
Acheteurs de Produits Agricoles Tropicaux (ANAPAT) en y intégrant. En
outre, depuis quelques années, l'URPA-Z/C de même que l'UCPA
forte de la confiance que leur accordent 24,10% des producteurs en acceptant
la vente groupée des noix de cajou se sont lancés dans la
commercialisation des noix d'anacarde. Cette commercialisation se fait à
travers des contrats avec les usines de transformation et les exportateurs.
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