![]() |
L'etre-là africain et inculturation: essai d'une relecture théologique de Martin Heidegger pour l'Afrique( Télécharger le fichier original )par Roland TECHOU Grand Séminaire Mgr Louis Parisot Tchanvedji Bénin - Baccalaureat en théologie 2010 |
Chapitre 31.3- HEIDEGGER ET LES ENJEUX PHILOSOPHIQUES DE L'ETRE-LADès son origine, la philosophie s'est caractérisée par sa visée de l'universel. Or l'universel ne résulte pas de la somme des particularités culturelles, mais de la recherche d'une vérité commune à tous. Et celle-ci n'est identifiée comme telle qu'en se ressourçant dans un idiome particulier. Si avant le contact avec l'Occident moderne, il est difficile de parler de philosophie en Afrique noire, l'existence d'une pensée africaine incluse dans les manifestations traditionnelles de la culture négro-africaine n'est pas impensable. Et c'est ce qui nous sert de base pour voir à quelles conditions une philosophie peut être élaborée à partir de ce que la tradition culturelle de l'Afrique et sa situation actuelle donne à penser. Le mérite de cette entreprise revient dans une certaine mesure au Père Tempels malgré la précocité de ses analyses. Parmi ses détracteurs ou admirateurs, on peut apprécier l'oeuvre de Henri Maurier38(*) qui dans une étude globale de plusieurs sociétés africaines, définit la structure anthropocentrique fondamentale comme -Je-Avec -. On en retient la catégorie de la relation qui nous fait comprendre qu'en Afrique, le moi est essentiellement relationnel- l'individu étant alors une abstraction prélevée sur cette structure existentiale plus originaire. Une telle approche offre la possibilité d'un comparatisme inséparable d'une pensée dialoguale ; pensée à laquelle la pensée de Heidegger semble devoir être inévitablement associée. Aucun indice dans l'oeuvre de Heidegger ne nous offre l'occasion d'une telle analyse. Cependant, son attachement à la tradition, au terroir, à l'idiome rejoint la tendance africaine à se réclamer de la coutume, à revaloriser l'amour du pays et de la langue propre. Mais le plus intéressant chez Heidegger est sa notion d'ontologie fondamentale et on peut déjà se demander en quoi la notion bantoue de force vitale viendrait l'informer. Dans un tel sillage, l'herméneutique paraît le passage obligé pour mener à bien l'élaboration philosophique d'une pensée africaine. Assumer son identité implique un travail herméneutique d'assimilation, de conceptualisation et de critique d'une tradition reçue. Une telle herméneutique acquiert le statut d'une âme du développement, de l'autonomie et de l'accès à l'universalité. L'objectif de l'auteur est tripartite : montrer que la réappropriation critique par Heidegger de la tradition occidentale reste de part en part, un monologue ; relever que la présence unilatérale de Heidegger en Afrique ne relève pas d'une illusion d'optique ; indiquer néanmoins que cette présence de Heidegger en Afrique demeure, bon gré mal gré un monologue39(*). Pour réussir à atteindre ces objectifs, l'auteur part des présupposés d'un dialogue avec Heidegger autour de la question de la tradition. Il donne une nouvelle image du concept de tradition avant de présenter les références africaines à l'oeuvre de Heidegger. Il montrera enfin de compte, comment l'être manifesté africain est une quête et un devoir de l'universel -singulier. C'est cette analyse qui nous paraît pertinente dans notre démarche de redorer l'identité culturelle de l'homme africain dans son souci d'accueillir la foi chrétienne et de l'assimiler avec ses armes africaines. Ainsi, une culture, une tradition ne semble s'identifier qu'en face d'une autre. L'Afrique avait donc, si l'opportunité lui était laissée, le devoir de déployer sa culture, sa tradition en face de l'Occident. Puisqu'elle portait toutes les caractéristiques universelles de l'être-là que Heidegger approuve comme fondamentales. Il importe de finir cette partie en reprécisant la conception précise que donne Heidegger de cet être-là. Un être-là qui a une portée universelle dans laquelle l'africain se retrouve. Nous allons nous en saisir pour un mieux-être à partir du souffle théologique que nous lui donnerons.. * 38 _ Philosophie de l'Afrique noire, * 39 _ Antoine - Dover Osongo -Lukadi `' Heidegger et l'Afrique'' Réception et paradoxe d'un « dialogue » monologique Louvain -La-Neuve, Bruylant- Académia, 2001 |
|