Paragraphe II : l'immunité du président du
sénat
Dans ce paragraphe, pour comprendre le mot immunité,
Michel Ameller rappelle ajuste titre «qu'à Rome, les
tribuns de la plèbe, qui étaient en quelque sorte les
parlementaires de l'époque, étaient
considérés comme des personnages
sacro-saints et bénéficiaient à ce titre d'une protection
particulière était absolument interdit de s'attaquer à eux
ou de les gêner dans l'exercice de leurs fonctions. Tout individu qui
bravait cette interdiction devenait un hors-la-loi et pouvait être
exécuté par le premier venu.» (42).
Le processus intervenu en France est d'une tout autre nature.
En effet, la Déclaration des droits de l'homme de 1789 n'y est pas venue
confirmer un ensemble de droits déjà reconnus, mais proclamer une
ambition nouvelle à vocation universelle, destinée à
s'imposer au nom de la raison pure.
La conception anglo-saxonne des immunités plonge par
conséquent ses racines dans l'évolution progressive d'une
coutume, qui s'est consolidée lentement mais de façon
ininterrompue. Dans cette logique, la protection de l'individu, qu'il
possède ou non la qualité de parlementaire, va de soi et si, par
malheur, il n'en était pas ainsi, il reste toujours le recours ultime
face aux empiétements du pouvoir: l'appel à la justice
fondé dès 1215 sur la Grande Charte et précisé par
l'Acte Habeas Corpus. On comprend dès lors que les membres du Parlement
britannique n'aient vraiment ressenti le besoin d'instaurer une protection
spécifique pour eux-mêmes, les institutions de droit commun
suffisant à prévenir et à réprimer les poursuites,
les arrestations et les détentions illégales et arbitraires.
Il va sans dire qu'un tel régime n'est possible que dans la mesure
où il existe dans le pays un accord fondamental sur les valeurs
essentielles de la vie politique .
Inspiré des pays du nord, le Sénégal, en son
chapitre X intitulé:
« immunité » en les
articles 43 et 44 précise l'immunité d'un sénateur. Au
regard de ces disposition , le président du sénat du
Sénégal, conformément à l'article 61 de la
constitution, le président du sénat : « ne peut
être poursuivi,recherché,arrêté, détenu ou
jugé à l'occasion des opinions ou vote émis par lui dans
l'exercice de ses fonctions ».
Si le droit des immunités ne va (heureusement) plus
aussi loin à l'heure actuelle, il ne procède pas moins de la
même idée: les représentants du peuple doivent être
entourés de garanties, d'une part pour marquer la dignité, la
gravité et l'importance de la fonction qu'ils occupent et, d'autre part
et surtout, pour leur assurer une tranquillité d'esprit propre à
favoriser l'exercice de leur mandat. Dans cette optique, l'institution des
immunités parlementaires a donc bien une valeur universelle et
permanente, même si elle ne présente pas partout le même
aspect ni la même portée.
En effet, le président du sénat du
Sénégal ne peut, pendant le durée des sessions, être
poursuivi ou arrêté en matière criminelle ou
correctionnelle qu'avec l'autorisation du Sénat, sauf en cas de flagrant
délit. Par ailleurs, même hors des sessions, ne peut être
arrêté qu'avec l'autorisation du bureau du sénat dont il
est le président, sauf en cas de flagrant délit, tel que
prévu par l'alinéa précèdent, ou de condamnation
pénale définitive. Si le sénat le requiert, en cas de
détention ou de poursuite est suspendu.
Toutefois l'article 61 de la constitution du
Sénégal du 22 janvier 2001 en son dernier alinéa dispose
que « le membre du parlement qui fait l'objet d'une
condamnation pénale définitive est radié de la liste des
parlementaires sur demande du ministre de la justice ».
En grande Bretagne, de nos jours encore, la coutume veut qu'au
début de chaque nouvelle législature, le Speaker, dès son
élection, fasse valoir ses droits au nom de la Chambre des Communes
devant la Chambre des Lords en demandant humblement de confirmer les droits et
privilèges anciens et incontestés de la Chambre des Communes,
dont la liberté de parole(43).
La plupart des pays du Commonwealth ont été
marqués par la tradition britannique et ont adopté des
dispositions similaires. Mais le principe de la liberté de parole ou de
l'irresponsabilité parlementaire ne s'est pas arrêté aux
frontières du Commonwealth. Dans pratiquement tous les autres pays
(exceptions: Cuba, Kazakhstan), on retrouve sous l'une ou l'autre forme la
règle selon laquelle les parlementaires ne peuvent être poursuivis
en raison d'une opinion ou d'un vote émis dans l'exercice de leur
mandat.
L'irresponsabilité parlementaire se caractérise
non seulement par une relative homogénéité au niveau
international, mais aussi par une grande stabilité. La plupart des pays
signalent qu'aucune modification récente n'a été
apportée à la législation en la matière. Le champ
d'application de l'irresponsabilité parlementaire du président du
sénat du Sénégal (liberté de parole) peut
être étudié sous quatre angles: rationae personae (qui
bénéficie de la protection personnelle), rationae temporis
(début et fin de la protection), rationae loci (la protection est-elle
limitée à l'enceinte du Parlement ou s'étend-elle
au-delà) et rationae materiae ( les actes sont couverts par
l'irresponsabilité).
le Sénat australien vient de prévoir une
disposition en vertu de laquelle une personne qui a été
citée (dans un contexte négatif) au cours d'une réunion
parlementaire peut faire insérer une réponse dans le compte rendu
de la réunion; au Royaume Uni, une modification a été
apportée à la législation (Defamation A et 1996),
modification en vertu de laquelle les parlementaires peuvent renoncer à
leur privilège dans le cadre d'une procédure pour calomnie et
diffamation.
Dans un certain nombre de pays surtout, mais pas exclusivement
de tradition britannique (Canada, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas,
Suisse...), «la protection est plus étendue et
s'applique à toutes les personnes qui participent au débat
parlementaire (tels les ministres, même s'ils ne sont pas
parlementaires), ou à toute personne qui participe aux travaux
(...)»(44). C'est par exemple le cas en Australie et au
Royaume-Uni, où la liberté de parole s'étend
également à toutes les personnes qui participent aux travaux
parlementaires (fonctionnaires, témoins, avocats, requérants).
L'Irlande vient d'adopter une modification légale en ce qui concerne la
liberté de parole des témoins qui sont appelés à
comparaître devant une commission parlementaire.
Ces témoins jouissent d'une immunité absolue et
ne peuvent par conséquent pas être poursuivis pour des propos
qu'ils ont tenus au cours de réunions de la commission Qui s'inscrivent
plus dans la tradition française, l'irresponsabilité ne couvre en
principe que les parlementaires par exemple le cas du Sénégal.
Notons toutefois que la jurisprudence française admet, sur la base de la
loi du 29 juillet 1881 relative à la
Liberté de la presse, que les témoins qui
déposent devant une commission d'enquête parlementaire
bénéficient également de l'irresponsabilité.(45) En
définitive, si on se réfère de ce qui a été
dit ci-dessus, dans le règlement intérieur du sénat, deux
articles parles de l'immunité de façon général.
Mais, la loi reste muette sur les participants aux travaux du sénat.
Puisque le président du sénat a souligné que le
sénat doit s'inscrire dans les démocraties modernes, donc il faut
que tous les participants aux travaux parlementaires doivent
bénéficier les mêmes garanties que les parlementaires. le
président du sénat du Sénégal, les textes lui ont
attribués un statut mais aussi des attributions.
45--«On considère (cour d'appel de
Paris, 16 janvier 1984) que les propos des témoins entendus devant
une commission d'enquête bénéficient de l'immunité
prévue pour tout rapport et toute pièce imprimée par
l'ordre de l'Assemblée nationale et du Sénat, sauf en cas de
propos diffamatoires ou injurieux s'avérant étrangers à
l'enquête parlementaire ou malicieux.».
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