III. DONNEES BACTERIOLOGIQUES
A. Le type de prélèvement
85% des prélèvements ont été
effectué à la seringue. Ce type de prélèvement,
comparativement à l'écouvillon, permet de réduire
considérablement les contaminations de la flore commensale.
L'écouvillon a été utilisé pour les
lésions ouvertes dans 11% des cas.ces prélèvement sont en
général contaminés par la flore commensale.
KOUAME [2] retrouve respectivement pour les
prélèvements à la seringue et à l'écouvillon
79,2% et 20,8% des cas.
Les prélèvements osseux (séquestre) ont
représenté 4% des cas
B. L'examen macroscopique
L'examen macroscopique des collections suppurées a
été apprécié seulement sur des
prélèvements effectués à la seringue.
92% des prélèvements avaient un aspect purulent et
8% hématiques.
C. L'examen microscopique
72% des patients avaient un taux élevé de
leucocytes, ce qui est en faveur d'une infection, contre 28% qui avaient un
faible taux de leucocytes. Cette prédominance est aussi rapportée
par KOUAME [2]
Notre étude montre pour la flore aérobie, une
prédominance des coccidé Gram positif avec 23,91% contre 17,39%
pour les bacilles Gram négatif,
Cette prédominance est également rapportée
par DIOMANDE [31] et KOUAME [2]
Pour la flore anaérobie, il a été
observé 1 cas de bacille gram négatif soit 2,17 des cas. Ce
résultat est largement en deçà de ceux observé par
FOFANA [33], LAROQUE [37] et KOUAME
[2]. Ceci peut s'expliqué :
par une maitrise insuffisante des techniques de
prélèvements par les médecins du service (Afin
d'isoler des anaérobies stricts, il convient en effet d'éviter de
prélever la flore résidente par la ponction à l'aiguille
apr~s désinfection locale, et de réduire au minimum la
toxicité de l'oxygène sur le prélèvement durant son
transport jusqu'au laboratoire. En aucun cas le prélèvement ne
doit être placé au réfrigérateur)
et une attitude compulsive de prescription des antibiotiques
avant les prélèvements.
D. Les bactéries du groupe
infectéLe groupe infecté est représenté
par les 18 patients chez qui les prélèvements étaient
positifs sur les 46
patients recruté
Notre étude montre une prédominance des
staphylocoques avec 55%, suivis des entérobactéries 25%, des
bacilles Gram négatif non entérobactéries 15% et des
anaérobies 5%.
Ces résultats semblent être en contradiction avec
les travaux de KOUAME en Côte d'Ivoire, LAROQUE au Sénégal
et FOFANA en Guinée qui trouvent une prédominance des
streptocoques.
Dans les infections où les aérobies sont
présents, Eick et coll. [38] isolent toujours un
streptocoque, 5 fois un staphylocoque et 8 fois un bacille à Gram
négatif.
De 1995 à 1999[39] ZAKIA sur quarante
(40) cas de cellulites cervico-faciales à Oran en Algérie a
obtenu un taux des Staphylocoques de 66,66 %.
Une deuxième étude a été
réalisée par GHERBI et KOUAKI [39] (Oran en
Algérie), ont remarqué que les cellulites étaient
causées surtout par le Staphylocoque (88,88 %) et rarement par
le Streptocoque (11,12 %).
En comparant ces résultats avec les nôtres, nous
trouvons que les Staphylocoques deviennent de plus en plus
majoritaires dans la flore microbienne des dents et leurs accidents
infectieux.
D'où proviennent les Staphylocoques
?
Les Staphylocoques sont des coccidé Gram positif,
typiquement groupés en amas (en forme de grappe de raisin) ; ils sont
facultatifs et possèdent une catalase qui permet de les
différencier des Streptocoques. Ils sont immobiles,
asporulés et en général sans capsule. Les
Staphylocoques dits à coagulase positif comme S.
aureus ont un pouvoir pathogène important di à la
présence de l'enzyme staphylocoagulase. S. aureus est le type
même des bactéries pyogènes, c'est à dire, des
bactéries provoquant essentiellement des lésions suppuratives et
nécrotiques.
La peau et les muqueuses en particulier des cavités
nasales, sont l'habitat préférentiel des Staphylocoques,
où S. aureus et S. epidermidis
constituent la flore commensale dominante. La salive du tiers des individus
sains contient S. aureus et S. epidermidis en faible
proportion, et leur présence dans la plaque dentaire n'est
qu'occasionnelle. On trouve constamment S. epidermidis sur les
lèvres et les commissures labiales. Sur ces sites ainsi que sur la
langue, la présence d'une forte proportion de S. aureus signe
une pathologie. Ces données indiquent que les Staphylocoques ne font pas
partie de la flore indigène de la cavité buccale. Toutefois, la
proximité d'habitat où ils sont la flore dominante explique
qu'ils sont une flore de passage exprimant à l'occasion un pouvoir
pathogène opportuniste.
Les lésions qui caractérisent les
Staphylococcies sont suppuratives et nécrotiques,
d'évolution aiguë ou suraiguë et parfois même
chronique.
Elles sont dues à S. aureus,
appelé vulgairement Staphylocoque doré en raison de la
couleur jaunâtre de ses colonies sur gélose. S.
aureus devient de plus en plus résistant aux antibiotiques ! !
!
E. Profil individuel des germes
1. Staphylococcus aureus
Ce sont des coccidé Gram positif aérobies et
anaérobies facultatifs. Les souches de Staphylococcus aureus
sont connues pour provoquer des infections cutanées : cellulites,
staphylococcie maligne de la face... S. aureus partage avec la
bactérie Escherichia coli le triste privilege d'être au
premier rang des germes responsables d'infections
nosocomiales. L'élévation de l'incidence des infections
staphylococciques est en rapport avec le nombre croissant
d'immunodéprimés mais aussi avec la multiplication des
procédures invasives qui lèsent la barrière
cutanéo-muqueuse.
Les staphylocoques ont développé depuis longtemps
une résistance à la méticilline et plus de 30 % des
souches de staphylocoque doré sont maintenant résistantes
à la méticilline [40].
Les bétalactamases sont des enzymes inactivant
l'antibiotique par ouverture du cycle béta lactame. La
bétalactamase du staphylocoque est une pénicillinase qui induit
une résistance aux pénicillines G et A (Ampicilline,
Amoxicilline), aux carboxypénicillines (Ticarcilline) et aux
acyluréidopénicillines (Mezlocilline, Azlocilline et
Pipéracilline) mais n'a pas d'effet sur les pénicillines M
(Méticilline, Oxacilline, Cloxaciline), les céphalosporines et
les pénèmes (Imipenème). Cette pénicillinase
staphylococcique est inactivée par des produits dénommés
"inhibiteurs de bétalactamases" (acide clavulanique, Tazobactam,
Sulbactam) qui, associés aux bétalactamines, restaurent leur
efficacité. En milieu hospitalier, 80% au moins des staphylocoques sont
producteurs de bétalactamase.
LAROQUE et coll. Leur reconnaissent une sensibilité aux
aminosides.
Dans notre série, ces bactéries sont sensibles
à 100% aux aminosides (Nétilmicine, vancomycine) et à la
fosfomycine.
Bon niveau de sensibilité aux macrolides 70-80% et aux
quinolones de 50-80%
Par contre avec la péni G on note une résistance
à 85%. Cette résistance est reconnue dans la
littérature
[41].
2. Escherichia coli
Ce sont des bacilles Gram négatif aérobies. Ces
germes sont fréquemment résistant à l'amoxicilline
[42]. Dans notre étude, les souches isolées sont
résistantes à 100% à l'amoxicilline et 33 % restent
résistantes à son association avec l'acide clavulanique.
Par contre, pour les aminosides, on note un bon niveau de
sensibilité : 100% pour la Nétilmicine et à peu
près supérieur 50%. Pour la gentamycine.
Pour les autres, on note un niveau de sensibilité
à 100%pour l'imipenème et la fosfomycine, un taux de
sensibilité modéré pour les céphalosporines a
environ 67% et un taux de résistance à 100% pour la
Ciprofloxacine
3. Klebsiella pneumoniae
K. pneumoniae est naturellement résistant aux
pénicillines (amoxicilline, ticarcilline) par production d'une
bétalactamase de La résistance à l'amoxicilline et
à la ticarcilline correspond à une résistance naturelle de
cette espèce par sécrétion d'une pénicillinase
naturelle.
On peut remarquer que contrairement à E. coli, il
persiste une bonne activité de l'association amoxicilline -acide
clavulanique.
Excellente activité des autres familles d'antibiotiques :
Aminosides et quinolones, la sensibilité tend vers
100%
4. Pseudomonas aeruginosa
Ou bacille pyocyanique est une espèce bactérienne
fréquemment isolée en milieu hospitalier. Le traitement des
infections à pyocyanique est souvent difficile à cause de la
multi résistance, l'adaptation et la résistance naturelle de
cette espèce à de nombreux antibiotiques
Dans notre série on note une bonne sensibilité
dans l'ensemble aux â-lactamines avec des niveaux de sensibilité
allant de 50% pour l'association amoxicilline- acide clavulanique
jusqu'à 100% pour les céphalosporines (Ceftriaxone,
Céfotaxime, Ceftazidime...)
Céphalosporinases hyper produite.
La sensibilité aux aminosides reste bonne.
Pour les quinolones (Ciprofloxacine), on un taux de
sensibilité à 66%.
5. Proteus mirabilis
P. mirabilis est naturellement résistant
à la colistine.
Il persistance d'une bonne activité de l'ensemble des
â-Lactamines et des autres classes d'antibiotiques (aminosides,
quinolones...) avec 100% de souches sensibles.
6. Bactéroïdes
D'après LE BERGEY'S MANUEL rapporté par M'BOUP
[43], ce sont des bacilles Gram négatif
anaérobies strictes, non sporulées, commensales de la
cavité buccale, susceptibles de provoquer chez les sujets dont
l'hygiène bucco-dentaire est défectueuse, une gingivite et par
progression une cellulite.
Selon la littérature, ces germes sont sensibles :
A l'amoxicilline-acide clavulanique
Aux nitro-imidazolé
Aux quinolones Aux macrolides
Chloramphénicol
Dans notre étude le germe isolé au laboratoire n'a
pas poussé, ce qui n'a pas permis de tester sa sensibilité.
7. Profil général des germes
L'étude du profil bactériologique dans le service
de stomatologie et chirurgie maxillo-faciale du CHU de Cocody fait ressortir
que escherichia coli est le germe le plus résistant à
presque tous les antibiotiques testés ; surtout au bétalactamines
(pénicilline A) et le Cotrimoxazole.
Il y a de nombreuses preuves de la relation entre consommation
des antibiotiques et résistances aux antibiotiques [43]. Les
données générées par ESAC (European surveillance of
antimicrobial consumption) ont montré que la France était en 2001
le premier pays prescripteur de pénicillines en Europe [44]. On note
depuis 1990 une diminution significative des sensibilités aux
pénicillines A et au Cotrimoxazole d' escherichia coli
(respectivement 73,1% et 91,6% en 1990 à 62,8% et 80% en 1995).
Ceci s'explique aussi dans notre service car E. coli pourrai
avoir acquis une résistance du fait que, surtout les péni A sont
d'utilisations systématique dans presque toute les infections et ceci
depuis des années.
Dans l'ensemble, la sensibilité aux quinolones, aux
céphalosporines de 3e génération, à la fosfomycine
et aux aminosides reste élevée.
CONCLUSION
La fréquence des infections en stomatologie et chirurgie
maxillo-faciale, la rareté de recours à un antibiogramme due
à l'extrême urgence du traitement, mais surtout aux
difficultés économiques des patients, imposent la pratique d'une
antibiothérapie probabiliste de première intention basée
sur des connaissances épidémiologiques. Le constat du
développement de la résistance des germes couramment
rencontrés aux antibiotiques habituellement utilisés, justifie un
réajustement des protocoles thérapeutiques.
Nous avons une mené une étude de type
étude transversale exhaustive et descriptive sur une période de 7
(sept) mois au CHU de Cocody, incluent les patients de tous sexes, les patients
de tous âges et les patients présentant une infection patente ou
latente diagnostiquée par un médecin et ayant fait un examen
microbiologique.
Elle a porté sur les aspects
épidémiologiques, cliniques, bactériologiques et
thérapeutiques des infections en stomatologie et chirurgie
maxillo-facial.
Cette étude de la sensibilité aux antibiotiques des
germes isolés d'une série de 46 observations de manifestations
infectieuses nous a permis de montrer que :
Les cellulites maxillo-faciales constituent la pathologie
infectieuse la plus fréquente en stomatologie et chirurgie
maxillo-faciale avec 60,86% des cas
Les ostéites viennent en deuxième position avec
13,04% suivi de l'association cellulite-ostéite avec 10,86% des cas
Les autres pathologies représentent 15,24% de l'ensemble
des pathologies infectieuses.
L'étude bactériologique montre le type de
prélèvement semble influencer les bactéries isolées
; cependant, les autres bactéries sont fréquemment isolées
avec les écouvillons. Les bactéries isolées sont
dominées par :
les staphylocoques (55%), suivi des entérobactéries
(25%) avec pour chef de file escherichia coli (15%) les
bactéries Gram négatifs non entérobactéries sont
dominées par klebsiella pneumoniae (15%)
compte tenu des difficultés liées au
prélèvement et au transport, une bactérie anaérobie
(bactéroïdes) a été isolée dans notre
étude.
Sur le plan thérapeutique, la bi ou la tri
antibiothérapie est de règle compte tenu de la flore pluri
microbienne. Ce travail permet de prédire aux aminosides, aux
fluoquinolones, aux céphalosporines de troisième
génération, à l'association amoxicilline-acide
clavulanique et aux macrolides, une place prépondérante dans les
prescriptions antibiotiques en stomatologie et chirurgie maxillo-faciale au CHU
de Cocody.
RECOMMANDATIONS
Au terme de ce travail, nous pouvons formuler un certain nombre
de recommandation :
i. Concernant la nature des
prélèvements
> Les prélèvements â la seringue doivent
être préconisés car la qualité des résultats
dépend de la qualité des prélèvements.
> Si cela est possible, faire les prélèvements
avant toute prescription médicamenteuse
ii. Concernant l'antibiothérapie
probabiliste c'est-â-dire l'antibiothérapie de premiere
intention sans l'antibiogramme.
> Dans les cellulites
v' L'antibiothérapie de premiere
intention
Les cellulites aigues circonscrites :
amoxicilline* + aminoside**ou
amoxicilline* + métronidazole.
Les cellulites aigues diffusés :
amoxicilline*-acide clavulanique + aminoside**
ou amoxicilline*-acide clavulanique + métronidazole.
Les cellulites diffuses : C3G +
aminoside** + fluoquinolone
v' L'antibiothérapie de deuxième
intention
C3G + aminoside** ou C3G + métronidazole
> Dans les ostéites
Fluoquinolone + aminoside** ou fluoquinolone +
métronidazole
> Dans les stomatites et les infections des glandes
salivaires
( Patients hospitalisés
En première intention : amoxicilline*-acide
clavulanique + aminoside** En deuxième intention : C3G +
aminoside**
V' Patients en ambulatoire Macrolide +
métronidazole
L'antibiothérapie curative sera poursuivie jusqu'à
la disparition des signes des signes de l'inflammation.
> Dans l'antibioprophylaxie de la chirurgie propre ou
propre-contaminée aura recours â l'Amoxicilline.
> Dans l'antibioprophylaxie de l'endocardite
streptococcique : l'Amoxicilline par voie orale ou parentérale
(on utilisera les aminosides par voie parentérale et en cas de
contre-indication aux Bétalactamines.
P.S : * :si allergie aux
â-lactamines, remplacer par macrolide
** :si bilan rénal bon. Ne pas dépasser 5 jours de
traitement.
iii. A l'intention des autorités
( La nécessite de la création d'une commission du
médicament qui doit choisir les antibiotiques qui ont un taux de
sensibilité supérieur à 75% comme antibiothérapie
probabiliste.
( La collaboration entre clinicien et microbiologiste pour le
choix de l'antibiothérapie probabiliste. ( Promouvoir la formation des
spécialistes e bactériologies de la cavité buccale et en
maxillofaciale.
iv. A l'intention de la population
( Eviter l'automédication aux antibiotiques sources de
résistance ( Réaliser les soins dentaires adaptés et
précoce
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