L'abstentionnisme électoral au mali depuis l'avènement du multipartisme en 1992.( Télécharger le fichier original )par Madou NIMAGA Université Cheickh Anta DIOP de Dakar - DEA en Science politique 2006 |
Première Partie :Les facteurs liés au processus organisationnel des élections et à la conjoncture.« D'après une opinion courante, les élections ne sont qu'un domaine d'incohérence et de fantaisie. En les observant à la fois de près et de loin, je suis arrivé à une conclusion contraire. Si selon le mot de GOETHE l'enfer même à ses lois, pourquoi la politique n'aurait-elle pas les siennes ? ». SIEGFRIED A., Tableau politique de la France de l'ouest, Paris, A. Colin, 1913.
Les déterminants de la participation électorale à travers les études classiques (aussi bien américaine que française) du comportement électoral sont liés surtout aux variables sociaux 64(*)(biologique, économique, culturel...) tels que l'âge, le sexe, l'habitat, la profession, la faible insertion sociale, l'identification partisane, les solidarités communautaires ou religieuses etc. Il s'agit ici pour nous de prolonger l'analyse des facteurs explicatifs de l'abstentionnisme électoral en diagnostiquant l'impact des défaillances liées au processus organisationnel des élections et le poids de la conjoncture (les enjeux électoraux, l'offre politique, le calendrier électoral...). Au Mali, le vote est un droit (Electorat-droit) et non une obligation donc l'abstention électorale peut apparaître considérée comme une alternative offerte au citoyen dans une situation de choix sollicité en particulier à l'occasion d'élection politique de voter ou de ne pas voter. En effet comme l'a souligné Alain LANCELOT65(*) : « le comportement électoral n'est pas un comportement totalement autonome (...), c'est un comportement sollicité, instrumental vis-à-vis du système politique et qui peut être considéré comme un comportement sous contrainte ». En d'autres termes, le système politique peut modifier les taux de participation politique, en particulier le système électoral peut influencer de son côté la participation électorale. Ainsi dans cette première partie, nous étudierons d' une part les facteurs liés à l'organisation technique et matérielle des élections(Chapitre I) et d'autre part, les facteurs liés à la conjoncture(Chapitre II)
CHAPITRE I : L'organisation technique et matérielle des élections.La crédibilité d'un scrutin dépend surtout de sa bonne organisation c'est-à-dire aussi bien de sa préparation technique que de son organisation matérielle. Il s'agit de toutes les opérations effectuées depuis l'inscription des électeurs sur les listes électorales jusqu'aux opérations de vote proprement dites. Cette phase est très déterminante pour la participation électeurs. Au Mali, de l'accession à l'indépendance en 1960 jusqu'aux évènements de mars 1991, l'organisation des opérations électorales et référendaires a été toujours assurée par le seul département de l'administration territoriale avec des fortunes diverses. L'avènement de la démocratie pluraliste en 1992 a vu la création d'autres structures électorales indépendantes comme la commission électorale nationale indépendante (CENI) et la délégation générale aux élections (DGE). La création de la CENI en 1997, tant revendiquée par les partis politiques de l'opposition, en vue de l'organisation des élections générales de la même, s'est soldée par un fiasco électoral. En effet, le scrutin du 13 avril 1997 a été annulé par la cour constitutionnelle au motif de la non-présentation des listes électorales à la cour. C'est pourquoi, depuis 2002 l'organisation technique et matérielle des élections sont confiée à diverses structures avec des rôles spécifiques bien déterminés. Malgré l'implication de la CENI et de la DGE, le Ministère chargé de l'Administration Territoriale et des Collectivités Locales (MATCL) constitue toujours la cheville ouvrière de l'organisation technique et matérielle des élections. Ceci s'explique selon les autorités par l'expérience de ce département dans l'organisation des élections et sa présence effective sur toute l'étendue du territoire national. Au terme de nos enquêtes, il ressort que les modalités d'inscription des électeurs, l'état du fichier électoral (Section I) ainsi les défaillances liées aux opérations de vote (Section II) concourent à la faible participation électorale.
SECTION I : Les facteurs liés l'inscription des électeurs et à l'état du fichier électoral.Au regard, de la controverse autour des consultations électorales de 1997, largement due à la méfiance des acteurs vis-à-vis de la qualité du fichier électoral existant, le gouvernement s'est donc engagé à mettre en place un fichier électoral fiable et accepté par tous en vue des prochaines échéances. C'est dans ce cadre qu'a été réalisé le recensement administratif à caractère électoral (RACE) en 2001. Malgré cette volonté politique du gouvernement appuyée par ses partenaires financiers en vue d'améliorer la fiabilité du fichier électoral66(*), le constat est que la qualité de ce dernier continue toujours d'être mise en cause par les acteurs politiques. En outre, le Mali a opté pour le mode d'inscription d'office ou automatique des électeurs sur les listes électorales qui d'après plusieurs observateurs, contribue à augmenter les taux d'abstention. L'étude des facteurs liés au recensement et à l'établissement du fichier électoral, nous amène à analyser l'impact du mode d'inscription des électeurs sur la participation électorale (Paragraphe 1) et les incohérences contenues dans le fichier électoral en dépit de son informatisation (Paragraphe 2). * 64 Ces déterminants lourds seront abordés plus tard dans la deuxième partie de ce mémoire. * 65 In Abstentionnisme électoral en France, A. Colin, Paris, 1968. * 66 Le fichier électoral du Mali est désormais informatisé et est disponible en ligne : http://www.dgemali.net/inscription.html. |
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