UNIVERSITE PANTHEON-- ASSAS PARIS II
DROIT- ECONOMIE-SCIENCES SOCIALES
LES RESEAUX SOCIAUX
EN LIGNE ET LA VIE PRIVEE
Mémoire de Master 2 professionnel de Droit du
Multimédia et de l'Informatique.
Année universitaire 2008 - 2009
Melle FAGET Marie
Directrice de recherche : Mme METALLINOS
SOMMMAIRE
Sommaire~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~..~~~..1
Listedes
abréviations.............................
.....................................................4 LexiqueFacebook...................
......................................................
............5 Introduction................................................................................................7
CHAPITRE 1 : La protection des utilisateurs contre
l'exploitant du site de réseau social ..13
Section préliminaire : L'entreprise qui exploite
un site de réseau social est-elle un responsable de traitement de
données à caractère personnel ?.. 14
I Les informations sur les utilisateurs de réseaux
sociaux sont des données à caractère
personnel.......................................................
............................................. ......15
A Les données à caractère personnel
.............................................................................15
B Les données sensibles..................................
........................................................15
C L'incertitude sur la qualification de donnée personnelle
de l'adresse IP........................ ... .16
Le traitement de données à caractère
personnel............... ............................................18
Le responsable du traitement du site
Facebook............................... ............................19
Section 1 : L'application incertaine de la loi
Informatique et Libertés à Facebook 21
I L'application du critère de territorialité de
la loi Informatique et Libertés...................... ...... 21
A Le lieu d'établissement du responsable du
traitement............................... ......................22
B Le recours à des moyens de traitement situés sur
le territoire français................................. 24
II. La loi Informatique et Libertés doit-elle s'appliquer
à tout prix ?~~~~~~~~.~~~~~25
A Les solutions à l'application de la loi Informatique et
Libertés ......... 26
B. Le droit applicable aux données à
caractère personnel des membres français de Facebook
en l'absence d'application de la loi Informatique et Libertés
................................................. .30
Section 2 : Les atteintes causées par Facebook,
violant ses obligations de responsable de traitement ...32
I. L'exploitation des données : le système de
ciblage publicitaire............................... ..........32
La publicité ciblée sur Facebook
........................................................................
....33
L'application de la loi Informatique et Libertés à
la publicité ciblée sur Facebook...................35
Les solutions pour encadrer la publicité ciblée sur
Facebook........................... ......... .....35
II. La conservation des données : le droit à
l'oubli 37
Les textes relatifs au droit à l'oubli
.........................................................................38
L'absence de droit à l'oubli sur
Facebook....................................................
..............39
Les solutions permettant l'exercice du droit à
l'oubli.............................................. ......40
CHAPITRE 2 La protection des utilisateurs contre les
autres membres du site de réseau social . .43
Section I. Les atteintes à la vie privée et
à l'image sur les réseaux sociaux . 43
I Les atteintes traditionnelles à la vie privée
et à l'image sur les réseaux sociaux................ ...
...44 A L'application des règles ordinaires de protection de la vie
privée et de l'image ......... ...... .....44 B. L'application de
règles spécifiques de protection de la vie privée et de
l'image ......... ............52 II. Les atteintes inédites
à la vie privée et à l'image sur les réseaux
sociaux ...................... .......54 A. La politique de
confidentialité de Facebook
............................................................... 55
B. La libre volonté de la personne de dévoiler sa
vie privée..................... .............. ............56
Section II Les abus de liberté d'expression sur
les réseaux sociaux 58
I. La constitution des infractions de presse sur les
réseaux sociaux............ .... .......................59
L'élément fondamental aux infractions de presse :
la publicité .........................................59
Les éléments spécifiques constitutifs de la
diffamation et de l'injure....................................61
II. La répression des infractions de presse sur les
réseaux sociaux..........................................66
La détermination de la personne responsable sur les
réseaux sociaux...................................66
La prescription des infractions de presse commises sur les
réseaux sociaux ................... ......67
Conclusion 70
Bibliographie ..71
Table des matières .77
AJF Actualité juridique de la famille
Ass. plén. Arrêt de l'assemblée
plénière de la Cour de Cassation
Art. Article
Bull. civ. Bulletin des arrêts des chambres civiles de la
Cour de Cassation
Cass. Cour de cassation
CA Cour d'appel
CCC Contrats concurrence consommation
CCE Communication Commerce Electronique
CEDH Arrêt de la Cour européenne des droits de
l'homme
CESDH Convention européenne de sauvegarde des Droits de
l'Homme
Cf. Voir
Chron. Chronique
Civ. Arrêt d'une chambre civile de la Cour de Cassation
comm. Commentaire
Com. Arrêt de la chambre commerciale de la Cour de
cassation
concl. Conclusions
cp code pénal
crim. Arrêt de la chambre criminelle de la Cour de
Cassation
D. Recueil Dalloz
éd. Edition
G.P Gazette du palais
Infra Ci-dessous
IP : Internet protocol pour « protocole Internet
».
Jp. Jurisprudence
JCP Juris- classeur périodique générale
(Semaine Juridique)
JO Journal officiel
LCEN : Loi pour la confiance dans l'économie
numérique
LPA Les petites affiches
n° Numéro
obs. Observations
p. Page
RLDI Revue Lamy droit de l'immatériel
RTD civ. Revue Trimestrielle de droit civil
s. Et suivants
somm. Sommaires
supra Ci-dessus
TGI Tribunal de grande instance
V. Voir
LEXIQUE DES TERMES PROPRES AU SITE FACEBOOK
Accueil / Actualité / Home :
Page d'accueil, accessible à tout moment en cliquant sur l'onglet en
haut à gauche de la page Facebook, sur laquelle est
générée une liste de toutes les activités
récentes des amis par ordre chronologique.
Ami : personne qui a été
acceptée comme tel au terme d'une procédure de demande et
d'acceptation. Les amis peuvent voir l'intégralité de leur page
respective (sauf si la fonction de blocage a été
activée).
Application : logiciel ou fonctionnalité
activable dans Facebook, utilisant le plus souvent les données
renseignées par l'utilisateur.
Bannière : encart affiché sur les
pages Facebook contenant un ou plusieurs messages publicitaires.
Beacon : système de
publicité ciblée.
Configuration du compte / paramétrage du
compte : onglet permettant à tout membre de modifier les
paramètres d'utilisation de Facebook, tels que la visibilité de
son profil, les informations publiées aux autres utilisateurs,
l'activation des systèmes de publicité ciblée, etc.
Fonction recherche : fonction permettant de
retrouver une personne inscrite sur Facebook en tapant son nom et prénom
dans en encart situé en haut à droite des pages Facebook.
Groupe : groupe de personnes ayant choisies
de rejoindre un groupe thématique, possédant son propre profil,
et permettant d'envoyer des messages aux adhérents via le système
de messagerie interne de Facebook.
Mur / Wall : espace personnalisable
faisant partie de la page de chaque membre où peuvent être
affichés des messages provenant d'amis (ou de la personne
elle-même), des vidéos.
Profil : espace personnel
réservé à chaque membre inscrit sur Facebook, accessible
après avoir renseigné son identifiant et son mot de passe sur la
page d'accueil du site sur lequel se trouve les informations données
lors de son inscription, son mur, ses photos.
Réseau / Network : groupe Facebook
dont l'adhésion nécessite de suivre une procédure
particulière d'authentification, permettant à chaque membre de
voir le profil des autres membres du même réseau. Cette
procédure d'authentification repose sur une adresse électronique
liée à ce réseau quant il s'agit d'un réseau
sélectif (université, école, entreprise) mais est
totalement libre s'agissant des réseaux géographiques (pays,
région, ville).
Social Ads : système de
publicité ciblé.
Statut : courte phrase qu'un membre choisit
d'afficher sur son profil et visible sur la page d'accueil de ses amis.
Taguer/Marquer une photographie : indiquer le
nom de la personne sur une photographie pour que la personne soit
identifiée et sache qu'une photo la représentant a
été mise en ligne. Dès que le nom de la personne sur la
photographie est indiqué, la photographie est visible sur le profil de
la personne concernée.
INTRODUCTION
« Internet est avant tout un espace d'expression
humaine, un espace international qui transcende les frontières, un
espace décentralisé qu'aucun opérateur ni aucun Etat ne
maîtrise entièrement, un espace hétérogène
où chacun peut agir, s'exprimer et travailler, un espace épris de
liberté»1. Dans ce rapport datant de 1998,
l'urgence de protéger les données personnelles et la vie
privée des individus dans l'univers numérique se manifestait
déjà.
Dix ans plus tard, cet enjeu de protection se pose avec une
acuité grandissante avec le développement des réseaux
sociaux en ligne.
Les réseaux sociaux en ligne peuvent être
définis comme l'ensemble des sites qui permettent de mettre en relation
des personnes (ami, connaissance, collègue,)2
rassemblés en fonction de centres d'intérêts communs, comme
par exemple les goûts musicaux, les passions ou encore la vie
professionnelle3.
Les réseaux sociaux s'inscrivent dans le cadre du web
2.0, terme inventé par Dale Dougherty et popularisé en 2004 pour
désigner « la nouvelle génération de site
Internet et d'internautes qui utilisent des interfaces permettant d'interagir
avec le contenu des pages »4 Le passage au web 2.0, web communautaire
et interactif, a multiplié les communautés virtuelles en
diversifiant les possibilités de connections entre profils d'internautes
et les types d'objets mis en partage.
Les réseaux sociaux se sont imposés en l'espace
de 6-7 ans pour constituer aujourd'hui de véritables
phénomènes de société puisqu'en décembre
2008 près de 64% des internautes français les consultent, soit
plus de 21,7 millions de personnes en France5. Le leader des
1 J-F Théry, I. Falque-Pierrotin, « Internet et les
réseaux numériques », étude adoptée
par l'Assemblée générale du Conseil d'Etat
le 2 juillet 1998, La Documentation française, 1998, disponible sur
http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/984001519/0000.htm
2
http://www.nicolas-bermond.com/social-networking/definition-site-de-social-networking-6
3
http://lewebpedagogique.com/usagetic/category/veille-pedagogique/
4 AJ Pénal n° 3/2009 de mars 2009, Dossier
Cybercriminalité : morceaux choisis p. 120.
5
http://www.01net.com/editorial/403740/le-chiffre-du-jour-64-pour-cent-des-internautes-francais-frequententdes-reseaux-sociaux/
réseaux sociaux dans l'Hexagone est le site Facebook qui
enregistre 12 millions de visiteurs soit une progression de 443% en un an entre
décembre 2007 et décembre 20086.
Histoire et diversité des réseaux
sociaux
Les jeunes de moins de 18 ans étant grands
consommateurs de nouvelles technologies, les sites de réseaux sociaux se
sont d'abord tournés vers eux7. Ainsi le premier
réseau social en ligne,
classmates.com lancé en 1995,
avait pour finalité de mettre en relation des camardes de classes. Il
fut suivi en 1997 par
sixdegree.com puis par Friendster en
2002 dont le but était de permettre aux membres de ce site de rester en
contact avec leurs amis et de faire de nouvelles connaissances. Le concept de
réseau social a été réellement popularisé
par l'arrivée du site Myspace en 2002, dans lequel l'utilisateur se
crée un espace personnel à son image et partage ses passions avec
les personnes qu'il a accepté comme « ami »8 pour
ce site. Facebook, site de réseau social généraliste
d'abord réservé aux étudiants d'universités
américaines connait aujourd'hui un succès mondial. En
février 2009, le site enregistre près de 175 millions
d'abonnés à travers le monde9.
Les derniers réseaux sociaux en ligne sont davantage
tournés vers des sujets spécifiques tels le sport (par exemple
the IPL Fan Club, un réseau social pour les fans de criquet), les
passions diverses (The Rising, le réseau social de Steven
Spielberg pour les fans de science fiction et de phénomènes
paranormaux) ou vers les professionnels (Linkedln, Viadeo en sont des
exemples).
La mise en scène de soi
Dans « L'ère du vide », le philosophe Gilles
Lipovetsky10 décrit l'avènement d'une
société postmoderne, hyper-individualiste dans laquelle
l'individu, absorbé par lui-même, personnalise ses objets
quotidiens dans le but de se distinguer des autres. Ce livre, écrit dans
les années 80, pressentait l'arrivée d'une société
à l'individualisme exacerbé par deux grandes
6
http://www.secrets2moteurs.com/reseaux-sociaux-france-facebook.html.
7 F Pisani et D Piotet « Comment le web change le monde
: l'alchimie des multitudes » éditeur village mondial, 2008
p.17.
8 Le terme « ami » sera utilisé tout
au long de ce mémoire pour identifier les membres de Facebook qu'une
personne a accepté dans sa liste de contact et qui peuvent interagir sur
sa page
personnelle.
9tempsreel.nouvelobs.com/depeches/medias/20090219.REU9164/volteface_de_facebook_sur_ses_conditions_d
utilisation.html.
10 G. Lipovetsky « L'ère du vide :
essais sur l'individualisme contemporain », édition Gallimard
1983
tendances11 : un processus de subjectivisation,
d'extériorisation de soi oü l'individu se définit plus par
ses actions que par son moi intérieur ; et un processus de simulation de
soi caractérisé par une tension entre l'identité
très réaliste de la personne dans la vie physique et une
projection, simulation de soi dans l'univers virtuel (qui aujourd'hui est
internet).
Les réseaux sociaux en ligne s'inscrivent dans cette
recherche de sublimation de l'image de soi: les profils permettent de sculpter
l'image que les personnes souhaitent montrer d'elles méme, l'utilisateur
cherchant à gérer l'impression qu'il peut avoir sur les autres.
Par des photos, des commentaires laissés sur le profil de ses amis,
l'individu recherche l'approbation de ses pairs et se met ainsi en
scène12. Toutefois l'identité numérique est
aussi complexe que l'identité dans le monde physique. En effet, nous
n'avons pas une identité mais des identités qui sont
pléthores/multiples en raison de la variété de nos
facettes/humeurs, des situations, des personnes auxquelles nous nous adressons.
Cette multiplicité de l'identité se retrouve dans l'espace
numérique et est relatif : tantôt très visible,
tantôt plus obscur.
Typologie des réseaux sociaux
Selon Dominique Cardon, sociologue au laboratoire Sense
d'Orange Labs, on peut classer les réseaux sociaux selon trois grands
types de plateforme en fonction du degré de visibilité que chaque
site confère au profil de ses membres13 : le réseau
social paravent est un réseau ouvert dont le modèle type
est le site de rencontre. L'identité de la personne est définie
par un certain nombre de critères très objectifs le
décrivant mais l'individu ne se dévoile pas réellement et
se cache derrière un pseudonyme. La personne ne dévoilera son
identité civile qu'après un long processus d'interaction
progressifs : d'abord sur le site via sa fiche profil, puis par mail,
messagerie instantanée, téléphone et enfin par une
rencontre dans la vie réelle. Le réseau social
clair-obscur se caractérise par la visibilité de
l'intimité, du quotidien, de la vie sociale de la personne mais
auprès d'une communauté limitée et connue dans la vie
réelle. L'utilisateur n'a pas conscience de s'adresser à l'espace
public mais à un petit cercle d'amis. Les tiers n'accèdent que
difficilement à la fiche de la personne, soit parce que l'accès
est limité, soit parce que l'imperfection des outils de recherche sur la
plateforme Internet rendent
11 D. Cardon « Le Design de la visibilité. Un
essai de cartographie du web 2.0 » dans la revue Réseaux :
Communication,-Technologie,-Société Volume 26 n° 152/2008
p.95 &s.
12 D.Boyd « production d'identité dans une
culture en réseau » traduction dans Métamorphoses 21
« Culture numérique, Cultures expressives ».
13 D. Cardon « Le Design de la visibilité. Un
essai de cartographie du web 2.0 » dans la revue Réseaux :
Communication,-Technologie,-Société Volume 26 n° 152/2008
p.95 &s.
cet accès complexe et difficile. Dans ce type de
réseau social, ceux qui se connaissaient déjà dans le
monde réel enrichissent, renforcent leur relation par des
échanges virtuels qui leur permettent aussi d'entrer en contact avec la
nébuleuse des amis d'amis. L'exemple type de ce modèle de
réseau social est Skyblog.
Le dernier type de réseau social est le
modèle phare qui cumule les deux caractéristiques des
modèles précédemment envisagés : les participants
rendent visibles de nombreux traits de leur personnalité en donnant des
informations sur leurs goûts, leur intimité, leur identité
civile (modèle clair-obscur) et leurs profils sont accessibles à
tous (modèle paravent). Le but des utilisateurs du modèle phare
est de partager des contenus tels que la photo (Flicker par exemple), la
vidéo (YouTube par exemple) ou la musique (MySpace par exemple). Les
amis sont des moyens de gagner en visibilité sur le site et donc le
compteur d'amis est souvent énorme.
Chaque site de réseau social propose donc une politique
de visibilité spécifique et cette diversité des
visibilités permet aux utilisateurs de montrer sur chaque type de
réseau social une partie de leur identité. Toutefois de nouvelles
pratiques se développent dans l'univers des réseaux sociaux et
font apparaître une interconnexion entre des univers autrefois bien
délimités. Facebook est au coeur de cette recomposition puisque
les utilisateurs, derrière leur nom propre, mêlent de plus en plus
amis, collègues et inconnus.
Présentation de Facebook
Facebook s'est propagé à travers le monde
à une vitesse impressionnante. Créé en 2004 par un
étudiant d'Harvard, Mark Zuckerberg, ce « trombinoscope »
(signification du nom Facebook en anglais) était d'abord
réservé aux élèves de cet établissement
avant de s'ouvrir aux étudiants de grandes écoles ou
d'université par vérification de l'adresse électronique de
l'étudiant14. Depuis septembre 2006, le site est ouvert
à tous les internautes, ce qui a largement contribué à son
succès. Le modèle même du site incite les membres à
publier sur le réseau social toujours plus de données, parfois
méme sans qu'ils s'en rendent compte : dès l'inscription, le
nouvel arrivant est invité à donner des informations sur ses
caractéristiques stables et durables (état civil, études,
adresse de domiciliation, numéro de téléphone) mais aussi
sur ses signes d'identité beaucoup plus mouvants tels que ses opinions
politiques, ses préférences sexuelles, ses centres
d'intérêts. Il peut également agrémenter son
14 E. Delcroix et A. Martin « Facebook, on
s'y retrouve » édition Pearson p 7.
profil d'une photo qu'il pourra modifier ultérieurement
par toutes les photos mises en ligne le concernant. Facebook propose des
fonctionnalités optionnelles nommées « applications
» qui apparaissent à l'affichage de la page de profil de
l'utilisateur.15 Les plus courantes sont la liste de ses amis et des
groupes auxquels le membre appartient, un « mur » permettant
à ses amis de laisser des messages, vidéos, documents
multimédias, un mini-blog nommé « statut »
invitant l'utilisateur à décrire son humeur du moment en une
phrase qui est visible par tous ses amis. Une boite de réception
privée, un chat, une fonction recherche et d'actualité
(service permettant de rendre visibles aux utilisateurs et à leurs amis
leurs dernières sur Facebook) sont également présents. La
politique de confidentialité des données des utilisateurs est
minime sur Facebook. Par défaut, les informations publiées par
l'utilisateur sur son profil, son mur, sont accessibles à un cercle
élargi d'utilisateurs. Il appartient au membre du site de se diriger sur
l'onglet confidentialité du site et de décocher les cases
relatives aux informations qu'il souhaite ne révéler qu'à
ses amis. Les novices des sites de réseaux sociaux apprennent souvent
à leurs dépens que les informations qu'ils éditent sont
visibles par tous et non uniquement par les personnes de leur liste d'amis.
Pour plus de clarté dans la compréhension des
termes propres à Facebook, un lexique de ces termes est disponible au
début de ce mémoire.
Un compte Facebook a également été
créé spécifiquement afin d'apporter une approche pratique
à ce mémoire. Pour y accéder, il vous suffit
- de vous rendre sur le site
www.facebook.fr
- et d'entrer les identifiants et mots de passe suivants dans les
champs situés en haut de page :
o Identifiant =
memoiredmi@gmail.com
o Mot de passe = 20082009
La problématique de la
visibilité
Le « Panoptique » de Jeremy Bentham, figure
architecturale conçue de manière à ce que chaque
détenu se trouve dans une cellule d'oü il peut être vu mais
d'oü il ne peut voir personne, devient réalité : tout
individu peut surveiller les autres utilisateurs du réseau sans qu'ils
ne s'en rendent comptent16. La planète est réduite
à la dimension de « village »17, la
15
http://fr.wikipedia.org/wiki/Facebook.
16 J. Bentham, Le Panoptique, 1780.
surveillance devient participative. Cette intrusion publique peut
être préjudiciable au niveau familial, amical voire
professionnel.
Faut-il pour autant éviter les sites de réseaux
sociaux ou se désinscrire de ces sites afin de ne rien publier sur
internet ?
Le boycott des sites de réseaux sociaux n'est pas la
solution. En effet, s'il est essentiel d'éviter de s'exhiber sur
internet, de surveiller les éléments de sa réputation
numérique, il est également important voire primordial d'avoir
une existence numérique, une vitrine. En effet Olivier
Zara18 explique dans un chapitre de son livre consacré
à la réputation numérique qu' « Avoir une
réputation numérique, c'est être transparent, c'est montrer
votre capacité à partager l'information, à exprimer des
idées ou des opinions, à utiliser les technologies de
l'information qui sont aujourd'hui au coeur de la performance des
organisations, et votre sens du risque ou votre esprit d'initiative.
» Ne pas figurer sur internet serait maintenant suspect et pourrait
être un facteur d'exclusion selon le milieu dans lequel évoluent
certaines personnes. En quelque sorte, ne pas être
référencé serait encore pire que de l'être. Se pose
ainsi le problème de la frontière vie privée, vie
publique, qui devient opaque, poreuse.
Ce mémoire, consacré aux réseaux sociaux
et aux risques d'atteinte à la vie privée, utilisera Facebook
comme principal exemple. Ce mémoire ne recherche pas
l'exhaustivité mais analysera les principales atteintes dont peuvent
être victimes les membres des réseaux sociaux pour comprendre si
le droit en vigueur permet de sanctionner correctement ces atteintes.
En l'absence de jurisprudence sur les atteintes portées
par Facebook, il s'agit ici d'identifier les régimes applicables par
défaut et de formuler des propositions d'adaptation à ce nouveau
représentant du Web 2.0.
Nous aborderons les deux principaux types d'atteintes
susceptibles d'être commises sur les sites de réseaux sociaux
ainsi que leur protection par le droit positif. L'étude se scindera en
deux parties avec, d'une part, la protection des utilisateurs contre
l'exploitant du site de réseau social (Chapitre1) et, d'autre part, la
protection des utilisateurs contre les autres membres du site de réseau
social (Chapitre 2).
17 Expression tirée du livre de M. Mac Luhan «
Message et massage, un inventaire des effets » 1968 dans lequel
M. Mac Luhan explique que les nouveaux moyens de communication permettent de
relier les individus partout dans le monde pour ne devenir qu'un village, un
« village planétaire ».
18 O. Zara « Réussir sa carrière
grâce au Personnal Branding », chapitre 8 L'impact de notre vie
numérique sur notre identité et notre réputation
professionnelles éditeur Eyrolles.
Chapitre 1 : La protection des utilisateurs
contre l'exploitant du site de réseau social
Les exploitants des sites de réseaux sociaux pourraient
se voir appliquer deux qualifications : celle de responsable de traitement et
celle d'hébergeur. Nous aborderons succinctement la qualification
d'hébergeur pour mieux nous concentrer sur la qualification de
responsable de traitement.
Les sites de réseaux sociaux permettent aux
utilisateurs de mettre en ligne toutes sortes de contenus, dont des
vidéos. Certains de ces contenus peuvent être
protégés par un droit de propriété intellectuelle,
de sorte que les ayants droits attaquent les exploitants de sites de
réseaux sociaux (tout particulièrement Youtube, Dailymotion qui
sont des modèles phare de réseaux sociaux) lorsque des
oeuvres dont ils sont titulaires sont mis en ligne. Les sites de réseaux
sociaux affirment de leur côté bénéficier de la
qualité d'hébergeur au sens de l'article 6-I-2 de la loi pour la
confiance en l'économie numérique (LCEN) et jouir ainsi de la
responsabilité limitée dérogatoire au droit commun qui en
découle. En effet, aux termes de l'article 6-I-7 de la LCEN, les
hébergeurs ne sont soumis à aucune obligation
générale de surveillance des informations qu'ils transmettent ou
stockent, ni à une obligation générale de rechercher des
faits ou des circonstances révélant des activités
illicites. Dès lors, leur responsabilité ne peut être
engagée que lorsqu'ils ont pris connaissance de manière effective
du contenu illicite, ils n'ont pas agit promptement pour le retirer (article
6-I-2 de la LCEN). Les sites de réseaux sociaux n'étant pas
dotés d'un statut légal spécifique, les juges ont du les
rattacher à une catégorie préexistante19,
souvent de manière contradictoire, même si depuis peu le
régime semble s'être stabilisé. Comme il n'existe aucune
décision de justice impliquant spécifiquement Facebook, il
convient de se tourner vers les décisions impliquant Myspace, autre site
de réseau social, ainsi que Youtube et Dailymotion, qui sont des sites
de partage de contenu dont la problématique est identique à celle
de Facebook. Les dernières décisions rendues qualifient ces sites
d'hébergeur20et, par analogie, en l'état actuel de la
jurisprudence, Facebook serait donc qualifiable d'hébergeur. Nous
n'entrerons pas plus en détail pour nous intéresser en
priorité à la protection des données à
caractère personnel.
19 C. Féral-Schuhl « Cyberdroit, le droit
à l'épreuve de l'Internet », 5e
édition, p. 799.
20 TGI Paris 10 avril 2009 Zadig productions contre
Dailymotion; CA Paris Paris 6 mai 2009 Dailymotion contre Nord Ouest Production
et autres, TGI Paris 14 novembre 2008 Jean Yves Lafesse contre Youtube ; TGI
Mulhouse 17 mars 2008 Société anonyme d'Économie Mixte
Solea contre Youtube ; TGI Paris Ordonnance de référé 09
février 2009 Kimberley P. contre Myspace et autres 09/02/2009.
Après avoir envisagé la qualification
d'hébergeur des sites de réseaux sociaux, il conviendra de
déterminer si les entreprises exploitant ces sites peuvent se voir
imposer la qualité de responsable du traitement de données
à caractère personnel ainsi que les obligations en
découlant.
La loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à
l'informatique, aux fichiers et aux libertés dite loi Informatique et
Libertés, a été adoptée en réaction au
projet de fichier SAFARI élaboré dans les années 1970. Ce
projet gouvernemental avait pour objet d'identifier chaque citoyen par un
numéro et d'interconnecter sur la base de cet identifiant tous les
fichiers de l'administration. Afin de protéger les personnes physiques
contre les dangers de la mémoire informatique, potentiellement
perpétuelle en plus d'être réutilisable, et donc
susceptible de menacer les libertés individuelles des individus, la loi
Informatique et Libertés impose des obligations aux personnes
qualifiées de responsable du traitement21. Nous
démontrerons donc, dans un premier temps, que les exploitants de site de
réseaux sociaux sont des responsables du traitement de données
à caractère personnel (Section préliminaire). Par voie de
conséquence, nous démontrerons dans un deuxième temps que
Facebook entre dans le champ d'application territorial de la loi Informatique
et Libertés (Section 1). Partant de ce postulat, nous aborderons enfin
la protection offerte par la loi Informatique et Libertés aux membres de
réseaux sociaux, qui revient à imposer un certain nombre
d'obligations à la charge des responsables de traitements (Section
2).
Section préliminaire L'entreprise qui exploite un
site de réseau social est-elle un responsable d'un traitement de
données à caractère personnel ?
Les principes de base de la loi Informatique et
Libertés sont posés dans ses articles 2 et 3. Après avoir
rappelé ce que recouvre la notion de donnée à
caractère personnel (I), nous identifierons ce que constitue un
traitement de données à caractère personnel (II) pour
démontrer que la société exploitant le site Facebook est
susceptible de se voir reconnaître la qualité de responsable de
traitement (III).
21 L'article 3-I de la loi Informatique et Libertés
dispose que « Le responsable d'un traitement de données
à caractère personnel est, sauf désignation expresse par
les dispositions législatives ou réglementaires relatives
à ce traitement, la personne, l'autorité publique, le service ou
l'organisme qui détermine ses finalités et ses
moyens».
I Les informations sur les utilisateurs de réseaux
sociaux sont des données à caractère personnel
Nous allons nous se demander si les informations des
utilisateurs sont des données à caractère personnel (A),
voire des données à caractère personnel sensibles (B). La
controverse concernant la qualification de l'adresse IP de donnée
à caractère personnel sera également abordée
(C).
A Les données à caractère personnel
L'article 2 alinéa 2 de la loi Informatique et
Libertés, modifiée par la loi n° 2004-801 du 6 août
2004 transposant la directive 95/46/CE du 24 octobre 1995 du Parlement
européen et du Conseil relative à la protection des personnes
physiques à l'égard du traitement des données à
caractère personnel et à la libre circulation de ces
données, définit les données à caractère
personnel (ou « donnée personnelle ») comme : « Toute
information relative à une personne physique identifiée ou qui
peut être identifiée, directement ou indirectement, par
référence à un numéro d'identification ou à
un ou plusieurs éléments qui lui sont propres. Pour
déterminer si une personne est identifiable, il convient de
considérer l'ensemble des moyens en vue de permettre son identification
dont dispose ou auxquels peut avoir accès le responsable du traitement
ou toute autre personne. »
Avant la réforme opérée par la loi du 6
août 2004, la loi Informatique et Libertés ne visait pas
expressément la notion de données à caractère
personnel mais celles « d'informations nominatives ». Ce changement
terminologique marque un élargissement de la notion puisqu'il permet
d'étendre la protection de la loi à la voix et à l'image
des personnes concernées22.
Sur Facebook, le candidat à l'inscription doit
obligatoirement fournir certaines informations telles que son prénom,
son nom de famille, son adresse électronique, son mot de passe, son sexe
et sa date de naissance. D'autres informations concernant ses centres
d'intérêts, sa formation et ses expériences
professionnelles peuvent également être publiées sur son
profil lors de l'inscription ou à tout moment. Ces informations
étant « des informations relatives à une personne
physique identifiée »23, elles peuvent être
qualifiées des données à caractère personnel.
D'autres informations, dites sensibles, sont susceptibles
d'être publiées sur Facebook (B).
22 Jurisclasseur administratif, fascicule 274 «
Informatique. Traitement de données à caractère personnel
» paragraphe 38.
23 Article 2 alinéa 2 de la loi Informatique et
Libertés.
B Les données sensibles
L'utilisateur a également la possibilité de
fournir lors de son inscription ou à tout moment des informations
très intimes comme sa situation amoureuse, ses préférences
sexuelles, ses opinions politiques, sa religion.
Ces informations pourraient être
considérées comme des informations sensibles au sens de la loi
Informatique et Libertés, dont le traitement est soumis à
davantage de restrictions, voire est interdit dans certains cas.
En effet, l'article 8 I de la loi Informatique et
Libertés interdit de « collecter ou de traiter des
données à caractère personnel qui font apparaître,
directement ou indirectement, les origines raciales ou ethniques, les opinions
politiques, philosophiques ou religieuses ou l'appartenance syndicale des
personnes, ou qui sont relatives à la santé ou à la vie
sexuelle de celles-ci ». L'article 8 II pose des limites à
cette interdiction en fonction de la finalité du traitement.
L'interdiction peut ainsi être levée par le
« consentement exprès » de la personne
concernée (article 8 II 1°), de sorte que le traitement portant sur
ces données dites sensibles sera licite. Cette exception permet de
responsabiliser l'individu en lui permettant de consentir à ce que la
loi par principe lui interdit24. Le consentement de la personne
devient la pierre angulaire de la loi Informatique et Libertés puisque
par sa libre volonté, tout individu peut dévoiler toute sa vie
privée. Pour savoir si Facebook peut collecter ces données
sensibles en ayant recueilli le consentement de ses utilisateurs, il convient
d'approfondir cette notion de consentement.
La loi Informatique et Libertés ne précisant pas
ce que recouvre la notion de consentement, il est nécessaire de se
reporter à la directive du 24 octobre 1995. Le droit français
devant être interprété au regard de l'objectif à
atteindre de la directive.
L'article 2 (h) de la directive du 24 octobre 1995
définit le consentement comme « toute manifestation de
volonté, libre, spécifique et informée ». Pour
être valable, le consentement
24 Cours de Madame A. Lepage de 2008-2009 du Master 2 Droit du
Multimédia et de l'Informatique de Paris II.
comprend trois critères cumulatifs que sont la
liberté du consentement, la spécificité du consentement et
l'information.
On peut considérer que le consentement de l'utilisateur
qui fournit de telles informations sur Facebook a été librement
donné puisque l'utilisateur du site de réseau social a le choix
de délivrer ou non cette information. Le consentement est
également spécifique puisqu'il porte sur une question
précise et non sur un ensemble de questions, de sorte que l'utilisateur
a la possibilité de ne répondre qu'à certaines questions,
indépendamment des autres. L'exigence d'information, dernier
critère cumulatif, n'est toutefois pas incontestable. En effet, il n'est
pas certain que la personne ait été correctement informée
des conséquences que la délivrance de cette information pourrait
avoir, comme par exemple du fait que cette information serait collectée
par le responsable du traitement et puisse être par la suite
utilisée pour proposer de la publicité ciblée.
La politique de confidentialité de Facebook, dont la
dernière mise à jour date du 26 novembre 2008, précise que
« Lorsque vous vous connectez sur Facebook, nous enregistrons le type
de votre navigateur et votre adresse IP ».
En dernier lieu de ce I, une incertitude entoure le cas
d'enregistrement de l'adresse IP par Facebook : constitue-elle une
donnée à caractère personnel ? (C).
C L'incertitude sur la qualification de donnée
personnelle de l'adresse IP
L'adresse IP (Internet Protocol) est une
«Série de quatre nombres (compris entre 0 et 255) servant
à identifier un ordinateur connecté à
Internet»25. L'enjeu de la qualification de l'adresse IP
comme donnée à caractère personnel est primordial. En
effet, si l'adresse IP est une donnée personnelle, sa collecte et son
enregistrement seront soumis à l'ensemble des règles
édictées par la loi Informatique et Libertés. Lors d'un
procès, une personne ne pourrait utiliser l'adresse IP comme moyen de
preuve si elle n'a pas préalablement procédé aux
formalités de déclaration auprès de la CNIL
imposées par la loi Informatique et Libertés. En effet, le
traitement de l'adresse IP sans déclaration étant illégal,
ce moyen de preuve serait rejeté par le tribunal26.
25AJ Pénal n° 3/2009 de mars 2009, «
Dossier Cybercriminalité : morceaux choisis » p. 120. 26
O. Itéanu « L'identité numérique»
p.16.
La doctrine et la jurisprudence sont encore divisées
sur la qualification de l'adresse IP. Les juges du fond restent
réfractaires à la reconnaissance de l'adresse IP comme une
donnée à caractère personnel, faisant valoir que l'adresse
IP ne permettrait pas d'identifier indirectement des personnes physiques, dans
la mesure oü elle ne se rapporte qu'à une machine et non à
un individu27.
La Commission nationale Informatique et Libertés
(CNIL), ainsi que l'ensemble des autorités de protection des
données personnelles européennes, considère que l'adresse
IP est une donnée à caractère personnel28 car
derrière l'ordinateur auquel est attribué l'adresse IP se trouve
un propriétaire qui est donc indirectement identifié.
La Cour de cassation, dans un arrêt du 4 avril
200729, considère indirectement que l'adresse IP est une
donnée à caractère personnel puisqu'elle reconnaît
qu'il est nécessaire que la collecte de ce type de donnée ait
reçu une autorisation de la CNIL. Si l'on suit la position dominante, il
est donc raisonnable de considérer que l'adresse IP constitue une
donnée à caractère personnel. Le site Facebook est donc
censé déclarer l'enregistrement de ces adresses IP qu'il
enregistre, celles-ci constituant un traitement de données à
caractère personnel. Le législateur semble suivre la position de
la Cour de cassation puisque très récemment, le Sénat
s'est prononcé en faveur de la qualification de l'adresse IP comme
données personnelle30.
Les informations des utilisateurs constituent donc des
données à caractère personnel, voire des données
sensibles. Pour que la loi Informatique et Libertés s'applique, ces
données doivent aussi faire l'objet d'un traitement (II).
II Le traitement de données à caractère
personnel
L'Article 2 alinéa 3 de la loi Informatique et
Libertés dispose que « Constitue un
traitement de données à caractère personnel toute
opération ou tout ensemble d'opérations portant sur de telles
données, quel que soit le procédé utilisé, et
notamment la collecte, l'enregistrement, l'organisation, la conservation,
l'adaptation ou la modification,
27 CA Paris 27 avril 2007 Anthony G. contre SCPP disponible
sur
http://www.legalis.net/jurisprudencedecision.php3?id_article=1954
et CA Paris 15 mai 2007 Henri S. contre SCPP disponible sur
http://www.foruminternet.org/specialistes/veille-juridique/jurisprudence/cour-d-appel-de-paris-13e-chambresection-a-15-mai-2007.html.
28 Avis n°4/2007, le concept de données à
caractère personnel du 20 juin 2007, WP 136. p18.
29 Cass. Crim. 4 avril 2007 disponible sur
http://www.legalis.net/jurisprudence-decision.php3?id_article=1959.
30
http://www.infos-du-net.com/actualite/15615-Senat-Adresse-IP.html.
l'extraction, la consultation, l'utilisation, la
communication par transmission, diffusion ou toute autre forme de mise à
disposition, le rapprochement ou l'interconnexion, ainsi que le verrouillage,
l'effacement ou la destruction». L'objectif de la loi est d'inclure
dans la notion de traitement la moindre opération effectuée sur
les données personnelles.
La politique de confidentialité de Facebook indique
qu'il collecte les informations personnelles que l'utilisateur a volontairement
choisi de révéler et les données relatives à
l'utilisation du site Internet. Le site Facebook indique également qu'il
enregistre l'adresse IP de ses membres et qu'il conserve un certain nombre de
données sur les utilisateurs31. La collecte, l'enregistrement
et la conservation d'informations étant comprises dans la notion de
traitement, les opérations effectuées sur les données
à caractère personnel publiées sur le site Facebook
constituent un traitement de données à caractère
personnel.
Il reste à déterminer qui est le responsable du
traitement auquel il appartient de déclarer le traitement de
données à caractère personnel (III).
III Le responsable du traitement du site Facebook
L'article 3-I de la loi Informatique et Libertés dispose
que « Le responsable d'un traitement de données à
caractère personnel est, sauf désignation expresse par
les
dispositions législatives ou réglementaires
relatives à ce traitement, la personne,
l'autoritépublique, le service ou l'organisme qui
détermine ses finalités et ses moyens ». Le guide
« Transferts de données vers des pays non
membres de l'Union européenne » élaboré par la
CNIL en juin 2008 précise que la qualification de responsable du
traitement se caractérise par son « autonomie dans la mise en
place et la gestion d'un traitement »
En l'espèce, la société exploitant
Facebook détermine les finalités et les moyens des traitements
des données à caractère personnel qu'elle reçoit
des différents pays dans lesquels son site est accessible. La
société exploitant Facebook serait donc le responsable du
traitement.
31 Extrait de la politique de confidentialité du site
Facebook « vous pouvez actualiser votre profil personnel, vos
relations, envoyer des messages, effectuer des recherches et envoyer des
invitations, créer des groupes, mettre à jour des
événements, ajouter des applications, ainsi que transmettre des
informations de diverses manières. Nous conservons ces informations afin
de vous offrir un service et des fonctions personnalisés. Dans la
plupart des cas, nous les conservons ».
Mais cette société est-elle le seul responsable
du traitement ? La société exploitant Facebook pourrait affirmer
qu'elle offre seulement les moyens du traitement mais ne détermine pas
les finalités du traitement. En effet, seul l'utilisateur choisit de
publier des données à caractère personnel voire des
données sensibles. Il publie ces informations de sa propre initiative et
n'est pas obligé de délivrer ces informations. Pour étayer
cette argumentation, il est possible de se fonder sur une
délibération de la CNIL de 2005 dans laquelle l'autorité a
considéré les auteurs de blogs comme des responsables du
traitement bien qu'elle les a dispensé de la formalité de
déclaration depuis 200532. Même si la notion de
co-responsables du traitement n'est pas prévue par loi Informatique et
Libertés, cette notion apparaît à l'article 2 d) de la
directive du 24 octobre 1995, qui définit le responsable du traitement
comme « La personne physique ou morale, l'autorité publique, le
service ou tout autre organisme qui, seul ou conjointement avec d'autres,
détermine les finalités et les moyens du traitement de
données à caractère personnel».
Il serait possible de s'inspirer de la décision de la
Commission belge de protection de la vie privée (CPVP) qui, dans
l'affaire SWIFT, a considéré que les banques au sein de la
société Swift formaient une « communauté
d'intérêts »33 ad hoc, qui avait investie
la société Swift d'une véritable délégation
de fait par défaut. Cette communauté était donc un
responsable du traitement. Un raisonnement similaire pourrait être
appliqué à la communauté d'utilisateurs du site Facebook.
L'adoption de ce type de raisonnement permettrait de responsabiliser les
utilisateurs afin qu'ils soient davantage acteurs du sort de leurs
données à caractère personnel. Toutefois, on peut
valablement penser que seule la société exploitant le site de
réseau social sera reconnue comme responsable du traitement, l'objectif
de la loi Informatique et Libertés étant la protection des droits
et libertés des individus. En outre, reconnaître que les
utilisateurs sont également des responsables du traitement poserait de
sérieux problèmes d'application de la loi Informatique et
Libertés à tous les membres de Facebook. C'est la raison pour
laquelle
32 Délibération n°2005-284 du 22 novembre
2005 décidant la dispense de déclaration des sites web diffusant
ou collectant des données à caractère personnel mis en
oeuvre par des particuliers dans le cadre d'une activité exclusivement
personnelle.
33 Décision de la CPVP du 9 décembre 2008 relative
au contrôle et à la procédure de recommandation
initiés à l'égard de la société Swift scrl,
paragraphes 50 et suivants. Disponible sur
http://www.privacycommission.be/fr/static/pdf/cbpl-documents/swift---projet-de-d-cision-modifications-09-12-
200.pdf.
la CNIL a dispensé de déclaration les auteurs de
blogs personnels34, tout en adoptant une recommandation sur la mise
en oeuvre de ces sites35.
La mise en oeuvre d'un réseau social peut donc
être considérée comme un traitement de données
à caractère personnel, opéré par la
société exploitant le site de réseau social en tant que
responsable du traitement. La qualification de traitement de données
à caractère personnel s'appliquant aux réseaux sociaux, le
régime de la loi Informatique et Libertés s'applique en
conséquence, sous réserve que cette loi soit applicable (Section
1). Ce point est important, car il conditionne l'application de la Loi
Informatique et Libertés à la société exploitant
Facebook.
Section 1 L'application incertaine de la loi
Informatique et Libertés à Facebook
En dehors de l'Espace Economique européen
(EEE)36, il n'existe pas de texte international relatif à la
protection des données à caractère personnel qui ait une
valeur contraignante.37 Cette absence de textes révèle
la difficulté de trouver un accord au niveau mondial pour harmoniser les
différentes législations et concilier la libre circulation des
données avec le respect de la vie privée38. Le
responsable du traitement, même établi hors de l'EEE, doit dans
certaines hypothèses appliquer la loi Informatique et libertés.
La loi Informatique et Libertés telle que modifiée comporte une
disposition spécifique permettant de déterminer son champ
d'application territorial. Avant la transposition de la directive
européenne de protection des données à caractère
personnel, la loi applicable était déterminée par le droit
international de droit commun, la loi Informatique et Libertés de 1978
ne prévoyant aucune disposition relative à son champ
d'application territorial39. La directive a
34 Délibération n°2005-284 du 22 novembre
2005 décidant la dispense de déclaration des sites web diffusant
ou collectant des données à caractère personnel mis en
oeuvre par des particuliers dans le cadre d'une activité exclusivement
personnelle.
35 Délibération n°2005-285 du 22 novembre
2005 portant recommandation sur la mise en oeuvre par des particuliers de sites
web diffusant ou collectant des données à caractère
personnel dans le cadre d'une activité exclusivement personnelle.
36 L'Islande, le Liechtenstein et la Norvège, membres
de l'Association Européenne de Libre Echange (AELE) ont du
transposé la directive 95/46 dans leur droit national en application des
obligations imposées par l'accord sur l'Espace économique
européen (EEE) (guide CNIL « Transferts de données
à caractère personnel vers des pays non membres de l'Union
européenne » de juin 2008 p 14).
37 Les seuls textes internationaux traitant de la question des
données personnelles sont les lignes directrices de l'OCDE du 23
septembre 1980, de l'Assemblée générale des Nations Unies
du 14 décembre 1990 et des dispositions de l'Organisation du commerce et
de l'Organisation internationale du travail.
38 Jurisclasseur administratif, fascicule 274 : Informatique.
Traitement de données à caractère personnel pargaraphe
.12.
39 G. Goussu, C. Oudey Les critères d'applicabilité
de la loi Informatique et Libertés. Disponible sur
http://www.juriscom.net/pro/visu.php?ID=1127.
donc introduit une règle de conflit40 en la
matière. Après avoir envisagé l'application du
critère de territorialité relatif de la loi Informatique et
Libertés (I), nous nous demanderons si la loi Informatique et
libertés doit nécessairement s'appliquer (II).
I L'application du critère de territorialité
de la loi Informatique et Libertés
L'article 5-I de la loi Informatique et libertés fixe
deux critères alternatifs à son champ d'application territorial :
le lieu d'établissement du responsable du traitement (A), ou le recours
à des moyens de traitement situés sur le territoire
français (B).
A Le lieu d'établissement du responsable du
traitement
L'article 5-I-1°de la loi Informatique et Libertés
dispose que lorsque le responsable du traitement de données à
caractère personnel est établi sur le territoire français,
la loi Informatique et Libertés s'applique à ce traitement. Le
responsable du traitement de Facebook est situé en Californie, aux
Etats-Unis, lieu de son siège social.
La même disposition précise que le responsable du
traitement est considéré comme établi en France «
dès lors qu'il exerce une activité sur le territoire
français dans le cadre d'une installation, quelle que soit sa forme
juridique ».
L'article 4 1-a) de la directive du 24 octobre 1995 dispose
que lorsque le responsable du traitement est établit sur le territoire
d'un Etat membre, le droit de la protection des données à
caractère personnel de l'Etat membre s'applique dès lors que le
traitement est effectué dans « le cadre des activités
d'un établissement du responsable de traitement ».
La notion d'établissement permet de pallier à
l'absence de présence physique du responsable de traitement sur le
territoire d'un Etat membre. La notion d'établissement sous-entend
« l'exercice effectif d'une activité économique au moyen
d'une installation stable dans un autre État membre pour une
durée indéterminée »41. Le groupe de
travail de l'article 29 dit G29 (groupe de travail établi en vertu de
l'article 29 de la directive du 24 octobre 1995 regroupant toutes les
autorités de protection des données à caractère
personnel de la
40 « Règle de droit législative ou
jurisprudentielle qui, tenant compte des liens qu'une situation présente
avec plusieurs systèmes juridiques, prescrit l'application à
cette situation, ou à tel ou tel de ses éléments, d'un de
ces systèmes, de préférence aux autres». , G.
Cornu, Dictionnaire de vocabulaire juridique, association Henri Capitant.
Quadrige édition PUF 7e édition.
41 CJCE 25 juillet 1991, affaire 21/89 Factortame. Disponible sur
http://eurlex.europa.eu/smartapi/cgi/sga_doc?smartapi!celexplus!prod!CELEXnumdoc&lg=fr&numdoc=61989J
0221.
Communauté européenne.) a précisé
dans un avis adopté le 4 avril 2008 WP 148 sur les aspects de la
protection des données liées aux moteurs de recherche, que
l'établissement doit jouer « un rôle significatif » dans
l'opération de traitement en cause. Le raisonnement juridique du G29
s'applique également aux sites de réseaux sociaux. Le G29
relève trois cas d'activité effective lorsque :
« -Un établissement est chargé des
relations avec les utilisateurs du moteur de recherche dans une juridiction
donnée ;
-un fournisseur de moteur de recherche établit dans un
bureau dans un Etat membre qui joue un rôle dans la vente de publique
ciblée aux habitants de cet Etat ;
-l'établissement d'un fournisseur de moteur de
recherche se conforme aux décisions des tribunaux et/ou répond
aux demandes d'application de la loi aux autorités compétentes
d'un Etat membre à l'égard des données
d'utilisateur»42.
Dans un autre avis WP 56 sur l'application internationale du
droit de l'UE en matière de protection des données au
traitement des données à caractère personnel sur Internet
par des sites web établis en dehors de l'UE du 30 mai 2002, le G29
indique que le lieu d'établissement d'une société qui
fournit des services par le biais d'un site Internet n'est pas le lieu oü
est située la technologie qui supporte son site web ni le lieu
d'accès au site web mais le lieu où elle exerce son
activité43.
Il faut donc déterminer si des établissements du
site Facebook, sont situés sur le territoire d'un État membre et
jouent un rôle effectif et réel pour que la loi Informatique et
Libertés soit applicable. En l'occurrence, le site
societe.com mentionne qu'une entreprise
Facebook UK LTD est établie en France sous la forme d'une
société étrangère immatriculée au
RCS44. On ne sait pas si cette société exerce un
rôle effectif dans le traitement des données à
caractère personnel des utilisateurs français, le site
societe.com indiquant seulement qu'elle
s'occupe des « portails internet ».
Les tribunaux français interprètent de
manière restrictive la notion d'activité effective.
Nous traiterons à plusieurs reprises dans cette section 1 de
l'affaire Bénédicte S contre Google car les faits de
l'espèce traduisent la difficulté d'application de la loi
Informatique et Libertés à
42 Avis WP 148 sur les aspects de la protection des
données liées aux moteurs de recherche adopté le 4
avril 2008.
43 Avis WP 56 sur la protection des données au
traitement des données à caractère personnel sur Internet
par des sites web établis en dehors de l'UE du 20 mai 2002.
44 Disponible sur
http://www.societe.com/cgi-bin/recherche?rncs=509004305.
une entreprise américaine dont le siège social
est établie en dehors de l'EEE. Dans cette affaire, une internaute
demandait l'application des dispositions de la loi Informatique et
Libertés à Google Incorporated et à sa filiale Google
France. Dans l'ordonnance de référé du Tribunal de grande
instance de Paris du 14 avril 2008 Bénédicte S. contre
Google45, le président du tribunal a décidé que
la filiale Google France ne répondait pas aux conditions
d'établissement car elle constituait une simple agence commerciale
intervenant dans la gestion du service du moteur de recherche.
En l'absence d'indication précise du rôle de la
société Facebook UK LTD, on ne peut savoir avec certitude si
la loi Informatique et Libertés serait applicable sur le fondement de
l'article
5- I -1e de ladite loi.
Nous allons donc envisager le deuxième critère
alternatif sur le droit applicable au traitement de données à
caractère personnel, le critère de localisation des moyens de
traitement utilisés (B).
B le recours à des moyens de traitement
situés sur le territoire français
L'article 5-I-2° de la loi Informatique et
Libertés dispose que ladite loi est applicable dès lors que
« le responsable, sans être établi sur le territoire
français ou sur celui d'un autre Etat membre de la Communauté
européenne, recourt à des moyens de traitement situés sur
le territoire français à l'exclusion des traitements qui ne sont
utilisés qu'à des fins de transit sur ce territoire ou sur celui
d'un autre Etat membre de la Communauté européenne ».
Aucune définition du terme « moyen » n'est apportée par
la loi Informatique et Libertés. Dans ses avis WP 5646 et WP
14847 précités, le groupe de l'article 29
considère comme des moyens utilisés sur le territoire
français, l'existence d'une base de données, d'ordinateurs
personnels, de terminaux ou de serveurs, ou encore l'utilisation de cookies.
En suivant l'avis du G29, les ordinateurs des membres de
Facebook pourraient être considérés comme des moyens de
traitement. Les ordinateurs des membres français de Facebook
étant situés sur le territoire français, la loi
Informatique et Libertés serait donc applicable à Facebook.
45 Disponible à l'adresse suivante :
http://www.legalis.net/jurisprudence-decision.php3?id_article=2311.
46 46 Avis WP 56 sur la protection des données au
traitement des données à caractère personnel sur Internet
par des sites web établis en dehors de l'UE du 20 mai 2002
disponible sur
http://ec.europa.eu/justice_home/fsj/privacy/docs/wpdocs/2002/wp56_fr.pdf
p 9 et suivantes.
47 Avis WP 148 sur les aspects de la protection des
données liées aux moteurs de recherche adopté le 4
avril 2008.
http://ec.europa.eu/justice_home/fsj/privacy/docs/wpdocs/2008/wp148_fr.pdf
p 11 et suivantes.
Toutefois, dans l'affaire précitée
Bénédicte S contre Google48, le président du
Tribunal de grande instance a décidé que le critère des
moyens de traitement était inopérant car aucun serveur
dédié au service n'était situé sur le territoire
français. Le juge n'a pas relevé que les ordinateurs personnels
d'internautes français pouvaient être considérés
comme des moyens de traitement.
En s'appuyant sur le raisonnement de cette ordonnance, pour
que le deuxième alinéa de l'article 5-I de la loi Informatique et
Libertés s'applique à Facebook, il serait nécessaire de
prouver que l'entreprise exploitant Facebook utilise des serveurs sur le
territoire français mais également que ces serveurs ne sont pas
utilisés uniquement à des fins de transit. Si certains articles
expliquent que la majorité des serveurs de la société
Facebook sont implantés aux Etats-Unis49, il n'existe en
revanche aucune information à l'heure actuelle permettant de savoir si
Facebook utilise des serveurs situés en France. En l'absence de
démonstration de l'existence de serveurs sur le territoire
français, le second critère de l'article 5 de la loi Informatique
et Libertés serait inefficace.
Deux possibilités s'offrent donc à nous : soit
suivre l'avis du G29, selon lequel les ordinateurs des membres de Facebook sont
des moyens de traitement permettant l'application de la loi Informatique et
Libertés, soit suivre le raisonnement du président du Tribunal de
grande instance de Paris dans l'affaire Bénédicte S. auquel cas
seuls les serveurs seront considérés comme des moyens de
traitement et la loi Informatique et Libertés ne sera pas applicable
à Facebook.
Dans l'hypothèse oü aucun critère
d'application territorial de la loi Informatique et Libertés ne serait
retenu, Facebook échapperait à l'application de la loi
française. La loi Informatique et Libertés doit-elle s'appliquer
à tout prix ? (II).
II La loi Informatique et libertés doit-elle
s'appliquer à tout prix ?
Le problème majeur en terme de loi applicable à
un traitement de donnée personnelle est que « Les lois restent
nationales alors que les phénomènes qu'elles doivent
appréhender est d'une autre ampleur »50. Il existe
des moyens juridiques permettant l'application de la loi Informatique et
Libertés (A). Toutefois, si aucune des solutions proposées n'est
retenue et que
48 Ordonnance de référé du Tribunal de
grande instance de Paris du 14 avril 2008 Bénédicte S. c/
Google
49 L'infrastructure de Facebook, c'est 10 000 serveurs.
Disponible sur
http://www.theinquirer.fr/2008/04/23/linfrastructure_technique_de_facebook_cest_10_000_serveurs.html
50 M. Vivant « Les transferts internationaux de
données dans I a I oi de 2004 », RLDI 2005/9, n° 270
p.64-68.
la loi Informatique et Libertés n'est pas applicable, il
convient d'envisager la protection dont bénéficierait les
données à caractère personnel des membres français
de Facebook (B).
A Les solutions à l'application de la loi
Informatique et Libertés
Deux solutions sont envisageables pour permettre l'application
de la loi Informatique et Libertés : la désignant la loi
française comme loi de conflit (1), la reconnaissance de la loi
Informatique et Libertés comme loi de police (2).
1) La désignation de la loi française comme
loi de conflit
La première solution envisageable à
l'application de la loi Informatique et Libertés serait l'application
d'une convention internationale qui désignerait la loi française
comme règle de conflit. Les délits civils et autres faits
juridiques sont généralement régis, soit par la loi du
lieu du fait générateur du dommage (lex loci delicti),
soit par la loi du lieu du lieu où le dommage est survenu (lex loci
damni).
Concernant Facebook, la loi du fait générateur
est la loi du lieu de localisation du siège social de l'entreprise,
c'est-à-dire la loi californienne, et la loi de réalisation du
dommage est la loi Informatique et Libertés si les données
collectées sont celles d'un internaute situé sur le territoire
français. Si une convention internationale désigne la loi du lieu
où le dommage est survenu, les membres français de Facebook
pourraient obtenir l'application de la loi Informatique et Libertés.
Le règlement (CE) n°864/2007 du Parlement
européen et du Conseil sur la loi applicable aux obligations non
contractuelles dit Rome II du 11 juillet 2007 prévoit que la loi
applicable est la loi du pays où le dommage survient ou est susceptible
de survenir. Une telle règle permettrait d'appliquer la loi Informatique
et Libertés à Facebook. .Toutefois, le règlement exclut
formellement de son champ d'application les obligations non contractuelles
découlant d'atteintes à la vie privée et aux droits de la
personnalité51. En l'absence de convention internationale, il
convient d'appliquer le droit commun.
La jurisprudence française considère que l'action
en réparation d'un dommage est soumise à la loi du lieu «
où le fait dommageable s'est produit52 ». Elle
précise que « ce lieu s'entend
51 Articles 1 et 2 du règlement Rome II.
52 Cass. Civ. 1e 16 avril 1985, Bull. n° 114.
aussi bien de celui du fait générateur du
dommage que du lieu de réalisation de ce dernier53
». Le juge bénéficie donc de l'option entre la loi du
lieu du fait générateur du dommage et la loi où le dommage
est survenu.
Si le juge décidait de recourir à la loi de
réalisation du dommage, la loi Informatique et Libertés serait
donc applicable. Le droit commun extracontractuel international permettrait
donc, dans une certaine mesure, d'obliger les entreprises exploitant les
réseaux sociaux à se conformer à la loi Informatique et
Libertés dès lors que les réseaux sociaux concernent des
internautes situés sur le territoire français.
Plusieurs obligations de la loi Informatique et
Libertés sont sanctionnées pénalement aux articles 226-16
et suivants du code pénal. Or, en matière répressive, le
principe de la solidarité des compétences législative et
juridictionnelle prévoit que la compétence des juridictions
françaises détermine l'application de la loi française.
Les principales règles de compétence des juridictions
pénales françaises sont le principe de
territorialité54, le principe de la personnalité
active55 et de personnalité passive56. Le principe
de territorialité, en vertu duquel toute infraction commise sur le
territoire de la République justifie la compétence des tribunaux
français et par conséquent l'application de la loi pénale
française, constitue le lien de rattachement essentiel. Or, en
matière de délits commis sur Internet, les tribunaux
français ont une conception large du critère de localisation de
l'infraction. Ils considèrent que la possibilité d'accéder
depuis le territoire français à un contenu litigieux sur
Internet, sanctionné pénalement par la loi française,
constitue un critère de rattachement suffisant justifiant la
compétence de la loi nationale57. On peut reprocher à
la théorie de l'accessibilité d'être un critère de
rattachement excessif en ce qu'il consacre la compétence universelle des
juridictions françaises en matière de délit commis sur
Internet58, mais cette théorie permettrait d'appliquer
à Facebook les obligations prévues et sanctionnés
pénalement par loi Informatique et Libertés.
La dernière possibilité consisterait à
reconnaître à la loi Informatique et Libertés la valeur
d'une loi de police, obligeant ainsi le juge à l'appliquer de plein
droit au litige (2).
53 Cass. Civ. 1e 14 janvier 1997 Gardon, Bull. n°
14 ; 11 mai 1999 Bull. n° 153.
54 Article 113-2 du code pénal.
55 Article 113-6 du code pénal : l'auteur de l'infraction
est de nationalité française.
56 Article 113-7 du code pénal : la victime de
l'infraction est de nationalité française.
57 TGI Paris 13 novembre 1998 UNADIF contre Faurisson cité
dans le Jurisclasseur communication fascicule 3000 « conflit de lois
et compétence internationale des juridictions françaises
», paragraphe 73.
58A. Huet, « Le droit pénal
international et internet », LPA, 10 novembre 1999 n° 224, p.
39.
2) La reconnaissance de la loi Informatique et
Libertés comme loi de police
Selon l'article 3 du code civil, « les lois de police
et de sûreté obligent tous ceux qui habitent sur le
territoire». Le concept de loi de police est un concept assez flou
puisque le texte ne dispense aucun critère sur ce que constituent les
lois de polices et ne donne pas de liste indicative de celles-ci. Comme il
n'existe pas de définition légale dans l'ordre juridique interne,
il est nécessaire de se reporter à la définition de loi de
police donnée par la Cour de Justice des Communautés
Européennes (CJCE) dans l'affaire C-369/96 du 23 novembre 1999,
Arblade59 « il convient d'entendre cette expression comme
visant des dispositions nationales dont l'observation est jugée cruciale
pour la sauvegarde de l'organisation politique, sociale ou économique de
l'État au point d'en imposer le respect à toute personne se
trouvant sur le territoire national de cet Etat membre ou à tout autre
rapport juridique localisé dans celuici ».
Dans l'affaire Bénédicte S60, le
président du Tribunal de grande instance de Paris a refusé de
reconnaitre à la loi Informatique et Libertés le caractère
de loi de police au motif que l'application de la loi française ne
s'imposait pas sans contestation possible pour la sauvegarde de l'organisation
socioéconomique de la communauté nationale.
Plusieurs arguments militent en faveur de la solution
contraire.
Tout d'abord, la valeur des données personnelles sur
Internet : les données à caractère personnel sont non
seulement un moyen d'identification de la personne mais ont également
une valeur économique en raison du système de ciblage
publicitaire61. Il est donc important que la loi Informatique et
Libertés s'applique pour que ces données soient
protégées.
Ensuite, d'autres textes de droit français
protégeant les mémes intéréts ont valeur
constitutionnelle : l'article 8 de la Convention européenne de
sauvegarde des droits de l'Homme et des Libertés fondamentales
(CESDH)62 relative au droit au respect de la vie privée et
familiale, et l'article 9 du Code civil63 relatif au respect de la
vie privée. Le Conseil constitutionnel a de plus clairement reconnu la
loi Informatique et Libertés comme assurant la
59 Disponible sur
http://eurlex.europa.eu/smartapi/cgi/sga_doc?smartapi!celexplus!prod!CELEXnumdoc&lg=fr&numdoc=61996J0369
60 Ordonnance de réfóé du Tribunal de grande
instance de Paris du 14 avril 2008 Bénédicte S. c/ Google.
61 E. Caprioli « Impunité de Google en
matière de vie privée sur le territoire français
» CCE n°10, Octobre 2008, commentaire 119.
62 Décision n° 76-75 DC du 12 janvier 1977 du Conseil
constitutionnel.
63 Décision n° 99-416 DC du 23 juillet 199 du Conseil
constitutionnel.
protection d'un principe à valeur constitutionnelle, la
liberté individuelle64, qui est elle-même un principe
fondamental garanti par les lois de la République65.
Par ailleurs, au niveau communautaire, la Charte des droits
fondamentaux66 et le traité de Lisbonne consacrent
expressément le droit à la protection des données à
caractère personnel. Vingt deux des vingt sept Etats membres de la
communauté européenne ont intégré le droit au
respect de la vie privée dans leur constitution. Parmi eux, treize Etats
ont déjà reconnu le droit à la protection des
données personnelles comme principe à valeur constitutionnelle.
L'environnement européen est donc propice à reconnaître
à la loi Informatique et Libertés la valeur de loi de police.
Enfin, le président de la CNIL, Alex Türk, s'est
prononcé, lors de la présentation du 28ème rapport
d'activité de la CNIL en mai 2008, en faveur de l'inscription dans le
préambule de la constitution de la protection des données
personnelles67. Par la suite, Alex Türk et l'ensemble des
membres de la CNIL ont réitéré ce souhait de modification
du préambule de la constitution souhait en décembre 2008. Un
tribunal pourrait donc se fonder sur l'un de ses nombreux arguments et
reconnaître, dans un contentieux opposant Facebook à un membre de
ce site que la loi Informatique et Libertés est applicable.
L'application de la loi Informatique et Libertés aux
données à caractère personnel françaises de
Facebook semble donc possible. Les juges français pourraient
néanmoins décider de se retrancher derrière l'ordonnance
du président du Tribunal de grande instance de Paris et décider
que la loi Informatique et Libertés est inapplicable. Dans cette
hypothèse, il convient d'envisager la protection dont
bénéficieraient les données à caractère
personnel françaises (B).
64 Décision n° 2004-499 DC du 29 juillet 2004
Loi relative à la protection des personnes physiques à
l'égard des traitements de données à caractère
personnel et modifiant la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à
l'informatique, aux fichiers et aux libertés.
65 Décision n° 76-75 DC du Conseil constitutionnel
Fouilles des véhicules.
66 Article 8 Charte des droits fondamentaux.
67 Le Monde du 16 mai 2008 « La CNIL veut inscrire dans
la constitution la protection des données personnelles ».
B Le droit applicable aux données à
caractère personnel françaises de Facebook en l'absence
d'application de la loi Informatique et Libertés
Facebook étant une entreprise américaine dont le
siège social est établit en Californie et membre du Safe Harbor,
le droit californien et les principes du Safe Harbor lui seraient
applicables.
La politique américaine de protection des
données à caractère personnel diffère beaucoup de
la conception française et européenne : les Etats-Unis n'ont pas
adopté au niveau fédéral de loi générale
protégeant les données à caractère personnel d'une
personne et il n'existe que des lois sectorielles en la matière. S'il
est vrai que la constitution de l'Etat de Californie reconnaît
expressément le droit au respect de la vie privée68,
cette garantie n'est pas comparable à la loi Informatique et
Libertés69.
Pour compenser ce manque de règles protectrices par
rapport au droit européen, la Commission Fédérale du
Commerce des Etats-Unis (Federal Trade Comission ou FTC) a
élaboré le Safe Harbor ou « Sphère de
sécurité » qui est une solution d'auto réglementation
des entreprises américaines par laquelle les entreprises établies
aux Etats-Unis certifient volontairement adhérer à une
série de principes relatifs à la protection de données
à caractère personnel publiés par la Commission
Fédérale du Commerce des Etats-Unis des
Etats-Unis70.
Les entreprises adhérentes s'engagent à
respecter les principes de protection des données à
caractère personnel fondés en grande partie sur ceux de la
directive du 24 octobre 1995: information des personnes, possibilité de
s'opposer au transfert à des tiers ou à une utilisation des
données pour des finalités différentes, consentement
explicite pour les données sensibles, droit d'accès,
sécurité71.
Dans son article intitulé « Les Safe Harbor
Principles-Une protection adéquate ? »72,
Yves Poullet met en exergue plusieurs points importants contenus dans le
Safe Harbor montrant que
68 Article 1 section 1 de l'Etat de Californie « All
people are by nature free and independent and have inalienable right. Among
these are enjoying and defending life and liberty, acquiring, possessing, and
protecting property, and pursuing and obtaining safety, happiness, and
privacy».
69 Experties août-septembre 2008 « Affaire «
Bénédicte S. », Variation sur la détermination de la
loi applicable à Google » Richard Montbeyre p.296-300.
70 CNIL, guide relatif aux transferts de données à
caractère personnel vers des pays non membres de l'Union
Européenne juin 2008 p16.
71 Le Monde « Le problème, c'est que ce sont des
sociétés américaines » Question à Sophie
Tavernier (CNIL) par Cécile Ducourtieux article du 11 novembre 2007.
72 Yves Poullet, « Les Safe Harbor Principles-Une
protection adéquate ?»,
Juriscom.net, 17 juin 2000, texte
présenté lors du colloque de l'IFLCA à Paris les 15 et 16
juin 2000.
ce système n'offre pas une protection analogue à
celle proposée par la directive du 24 octobre 1995 de la
Communauté européenne.
Ces réticences concernent par exemple :
-le champ d'application rationae personae du Safe
Harbor, qui ne concerne que les données d'origine européennes, le
Safe Harbor ne s'appliquant pas aux données à caractère
personnel d'origine américaine. Ce manque d'uniformité peut faire
craindre un manque d'effectivité de ce principe, les entreprises
américaines devant appliquer une réglementation différente
en fonction de l'origine de la donnée73 ;
-l'absence de définition précise des concepts de
base tels que la notion de donnée à caractère personnel,
de tiers, de consentement ou encore du principe de finalité
légitime (qui exige que les données soient traitées pour
une finalité déterminée et légitime).
-En outre, le droit d'accès prévu dans le Safe
Harbor souffre de nombreuses exceptions74.
Malgré la mise en évidence de ces carences de
protection, la Commission européenne a adopté une décision
d'adéquation le 26 juillet 2000 reconnaissant que les principes du Safe
Harbor assurent une protection adéquate pour les transferts de
données à caractère personnel75.
Facebook est membre du Safe Harbor depuis le 10 mai
200776. Les données des membres français de Facebook,
n'étant pas des données d'origine américaine, les
données à caractère personnel françaises seraient
donc soumises au principe du Safe Harbor.
Si la loi Informatique et Libertés venait à
être considérée comme inapplicable, les données
à caractère personnel des membres français de Facebook
seraient protégées par la loi californienne et par les principes
du Safe Harbor. Or, aucun de ces deux régimes n'assure réellement
une protection équivalente à la loi Informatique et
Libertés.
En raison de l'incertitude quant à l'
applicabilité de la loi Informatique et Libertés à
Facebook, il est nécessaire qu'une convention internationale relative
aux données à caractère personnel, déterminant
clairement la loi applicable, soit adoptée. Ce problème a
été mis en exergue puisque différentes initiatives voient
le jour afin de moderniser la directive
73Yves Poullet, « Les Safe Harbor
Principles-Une protection adéquate ?» p.6-7.
74 Yves Poullet, « Les Safe Harbor Principles-Une
protection adéquate ?» p.9-10.
75 Décision de la Commission 2000/520/CE du 26 juillet
2000. 76
http://web.ita.doc.gov/safeharbor/SHList.nsf/f6cff20f4d3b8a3185256966006f7cde/1c51b941879c2e87852572d
700734dc1?OpenDocument&Highlight=2,facebook
communautaire 95/46/CE du 24 octobre 1995 sur la protection des
données à caractère personnel et afin d'établir une
norme internationale en la matière.
Dans l'hypothèse oü la loi Informatique et
Libertés serait applicable aux sites de réseaux sociaux, il
convient d'envisager à présent les atteintes causées par
l'entreprise exploitant Facebook qui violerait ses obligations de responsable
de traitement (Section 2).
Section 2 Les atteintes causées par Facebook
violant ses obligations de responsable de traitement
Le chapitre V de la loi Informatique et Libertés
énonce les obligations incombant aux responsables du traitement. Les
principales obligations sont le droit à l'information de la personne
dont les données à caractère personnel ont
été collectées77, le droit
d'accès78 et de rectification de ces
données79. Ces obligations semblent respectées par le
site Facebook en ce qui concerne les données personnelles
publiées sur le profil de l'internaute. En effet, le membre de Facebook
a la possibilité de modifier à tout moment les informations de
son profil. Néanmoins, les conditions générales de
Facebook stipulent expressément que « l'utilisateur
concède une licence à Facebook sur tout le contenu qu'il a
apporté ». Cette clause pose deux types de problèmes :
d'une part, celui de l'exploitation des données personnelles de
l'utilisateur (I); d'autre part, la question de la conservation des
données à caractère personnel, le droit américain
ne connaissant pas le système européen du « droit à
l'oubli »80 (II). Nous restreindrons notre étude
à ces deux principales atteintes.
I L'exploitation des données : le système
ciblage publicitaire
La publicité dite « ciblée » est un
mode de marketing publicitaire qui s'est développé il y a une
quinzaine d'années et a atteint aujourd'hui son point culminant grace
aux possibilités technologiques offertes par Internet. L'annonceur ne
cherche plus à attirer le consommateur vers son site mais observe le
comportement de l'internaute sur la toile pour lui proposer par la suite des
produits en adéquation avec ses centres d'intérêts
déduits, par exemple, des sites parcourus.
77 Article 32 de la loi Informatique et Libertés.
78 Article 39 de la loi Informatique et Libertés.
79 Article 40 de la loi Informatique et Libertés.
80 I. Daviaud RLDI mars 2009 n° 47 « Données
personnelles : des données personnelles à l'identité
numérique » p.90.
Dans son rapport de février 2009 intitulé «
la publicité ciblée en ligne », la CNIL
relève trois niveaux de publicité ciblée sur
Internet81. La publicité personnalisée classique qui
est « choisie en fonction des caractéristiques connues de
l'internaute » qu'il a lui méme fourni en s'enregistrant sur
un site en ligne; la publicité contextuelle qui est « choisie
en fonction du contenu immédiat fourni à l'internaute »
c'est à dire en fonction de la page visitée par l'internaute,
cette page permettant de se renseigner sur les goûts
présumés de l'utilisateur et de produire de la publicité
en lien avec le contenu ; et la publicité comportementale qui est «
choisie en observant le comportement de l'internaute à travers le
temps ». Les sites de réseaux sociaux en ligne s'inscrivent
dans cette logique de publicité ciblée. Après avoir
analysé le fonctionnement de la publicité ciblée sur
Facebook (A), nous verrons si la loi Informatique et Libertés est
applicable (B) pour ensuite aborder les diverses solution pour encadrer ce type
de publicité (C).
A La publicité ciblée sur Facebook
En offrant un accès gratuit à son service,
Facebook utilise en contrepartie les données récoltées sur
son site en vue de les analyser à des fins de prospection commerciale.
En effet, le modèle économique d'un certain nombre de sites de
réseaux sociaux repose sur la commercialisation des données
à caractère personnel, l'essentiel de leur financement provenant
des revenus publicitaires. Lors de la procédure d'inscription,
l'utilisateur doit fournir un certain nombre d'informations
détaillées le concernant. A cet égard, les profils offrent
une description assez fine des centres d'intérêts des
utilisateurs. En outre, les multiples applications proposées par la
plate-forme Facebook mais aussi par les tiers développeurs poussent les
utilisateurs à révéler spontanément et directement
leurs goûts82. Toutes ces données, constituent une base
de données inestimable sur les goûts des individus, et les
annonceurs sont prêts à payer le prix nécessaire pour
toucher la cible visée83.
Facebook propose plusieurs types de publicité, dont les
deux plus intéressants retiendront notre attention : « Social
Ads » (ou « Annonces sociales ») (1) et «
Beacon »(2).
81 CNIL rapport du 9 février 2009 « La
publicité ciblée en ligne » p5.
82 X.Wauthy. Regard économiques, publication de l'UCL de
mai 2008 n°59 « No free lunch sur le web 2.0 ! Ce que cache la
gratuité apparente des réseaux sociaux numériques
» ;
83 W. J. Maxwell, T. Zeggane et S. Jacquier.CCC n° 6 de juin
2008, étude 8 « Publicité ciblée et protection du
consommateur en France, en Europe et aux Etats-Unis ».
1) Social Ads
Social Ads est un système de publicité
personnalisée car l'entreprise exploitant le site Facebook utilise les
données du profil des membres en vue de personnaliser les
publicités et promotions proposées sur Facebook. La politique de
confidentialité de Facebook précise que les données
sélectionnées ne permettent pas d'identifier l'individu
vis-à-vis des tiers et ne sont pas communiquées à la
société de distribution. La démarche des annonceurs
voulant participer à cet arsenal publicitaire se déroule en deux
temps: l'annonceur s'adresse à Facebook en lui indiquant le plus
précisément possible les consommateurs « ciblés
» (âge, lieu de résidence, sexe, centres
d'intérêts, études...). Facebook affiche ensuite le texte
et le lien publicitaire proposés par l'annonceur sur les pages des
membres dont le profil correspondant aux consommateurs ciblés par
l'annonceur84. L'utilisateur pourra visionner la page publicitaire
en cliquant sur sa bannière et même se déclarer fan de la
marque qui fait l'objet de publicité. Toute action de l'internaute
effectuée sur la page de la marque apparaitra sur son profil et dans la
page Actualités que peuvent consulter ses amis.
2) Beacon
Beacon est un système de publicité
comportementale qui emploie la logique de recommandation des amis en
matière d'achat de service ou de produits. Dès lors qu'un membre
de Facebook effectue des achats sur des sites Internet tiers, ces actions
(achat, publication d'un avis sur un forum) sont indiquées à ses
amis Facebook85. Seuls les sites Internet ayant conclu un accord de
partenariat avec Facebook bénéficient de cette publicité.
Lors de sa présentation en novembre 2007, le système
Beacon a été vivement critiqué car il
fonctionnait à l'époque selon le système de l'opt-out
(c'est-à-dire du consentement présumé de
l'internaute). Il appartenait donc à l'utilisateur de décocher la
case « Beacon », placée dans la page affichant la
politique de confidentialité du site, pour ne pas participer à ce
programme. A la suite de nombreuses protestations et d'une pétition
signée par 50 000 utilisateurs, dénonçant le
caractère intrusif de ce système, la fonction de Beacon
a été modifiée un mois plus tard en décembre 2007
et fonctionne désormais sur le système de
l'opt-in86. A l'heure actuelle, l'utilisateur doit donc
donner son accord préalable pour que l'historique de son activité
sur les sites marchands partenaires de Facebook soit utilisé par le
programme Beacon et soit donc visible par ses amis sur le site de réseau
social.
84 CNIL rapport du 9 février 2009 « La
publicité ciblée en ligne » de la CNIL p.15.
85 Politique de confidentialité du site Facebook.
86Génération-net « Vie
privée : Facebook reconnaît ses erreurs et s'excuse »
disponible sur
http://www.generation-nt.com/facebook-publicite-zuckerberg-beacon-actualite-50396.html
A coté des avantages considérables que
représente la publicité ciblée, qui propose une
publicité proche des goûts et intérêts de la personne
ciblée, des menaces sur le plan des libertés et du respect de la
vie privée existent, telles que le risque de « profilage
systématique des internautes, qui plus est, à leur insu, ainsi
qu'un risque de marchandisation des profils individuel entre les fournisseurs
de contenus et les annonceurs »87. Les données
collectées à des fins de publicité constituent-elles des
données à caractère personnel (B)?
B L'application de la loi Informatique et Libertés
à la publicité ciblée sur Facebook
Les fournisseurs de contenus qui affichent les
publicités d'annonceurs, tels que les réseaux sociaux, affirment
que les données utilisées sont non-identifiantes en ce qu'elles
ne peuvent pas être rapprochées de l'identité de
l'individu. Le G29, dans son avis WP 136 considérait à cet
égard que « la possibilité d'identifier une personne
n'implique plus nécessairement la faculté de connaître son
identité »88. La CNIL en a conclu dans son rapport
sur la publicité ciblée en ligne qu'il «est possible de
considérer que les données qui sont dans les profils comme l'age,
le sexe ou la localisation sont des données à caractère
personnel dans la mesure où elles sont liées à cet
identifiant »89. La CNIL suit ainsi la position retenue
par le G29, WP 148 sur les aspects de la protection des données
liées aux moteurs de recherche. De ce fait, la CNIL revendique
l'application des mesures protectrices de la loi Informatique et
libertés aux systèmes de publicité ciblée. La loi
Informatique et Libertés serait donc applicable à la
publicité ciblée sur Facebook et les membres du site pourraient
donc bénéficier des droits qui leur sont reconnus dans cette loi
qui sont autant de solutions pour encadrer la publicité ciblée
sur Facebook (C).
C Les solutions pour encadrer la publicité
ciblée sur Facebook
L'article 7 de la loi Informatique et Libertés dispose
qu'un traitement de données à caractère personnel doit
avoir reçu le consentement de la personne concernée pour
être mis en place. Les exceptions prévues au même article
permettant de passer outre le consentement de la personne ne semblent pas
applicables aux réseaux sociaux qui proposent de la publicité
ciblée.
87 Rapport du 9 février 2009 « La publicité
ciblée en ligne » de la CNIL p. ??
88 Avis n°4/2007, 20 juin 2007, relatif au concept de
données à caractère personnel WP 136. p15.
89 CNIL, rapport du 9 février 2009 « La
publicité ciblée en ligne » de la CNIL p. 26.
Comme nous m'avons vu dans la section préliminaire, ce
consentement doit être libre, spécifique et informé. On
constate que les conditions concernant le consentement sur Facebook ne sont pas
remplies : en effet, le consentement n'est pas libre car la personne ne peut
refuser la publicité ciblée.
Le consentement n'est pas spécifique car la personne ayant
adhéré à Facebook n'a pas donné son accord à
l'utilisation de ces données à des fins de prospection
commerciale.
L'information sur l'utilisation des données à
caractère personnel par Facebook à des fins de publicité
ciblée n'est également pas respectée. Si la
possibilité d'utilisation des données à des fins de
publicité ciblée est indiquée dans la politique de
confidentialité du site, cette information n'est pas facile
d'accès dans ma mesure oü la politique de confidentialité
est un document très long et difficilement compréhensible par des
non-juristes. De plus, peu de membres de réseaux sociaux lisent les
conditions générales et la politique de confidentialité du
site ou se soucient de ce qu'il advient de leurs données.
Dans son rapport relatif à la publicité
ciblée, la CNIL réclame la mise en place d'une meilleure
information de l'internaute. Dans un souci de transparence, les sites de
réseaux sociaux devraient clairement indiquer que toutes les
informations publiées sur le site sont susceptibles d'être
utilisées pour proposer de la publicité ciblée. La mise en
place d'une politique de confidentialité accessible et
pédagogique serait un moyen d'obtenir le réel consentement des
membres de Facebook.
Des dispositions spécifiques relatives à la
prospection commerciales par voie électronique sont inscrites dans le
code des postes et des communications électroniques. L'article L 34-5 du
code des postes et des communications électroniques alinéa
190 prévoit que la prospection commerciale par automate
d'appel, par télécopieur ou par courrier électronique
à destination de consommateurs est subordonnée à l'accord
préalable de la personne démarchée (principe de «
l'opt-in »). Comme il s'agit d'une disposition pénale et
que le droit pénal est d'interprétation stricte91, on
ne peut a priori appliquer par analogie cette obligation aux
bannières publicitaires de Facebook. De ce fait, la prospection
commerciale sur Facebook serait donc soumise au principe de l'opt-out
c'est-à-dire à la possibilité de s'opposer à
l'utilisation des données à des fins de prospection
commerciale.
90 Modifié par l'article 10 de la loi n° 2004-669
du 9 juillet 2004 transposant la directive 2002/58 concernant le traitement des
données à caractère personnel et la protection de la vie
privée dans le secteur des communications électroniques.
91 Article 111-4 du code pénal, corollaire du principe de
légalité.
Ce principe est similaire à celui du droit d'opposition
prévu à l'article 38 alinéa 2 de la loi Informatique et
Libertés.
Le droit d'opposition n'est pas respecté par Facebook
à l'heure actuelle puisque l'utilisateur n'a pas la possibilité
de refuser les encarts publicitaires qui sont intégrés aux pages
Facebook. La seule possibilité dont dispose l'utilisateur est de cliquer
sur la flèche située sous la publicité afin qu'une autre
publicité prenne la place de la précédente. Le non-respect
du droit d'opposition de la personne dont les données à
caractère personnel font l'objet d'un traitement est un délit
sanctionné pénalement92, et le non respect du principe
de l'opt-in de l'article L34- 5 du code des postes et des
communications électroniques est puni par une amende de 750 euros par
message envoyé. Il conviendrait donc que Facebook prévoit dans sa
politique de confidentialité un moyen permettant à l'internaute
de s'opposer à cette prospection commerciale.
Pour lutter contre les pratiques irrespectueuses de la loi
Informatique et Libertés, La CNIL sollicite l'adoption de codes de
bonnes pratiques par les professionnels et d'une procédure de
labellisation93. La Commission européenne travaille ainsi
depuis 2007 sur le projet de label « Europrise »,
délivré aux sites respectant la réglementation
européenne de protection des données à caractère
personnel. De son coté, la Commission Fédérale du Commerce
des Etats-Unis a publié un ensemble de principes, reposant sur
l'autoréglementation pour encadrer la pratique des publicités
ciblées94. On y retrouve un certain nombre de principes
déjà proposés par la CNIL, comme la transparence dans la
collecte des données et dans l'information de l'utilisateur, la possible
opposition des consommateurs à l'utilisation de leurs données
dans le cadre de la publicité ciblée ou encore la conservation
limitée dans le temps des données.
La publicité ciblée et incontournable sur Facebook
pose donc un véritable problème dont la résolution
appellerait une réponse uniforme au niveau européen.
92 Article 226-18-1 du code pénal : « Le fait
de procéder ou de faire procéder à un traitement de
données à caractère personnel concernant une personne
physique malgré l'opposition de cette personne, lorsque ce traitement
répond à des fins de prospection, notamment commerciale, [...]
est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 300 000 € d'amende
».
93 CNIL, rapport du 9 février 2009 « La
publicité ciblée en ligne » p. 32.
94 F. Gilbert, gazette du Palais, 24 avril 2008 n°115, p. 17
« Le FTC américain propose des principes pour encadrer la
publicité comportementale sur Internet ».
L'autre difficulté importante liée aux
réseaux sociaux concerne la conservation des données à
caractère personnel (II).
II La conservation des données : le droit à
l'oubli
Il convient d'envisager d'abord les textes relatifs au droit
à l'oubli (A), pour constater ensuite que ce droit n'est pas
respecté sur Facebook (B) et enfin proposer plusieurs solutions pour
encadrer ce type de publicité (C).
A Les textes relatifs au droit à l'oubli
L'article 6, 5° de la loi Informatique et Libertés
dispose que les données « sont conservées sous une forme
permettant l'identification des personnes concernées pendant une
durée qui n'excède pas la durée nécessaire aux
finalités pour lesquelles elles sont collectées et
traitées». En application de l'article 6, 5° de la loi
Informatique et Libertés, l'État comme les entreprises ne doivent
conserver les données personnelles collectées et stockées
que pour une durée limitée en adéquation avec la
finalité légitime de leur traitement. C'est la raison pour
laquelle le principe de conservation limitée des données à
caractère personnel est alternativement dénommé «
droit à l'oubli », méme si ce terme n'existe pas en
tant que tel dans la loi Informatique et Libertés. Le droit à
l'oubli peut être défini comme « une limitation dans le
temps de la conservation des données à caractère personnel
stockées dans la mémoire des ordinateurs»95.
En effet, en raison des capacités quasi-infinies de la mémoire
informatique, permettre une conservation perpétuelle des informations
stigmatiserait les individus et les empécherait d'évoluer par
rapport aux erreurs du passé. Le plan « France Numérique
2012 », présenté par Eric Besson en octobre 2008 expose
l'importance de la protection des données à caractère
personnel et, dans son action n° 45, ce dernier insiste sur l'importance
du droit à l'oubli et sur l'importance du droit dont dispose
l'internaute de garder le contrôle des informations qu'il
diffuse96.
La loi Informatique et Libertés donne également
la possibilité à toute personne faisant l'objet d'un traitement
de données à caractère personnel de demander à
être radiée d'un fichier dans lequel ses données seraient
enregistrées à l'article 40 alinéa 1 : « Toute
personne physique justifiant de son identité peut exiger du responsable
d'un traitement que soient, selon les cas,
95 Jurisclasseur communication fascicule 4735 Protection des
données à caractère personnel --Vie privée et
communication électronique de M-P. Fenoll-Trousseau et G. Haas de 2005
p37.
96 Plan « France Numérique 2012 » p.
38, disponible sur www.francenumerique 2012.fr.
rectifiées, complétées, mises
à jour, verrouillées ou effacées les données
à caractère personnel la concernant, qui sont inexactes,
incomplètes, équivoques, périmées, ou dont la
collecte, l'utilisation, la communication ou la conservation est interdite
».
Internet met à l'épreuve ce droit à l'oubli
car on constate qu'il est plus facile de diffuser des informations sur Internet
que de les enlever définitivement.
Les principes du Safe Harbor, auxquels la
société Facebook a adhéré, ne prévoient pas
de durée de conservation des données. Il appartient donc à
chaque entreprise américaine de fixer elle-même la durée de
conservation des données à caractère personnel qu'elle
traite. Une entreprise américaine peut même garder
indéfiniment des données à caractère personnel car
aucune autre législation américaine n'encadre la durée de
conservation.
Seule la loi Informatique et Libertés prévoit que
les données à caractère personnel doivent être
conservées pendant une période limitée
proportionnée à la finalité du traitement.
Cette obligation de conserver les données à
caractère personnel pendant une durée limitée n'est pas
appliquée sur Facebook (B).
B L'absence de droit à l'oubli sur Facebook
Concernant la suppression définitive d'un compte
Facebook, la politique de confidentialité mentionne uniquement le droit
de résiliation. Lors du processus de désinscription, le membre du
site doit obligatoirement indiquer les motifs de résiliation de compte.
Toutefois, le compte Facebook n'est pas réellement supprimé mais
seulement mis en veille et pourra être réactivé à
tout moment par l'ancien membre du réseau social.
Cette difficulté d'effacement total des données
du profil, mais aussi des informations secondaires liées à ce
profil tels que les commentaires publics publiés sur le site, a
été mise en exergue dans de nombreux rapports.
Le rapport n°1 de l'Agence européenne
chargée de la sécurité des réseaux et de
l'information (ENISA) intitulé « Security Issues and
Recommendations for Online Social Network »97 d'octobre 2007
suggère que les réseaux sociaux donnent la possibilité aux
utilisateurs d'effacer facilement leur profil ainsi que tout contenu ou
information qu'ils ont publiés sur le site.
De même, lors de la trentième conférence
mondiale des Commissaires à la protection des données et de la
vie privée, qui réunissaient les autorités homologues de
la CNIL de 60 pays
97
http://www.enisa.europa.eu/doc/pdf/deliverables/enisa_pp_social_networks.pdf.
autour de la thématique « Protéger la
vie privée dans un monde sans frontières », les 15 et
17 octobre 2007, une résolution sur la protection de la vie
privée dans les services de réseaux sociaux a été
adoptée98. Elle préconise la possibilité pour
les membres de réseaux sociaux d'effacer totalement leur profil ou toute
information qu'ils ont publiés sur le réseau social.
Il est intéressant de constater que la
problématique de la conservation excessive de données à
caractère personnel des réseaux sociaux concerne également
les moteurs de recherche. Ainsi, dans son avis relatif aux moteurs de
recherche, le G29 recommande que les données à caractère
personnel enregistrées par les moteurs de recherche soient
effacées dès que possible ou que la durée de conservation
n'excède pas 6 mois99. La même durée de
conservation après la fin des relations de l'utilisateur avec Facebook
pourrait être appliquée, à savoir une suppression des
données à caractère personnel 6 mois au plus tard
après que l'utilisateur ait quitté Facebook.
Dans une interview publiée le 14 février 2008,
Chris Kelly, le vice président et « chief officer »
de Facebook, explique que la suppression seulement temporaire des profils
répondrait à l'attente de la majorité des utilisateurs du
site100. Il ajoute que la suppression définitive est possible
par l'envoi d'un email à cette fin. Enfin, la société
examinerait la proposition européenne de supprimer définitivement
les données au bout de 18 mois en cas de désactivation du compte
par l'utilisateur.
A l'heure actuelle, un membre du site Facebook ne pourra donc
pas exercer son droit de suppression des données à
caractère personnel concernant son profil d'utilisateur alors
méme qu'il aurait suivi la procédure décrite sur le site
pour résilier son compte. Celui-ci devra écrire un courrier
électronique à Facebook expliquant qu'il souhaite obtenir la
suppression de son compte. Après l'envoi de ce courrier
électronique, l'utilisateur devra attendre un certain temps pour que son
compte soit réellement désactivé. Ce dispositif n'est donc
pas conforme à la loi Informatique et Libertés, puisque la
possibilité de suppression des données à caractère
personnel n'est pas garantie. Toutefois plusieurs solutions sont d'ores et
déjà envisageables
(C).
98
http://www.privacyconference2008.org/adopted_resolutions/STRASBOURG2008/resolution_social_networks
_fr.pdf.
99
http://ec.europa.eu/justice_home/fsj/privacy/docs/wpdocs/2008/wp148_fr.pdf.
p28.
100
http://www.neteco.com/126274-netxplorateur-facebook-vie-privee-chris-kelly.html
C. Les solutions permettant l'exercice du droit à
l'oubli
Si les réseaux sociaux décident de ne pas se
conformer aux recommandations des différents organismes
étudiés supra (cf. B de ce paragraphe), ces avis n'ayant
pas force obligatoire, il existe d'autres solutions pour qu'un réel
droit à l'oubli puisse être exercé.
Le plan France numérique 2012 101 propose
que soient adoptées des recommandations au plan européen et
international, voire des standards, définissant une durée de
conservation maximale des données personnelles détenues par les
moteurs de recherche. Il serait opportun que de tels standards de durée
de conservation soient adoptés au niveau international pour qu'ils aient
une réelle effectivité et qu'ils soient étendus aux
réseaux sociaux et donc à Facebook.
Aux Etats-Unis, d'autres pistes sont proposées pour
limiter la durée de conservation des données. Viktor
Mayer-Schonberger, professeur de droit public à l'université
d'Harvard suggère que « les sites web devraient se doter de
logiciels capables d'autoprogrammer l'effacement des données à
l'expiration d'un délai légal de conservation. Le dispositif
pourrait s'appliquer uniformément dans le monde. Dans tous les cas, il
faut associer la loi à la technique. »102. Le
moteur de recherche américain
Ask.com propose aux internautes ayant
navigué sur sa page d'effacer leurs données personnelles en
cliquant sur une fonction intitulée « ask eraser
».
Si cette technique permet réellement d'effacer
efficacement les données à caractère personnel par un
simple click, il serait judicieux que Facebook utilise cette méthode
d'effacement des données à caractère personnel pour les
personnes ne souhaitant plus être membre de Facebook.
On observe donc que la politique de conservation des
données à caractère personnel de Facebook n'est pas
pleinement respectueuse des modalités prévues dans la loi
Informatique et Libertés et ce particulièrement en ce qui
concerne la publicité ciblée et la durée de conservation
des données à caractère personnel.
101 Plan « France Numérique 2012 » p.
38, disponible sur www.francenumerique 2012.fr.
102 Les Echos du 7 novembre 2008 « Internautes : le droit
à l'oubli aux abonnés absents » de Monique Ciprut.
Disponible sur
http://www.lesechos.fr/info/innovation/4794388-internautes-le-droit-a-l-oubli-aux-abonnesabsents.htm.
CONCLUSION DU CHAPITRE 1
L'étude de l'application de la loi Informatique et
Libertés à Facebook a fait apparaître que la
société exploitant le site de réseau social est
responsable d'un traitement de données à caractère
personnel au sens de la loi Informatique et Libertés, mais aussi de la
directive 95/46/ CE du 24 octobre 1995. La loi française de protection
des données à caractère personnel lui est potentiellement
applicable si une application extensive du champ d'application de la loi
Informatique et Libertés est reconnue. On constate une différence
importante entre les obligations théoriques incombant au responsable de
traitement et l'application pratique de ces obligations, un certain nombre de
droits reconnus aux utilisateurs des membres du réseau social
étant floués. Cette absence de conformité aux principes de
protection des données à caractère personnel fait l'objet
de discussion au niveau de la commission européenne qui a tenue une
conférence à ce sujet les 19 et 20 mai 2009.
D'autres atteintes peuvent intervenir de la part d'autres
personnes que le réseau social : les membres du réseau social
peuvent voir leur vie privée atteinte par les utilisateurs du même
site de réseau social auquel il est inscrit (chapitre 2).
CHAPITRE 2 : La protection des utilisateurs
contre les autres membres du site de réseau social
Les réseaux sociaux sont un espace de communication sur
lesquels les membres échangent beaucoup d'informations relatives
à leur vie privée. La facilité de publier des informations
sur tout et n'importe quoi, associée au sentiment de déconnexion
par rapport au monde réel, peut provoquer des abus.
L'apparition d'Internet a démultiplié le
contentieux relatif aux abus de liberté d'expression. En 2004, le nombre
d'abus de liberté d'expression ont augmenté de 114% et la plupart
des infractions sont des diffamations ou des injures103. Les
internautes, cachés derrière leurs écrans, ont une
sensation de totale liberté et n'hésitent pas à exprimer
ce que bon leur semble sans avoir conscience des limites juridiques de la
liberté d'expression. Méme si à l'heure actuelle on ne
recense pas de jurisprudence française spécifique aux abus de
liberté d'expression commis sur les sites de réseaux sociaux, ces
sites constituent néanmoins un vivier potentiel de contentieux. Nous
envisagerons donc l'application de la loi du 29 juillet 1881 sur la
liberté de la presse aux sites de réseaux sociaux (Section 2).
La divulgation d'un nombre sans cesse plus important
d'informations est susceptible de ne pas concerner que la personne à
l'origine de la publication. Ces informations peuvent être des
éléments relatifs à la vie privée d'un autre membre
du site ou prendre la forme d'une photographie de cet autre membre. Sans
forcément le savoir, la personne porte ainsi atteinte à la vie
privée et ou à l'image de la personne. Contrairement à la
jurisprudence traditionnelle relative à la vie privée ou au droit
à l'image, l'auteur de l'atteinte n'est pas un journaliste et la victime
n'est pas nécessairement une célébrité. Il convient
donc d'envisager les atteintes aux droits de la personnalité (Section
1).
Section 1 Les atteintes à la vie privée
et à l'image sur les réseaux sociaux
Les atteintes dont peut être victime un membre d'un
réseau social sont de deux types. Un tiers peut révéler
sur un site de réseau social un aspect de la vie privée d'un
membre de ce réseau que ce dernier ne souhaitait pas divulguer. Un tel
préjudice n'est pas nouveau en soi et le droit sanctionne ces atteintes
commises sur les supports traditionnels. On envisagera donc les atteintes
traditionnelles à la vie privée réalisées sur les
réseaux sociaux (I). Un membre de réseau social peut
également être victime d'une divulgation relative à sa vie
privée dont il est
103 Cours de Madame A. Lepage de 2008-2009 du Master 2 Droit du
Multimédia et de l'Informatique de Paris II.
lui-méme à l'origine. En effet, les membres des
réseaux sociaux dévoilent des aspects très importants de
leur vie intime qui peuvent leur porter préjudice aussi bien dans leur
vie personnelle que professionnelle. Ces atteintes particulières,
inédites jusqu'à présent, seront étudiées
(II).
I Les atteintes traditionnelles à la vie
privée et à l'image sur les réseaux sociaux
Les atteintes traditionnelles à la vie privée et
à l'image peuvent être résolues par deux séries de
règles : les règles ordinaires de protection de la vie
privée et de l'image applicables sur tous les supports (1) mais
également par des règles spécifiques au support de
diffusion qu'est Internet (2).
A. L'application des règles ordinaires de protection
de la vie privée et de l'image Le droit à la vie privée
et à l'image sont des droits de la personnalité. Les droits de
la
personnalité peuvent être définis comme
« les droits inhérents à la personne humaine
quiappartiennent de droit à tout personne physique
(innés et inaliénables) pour la protection de
ses intérêts primordiaux
»104 La notion de droits de la personnalité est
assez récente. En effet, l'apparition de la protection de la vie
privée a été introduite dans le code civil à
l'article 9 dudit code par la loi du 17 juillet 1970105. Nous
envisagerons tout d'abord la protection civile de la vie privée et de
l'image (a) puis leur protection pénale (b). Dans cette partie ne seront
abordés que les aspects extrapatrimoniaux des droits de la
personnalité des personnes majeures sur Facebook, (les personnes
victimes d'atteinte aux droits de la personnalité dans les
réseaux sociaux étant majoritairement des personnes lambda.)
1) La protection civile de la vie privée et de
l'image sur Facebook
Nous verrons successivement le droit au respect de la vie
privée (a) et le droit à l'image (b) sur Facebook.
a/ Le droit au respect de la vie privée
La vie privée est un droit fondamental reconnu dans de
nombreux textes nationaux et internationaux.
Au niveau national, l'article 9 alinéa 1 du code civil
dispose que « Chacun à droit au respect de sa vie
privée ». Le Conseil Constitutionnel, par une décision
n° 99-416 DC datant du 23
104 Définition du dictionnaire Vocabulaire juridique de
l'Association Henri Capitant, édition PUF, 7e
édition.
105 Article 9 alinéa 1 du code civil.
juillet 1999, a considéré que le droit à
la vie privée était une composante de l'article 2 de la
Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen. Il lui a donc reconnu
une valeur constitutionnelle.
Au niveau international, deux textes importants
protègent la vie privée. Tout d'abord, l'article 12 de la
Déclaration Universelle des Droits de l'Homme adoptée par
l'Assemblée générale des Nations Unies le 10
décembre 1948 prévoit que « nul ne fera l'objet
d'immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou
sa correspondance, ni d'atteinte à son honneur ou à sa
réputation ». Ce principe a été repris et
détaillé à l'article 8 de la Convention européenne
de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales
(CESDH) adoptée le 4 novembre 1950 et ratifiée par la France le 3
mai 1974 selon lequel « toute personne a droit au respect de sa vie
privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance
». Si le premier des deux textes n'a qu'une valeur
déclarative, le second a force obligatoire et peut être
directement invocable par les particuliers lors d'un
procès106. On remarque donc le souci qu'ont les
différentes organisations internationales de vouloir protéger la
vie privée.
Ces textes s'appliquent aux atteintes au droit à la vie
privée commises sur Internet en raison du principe de
neutralité technologique. En vertu de ce principe, issu des
travaux de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial
international (CNUDCI), aucune discrimination ne doit être faite dans
l'application du droit selon le support technologique utilisé. Les
solutions proposées par la jurisprudence pour les atteintes commises sur
support papier ont vocation à s'appliquer aux atteintes qui se sont
produites sur Internet et donc sur les réseaux sociaux. Ainsi la
diffusion sur un site Internet d'un article consacré à la vie
familiale et sentimentale d'un chanteur a été
considérée comme portant atteinte à sa vie privée
et à son droit à l'image107.
Le droit au respect de sa vie privée signifie que toute
personne est en droit de garder secrètes les informations concernant sa
vie privée et donc de s'opposer à toute révélation
la concernant. Comme la personne est maître de ses
révélations, elle peut donc a fortiori décider
quelles informations relatives à sa vie privée elle souhaite
divulguer. Appliquées à Facebook, ces règles signifient
que seul un membre du réseau social a le droit de divulguer sur le site
des informations relatives à sa vie privée.
106 Article 1 de la CESDH.
107 TGI Paris référé 2 avril 2008, RLDI
2008/37 n° 1145, observations L. Costes
L'article 9 du code civil ne précisant pas quelles
informations constituent des informations privées, les tribunaux ont du
déterminer le contenu de la sphère privée. Un inventaire
exhaustif de ces éléments n'étant ni possible (les
informations étant très nombreuses et ayant variées dans
le temps), ni le sujet de ce mémoire, il est préférable
d'analyser les informations postées sur les réseaux sociaux qui
pourraient être protégées par le droit à la vie
privée. Les informations susceptibles d'être
protégées sur les réseaux sociaux sont diverses : la vie
affective108, l'adresse du domicile d'une personne109,
l'état de santé110, l'image de la
personne111, la religion112, la vie
familiale113. La notoriété de la personne titulaire du
droit au respect de la vie privée est indifférente à
l'application du texte.
L'atteinte à la vie privée ne nécessite
pas la réunion des trois éléments de la
responsabilité civile de l'article 1382 du code civil qui sont une
faute, un préjudice et un lien de causalité. Depuis un
arrêt rendu par la première Chambre civile de la Cour de cassation
le 5 novembre 1996114, réaffirmé à plusieurs
reprises depuis, « la seule constatation de l'atteinte à la vie
privée ouvre droit à réparation ».
Le droit à la vie privée peut entrer en conflit
avec la liberté d'expression prévue à l'article 10 de la
CESDH et être limité par celle-ci. Ces deux droits ayant une
valeur normative identique, il appartient aux tribunaux de déterminer
selon le cas d'espèce lequel des deux droits doit prévaloir sur
l'autre. La solution sera fonction des circonstances, les juges devant mettre
en balance les différents intérêts invoqués.
Néanmoins, la jurisprudence a dégagé trois critères
généraux permettant de passer outre le consentement de la
personne.
Le premier critère susceptible d'être mis en
oeuvre est l'information du public ou la contribution à un débat
d'intérêt général. Si la vie privée d'une
personne est impliquée dans un événement
d'actualité, ou si la révélation d'informations intimes
contribue à un débat d'intérêt
général, l'importance de l'information légitime la
divulgation de sa vie privée. Par exemple, la Cour de cassation a
jugé que la révélation de l'appartenance à la
francmaçonnerie d'un certain nombre d'élus d'une
municipalité était licite car la révélation
108 Cass. Civ. 2e 24 avril 2003.
109 TGI Paris 2 juin 1976.
110 TGI Paris 23 octobre 1996.
111 Cf. voir B du paragraphe.
112 Cass. Civ. 1e 6 mars 2001.
113 La Maternité par exemple: Civ. 2e 5 janvier 1983
114 Bulletin civil I, n° 378.
s'inscrivait dans le contexte d'une actualité
judiciaire et permettait l'information du public sur un débat
d'intérêt général115. Appliqué
à Facebook, ce moyen de défense a peu de chance de
prospérer étant donné que les membres victimes de
révélations sont généralement des personnes
anonymes. La personne à l'origine de la divulgation aura la difficile
tâche de prouver que l'information qu'elle a publiée participe
soit à un débat d'intérêt général,
soit que l'élément divulgué sur la vie privée de la
personne est un événement d'actualité.
Le caractère anodin de l'information divulguée
chasse également l'atteinte au respect de la vie privée. La
révélation de la grossesse d'une princesse a par exemple
été considérée comme licite car
anodine116. Ce critère est difficile à manier car
très subjectif, ce qui est anodin pour une personne peut ne pas
l'être pour une autre. Ce critère joue également pour les
personnes anonymes et les personnes vulnérables telles que les mineurs
mais seulement s'ils sont impliqués dans un fait
d'actualité117. En effet, pour faire sortir la
révélation de la sphère privée, il faut que le
public ait un intérêt à connaître cet
élément118. Sur Facebook, le prévenu devra donc
non seulement prouver que l'intéressé est concerné par un
événement d'actualité mais également que
l'élément dévoilé est bénin.
Enfin, les faits déjà rendus publics sortent de
la sphère privée de la personne et peuvent être librement
divulgués119. La personne ayant donné son autorisation
à la révélation ne peut pas à l'heure actuelle
bénéficier automatiquement du droit à
l'oubli120. Le droit à l'oubli n'est plus qu'un argument
parmi d'autres que le juge prendra en considération dans la balance des
intérêts en jeu121. Seules les circonstances de
l'espèce peuvent conduire les juges à estimer que la rediffusion
de ces informations est fautive. Sur Facebook, si une personne rappelle des
faits déjà divulgués, elle pourra bénéficier
de cette exception. Toutefois, comme les propos sur Facebook peuvent constituer
des données à caractère personnel, (cf. infra B 2), la loi
Informatique et Libertés pourrait diminuer la force de cette
exception.
115 Cass. Civ. 1e 24 octobre 2006 ; legipresse 2007,
troisième partie p. 89.
116 Cass. Civ. 1e 19 février 2004 ; D. 2004
p.1633, C. Caron.
117 Cass. Civ. 2e 29 avril 2004.
118 Cass. Civ. 2e 25 novembre 2004 ; D. 2005 p. 2643,
A. Lepage, L. Marino, C. Bigot.
119 Cass. Civ. 2e 3 juin 2004; D. 2005 p. 2643, A.
Lepage, L. Marino, C. Bigot.
120 Cass. Civ. 1 20 nov. 1990, JCP 1992. II. 21908, obs.
Ravanas : arrêt rendu à propos du rappel, dans un livre, d'une
condamnation pénale. A cette occasion, la Cour de cassation a
refoulé le droit à l'oubli comme règle
générale du droit.
121 T. Hassler « Droits de la personnalité :
rediffusion et droit à l'oubli » D. 2007 p. 2829.
Toutes ces exceptions s'appliquent sous réserve du
respect de la dignité de la personne humaine122. Une image ou
des propos choquants diffusés sur Facebook seraient donc
sanctionnés pour atteinte à la vie privée sans que
l'auteur des propos ou de l'image ne puisse valablement invoquer la
liberté d'expression.
L'atteinte à la vie privée sur les
réseaux sociaux est souvent réalisée par la mise en ligne
d'une photographie pour laquelle la personne représentée n'a pas
donné son consentement. Cette atteinte au droit à l'image doit
donc être abordée (b).
b/ Le droit à l'image
La protection civile de l'image est une création
prétorienne fondée sur l'article 9 du code civil. Dès
1982, la Cour d'appel de Paris affirme que « le droit au respect de la
vie privée permet à toute personne, fut-elle artiste du
spectacle, de s'opposer à la diffusion, sans son autorisation expresse,
de son image, attribut de sa personnalité »123. Le
droit à l'image permet à toute personne de s'opposer à la
reproduction et à la diffusion de son image sans autorisation. Pour que
la personne puisse bénéficier de cette protection, elle doit
être identifiée ou identifiable124, le droit à
l'image ayant pour principale finalité d'assurer la protection de
l'identité physique125.
Les règles de droit commun s'appliquent de la
méme manière lorsque l'atteinte à l'image a lieu sur
Internet : l'article 9 du code civil s'applique indifféremment au
support sur lequel est publié l'image. Cette neutralité
technologique a été très tôt consacrée par
la
jurisprudence dans les affaires Estelle Halliday126 et
Lynda Lacoste127 : sauf
nécessitéd'information du public, l'autorisation de la
personne doit toujours être recueillie pour diffuser une information la
concernant ou une photographie la représentant.
Sur Facebook, il est possible de « taguer »
(« marquer » dans la version française de Facebook) une
personne c'est-à-dire d'indiquer son nom sur une photographie pour que
la personne soit identifiée et reçoive une notification sur la
mise en ligne d'une nouvelle photographie la représentant. Dès
que le nom de la personne sur la photographie est indiqué,
122 Cass. Civ. 1e 20 février 2001 ; D. 2001
page 1119, note Gridel.
123 CA Paris 25 octobre 1982.
124 Cass. Civ. 1e 21 mars 2006 ; D. 2006 p. 2702, A.
Lepage, L. Marino, C. Bigot.
125 TGI Paris 20 janvier 1982 ; D. 1985 I.R., p. 163,
observations R Lindon.
126 CA Paris 10 février 1999 ; CCE 2000 commentaire
n° 34, observations R. Desgorces.
127 CA Versailles 8 juin 2000 ; CCE 2000 commentaire n° 81,
observations J-C Galloux.
la photographie est visible sur le profil de la personne
concernée. 27% des 18-24 avouent avoir publié des informations ou
des photos de personnes sans leur consentement128. La seule
possibilité offerte à la personne est de supprimer son nom de la
photo. La politique de confidentialité du site Facebook encourage les
personnes à régler entre elles leur problème129
et refuse d'intervenir si la photo n'est pas choquante130. Il serait
souhaitable que le site Facebook empéche de marquer si la personne sur
la photo n'a pas préalablement donné son consentement. Si le
membre à l'origine de la publication de la photo refuse de retirer la
photographie du site, le recours à l'intervention judiciaire pour
violation du droit à l'image sera l'unique solution.
La jurisprudence a une conception très protectrice du
droit à l'image. L'autorisation de la personne photographiée doit
être expresse et spéciale, c'est-à-dire qu'elle doit
préciser chaque mode de diffusion131. L'autorisation est
strictement interprétée par les tribunaux et toute image
utilisée en dehors du cadre de l'autorisation constitue une violation du
droit à l'image de la personne132. Contrairement au droit
à la vie privée, où un fait déjà
divulgué ne peut plus constituer une atteinte à la vie
privée133, l'image rendue publique ne peut pas être
réutilisée sans l'autorisation de la personne134.
L'image bénéficie donc d'une plus grande protection.
Sur Facebook, il est donc nécessaire d'obtenir
l'autorisation de la personne pour publier la photographie même si la
personne a consenti à être photographiée ou si la
photographie est publiée sur un autre site Internet.
La jurisprudence reconnaît depuis peu l'existence
d'autorisations tacites d'utilisation d'images pour certaines personnes, telles
qu'un chauffeur de taxi participant à un documentaire135 ou
un mannequin136. Cette souplesse d'appréciation de
l'autorisation, conforme au principe du consensualisme du droit des contrats,
ne supprime pas l'exigence d'une autorisation certaine.
128 Etude de 2007 réalisée par le site gate safe
online, sur 2013 britanniques de plus de 18 ans disponible sur
http://www.getsafeonline.org/nqcontent.cfm?a_id=1469.
129 « Si vous souhaitez qu'une photo ne soit pas
publiée du tout, adressez vous directement à la personne qui l'a
publiée » Politique de confidentialité de Facebook.
130 « Malheureusement, Facebook ne pourra pas supprimer
les photos qui ne violent pas les conditions d'utilisation du site. »
Politique de confidentialité de Facebook.
131 CA Dijon 4 avril 1995 ; JCP 1996, IV, 1528.
132 CA Lyon 27 janvier 2005; disponible sur
http://www.juriscom.net/jpt/visu.php?ID=664.
133 Cass. Civ. 2e 3 juin 2004, D. 2005 p. 2643, A.
Lepage, L. Marino, C. Bigot.
134 CA Lyon 11 janvier 1996 ; Légipresse 1996, I,
p.147.
135 Cass. Civ. 1e 7 mars 2006 ; D. 2006 p. 2702, A.
Lepage, L. Marino, C. Bigot.
136 Cass. Civ. 2e 4 novembre 2004 ; D. 2005 p. 2643,
A. Lepage, L. Marino, C. Bigot.
La nécessité d'obtenir l'autorisation de la
personne pour diffuser son image peut céder pour illustrer un article en
lien avec un événement d'actualité137, sous
réserve de l'atteinte à la dignité de la
personne138. Ces exceptions au consentement de la personne ayant un
champ d'application limité, elles ont peu de chance de prospérer
en cas de contentieux relatif à l'image d'une personne sur Facebook.
Depuis un peu moins de 10 ans, la jurisprudence reconnait au
droit à l'image une existence autonome par rapport à la vie
privée. La Cour de cassation, dans un arrêt du 10 mai 2005
énonce que « constituent des droits distincts le respect
dû à la vie privée et celui dû à l'image
»139. Dans ces circonstances, il n'est pas
nécessaire que les photographies saisissent la personne dans un instant
de sa vie privée pour que l'atteinte à l'image soit
constituée140. Une photographie prise dans un lieu public et
publiée sur Facebook sera considérée comme une atteinte au
droit à l'image de la personne si celle-ci n'a pas donné son
accord à la publication. L'image constituera donc soit un moyen de
porter atteinte à la vie privée, soit sera protégée
en tant que telle car elle représente un prolongement de la vie
privée.
Sur Facebook, comme sur tout site de réseau social, les
membres doivent recueillir le consentement de la personne avant de
révéler un aspect de la vie privée d'une personne ou avant
de mettre en ligne une photographie, ce qui est rappelé par Facebook
à chaque fois qu'un membre met en ligne une photo. On constate donc que
la particularité des sites de réseaux sociaux ne fait pas
obstacle à l'application traditionnelle de la protection civile de la
vie privée et de l'image. La politique de confidentialité
pourrait également comporter des conseils sur la façon dont les
utilisateurs devraient traiter les données personnelles des tiers qu'ils
diffusent sur le site.
Les droits de la personnalité bénéficient
également d'une protection pénale qu'il convient d'aborder
(2).
137 Cass. Civ. 1e 7 mars 2006 ; D. 2006 p. 2702, A.
Lepage, L. Marino, C. Bigot.
138 Cass. Civ. 2e 4 novembre 2004 ; D. 2005 p. 2643,
A. Lepage, L. Marino, C. Bigot.
139 Cass. Civ. 1e 10 mai 2005; D. 2005 p. 1380.
140 Juris classeur communication fascicule 3750 L'image des
personnes, E. Dreyer, 4 novembre 2008 paragraphe 34.
2) La protection pénale de la vie privée et
de l'image
Dans le titre consacré aux atteintes à la
personne du livre 2 du code pénal, il existe un chapitre 6 relatif aux
atteintes à la personnalité. Les articles 226-1 à 226-7 du
code pénal incriminent l'atteinte à la vie privée tandis
que les articles 226-8 à 226-9 incriminent l'atteinte à la
représentation de la personne. Le contentieux relatif à la vie
privée et à l'image étant essentiellement civil et non
pénal, nous limiterons l'étude de la protection pénale des
droits de la personnalité à quelques observations
générales concernant les éléments constitutifs de
ces infractions.
La protection civile et la protection pénale de la vie
privée renvoient de la même manière à la
nécessité de prouver l'absence de consentement de la victime,
puisque le droit civil et le droit pénal ne répriment les
atteintes à la vie privée qu'en l'absence de consentement de la
part de la victime. Ainsi, selon l'article 226-1 du code pénal, qui
réprime le fait, au moyen d'un procédé quelconque, de
porter volontairement atteinte à l'intimité de la vie
privée d'autrui, le consentement de la personne est
présumé dès lors que l'acte est accompli au vu et au su de
la personne intéressée et qu'elle ne s'y est pas opposée.
Dans cette hypothèse, la loi ne sera pas applicable.
Ensuite, toutes les formes d'atteinte à la vie
privée ne constituent pas une infraction. L'article 226-1 suppose que la
personne soit dans un lieu privé.
Enfin, les articles 226-1 et 226-2 du code pénal
envisagent le droit à l'image simplement comme un vecteur,
c'est-à-dire comme un moyen de porter atteinte à la vie
privée. En revanche, l'article 226-8 du code pénal semble
s'orienter vers l'autonomie du droit à l'image. Ainsi, le
périmètre de protection de la vie privée est plus
restreint en droit pénal qu'en droit civil, seules les atteintes les
plus graves à la vie privée sont
incriminées.141
Les articles 226-1 et 226-8 du code pénal ont
été utilisés dans deux affaires où les
prévenus diffusaient sur Internet des photographies
intimes142 ou des images pornographiques143 prises d'une
autre personne dans un lieu privé.
L'image d'une personne prise à son insu dans un lieu
privé et diffusée sur Facebook serait donc susceptible
d'être réprimée sur le fondement d'atteinte à
l'intimité de la vie privée, prévu par les articles 226-1
et suivants du code pénal.
141 Cours de Madame A. Lepage de 2008-2009 du Master 2 Droit du
Multimédia et de l'Informatique de Paris II.
142 CA Paris 22 mars 2005, CCE n° 11, novembres 2005,
commentaire 176 de A. Lepage.
143 Ca Paris 24 avril 2007, CCE n°12, décembre 2007,
commentaire 156 de A. Lepage.
L'article 9 du code civil n'est pas le seul fondement
susceptible d'engager la responsabilité des personnes violant la vie
privée et le droit à l'image des membres de réseaux
sociaux. Depuis quelques années, on assiste à une montée
en puissance de la loi Informatique et Libertés comme moyen de
protection de la vie privée sur Internet (2)
B. L'application de règles spécifiques de
protection de la vie privée et de l'image
Dans les affaires impliquant des atteintes à la vie
privée, les victimes invoquent généralement l'article 9 du
code civil pour obtenir réparation de leur préjudice. Toutefois,
l'article 9 n'est pas l'unique remède face aux violations de la
sphère privée. La loi Informatique et Libertés peut
également concourir à la protection des atteintes à la vie
privée dès lors que les informations constituent des
données à caractère personnel.
La diffusion de l'image d'une personne à partir d'un
site Internet ouvert au public est susceptible de constituer un traitement de
données dès lors que la photographie de la personne se rapporte
à une personne identifiée ou identifiable144. Dans
cette hypothèse, les dispositions protectrices de la loi Informatique et
Libertés s'appliquent. La personne représentée sur l'image
pourrait s'adresser « soit au juge (..), soit à la CNIL,
après avoir, en application du droit d'opposition145,
demandé sans succès l'arrêt de cette diffusion au
responsable du site»146.
Cette possibilité de recourir à la loi
Informatique et Libertés est illustrée dans un arrêt
à la motivation confuse de la Cour d'appel de
Besançon147. En l'espèce, une association avait
diffusée sur son site Internet l'image d'une femme citée
nommément portée disparue. Deux membres de la famille de cette
femme avaient demandé sous astreinte le retrait de l'appel à
témoin du site pour violation de leur vie privée. La Cour d'appel
a estimé que cette diffusion sans l'autorisation des membres de la
famille constituait un trouble illicite et a ordonné le retrait de ces
informations sur le fondement du droit d'opposition prévu par la loi
Informatique et Libertés.
144 L'utilisation de l'image des personnes, 28 mars 2005
(disponible sur le site de la CNIL).
145 Article 38 loi Informatique et Libertés.
146 L'utilisation de l'image des personnes, 28 mars 2005
(disponible sur le site de la CNIL).
147 CA Besançon 31 janvier 2007 ; D. 2007 p.2771, A.
Lepage, L. Marino, C. Bigot.
La loi Informatique et Libertés pourrait
également pallier aux insuffisances de l'article 9 du code civil. En
effet, en application de la jurisprudence des faits anodins, certaines
révélations de faits relatifs à la vie privée ne
sont pas protégeables sur le fondement de l'article 9 du code civil. Par
application du principe de finalité148, le traitement
d'informations même recueillies de façon licite, pourrait
être sanctionné dès lors que ce traitement ne serait pas
conforme au regard de sa finalité149. Par exemple, une
personne publiant une information intime sur un groupe Facebook pourrait
s'opposer à la réutilisation de cette information dans un
contexte différent de l'objectif du groupe.
L'exception de divulgation antérieure pourrait
également péricliter face au droit à l'oubli
consacré dans la loi Informatique et Libertés150. Par
application de ce principe, le traitement de données á
caractère personnel doit être limité dans le temps. Ainsi,
une information intime publiée sur Facebook et réutilisée
un certain nombre d'années plus tard alors que la personne s'est
désinscrite du site pourrait s'opposer à cette utilisation en
invoquant le droit à l'oubli.
Sur Facebook, les exceptions relatives au droit au respect de la
vie privée et à l'image auraient donc moins de force que sur les
supports traditionnels.
Toutefois, la loi Informatique et Libertés ne pourrait
totalement évincer l'article 9 du code civil dans la protection de la
vie privée151. Le traitement de données relatives
á la vie privée aux seules fins de journalisme ou d'expression
artistique n'est pas soumis par exemple aux principales dispositions de la loi
Informatique et Libertés152. Par ailleurs, le consentement de
la personne peut etre évincé si le responsable de traitement
poursuit la réalisation d'un « intérêt légitime
»153. Cet intér~t légitime n'est cependant admis
que « sous la réserve de ne pas méconnaitre
l'intérêt ou les droits et libertés fondamentaux de la
personne concernée »154. Dans ces deux
hypothèses, l'article 9 du code civil retrouverait sa plénitude
d'action.
Les dispositions pénales de la loi Informatique et
Libertés peuvent également servir d'adjuvant aux articles
226-1 et suivants du code pénal155. L'article 226-19 du code
pénal incrimine le fait de mettre ou de conserver en mémoire
informatisée, sans l'accord de
148 Article 6-2° de la loi Informatique et
Libertés.
149 L. Marino Les nouveaux territoires des droits
de la personnalité, GP 19 mai 2007 n°139 p.22.
150 Article 6-5° de la loi Informatique et
Libertés.
151 L. Marino Les nouveaux territoires des droits
de la personnalité, GP 19 mai 2007 n°139 p.22.
152 Chapitre 11 de la loi Informatique et
Libertés.
153 Article 7-5° de la loi Informatique et
Libertés.
154 Article 7-5° de la loi Informatique et
Libertés.
155 A. Lepage liberté et droits
fondamentaux à l'épreuve de l'Internet, litec, 3e
édition p113.
l'intéressé, des données dites sensibles.
Un jeune homme a été condamné sur ce fondement pour avoir
stocké sur sa page d'accueil des images pornographiques de son ancienne
petite amie, accompagnées de commentaires relatifs à ses
moeurs156.
Sur Facebook, la publication de données sensibles
telles que des informations relatives aux opinions politiques de la personne,
à sa vie sexuelle sans l'accord de la personne pourrait être
sanctionnée sur le fondement de l'article 226-19 du code
pénal.
Comme le fait remarquer Madame Laure Marino157, les
nouvelles technologies pourraient servir de vecteurs à la mutation des
droits de la personnalité. En effet, d'un coté le droit au
respect de la vie privée pourrait devenir « un droit de
contrôle sur des informations personnelles »158 , de
l'autre, l'utilisation de la loi Informatique et Libertés pour
protéger les droits de la personnalité pourrait se transformer en
un nouveau droit subjectif : le droit au respect des informations
personnelles.
Sur les réseaux sociaux, des atteintes inédites
voient également le jour (II).
II Les atteintes inédites à la vie
privée et à l'image sur les sites de réseaux sociaux
Un membre de site de réseau social peut être
lui-même à l'origine de l'atteinte à sa propre vie
privée. En effet, une personne peut dévoiler une part très
importante de sa vie intime sur Internet sans même y prendre garde
Le journal le Tigre159, a voulu attirer l'attention
sur le danger que représente la publication d'informations personnelles
sur internet en réalisant le portrait d'un internaute, pris au hasard,
en s'appuyant seulement sur les traces numériques qu'il avait
laissé sur différents sites de réseaux
sociaux160. Le journal a pu de cette manière retracer toute
la vie amoureuse, familiale et professionnelle de la personne de ces
dernières années. Pour Alex Türk, président de la
CNIL, « Le fait même dentrer dans ce type de réseau,
revient à accepter de réduire son périmètre
d'intimité. ».
La politique de confidentialité du site Facebook et
l'autorisation de la personne à dévoiler sa vie privée
seront les deux grands axes de ce paragraphe.
156 TGI Privas 3 septembre 1997 ; LPA 11 novembre 1998 p. 19,
note J. Frayssinet, confirmé par CA Nîmes 6 novembre 1998revue
droit de l'informatique et des télécoms 1999/4 p51, note M-E
Bichon-Lefeuvre.
157 L. Marino Les nouveaux territoires des droits de la
personnalité, GP 19 mai 2007 n°139 p.22.
158 D. Gutman Le sentiment d'identité p.221
cité par. Marino Les nouveaux territoires des droits de la
personnalité, GP 19 mai 2007 n°139 p.22.
159 www.le-tigre.neti160 Le Monde du 18 janvier 2009 « Un
internaute piégé par ses traces sur la Toile » de Y.
Gauchard.
A La politique de confidentialité de Facebook
Le site Facebook encourage ses membres à
dévoiler un maximum d'informations les concernant. Lors de
l'inscription, tout nouveau membre est invité à détailler
le plus précisément possibles les informations relatives à
sa vie civile et sociale sur son profil, à participer à de
nombreux quizz qui peuvent être parfois très intrusifs et auxquels
peu de personnes accepterait de répondre s'ils étaient
posés en dehors du support Internet. En rappel de ce qui a
déjà été mentionné dans l'introduction de ce
mémoire, la politique de confidentialité de Facebook
protège peu la vie privée de l'utilisateur. En l'absence d'action
de celui-ci, toutes les informations qu'il publie sont visibles par un cercle
élargi d'utilisateurs.
La plupart des membres de Facebook n'imagine pas la multitude
de personnes susceptibles d'avoir accès à tout moment à
leurs informations personnelles sur Facebook. A cette absence de discernement
s'ajoute un manque de connaissance quant à la manière de modifier
la « visibilité » de leur page. Selon une étude de 2007
réalisée par le site Gate Safe Online, site de sensibilisation
à la sécurité informatique, sur 2013 britanniques de plus
de 18 ans161, 16% des personnes interrogées disent ne rien
connaître sur les règles de sécurité sur internet.
Ce chiffre s'élève à 29% pour les personnes
âgées de 55 à 64 ans. 15% des utilisateurs de sites de
réseaux sociaux n'utilisent aucun paramètre de personnalisation
pour rendre confidentiel les informations sur ces sites. Selon une
enquête publiée en août 2007 par Sophos162,
société spécialisée dans les anti-virus et les
anti-spam, 41% des utilisateurs de Facebook acceptent d'ajouter dans leurs amis
un parfait inconnu qui en fait la demande.
Les risques liés à ce dévoilement
délibéré de sa vie privée peuvent être
importants : les employeurs potentiels utilisent les services de prestataires
qui récoltent des informations sur la toile, en toute discrétion,
pour dresser le profil de candidats à l'embauche à partir
d'informations plus ou moins exactes, constituées de contributions
volontaires que laisse volontairement ou involontairement un individu sur
Internet. Le cabinet de recrutement Robert Half a publié une
étude en août 2008 dans laquelle il est estimé que 94% des
directeurs des ressources humaines français recourent à des modes
de sélection de moins en moins
161 Disponible sur
http://www.getsafeonline.org/nqcontent.cfm?a_id=1469.
162 Disponible sur
http://www.sophos.fr/pressoffice/news/articles/2007/08/facebook.html.
traditionnels tels que les réseaux
sociaux163. Les sites de réseaux sociaux sont ainsi un moyen
de plus en plus fréquemment utilisé pour obtenir des informations
sur les candidats à l'emploi, pour creuser leur profil et
découvrir ce qui n'est pas inscrit dans le curriculum vitae. Une blague
de mauvais goût ou une photographie compromettante peuvent orienter un
employeur sur le choix de son futur employé.
Au principe d'accessibilité à tous des
informations d'un membre, devrait succéder le principe de divulgation de
ses informations aux seules personnes acceptées. De cette
manière, seules les personnes que le membre accepte comme amies auraient
la possibilité de voir ses informations personnelles. Facebook semble
avoir accéder partiellement à cette demande puisqu'au
début de l'année 2009, le site a modifié ses options
d'affichage. Désormais seuls les amis et les membres de «
réseau »164 peuvent accéder à
l'intégralité des informations de l'utilisateur. Néanmoins
si une personne utilise la fonction recherche du site pour retrouver un membre
du site, elle pourra voir la photo de profil, sa liste d'amis, un lien pour
l'ajouter en tant qu'ami ou pour lui envoyer un message ainsi que les pages
dont le membre se déclare fan. Cette modification n'est pas totalement
satisfaisante car l'utilisateur devra encore faire l'effort de
paramétrer sa visibilité dans la fonction recherche du site pour
ne pas être visible par les personnes qui ne font pas partie de sa liste
d'amis ou de son réseau. De méme, s'il souhaite montrer que
certaines informations à ses amis, il devra ici encore modifier ses
options de confidentialité.
Le second type d'atteinte inédite réalisée
sur les sites de réseaux sociaux tient à la libre volonté
des membres de dévoiler leur vie privée (B).
B La libre volonté de la personne de dévoiler
sa vie privée
Une partie des membres des réseaux sociaux
n'hésitent pas à publier toujours plus d'informations les
concernant. Face aux revendications de certains membres, Facebook a
réactivé l'option « profil public » qui permet
à n'importe quel membre du site d'accéder au
163 Disponible sur
http://www.lepoint.fr/actualites-technologie-internet/les-recruteurs-pistent-les-candidats-surgoogle-et-facebook/1387/0/309970.
164 Lors de l'inscription, le nouveau membre doit
sélectionner le réseau auquel il souhaite appartenir. Ce
réseau est le plus souvent géographique (un pays, une
région, une ville) mais peut également être une entreprise
ou une école.
profil de la personne ayant choisie cette option165.
Ces personnes justifient leur comportement en affirmant qu'elles « n'ont
rien à se reprocher ».
Jusqu'oü le droit peut-il protéger une personne
contre elle-même ? Les limites classiques de la vie privée
dépendent de la volonté individuelle de chacun. L'étendue
de la diffusion des informations relatives à la vie privée d'une
personne relève de son seul consentement de la personne. Toute personne,
à condition qu'elle soit majeure, est libre de fixer les limites de ce
qui peut être divulgué sur sa vie intime. La Cour
européenne des droits de l'homme (CEDH) parle à ce sujet de
« droit à l'autonomie personnelle »166.
Toutefois, le consentement de la personne, nécessaire pour
délivrer une information personnelle, est peut être insuffisant
dans l'univers numérique car une fois ce consentement donné, la
protection de la personne cesse en pratique. La disparition de la protection
par le jeu de la volonté est dangereuse car l'individu n'a pas toujours
pleinement conscience de ce que recouvre la divulgation des aspects de sa vie
privée et des conséquences néfastes que ce type de
conduite peut induire.
A l'instar du formalisme ad validitatem, qui a pour
but d'éviter tout engagement irréfléchi, il serait
souhaitable de mettre en place un certain formalisme lors de l'acceptation de
l'internaute au dévoilement de sa vie privée. Ce formalisme
pourrait prendre la forme d'une charte d'utilisation dans laquelle seraient
expliquées les conséquences de la publication de ces
informations. En effet, la facilité de divulguer des informations
personnelles doit être mise en parallèle avec la fugacité
de l'autorisation de la personne et la redoutable mémoire
informatique.
Dans son rapport, l'ENISA (European Network and Information
Security Agency)167 a estimé que les informations fournies
par les sites de réseaux sociaux ne sont pas suffisantes pour que
l'internaute puisse valablement avoir conscience de l'étendue de ses
révélations, « l'utilisateur n'ayant pas conscience de
l'ampleur de les informations qu'il divulgue. L'apparence d'intimité
résultant de l'entourage d' « amis » donnant souvent lieu
à des révélations inopportunes ou dommageables
». Il conviendrait donc selon l'ENISA, d'opter pour des campagnes de
sensibilisation et d'éducation de l'opinion à l'usage des sites
communautaires.
165
http://www.cnetfrance.fr/news/internet/facebook-profil-public-39387901.htm
166 CEDH 29 avril 2002 Pretty contre Royaume-Uni, paragraphe 62
« La notion d'autonomie personnelle reflète un principe
important qui sous-tend l'interprétation des garanties de l'article 8.
»
167
http://www.enisa.europa.eu/doc/pdf/deliverables/enisa_pp_social_networks.pdf
Les règles traditionnelles de protection de la vie
privée et de l'image s'appliquent donc à Facebook sans grande
difficulté. L'originalité de ce support lui permet, en outre, de
bénéficier d'une plus grande protection grace à la loi
Informatique et Libertés qui constitue un fondement
supplémentaire pour que toute atteinte à la vie privée
d'une personne cesse. Toutefois, de nouvelles atteintes aux droits de la
personnalité apparaissent via les sites de réseaux sociaux
auxquelles les Tribunaux et les Cours n'ont pas encore eu à faire face.
S'il a été possible de faire pression sur ces sites pour qu'ils
mettent en place une politique de visibilité restrictive des
informations de leurs membres grâce à des campagnes de presse
condamnant leur politique de confidentialité, le droit est
désarmé face à l'attitude exhibitionniste de certaines
personnes sur ces sites. La politique de confidentialité pourrait
comporter des conseils sur la façon dont les utilisateurs devraient
traiter les données personnelles des tiers qu'ils diffusent sur le
site.
Les membres des réseaux sociaux tels que Facebook sont
également des victimes de possibles diffamations et injures
publiées sur les sites. Il faut donc envisager quel serait le le
régime des infractions de presse en l'espèce (Section 2).
Section 2 Les abus de liberté d'expression sur
les réseaux sociaux
La loi du 29 juillet 1881 relative aux infractions de presse
(dite loi de 1881), sanctionne les abus de la liberté d'expression.
Contrairement à ce qu'indique son nom, cette loi ne concerne pas
seulement les infractions commises sur support papier mais englobe
également les services de communication au public en ligne,
c'est-à-dire Internet. En effet, l'article 6-V de la LCEN dispose que
« les dispositions des chapitre IV et V de la loi du 29 juillet 1881
sont applicables aux services de communication au public en ligne et la
prescription acquise dans les conditions prévues par l'article 65 de
ladite loi ». L'application du droit de la presse ne dépend
donc pas de son support et nous allons envisager les deux infractions de presse
les plus fréquemment commises sur Internet, la diffamation et l'injure,
et identifier la manière dont ces infractions sont
appréhendées et réprimées sur les sites de
réseaux sociaux. Seules les diffamations et injures envers un simple
particulier et sans motif discriminatoire seront traitées dans ce
paragraphe. Les éléments constitutifs des infractions d'injure et
de diffamation sur les réseaux sociaux (I), ainsi que les
modalités de leur répression (II) formeront deux parties de cette
section.
I La constitution des infractions de presse sur les
réseaux sociaux
La loi de 1881 est applicable aux sites de réseaux
sociaux si les éléments constitutifs de l'injure et de la
diffamation peuvent être constatés sur ce support particulier
qu'est Facebook. Dans un souci de clarté, nous aborderons d'abord
l'élément commun aux infractions de presse, la publicité
(A), avant de s'intéresser aux éléments spécifiques
à la diffamation et à l'injure (B).
A L'élément fondamental commun aux
infractions de presse : la publicitéL'article 23 de la loi de 1881
énumère les différents modes de publication relevant
de
la loi de 1881. Depuis l'entrée en vigueur de la LCEN,
le terme de « communication au public par voie électronique »
est répertorié dans cet inventaire et inclut la communication
audiovisuelle168 et la communication au public en
ligne169. Avant cette modification législative, le
réseau Internet était assimilé à un moyen de
communication audiovisuel et constituait donc déjà un support de
publication.
La condition de publicité est fondamentale car elle
détermine l'application ou l'exclusion de la loi de 1881. En effet, loin
d'avoir un régime uniforme, les différentes publications sur
Internet sont susceptibles de relever de deux régimes différents:
le régime de la correspondance privée et le régime de la
communication publique170. Chacun de ces deux régimes fait
l'objet d'un corps de règles spécifique. En effet, d'une part, la
correspondance privée relève du régime du secret des
correspondances171 et échappe aux dispositions relatives
à la répression des infractions de presse de 1881. D'autre part,
la communication au public est soumise aux règles posées par la
loi de 1881 et notamment la diffamation et l'injure. Néanmoins, dans le
cas de l'injure et de la diffamation non publiques, une sanction pénale
reste possible, non pas sur le fondement de la loi de 1881 mais sur le celui
des articles R 621- 1 et R 621-2 du code pénal, équivalente
à une contravention de première classe.
Sur Facebook, il est difficile de savoir si une diffamation ou
une injure mise en ligne est publique ou privée, le contenu litigieux
pouvant n'être accessible qu'à un nombre limité de
personnes. Pour pallier à cette difficulté de qualification de la
porté des propos, la jurisprudence a recours au critère
traditionnel de la « communauté d'intérêts ».
Selon M.
168 Article 2 alinéa 3 de la loi du 30 septembre 1986 tel
que modifié par la LCEN.
169 Article 1-IV alinéa 4 de la LCEN.
170 CA Paris 16 janvier 2003 CCE octobre 2003 p. 13, A.
Lepage.
171 Article 226-15 et 432-9 du code pénal.
Mayaud, cette notion peut être définie par
«l'appartenance commune, des inspirations ou des objectifs
partagés, formant une entité suffisamment fermée pour ne
pas être perçue comme regroupant des tiers par rapport à
l'auteur des propos »172.
En conséquence, les tribunaux retiennent pour permettre
de faire la différence entre le caractère public ou privé
d'un site Internet que « la sélection doit être
fondée sur un choix positif des usagers, par laquelle sont
assurés leur nombre restreint et, partant, leur communauté
d'intérêts »173. Dans cette hypothèse,
les dispositions de la loi de 1881 ne sont pas applicables à Internet. A
l'inverse, « la diffusion litigieuse sur le réseau internet,
à destination d'un nombre illimité de personnes nullement
liées par une communauté d'intérêts, constitue un
acte de publicité commis dès que l'information a
été mise à la disposition des utilisateurs
éventuels du site»174. Dans cette seconde
hypothèse, les dispositions de la loi de 1881 s'appliqueront.
Sur Facebook, la qualification du caractère public du
message reposera donc sur la circonstance que non seulement un nombre
limité de personnes a accès au message litigieux, mais
également au fait que ces personnes ne sont pas des tiers les uns par
rapport aux autres. Deux hypothèses sont donc à distinguer:si la
personne à l'origine du message a publié celui-ci sur son profil
et que ce profil est accessible à tous (par défaut ou par choix),
la publication sera certainement considérée comme publique.
Par contre, si le profil n'est accessible qu'à ses
seuls amis, le juge devra déterminer si les personnes sont unies par une
communauté d'intérêt. La Cour d'appel de
Paris175 a jugé qu'une pétition diffamatoire
adressée par courrier électronique et envoyée à une
centaine d'universitaires chercheurs était une diffamation publique. Les
juges avaient estimé que la communauté scientifique ne se
confondait pas avec la communauté d'intérêts, la
qualité d'universitaires chercheurs étant insuffisante pour
caractériser la communauté d'intérêts. Les juges
ayant une conception restrictive de la communauté
d'intérêts, une diffamation ou une injure publiée sur
Facebook serait donc le plus souvent considérée comme publique si
les propos litigieux sont accessibles à un nombre conséquent
d'amis.
172 Y. Mayaud, Revue de Sciences Criminelles, 1998,
p.104.
173 TGI Paris, référé, 5 juillet 2002, D.
2003 sommaire p. 1536 observations L. Marino.
174 CA Paris, 23 juin 2000, Légipresse, novembre
2000, III, 182, note C. Rojinsky.
175 Cour d'appel de Paris 16 janvier 2003 CCE octobre 2003 p. 13,
A. Lepage.
Si l'acte de publication est retenu, il sera également
nécessaire que le message litigieux présente un contenu
particulier pour être qualifié de diffamation ou d'injure (B).
B Les éléments spécifiques
constitutifs de la diffamation et de l'injure
Les différents éléments constitutifs de
la diffamation et de l'injure seront étudiés au regard de la
commission de l'infraction sur un site de réseau social. Dans un premier
temps, l'élément matériel de la diffamation et de l'injure
sera abordé (1), puis son élément intentionnel (2).
1) L'élément matériel de la
diffamation et de l'injure
La diffamation et l'injure sont des infractions qui
sanctionnent l'atteinte à l'honorabilité de la personne. A partir
de l'article 29 de la loi de 1881, qui définit les deux infractions,
nous allons successivement analyser l'élément matériel de
chacune de ces deux infractions pour les appliquer ensuite envisager leur
application à Facebook.
La diffamation est définie à l'article 29
alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881 comme « toute
allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur
ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait
est imputé, est une diffamation ». Traditionnellement la
diffamation suppose l'existence de quatre conditions
cumulatives176.
En premier lieu, la diffamation requiert tout d'abord un
reproche, peu importe qu'il prenne la forme d'une allégation (qui
consiste à présenter un fait comme étant plus ou moins
douteux sans en prendre la responsabilité) ou d'une imputation (qui vise
à affirmer un fait en le prenant à son compte). La jurisprudence
interprète largement la notion de reproche et a précisé
que le reproche pouvait même prendre la forme interrogative177
ou la forme d'une photographie178.
En second lieu, ce fait doit être précis et
déterminé afin de pouvoir faire l'objet d'une preuve et d'un
débat contradictoire179. Cette exigence est essentielle car
elle permet de distinguer l'injure de la diffamation. La Chambre criminelle
de la Cour de cassation relève ainsi que
176 E. Dreyer Responsabilité civile et pénale
des médias, Litec, 2008.
177 Cass. Crim. 21 février 1967 : Bull. crim n°76.
178 CA Poitiers, 12 décembre 1991 : GP 10-11 avril 1992,
p.15.
179 Cass. Crim. 26 mars 1991: ibid.226.
« l'allégation d'une manie comme l'ivrognerie
relève de l'injure tandis que l'imputation d'un état
d'ébriété précis se présente comme une
diffamation»180.
En troisième lieu, l'imputation ou l'allégation
doit etre attentatoire à l'honneur ou à la considération
de la personne mise en cause. La considération consiste en l'image
sociale que la personne veut donner de soi aux autres tandis que l'honneur vise
le regard de la personne sur elle même. Ces deux notions protègent
le même intérêt, la dignité de la personne.
Cependant, la jurisprudence ne distingue pas en pratique l'honneur et la
considération, l'atteinte à l'honneur ou à la
considération est appréciée in abstracto, par
rapport au modèle type d'atteinte à l'honneur ou à la
considération, et non en fonction de la conception personnelle de la
personne attaquée.
Enfin, le reproche doit etre adressé à une
personne identifiée ou identifiable. En effet, l'article 29 de la loi de
1881 précise que la diffamation peut être réalisée
contre une personne « non expressément nommée mais dont
l'identification est rendue possible ». La jurisprudence
précise qu'il suffit que l'« identification soit rendue
possible, soit par l'analyse des propos publiés ou diffusés, soit
par des circonstances extrinsèques qui éclairent et confirment
cette désignation, de manière à la rendre évidente
»181.
L'autre infraction susceptible d'être commise sur
Facebook, l'injure, est définie à l'alinéa 2 de l'article
29 de la loi de 1881 comme « toute expression outrageante, termes de
mépris ou invective qui ne renferme l'imputation d'aucun fait
». L'injure suppose quant à elle l'existence de trois conditions
cumulatives182.
L'injure doit d'abord consister en une opinion
dévalorisante, qui peut prendre aussi bien la forme d'une expression
outrageante (portant atteinte à la personne dans son for
intérieur), que d'une invective (qui est une forme aggravée de
l'expression outrageante), ou encore d'un terme de mépris
(c'est-à-dire une dévalorisation publique de la personne). La
jurisprudence, quant à elle, utilise indistinctement chacun de ces trois
termes pour caractériser une injure.
180 Cass. Crim. 20 décembre 1923, DH
1924.68.
181 Cass. Civ. 2e, 3 février 2000, Bull. civ. II,
n°23, D. 2000 p. 76.
182 E. Dreyer Responsabilité civile et
pénale des médias, Litec, 2008.
L'injure a la spécificité de devoir reposer sur
l'imputation d'un fait précis, contrairement à la diffamation. En
conséquence, la personne à l'origine de l'injure ne pourra pas
rapporter la vérité d'un propos injurieux, contrairement au
propos diffamatoire. Pour autant, l'injure doit, tout comme la diffamation,
viser une personne déterminée ou déterminable.
La politique de confidentialité de Facebook,
prévoit que les messages « à caractère insultant,
pornographique ou inadéquat de manière générale
» publiés sur le site, qui peuvent s'apparenter en droit
français à la diffamation et à l'injure, appartiennent
à la catégorie des contenus répréhensibles. La
personne visée a la possibilité de signaler à Facebook
cette atteinte à la réputation en envoyant un courrier
électronique à l'
adresse
abuse@facebook.com. Le site s'engage à traiter la
réclamation dans les 24 heures suivant réception du message et
à informer, dans un délai de 72 heures à compter de la
réception du message, des mesures prises Ces mesures peuvent être
notamment la suppression du message litigieux ou une interdiction
d'accès à Facebook de la personne à l'origine du message
litigieux.
Toutefois, ce système de notification de contenu
litigieux ne semble pas opérationnel : plusieurs personnes se sont
plaintes sur leur blog de l'utilisation sans résultat de la
procédure de notification de contenu répréhensible
auprès de Facebook. Ainsi, par exemple, un groupe
injurieux183, bien qu'il ait été signalé
plusieurs fois à Facebook en 2008, reste encore accessible à
l'heure actuelle184.
Face à l'efficacité relative de la
régulation en interne par Facebook lui méme, certaines personne
ont déjà décidé d'assigner la personne à
l'origine du message litigieux devant les tribunaux. C'est ainsi qu'en
Angleterre la Haute Cour de Londres a condamné un internaute à
payer 2200 livres de dommages intéréts pour diffamation en raison
de la constitution d'un faux profil, fait au nom de l'un de ses amis, sur
Facebook. Les informations concernant son état civil étaient
exactes mais celles concernant sa vie sociale (ses opinions politiques, son
orientation sexuelle, et sa situation financière) étaient fausses
et diffamatoires.185 En France, un professeur d'anglais de
lycée est actuellement poursuivi pour diffamation et injure par ses
anciens collègues de travail en raison de propos consistant en des
« railleries blessantes », des
183 intitulé « pour ceux qui pensent que Marie
Trintignant avait un crâne bien trop fragile ».
184
http://jeanmarcelbouguereau.blogs.nouvelobs.com/archive/2009/02/13/censure-sur-facebook-puritain-maissexiste.html.
185Blog juridique
Acerberos.ch Fuax profil Facebook :
condamnation salée 26 juillet 2008.
http://monblog.ch/acerberos/?p=200807252314312
« attaques sexuelles », et des « remarques acerbes
» qu'il aurait publiés sur un groupe Facebook consacré aux
professeurs de ce lycée186.
Les infractions de diffamation et d'injure étant des
délits, il est à présent nécessaire d'en
caractériser l'élément intentionnel.
2) L'élément intentionnel de la diffamation
et de l'injure
L'article 121-3 alinéa 1 du code pénal dispose
« Il n'y a point de crime ou de délit sans intention de le
commettre ». Il faut donc que la diffamation et l'injure aient
été publiées intentionnellement. La victime doit ainsi
prouver que l'auteur des propos voulait porter atteinte à sa
réputation. De jurisprudence constante, l'intention coupable est
présumée pour ces deux infractions dès l'instant oü
l'acte matériel est réalisé187. Ainsi, la
personne à l'origine du message est présumée avoir
conscience de rendre publique un propos diffamatoire ou injurieux. L'intention
délictuelle de l'auteur de propos diffamatoire ou injurieux
publiés sur Facebook sera ainsi présumée. Toutefois,
l'auteur conserve la possibilité d'invoquer des circonstances de fait
justifiant le parti pris diffamatoire de ces propos ou la provocation au propos
injurieux.
A titre de défense, l'article 35 de la loi de 1881 a
prévu un fait justificatif propre à la diffamation : le
caractère délictueux de la diffamation disparaît dès
lors que le prévenu établit l'exactitude de ses propos, il s'agit
de l'exceptio veritatis. En raison des conditions étroites dans
lesquelles le fait justificatif est enfermé, la jurisprudence a par la
suite créé un deuxième fait justificatif, la bonne foi de
l'auteur des propos.
La personne à l'origine des propos a la
possibilité de prouver la vérité des faits
allégués. La vérité ne peut néanmoins
être démontrée dans trois domaines : lorsque les faits ont
un rapport avec la vie privée de la personne, ont plus de 10 ans, ou ont
fait l'objet d'un pardon188 (sauf pour les faits constitutifs de
l'infraction de pédophilie, datant de plus de 10 ans ou touchant
à des faits privés, dont la preuve est autorisée depuis la
loi du 17 juin 1998)189. En dehors de ces trois exceptions, la
preuve de la vérité doit être totale pour produire son
effet absolutoire : le
186
http://blog.charentelibre.com/journal/index.php?2009/04/03/2791-au-lycee-jean-monnet-de-cognac-facebookvire-au-jeu-de-massacre
187 Par exemple : Cass. Civ. 2e, 14 janvier 1998, Bull.
civ. II, n°11 ; D.1999 p. 134.
188 Article 35 alinéa 3 a/, b/ et c/ de la loi du 29
juillet 1881.
189 Article 35 alinéa 4 de la loi du 29 juillet 1881.
moindre doute privera le prévenu du
bénéfice du fait justificatif. Selon la chambre criminelle de la
Cour de cassation, la preuve doit être « parfaite, totale et
corrélative aux imputations dans toute leur portée et leur
signification diffamatoire »190.
Si le prévenu échoue dans sa tentative d'offrir
la preuve du fait diffamatoire, celui-ci peut néanmoins invoquer sa
bonne foi par l'existence de circonstances particulières. La bonne foi
suppose quatre critères cumulatifs : la légitimité du but
poursuivi par l'auteur du propos (l'information du public), l'absence
d'animosité personnelle, la fiabilité de l'enquête ainsi
que la prudence et la mesure dans l'expression191.
L'excuse de provocation est également
insérée dans des conditions restrictives : l'auteur de l'injure
doit être la victime méme de la provocation, le contenu injurieux
doit être en rapport direct avec le contenu de la provocation et la
provocation doit avoir été injustifiée.
En l'absence de jurisprudence spécifique visant les
sites de réseaux sociaux, il convient d'examiner les affaires relatives
aux forums de discussion et aux blogs pour déterminer si les tribunaux
apprécient différemment ces moyens justificatifs dès lors
que les infractions sont commises sur Internet. On constate dans plusieurs
décisions que les critères de la bonne foi en matière de
diffamation sur les blogs sont appréciés avec indulgence
notamment concernant la fiabilité des sources.
Dans un jugement du 17 mars 2006, le Tribunal de grande
instance de Paris retient qu'un journaliste qui s'exprime à titre
privé sur son blog et qui ne vérifie pas la
véracité des sources qu'il reproduit bénéficie
néanmoins de l'exception de bonne foi. Les juges feraient une
distinction entre journaliste et non journaliste (ou journaliste ne s'exprimant
pas en cette qualité), la personne non journaliste étant
dispensée de vérifier la fiabilité des informations
qu'elle publie192. Toutefois dans un arrêt du 6 avril 2006, la
Cour d'appel de Paris rétablit l'orthodoxie juridique et impose au
blogueur « un minimum d'enquête » pour qu'il puisse
bénéficier de l'exception de bonne foi 193. Ces
difficultés d'application des faits justificatifs aux blogs seraient
susceptibles de se poser aux diffamation et injures réalisées sur
les sites de réseaux sociaux.
190 Cass. Crim. 29 avril 1997; Legipresse 1998, n° 151, I,
p.50.
191 Cass. Civ. 2e 14 mar 2002; Bull. civ. 2002, II, n° 41 p.
34.
192 TGI Paris 17 mars 2003 ; CCE mars 2006 p. 39, A. Lepage.
193 Cour d'appel de Paris 16 janvier 2003 CCE octobre 2003 p. 13,
A. Lepage.
Après avoir envisagé la constatation de la
diffamation et de l'injure sur les sites de réseaux sociaux, nous
examinerons à présent la répression de ces infractions sur
les réseaux sociaux (II).
II La répression des infractions de presse sur les
réseaux sociaux
La procédure relative à la répression des
infractions de presse est une procédure dérogatoire au droit
commun, qui a pour but de protéger la liberté de la presse. Ces
dérogations se retrouvent tant au niveau de la détermination de
la personne responsable, (A) qu'au niveau de la prescription de ces infractions
(B).
A. La détermination de la personne responsable sur
les sites de réseaux sociaux
L'article 42 de la loi de 1881 prévoit un
système de responsabilité en cascade pour déterminer
l'auteur juridique de l'infraction. Aux termes de ce texte, sont
présumés responsables, en tant qu'auteurs principaux : les
directeurs de publications ou éditeurs, à leur défaut, les
auteurs, à défaut des auteurs, les imprimeurs, à
défaut des imprimeurs, les vendeurs, distributeurs et afficheurs. Ce
texte ne concerne que les publications de presse. Un système comparable
existe pour la communication au public par voie électronique à
l'article 93-3 de la loi du 29 juillet 1982. Si l'infraction est accomplie par
un moyen de communication au public par voie électronique, sera
poursuivi, en tant qu'auteur principal : le directeur de la publication ou, le
codirecteur, à défaut, l'auteur, à défaut de
l'auteur, le producteur. Cette responsabilité est plus limitée
car elle est subordonnée à la fixation préalable du
message sur le support. En effet, si le message litigieux ne fait pas l'objet
d'une fixation préalable, le directeur de la publication est dans
l'incapacité de vérifier matériellement le contenu du
message et n'a donc pas à assumer la responsabilité qui en
découle.
Sur Internet, la notion de fixation préalable est
liée à l'existence d'une modération a priori
(définition de la modération d'un site)194 car elle
permet au directeur de la publication de prendre connaissance d'un message
avant qu'il ne soit publié. Ainsi, une personne qui reçoit le
message d'un tiers et le diffuse sur Internet est considérée
comme auteur principal dès lors
194 Juris-Classeur, Communication, 2003, Volume 3,
Fascicule n°4750 « Forums de discussion »,
C.Rojinsky.
que la personne a conscience du caractère public de la
diffusion195. Si la responsabilité du directeur de la
publication est engagée à titre principal, l'auteur du message
verra sa responsabilité automatiquement engagée en tant que
complice196.
A défaut de fixation préalable du message, ou si le
responsable de la publication n'est pas identifiable, l'auteur de l'infraction
sera l'auteur du message litigieux.
Sur Facebook, l'auteur principal d'une injure ou d'une
diffamation serait donc la personne qui diffuse sciemment le message sur le
site, peu importe qu'elle soit ou non l'auteur de ce message.
La deuxième dérogation au droit commun concerne la
prescription de ces infractions (B).
B. La prescription des infractions de presse commise sur
les réseaux sociaux
Les poursuites en matière d'infraction de presse sont
enfermées dans un délai de prescription abrégé de
trois mois. L'article 65 alinéa 1 de la loi de 1881 dispose que
«L'action publique et l'action civile résultant des crimes,
délits et contraventions prévus par la
présente loi se prescriront après trois mois
révolus, à compter du jour où ils auront
étécommis ou du jour du dernier acte d'instruction ou
de poursuite s'il en a été fait ». Ce court
délai, défavorable aux victimes, a pour objectif de
protéger la liberté d'expression.
L'article 65 de la loi de 1881 ne précise pas le point
de départ de l'action publique. De manière constante, la
jurisprudence fixe le point de départ de la prescription à la
date du premier acte de publication par lequel le délit a
été commis197. Plusieurs juges du fond ont
essayé de modifier la rigueur de cette solution pour les infractions de
presse commises sur Internet. Ces juges estimaient que l'infraction de presse
commise sur ce support changeait de nature et devenait une infraction continue
en raison de la « volonté renouvelée de
l'émetteur qui place le message sur un site, choisit de l'y maintenir ou
de l'en retirer quand bon lui semble »198. Le point de
départ de la prescription était donc retardé au jour
où le message litigieux était retiré du site. La Cour de
cassation mit fin à cette jurisprudence contradictoire en rappelant la
nature instantanée de l'infraction et en fixant par conséquent le
point de départ du délai de prescription à la date du
premier acte de publication199. En effet, seul le premier
195 CA Paris 16 janvier 2003 CCE octobre 2003 p. 13, A. Lepage.
TGI Paris, 25 octobre 1999, Legipresse, sept 2001, I, p.99.
196Article 93-3 alinéa 3de la loi du 29 juillet
1982
197 Cass. Crim. 5 janvier 1974 ; Bull. Crim. n° 4.
198 CA Paris, 15 décembre 1999, Expertises
n°235, 2000, p. 77 et TGI Paris, 25 mai 2000,
Légipresse, n°178, janvier2001, III, p.10.
199 Cass. Crim. 30 janvier 2001 ; JCP 2001, II, 10515, note A.
Lepage.
acte de publication doit être pris en
considération car il matérialise l'accord donné par le
responsable éditorial à la publication, peu importe que le propos
reste par la suite accessible au public200.
Le législateur tenta de briser la jurisprudence de la
Cour de cassation en prévoyant une disposition dans la LCEN selon
laquelle la prescription des contenus mis en ligne pour la première fois
sur Internet commencerait à courir après le retrait de l'article
ou du message incriminé. Cette disposition fut censurée par le
Conseil constitutionnel201 car la différence de régime
aboutissait à un décalage considérable par rapport aux
autres supports. L'article 65 de la loi de 1881 s'applique donc de la
méme manière aux sites Internet.
Des victimes ont voulu éluder la courte prescription de
l'article 65 de la loi de 1881 en invoquant l'application de l'article 1382 du
code civil et du délai de prescription en découlant. Ces
tentatives se sont soldées par des échecs : «Les abus de
la liberté d'expression prévus et réprimés par la
loi du 29 juillet 1881 ne peuvent être réparés sur le
fondement de l'article 1382 du code civil»202. Ce principe
a été rappelé à l'occasion de l'application de la
courte prescription de l'article 65 de la loi de 1881203.
L'application de l'article 1382 à la diffamation et à l'injure
est susceptible de réapparaître car parmi les soixante cinq
propositions formulées par la Commission Guinchard au sujet de la
«répartition des contentieux », est suggérée la
dépénalisation de la diffamation et de l'injure qui ne
constitueraient plus que des fautes civile. Toutefois en raison des nombreuses
critiques que suscite cette proposition204, celle-ci ne serait plus
à l'ordre du jour.
A l'heure actuelle, pour des faits relevant d'une diffamation
ou d'une injure, seule la courte prescription de trois mois sera
appliquée. En conséquence, la diffamation ou l'injure
perpétuée sur les réseaux sociaux se prescrivent dans un
délai de trois mois à compter de la mise en ligne du message
litigieux.
Malgré la singularité d'Internet, on constate
qu'une grande partie du régime des infractions de presse s'applique
à ce média. S'il est nécessaire d'adapter certaines
notions au particularisme
200 E. Dreyer Responsabilité civile et pénale
des médias, Litec, 2008.
201 Conseil Constitutionnel décision DC n°2004-496
202 Cass. Ass. Plén. 12 juillet 2000, Bull. Civ. Ass.
Plén. n°8, p.13 ; Légipresse 2003, n°202,
II, p.71, obs. S. Martin-Vallette.
203 C. Cass., 9 octobre 2003, Dalloz 2004, n°9,
p.590, note E. Dreyer.
204 JCP, 566, n° 39 du 24 septembre 2008 P. Malaurie «
Ne dépénalisons pas la diffamation et l'injure ».
de ce support, le caractère généraliste
de la loi de 1881 permet son application à tout mode de diffusion
publique des informations. Une diffamation ou une injure constatée sur
un site de réseau social sera appréhendée de façon
similaire à un support plus traditionnel.
CONCLUSION DU CHAPITRE 2
En dépit du sentiment de liberté régnant
sur les sites de réseaux sociaux, les membres de ces sites ne peuvent se
permettre d'y publier tout ce qu'ils souhaitent. A la liberté de
publication sur ces sites fait écho une responsabilité pour leurs
actions. Les atteintes aux droits de la personnalité, la diffamation et
l'injure commises dans ce contexte sont régies par les concepts
traditionnels du droit. Même si des particularités ponctuelles
existent - et sont nécessaires pour permettre la pertinence des concepts
généraux- telles que l'ajustement de la loi de 1881 ou encore le
recours à la loi Informatique et Libertés pour réprimer
les atteintes aux droits de la personnalité, le support Internet ne
bouleverse pas l'édifice juridique. Toutefois on constate que certains
comportements imprudents restent en dehors du droit.
CONCLUSION DU MEMOIRE
La vie privée sur les réseaux sociaux tels que
Facebook n'est donc pas exempte de toute protection juridique puisque les
dispositions de la loi Informatique et Libertés, du droit de la
personnalité et de la loi de 1881 sur la liberté de la presse lui
sont applicables.
L'engouement pour les sites de réseaux sociaux et la
diffusion devenue courante des données les plus intimes mettent
toutefois en exergue deux problèmes essentiels.
D'une part, la révélation excessive
d'informations très intimes sur Facebook fait courir le risque aux
internautes d'être gênés tout au long de leur vie par la
republication ultérieure de ces éléments. Un travail de
sensibilisation doit être opéré par le réseau social
et au niveau national pour que les membres de ces sites apprennent à
dévoiler les informations les concernant, en connaissance de cause et
avec vigilance. Le site Facebook devrait prendre exemple sur la politique de
confidentialité du site Google, qui tente d'expliquer de manière
simple et claire comment et pour quelles finalités les données
qu'il collecte. La CNIL devrait également donner des exemples concrets
d'utilisation sécurisée des sites de réseaux sociaux.
D'autre part, la dimension universelle inhérente
à Internet montre la faiblesse du droit positif national pour
protéger les données à caractère personnel. A ce
titre, il serait nécessaire de promouvoir l'adoption d'une convention
internationale réglant les principes essentiels tels que la loi
applicable, la conservation des données, le consentement de la
personne.
Enfin une protection effective de la vie privée
nécessite une action combinée des gouvernements et des acteurs
privés car la régulation étatique doit s'enrichir des
pratiques d'autorégulation. Toutes ces solutions peuvent être
résumées par le principe proposé par M.
Thoumyre205 de la « covigilance »
c'est-à-dire qu'il conviendrait de « ne pas attendre que des
lois régulent des phénomènes apparaissant mais que tous
les individus sur Internet s'organisent afin de prévenir l'apparition
des dangers numériques. Il faut donc éduquer les enfants aux
menaces, sensibiliser les citoyens et élaborer des outils d'alerte et de
protection performants ».
205 L. Thoumyre revue Lamy droit de l'immatériel novembre
2008 n°43, propos introductifs de perspectives colloque « Enjeux des
nouveaux réseaux internet »
Bibliographie
Etudes
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les réseaux numériques ", étude adoptée
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l'alchimie des multitudes " éditeur village mondial, 2008.
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l'épreuve de l'Internet, litec, 3e édition. E.
Delcroix et d'A. Martin « Facebook, on s'y retrouve "
Pearson
C. Féral-Schuhl « Cyberdroit, le droit à
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Itéanu L'identité numérique, Eyrolles
E. Dreyer Responsabilité civile et pénale des
médias, Litec, 2008.
J. Bouteiller, C. Germouty, K. Papillaud « Bienvenue sur
Facebook !: Le mode d'emploi " Albin Michel, avril 2008
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Articles de presse
D. Boyd « Production d'identité dans une culture
en réseau " traduction dans Métamorphoses 21 « Culture
numérique, Cultures expressives "
D. Cardon Le Design de la visibilité. Un essai de
cartographie du web 2.0 dans la revue « Réseaux :
Communication,-Technologie,-Société " Volume 26 n°
152/2008.
Le Monde du 16 mai 2008 « La CNIL veut inscrire dans la
constitution la protection des données personnelles "
C. Ducourtieux, Le Monde « Le problème, c'est que
ce sont des sociétés américaines " Question à
Sophie Tavernier (CNIL) du 11 novembre 2007.
Le Monde du 18 janvier 2009 « Un internaute
piégé par ses traces sur la Toile " de Yan Gauchard
Yves Poullet, « Les Safe Harbor Principles-Une protection
adéquate ?",
Juriscom.net, 17 juin 2000, texte
présenté lors du colloque de l'IFLCA à Paris les 15 et 16
juin 2000.
Regard économiques, publication de l'UCL de mai 2008
n°59 « No free lunch sur le web 2.0 ! Ce que cache la gratuité
apparente des réseaux sociaux numériques " de Xavier Wauthy.
Avis du G 29
-avis WP 56 sur l'application internationale du droit de l'UE
en matière de protection des données au traitement des
données à caractère personnel sur Internet par des sites
web établis en dehors de l'UE du 30 mai 2002.
Avis n°4/2007, 20 juin 2007, WP 136. p18
Délibérations, guides, rapports de la CNIL
Délibération n°2005-284 du 22 novembre 2005
décidant la dispense de déclaration des sites web diffusant ou
collectant des données à caractère personnel mis en oeuvre
par des particuliers dans le cadre d'une activité exclusivement
personnelle.
Délibération n°2005-285 du 22 novembre 2005
portant recommandation sur la mise en oeuvre par des particuliers de sites web
diffusant ou collectant des données à caractère personnel
dans le cadre d'une activité exclusivement personnelle
Guide relatif aux transferts de données à
caractère personnel vers des pays non membres de l'Union
Européenne juin 2008 p16
Rapport du 9 février 2009 « La publicité
ciblée en ligne » du 9 février 2009 L'utilisation de l'image
des personnes, 28 mars 2005
Décision de la CPCV
Décision de la CPVP du 9 décembre 2008 relative au
contrôle et à la procédure de recommandation initiés
à l'égard de la société Swift scrl, paragraphes 50
et suivants.
Revues juridiques
* Recueil Dalloz
A. Lepage, L. Marino, C. Bigot « Droits de la
personnalité : panorama 2004-2005 » D. 2005 p. 2643
A. Lepage, L. Marino, C. Bigot. « Droits de la
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A. Lepage, L. Marino, C. Bigot « Droits de la
personnalité (juillet 2006/ juillet 2007) » D. 2007 P.2771
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: rediffusion et droit à l'oubli », D. 2007 p. 2829
*Communication Commerce Electronique
E. Caprioli « Impunité de Google en
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*Contrats Concurrence Consommation
W. J. Maxwell, T. Zeggane et S. Jacquier « Publicité
ciblée et protection du consommateur en France, en Europe et aux
Etats-Unis ", CC C n° 6 de juin 2008, étude 8.
* Semaine juridique édition
générale
P. Malaurie « Ne dépénalisons pas la
diffamation et l'injure ", JCP n° 39 du 24 septembre 2008,
actualités, 566.
* Gazette du palais
F. Gilbert « Le FTC américain propose des
principes pour encadrer la publicité comportementale sur Internet "
GP, 24 avril 2008 n°115, p. 17
L. Marino « Les nouveaux territoires des droits de la
personnalité ", GP 19 mai 2007 n°139 *Actualité
juridique Pénal
Dossier Cybercriminalité : morceaux choisis AJ
Pénal n° 3/2009 de mars 2009p. 120. * Revue de sciences
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Y. Mayaud, Revue de Sciences Criminelles, 1998,
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*Revue Lamy droit de l'immatériel
-brève« Facebook modifie ses conditions
d'utilisation » RLDI n° 47 mars 2009
-M Vivant « Les transferts internationaux de
données dans la loi de 2004 ", RLDI 2005/9 p.64-68.
-L. Thoumyre « propos introductifs de perspectives
colloque « Enjeux des nouveaux réseaux internet " RLDI
novembre 2008 n°43
*Expertises
R. Montbeyre « Affaire « Bénédicte S.
», Variation sur la détermination de la loi applicable à
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*Les petites affiches
A. Huet, « Le droit pénal international et
internet ", LPA, 10 novembre 1999 n° 224, P. 39.
Jurisclasseur
Juris-Classeur, Communication, 2003, Fascicule
n°4750, « Forums de discussion ", C. Rojinsky
Jurisclasseur administratif, fascicule 274 : «
Informatique. Traitement de données à caractère
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Jurisclasseur communication fascicule 4735 «
Protection des données à caractère personnel - Vie
privée et communication électronique » de M-P.
Fenoll-Trousseau et G. Haas de 2005 p37
Juris classeur communication fascicule 3750 « image des
personnes », E. Dreyer, 4 novembre 2008 p.13
Jurisclasseur communication fascicule 3000 « conflit de
lois et compétence internationale des juridictions
françaises », paragraphe 73.
Jurisclasseur communication fascicule 3000 « conflit de lois
et compétence internationale des juridictions françaises »,
paragraphe 73
Jurisprudence
CJCE 25 juillet 1991, affaire 21/89 Factortame.
CEDH 29 avril 2002 Pretty contre Royaume-Uni
CCE n°10, Octobre 2008, commentaire 119 d'Eric Caprioli
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2000
Conseil Constitutionnel décision n°2004-496 DC
Conseil constitutionnel décision n° 76-75 DC du 12
janvier 1977 Conseil constitutionnel décision n° 99-416 DC du 23
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Plén. n°8, p.13 ; Légipresse 2003, n°202,
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Cass. Crim. 26 mars 1991 :
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Cass. Civ. 2e 3 juin 2004,
Cass. Civ. 1e 7 mars 2006
Cass. Civ. 2e 4 novembre 2004 ; Cass. Civ
1e 7 mars 2006 ;
Cass. Civ. 1e 10 mai 2005; D. 2005, IR, 1380
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Lepage, L. Marino, C. Bigot Cass. Civ 1e 19 février 2004 ; D.
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Cass. Civ 2e 29 avril 2004.
Cass. Civ. 2e 25 novembre 2004 ; D. 2005 p. 2643, A.
Lepage, L. Marino, C. Bigot. Cass. Civ 2e 3 juin 2004; D. 2005 p. 2643, A.
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Cass. Civ. 1re, 20 nov. 1990, JCP 1992. II. 21908, obs. Ravanas
:
Cass. Civ. 1e 20 février 2001 ; D. 2001 page
1119, note Gridel
Cour d'appel de Paris 27 avril 2007 Anthony G. contre SCPP Cour
d'appel de Paris 15 mai 2007 Henri S. contre SCPP
CA Paris Paris 6 mai 2009 Dailymotion contre Nord Quest
Production et autres CA Besançon 31 janvier 2007 ; D. 2007 P.2771, A.
Lepage, L. Marino, C. Bigot. Cour d'appel de Paris 16 janvier 2003 CCE octobre
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2000, III, 182, note C. Rojinsky. Cour d'appel de Paris 16 janvier 2003 CCE
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commentaire 176 de A. Lepage. CAParis 24 avril 2007, CCE n°12,
décembre 2007, commentaire 156 de A. Lepage. CA Paris 10 février
1999 ; CCE 2000 commentaire n° 34, observations R. Desgorces. CA
Versailles 8 juin 2000 ; CCE 2000 commentaire n° 81, observations J-C
Galloux
TGI Privas 3 septembre 1997 ; LPA 11 novembre 1998 p. 19, note
J. Frayssinet, confirmé par CA Nîmes 6 novembre 1998revue droit de
l'informatique et des télécoms 1999/4 p51, note M-Existence
Bichon-Lefeuvre
TGI Paris 10 avril 2009 Zadig productions contre Dailymotion;
TGI Paris 14 novembre 2008 Jean Yves Lafesse contre Youtube,
TGI Mulhouse 17 mars 2008Société anonyme
d'Économie Mixte Solea contre Youtube,
TGI Paris Qrdonnance de référé 09
février 2009 Kimberley P. / Myspace et autres 09/02/2009 TGI Paris 13
novembre 1998 UNADIF contre Faurisson cité dans le Jurisclasseur
communication fascicule 3000 « conflit de lois et compétence
internationale des juridictions françaises », paragraphe 73.
TGI Paris 20 janvier 1982 ; D. 1985 I.R., p. 163, observations
Lindon R
TGI Paris, référé, 5 juillet 2002, Dalloz
2003 sommaire p. 1536 observations L. Marino. TGI Paris 17 mars 2003 ; CCE mars
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Qrdonnance de référé du Tribunal de grande
instance de Paris du 14 avril 2008 Bénédicte S. c/ Google
TGI Paris référé 2 avril 2008, RLDI 2008/37
n° 1145, observations L. Costes
Sommaire...................................................................................................1
Liste des
abréviations.............................
.....................................................4 LexiqueFacebook...................
......................................................
............5 Introduction................................................................................................7
CHAPITRE 1 : La protection des utilisateurs contre
l'exploitant du site de réseau social 13
Section préliminaire : L'entreprise qui exploite
un site de réseau social est-elle un
responsable de traitement de données à
caractère personnel ? 14
I Les informations sur les utilisateurs de réseaux sociaux
sont des données à caractère
|
personnel.......................................................
.............................................
|
15
|
A Les données à caractère personnel
.............................. 15
|
|
B Les données
sensibles..................................
........................................................
|
16
|
C L'incertitude sur la qualification de donnée personnelle
de l'adresse IP...................... ......
|
.17
|
II. Le traitement de données à caractère
personnel............... ............................................
18
|
|
III. Le responsable du traitement du site
Facebook............................... ............................
|
19
|
|
Section 1 : L'application incertaine de la loi
Informatique et Libertés à Facebook
|
21
|
I L'application du critère de territorialité de la
loi Informatique et Libertés...................... ......
|
21
|
A Le lieu d'établissement du responsable du
traitement.......................................................
22
|
|
B Le recours à des moyens de traitement situés sur
le territoire français.................................
24
|
|
|
77
|
II. La loi Informatique et Libertés doit-elle
s'appliquer à tout prix ?~~~~~~~~.~~~~~25
A Les solutions à l'application de la loi Informatique et
Libertés ...........................................26
1) La désignation de la loi française comme
règle de conflit.................. ............... 26
2) La reconnaissance de la loi Informatique et Libertés
comme loi de police... ............. .27
B. Le droit applicable aux données à
caractère personnel des membres français de Facebook
en l'absence d'application de la loi Informatique et Libertés
................................................. 29
Section 2 : Les atteintes causées par Facebook,
violant ses obligations de responsable du traitement ...32
I. L'exploitation des données : le système de
ciblage publicitaire............................... ..........32
A. La publicité ciblée sur Facebook
............ ..........................................................
....33
1) Social Ads..................
......................................................................
...33
2)
Beacon..................................................................................
...............34
B. L'application de la loi Informatique et Libertés
à la publicité ciblée sur
Facebook...................35
C. Les solutions pour encadrer la publicité ciblée
sur Facebook............................ ......... ....35
II. La conservation des données : le droit à
l'oubli 37
A. Les textes relatifs au droit à l'oubli
.........................................................................38
B. L'absence de droit à l'oubli sur
Facebook............................................................
......39
C. Les solutions permettant l'exercice du droit à
l'oubli.............................................. ......40
CHAPITRE 2 La protection des utilisateurs contre les
autres membres du site de réseau social . .43
Section I. Les atteintes à la vie privée et
à l'image sur les réseaux sociaux . 43
I Les atteintes traditionnelles à la vie privée
et à l'image sur les réseaux sociaux................ 44
A L'application des règles ordinaires de protection de la
vie privée et de l'image ......... ...... .....44
1) La protection civile de la vie privée et de l'image
sur Facebook ............ ...... ..44
a/ Le droit au respect de la vie
privée.........................................................................
44
b/ Le droit à
l'image.................................................................................................48
2) La protection pénale de la vie privée et de
l'image sur Facebook............... ...............51 B. L'application
de règles spécifiques de protection de la vie privée et de
l'image ... ... ............52 II. Les atteintes inédites à la
vie privée et à l'image sur les réseaux sociaux
...................... .......54
A. La politique de confidentialité de Facebook
.................................................................55
B. La libre volonté de la personne de dévoiler sa
vie privée...................... ............. ............56
Section II Les abus de liberté d'expression sur
les réseaux sociaux 58
I. La constitution des infractions de presse sur les
réseaux sociaux............ ... 59
A. L'élément fondamental aux infractions de presse
: la publicité .........................................59
B. Les éléments spécifiques constitutifs de
la diffamation et de l'injure....................................61
1) L'élément matériel de la diffamation et
de l'injure.......................................... ..61
2) L'élément intentionnel de la diffamation et de
l'injure ......... ................ .............64
II. La répression des infractions de presse sur les
réseaux sociaux..........................................
|
66
|
A. La détermination de la personne responsable sur les
réseaux sociaux...................................
|
66
|
B. La prescription des infractions de presse commises sur les
réseaux sociaux ...........................
|
67
|
Conclusion
|
70
|
Bibliographie
|
..71
|
Table des matières
|
.77
|
|