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La "class action"

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par Didier Ndoubayo
Université de Nancy II - Master de Droit privé général 0000
  

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Paragraphe 2 - Le mode de paiement des indemnités.

Le mode de paiement des indemnités est une question qui se pose pas de façon moins problématique en droit français. En effet, la question de la réparation a été bien organisée par le Code civil69(*). Faudra-t-il fixer un délai à l'expiration duquel les victimes ne pourront plus se faire connaître? Faut-il accepter l'idée d'un fonds pérenne, dans l'attente que des victimes inconnues aujourd'hui se manifestent même tardivement? A Québec, cette question de l'attente de la distribution des fonds est cruciale et bien organisée. En effet l'article 1031 du Code de procédure civile dispose que « le tribunal ordonne le recouvrement si la preuve permet d'établir d'une façon suffisamment exacte le montant total des réclamations des membres ; il détermine alors le montant dû par le débiteur même si l'identité de chacun des membres ou le montant exact de leur réclamation n'est pas établi ». Par la suite, le juge choisit entre une distribution individuelle ou une distribution collective du montant global perçu.

S'il opte pour une distribution collective, la somme due doit être déposée aux greffes ou dans un établissement financier exerçant son activité au Québec. Dans ce cas, les membres bénéficient des intérêts sur les montants déposés.  Le tribunal peut, s'il est d'avis que la liquidation des réclamations individuelles ou la distribution d'un montant à chacun des membres est impraticable ou trop onéreuse, refuser d'y procéder et pourvoir à la distribution du reliquat des montants recouvrés collectivement après collocation des frais de justice et des honoraires du procureur du représentant70(*).

Le tribunal dispose du reliquat comme il le souhaite, en tenant compte notamment de l'intérêt des membres, après avoir donné aux parties et à toute autre personne qu'il désigne l'occasion de se faire entendre71(*). La procédure québécoise donne la possibilité à chaque membre dans l'année qui suit l'acquisition de l'autorité de la chose jugée par le jugement introduire une réclamation individuelle au greffes du tribunal qui a rendu la décision collective72(*).

Selon S. GUINCHARD, sur ce dernier point comme sur bien d'autres déjà rencontrés, le système américain de la « Class action » est inadapté « aux besoins et aux contraintes françaises »73(*). En effet, il est inenvisageable d'admettre une réclamation d'une des parties lorsqu'un jugement a acquis l'autorité de la chose jugée. La seule possibilité dont elle dispose de discuter du fond du litige est de faire appel. Une telle différence avec le droit français serait sans doute dû à une différence culturelle comme l'a relevé M. BANDRAC74(*) : « une telle procédure, et le rôle qu'elle suppose donner au juge, constitue, à la disposition des groupes de pression, l'instrument d'une action politique plutôt que juridictionnelle ». Les juges disposent ainsi du pouvoir de revenir à tout moment dans un délai d'un an sur réclamation d'un membre du groupe sur leur décision. Une entreprise condamnée en « Class action » pourrait ainsi voir sa condamnation aggravée sur la base d'une réclamation formulée par des groupes de pressions75(*).

De ce fait, la « Class action » n'est pas une action adaptée à notre droit privé. Seul le recours pour excès de pouvoir s'apparente à la « Class action » dans la mesure où le juge administratif reconnaît qualité à tous les membres d'une catégorie abstraite pour contester la légalité d'un acte portant atteinte à l'intérêt catégoriel et obtenir ainsi un jugement quasi réglementaire puisqu'il annule un règlement. Il est donc nécessaire d'envisager un modèle français de défense d'intérêts collectifs qui respecte nos principes fondamentaux de procédure, sans perdre en efficacité. C'est dans cette perspective qu'il faudrait envisager les voies françaises d'une défense d'intérêts collectifs.

Deuxième partie

LES VOIES FRANCAISES D'UNE DEFENSE D'INTERETS COLLECTIFS.

L'hypothèse considérée est celle dans laquelle un plaideur exerce une action, non dans son intérêt propre, mais dans l'intérêt de la catégorie sociale qu'il prétend représenter. Cet intérêt peut être dit « collectif » et ne saurait être réduit ni à l'intérêt personnel ni à l'intérêt général. En principe de telles actions sont irrecevables à défaut d'un intérêt personnel de la personne qui agit. Toutefois, dans la mesure où le groupement de personnes peut être considéré comme représentatif d'une collectivité précisément identifiable et où l'intérêt de cette collectivité ne se confond pas avec l'intérêt général, le groupement considéré peut agir pour la défense d'intérêt collectif.

A cet effet, des moyens de défense d'intérêt collectif existent d'ores et déjà en droit français car le double objectif d'ouvrir largement l'accès à la justice tout en améliorant la qualité et l'économie globale du processus judiciaire est commun à la France et aux Etats-Unis : il s'agit de l'action collective et de l'action en représentation conjointe. Contrairement à la situation américaine ou plus généralement des pays anglophones, c'est leur inefficacité qu'il s'agit de pallier par l'introduction des « Class actions ».

En dépit de la consécration de ces deux actions, les victimes de dommages collectifs n'en sont pas pour autant bien protégés. D'ou la nécessité d'une véritable « Class action » à la française. Cette nouvelle action aura le mérite de mettre à la disposition des justiciables une procédure leur permettant de se défendre aussi efficacement que la « Class action » de type américain tout en conservant les spécificités de notre culture juridique. Car, « le phantasme c'est celui de l'américanisation du droit, souvent présenté comme une « hamburgerisation » du système juridique peu conforme à la « sophistication » française. L'inhibition résulte de cette idée que la « Class action » est impossible, en raison d'un mythe profondément enraciné : celui de l'exception française »76(*). Ceci étant, des moyens de défenses des intérêts collectifs ont été mis en place mais ils se sont avérés inefficaces (Titre 1). C'est pourquoi il faudrait envisager la possibilité d'une véritable « Class action » à la française (Titre 2).

* 69 Art 1146 et s. sur la réparation suite à une déclaration de responsabilité contractuelle et la réparation suite à une déclaration de responsabilité délictuelle.

* 70 Art. 1034 du Code civil québécois.

* 71 Art. 1036 du Code civil québécois.

* 72 « Lorsque le jugement final acquiert l'autorité de la chose jugée, un membre peut, dans l'année qui suit la publication de l'avis prévu par l'article 1030, produire sa réclamation au greffe du district dans lequel le recours collectif a été entendu ou de tout autre district selon que le détermine le tribunal ». Art. 1038 du Code civil québécois

* 73 S. GUINCHARD, Uns class action à la française?. Rec. Dal. 2005, n° 32.

* 74 M. BANDRAC, Droit processuel. Précis Dalloz.

* 75 Ce sont bien souvent des groupes de pression qui comme les cabinets d'avocats mobilisent la classe en vue d'une « Class action ».

* 76 D. HOUTCIEFF, Les « Class action  » devant les juges français : rêve ou cauchemar? Petites affiches-10 juin 2005. p. 42.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand