Chapitre II : Les sols en zone à déficit
hydrique
Introduction :
Dans les régions arides, les sols, d'une manière
générale, posent d'énormes problèmes de mise en
valeur. Ils présentent souvent des croûtes calcaires ou gypseuses
et sont la plupart du temps salés et sujets à l'érosion et
à une salinisation secondaire (AUBERT, 1960).
Les sols seront classés en fonction du niveau des sels,
selon Halitim (1988) on distingue les types de sols suivants :
· Les sols accumulation de sels (au sens très large
du terme sels)
· Les sols calcaires.
· Les sols gypseux.
· Les sols calcaires et gypseux.
· Les sols salés.
1- Les sols salés :
Introduction
Les sols salés ou sols halomorphes appelés
actuellement sols salsodiques représentent un pourcentage important de
la surface totale des sols dans le monde (Cherbuy, 1991). Ils se
différencient naturellement sous les climats plus ou moins aride, mais
aussi tempérés, maritimes ou continentaux, là ou
l'évaporation excède, les précipitations pluviales de
façon permanente ou temporaire (Bouteyre et loyer , 1992). Par ailleurs
le développement mondial de la culture irriguée entraine et
toujours une extension secondaire des terres salées liée à
la dégradation chimique et physique des sols et à une mauvaise
conduite de l'irrigation (Shainberg I, et Shalhevet J, 1984 ; Sumner, 1993 ;
Gassemi et al, 1995 ; Cheverry et Bourrie ; 1998) cités par Claud et al
(2005).
1-1-Définition et Dénomination des sols
salés :
1-1-1-les sols salés
: sont ceux dont l'évolution est dominée par la présence
de forte quantités de sels solubles - plus solubles que le gypse- ou par
la richesse de leur complexe absorbant en ions provenant de ces sels et
susceptibles de dégrader leurs caractéristiques et
propriétés physiques, en particulier leur structure, qu'ils
rendent diffuse. Ces deux caractères de ces sols modifient
également et diminuent le développement de leur
végétation et des cultures que l'on peut y faire.
Certains des sols « salés » n'ont que l'un de
ces caractères, d'autres présentent les deux à la fois
(Aubert, 1983).
On parlera en général de sol salé
lorsque la concentration en sels des solutions dépasse 0.5 g/ l cette
concentration est le plus souvent mesurée par la conductivité
électrique (CE) de la solution du sol saturée exprimée en
mmhos/cm ou actuellement en décisiem en s/m (Robert, 1996).
Selon Calvet (2003) un sol est dit salé quand la
conductivité électrique, est supérieure à 4 dS/m.
Cependant la salinité d'un sol s'apprécie plus par le
10
comportement des plantes de sorte que cette limite peut
être très différente selon la sensibilité des
espèces végétales.
1-1-2- Les sels : les sels solubles sont
tous les sels plus solubles à l'eau que le gypse. Leur concentration
globale est généralement exprimée par la
conductivité électrique qui représente en
réalité la conductivité eletrolytique (Halitim ,1988).
Les plus fréquents dans les régions arides et
semi- arides sont surtout les chlorures et les sulfates de sodium, les sulfates
de magnésium et à un moindre degré les carbonates de
sodium (Servant, 1978 ; Halitim, 1988).
1-1-3- le Sodium : en
excès dans le complexe absorbant du sol, peut dégrader la
structure. Ces sols à structure diffuse sont souvent
dénommés sols à alcali ou sodique (Aubert, 1983). Il
apparaît que dans certains cas (richesse en humus, type d'argile) le
magnésium peut aussi provoquer l'apparition de cette structure diffuse (
Samoiloya, 1979).
1-2-Origine de la salinité des sols :
1-2-1- Facteurs intervenant dans le processus de
salinisation :
Selon Wyn- jones et gunston (1991), la salinisation des sols
peut être due a :
· Lixiviation des sels solubles et / ou à
l'évaporation qui déposent leurs sels dans les sols.
· En régime, non saturé, la remonté
capillaire entraîne un transport des sels par flux de masse vers la
surface du sol ou ils s'accumulent après évaporation de l'eau (
Raju et al, 1993). Dans les mêmes conditions You et al (1999) cité
in Djili et Daoud (1999) ont étudie expérimentalement la
remonté capillaire et l'accumulation des sels en surface. Ils
suggèrent que cette accumulation dépend de la profondeur de la
nappe et la texture du sol.
D'après Cherbuy (1991), la salinisation d'un milieu
implique la présence d'une source de sels qui peut être naturelle,
dénommée primaire, et une salinisation anthropique,
généralement liée à l'irrigation, que l'on
appellera secondaire.
1-2-2- Salinisation primaire :
1-2-2-1- Salinisation géologique :
Les sels solubles peuvent provenir :
· Soit de l'altération des roches contenant des
minéraux sodiques potassiques et magnésiques. En région
arides et semi-arides, ces sols se concentrent sur place ; dans les
dépressions fermées.
· Soit de dissolution des évaporites contenant
des chlorures, des sulfates, etc., les évaporites se localisent
essentiellement dans les bassins élémentaire (Trias, terraines et
quaternaire).
· Soit de l'altération des roches volcanique
(Servant, 1975)
1-2-2-2 -Salinisation marine et lagunaire :
L'origine des sels peut se trouver dans les
dépôts lagunaires ou matériaux salés plus ou moins
récents qui peuvent être eux-mêmes des roches mères
des sols et fournir leurs sels aux oueds qui les transportent jusqu'aux nappes
superficielles plus ou moins profondes sous les sols des vallées et
basses plaines ou les déposent à leur surface (Gaucher et Burdin
; 1974).
La salinisation d'origine géologique, marine ou
lagunaire correspond à une salinisation liée au fonctionnement
naturel des terrains, sous l'influence du climat, de l'altération des
roches, de dynamique des eaux.
D'après Szablocs (1986) et la FAO cité in Robert
(1996), la superficie totale concernée par cette salinisation naturelle
est proche de mille millions d'hectares (995 ha) soit prés de 5 % de la
surface du globe.
1-2-3 - Salinisation secondaire :
Dans les zones à climat aride et semi- aride, la pratique
de l'irrigation représente l'une des plus importantes causes de la
salinisation secondaire.
Actuellement il y a environ 350 millions d'hectares
irrigués dans le monde (Szablocs, 1994). Ces chiffres sont susceptibles
d'être augmentés à l'avenir.
12
En effet, Hamdy et al (1995) ont constaté que les
terres irriguées affectées par la salinité correspondent
à 27% de la surface irriguées dans le monde. Plus de la
moitié des terres irriguées du monde sont salées, sodiques
ou sujettes à l'engorgement. Cette menace selon Chevery (1995)
occasionne, chaque année des pertes de terres variables selon les
auteurs de 10- 12 millions d'hectares.
En Algérie, prés de 10-15 % de terres
irriguées, sont concernées par ces problèmes. Bien que le
problème d'alcalinisation, selon Daoud et Halitim (1994) ne se pose
plus, on estime que les terres salinisées seront difficilement
récupérables.
1-3-principales caractéristiques des sols
salsodiques :
1-3-1- Salinité globale : Pour
caractériser la salinité des sols, on met habituellement l'accent
sur la détermination de la composition ionique de la solution d'un
extrait aqueux de sol ( Halitim, 1988) . Obtenir à partir d'un
échantillon de terre, soit une pâte saturée en eau
distillée (méthode de Richards (1954), soit une solution
d'extraction aqueuses en prenant soin de veiller à ce que le rapport
sol/eau soit constant (1/ 5 ou 1/ 10) exprimée en mm hos/ m à
25°C.
Le tableau (2) donne quelques classifications de
salinité.
Tableau2: classe de la salinité en fonction de la
conductivité électrique de l'extrait aqueux à 25 °c
cité in Mathieu et al (2003).
1-3-2-pH : le pH est indicateur de la
réaction du sol, les sols salés présentent des pH basiques
( > 7) car les hydroxydes sont plus prépondérants que les
hydrogènes.
Certains auteurs ont établi que l'accroissement
du pH reflète la saturation du Na+ sur le complexe
d'échange et l'état de la saturation du sol (Aubert, 1983 ;
Bridges, 1978 ; Duchauffour, 1969)
- Un pH compris entre 8 et 9 est retenue,
généralement comme limite de la dégradation de la
structure (Aubert, 1983 ; Bridges, 1978)
- La valeur de 9 atteinte lorsque Na+
représente 30 % de la CEC et la pH 10 correspond à une ESP >
15 % (Aubert, 1983).
- Le pH peut dépasser 10 ; après
précipitation du carbonate de calcium, les ségrégations
salines sont fortement sodiques et renferment des sels alcalins ( NaHCO3) ,
Na2CO3 , Na2SO4) ( Servant, 1975).
1-3-3 - Composition en sels :
Les sels les plus couramment représentés
sont les sels sodiques qui sont également les plus solubles.
A partir de la composition ionique, les solutions
peuvent être classées sur le diagramme de piper ( Cherbuy, 1991),
qui permet de déterminer différents faciès selon le type
anionique ou cationique de la salure.
1-3-4 - SAR (Sodium adsorption ratio):
Il représente le taux de sodium adsorbable par
rapport aux autres cations (Ca++ et Mg++). La relation
entre les trois cations est proposée par le laboratoire de Riverside
(Richards, 1954), et s'exprime comme suit :
a+, Ca++, Mg++
exprimés en meg/l de la
Na +
SAR =
Solution dosée.
Ca + Mg
+ + ++
2
Le SAR est un critère utilisé pour
prévoir l'évolution de la composition du complexe
d'échange et on peut distinguer deux cas : (Cherbuy, 1991).
* Si le SAR > 10, il y a sodisation * SAR < 10 , il
y pas enrichissement du complexe d'échange en sodium
D'après Rieu et al (1992) le SAR constitue un
critère d'appréciation de la qualité des eaux d'irrigation
car il définit leur pouvoir alcalinisant
14
1-3-5 ESP (éxchange sodium pourcentage)
:
Il s'agit du pourcentage de sodium échangeable sur le
complexe d'échange est exprimé par la formule qui suit (Richards,
1954) :
Na+
ESP = x 100
CEC
|
Na+ : exprimé en meq/100 g CEC : exprimé
en meq/ 100g
|
La norme retenue par l'USSL (1954) pour le taux de sodium
échangeable est de 15 % de la capacité d'échange
cationique (CEC). Selon la FAO (1984) la limite de classe pour le taux de
sodium échangeable est donnée comme suit :
- ESP ( 5% alcalinité légère
- 5% ( ESP ( 20 % alcalinité modérée
- 20 % ( ESP ( 45 % alcalinité grave
- ESP ) 45 % alcalinité très grave.
De nombreux travaux ont tenté d'établir une
relation entre ESP et SAR (Richards, 1954 ; Servant, 1970 ; Creusi, 1970). Ces
relations sont en fait peu fiables pour déterminer
précisément la composition chimique du complexe d'échange
(Claud et al, 2005). Rieu et al (1992) ont proposé de nouveaux concepts
pour le calcul du SAR.
4- Type de profils salins :
La distribution quantitative de la salinité peut dans
tous les cas revêtir plusieurs modalités et conduit
indépendamment à des types de sol (servant, 1973 ; 1975).
Selon servant (1976), il est possible de distinguer quatre formes
principales figure ( 3 ).
-La forme A est une salinisation.
-La forme B est une désalinisation temporaire.
-La forme D est une désalinisation permanente
-La forme C est une résalinisation
Figure 3 : type de profils salins (Servant,
1976)
1-5 Répartition des sols salés
:
1-5-1 Dans le monde :
Les estimations de la superficie totale
représentée par les sols salsodiques dans le monde sont
très variables d'un auteur à l'autre :pour Szablocs (1994), elle
atteint 954832 millions d'hectare, pour Claud et al ( 2005) la superficie est
estimée à environ 9.55 millions de Km2, soit 6.4 % des
continents ou 19 fois le territoire français.
Tous les continents présentent de vaste surfaces de sols
salsodiques figure(4)
16
re4
Figure 4 : Distribution des sols salés
en Afrique (Classification de Aubert, 1970) .In Cherbuy,1991
Selon Szablocs (1994), La répartition de ces zones sur les
continents serait la suivante (Tableau 3) :
Tableau 3 : Répartition des sols salés dans le
monde (Szablocs , 1994).
Sols affectés par les sels des différents
continents et S/ continents (10 3 hectares)
|
* Amérique du Nord
|
15755
|
* Mexique et Amérique centrale
|
1965
|
* Amérique du sud
|
129163
|
*Afrique
|
80608
|
*Asie du sud
|
87608
|
*Asie du Nord et du centre
|
211686
|
*Asie du Sud est
|
19983
|
* Australie
|
357330
|
*Europ
|
50804
|
Total
|
954832
|
Les sols salés ont un caractère azonal. Ils se
rencontrent dans toutes les parties du monde (servant, 1976 ; Durand, 1983)
L'Afrique présente de vastes régions
affectées par les sels (notamment les zones arides et a proximité
des grands fleuves) ( Cherbuy, 1991)
1-5-2 En Algérie :
Selon le Houerou (1993), les sols salés occupent de
vastes superficies (3.2 millions d'hectares de la superficie totale). Ils sont
localisés au Nord qu'au sud ils s'expriment mieux entre les
isohyètes 450mm semble être la limite supérieure des sols
fortement sodiques ( Djili, 2000).
Figure 5
18
Selon FAO (2005) Figure (6) , On rencontre plusieurs type de sols
salés en Algérie localisés surtout dans les étages
bioclimatiques arides et semi- arides.
Figure 6 : Type de sol en Algérie ( FAO,
2005)
20
22
1-6-Classification des sols salsodiques :
La classification Française parait la plus
appropriée dans les zones arides et en particulier pour les sols
salés, puisque selon Halitim (1988), la classification Américaine
est pragmatique et classe les sols dans des ordres différents en
fonction d`une faible variation de l'évapotranspiration ou de la
pluviométrie.
Dans la classification Française, les sols salés
sont rangés dans la classe des sols salsodiques, elle - même
subdivisée en deux (02) sous classes :
A. Sous classe des sols sodiques à structure non
dégradée :
Ce sont des sols salins (solonchak), soumis à
l'influence d'une nappe salée peu profonde, riches en sels de sodium,
caractérisés par une conductivité électrique
supérieure à 4 mmhos/cm ( Duchauffour, 1988).
A-1. Sols salins à complexe calcique ( solontchaks)
:
Très fréquents en Algérie ( FAO, 2005),
caractérisés par :
ESP < 15% et un profil peu différencié (
Servant, 1975 ; Duchauffour, 1976) .
Ils se rencontrent dans les zones steppiques ou
désertiques dans les quelles des nappes salées contiennent
à l'instar des sels solubles, une quantité importante de calcium
qui alimente le profil ( Halitim, 1973).
|