Chapitre 1 : La position du problème
La gestion urbaine est d'une manière
générale complexe car touchant les questions affectant
directement au jour le jour la qualité de la vie des citadins. Ce
chapitre traite d'une part de la problématique de la gestion urbaine et
d'autre part des hypothèses et des objectifs de la présente
étude.
1.1-La Problématique
L'ampleur du mouvement d'urbanisation s'est manifestée
dans l'ensemble des centres urbains et dans leurs périphéries qui
s'étendent à un rythme effréné (Rahim, 2009). A
titre d'exemple, en 1800, à peine 3 % de la population mondiale vivait
en ville, contre 15 % en 1900 et 50 % en 2000 (Chavagneux, 2001). A ce rythme,
les estimations prévoient que 65 % de la population mondiale sera
urbaine en 2025 (UNFPA, 2007).
Cependant l'ampleur du phénomène urbain est
inégale selon les régions du monde. L'urbanisation de nos jours
progresse beaucoup plus rapidement dans les pays du Sud (Diagabate, 2009). En
effet, dans les métropoles des pays du Sud, nous assistons à une
urbanisation informelle des périphéries comme pratique populaire
(exemple : occupations illégales de terrains), une
périurbanisation qui peut résulter d'un développement
planifié (exemple : quasi-villes satellites de Delhi) et un mouvement de
déconcentration des classes aisées en périphérie
lointaine (Veron J., 1996). L'Afrique et l'Asie comptent encore une
majorité de ruraux. Mais avec le développement de l'urbanisation,
les urbains devraient y être majoritaires d'ici 2030, et ces continents,
les plus peuplés, pourraient ainsi abriter la majorité des
grandes cités (Veron J., 1996).
L'explosion urbaine dans les pays du Sud pose de nombreux
problèmes sociaux et environnementaux (Diagabate, 2009). Certains faits
sont caractéristiques des villes des pays du Sud. Ainsi, on a un
accès difficile au sol et au logement, à l'inaccessibilité
des services de base, à la pauvreté, à la
ségrégation résidentielle, aux violences sociales, aux
conditions de travail précaires dans une économie informelle sans
sécurité de l'emploi (Bolay J.C, 2004). Aussi, les transports
publics sont insuffisants pour répondre aux besoins de
déplacements des citadins (Rochefort, 2000). Face à ce sombre
tableau de « ville impossible », les autorités municipales du
Sud ont reconnu leurs incapacités face aux risques qui assaillent les
villes (Rochefort, 2000).La résolution des problèmes urbains fait
ainsi appel à la gestion urbaine (Bouvier, 2007).
L'usage du concept de la gestion urbaine dans les villes du
Sud s'est officialisé en 1985 par le Programme de gestion urbaine, dont
l'objectif était de « travailler avec les pays en
développement au renforcement de la contribution que les villes peuvent
faire à la croissance économique, au développement social
et à l'atténuation de la pauvreté » (Jaglin S.,
1995). La gestion urbaine est donc présentée comme un
élément majeur de la régulation sociale de l'espace
public, et donc du fonctionnement de la société. A ce titre, elle
est un élément clé d'une conception sociétale du
développement durable. Aussi face aux problèmes urbains qui sont
d'actualité et qui se posent différemment selon les pays, la
gestion urbaine se présente comme un moyen de résolution de ces
crises urbaines en intégrant tous les acteurs urbains : Etat,
élus locaux, population et partenaires au développement,
(Bouvier, 2007).
Depuis la conférence de Rio (1992) et avec la mise en
place des agendas 21 locaux, les projets, aménagements et gestions
urbaines ont de plus en plus recours aux nouvelles idées issues de la
réflexion sur le développement durable notamment les nouveaux
modèles environnementaux (amélioration de la qualité de
vie urbaine, économie d'énergie, réduction des pollutions)
mais aussi de nouveaux modes de gouvernance (participation du local, rôle
des associations et des ONG, place aux initiatives individuelles et
privée), (Renata, 2010). Tout ceci vise à résoudre les
problèmes complexes rencontrés par les municipalités. Il
s'agit en effet de gérer des problèmes complexes
rencontrés dans les villes (Allen, 2004). Ainsi la gestion urbaine
recouvre l'ensemble des activités qui concourent à l'entretien de
l'habitat, des espaces, des équipements urbains et qui plus largement
assurent le fonctionnement social urbain (Bonetti, 2007). Aussi, Nguyen
rappelle que la gestion urbaine (du développement) est un secteur
transversal qui compte sur la gestion foncière, la gestion des
infrastructures, la gestion de l'habitat, la gestion des services sociaux, la
gestion du développement économique, etc (Nguyen, 2008).
L'évolution de la politique de la ville constitue un
bon indicateur du « phénomène » de la gestion urbaine :
alors que cette politique a émergé dans les années 1970,
il a fallu attendre plus de 20 ans pour que les acteurs et les responsables
politiques commencent à se préoccuper des problèmes de
gestion urbaine (Bonetti, 2007). Pour Nguyen, les problèmes de gestion
urbaine de Ho Chi Minh ville pourraient fragiliser le statut de
capitale économique du pays (Nguyen, 2008).
La dévalorisation de la gestion urbaine découle
même tient tout d'abord de la nature même de ces activités
qui concernent de nombreuses actions récurrentes, dont les effets ne
sont pas très spectaculaires (Bonetti, 2007). Or ces activités
sont fortement dévalorisées par la majorité des acteurs
professionnels et des responsables politiques qui participent au
développement urbain. Tout en proclamant que ces activités sont
indispensables au bon fonctionnement de la ville, la plupart de ces acteurs ne
s'y intéressent guère (Bonetti, 2007).
La difficulté de gestion du transport s'est
manifestée par une disparition de la majorité des entreprises
publiques d'autobus et la régression de celles qui subsistaient. A cela,
il faut ajouter le désengagement des états dans la gestion des
transports au profit des communes (Ezzine, 2000).Dans le domaine de l'habitat,
le déficit de gestion urbaine stigmatise les quartiers qui le subissent,
accroît le processus de ségrégation, ne favorise pas les
relations de bon voisinage, accroît les tensions sociales et favorise la
délinquance (Bonetti, 2007). Ce déficit de gestion entraîne
aussi une dégradation rapide des bâtiments, des espaces urbains et
réduit leur durabilité. Ce déficit génère
enfin des investissements considérables car il conduit à engager
des travaux de rénovation très couteux (Bouvier, 2007).
Sur le plan socio-économique, la crise de la gestion
municipale peut être renvoyée à la problématique de
fractionnement et de l'atomisation institutionnelle comme ce fut le cas au
Maroc (Sedjari, 2006).En effet, les municipalités gérées
par les communautés urbaines ont vu leur gestion subir des
découpages administratifs successifs, un éparpillement des
pouvoirs de décision et une absence d'optimisation des ressources
(Sedjari, 2006). Aussi la polarisation sociale et spatiale croissante des
villes va de pair avec la montée de la violence urbaine. Bien des formes
de violence dans la ville s'expliquent par l'exclusion sociale,
économique et culturelle (Lapeyronnie, 1993).
Au Maroc par exemple, le problème de gestion
financière est criard comme le résume ce constat de Jean Collin :
« la gestion financière était caractérisée
par un déficit chronique et des errements d'une extrême
gravité. Mais toutes les municipalités des communes chefs-lieux
de région avaient un dénominateur commun. Des groupes de pression
y avaient favorisé la politisation de la gestion, de sorte que les
administrateurs élus, malgré leur volonté de bien
gérer les affaires de la collectivité, étaient dans la
majorité des cas liés par mille entraves qui ne leur permettaient
pas d'oeuvrer toujours pour le bien commun : trop souvent au contraire, nombre
de facteurs les poussaient à favoriser les minorités partisanes
au détriment de la collectivité locale et même de l'Etat
» (Collin, 1977).
Cette mauvaise gestion est due à la personnalisation du
mode de gestion du personnel municipal et aux effets du clientélisme
(Collin, 1977). Dans le même temps l'importance des coûts de
gestion urbaine est souvent sous-estimée. Au regard des investissements
nécessaires pour rénover un quartier, qui peuvent
représenter plusieurs milliards de francs CFA, les coûts de
gestion urbaine paraissent très faible (Bonetti, 2007). En plus, le
faible équipement d'une ville en services et en moyens de gestion
expliquerait la pauvreté d'une grande partie de sa population
(Haeringer, 1999). Enfin, dans la plupart des cas, les communes des pays en
développement n'ont pas de garanties sur le volume de ressources qui
leur seront affectées et sur la régularité des versements
(Rochefort, 2000).
La logique politique, que nul ne saurait ignorer, a fait des
villes du Sud le théâtre d'un enjeu d'intérêts
conflictuels sans précédent. Ainsi, les villes ou les
arrondissements au sein des villes sont érigées sans des mesures
conséquentes d'accompagnement. Ainsi la ville est éclatée
en plusieurs municipalités et soumise à une gestion de type
bureaucratique. Une incompréhension naît entre les gestionnaires
(administrateurs) locaux et la population qui trouve que ses aspirations ne
sont pas identiques aux ambitions déclarées des gestionnaires
(Sedjari, 2006).
Pour ce qui concerne l'espace urbain, il faut rappeler que la
gestion de l'espace est l'un des problèmes les plus complexes qui se
posent aux états africains issus de la colonisation depuis les
indépendances, (Nzuzi Lelo, 1995). L'inégale gestion de l'espace
urbain dans les pays du Sud entraîne l'aggravation des
ségrégations socio-spatiales, sans résoudre les
problèmes généraux de la pollution, des embouteillages et
de la violence (Rochefort, 2000).
Quant à l'impact de l'environnement, il importe de
souligner que l'univers est confronté à un véritable
problème de gestion des déchets de manière beaucoup plus
aigu qu`anciennement (Shabanthu, 2006). Cette situation s'explique par de
multiples raisons dont : l`expansion démographique entraînant
l`augmentation de la demande en produits de consommation, la diminution de la
durée de vie des biens et des produits, l`accroissement des emballages
non naturellement destructibles et l'augmentation de la quantité des
informations imprimés (journaux, concentration des populations et type
d`habitats...). L'augmentation des quantités de déchets dans nos
contrées pourrait occasionner les maladies parasitaires y compris les
helminthiases entraînant du même coup une élévation
du taux de morbidité et une mortalité dans le monde entier
(Blumberg., 1968 cité par Shabanthu, 2006).
De nos jours, les questions touchant la gestion des
déchets urbains et, par extension la planification et la gestion de
l'environnement urbain comptent parmi les plus complexes auxquelles doivent
répondre les gestionnaires urbains en raison de leurs effets sur la
santé humaine, le développement durable (Attahi, 1996). Les
risques environnementaux et sanitaires liés à la
problématique de la gestion des déchets solides ne sont pas
correctement maîtrisés par les états centraux, les
appareils municipaux, et les organisations communautaires de base. Aussi la
collecte ne dépasse guère les 50 % des déchets produits et
les municipalités de la plupart des villes du Sud y consacrent
près de la moitié de leur budget (Housseynou, 1997).
Dans ce siècle courant, divers changements semblent
s'annoncer dans les villes des pays du Sud. De ce fait, la gestion urbaine et
municipale dans les pays du Sud est devenue un domaine de plus en plus complexe
et sujet à des conditions sans cesse changeantes qui affronte toute une
série d'enjeux sociaux, économiques, politiques et
administratifs. Les centres urbains investis de nouveaux pouvoirs avec le
processus de décentralisation se retrouvent donc dans l'obligation de
traiter les problèmes liés à la gestion des villes. Cette
gestion est toutefois difficile à cause de la pauvreté et du sous
développement des villes.
La santé et la maladie sont des éléments
écologiques qui décrivent les relations entre un organisme et la
valeur future de son environnement (Brewer, 1988). Aussi, le problème
d'assainissement constitue un sujet d'actualité partout dans le monde et
particulièrement dans les pays du Sud (Diagabate, 2009). Dans les villes
du Sud en effet, les déchets sont jetés dans les rues, dans les
caniveaux ou entreposés dans des dépôts sauvages devenant
des immenses cloaques d`immondices (Sane, 1999 ; Botkin, 1995). Ainsi, la
problématique de l'insalubrité est devenue une
réalité incontournable et demeure préoccupante
malgré les efforts des municipalités.
Le choix de ce thème « gestion urbaine dans les
pays du Sud » tire son importance du fait que la préservation des
ressources naturelles et le respect de l'environnement sont parmi les axes
principaux de toute stratégie de développement durable. Ainsi
aborder la question de la gestion environnementale présente pour nous un
intérêt sur le plan scientifique, écologique et
économique à cause de l'impact des déchets sur le cadre de
vie urbain et sur les citadins.
Au regard de cet état de fait, il s'agit pour nous
d'analyser les modalités de la gestion urbaine en privilégiant
l'étude de la gestion des déchets urbains dans les pays du Sud.
En d'autres termes, il sera question de trouver des réponses aux
interrogations suivantes :
Quels sont les résultats des différents modes de
gestion du cadre de vie urbain Distinguer les différents champs de la
gestion urbaine ?
Pourquoi la gestion environnementale apparaît plus
préoccupante ? Pourquoi la gestion des déchets urbains est elle
capitale ?
1.2.-Hypothèses de l'étude
1.2.1-Hypothèse générale
Nous formulons l'hypothèse principale selon laquelle que
les modes de gestion urbaine ne résolvent pas de façon durable
les problèmes urbains.
1.2.2-Hypothèse spécifiques
De cette hypothèse principale découlent trois
hypothèses spécifiques, à savoir
1- Les domaines d'intervention de la gestion municipale touchent
plusieurs secteurs de la vie sociale
2- La destruction de l'environnement et la présence de
certaines maladies découlent des déchets produits
3- La gestion des déchets regroupe les actions
d'enlèvement de traitement et de valorisation
1.3.-Objectifs de l'étude
Notre étude vise un objectif général et 3
objectifs spécifiques. 1.3.1-Objectif
général
La présente étude a pour objet d'analyser la
pertinence et l'efficacité des résultats des modes de gestion du
cadre de vie urbain
1.3.2-Objectifs spécifiques
1- Déterminer les domaines d'intervention de la gestion
urbaine
2- Déterminer les impacts des déchets sur
l'environnement
3- Identifier les axes de la gestion des déchets
urbains
La relation entre les hypothèses, les objectifs de
l'étude et les questions de recherche nous est présentée
par le tableau synthétique ci-dessous (le tableau ni)
Tableau ni : La relation entre les hypothèses, les
objectifs de l'étude et les questions de recherche
Hypothèses de l'étude
|
Objectifs de l'étude
|
Questions de recherche
|
Hypothèse générale
Les modes de gestion urbaine ne résolvent pas de
façon durable les problèmes urbains
|
Objectif général
Analyser la pertinence et
l'efficacité des résultats des
modes de gestion du cadre de vie urbain
|
Question principale
Quels sont les résultats des différents modes de
gestion du cadre de vie urbain
|
Hypothèse spécifique 1
Les domaines d'intervention de la gestion municipale touchent
plusieurs secteurs de la vie sociale
|
Objectif spécifique 1
Déterminer les domaines
d'intervention de la gestion urbaine
|
Question spécifique 1
Distinguer les différents
champs de la gestion urbaine ?
|
Hypothèse spécifique 2
La destruction de l'environnement et la présence de
certaines
maladies découlent des déchets produits
|
Objectif spécifique 2
Déterminer les impacts des
déchets sur l'environnement
|
Question spécifique 2
Pourquoi la gestion
environnementale apparaît plus préoccupante ?
|
Hypothèse spécifique 3
La gestion des déchets regroupe les actions
d'enlèvement de traitement et de valorisation
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Objectif spécifique 3
Identifier les axes de la gestion des déchets urbains
|
Question spécifique 3
Pourquoi la gestion des
déchets urbains est elle prioritaire ?
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