VIII.3.4 Appréciation de
soi
Les OEV interrogés dans le cadre de notre travail
s'apprécient positivement. Dans 86,7% des cas ils estiment pouvoir
réussir dans la vie. A la question de savoir quels étaient leurs
sentiments à l'égard de la vie depuis la perte des parents, 30%
estiment être tristes, 10% inquiets et 6,7% affligés. Les enfants
souffrent de la perte de nombreuses figures adultes. Ceci est susceptible de
créer un sentiment d'insécurité qui peut affecter la
capacité des enfants à agir dans leur meilleur
intérêt. La perte de repères peut freiner l'enfant dans son
développement et son intégration dans son milieu en particulier
et dans la société en général.
VIII.3.5 Devenir des OEV
Le tableau 14 indique que la majorité des OEV veut
devenir soit médecin (26,7%) soit infirmier (16,7%). Il y a une
association significative entre le devenir et le sexe (p=0,05). La
modalité autres (coiffeuse, couturière, mécanicien,
plombier...) représente 23,3%. Un responsable de l'AJPO confirme la
tendance dominante : « (...) Presque à
l'unanimité ces enfants chacun veut devenir infirmier, embrasser le
domaine de la santé ».
Voir la souffrance de leurs parents, leurs infections
opportunistes à répétition, leur servir de garde-malade,
être confronté à leur intimité s'ils doivent les
laver, les emmener aux toilettes, anticiper sur le deuil à venir est
particulièrement difficile à supporter pour un enfant. Ces
raisons évoquées motivent les OEV à vouloir devenir
professionnel de santé. Car ils se disent que s'ils avaient
été dans le secteur de la santé ils auraient pu
atténuer la souffrance des parents.
Tableau 14 : Répartition des OEV selon le
sexe et la profession envisagée dans le futur
Professions
|
Sexe
|
Total
|
Masculin
|
%
|
Féminin
|
%
|
|
Médecin
|
2
|
6,7%
|
6
|
20%
|
8 (26,7%)
|
Infirmier
|
0
|
0,0%
|
5
|
16,7%
|
5 (16,7%)
|
Entrepreneur
|
3
|
10,0%
|
1
|
3,3%
|
4 (13,3%)
|
Militaire
|
3
|
10,0%
|
1
|
3,3%
|
4 (13,3%)
|
Pilote
|
2
|
6,7%
|
0
|
0,0%
|
2 (6,7%)
|
Autres
|
4
|
13,3%
|
3
|
10,0%
|
7 (23,3%)
|
Total
|
14
|
(46,7%)
|
16
|
(53,3%)
|
30 (100%)
|
(Khi deux = 11, 0,59)
VIII.3.6 Relations avec les
autres et au sein du ménage
Le développement de liens entre les OEV et les autres
enfants et la participation de la communauté au développement
d'activités de soutien peuvent permettre de décourager les
comportements de stigmatisation et de discrimination. Ainsi dans notre
étude, un peu plus de la moitié des OEV (56,7%) affirment
s'entendre bien avec les autres jeunes de leur âge. Cela ne se passe pas
toujours bien pour tous les OEV. En effet, madame N.N.D, 46 ans, veuve et
infectée par le VIH ainsi que sa fille de 6 ans ½ nous rapporte le
cas stigmatisation vécu par celle-ci : « la fille de
ma voisine a payé une culotte mais elle était grande pour elle,
elle a voulu la vendre à ma fille qui était
intéressée mais qui n'avait pas l'argent aussitôt. Le
lendemain matin, la fille de ma voisine est venue exiger son argent, ma fille
lui a remis la culotte puisqu'elle n'avait pas l'argent. L'autre a
refusé en disant qu'elle ne prend pas ce qui a été
porté par un sidéen ». La mère poursuit en
nous rapportant que : « la réponse de ma fille ne
s'est pas faite attendre, elle lui a répondu en disant que
c'était une maladie comme toute autre ».
Au sein des ménages les choses peuvent se passer
quelques fois très mal si l'enfant est placé dans une famille
d'accueil. C'est le cas de S.B.B., 18 ans, orphelin de père et de
mère depuis 5 ans, chef de ménage : « un jour
ma tante s'est levée et nous a chassé de la maison, mon
frère et moi, depuis nous prenons notre vie en mains ».
En voulant comprendre les raisons qui ont motivé leur renvoi, S.B.B.
rapporte que : « notre tante a bouffé mon argent
comme je fais de petits travaux pendant les vacances, elle ne voulait pas
rembourser ».
En ce qui concerne les relations avec le chef de
ménage, un seul OEV affirme s'entendre très mal avec son chef de
ménage. Pour appuyer cela, un responsable de l'AJPO relate un cas
vécu récemment : « il y a une marraine qui a
créé un scandale, elle a cru bien faire, de proposer à
l'enfant les vacances prochaines en France. L'enfant a eu des problèmes
dans sa famille (...) quand on discute avec le tuteur, ses frères, ses
demi-frères j'allais dire, il y a pas de problème mais c'est trop
de suspicion. On s'est dit est-ce que ce n'est pas le voyage de l'enfant qui le
problème ? On te prend comme quelqu'un à qui on fait de la
pitié, toi tu viens tu veux être mieux que n'importe qui ici. Donc
c'est la jalousie ».
Nous avons également cherché à comprendre
comment les OEV se sentent dans les ménages qui les accueillent, 33%
affirment bien se sentir, 30% assez bien, 20% passable. Les raisons
avancées sont : « ils me traitent
bien » dans 40% des cas, « il y a de la
nourriture » dans 20% des cas. Dans 6,7% des OEV, les OEV
estiment avoir trop de travaux ménagers à faire.
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