INTRODUCTION GENERALE
1- POSITION DU PROBLEME
L'aide au développement est certainement selon Marchant
(1991), l'acte politico-économique qui a suscité plus d'espoir au
cours du siècle dernier, pour les pays sous développés.
Elle est certainement aussi celle qui a, semble-t-il, fait couler beaucoup de
salive et d'encre.
Sur un plan historique, l'idée est plus ou moins
récente, elle date d'un peu plus de 50 ans. Elle a été
lancée en effet et mise en oeuvre à l'initiative des Etats-Unis,
dans le cadre de l'European Relief Program, beaucoup plus connu sur le
terme de plan Marshall, qui fut un programme de relance
économique des pays européens ruinés au sortir de la
deuxième Guerre Mondiale. Environ 13,3 milliards de dollars US furent
alloués pendant quatre ans à près de 16 pays
européens, représentant près de 10% de leur P.I.B (sogge,
2003 :19).
Pour ce qui est de l'Afrique, l'initiative de l'aide au
développement débute au lendemain des indépendances, dans
le cadre de la coopération bilatérale entre les pays africains
nouvellement indépendants et leurs anciennes puissances colonisatrices.
C'est une aide qui émane du secteur public, dans le but principal de
faciliter le développement économique et d'améliorer les
conditions socio-économiques des pays bénéficiaires
(Daidj, 1998 :16). Mais, c'est dans les années 1970 que l'initiative de
l'aide au développement connaît une consécration
universelle et normative.
En effet, les pays donateurs, conscients du large écart
socio-économique qui existe entre eux, et les pays sous
développés du tiers monde ; considérant que ces derniers
ne peuvent impulser une véritable politique de développement que
par leurs propres moyens, se sont engagés à leur verser un
pourcentage précis de leur PNB. C'est à cet effet que, le 24
octobre 1970, l'Assemblée Générale des Nations Unies vote
la Résolution 2626 qui, dans son alinéa 43, dispose :
«Vu l'importance du rôle que seule peut jouer l'aide officielle
au développement, une portion majeure des ressources financières
aux pays en voie de développement devrait s'effectuer sous forme de
transfert de ressources publiques. Chaque pays économiquement
avancé, accroîtra progressivement son aide (...) et s'efforcera
particulièrement d'atteindre au milieu de la décennie au plus
tard, un montant minimum en valeur nette de 0,7 pour cent de son Produit
national brut » (Smith, 2003 : 102).
Plus récemment, en 2000, la même Assemblée
Générale a adopté une série d'objectifs
internationaux, afin de réduire la pauvreté et les
inégalités dans le monde de cette date à 2015 : ce sont
les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD), qui
s'imposent dès lors comme une "feuille de route" pour les pays
donateurs en vue de contribuer efficacement par le biais de l'aide au
développement, à améliorer les conditions
socio-économiques des pays pauvres. C'est donc dans ce même ordre
d'idée, que des ONG françaises se sont mobilisées en 2002
au sein de la campagne « votons pour un monde plus juste !»,
en faveur d'une augmentation de la contribution de la France au financement du
développement. Cette mobilisation a permis de recueillir plus de 200000
signatures en faveur d'une aide publique au développement (APD), et a
contribué à mettre cette question dans l'agenda de la campagne
des élections présidentielles françaises en 2002. Cette
mobilisation massive de ces différentes organisations rejoint ainsi une
prise de conscience plus large au sein de la classe politique française,
de la nécessité de renforcer la solidarité internationale.
Prise de conscience, qui, depuis les années 1990, semble s'afficher
très clairement dans le discours sur la politique française de
son aide publique en faveur des pays en développement, qui sont dans une
situation de besoin prégnant qui semble perdurer et devenir
endémique.
Le sous continent africain semble être à ce
titre au centre de la politique d'allocation de l'aide française. En
2004 par exemple, elle occupait 53,2% des 66% de l'APD française
allouée en Afrique. En 2003, c'est pratiquement 57% de 69% de l'aide
française allouée en Afrique, qui a été
octroyée en Afrique subsaharienne. En 2002, la France a consacré
environ 72% de son aide bilatérale en faveur de l'Afrique, dont 60% par
l'Afrique Subsaharienne.
Toutefois, ces données globales, quoique
séduisantes, doivent être prises avec beaucoup de prudence. Car,
en matière d'APD, la qualité est aussi importante que la
quantité. Ce qui nous amène à nous interroger sur
l'allocation sectorielle de l'APD française en Afrique subsaharienne
à partir de deux cas précis : Le Cameroun et le Gabon. Pourquoi
le Cameroun et le Gabon ? Ce choix s'expliquerait par le fait que malgré
les disparités géographiques et démographiques qui
existent entre eux, ce sont deux pays ont néanmoins des rapports assez
étroits avec la France, au regard de l'héritage historique commun
qu'ils partagent avec cette dernière. Ces deux pays, dans une sous
région en proie à une turbulence permanente, connaissent quant
même une stabilité certaine depuis leurs indépendances
respectives, et s'imposent comme les piliers économiques de leur sous
région.
Car, l'APD française, si elle veut être plus
efficace et non pas considérée comme « un maudit don du ciel
», selon le terme consacré de Smith (2003) par les pays
bénéficiaires, doit être orientée vers des secteurs
prioritaires de ces derniers, et être plus concentrée en terme de
volume, afin d'améliorer de manière rapide et croissante les
conditions de vie des populations désireuses, qui vivent dans ces pays.
Ceci aurait aussi pour effet rétroactif, pour le pays donateur, de
bénéficier d'une aura internationale plus considérable
aussi bien à l'égard de ses pairs que des pays
bénéficiaires. Cela étant dit, comme principe de base, il
est question de nous interroger sur l'orientation sectorielle de l'APD
française au Cameroun et au Gabon dès 1990 à 2005;
notamment dans les secteurs de la Santé, l'éducation,
l'accès à l'eau potable et l'agriculture. Ceci, à travers
un ensemble de questionnements : 1- comment peut-on caractériser
l'orientation sectorielle de l'aide française affectée au
Cameroun et au Gabon dans les différents domaines suscités depuis
1990 ?
2- Quelle incidence cette aide a pu avoir dans
l'amélioration des conditions de vie de ces deux pays?
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