Paragraphe 2 : L'action
répressive au niveau international
La question du respect du DIH par les belligérants dans
les conflits armés internes, revêt aujourd'hui une importance
capitale pour la Communauté Internationale. Elle est inscrite à
l'ordre du jour de l'assemblée général de l'ONU, de la
conférence internationale de la Croix-Rouge et des sessions annuelles
des organes délibérants des institutions régionales. Cette
mobilisation de la communauté internationale face aux atrocités
commises dans l'impunité la plus totale, traduit la nécessite
pour les Etats d'adopter au niveau international des mesures de mise en oeuvre
du DIH. Ces mesures visent, d'une part à instaurer des procédures
de contrôle international (A), et d'autre part à
réprimer par les juridictions internationales, les personnes
responsables de violations graves du DIH (B).
A- Le contrôle du respect des
garanties de protection
Des procédures d'enquête ont été
développées au sein du droit humanitaire. Il s'agit de la
procédure prévue par les art. commun 52-53-132-145 aux
Conventions de Genève, et de l'enquête institutionnelle de la
Commission Internationale Humanitaire d'établissement des Faits (CIHEF).
C'est ce dernier qui retiendra notre attention parce qu'elle constitue le seul
organe permanent rapidement mobilisable aux fins d'enquête sur des
allégations de violations graves du DIH . Il faut cependant noter que le
CICR peut signaler directement aux Parties concernées, en principe
à titre confidentiel, les infractions au DIH qu'il constate
lui-même. Pour ne pas se mêler de polémiques qui pourraient
être nuisibles à son action, Il n'accepte qu'en dernier ressort
de participer à une commission d'enquête s'il est sollicité
par les parties intéressées. D'autres procédures ont
également été prévues en dehors du DIH.
L'enquête
institutionnelle de la CIHEF
L'art. 90 du P.A prévoit l'établissement d'une
CIHEF. Créée officiellement en 1991, la Commission est un organe
international permanent dont la fonction essentielle consiste à
enquêter sur tout fait prétendu être une infraction ou
violation grave du DIH. La Commission est donc un mécanisme
indispensable pour aider les Etats à veiller à l'application et
à l'observation du droit humanitaire en temps de conflit armé.
La compétence de la
commission
Le but de la Commission est de protéger les victimes
des conflits armés en obtenant le respect des principes et des
règles de droit international applicables dans les conflits
armés. La Commission est notamment compétente pour :
1. Enquêter sur tout fait prétendu être une
infraction grave au sens des Conventions et du Protocole ou une autre violation
grave des Conventions ou du Protocole,
2. Faciliter, en prêtant ses bons offices, le retour
à l'observation des dispositions des Conventions et du Protocole.
La Commission a cette compétence si les Etats parties
à la procédure ont accepté sa compétence en
déposant les déclarations appropriées. Dans un tel cas,
aucune autre manifestation du consentement n'est nécessaire pour fonder
la compétence de la commission.
De même, dans d'autres situations, la Commission peut
ouvrir une enquête à la demande des Etats aux conflits, mais
uniquement avec le consentement de l'autre ou des autres parties
intéressées. Dans ce contexte, la Commission a fait part de sa
volonté d'enquêter sur les violations alléguées du
droit humanitaire, y compris sur celles qui surviennent dans des conflits
armés à caractère non international, aussi longtemps que
les parties au conflit y consentent.
De plus, elle a exprimé sa conviction qu'il est
nécessaire de prendre toutes les initiatives appropriées, le cas
échéant en coopération avec d'autres organismes
internationaux, en particulier avec les Nations Unies, pour exercer ses
fonctions dans l'intérêt des victimes de conflits armés.
Cette conviction est partiellement fondée sur les articles 89 et 1er,
paragraphe 1, du P.1 et sur l'article 1er commun aux Conventions de
Genève.
La procédure
d'enquête
Lorsqu'une requête est déposée,
l'enquête doit être effectuée, à moins que les
parties n'en disposent autrement, par une chambre composée de sept
membres nommés comme suit: après consultation des parties au
conflit, le Président de la Commission nomme, sur la base d'une
représentation équitable des régions géographiques,
cinq membres de la Commission, qui ne doivent être ressortissants
d'aucune partie au conflit, et deux membres ad hoc, qui ne doivent être
ressortissants, eux non plus, d'aucune des parties au conflit, sont
nommés respectivement par chacune de celles-ci.
La Chambre doit inviter les parties à l'assister et
à produire des preuves. La Chambre peut rechercher les autres preuves
qu'elle juge pertinentes et elle peut procéder à une
enquête sur place. La Chambre doit communiquer tous les
éléments de preuve aux parties, qui ont le droit de
présenter des observations et de les discuter.
Une fois achevée la procédure
d'établissement des faits, la Chambre doit en établir les
résultats. Il appartient toutefois à la Commission
elle-même de soumettre aux parties un rapport sur ces derniers, avec les
recommandations qu'elle juge appropriées. Si la Commission n'est pas en
mesure de rassembler des preuves qui suffisent à étayer des
conclusions objectives et impartiales, elle doit faire connaître les
raisons de cette impossibilité.
La Commission ne peut pas communiquer publiquement ses
conclusions, à moins que toutes les parties au conflit n'y
consentent.
Par principe, la mission première de la Commission est
d'établir les faits, non pas pour définir des
responsabilités individuelles, mais en vue de favoriser une meilleure
mise en oeuvre des dispositions du DIH. Il se pourrait néanmoins, que
les conclusions de la Commission puissent se révéler utiles pour
des poursuites pénales, nationales et internationales, y compris dans le
cadre des actions de la CPI.
Malgré les efforts déployés par les Etats
pour mettre en place cette commission, il est à constater que ces
mécanismes n'ont jamais fonctionnés réellement.
L'instauration de la CIHEF comme mécanisme appelé à
inciter au respect du DIH par l'établissement des faits et l'exercice de
bons offices, ne peut être efficace en ce qui concerne les conflits
armés internes. En effet la compétence de la commission est
subordonnée ici au consentement des parties au conflit or, ces
dernières se gardent toujours d'en faire usage : un Etat qui commet
des crimes de guerre, ne va évidemment jamais saisir la commission pour
qu'elle enquête sur ses faits. C'est pourquoi nous pensons que les
mécanismes de contrôle développés au sein de l'ONU
et des organisations internationales régionales, peuvent contribuer
à un meilleur respect du DIH.
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