Analyse du système d'information de lutte contre
la tuberculose au Cameroun
Francis BOGNI1
1Etudiant à l'Université
de la Méditerranée Aix-Marseille, Marseille, France
Résumé
Au Cameroun, la tuberculose demeure un problème
majeur de santé publique de par son impact sur la mortalité, la
morbidité et ses répercussions socio-économiques sur la
population en général. En 2009, 25 174 cas de tuberculose ont
été dépistés. Le nombre de malades qui acceptent de
faire le test de dépistage de l'infection au VIH/Sida a augmenté
passant de 18 671 à 18 677 entre 2008 et 2009. Et 42% d'entre eux ont
été déclaré positifs.
Un système est un ensemble
d'éléments ayant des liens entre eux et concourant à
l'atteinte des mêmes objectifs. Ainsi, le système d'informations
sanitaires peut être défini comme l'ensemble des outils
utilisés pour la collecte, l'analyse et l'interprétation des
données sanitaires. Du fait que le système d'information
sanitaire du PNLT se soit basé principalement sur l'outil EXCEL, il nous
a été confié au cours de notre stage d'analyser le
système d'information sanitaire mis en place au sein du PNLT. Cette
analyse a abouti à la construction d'une base de données sur
ACCESS devant améliorer le traitement des données et la prise de
décision. Pour bien mener ce travail nous nous sommes rendus au
Programme National de lutte contre la tuberculose, dans certains Centres de
Diagnostic Traitement pour échanger avec les responsables et nous
imprégner de la façon dont le système d'information
sanitaire est organisé.
La lutte contre la tuberculose qui demeure encore de
nos jours un problème majeur de santé publique se fait à
travers une structure spécialisée : le Comité National de
lutte contre la Tuberculose (CNLT). Le Groupe Technique Central du Programme
National de Lutte contre la Tuberculose (GTC/PNLT) est l'organe
exécutive du CNLT c'est-à-dire sa cheville ouvrière. Ils
ont été mis en place en 2002.
Le principal outil de synthèse et transmission
de l'information est le rapport trimestriel d'activités.
Le système d'information sanitaire vise
à produire des informations pertinentes et de qualité à
l'appui de l'action sanitaire. Il doit répondre aux besoins et aux
exigences de toutes les parties intéressées dans le cadre d'un
plan global pour le renforcement des systèmes de statistique et de
santé. Partant de ce fait, et dans le but de faciliter les futures
analyses des données issues des CDT (Centre de Diagnostic Traitement),
une application informatique chargée de présenter de façon
claire et précise les indicateurs de santé suivi par le PNLT, a
été mise à la disposition du GTC/PNLT. Cet application
été dénommée THIS version 1.0
Mots dles :
Tuberculose, Système d'information
sanitaire
1 Introduction
Le besoin d'être en bonne santé est sans
aucun doute l'une des principales aspirations légitimes de l'être
humain [1]. Malheureusement, depuis des siècles, la lutte contre la
maladie n'a cessé de remettre en cause cette aspiration au bien
être. Aujourd'hui plus que par le passé, grâce aux
progrès de la médecine l'homme vit plus longtemps et la victoire
contre la maladie semble à portée de main. Cependant, en
attendant ce jour où l'on aura trouvé la solution miracle, le
quotidien de l'homme est agrémenté par diverses maladies, parmi
lesquelles la tuberculose. L'intérêt pour la lutte contre la
tuberculose et ses résultats ont connu au cours des dernières
décennies des fortunes diverses [2]. Maladie contagieuse, de
caractère endémo épidémique, à transmission
essentiellement interhumaine, la tuberculose demeure un fléau mondial en
progression et reste le deuxième plus gros tueur après le VIH
[3]. En Afrique Sub-Saharienne, une réduction de moitié de la
mortalité d'ici 2015 dans cette région est hautement improbable
à cause de l'effet négatif de l'épidémie de VIH.
Pour l'ensemble du monde, atteindre les cibles établies par le
partenariat « Halte à la tuberculose » (réduire de
moitié la prévalence de 1990 et les taux de mortalité
d'ici 2015) ne sera possible que si les efforts visant à contrôler
la tuberculose se poursuivent, de même que le financement de ces efforts
[3].
Dans le but de mettre un frein à
l'évolution de cette maladie, le Gouvernement camerounais a
créé le Programme National de Lutte contre la Tuberculose (PNLT).
La création de ce programme témoigne en effet de la
volonté du Gouvernement camerounais d'apporter une réponse
adéquate et efficace contre l'évolution de la Tuberculose au
Cameroun.
La tuberculose n'est pas une maladie
réservée à certaine cible. Elle frappe toutes les couches
sociales. Aussi, les politiques visant la réduction de la maladie sont
multisectorielles, et leur mise en oeuvre nécessite la connaissance de
données fiables et précises sur la situation
épidémique de l'ensemble du territoire national, et aussi
l'impact socioculturel et économique de la maladie sur la population.
Les indicateurs statistiques en tant qu'outil d'évaluation et d'aide
à la décision grâce auquel on va pouvoir mesurer l'impact,
une situation ou une tendance, de façon relativement objective, à
un instant donné, sont de ce fait indispensables dans cette lutte. A cet
effet, des mécanismes de collecte de données ont
été mis en application sur toute l'étendue du territoire
national à travers des unités techniques régionales et de
district du PNLT. Des ressources humaines qualifiées ont
été recrutées et affectées pour assurer la collecte
et l'analyse de ces données de façon
périodique.
Dans le souci de disposer, d'informations statistiques
de qualité devant orienter à la prise de décision pour
lutter efficacement contre cette maladie et de l'éliminer comme un
problème de santé publique, il nous a été
confié : d'analyser le système d'information sanitaire
(mécanisme de collecte, de transmission, de traitement et d'analyse des
données) mis en place au sein du PNLT.
Notre travail s'articulera en quatre (04) parties. La
première partie est consacrée à la présentation des
contexte et problématique, objectif général et objectifs
spécifiques de l'étude, la deuxième partie abordera la
méthodologie adoptée pour mener ce travail. Dans la
troisième partie, nous présentons les résultats de
l'étude, notamment la revue de la
littérature des SIS, la description du PNLT,
l'analyse de son système d'information sanitaire et l'élaboration
du Modèle Conceptuel de Données (MCD) et du Modèle
Physique de Données (MPD). La quatrième partie sera consacrer
à la discussion des ces résultats suivi enfin d'une
conclusion.
2 Contexte et Problématique
2.1 Aperçu mondial de l'endémo
épidémie
La tuberculose est une maladie infectieuse et
contagieuse, causée par un micro-organisme appelé Mycobacterium
tuberculosis ou bacille de Koch (BK). La transmission se fait surtout par voie
aérienne, lorsqu'une personne en bonne santé respire de l'air
contaminé par une personne souffrant de tuberculose pulmonaire. Le BK
peut attaquer tous les organes de l'organisme, mais au plan
épidémiologique, seule la tuberculose pulmonaire est responsable
de la pérennité de l'endémie au sein de la population, car
c'est elle qui est contagieuse. Le traitement de la tuberculose dure 6 à
8 mois et fait l'objet d'une association de plusieurs médicaments
(polychimiothérapie). La tuberculose est une maladie cosmopolite, mais
une importante endémie sévit dans les pays à faibles
revenus. Elle est liée à la pauvreté et touche surtout les
jeunes adultes, à l'âge où ils sont le plus productifs.
Elle demeure une cause majeure de mortalité et l'ampleur à
l'échelle mondiale de la maladie est indéniable. En effet, elle
touche toutes les nations dans le monde, et selon le rapport 2010, de
l'Organisation Mondiale de la Santé sur la lutte contre la tuberculose
dans le monde, les estimations mondiales de la charge de la tuberculose en 2009
sont les suivantes :
- Incidence : 9,4 millions de cas (entre 8,9 et 9,9
millions), prévalence : 14 millions (entre 12 et 16 millions),
mortalité : 1,3 millions chez les VIH-négatifs (entre 1,2 et 1,5
million) et 380 000 chez les VIH-positifs (entre 320 000 et 450 000). Ces
décès sont classés comme des décès par VIH
selon la Classification internationale des Maladies (CIM-10). La plupart des
cas ont été constatés dans les régions africaine,
de l'Asie du Sud-Est et du Pacifique occidental, avec des taux de 35 %, 30% et
20% respectivement. On estime que les VIH-positifs représentent entre 11
et 13% de l'ensemble des nouveaux cas de TB, la Région africaine
comptant pour environ 80% de ces cas.
2.1.1 Principaux objectifs de la lutte antituberculeuse
mondiale
Les principaux objectifs de la lutte mondiale contre la
tuberculose sont les suivants [4] : > Faire baisser
l'incidence de la tuberculose d'ici 2015 (cible 6.c) des OMD) ;
> Réduire de moitié d'ici 2015 les taux
de prévalence et de mortalité par rapport à leur niveau de
1990 ;
> Dépister et traiter au moins 70% des nouveaux
cas à frottis positif dans le cadre de programmes DOTS [5] ;
et
> Traiter avec succès au moins 85% des nouveaux
cas à frottis positif. 2.2 Aperçu de l'endémo
épidémie au Cameroun
D'après l'OMS, la tuberculose est une maladie
génératrice de pauvreté. Il est estimé que
la tuberculose est responsable de la baisse de 1% du PIB au Cameroun [6]. En
moyenne 22 500 nouveaux cas de tuberculose sont notifiés au
Ministère de la Santé Publique chaque
année. La recrudescence de cette maladie au cours
de ces dernières années est de plus en plus attribuée
à la pandémie de VIH/SIDA et à la
pauvreté.
Le tableau suivant constitue les statistiques obtenues
en 2008 par le Programme National de lutte contre la Tuberculose. Il nous
renseigne sur le nombre de malades dépistés par
régions
Tableau 1 : Statistiques Lutte contre la Tuberculose en
2008
Région
|
Nombre de malades TB toute forme confondue
|
% au total
|
Taux d'administration du test VIH
|
Proportion de patient VIH-TB
|
Adamaoua
|
1035
|
4%
|
66%
|
35%
|
Centre
|
1577
|
6%
|
61%
|
39%
|
Est
|
2087
|
8%
|
54%
|
45%
|
Extrême Nord
|
2586
|
10%
|
57%
|
21%
|
Littoral
|
1039
|
4%
|
85%
|
36%
|
Nord
|
1858
|
7%
|
66%
|
29%
|
Nord Ouest
|
2134
|
8%
|
94%
|
60%
|
Ouest
|
1498
|
6%
|
79%
|
39%
|
Sud
|
1039
|
4%
|
86%
|
40%
|
Sud Ouest
|
1935
|
8%
|
87%
|
46%
|
Douala
|
4682
|
19%
|
73%
|
35%
|
Yaoundé
|
3659
|
15%
|
65%
|
47%
|
Total
|
25129
|
|
72%
|
40%
|
Source : PNLT, 2008
On constate que les villes de Douala et Yaoundé
ont été comptées comme régions à part afin
de mettre en évidence l'importance de la tuberculose comme
problème de santé urbain. On constate que Douala et
Yaoundé fournissent 34% du nombre de patients du Cameroun. Faut-il le
noter, le test de VIH est recommandé à tous les malades de
tuberculose et le taux de réalisation dudit test est de 72% parmi
lesquels on a 40% des personnes ayant le VIH.
Figure 1 : prévalence de la Tuberculose (Taux pour
100 000 habitants) [7]
Figure 2 : Mortalité due à la Tuberculose y
exclu le VIH (Taux pour 100 000 habitants) [7]
Les figures 1 et 2 montrent que, la prévalence
tout comme la mortalité due à la tuberculose a suivi une
évolution presque semblable de 1990 à 2008. Une forte croissance
de ses indicateurs a été observée durant la période
1990-2000. Ensuite cette tendance c'est vue clairement inversés
après les années 2004. Ses indicateurs, bien qu'ayant pas encore
atteint les taux qu'ils détenaient en 1990, ne cessent de
décroitre et ainsi à s'améliorer dans le
temps.
En 2009, 25 174 cas de tuberculose ont
été dépistés. Soit une quasi stagnation de la
situation de la lutte au regard des chiffres de l'année 2008. Le nombre
de malades qui acceptent de faire le test de dépistage de l'infection au
VIH/Sida a augmenté passant de 18 671 à 18 677 entre 2008 et
2009. Et 42% d'entre eux ont été déclaré
positifs.
Le financement de la lutte contre la tuberculose
dépend en partie des apports extérieurs notamment du Global Fund
et des ressources PPTE. En 2003, ce Fonds a octroyé à cet effet
près de 3 milliards de FCFA au Cameroun, qui ont permis de stabiliser le
financement du programme, et de rendre concret la gratuité du test VIH
pour les malades tuberculeux. Depuis la même année, les ressources
PPTE financent des activités de lutte contre la tuberculose [8].
Aujourd'hui, la contrepartie du Cameroun au Fond Mondial est de 50%. Comme
progrès notables on peut relever:
v' La formation des personnels et l'équipement de
nombreux centres de dépistage et de traitement (CDT) à travers le
pays ;
v' La réduction des coûts de traitement pour
les malades (1 000 FCFA pour le dépistage et le suivi biologique et
gratuité du médicament).
v' Un succès thérapeutique de 78% de
malades tuberculeux pulmonaires à microscopie positive (TPM+) mis sous
traitement en 2008.
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