L'espace web du sénégal : étude de son degré d'ouverture ´ travers l'analyse des liens hypertextes( Télécharger le fichier original )par El Hadji Malick GUEYE Université Paris 10 Nanterre - Master de Recherche 2005 |
I.2.2 Le Web : entre virtualité et réalité ?Notre approche pour cette question n'est pas de la réduire en une logique dialectique, de démontrer que le Web est soit l'un, soit l'autre. Car, vu que le caractère virtuel du Web ne fait aucun doute, nous voulons essayer de voir dans quelle mesure cette virtualité peut-elle revêtir, dans son élaboration, dans son fonctionnement ou dans ses impacts, une certaine idée de la réalité. Il s'agira d'aller chercher, au-delà des technologies de connexion, du transport des paquets de données et des liaisons hypertextuelles (à première vue instantanées et sans réels motifs), les raisons de leur élaboration et de leur donner ainsi une intelligibilité cognitive en rapport avec des considérations politiques, économiques, sociales, culturelles... Concernant Internet dans son ensemble, (...) en dépit de la promesse d'une ubiquité dans la connectivité, l'Internet est un réseau sélectif qui reflète la géographie physique et le développement économique12(*). Plus précisément, il apparaît clairement que le déploiement des infrastructures d'accès comme les câbles, les satellites, (bref tout ce qui compose la couche physique du réseau) est le fait d'une réelle volonté politique et obéit à des considérations économiques et financières. On est loin de la virtualité comme le soulignent Barthelemy Marc, Gondran Bernard, Guichard Eric (2003) : « The Internet infrastructure is not virtual : its distribution is dictated by social, geographical, economical, or political constraints 13(*)». Pour illustration, les cartographies faites sur ces infrastructures au niveau planétaire donnent une vision assez nette de la fracture numérique avec les pays développés constituant le noeud de ces dispositifs et les pays du tiers monde (avec des contrastes) bénéficiant seulement de quelques ramifications. D'où les propos de Matthew Zook : « L'Internet n'est pas en train de détruire la géographie mais connecte de manière sélective certaines personnes et certains lieux au sein de réseaux hautement interactifs, et dans le même temps en contourne largement d'autres14(*)». S'agissant de l'univers du Web et de la virtualité proprement parlée, cette interaction (directe ou indirecte) avec la réalité est beaucoup moins évidente. Donner une quelconque intelligibilité et une signification pratique (qui s'appuieraient sur la réalité) au déploiement des sites Web, de leur interconnexion et de l'organisation hypertextuelle de la toile est un peu difficile pour la raison suivante : les raisons et motivations qui peuvent être à l'origine de la création d'un lien hypertexte sont de plusieurs sortes (voir page 54). En terme d'analogie entre bibliométrie et wébométrie, si les citations permettrent, dans une certaine mesure, une représentation assez nette des relations entre centres d'intérêt, chercheurs, institutions et pays grâce notamment aux modes de fonctionnent des revues et aux règles de complication des banques de données comme Thomson ISI, on ne peut pas en dire autant pour les « sitations » quant à l'organisation et la compréhension du Web. Cependant, certaines études ont essayé de dépasser ces limites des liens hypertextes et de jeter un pont entre la virtualité et la réalité. Mike Thelwall15(*) a essayé de voir si la distance géographique entre les universités britanniques influerait sur le degré d'interconnexion de leurs sites Web. Son étude qui concernait 109 universités est arrivée au constat suivant : plus leur distance géographique est petite, plus elles ont tendance à se « siter » : (...) universities are still most likely to be linked to their neighbours. Cependant, il a évité d'en faire une généralité à cause notamment du problème des motivations des « sitations » et de la relative spécificité des sites universitaires. Par ailleurs, les gTLDs (comme .com, .org, .edu) et les ccTLDs (ex. .sn pour le Sénégal et .fr pour la France) vont permettre à ceux qui s'intéressent à la représentation spatiale du Web davantage de précision et de « fidélité » par rapport à la géographie physique. Les cartes de Martin Dodge16(*) montrent les différentes possibilités qu'ils offrent. La cartographie de la ville de New York par le biais de la répartition des domaines (.com.) réalisée par Matthew Zook17(*) en est aussi un exemple. Sa carte laisse apparaître une concentration trop importante de ces noms de domaines autour de l'île de Manhattan et Wall Street, ce qui « peut » révéler la présence d'une activité économique, financière ou commerciale assez dynamique. * 12 ZOOK, Matthew. Etre connecté est une affaire de géographie. Traduit par Eric Bernard. In : Networker, septembre 2001, Vol 5, n°3, pp.13-17. Disponible aussi sur l'URL : http://www.zooknic.com/info/Zook-netWorker-2001.pdf * 13 BARTHELEMY Marc, GONDRAN Bernard, GUICHARD Eric. Spatial structure of the Internet traffic. In : Physica A: statistical mechanics and its applications, vol. 319, 2003, p.633-642. Disponible aussi sur l'URL : http://fr.arxiv.org/abs/cond-mat/0208553 [page consultée le 23/02/05] * 14 Ibid. * 15 THELWALL Mike. Evidence for the existence of géographique trends in université web site interlinking. In : Journal of Documentation, 58(5), 2002. * 16 Voir www.cybergeography.org * 17 http://mappa.mundi.net/maps/maps_016/ [site visité le 28/02/05] |
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