DEDICACE
A mon père ;
A ma mère ;
A mes frères et soeurs ;
Axelle NZITONDA
REMERCIEMENTS
La rédaction d'un travail de recherche ne saurait
être l'oeuvre exclusive d'une seule personne ; il serait trop
prétentieux d'affirmer que c'est sans le concours d'autres personnes que
nous sommes venus à bout de ce travail.
Nos sincères remerciements vont aux diverses
autorités de l'Université Lumière de Bujumbura et plus
particulièrement au corps professoral de la Faculté de Droit
à qui nous devons cette formation universitaire. Notre profonde
gratitude va spécialement au directeur de ce mémoire, Monsieur
Déo NTAHONKIRIYE qui a accepté malgré ses multiples
occupations de diriger notre travail. Ses conseils judicieux qu'il n'a
cessé de nous prodiguer ont été d'un précieux
encadrement.
Notre éducation et formation scientifique sont
largement tributaires de notre entourage depuis notre enfance jusqu'à ce
jour. Nous pensons spécialement à notre père pour son
encouragement, à notre mère pour son soutien, à nos
frères et soeurs, à nos cousins et cousines sans oublier nos amis
et nos collègues étudiants.
Que soient associées à cette reconnaissance les
différentes instances judiciaires et diverses associations de
défense des droits de la personne humaine pour avoir gentiment mis
à notre disposition les informations dont nous avions besoin lors de
notre recherche. Nos sentiments de reconnaissance vont plus
particulièrement à Madame Josiane KARIRENGERA et à
Monsieur Joseph MUJIJI qui ont bien voulu consacrer une partie de leur temps
précieux pour nous guider durant notre parcours permettant ainsi la
réalisation de ce travail.
Enfin, que toute personne qui de près ou de loin a
contribué à la réalisation de ce travail d'une
façon ou d'une autre trouve ici l'expression de notre profonde
gratitude.
Axelle NZITONDA.
SIGLES ET
ABREVIATIONS
A.D.N : Acide Désoxyribonucléique.
art. : Article.
al. : Alinéa.
A.S.F : Avocats Sans Frontières.
B.O.B : Bulletin Officiel du Burundi.
C.O.C.J : Code d'Organisation et de la Compétence
Judiciaires.
C.P : Code pénal.
C.P.P : Code de procédure pénale.
D.L : Décret-loi.
D.P.S : Droit pénal spécial.
Ed. : Edition.
etc. : Et cætera.
Ibidem : Même auteur, même ouvrage et même
page.
Idem : Même auteur, même ouvrage.
M.P : Ministère public.
M.S.F : Médecins Sans Frontières.
M.S.T : Maladie Sexuellement Transmissible.
O.M.P : Officier du ministère public.
O.P.J : Officier de police judiciaire.
op. cit. : Opere citato (ouvrage déjà cité).
p. : page.
PJP : Police Judiciaire des Parquets.
PSI : Police de Sécurité Intérieure
P.U.F : Presses Universitaires de France.
RCN : Réseau des Citoyens-Citizen Network.
R.D.P.C : Revue de Droit Pénal et de Criminologie.
T : tome.
T.G.I : Tribunal de Grande Instance.
U.B. : Université du Burundi.
U.L.BU : Université Lumière de Bujumbura.
VIH/SIDA : Virus d'Immuno déficience Humain / Syndrome
d'Immuno
Déficience Acquise
Vol. : volume.
INTRODUCTION
GENERALE
La police judiciaire burundaise affiche dans ses statistiques
sur la criminalité un taux très prononcé pour les
infractions à caractère sexuel aussi bien
précisément les cas de viol à l'encontre surtout des
femmes, des jeunes filles majeures que mineures et parfois des jeunes
garçons. Ce fléau n'a pas cessé d'augmenter malgré
les cris de nombreuses personnes et associations et vient par conséquent
exacerber, avec cette hausse, l'état déjà critique du
peuple burundais s'agissant de la contamination des maladies sexuellement
transmissibles et surtout du SIDA.
La meilleure solution à adopter serait de
réserver aux auteurs de ce crime une répression exemplaire afin
de les intimider et éradiquer l'impunité qui les encourage. Cela
pourrait sans doute contribuer à réduire le nombre de crime de ce
genre comme la peine joue entre autre la fonction d'intimidation et
d'exemplarité.
Mais de toutes les façons, il ne suffit pas
d'appréhender et de condamner, il faut aussi prouver que la personne
appréhendée est réellement responsable du crime qui lui
est reproché. En effet, la personne coupable d'un tel fait
répréhensible n'est pas automatiquement repérée,
dénichée et jugée sans risque d'erreur ou de confusion. Il
ne suffit pas donc de trouver encore faut-il prouver.
Notre travail aura pour fin entre autres d'analyser le
régime juridique burundais en matière de l'infraction de viol et
de faire état du déroulement de l'activité judiciaire
effectuée par les organes compétents des différentes
autorités publiques chargées de la répression dès
la commission de l'infraction jusqu'à l'identification et la
condamnation de son auteur en passant par les enquêtes policières,
l'instruction préparatoire et le jugement.
Comment savoir que telle personne a violé telle autre ?
Quand la victime est mineure, l'expertise médico-légale qui fait
état de lésions locales est souvent le seul élément
de preuve disponible. Lorsque la victime est majeure, les enquêteurs ont
tendance à vérifier si elle a crié, appelé au
secours les voisins ou les passants, futurs témoins tant oculaires
qu'auriculaires. L'expertise médicale n'indique pas grand-chose surtout
que les majeures ont pour la plupart perdu leur virginité.
Le juge aussi étant en principe déterminé
dans sa décision est très souvent déçu à
cause de la fragilité de cette insuffisance de preuves. On remarquera
aussi que l'examen médical possible au Burundi ne parvient pas à
indiquer l'identité du violeur et cela amènera l'accusé
à nier les faits en avançant que peut être un autre en est
responsable. Par ailleurs, le témoignage à charge est parfois
corrompu ou incomplet.
A cet égard deux questions se posent. Primo il convient
de se demander si la législation pénale burundaise dispose d'un
régime juridique spécial de preuve en matière de viol. En
outre, une preuve reste fragile et ne parvient pas à convaincre le juge
qui est vaincu par le doute comme le dit l'adage « in dubio pro reo
».1(*) Face
à ce doute, la juridiction risque d'acquitter un vrai coupable ou
condamner un pur innocent. Secundo, comment renforcer sinon améliorer le
droit de la preuve en matière de viol ?
Nous aurons vu que la tâche n'est pas aussi facile qu'on
peut le croire. D'où le choix de notre travail intitulé :
« Problématique d'administration de la preuve de l'infraction
de viol en droit pénal burundais. »
Ce travail est inscrit dans le domaine du droit pénal
et la période de notre recherche est prise en compte dans la
démarche scientifique que nous avons entreprise. Et notre étude
se situe sur toute l'étendue du territoire national. La méthode
utilisée est la méthode analytique qui nous aide à
analyser les données recueillies des rapports, des ouvrages, de
jurisprudence et autres documents en vue de les interpréter et tirer les
conclusions y relatives.
Conscient donc du problème de l'insuffisance de moyens
de preuves en matière de crime de viol au Burundi, les objectifs majeurs
de notre travail sont premièrement de définir le crime de viol,
de faire état de sa propagation et sa gravité, de
témoigner des diverses difficultés éprouvées par
les organes de poursuite pour établir la véracité des
charges contre l'accusé et enfin de proposer sinon suggérer les
voies solutionnaires en la matière.
A part l'introduction générale, notre travail se
focalisera sur trois chapitres. Le premier chapitre est axé sur les
généralités. Il sera question d'apporter des
éclaircissements sur la notion du viol et d'autres infractions voisines.
Nous montrerons la problématique de la définition du viol et ses
différentes formes tout en étudiant ses éléments
constitutifs dont l'élément légal, matériel et
moral.
Le deuxième chapitre sera tout d'abord consacré
à l'étude de la preuve en matière pénale et ensuite
nous analyserons les preuves qui sont spécifiquement abordées en
cas de viol. Nous aurons aussi à démontrer leur
précarité.
Le troisième chapitre concerne les perspectives de
renforcement des moyens probatoires dans la lutte contre le crime de viol. Il
débute par l'étude critique ayant trait à l'état
fragile des voies probatoires disponibles au Burundi et débouche sur
diverses techniques modernes de recherche des preuves qu'il importe
d'intégrer dans notre droit de la preuve.
Une conclusion générale émaillée
de suggestions, de considérations personnelles et de recommandations
bouclera notre travail.
CHAPITRE I :
DES GENERALITES
En dépit du fait que certains mouvements ont
déposé les armes, le phénomène de violences
sexuelles et surtout du viol a pris une allure plutôt inquiétante
ces derniers temps. En effet, ce fléau gagne du jour au lendemain
beaucoup plus de terrain semant ainsi une grande terreur dans le pays d'autant
plus que sa preuve est généralement très difficile
à apporter.
Section I :
Notions générales
Nous ne pourrait pas étudier le problème de la
preuve de viol sans toutefois savoir ce que c'est le viol. Il convient de faire
tout d'abord un bref aperçu sur le phénomène de viol. Nous
essaierons donc d'apporter une définition du concept de viol, d'en
cerner les formes afin qu'on puisse parvenir à faire une distinction de
ce crime avec les autres infractions à caractère sexuel.
§1.
Définition de l'infraction de viol
Sans le définir, la législation burundaise dans
le code pénal prévoit et punit le viol. L'article 385 fait
sous-entendre que le viol est toute relation sexuelle obtenue par la violence.
Le législateur assimile à cette violence, la relation sexuelle
obtenue par menaces graves, par ruse, par abus de la personne qui par l'effet
d'une maladie, par l'altération de ses facultés ou par toute
autre cause accidentelle aurait perdu l'usage de ses sens ou en aurait
été privée par quelque artifice.2(*)
Nous remarquons à partir de cet article que le viol
n'est pas défini. Le législateur se contente seulement de citer
les peines sans toutefois définir l'infraction. Cela s'avère
lacunaire car la définition fournie par le texte doit être la plus
précise possible parce que la précision de la loi est une
condition de la légitimité de l'incrimination.
A défaut d'une définition légale et
stable, la jurisprudence et la doctrine considèrent que le viol est le
fait d'imposer des relations sexuelles à une femme contre sa
volonté. Toutes les autres formes de la fureur sexuelle étaient
réprimées sous la qualification d'attentat à la pudeur. Le
viol suppose donc selon cette jurisprudence, l'introduction du membre viril de
l'homme dans les parties génitales de la femme. Il s'en suit que le
coupable du viol soit un homme pendant que la victime soit
nécessairement une femme. Partant, le fait d'introduire dans l'organe
génital d'une femme, malgré sa résistance, le doigt ou
tout autre objet de nature quelconque, ne pourrait être poursuivie que
sous une autre qualification d'attentat à la pudeur. Il en serait ainsi
de même si ces agissements avaient eu pour effet de déchirer
l'hymen et déflorer une vierge.
A titre d'illustration, le tribunal de grande instance de
Bujumbura mairie siégeant à Bujumbura en matière
pénal a reconnu coupable d'attentat à la pudeur et non de viol
mademoiselle Chantal M. En effet, celle-ci excitée a amené
l'enfant Jean N. de six ans dont elle avait en charge comme bonne dans sa
chambre et déshabillée elle a placé l'enfant au dessus
d'elle mais l'enfant n'a pas pu la pénétrer.3(*)
Elle a été reconnue coupable d'attentat à
la pudeur et non de viol car selon la jurisprudence, une femme ne peut se
rendre coupable de viol.
VERON, partage aussi cette idée en disant qu'il y a
viol quand un homme impose à une femme une conjonction sexuelle contre
son gré ou sans son consentement libre. Le coupable ne peut être
qu'un homme et la victime qu'une femme.4(*)
Selon le dictionnaire juridique, le viol est défini
comme étant un crime consistant en tout acte de
pénétration sexuelle de quelque nature que ce soit commis sur la
personne d'autrui par violence, menace, contrainte ou surprise.5(*)
Quant au dictionnaire pratique du droit humanitaire, le viol
consiste dans le fait de soumettre un individu par la force ou la violence
à une relation sexuelle non volontaire.6(*)
Dans la législation française par contre, la
définition du viol est allée en évoluant selon RASSAT.
En effet, la loi de 1810 de la législation
française ne définissait pas le viol et la doctrine
considérait que le viol consistait dans le fait de «
connaître charnellement une femme sans la participation de sa
volonté » ou encore dans «le coït illicite avec une femme
qu'on sait n'y point consentir. » Le caractère matériel de
viol consistait donc spécifiquement dans une conjonction sexuelle,
c'est-à-dire l'introduction d'un membre viril de l'homme dans la
cavité vaginale de la femme.7(*)
Avec l'évolution du droit, le domaine du viol a
été élargi afin de supprimer toute discrimination de
nature sexuelle entre les auteurs potentiels de l'infraction. Le viol devient
donc avec le code de 1980 « tout acte sexuel de quelque nature qu'il
soit imposé à autrui. »8(*)
Cette définition se montrât très vague et
ne permettait pas de faire une distinction du viol avec les autres infractions
de nature sexuelle notamment l'attentat à la pudeur.
On adopta donc à la fin, une autre définition
selon laquelle le viol est « tout acte de pénétration
sexuelle de quelque nature qu'il soit commis sur la personne d'autrui par
violence, contrainte, menace ou surprise. »9(*) Cette définition a été
reprise par le code pénal français actuel.
Cette définition marque un progrès
considérable dans la recherche d'une définition précise et
stable. Elle offre de nombreuses possibilités de poursuivre le viol sous
toutes ses formes, notamment les actes de pénétration anale
(sodomisation) ou buccale (fellation) commis au moyen du sexe. Elle permet de
poursuivre également le viol avec introduction d'objet quelconques dans
le vagin ou l'anus de la victime dans un but sexuel.
C'est en se basant sur cela que nous préférons
retenir comme définition qui va nous guider au cours de notre travail,
le fait que le viol est : « Tout acte de pénétration
sexuelle de quelque nature qu'il soit et de quelques moyens que ce soit commis
sur la personne d'autrui par violence, menace, contrainte, surprise ou en
abusant de la personne de la victime ».
§2.
Eléments constitutifs
Le viol ainsi défini présente quelques
éléments qui le caractérisent et permettent de le
distinguer à d'autres infractions. Ce sont ces éléments
que nous allons analyser dans ce paragraphe.
I.
L'élément légal
Le législateur doit définir l'incrimination en
la précisant, et notamment en décrivant les moyens de parvenir
à ce résultat qui, seuls seront incriminés.10(*)
L'infraction consiste dans la violation de la loi
pénale. L'élément légal réside donc dans le
fait que cette infraction soit prévue et punie par la loi. En effet, la
définition fournie par le texte doit être la plus précise
possible parce que d'une part la précision de la loi est une condition
de la légitimité de l'incrimination, d'autre part la règle
correspond à une pure exigence technique, dans la mesure où elle
est une condition de l'efficience de l'incrimination.11(*)
L'infraction de viol est punie et prévue par le code
pénal burundais du 4 avril 1981 dans ses articles 385 à 387 parmi
les infractions contre la famille et la moralité publique.
L'article 385 dispose que : « Est puni de servitude
pénale de cinq à vingt ans, celui qui aura commis un viol, soit
à l'aide de violence ou menaces graves, soit par ruse soit en abusant
d'une femme qui, par l'effet d'une maladie, par l'altération de ses
facultés ou par tout autre cause accidentelle, aurait perdu l'usage de
ses sens ou en aurait été privée par quelque
artifice.
Est réputé viol à l'aide de violence,
le seul fait du rapprochement charnel des sexes commis sur les personnes
désignées à l'article 382. »
La réclusion criminelle est de cinq à vingt
ans.
Le viol est puni de mort ou de la servitude pénal
à perpétuité lorsqu'il a causé la mort de la
personne sur laquelle il a été commis.12(*)
Le minimum de la peine est doublé dans le cas où
il a été commis :
« - Par une personne particulière (ascendant
légitime, naturel ou adoptif ou par une autre personne ayant
autorité sur la victime, personne abusant de l'autorité que lui
confère ses fonctions).
- Dans les circonstances particulières (par
plusieurs auteurs ou complices).
- En ayant causé à la victime une
altération grave de la santé. »13(*)
II.
L'élément matériel
L'élément matériel est l'action ou
l'omission illicite permettant de parvenir au résultat prohibé.
Une action existe par son activité matérielle qui est la
manifestation extérieure de l'infraction.14(*)
L'élément matériel du viol est
composé non seulement d'un acte qui implique le recours à la
violence, la menace, la contrainte ou la surprise mais aussi et surtout de la
pénétration sexuelle commise sur la personne d'autrui.
1. Notion
de pénétration sexuelle
La qualification du viol doit être retenue dès
lors qu'une pénétration sexuelle a été
réalisée sur la personne de la victime. Le résultat du
viol est ainsi également réalisé en cas de
pénétration buccale (fellation), pénétration
vaginale, pénétration anale (sodomisation) ou même en cas
d'introduction d'un objet dans le vagin ou l'anus de la personne de la victime.
Dans ce cas, le viol peut donc être commis indifféremment par un
homme ou une femme sur un homme ou une femme.
Mais pour que la pénétration vaginale puisse
être valablement retenue comme qualifiant le viol, il doit revêtir
deux caractères principaux.
Premièrement, la pénétration doit
être commise sur la personne d'autrui. Ceci implique que le viol ne peut
être commis que sur une personne vivante. La pénétration
sexuelle sur un cadavre peut en revanche tomber sur le coup de la qualification
d'atteinte à l'intégrité du cadavre.15(*) Au Burundi, le code
pénal prévoit et puni quiconque aura, dans une intention
coupable, fouillé une personne en état d'inconscience ou
trouvée morte.16(*)
Le viol n'est également constitué que si la
pénétration est pratiquée sur la personne de la victime.
Le crime de viol n'est caractérisé que si l'auteur réalise
l'acte de pénétration sexuelle sur la personne de la
victime.17(*)
Deuxièmement, la pénétration doit
être de nature sexuelle. Ceci désigne toute
pénétration par le sexe, qu'elle soit vaginale ou orale et toute
introduction de corps étrangers dans le sexe ou l'anus dans un but
sexuel ; que ce soit par la main ou d'autres objets. Et dans ce cas, le viol
d'un homme par une femme est envisageable.18(*)
Le critère de pénétration sexuelle
évite donc que de simples attouchements ou des comportements analogues
soient considérés comme du viol. Il ne peut y avoir de viol en
l'absence de pénétration par le sexe ou par un autre objet
quelconque, il doit s'agir d'une pénétration sexuelle. Des actes
de pénétration dépourvus de cette dominante sexuelle ne
pourront être qualifiés de viol.
La présence de l'élément sexuel
s'apprécie en fonction des normes ayant cours en matière de
comportement sexuel et sur base d'un facteur subjectif qui est la motivation
sexuelle dans le chef de l'auteur. Ces deux aspects doivent être
réunis. Dès qu'on se trouve en présence d'une
pénétration sexuelle, la localisation de celle-ci n'a plus aucune
importance : le viol peut consister tant en une pénétration
vaginale qu'en une pénétration anale ou buccale. Il n'y a pas de
distinction entre la pénétration par le sexe ou par un objet.
2. Absence
de consentement
Le consentement de la victime est l'adhésion
donnée d'avance par une personne à une infraction portant
atteinte à ses droits. Il ne supprime pas légalement l'infraction
sauf si celle-ci exige pour sa constitution une fraude ou une
violence.19(*)
En matière de viol, c'est le non consentement de la
victime qui caractérise le viol. Ce défaut de consentement peut
résulter des moyens employés par l'agresseur pour imposer sa
volonté. C'est notamment la violence, les menaces, la ruse, la
contrainte, surprise ou en abusant de la personne de la victime.
Quand la victime est un mineur, cette absence de consentement
n'est pas requise pour que l'infraction soit constituée. En effet, la
loi présume qu'un enfant de moins de 18 ans ne peut pas donner un
consentement légalement valable. Ce qui fait que la personne majeure qui
a des relations sexuelles avec un mineur même consentant se rend coupable
d'une infraction de viol.
En cas de viol, on entend par violence, des violences
physiques ou morales contre la personne dont on veut abuser, à
l'exclusion des violences intermédiaires telle que l'effraction d'une
porte dans le but d'arriver à la victime. L'article 385 du code
pénal burundais assimile à la violence le fait d'abuser d'une
personne qui, par l'effet d'une maladie, par l'altération de ses
facultés ou par tout autre cause accidentelle, a perdu l'usage de ses
sens ou en a été privée par quelque artifice.
a. Violence
La violence désigne les pressions physiques
exercées sur la victime pour obtenir d'elle le comportement sexuel qu'on
souhaite.20(*) La violence
peut être directe et physique ou violence morale sur la victime. Par
violence physique, nous sous-entendons qu'il y a utilisation de la force pour
obtenir le consentement de la victime. L'agresseur exerce des pressions
corporelles pour obtenir ce qu'il désire.
Selon BOLONGO, le défaut de consentement
s'établit aisément lorsque la femme n'a cédé
qu'à la force. Il n'est même pas requis qu'elle ait
conservé sur son corps les traces de brutalités de l'assaut dont
elle a été victime ou qu'elle ait crié au secours. Il en
est ainsi évidemment de la femme à qui un agresseur impose la
conjonction sexuelle après une lutte et qui n'a cessé de
résister qu'à cause de la supériorité musculaire de
l'homme.21(*)
b. Les
menaces
La menace supprime le consentement et caractérise
l'agression. La violence morale résulte des menaces reçues par la
femme pouvant inspirer à celle-ci la crainte sérieuse et
immédiate d'exposer sa personne ou celle de ses proches à un
péril considérable et imminent.22(*)
La menace est en effet toute forme d'expression morale. Elle
se confond avec la contrainte morale par le fait que tous les deux consistent
à menacer quelqu'un de lui faire du mal à lui ou à ses
proches, voire de causer du tort à ses biens.
Ainsi, pour BOLONGO, constituent un viol à l'aide de
menaces :
- Le fait de se livrer à un patron sous menace de
licenciement,
- Le fait de céder à la suite d'une menace
d'arrestation de la part d'un gendarme,
- Le fait pour une femme mariée surprise en flagrant
délit d'adultère de se livrer à un témoin qui la
menacerait de la dénoncer à son mari. 23(*)
c. Surprise
Pour le cas de la surprise, le défaut de consentement
peut résulter d'un acte commis à l'insu des
intéressés. Il faudra comprendre le mot « surprise »
dans le sens juridique de tromperie et non dans le sens commun
d'étonnement.
C'est le cas d'un agresseur qui s'introduirait dans le lit
d'une femme marié, la nuit pour se livrer à des attouchements et
qui parviendrai à avoir des rapports sexuels avec elle, alors qu'elle
croyait se livrer à son mari.24(*)
Sera également poursuivi de viol par ruse un
féticheur qui aurait des relations sexuelles avec une femme
mariée stérile qui chercherait à avoir des enfants en lui
affirmant faussement que c'est le seul moyen pour elle de concevoir.25(*)
d. Abus
d'une personne
Il y a abus de la faiblesse de la victime lorsque celle-ci,
à raison de son état physique ou de son état mental, est
dans l'incapacité de consentir.26(*)
L'infirmité ou la déficience qui porte sur
l'état physique ou sur l'état mental de la victime peut
être définitive, mais aussi temporaire et résulter à
titre d'exemple, de l'absorption d'un médicament, de l'alcool ou de la
drogue.27(*) C'est le cas
pour l'agresseur qui profiterait de l'état d'évanouissement ou de
l'état d'ivresse de la victime pour la violer.
III.
L'élément moral
Par élément moral, on entend aussi
l'élément intellectuel ou psychologique. Cet
élément détermine la psychologie, l'attitude
intellectuelle, l'état d'esprit lors de la commission de
l'infraction.
Le viol est un crime, donc une infraction intentionnelle.
Cette intention est constituée dès lors que l'auteur a la
volonté ou la conscience d'imposer des rapports non
désirés à la victime. Il existe une difficulté
lorsque l'auteur explique qu'il s'est mépris sur l'absence de
consentement. Les tribunaux vont alors apprécier le défaut
d'intention de l'auteur selon les circonstances.
Le viol n'est donc constitué tout d'abord que si
l'auteur a voulu l'acte de pénétration sexuelle et ensuite que
s'il l'a perçu comme tel. Le caractère volontaire de l'acte ne
pose pas en principe de difficulté et découlera de la nature de
l'acte accompli.28(*)
Pour montrer que l'acte de pénétration a
été perçu comme tel par l'auteur du viol, il faut en
revanche établir deux éléments :
1° Que l'auteur a eu conscience d'aller à
l'encontre de la volonté de la victime. Cette conscience est le plus
souvent établie par la nature des actes accomplis. Ainsi celui qui a
employé la violence pour arriver à ses fins comme celui qui
accomplit le viol sur une victime inconsciente ne peut qu'avoir conscience de
l'absence de consentement de la victime : à défaut en effet, il
n'aurait pas employé ces moyens ou exploité ces
circonstances.29(*)
2° Que l'auteur a eu conscience d'accomplir un acte de
nature sexuelle. Cette conscience pourra être déduite de la
matérialité même de ces actes. Celui qui impose par exemple
à la victime d'accomplir une fellation peut difficilement
prétendre ne pas avoir conscience de la nature sexuelle. C'est la preuve
de l'élément matériel qui détermine
l'élément moral.30(*)
§3. Quid
de la tentative de viol
Il y a tentative de viol, lorsqu'un agresseur tente ou menace
de commettre un viol ou d'imposer toute forme de relation sexuelle à
autrui sans son consentement. Lors d'une tentative de viol, il peut y avoir
rapprochement ou contact des sexes avec ou sans éjaculation.31(*)
Selon l'article 9 du code pénal, la tentative est punie
de la même peine que pour le crime et le délit consommé.
Par cet article, celui qui tente de commettre un viol et qu'on parvient
à l'en empêcher avant d'arriver à son but est puni de la
même peine que pour le viol consommé.
On observe par contre que la jurisprudence et la doctrine
dominante au Burundi ne révèlent aucun cas de tentative de viol
punissable comme telle. Toutes les situations ont été
réprimées comme attentat à la pudeur.
Pour LEVASSEUR, il est très rare qu'on poursuive pour
tentative de viol parce qu'il faut que le ministère public fasse la
preuve que l'individu avait l'intention de violer. Cette preuve serait
difficile à donner si l'auteur de l'infraction qui par hypothèse
n'a pu la réaliser par suite des circonstances indépendantes de
sa volonté n'était pas assez près de ses fins. 32(*)
Nous ne partageons pas cette idée car ce n'est pas tous
les jours qu'il est difficile d'établir que l'auteur voulait
réellement violer la victime. Et dans des cas pareils de tentative de
viol nous soutenons que l'article 9 du code pénal s'applique.
Ainsi, pour MERLE et VITU, la tentative de viol punissable
existe dès qu'il y a commencement d'exécution et une absence d'un
désistement volontaire.33(*)
Pour un mineur, cette tentative ne se distingue pas nettement
de l'acte consommé car le simple fait du rapprochement charnel des sexes
suffit pour incriminer l'auteur de viol.
§4. Les
formes de viol
L'acte de viol revêt différentes formes. On
essaiera de citer et de définir quelques formes qui sont couramment
constatées. Il s'agit ainsi du viol individuel, viol collectif, viol
avec violence et selon la qualité de l'auteur du viol, le viol
incestueux, le viol conjugal, le viol par une autorité morale et enfin
le viol en temps de guerre.
I. Le viol
individuel
Est considéré comme viol individuel si l'acte a
été réalisé par une seule personne. Souvent le viol
individuel est prémédité car il est préparé
et généralement l'agresseur connaît la victime.
II. Viol
collectif
Est considéré comme viol collectif si l'acte est
réalisé par deux ou plusieurs personnes sur une seule victime. Ce
cas est généralement constaté en temps de conflits
armés. Cette forme de viol s'est beaucoup répandue pendant les
périodes de crises qu'a traversé notre pays. A titre
d'illustration, « Dans la nuit du 8 au 9 mai 2006, vers 2h du matin,
dans le secteur de Giko, zone, commune et province Bubanza, un groupe de six
personnes armées ont violé une fillette de 13 ans. Ces violeurs
ont ordonné à la mère de l'enfant d'aller puiser de l'eau
pour qu'ils violent l'enfant en son absence. Le matin on a retrouvé au
domicile de la victime une carte de la mutuelle de la fonction publique
contenant un billet de sortie d'un militaire, le caporal Simbiyara, de la
position de Muramba en commune Bubanza. Il avait demandé une permission
pour se rendre à Bujumbura. »34(*)
III. Viol
avec violence
Le viol avec violence est constaté quand le violeur a
fait recourt à la force pour arriver à ses fins. Par force on
sous-entend par exemple les coups qui peuvent causer des blessures ou parfois
même entraîner la mort. En guise d'illustration, « En date
du 9 juillet 2006, sur la colline Sampeke, Zone Bigina, commune Kayogoro, deux
hommes répondant aux noms de Ntukamazina et Nzaniye ont
été pointé du doigt pour avoir violé et
étranglé leur victime du nom de Mélanie, épouse de
Kabura, tout près du domicile de la victime. Cette dernière
rentrait du marché. Les présumés auteurs ont
été arrêtés. »35(*)
IV. Viol
incestueux
Le viol incestueux est réalisé quand le violeur
est une parenté de la victime. Il peut s'agir du père, de la
mère, d'un frère ou un oncle, ... Rappelons aussi que c'est une
forme aggravante de l'infraction de viol. Ainsi, « En date du 17
août 2006, vers 17h en commune urbaine de Cibitoke, quartier Bubanza,
14ème avenue, n°53, un homme a violé sa propre
fillette âgée de 8 ans. La mère de la victime a vu un
liquide blanc sur le sous vêtement de sa fille, puis elle lui a demande
d'où elle était venue. La victime a répondu que son
père avait introduit son sexe dans le sien et avait « uriné
» un liquide blanc sous son sous vêtement. La victime a
ajouté que ce n'était pas pour la première fois. Souvent
en l'absence de sa mère, son père l'appelait dans la chambre pour
lui faire cela. L'auteur a accepté les faits devant sa femme. La
mère de la victime a porté plainte en justice. »36(*)
V. Viol par
une autorité morale
Il s'agit d'une forme de viol qui est constaté dans les
organisations et les communautés où les autorités
profitent de leur position pour abuser de leurs subalternes. C'est aussi une
circonstance aggravante de l'infraction de viol. A titre
d'illustration,« En date du 13 janvier 2006, le Directeur de
l'école primaire de Gitibu Ndinzamagambo Dismas de 35 ans, originaire de
la colline Gikungere, commune Butaganzwa, marié père de deux
enfants a violé une jeune fille fraîchement affectée
à son école. Le violeur a intimé l'ordre à sa
victime de passer dans son bureau, pour la finalisation d'un rapport et quand
cette dernière est arrivée dans son bureau le directeur est
passé à l'acte. Ce dernier a été détenu au
cachot de la PSI Kayanza. »37(*)
VI. Viol
conjugal
Les violences sexuelles conjugales ébranlent le
fondement de relations hommes-femmes dans une société où
la sexualité, même tabou, définit l'essence des relations
féminin-masculin. Celui qui est censé être protecteur pour
la femme devient dans ce cas l'agresseur, un loup qui s'ignore.38(*)
En effet le viol conjugal est un rapport sexuel forcé
par un des conjoints sans le consentement de l'autre.
Cependant, le consentement aux relations sexuelles entre
époux est plus difficilement mis en doute. Entre époux, il y a
une présomption de consentement.
Selon DURRIEU-DIEBOLT et WANQUET, lorsqu'une procédure
de divorce est ouverte, il n'y a aucun problème. Le viol est reconnu
dès lors que les conditions générales sont remplies.
Le problème se pose quand le viol est commis durant le
mariage. Pendant longtemps, la justice présumait le consentement des
époux et cela ne permettait pas de retenir le viol d'un mari à
l'égard de sa femme. Les seuls cas ayant entraîné une
condamnation étaient des viols accompagnés de violences proches
de la torture.39(*)
Certains pays sont finalement arrivés à admettre
l'accusation de viol d'une femme par son mari dont par exemple la France et la
suisse.
La France a retenu depuis 1992 comme circonstances aggravantes
la qualité du conjoint en cas de violences conjugales et la
jurisprudence reconnaît le viol conjugal. Ainsi, en 1992, la chambre
criminelle de la cour de la cassation a rendu une décision de principe
qui admet que le viol peut être constitué entre époux et ce
même en l'absence de violence autre que la seule
pénétration sexuelle. Ceci signifie qu'il n'existe plus de
présomption de consentement des époux aux actes sexuels accomplis
dans l'intimité du mariage ou du moins si elle existe, elle supporte
aujourd'hui la preuve du contraire.40(*)
Quant à la Suisse le viol entre époux est
poursuivi d'office depuis le 1er avril 2004 ; auparavant,
l'infraction n'était poursuivie que sur plainte.41(*)
Le viol conjugal n'est pas prévu par la
législation burundaise et il est très difficile de le faire
comprendre même aux femmes qui le subissent car la tradition estime
qu'une bonne femme est celle qui est soumise entièrement à son
mari.
Mais le rapport fait par la ligue burundaise des droits de
l'homme « ITEKA », démontre que le viol conjugal est une
réalité au Burundi.
Les résultats de l'enquête sont assez frappant
comme l'indique les chiffres ci-après : 33,6% des femmes contre 14,4%
des hommes affirment qu'il leur est déjà arrivé de faire
des rapports sexuels forcés dans leur vie conjugale ; 27,9% des femmes
contre 11,9% des hommes interrogés les jugent fréquents.42(*)
Nous remarquons aussi que le projet de loi portant
réforme du Code pénal de 1981 s'est soucié de
prévoir le viol conjugal en son article 552 al.1 sous le vocable du viol
domestique.
VII. Viol
en temps de guerre
Ces dernières décennies, les viols commis durant
le génocide au Rwanda et au cours de la guerre au Burundi, au
Libéria et plus récemment au Congo ont fait l'objet d'une
attention croissante de la communauté internationale.43(*)
Comme son appellation l'indique, cette forme de viol s'observe
en temps de conflits armés. En effet, ces conflits armés exposent
les femmes à un risque accru, souvent massif de violences sexuelles. On
distingue différents types de viols en temps de guerre comme par exemple
:
1° Viol comme arme de guerre : cette
forme de viol vise l'exclusion symbolique du sujet par destruction de
l'identité individuelle, culturelle et ethnique.
Il s'agit généralement des viols de masse
(perpétrés sur de nombreuses victimes), de viols multiples (une
victime est agressée à plusieurs reprises) et des viols
collectifs (la victime est agressée par plusieurs assaillants)
accompagnés le plus souvent de brutalité et de coups.44(*)
En effet, les femmes sont vues comme l'incarnation de
l'identité culturelle adverse et leur corps comme un territoire à
conquérir ou comme un moyen d'humilier les hommes de leurs
communautés. Dans certains cas, le viol est une stratégie
délibérée visant à corrompre les liens
communautaires. Il constitue une forme d'attaque contre l'ennemi et
caractérise la conquête et l'avilissement de femmes et des
combattants.
2° Viol opportuniste : les belligérants profitent
de l'avantage que leur procurent leur armes pour exiger les faveurs sexuels des
femmes de la communauté adverse, voir de la leur. Ainsi lors des
conflits armés au Burundi, les femmes n'étaient pas
violées uniquement par les combattants ennemis mais également par
les hommes de leur propre camp.45(*)
3° Les viols perpétrés par des individus
infectés par le VIH en vue de contaminer volontairement les femmes de la
communauté adverse.
4° Les violences sexuelles comme monnaie d'échange
: certaines femmes sont contraintes de consentir à des relations
sexuelles pour survivre, en échange de nourriture, d'un abri de
protection.46(*)
5° Les mariages et les grossesses imposés par la
force.
6° L'esclavage sexuel imposé aux enfants soldats
ainsi qu'aux jeunes filles et aux fillettes chargés des tâches
domestiques des belligérants.
7° La prostitution forcée ou l'esclavage sexuel
imposé aux femmes emmenées comme butin de guerre.
En somme, on dirait que malgré la fin de la guerre, le
viol n'a cessé de se répandre à l'échelle nationale
comme nous le montre le graphique de l'évolution des statistiques sur le
viol ci-dessous présenté.
Source : Rapport annuel de la Ligue
« ITEKA » sur la situation des droits de l'homme, Bujumbura,
inédit, 2007, p.101.
Au vu de ce graphique, les statistiques ci-dessus montre une
allure plutôt ascendante de la situation. Le nombre de victimes de viol a
presque doublé de l'année 2003 à 2006.
Trois réalités entourent cette montée
selon la ligue«ITEKA ». D'une part le phénomène de viol
a pris des dimensions inquiétantes. D'autre part, les victimes de ce
crime sortent de plus en plus de l'ombre, encouragées par l'existence
des structures de leur prise en charge. Enfin, même les
communautés de plus en plus sensibilisées encouragent les
victimes à dénoncer ce mal ou le dénoncent
elles-mêmes.47(*)
- Répartition des victimes selon la fonction
Nous remarquons que le phénomène de viol touche
presque toutes les catégories sociales : les écolières,
les élèves et étudiants, les cultivatrices, les
fonctionnaires, les commerçants, les domestiques, etc.
Fonction
|
Nombre de victimes
|
%
|
Ecolières
|
16
|
26,6
|
Elèves/étudiants
|
15
|
25
|
Cultivatrices
|
17
|
28,3
|
Soeurs/Frères
|
9
|
15
|
Bonnes
|
3
|
5
|
Total
|
60
|
|
Source : Bulletin d'information de la
Ligue « ITEKA » n°69, p.22.
A voir ce graphique, ce sont les cultivatrices, les
écolières, les élèves qui sont le plus souvent
touchés. On pourrait penser que c'est dû au fait que les
cultivatrices passent beaucoup plus de temps dans leur champs et que ces champs
sont le plus souvent loin de leur maison ; pour les écolières et
les élèves, en raison de leur vulnérabilité du fait
de leur âge et le fait de prendre le même chemin de l'école
tous les jours en allant à l'école les exposes beaucoup à
ce crime.
-Catégories d'auteurs du viol
Source : Rapport annuel de la Ligue
« ITEKA » sur la situation des droits de l'homme, Bujumbura,
inédit, 2007, p.102.
Ce graphique montre que sur un total de 359 cas de viol
rapportés à la Ligue « ITEKA » et dont les auteurs
présumés ont été identifiés, 63,2% de viol
ont été commis par des voisins.
Ceci est une preuve que l'entourage immédiat de la
femme et de l'enfant est devenu le moins sécurisant au moment où
dans le temps, il constituait plutôt le garde-fou le plus sûr.
Cette situation déplorable est par ailleurs plus difficile à
combattre et à éradiquer puisque même ceux qui devraient
prendre part dans le combat pour protéger les victimes de viol ont
rejoint le rang des criminels.48(*)
§5. Viol
contre la personne d'un mineur
Le code pénal burundais dispose que : « est
réputé viol à l'aide de violence, le seul fait du
rapprochement charnel des sexes commis sur la personne ou à l'aide de la
personne d'un enfant âgé ou apparemment âgé de moins
de 18 ans. »49(*)
La législation burundaise tient comme âge de
mineur l'âge de 18 ans qui est la majorité d'une personne de sexe
féminin. Mais dans ce cas la loi prend globalement l'âge de 18 ans
sans distinction de sexe. On estime donc qu'un enfant âgé de moins
de 18 ans est incapable d'émettre un consentement valable.
On comprend donc par l'article précité que pour
un mineur, il ne faut pas nécessairement qu'il y ait
pénétration, le seul fait du rapprochement charnel des sexes
suffit pour condamner l'agresseur pour viol.
Ainsi, à titre d'illustration, le tribunal de grande
instance de Gitega reconnut Monsieur Ladislas G. responsable de viol sur un
mineur de 10 ans alors que celui-ci surexcité s'était
contenté de frotter son pénis sur les cuisses de la jeune
fillette sans être parvenu à introduire son organe. Bien que le
rapport médical précisait qu'il n'y avait pas eu
pénétration, pour un mineur, les seuls faits d'avoir
essayé de la pénétrer en vain et d'avoir seulement
frotté son pénis sur les cuisses de l'enfant sont
également punissables comme viol. Monsieur Ladislas G. a
été condamné à une servitude pénale
principale de 10 ans50(*).
On ne manquerait pas non plus de mentionner que le projet de
loi portant réforme du Code pénal de 1981 va plus loin en donnant
une grande précision. Ce projet de loi dispose en son article 552
qu'« est réputé viol avec violence tout acte de
pénétration sexuelle de quelque nature qu'il soit et quelques
moyens que se soit commis par une personne adulte sur un mineur même
consentant ainsi que le seul fait de rapprochement charnel des sexes commis sur
un mineur consentant. »51(*)
On remarque donc que ce projet de loi s'est soucié de
réprimer sérieusement ce crime, car les mineurs ont
été selon le Centre SERUKA, MSF Belgique, une cible
privilégiée des violeurs.
Répartition des victimes de viol par tranche
d'âge
Mineurs
|
Mineurs de moins de 12 ans
|
Plus de 18 ans
|
1412
|
539
|
518
|
Source : Centre SERUKA, MSF Belgique,
Bujumbura.
Section 2 :
Le viol et infractions voisines
Le viol présente des confusions très
fréquentes avec les infractions qui lui sont voisines,
c'est-à-dire celles ayant un caractère sexuel. Dans le but de
dissiper toutes ces confusions et d'apporter une certaine lumière
à chacune de ces infractions pour ne plus les confondre, on va essayer
d'opérer une distinction entre elles. On se limitera au cas d'attentat
à la pudeur et de l'outrage public à la pudeur.
§1. Le
viol et l'attentat à la pudeur
Le Code pénal burundais ne définit pas
l'attentat à la pudeur, il se contente seulement d'opérer une
distinction entre l'attentat à la pudeur sans violence sur la personne
d'un enfant âgé ou apparemment âgé de moins de 18 ans
et l'attentat à la pudeur avec violence et d'en énumérer
les peines.
Il convient donc de doter cette infraction d'une
définition et d'en déterminer les éléments
constitutifs avant d'opérer toute distinction avec le viol.
L'attentat à la pudeur est défini comme un acte
impudique exercé intentionnellement sur une personne de l'un ou l'autre
sexe contre la volonté manifestée ou présumée de
celle-ci. Tout acte, tout attouchement pudique exercé sur une personne
et susceptible de blesser sa pudeur, constitue un attentat à la
pudeur.52(*)
Quant à la jurisprudence et la doctrine, elles
définissent l'attentat à la pudeur comme étant «
tout acte contraire aux moeurs exercé intentionnellement et directement
sur une personne sans le consentement valable de celle-ci. »53(*)
De part cette définition, il ressort comme
éléments constitutifs de l'attentat à la pudeur, un acte
matériel portant atteinte à la pudeur et l'élément
intentionnel.
Les dispositions du Code pénal burundais
présentent l'attentat à la pudeur sous diverses formes quant
à son exécution. Ainsi, l'attentat peut être commis avec ou
sans ruse, menaces, violences, et les peines qui l'assortissent
diffèrent selon l'atmosphère dans laquelle cette infraction est
perpétrée. La pénalité peut même être
la mort du prévenu si son forfait a causé la mort de la victime.
I. L'acte
matériel
Toute infraction comporte un élément
matériel, c'est-à-dire un comportement jugé antisocial par
le législateur et susceptible d'être objectivement constaté
de l'extérieur.54(*)
L'attentat à la pudeur requiert donc comme un acte
matériel, toute action physique, immédiate contraire aux moeurs,
exercée sur une personne. L'acte impudique doit être de nature
à offenser la pudeur ou la morale de la communauté, d'une
région ou d'un pays et pas seulement la pudeur personnelle de la
victime. Et pour être punissable, il faudra que cet acte soit
réellement immoral car un acte relevant d'une légère
impudicité ne peut être poursuivi d'attentat à la
pudeur.55(*)
II.
L'élément intentionnel
L'élément intentionnel consiste dans une
intention coupable. L'auteur doit avoir agi consciemment et avec une
volonté d'enfreindre la loi en passant un acte qu'il sait impudique.
Aussi, l'attentat à la pudeur étant une agression contre la
pudeur d'autrui, le consentement de la victime doit avoir été
violé.56(*)
En effet, la violence exercée par l'auteur est la
preuve même de l'infraction. On ne peut pas comprendre qu'une personne
puisse exercer un acte obscène et immoral sur la personne d'un jeune
enfant ou employer la violence, supercherie ruse ou menaces pour le commettre
sans connaissance de son caractère criminel.57(*) Dès que l'acte
impudique est réalisé intentionnellement, l'infraction existe peu
importe le mobile
Si l'attentat à la pudeur est commis avec violence, la
victime doit évidemment prouver qu'elle a résisté autant
qu'elle pouvait contre le délinquant qui persévérait dans
son aventure. Tout dépend aussi des circonstances du moment. Une fille
qui s'est habillée moitié nue de façon que la
quasi-totalité de ses cuisses soit perceptible aura du mal à
charger l'auteur présumé.
Une dame qui s'est montrée particulièrement
imprudente et a semblé consentir aux actes incriminés, du moins
tacitement, risque de faire conclure que l'auteur s'est trompé sur la
sincérité de sa résistance qui n'est que nulle en
réalité. De tels cas ne sont pas fréquents dans la
jurisprudence burundaise.
On comprend donc par attentat à la pudeur avec
violence, la violence physique à laquelle l'auteur fait recourt à
la force pour arriver à ses fins. Il peut s'agir des coups ou des voies
de faits. Peu importe leur gravité, les violences même
légères sont également retenues. On peut aussi comprendre
par violence, la contrainte morale qui se confond avec la menace.58(*)
En ce qui concerne l'attentat commis sans violence ni menaces
sur la personne d'un mineur de moins de 18 ans, l'absence de consentement
découle de la présomption irréfragable selon laquelle il
est censé ne pas pouvoir consentir valablement aux actes immoraux subis
ou qu'on exige de lui. Cette présomption de violence morale ne peut
être renversée même si la victime était apparemment
la séductrice. L'élément caractérisant cette
infraction est l'âge de la victime. Peu importe le sexe de
l'enfant.59(*)
En somme, le jeune âge de la victime et l'emploi de la
violence pourront constituer, selon les cas, des éléments
constitutifs ou circonstances aggravantes de l'attentat à la pudeur.
III. La
tentative
Elle ne se distingue pas nettement de l'acte consommé
car elle est comprise avec lui dans la notion d'attentat. En
conséquence, c'est ce qui contribue à différencier
l'attentat à la pudeur du viol. Il s'agit d'un commencement
d'exécution. De la sorte, de simples paroles ou propositions
obscènes sont insuffisantes60(*). A cet égard, l'attentat à la pudeur
commence dès les premiers gestes qui peuvent être
considérés dans chaque cas d'espèce comme attentatoires
à la pudeur. L'interprétation juridique des faits est dès
lors laissée à l'appréciation du juge de fond. Des
critères de l'atmosphère de l'affaire et des
antécédents de l'auteur sont souvent pris en compte par le
tribunal. Un casier judiciaire chargé d'actes attentatoires aux moeurs
dans le chef d'un prévenu risque de suffire à persuader le juge
quant à la responsabilité de ce premier dans une nouvelle
accusation.
Par ailleurs, le geste ne doit pas nécessairement
être commis sur la chair vive de la victime. Un attentat à la
pudeur peut être commis sur les vêtements, du moment que
l'attouchement a eu lieu à un endroit du corps où il peut
être considéré comme attentatoire aux moeurs. Dans ce cas,
dénuder une partie du corps en soulevant les vêtements peut
également constituer un attentat à la pudeur.
Comme illustration, une personne qui immobilise une fille
pendant un certain temps après avoir soulevé la jupe
jusqu'à la ceinture, c'est-à-dire en d'autres termes en
dénudant les parties intimes de son corps, exécute l'infraction
par l'attouchement à un endroit du corps où il peut être
considéré comme attentatoire à la pudeur.
Après ce bref aperçu de la définition et
des éléments caractérisant l'attentat à la pudeur,
on ne peut nier qu'il a des éléments communs avec le viol
à savoir le contact matériel avec la victime, le défaut de
consentement valable résultant de la contrainte physique ou morale et
même de l'âge de la victime.
Mais également, le viol et l'attentat à la
pudeur présentent des distinctions qui nous permettent de ne pas les
confondre. Alors que l'attentat à la pudeur se limite à des
attouchements ou gestes obscènes, le viol a un élément
matériel précis qui est la pénétration sexuelle.
L'élément légal ainsi que les peines diffèrent
également. Le viol est toujours un crime alors que l'attentat à
la pudeur avec violence sur les personnes majeures est un délit.
Nous ne pouvions manquer de faire remarquer que par endroit on
constate que l'attentat à la pudeur et le viol font l'objet d'une
même incrimination. Certes, ce sont deux infractions d'une même
famille mais il n'y a aucun intérêt à les regrouper dans
une même incrimination.
Non seulement elles ne sont pas d'une même
gravité mais aussi cette façon de procéder pourrait avoir
pour résultat d'embrouiller le lecteur ou de diluer le viol qui est un
crime odieux. Il en est de même des éléments aggravants qui
ne devraient pas nécessairement être les mêmes.
§2. Le
viol et les outrages publics aux bonnes moeurs
Les outrages aux bonnes moeurs comme ils sont prévus
par le Code pénal peuvent s'envisager sous deux aspects. D'une part, les
outrages par objets, écrits et autres moyens et d'autre part les
outrages par actions qu'on appelle aussi les outrages publics à la
pudeur.
Les outrages par objets, écrits et autres moyens
s'entendent par le fait d'exposer, vendre ou distribuer des chansons, pamphlets
ou autres écrits, des images, des figures, emblèmes ou autres
objets contraires aux bonnes moeurs, de détenir, importer ou faire
importer, transporter ou faire transporter ou faire la publicité de tels
objets dans un but commercial ou de distribution.
L'élément matériel de cette infraction
réside dans le fait de détenir ou de publier un objet contraire
aux bonnes moeurs.61(*) Il
n'est pas nécessaire qu'ils soient des écrits, ils peuvent se
présenter en films pornographiques, en diapositives, en photographies,
en bandes enregistrées, en objets quelconques. L'élément
matériel peut aussi résider dans le fait d'exposer, de vendre ou
de distribuer ces objets contraires aux bonnes moeurs.62(*) Cela veut dire que celui qui
se procurerait de tels objets pour son compte personnel ne serait punissable
qu'au stade de l'importation et du transport de ces objets.
Cet élément matériel s'accompagne de
l'élément intentionnel qui existe par le seul fait de
l'exposition et de l'importation, de la vente et de la distribution de ces
objets contraires aux bonnes moeurs. Ils sont contraires aux bonnes moeurs car
ils visent les excitations aux passions sexuelles, la pornographie en
général, la prostitution ou l'avortement.63(*)
Pour les outrages par action selon l'article 390, nous
sous-entendons le fait de commettre des actes impudiques ou obscènes
dans un lieu public ou privé, et de nature à offenser la pudeur
des témoins éventuels. L'infraction existe dès que l'acte
est commis en public devant n'importe quelle personne, peu importe l'âge.
L'élément matériel de l'infraction
consiste dans le fait de commettre publiquement des actes impudiques ou
obscènes mais la loi n'a pas défini ces actes d'outrage. Il
appartient donc au juge d'apprécier les faits outrageants. Par ailleurs,
pour être punissable, l'outrage à la pudeur doit avoir
été commis publiquement. Ce qui le rend punissable, c'est sa
commission à la vue de témoins involontaires. C'est la pudeur
sociale qui est prise en considération. La raison en est que par cette
incrimination, la loi veut protéger l'honnêteté publique et
empêcher le scandale.
Aux yeux de VERON, la publicité constitue
l'élément essentiel du délit. L'acte impudique n'est pas
incriminé en tant que tel mais en raison du scandale résultant de
la publicité qui lui est donnée. Le même acte licite s'il
est discret devient délictueux s'il est en public.64(*)
C'est le cas de l'accomplissement des relations sexuelles
normales ou contre nature, il importe peu que celles-ci soient licites, tels
les rapports conjugaux dans les lieux publics. La loi sanctionne
l'impudicité et non l'immoralité.65(*)
Ce délit suppose donc que les tiers aient
été témoins involontaires de l'acte impudique ; ce qui
explique qu'une personne ne peut se prétendre scandalisée alors
qu'elle a cherché le spectacle ou qu'elle y a assisté
volontairement et en connaissance de cause.
Quant à l'élément intentionnel,
l'infraction d'outrages aux bonnes moeurs n'est pas forcément
intentionnelle. Le couple ou la personne auteur de l'infraction peut avoir eu
l'intention d'outrager les bonnes moeurs et de baver la morale publique mais le
plus souvent, il s'agit d'une simple faute provenant d'un défaut de
précaution ou d'une négligence.66(*)
D'après ce que nous venons de voir, le viol se
distingue très nettement des outrages aux bonnes moeurs. Du point de vue
fondamental, l'outrage au lieu de consister dans une atteinte physique, il
offre à ses victimes la scène, l'expression ou la reproduction
même de l'immoralité. L'infraction est constituée
même sans contact physique et sans violence contrairement au viol. Du
point de vue de l'élément légal et des peines, il y a
aussi des divergences. Le viol étant un crime l'outrage est un
délit.
CHAPITRE
II. PRECARITE DES MOYENS DE PREUVE DE L'INFRACTION DE VIOL
Le viol étant une infraction qui se commet en cachette,
sa preuve est très difficile à apporter. Les OPJ se retrouvent
généralement face à la seule déclaration de la
victime qui est elle aussi contredit par le récit du
présumé violeur. Dans ce cas qui dit la vérité ?
Qui ment ?
Dans ce chapitre, il nous convient de parler de la preuve
pénale et de décrire les différents modes de preuve
auxquels recourt l'enquêteur en général et
particulièrement concentrer notre analyse sur les preuves
évoquées quand il est question d'un crime de viol.
Section I.
La preuve en matière pénale
La preuve est une démonstration de l'existence d'un
fait (matérialité d'un dommage) ou d'un acte (contrat, testament)
dans les formes admises par la loi.67(*)
Selon MERLE et VITU, la preuve est tout moyen permettant
à établir l'existence d'un fait donné, ou encore
l'exactitude ou la fausseté d'une présomption.68(*)
En matière pénale donc la preuve tend
essentiellement à établir d'une part l'existence d'un fait
réprimé par la loi et d'autre part la participation à ce
fait de la personne poursuivie.
Selon RASSAT, tout problème de preuve quelque soit le
cadre juridictionnel dans lequel il se situe pose inévitablement trois
questions : Qui doit prouver ? Comment doit-on prouver ? Jusqu'où
doit-on apporter la preuve de ce qu'on affirme ?69(*)
§1. La
charge de la preuve
A la question de savoir celui qui doit prouver, la
procédure pénale répond par le principe de la
présomption d'innocence. Celle-ci signifie que la personne poursuivie et
ténue pour innocente tant que la preuve de la culpabilité n'a pas
été apportée. Cela à pour conséquence que ce
sont les autres acteurs du procès qui doivent prouver d'une part
l'existence des éléments constitutifs d'une infraction et d'autre
part l'imputation de cette infraction au poursuivi.
Pour GRIERE DE L'ISLE et COGNIART, représentant de la
société, le ministère public n'agit pas dans un esprit de
vengeance privée ; il est guidé moins pas le souci exclusif
d'obtenir une condamnation que par la recherche de la vérité ; il
dispose de puissants moyens d'investigation sans commune mesure avec ceux des
particuliers ; il sera dès lors amené et c'est son devoir
à chercher aussi bien les preuves qui étayent ses poursuites que
celles qu'invoque le poursuivi du soutient de ses allégations.70(*)
Quant à la partie civile remplissant conjointement avec
l'officier du parquet, ce rôle de demandeur doit pour justifier les
condamnations qu'elle postule, non seulement administrer la preuve de
culpabilité du prévenu mais en outre établir l'existence
et le montant du préjudice matériel ou moral qu'elle
prétend avoir éprouvé. En cas de doute elle ne peut
obtenir de réparation.71(*)
Ce principe de présomption d'innocence a comme
première conséquence le fait de régler la question de la
charge de la preuve comme nous venons de le voir plus haut. La personne
poursuivie n'a pas à faire la preuve de son innocence. Elle n'a pas non
plus à répondre aux charges qui pèsent sur elle.72(*)
En effet, la personne poursuivie a le droit de se borner
à un rôle purement passif et de contester en sa qualité de
défendeur le soutènement de la partie poursuivante. Elle a aussi
si elle le juge utile, la faculté d'indiquer les faits et circonstances
qui militent en faveur de son innocence ou atténuent sa
responsabilité.
La deuxième conséquence de la présomption
d'innocence est un élément de décision. Elle impose de
faire bénéficier la personne poursuivie du doute sur la balance
des preuves pénales selon la règle « in dubio pro
reo ». De part cette règle, le doute qui demeure
équivaut à une preuve positive de non culpabilité. Quand
l'accusation ne peut établir l'infraction dans ses
éléments et prouver la culpabilité, l'accusé doit
être acquitté.73(*)
Le problème du fardeau de la preuve est donc
gouverné en droit pénal par trois principes
généraux comme le démontre MERLE et VITU.74(*)
Tout d'abord, c'est aux demandeurs au procès
pénal qu'il appartient d'établir le corps du délit et la
participation de la personne poursuivie selon l'adage « actori
incumbit probatio ». En d'autres termes, à celui qui
dénonce un manquement à la loi et en demande la sanction,
l'obligation d'en prouver la réalité. La charge de la preuve
pèse sur le demandeur.
En second lieu, il appartient à l'inculpé qui
invoque un moyen de défense d'en établir la
réalité. C'est ce que signifie la formule latine
« reus in excipiendo fit actor » qui fait du
défendeur alléguant une cause de justification, d'excuse ou
d'irresponsabilité, un demandeur tenu de prouver ce qu'il soutient.
Le troisième principe est exprimé par l'adage
« in dubio pro reo » c'est qui veut dire que le
doute profite à l'accusé. La personne poursuivie est
présumée innocente jusqu'à ce qu'on ait pleinement
rapporté contre elle les preuves décisives de sa
culpabilité.
A toutes fins utiles, notons que le juge ne doit pas se
contenter seulement de la vérité formelle des parties. Le
magistrat a un devoir d'investigation qui l'oblige à rechercher
personnellement et directement la manifestation de la vérité
quelque soit l'action ou l'inaction déployer par les parties. Il est
investi par un rôle systématique et personnel qui se manifeste de
deux façons essentielles : l'interrogatoire de la personne poursuivie et
le droit de poser des questions aux témoins.
§2.
Principe de la liberté de la preuve
A la différence de la procédure civile, plus
formaliste et qui exclut du champ du débat certains modes de preuve, la
procédure pénale admet le principe dit de la liberté de
preuve. Mais quelle est la portée de cette règle ? Où
trouve-t-elle son fondement ? Quelles en sont les limites et les exceptions
?
I.
Portée du principe
A la question de savoir comment doit-on prouver, la
procédure pénale répond que les infractions peuvent
être prouvées par tous les moyens de droit. La partie poursuivante
établie par toutes les voies de droit l'existence de l'infraction dont
elle poursuit la répression. Toute preuve est en principe admise et le
juge recherche sur quels éléments ou modes de preuve il est
autorisé à étayer sa conviction.
II.
Fondement du principe
Ce principe trouve sa justification dans trois
éléments principaux75(*) :
1° Il sert d'abord le ministère public et par
conséquent les intérêts de la société car les
délinquants agissent ordinairement dans le secret et n'hésitent
pas à recourir à des artifices pour égarer la justice et
à supprimer des preuves existantes dès l'accomplissent de leur
forfait.
2° Il est utile ensuite pour la personne poursuivie qui
peut ainsi organiser sa défense à l'aide de tous moyens de
preuve.
3° Il s'explique enfin par le fait qu'en matière
pénale il s'agit de prouver des données matérielles et non
des actes juridiques comme dans le procès civil où la preuve peut
être préconstituée.
III. Les
limites de la liberté de preuves
Si la loi pénale permet d'utiliser tous les modes de
preuves, elle ne laisse pas une liberté absolue quant à
l'administration de ceux-ci. La liberté de la preuve est limitée
par l'application de certains principes généraux qui interdisent
de rechercher la vérité par n'importe quel
procédé.
1. Respect
des formes déterminées par la loi
Libre dans les moyens à choisir, la preuve au
pénal est légale, dans les formes que ses moyens doivent
emprunter. C'est le principe de la légalité de la preuve qui ne
permet d'utiliser celle-ci qu'autant qu'elle a été recueillie et
présentée selon les modes procéduraux qui lui sont
propres.
La jurisprudence est cependant hostile à ces
limitations légales. Elles ne les acceptent que lorsque le texte a
été formel en ce sens. Si la loi se borne à évoquer
un mode de preuve sans plus la jurisprudence en conclut que les autres n'ont
pas été forcément exclus. La précision que seul le
mode de preuve visé est admis est donc requise pour opérer cette
limitation.76(*)
2. Respect
de la libre contradiction des preuves
La contradiction des preuves signifie donc que tous les
éléments de preuve doivent êtres rapportés à
la connaissance du prévenu qui a droit de les contredire. Les
conséquences sont que le juge ne peut admettre, pour y baser sa
conviction, des preuves secrètes dont le prévenu n'a pas eu
connaissance ou des documents communiqués au tribunal pendant le
délibéré et non versés aux débats. Il ne
peut d'avantage avoir égard à des preuves résultant d'une
procédure antérieure que le prévenu n'a pas pu
discuter.77(*)
3. Respect
de la dignité de la personne humaine
Certains procédés sont interdits parce qu'ils
apparaissent peu fiables soit parce qu'ils paraissent porter abusivement
atteinte à la dignité de la personne humaine.
C'est pourquoi les juridictions répressives rejettent
des modes de preuve mettant en cause le corps des personnes impliquées
tel que l'aveu obtenu sous torture.78(*)
De même, certains modes de preuve scientifique sont
écartés. Il s'agit par exemple de l'injection, de la narcose ou
du « sérum de vérité ».79(*)
§3.
Principe de l'intime conviction
A la question de savoir jusqu'où doit-on apporter la
preuve, la procédure pénale répond par le principe de
l'intime conviction du juge. Il n'y a ni reine des preuves ni preuve absolue,
les magistrats se déterminent en fonction de l'effet qu'a produit, sur
leur intime conviction la balance des preuves.
Le principe de l'intime conviction a en réalité
un double rôle80(*)
:
C'est d'une part un principe d'appréciation des
preuves. En effet, les juges sont libres de tenir compte ou non des
éléments de preuve qui leur sont soumis. Ils peuvent condamner
quelqu'un qui nie avoir participé aux faits qu'on lui reproche. Ils
peuvent relaxer ou acquitter quelqu'un qui a avoué avoir commis
l'infraction si cet aveu leur paraît suspect.
Ils sont libres d'accorder ou non du crédit aux
différents témoignages. Bien entendu ils tiennent compte des
rapports d'expertises dans la mesure où ils le veulent. Naturellement
ils sont enfin, libres de combiner entre elles les différentes preuves
produites pour conforter par l'une les insuffisances de l'autre ou
inversement. Ils n'ont pas à s'expliquer sur les preuves qu'ils ont
retenues.
D'autre part, c'est un principe de décision. Les juges
doivent prendre une décision en vertu de leur conviction. Ils doivent
s'interroger dans le silence et le recueillement et chercher dans la
sincérité de leur conscience, quelle impression ont fait sur leur
raison les preuves rapportées contre l'accusé et les moyens de sa
défense.
Il faudra également savoir que des garanties de forme
sont prises pour éviter de permettre l'expression d'une fantaisie de
mauvais aloi. La première tient à la nécessité
minimale d'affirmer qu'on est convaincu en ne se contentant pas de
reconnaître qu'il y a une présomption sérieuse qui ne
saurait suffire à ce stade de la procédure. La seconde
relève de l'obligation de motiver les jugements qu'elles soient de
condamnation ou de relaxe. Une motivation qui ne serait faite que de
l'expression de l'intime conviction est naturellement, insuffisante.81(*)
Le respect de ces mesures limitant le pouvoir du juge dans
l'appréciation des preuves et d'une manière
générales, de toutes celles qui garantissent les droits de la
défense, est assuré par la cour de cassation qui a le pouvoir
d'annuler toute décision reposant sur une procédure poursuivie en
violation de la loi ou omettant les formalités substantielles.
§4. Les
modes de preuve en matière pénale
La question des différents modes de preuve utilisables
dans un procès est régie par deux principes fondamentaux comme
nous venons de le voir dans les précédents paragraphes. Il s'agit
du principe de la liberté de la preuve qui autorise les recours à
n'importe quel mode de preuve et le principe de la légalité de la
preuve qui ne permet d'utiliser celle-ci qu'autant qu'elle a été
recueillie et présenté selon les modes procéduraux qui lui
sont propres compte tenu de sa nature et du stade de la procédure auquel
on se trouve.
Ainsi pour reconstituer le passé, pour élucider
les circonstances de l'infraction on ne peut se référer qu'aux
personnes en les questionnant, ou aux objets en les scrutant. De là
divers modes de preuves.
- Les deux premiers sont issus de personnes. Il s'agit de
l'aveu et du témoignage ;
- Les deux suivants sont issus des choses. Il s'agit des
constatations matérielles et des présomptions ou indices.
- Un dernier mode de preuve, constitué par des
écrits est à mettre à part en ce que les écrits
participent des deux catégories précédentes relatant
à la fois les déclarations des personnes et les renseignements
que l'on tire des objets.82(*)
Sans vouloir atteindre au détail chaque mode de
preuve, nous allons voir les aspects particuliers que présentent les
modes de preuve courants du point de vue de la force convaincante.
Les modes de preuve dont nous étudieront succinctement
la force probante sont :
- l'aveu
- le témoignage
- les constatations matérielles
- les présomptions ou indices.
I.
L'Aveu
On appelle aveu, les déclarations par lesquelles
l'intéressé reconnaît en totalité ou en partie, le
bien-fondé des accusations portées contre lui.83(*)
Longtemps, ce moyen de preuve a été
regardé comme la « reine des preuves » la probatio
probatissima, dispensant les tribunaux de chercher ailleurs d'autres
éléments de conviction.
Ainsi s'explique encore qu'en droit anglais, si
l'accusé déclare plaider coupable, le procès tourne court
et le magistrat n'a plus qu'à prononcer la peine. D'où
l'importance fondamentale de la question posée au début des
débats à l'accusé : plaidez-vous coupable ou non coupable
(Guilty or not Guilty) ?84(*)
Dans l'état actuel cependant, l'expérience
prouve que l'aveu n'est pas une preuve infaillible. D'une part, il y a parfois
des aveux mensongers, provenant de déséquilibrés qui
s'accusent de crime imaginaires. D'autre part, il est manifeste que la force
convaincante de l'aveu varie suivant qu'il est spontané ou qu'il est
provoqué. Dans l'ancien droit où la torture était
pratiquée, l'aveu ne faisait jamais preuve complète à lui
seul. Aujourd'hui sa valeur probante est librement appréciée par
le juge.
Pourquoi justement cette libre appréciation, même
devant un aveu, mode de preuve qui de prime abord devrait convaincre le juge de
la culpabilité du prévenu qui le fait ?
C'est que l'aveu même lorsqu'il n'est pas
provoqué par des brutalités policières ne contient pas
toujours la révélation de la vérité. Il y a des
aveux mensongers pour diverses raisons : aveux de psychopathes, aveux par
désespoir, aveux par crainte ou affection à l'égard du
vrai coupable...C'est pourquoi en vertu de son intime conviction le juge
apprécie l'aveu dans chacune de ses parties et ne retient que ce qui lui
paraît probant. Le juge peut donc peser souverainement la valeur de
l'aveu, admettre certaines déclarations du délinquant et en
repousser d'autres.
Signalons enfin que l'aveu qui est soumis à la libre
appréciation du juge en matière pénale peut par
conséquent toujours être rétracté par son auteur,
à tout moment de la procédure et jusqu'à la clôture
des débats. Mais le principe de l'intime conviction laisse aussi le juge
libre d'apprécier la valeur de la rétractation, comme il
apprécie souverainement la portée de l'aveu lui-même.
II. Le
témoignage
La preuve testimoniale est le récit fait par une
personne de ce qu'elle a vu ou entendu des faits délictueux. Cette
preuve occupe le premier rang parmi les preuves pénales, le magistrat
peut se passer d'écrits, d'aveux, d'indices, il lui est plus difficile
de juger sans témoin qui est pour lui « les yeux et les oreilles de
la justice».85(*)
Le témoignage revêt une importance pratique qui
est incontestable. Il est dans certains cas le seul moyen de découvrir
la vérité, notamment lorsque l'infraction n'a pas laissé
de traces matérielles et que le prévenu se refuse à
avouer. Il est également un moyen de contrôle des autres
procédés de preuve aussi bien des déclarations du
prévenu que des preuves indiciales.
Selon RASSAT, plusieurs raisons militent en faveur de
l'importance du témoignage.86(*)
La première raison de fond tient à ce que le
témoignage des tiers paraît toujours moins suspect que les
déclarations de la personne poursuivie qui pour des raisons plus ou
moins avouées ou avouables peut toujours avoir tendance ou à
s'accuser de choses qu'elle n'a pas commise ou à essayer de se
dégager d'accusation dont elle fait l'objet à juste titre.
La seconde raison de forme est que le témoignage est un
mode de preuve qui convient très bien au type de procédure orale
et contradictoire qui prévaut à l'audience pénale.
La troisième raison de fait, tient à
l'étendue des questions sur lesquelles on peut témoigner au
procès pénal. Il est bien rare qu'il n'y ait pas de témoin
dans une affaire donnée alors qu'il peut n'y avoir ni déclaration
de la personne poursuivie, ni pièces à conviction, ni
indices.
Si le témoignage est la preuve la plus utilisée,
elle est aussi la plus dangereuse et on lui a parfois accordé un
crédit exagéré. Il s'agit d'un mode de preuve assez
fragile car non seulement certains témoins sont de mauvaise foi et
altèrent la vérité, mais même ceux qui sont de bonne
foi peuvent commettre des erreurs, et cela d'autant plus facilement que le
temps écoulé depuis les événements est plus
long.
Les causes de cette fragilité sont essentiellement :
- Le mensonge : il est réprimé par l'article 264
de notre code pénal sous la Prévention de « faux
témoignage».
- La simple erreur du témoin : il ne suffit pas qu'un
témoin soit sincère honorable et de bonne foi pour qu'il apporte
la vérité à la justice. Le témoignage est la
résultante de plusieurs opérations psychologiques qui toutes sont
sujettes à défaillance : la perception des choses ou des faits,
la mémoire qui en assure la fixation et la conservation, l'imagination,
la déposition devant l'officier instructeur ou à l'audience, sont
autant d'éléments qui interviennent dans le témoignage et
qui ne sont point infaillibles.87(*)
C'est donc en raison de ces dangers que le juge doit
réagir contre la foi spontanée et la vérité
d'affirmation sincères. Il doit, avant de fixer sa décision en
vertu de la libre appréciation des preuves qui lui est reconnue,
rechercher sous les apparences de la vérité les
possibilités des erreurs, déceler les mensonges et les
réticences, discerner ce que le témoin veut dire à travers
des modes d'expression parfois défectueux, enfin peser, en conscience,
la portée de la preuve rapportée.
III. Les
constatations matérielles
Les constatations matérielles ont pour but de relever
directement les diverses circonstances qui éclaireront sur la commission
de l'infraction ou sur l'identité de son auteur à savoir les
traces, les emplacements ou objets, ces derniers étant appelés
« pièces à conviction ».88(*)
On distingue ainsi trois modes de constatations
matérielles : la descente sur les lieux, les saisies perquisitions, les
expertises.
1. La
descente sur les lieux
Elle permet l'examen des lieux où l'infraction est
découverte et la recherche des traces. Celles-ci étant
susceptibles de s'effacer, la descente sur les lieux a d'autant plus
d'utilité qu'elle est faite rapidement. Son intérêt
apparaît donc surtout en cas d'infraction flagrante.89(*) Les services de polices
judiciaires doivent alors se rendre sur place sans délai, après
en avoir avisé immédiatement le procureur de la République
et procéder à toutes constatations utiles. La descente sur les
lieux peut être encore entreprise au cours de l'instruction
préparatoire ou même lors de la phase du jugement. Dans ces
derniers cas, elle a un caractère contradictoire, les parties et leurs
avocats doivent être invités à y participer.
2. Les
saisies perquisitions
La saisie consiste à s'emparer des pièces
à conviction dont l'examen apparaît nécessaire à la
manifestation de la vérité parce qu'elles ont permis ou
entouré la perpétration de l'infraction. Souvent, elles seront
trouvées sur les lieux même, lorsque la descente se fait sans
retard, comme au cas d'infraction flagrante. Ces pièces à
conviction sont alors placées sous main de justice.90(*)
Mais il arrive aussi, très souvent que les
pièces à conviction ne puissent être trouvées sans
investigations nouvelles et qu'il faut pour les découvrir et les saisir
procéder à des visites domiciliaires ou perquisitions : celles-ci
consistent à visiter et fouiller le domicile des personnes qui semblent
détenir des objets relatifs aux faits incriminés.
Pour MERLE et VITU, la perquisition du latin per-quaere est la
recherche minutieuse de tous les éléments de preuve utilisables,
effectuée au domicile d'un particulier. Ils continuent en soulignant que
l'on doit distinguer soigneusement la perquisition de la visite domiciliaire;
la première est une recherche approfondie, la seconde désigne
seulement l'entrée dans un lieu privé aux fins de constat ou de
vérification.91(*)
3. Les
expertises
Certaines constatations matérielles ne peuvent
être faites ou exploitées profitablement que par des
spécialistes, disposant des connaissances techniques et qui sont les
experts. Leurs investigations appelées expertises sont utiles ou
nécessaires dans de nombreuses hypothèses : relevé et
interprétation des empreintes, vérifications comptables, analyses
chimiques, examens médicaux, etc.
Pour BRAAS , l'expertise est le moyen de découvrir et
d'utiliser certains indices ou certaines preuves à l'aide de
connaissances techniques particulières ; les connaissances, le juge ne
les possède pas, mais ils les trouvent auprès des
spécialistes, les experts auxquels il demande d'apporter leur
collaboration dans la recherche de la vérité. Il continu en
disant que l'expert n'est pas une variété de témoin, en
dépit de ce que l'on affirme parfois : alors que ce dernier est
lié d'une façon immédiate aux circonstances de
l'infraction, dont il a une vision directe et personnelle, l'expert intervient
au procès uniquement en raison de ses connaissances techniques ; c'est
ce qui explique que l'expert peut dans le procès, être
remplacé par n'importe quel autre spécialiste ayant les
mêmes capacités tandis que le témoin est
irremplaçable.92(*)
Nous ne manquerons pas de signaler à la fin les
règles générales qui s'appliquent à toute expertise
comme le démontre SOYER :93(*)
- L'expert n'est jamais désigné par les
parties, mais par l'autorité qui ordonne l'expertise ;
- L'expert est tenu de prêter préalablement
serment d'apporter son concours à la justice, en son honneur et en sa
conscience ;
- Le juge n'est pas lié par l'opinion des experts.
IV. Les
présomptions
Nous entendons ici par « présomption », les
présomptions de faits ou indices et les présomptions
légales.
Les présomptions de faits ou indices sont des faits qui
établissent plutôt une probabilité qu'une preuve
véritable. A titre d'exemple : l'accusé a été vu
sur les lieux de crime en fuyant, certains effets lui appartenants ont
été trouvés sur les lieux du crime, etc. Il faut noter que
de tels indices sont obtenus par d'autres moyens de preuve, tels que les
témoignages ou les constatations matériels opérées
directement par les juges ou leurs auxiliaires. A raison du principe de
l'intime conviction, le juge en apprécie librement la force probante et
peut donc les faire prévaloir sur un mode de preuve plus immédiat
comme le témoignage par exemple. Mais autrement, les indices sont
plutôt considérés comme des moyens de preuves
secondaires.94(*)
Les présomptions légales sont quant à
elles des rapports nécessaires que la loi établit entre certains
faits, des conclusions qu'elle oblige le juge à dégager d'un fait
à un autre pour faciliter la tâche du juge dans la
découverte de la vérité. Il y a deux catégories de
présomptions : les présomptions légales absolues et les
présomptions légales relatives.95(*)
Les présomptions légales absolues ne peuvent
être combattues par la preuve contraire. Par exemple, la
présomption établie par l'art.382 du code pénal
d'après lequel, du jeune âge de la victime d'un attentat à
la pudeur, il y a absence de consentement valable.
Quant aux présomptions légales relatives, elles
admettent la preuve contraire et le juge apprécie. La loi en les
prévoyant, oblige le juge à tenir du vrai les faits qu'elle tend
à établir, mais laisse aux parties intéressées la
faculté de démontrer que, dans telles circonstances
données, l'introduction qui fait la loi et qu'elle établit comme
thèse n'est pas fondé comme hypothèse.
Section II
: Analyse de preuves spécifiques au viol
Comme nous venons de le voir, durant le procès
pénal, il appartient au procureur de la République et
subsidiairement à la victime de prouver les faits reprochés
à l'accusé ou la victime ne pourra pas obtenir de
dédommagement.
Nous allons donc analyser dans cette section les preuves qui
sont généralement utilisées par le ministère public
ou invoquées par la victime en cas de viol. Sachant que quand un viol se
commet ; toutes les voies probatoires n'entrent pas en jeux et que tout
dépend de l'âge, car la loi burundaise distingue le viol commis
sur les personnes majeures du viol sur les mineurs.
§1. L'aveu
En matière de viol, les avouants ne sont pas nombreux.
Même si l'accusé parvient à avouer, il reconnaît
qu'il y a eu des rapports sexuels mais que la victime était consentante.
Selon la jurisprudence burundaise, on rencontre souvent ces cas d'aveux en cas
de viol sur mineurs. En effet, l'accusé déclare qu'il ne savait
pas que la personne était mineure, que la taille était celle
d'une personne majeure, qu'elle était consentante et qu'il avait
même l'intention de l'épouser.
Reste alors la charge au ministère public de prouver
l'absence de consentement. Mais il faudra savoir que dans des cas pareils ce
sont généralement les parents qui portent plainte et que le
consentement de la victime invoqué par le prévenu n'est pas un
moyen de défense recevable car un mineur de moins de 18 ans n'est pas
apte à donner un consentement légalement valable.
A titre d'illustration, la cour d'appel siégeant
à Bujumbura en matière pénale a condamné le
31/7/1998 Monsieur Rémy B. d'une servitude pénale principale de
six ans pour avoir violé une fille de 13 ans. Celui-ci reconnaît
avoir eu des rapports sexuels consentis avec la victime mais prétend
qu'elle est majeure. Après des investigations, le ministère
public parvient à démontrer que le 19/02/1997, monsieur
Rémy B. avait amené mademoiselle Fabienne à BUTERERE pour
qu'elle l'aide à transporter un poste de radio, qu'il l'avait fait
entrer dans la maison du nommé John et qu'au moment où elle
allait prendre la dite radio, monsieur Rémy B. avait fermé la
porte et l'avait violée, que mademoiselle Fabienne avait crié et
qu'un passant était venu lui porter secours. Le prévenu ayant
avoué avoir eu des rapports sexuels avec la victime, l'aveu a
été la preuve principale de l'infraction.96(*)
§2.
Témoignage
Le témoin est selon le code de procédure
pénale une personne susceptible de donner des informations sur
l'infraction et sur ses auteurs et dont l'audition parait utile à la
manifestation de la vérité.97(*)
Dans des cas de viol, le témoin est une personne qui
était présente au moment de l'agression. A ce titre, le
témoin parle de ce qu'il a vu de ses propres yeux ou entendu de ses
propres oreilles à un OPJ (PV d'audition), soit devant les juridictions.
La réaction peut être audible si le viol est
commis surtout sur la personne majeure qui peut crier au secours. Dès
lors, les voisins de la maison, peuvent faire part de ce qu'ils ont entendu
sachant aussi que les enquêteurs ont tendance à demander à
la victime majeure si elle a appelé au secours lors du drame et
l'absence de cette éventualité risque de lui faire perdre la
cause. Les enfants d'un certain âge peuvent aussi crier suite à la
douleur subie.
Cependant, les témoins oculaires du viol sont
très rares d'autant plus que c'est une infraction qui se commet en
cachette loin de tout soupçon à l'exception de la flagrance.
Dans tous les cas, bien que les témoins du viol qui
n'ont fait qu'entendre des cris ou des appels au secours n'ont rien vu, leurs
dépositions permettent tout de même de découvrir des
preuves supplémentaires et d'établir leur signification et leur
importance.
Un tel témoignage sur les faits commis permet
l'approximation dans la recherche de la vérité. Dès lors,
il faut qu'il soit corroboré par d'autres éléments.
En guise d'illustration, la Cour d'appel de Gitega
siégeant à Gitega en matière pénale a
condamné le 30/11/1992 monsieur Jacques N. d'une servitude pénale
principale de 15 ans pour avoir violé avec violence une jeune fille de
15 ans nommée Sandrine G., la jeune fille ayant de plus par la
même occasion contracté le virus du Sida. En effet, Jacques N.
invitait souvent la jeune fille dans sa maison, la séduisait en lui
donnant des limonades et de l'argent et parvenait à l'amener dans sa
chambre où il la violait. Mademoiselle Jeannette I. amie de Sandrine G.
entendu par le ministère public, affirmait qu'elle accompagnait son amie
chez monsieur Jacques N., que dès qu'elles arrivaient chez lui, monsieur
Jacques N. et mademoiselle Sandrine G. allaient dans la chambre en laissant
mademoiselle Jeannette I. au salon et y restaient jusqu'à ce qu'elles
rentrent. Le témoignage de Jeannette I. a été très
déterminant comme preuve de l'infraction malgré les protestations
de Jacques N.98(*)
§3. Objets
matériels et traces corporelles
Durant le viol, l'auteur peut laisser quelques traces sur le
corps de la victime. Il peut s'agir des traces de sang, des empreintes, des
marques des coups et blessures, etc. L'enquêteur qui se rend sur les
lieux ou les agents de santé qui accueillent la victime, peuvent
également prélever quelques preuves comme des vêtements ou
taches de sang, de boue ou de sperme.
Les éléments de preuves seront collectés
au plus vite après le viol (de préférence avant 72 heures
à partir du moment de l'agression). Il est préférable que
les éléments de preuve recueillis soient soigneusement
conservés par la personne qui a examiné la victime en premier
lieu (l'infirmier ou le médecin). L'agent de santé doit
transcrire toutes les informations et les constatations de manière
complète, précise et sans porter aucun jugement sur la fiche de
prise en charge d'une victime de violence sexuelle ou un dossier
médical.99(*)
Toutes ces traces quoi qu'elles n'indiquent pas directement le
coupable, elles font tout de même présumer qu'il s'est
passé quelque chose et constitue un élément dans la
recherche de la vérité.
§4.
Expertise médico-légale
L'expertise médico-légale est très
importante. Elle est une première constatation de l'infraction de viol.
Le but de cette expertise médicale est de:
« - confirmer un contact sexuel récent ;
- constater par des preuves visuelles qu'il y a eu emploi de
la force ou de moyens de coercition ;
- confirmer le récit de la victime ;
- récolter si possible, les informations qui
pourraient contribuer à identifier l'agresseur. » 100(*)
Tout médecin agréé est apte à
être expert et peut établir un certificat
médico-légal sous serment selon le Ministère de la
Santé. Mais il appartient au juge et au ministère public de
désigner l'expert. Il est donc important que la victime se fasse
examiner par un médecin expert qui aura été
désigné par le ministère public.101(*)
Dans certaines situations, l'état de santé d'une
victime de violences sexuelles peut se détériorer en raison des
complications médicales après qu'une première expertise
médicale a été réalisée. Dans ce cas, une
seconde expertise est possible et souhaitable sur demande de l'OPJ ou du
ministère public. Cette seconde expertise est obligatoirement
réalisée par le même médecin expert. Il est
également possible que la première expertise ne soit pas
satisfaisante pour la victime qui peut alors demander à l'OPJ en charge
de son dossier de lui désigner un autre médecin expert pour une
seconde expertise.102(*)
En effet, dès que la police judiciaire est saisie d'une
plainte relative au viol, l'OPJ chargé du dossier écoute la
victime et rédige un procès-verbal d'audition qui constitue le
dépôt de la plainte. L'OPJ s'empresse donc à rédiger
une réquisition à expert intitulé «
réquisition à expert et prestation de serment » (voir annexe
I) qui constitue une demande de constat de l'agression par un médecin
expert. La victime est donc envoyée dans les plus bref délais
chez le médecin expert désigné qui a l'obligation de
rédiger le certificat médico-légal (voir annexe II) et de
collecter les preuves légales conformément aux instructions
nationales. C'est le seul document qui peut aider à
l'établissement de l'infraction.
Durant l'examen physique, la victime sera examinée de
la tête aux pieds en insistant sur les zones vulnérables (les
oreilles, la bouche, le cou, les seins, les avant-bras, éventuellement
les marques de tentative de parade, les poignets, la fasse interne des cuisses
et les chevilles (preuves d'immobilisation). On examine aussi les parties
génitales de la victime pour évaluer l'étendue des
lésions.103(*)
Le constat de l'examen physique est mis en rapport avec les
données recueillies lors de l'entretien. Par exemple, les tympans
perforés, probablement suite à des coups, le cuir chevelu
arraché,...
La confection du dossier médical se fait à
l'aide de tous les éléments relevés lors de l'examen
clinique (interrogatoire, examen physique) et les examens
complémentaires si nécessaire.
Lors de l'entretien avec le médecin du centre SERUKA,
elle nous a suggéré que les résultats sont souvent
libellés comme suit :
- Signe d'un traumatisme au sexe ;
- Rougeur de la muqueuse vulvaire ;
- Oedème des petites lèvres (gonflement) ;
- Déchirure de l'hymen partiel ou total (les berges
peuvent saignoter) ;
- Plaie périnéale superficielle ou profonde ;
- Euchymose ;
- etc.
Différentes conclusions :
- Il n'y a pas de signe d'un traumatisme du sexe. A
confronter avec l'interrogatoire ;
- Il y a des signes d'un traumatisme récent au sexe
avec défloration récente ou ancienne ;
- etc.
Selon toujours ce médecin du Centre SERUKA, l'absence de
signes physiques ne justifie pas l'absence de viol.
L'expertise, bien qu'elle ne désigne point l'auteur de
la relation sexuelle, permet d'établir au moins la
matérialité de l'acte commis sur la victime. Et même si
elle ne lie pas le juge dans ces décisions, il est très difficile
de trancher qu'il y a eu viol en l'absence de signes cliniques de viol.
Il faudra également et surtout savoir qu'aucun agent de
santé ni médecin expert n'a la responsabilité de conclure
en qualifiant lui-même l'infraction et en désignant l'auteur ;
ceci relève de l'autorité judiciaire.
A titre illustratif, en date du 09/01/1991, la Cour d'appel de
Ngozi a condamné Monsieur Léon K. pour un double viol sur la
personne de deux fillettes de 10 ans et 11 ans. Celui-ci étant leur
instituteur, il les a enfermés dans une classe avec lui sous
prétexte qu'elles avaient eu un échec en calcul. Il leur a
ordonné de faire des exercices physiques toutes nues sur des pupitres,
lesquels consistaient à élever les jambes jusqu'à ce que
lui aussi se déshabille et les viole. L'expertise médicale faite
sur l'ordre de l'officiel de police judiciaire à l'endroit des deux
fillettes a été très déterminante parce qu'elle
prouvait que les fillettes avaient réellement été
violées et que même l'une d'elle avait développé une
maladie et que ses organes avaient été sérieusement
endommagés.104(*)
§5. Précarité des moyens de preuve
de viol disponibles au Burundi
Si le principe de liberté de preuve est retenu en
matière pénale, les divers modes de preuve sont employés
par l'enquêteur pour charger ou décharger la personne
soupçonnée d'être l'auteur de l'infraction
concernée. Nous venons donc de décrire les modes probatoires les
plus utilisés tels que l'aveux, le témoignage, les
présomptions et l'expertise médico-légale et la conclusion
qui se tire est que le chemin est encore long dans notre pays au niveau de la
recherche de la preuve inculpant de façon incontestable le
présumé coupable de viol. De telles possibilités de la
recherche de la véracité des faits ne suffisent pas à
elles-mêmes à prouver de façon incontestable le crime
commis. Elles méritent d'être corroborées par d'autres
voies plus sûres faisant souvent intervenir la technologie moderne. C'est
l'objet même du troisième chapitre où nous aurons à
décrire les difficultés que subit l'enquêteur pour
établir la responsabilité de l'auteur et suggérer des
évolutions.
Section
III. Le viol sur mineur et sa preuve
Le viol sur mineur est une forme de maltraitance qui a des
conséquences désastreuses sur la vie des victimes. L'enfant
victime de viol court souvent le risque d'une psychopathologie grave qui peut
perturber son évolution psychologique, affective et sexuelle.105(*) Pour que cette infraction
soit correctement réprimée et que son auteur soit
sérieusement puni, il faut arriver à prouver la
matérialité de l'acte et déceler l'identité de son
auteur, tâche qui s'avère difficile vu que l'infraction se
déroule tout naturellement en cachette et que les témoins sont
parfois rares.
Quant un viol vient de se commettre sur la personne d'un
enfant, il est extrêmement difficile d'apporter la preuve. La preuve
médicale semble être le moyen le plus fiable et le plus
convaincant parce qu'elle permet d'établir la matérialité
des faits mais il s'avère qu'à l'analyse, la preuve
médicale certaine est très rare et son caractère parfait
semble s'estomper comme nous allons le voir. Il faudra donc recourir à
la déclaration de l'enfant. Mais est-ce que la parole de l'enfant peut
être correctement reçue en justice ?
§1.
L'administration de la preuve médicale
Quant on parle de la preuve médicale, on sous-entend
directement la preuve physique qui démontre effectivement qu'il y a eu
viol. Mais il est rare qu'une preuve physique absolue puisse être
apportée. Cela a pour conséquence que la preuve de viol sera
administrée par un faisceau d'indices tirés des motifs de
l'examen clinique et du récit de l'enfant ainsi que des examens du
laboratoire. Dans tous ces cas, à chacune de ces étapes le
médecin se heurte à beaucoup d'obstacles rendant
particulièrement délicate l'élaboration du diagnostic.
I. La
preuve physique
La preuve physique consiste à trouver lors de l'examen
médical des lésions ou blessures, d'abcès ou
d'inflammation sur les organes génitaux de l'enfant. Mais il est tout
à fait fréquent que l'on ne puisse rien détecter à
l'examen gynécologique et anal de l'enfant. Il faut donc se garder de
tirer des conclusions hâtives, voire négatives de cet état
de faits.106(*)
Selon MARIELLE et CHOULOT, la preuve physique
irréfutable n'est ni fréquente ni forcément
nécessaire. L'absence de lésion ou blessures ne permet pas donc
d'affirmer qu'il n'y a pas eu d'abus. Cela ne devrait même pas être
un élément de doute puisque les blessures ou lésions ne
constituent pas d'éléments constitutifs de l'infraction mais
« seulement » des circonstances aggravantes.107(*)
Le droit nous apprend que le juge n'est pas esclave de la
conclusion du médecin et que l'expertise ne lui apporte que quelques
précisions scientifiques qu'il ne maîtrise pas et qui l'aideraient
à orienter sa recherche de preuve. C'est pour cela que dans certains cas
de viol, le prévenu est reconnu coupable alors que l'examen
gynécologique ne présente rien d'anormal.
II.
L'examen médical proprement dit
L'examen médical doit permettre de poser un diagnostic
grâce à un faisceau de preuves comme nous l'avons dit plus haut.
Les motifs de cet examen médical sont extrêmement variés.
Il faudra donc évaluer et chercher à comprendre les motifs qui
ont poussé les parents, le service social ou judiciaire à faire
examiner l'enfant. Souvent pour les parents, les motivations ne sont pas
toujours louables. Il arrive, en effet, que l'un des parents, souvent la
mère, par inquiétude soit à l'origine d'une fausse
allégation d'abus sexuel. C'est le cas par exemple d'une mère qui
trouve sa fillette qui pleure en compagnie de son domestique et qui conclut
directement qu'il a abusé d'elle ou une mère par haine pour son
mari qui la maltraite l'accuse de viol sur la personne de son propre enfant. Il
n'est donc pas toujours évident de détecter ce genre de mensonge,
aussi, convient-il d'accueillir la parole des parents avec prudence.
Tout au plus, il faut chercher à comprendre ce qui
s'est passé en interrogeant l'enfant. Cet interrogatoire présente
un grand intérêt. C'est pour cela qu'elle doit se faire
soigneusement et en considérant l'enfant afin qu'il ne soit pas beaucoup
plus affecté par cette situation. Mais on n'insistera jamais assez sur
le fait que celui qui écoutera le récit de l'enfant doit avoir
une bonne pratique de ce genre d'entretien car le témoignage de l'enfant
est un élément essentiel du diagnostic, il doit faire foi. On
doit montrer à l'enfant qu'on le croit. Cet entretien doit être
conduit dans un climat sécurisant suivant l'âge de l'enfant.
Il faut aussi savoir que le langage de l'enfant n'est pas le
même que celui d'un adulte. La parole de l'enfant est souvent difficile
à « décoder ».
Alors, il peut être intéressant de faire dessiner
les enfants les plus jeunes. L'adjonction d'organes génitaux constitue
un indice important pouvant signaler l'abus. Il appartient à
l'examinateur de poser des questions sans suggérer les réponses.
Il pourra utiliser des formules comme « raconte moi plus », « et
puis qu'est-il arrivé » ou encore « est-ce que l'on t'a fait
faire quelque chose que l'on aurait pas dû te faire ou quelque chose que
tu n'aimes pas ? ». Le vocabulaire utilisé par l'enfant
mérite enfin de retenir l'attention. L'emploi de termes cru ou orduriers
ou de mots non habituellement connu à cet âge constitue un
élément de valeur. En tout état de cause, il faut
éviter de faire répéter son récit à
l'enfant.108(*)
L'examen clinique de l'enfant ne doit pas conclure à un
traumatisme supplémentaire. C'est pour cela que la présence d'un
adulte sécurisant pour l'enfant est souhaitable car l'examen doit
être aussi complet que possible.
Quelques exemples illustrent les difficultés
fréquemment montrées par les médecins lors de
l'élaboration du diagnostic.
D'abord, lorsque l'examen est réalisé
précocement, il peut révéler l'existence d'ecchymoses,
d'hématomes, de traces de griffures ou d'inflammation de la
région génitale (vulvite). L'interprétation de ces
lésions est parfois délicate. Lorsqu'elles sont discrètes,
on ne peut éliminer une cause accidentelle ou infectieuse
résultant d'un défaut d'hygiène par exemple.
Des femmes plaignantes qui déclarent que l'enfant
criait de douleur quand l'eau touchait la région génitale mais
sans révéler que l'enfant n'avait pas été
nettoyé des jours auparavant. Un petit garçon qui aime manipuler
son organe viril en découvrant le gland à plusieurs reprises va y
causer des lésions qui le rendent douloureux et risquent l'infection. Au
constant de ces faits, les parents vont penser qu'il y a eu abus
généralement de la part du domestique.
Dans tous les cas, il appartient au médecin de conclure
de manière nuancée en écrivant notamment que ces
lésions peuvent éventuellement être compatible avec des
attouchements sexuels mais qu'elles peuvent aussi résulter d'autre
cause. De même, l'existence d'un hymen « complaisant » se
laissant distendre en raison d'une élasticité particulière
permet un acte de pénétration sexuelle sans que cela n'implique
une lésion traumatique particulière. Il faudra alors expliquer
qu'un acte de pénétration sexuelle a pu être commis en
raison de la perméabilité hymenéale et vaginale.109(*)
En somme, il importe d'effectuer un examen complet afin de
rechercher tous les signes d'éventuels sévices. Cheveux, peau,
cavité buccale seront examinés avec soin. Et puis, certains
signes chez la petite fille sont souvent très évocatrices :
érosions, ulcérations, plaies, déchirures de l'hymen ou
disparition de l'hymen. Pour les garçons, les organes génitaux
seront examinés soigneusement à la recherche d'hématomes,
ecchymoses, cicatrices, trace de morsures. L'examen de l'anus doit être
effectué avec minutie à la recherche d'un signe traumatique,
cicatrices, dilatation anale, laxité du sphincter.110(*)
Les examens du laboratoire peuvent à la fin constituer
des preuves très importantes. Certains ne peuvent être
effectués que dans un laps de temps proche de la commission de l'abus
sexuel. Ainsi, on effectuera la sérologie, il faut rechercher la
présence de spermes, de phosphatase acide prostatique à condition
que l'examen soit fait dans les soixante-douze heures qui suivent l'abus, on
recherchera systématiquement la gonococcie ou chlanyolide.111(*)
Il importe aussi de signaler à cet effet que l'on
remarque des cas où les enfants lors de l'agression sont
contaminés des MST par leur agresseur. Lors de l'examen médical
de l'agresseur pour des fins d'enquête, on trouve que le résultat
est négatif. Il ne faudrait pas acquitter le prévenu sur le coup
car comme nous le savons, étant sous traitement et vu le temps qui
s'écoule entre l'abus, l'infection, les enquêtes et le
procès, l'accusé serait déjà guéris.
On aura donc vu que la production d'une preuve médicale
certaine est chose rare. La parole de l'enfant devient dans un nombre important
de cas, le seul élément sur lequel les magistrats pourront
prendre appui. Cela montre l'importance qu'il conviendrait de lui accorder.
§2. La
recevabilité de la déclaration de l'enfant
La parole de l'enfant n'est pas toujours bien reçue et
entendue. Cela tient en partie à la teneur des règles de
procédure pénale applicable en l'espèce. On analysera donc
la valeur juridique de la déclaration de l'enfant ainsi que la
vérification du bien-fondé des accusations portées par
l'enfant.
I. La
valeur juridique de la déclaration de l'enfant
La loi ne reconnaît pas à toutes personnes
indifféremment le droit de témoigner en justice. Elle a soumis ce
droit à certaines prohibitions absolues ou relatives selon qu'elle a
considéré le témoignage comme suspect, eu égard
à la qualité de la personne ou à la position
spéciale vis-à-vis des accusés. En droit pénal
Burundais, est considéré comme en état
d'infériorité physique et intellectuelle et à ce titre ne
doit pas être admis à prêter serment, le mineur de 13 ans.
Leur incapacité est fondée sur le fait qu'ils
peuvent ne pas se rendre compte exactement de la gravité du serment. En
outre, leur imagination et leur suggestibilité très forte font
d'eux de dangereux témoins et une prudence extrême
s'impose.112(*)
Les mineurs de 13 ans ne seront donc entendus qu'au seul titre
de renseignement. Il est constaté que pour les cas d'agression sexuelle
sur les mineurs, leurs témoignages sont très suspectés et
plus particulièrement lorsque l'hypothèse est celle d'un
inceste.
A titre d'illustration, la cour militaire siégeant en
matière pénale a décidé de ne pas se fonder sur la
déclaration d'une fillette de 7 ans. Celle-ci lors de l'interrogatoire
par le médecin avait affirmé avoir été
enfermée dans une « chambre douche » avant d'être
violée mais devant l'auditeur, avait déclaré que le
prévenu l'avait amené dans sa chambre et l'avait mise sur le lit
pour la violer. La cour a considéré qu'un enfant de 7 ans ne peut
pas confondre une chambre et une salle de bain et a acquitté le
prévenu pour défaut de preuve malgré que l'expertise ait
démontré la matérialité de l'acte.
C'est-à-dire érythème péri vaginal récent,
hymen perforé, pertes vaginales puantes avec comme possibilité
selon le médecin, de viol avec pénétration ou autre
traumatisme avec infection secondaire.113(*)
Nous trouvons que cette méfiance qui entoure la
déclaration de l'enfant est très excessive et qu'il faut essayer
de leur accorder plus de crédit. Par ailleurs, de très nombreux
médecins attirent l'attention sur le fait que les fausses
allégations émanant des enfants sont exceptionnelles.
Ainsi, la charte africaine des droits et du bien être de
l'enfant en son article 7 soutien la liberté d'expression de l'enfant en
disant que tout enfant qui est capable de communiquer se verra garantir le
droit d'exprimer ses opinions, sous réserve des restrictions
prévues par la loi.114(*)
II.
Vérification du bien-fondé des accusations de l'enfant
Pour se fier aux accusations de l'enfant, le juge dispose de
plusieurs moyens dont principalement la confrontation de l'enfant avec un
agresseur et l'expertise de crédibilité.
1. La
confrontation de l'enfant avec son agresseur
Du moment que deux thèses s'affrontent, la
confrontation sera toujours systématique malgré que dans sa
souveraineté décisionnelle, le juge soit libre dans la
détermination du mode de preuve à utiliser.115(*)
Mais nul ne peut nier que dans des cas pareils, c'est l'enfant
qui se trouve dans une position d'infériorité car faire face
à son agresseur adulte n'est pas facile surtout quand il s'agit d'un
proche. Cette confrontation est lourde de conséquence. Elle n'est pas
dans la matière qui nous occupe une garantie ni dans un sens ni dans un
autre.
La confrontation d'une fillette avec son père ou son
instituteur, personne respecté, voire aimé, n'exclut pas la
manipulation de la part de l'adulte, souligne CRETIN. Il serait dès lors
naïf de considérer que toute perversion est exclue du fait de la
présence du magistrat. Cela a comme conséquence que la parole de
l'enfant sous terreur devient particulièrement fragile et
rétractable. Dans la plupart des cas, l'enfant préférera
se taire car il est pris dans un conflit de loyauté extrêmement
difficile à gérer pour lui.116(*)
MARIELLE et CHOULOT soulignent que quand l'on fait confiance
à la parole de l'enfant, les aveux de l'abuseur et les preuves
matérielles de l'abus deviennent beaucoup plus difficiles à
recueillir. A la question de savoir comment distinguer ce qui est dit au
premier intact de ce qui a été rétracté, elles
préconisent que la personne à laquelle l'enfant se confie en
premier enregistre sur magnétophone les déclarations de
celui-ci.117(*)
2.
L'expertise de crédibilité
Pour vérifier le bien-fondé des accusations
portées par l'enfant, le magistrat peut également faire recours
à l'expertise de crédibilité. L'enfant sera donc
examiné par un médecin qui devra évaluer le degré
de crédibilité de sa parole. Mais là aussi, il convient
que la personne qui entend l'enfant soit réellement compétente en
la matière.
En effet, la personne qui écoute doit savoir qu'il n'a
pas les mêmes mots que l'adulte pour désigner son corps. Que
certains gestes peuvent ne pas paraître répréhensibles mais
banales ou au contraire d'autres sont ressentis comme honteux, défendeur
en fonction des tabou, de l'entourage ou de difficultés propres à
l'enfant quant à ses représentations personnelles de la
sexualité.
Mais, pour WOLF, « il m'embête » peut vouloir
dire : il se livre à des attouchements sexuels ou il a plaisanté
sur mon corps sexué. L'utilisation de poupées sexuées qui
permet à l'enfant de désigner et de montrer plutôt que de
parler peut aider quand on a affaire à des jeunes enfants ou à
des adolescents déficients intellectuels.118(*)
III.
Complexité et précarité de la preuve
S'il y a lieu de faire la synthèse de ce qui est dit
ci-haut à propos de la recherche de la preuve quand un mineur est
victime de violences, deux observations s'imposent. D'une part, recourant au
médecin pour la matérialité des faits, à la parole
de l'enfant s'il sait parler, aux rares témoins, l'enquêteur veut
dans la plupart des cas s'assurer d'avoir déniché le vrai
coupable. D'autre part, tous ces modes de preuves sont fragiles, très
fragiles dans notre pays en l'occurrence. En effet, les témoins en cette
matière sont souvent rares car l'acte se passe en cachette et ceux qui
prétendent avoir vu quelque chose mentent ou sont corrompus.
En outre, même si la parole de la victime n'est pas
influencée, elle n'est pas entièrement fiable. Des
paramètres à cet égard sont nombreux et relatifs pour
mesurer le degré de sa crédibilité.
Enfin, le comble des malheurs est que le niveau de
progrès de la médecine de notre pays affiche des lacunes
très déplorables. Le médecin constate des lésions,
la déchirure de l'hymen, du sang, etc. chez la victime et conclut que la
violence a eu lieu très récemment mais il ne montre pas la trace
du violeur.
L'enfant a été violé, c'est sûr,
mais par qui ? Bref, l'expert constate les faits mais n'indique pas leur
auteur. A cet égard, les prévenus accusés de viol
rétorquent en disant qu'ils sont d'accord que l'enfant a
été violé mais que ce ne sont pas eux les responsables,
que ça doit être quelqu'un d'autre. Que les spermes
retrouvés sur l'enfant ne sont pas les leurs, que cette grossesse n'est
pas leur oeuvre. Devant cette précarité de la preuve, le juge
bien avisé se perd, doute et exige d'autres enquêtes impossibles ;
le juge de mauvaise foi ce qui serait grave, s'aventurerait à trancher
selon l'équité dans tel ou tel sens.
A la fin de ce chapitre qui insiste sur l'analyse des preuves
spécifiques au viol, notre conclusion est que le chemin est encore long
dans notre pays au niveau de la recherche de la preuve. Les obstacles
identifiés étant nombreux et variés, le chapitre qui suit
a pour but d'approfondir quelques-uns et de proposer des solutions pour y
remédier.
CHAPITRE
III. POUR UN RENFORCEMENT ET UN ETABLISSEMENT EFFECTIF DE LA PREUVE DE
L'INFRACTION DE VIOL
Tout au long du précédent chapitre, nous avons
relevé les divers modes de preuve auxquels recourt l'enquêteur
pour établir la véracité des faits reprochés
à un accusé. Les mêmes moyens probatoires sont
employés par le juge pour établir sans équivoque la
responsabilité du prévenu. Tout particulièrement nous
avons ciblé le crime de viol et les preuves spécifiques
évoquées devant la juridiction saisie du dossier y relatif tout
en démontrant leur précarité.
Il convient donc d'emblée d'établir, dans le
présent chapitre, les difficultés inhérentes à ces
modes de preuve de l'infraction de viol disponibles dans le droit burundais et
d'apporter quelques propositions de renforcement d'autre part.
Section I.
Des problèmes liés à la preuve en matière de viol
Lorsqu'un viol se commet, l'officier de la police judiciaire
est saisie de la plainte dans les plus brefs délais notamment pour qu'il
établisse une réquisition à expert adressée au
médecin aux fins d'expertise médico-légale de peur que les
traces de la violence encore visibles disparaissent avec le temps. En
même temps, il procède aux interrogatoires, à
l'égard de différentes personnes ayant joué un certain
rôle dans le drame ou détenant une quelconque information à
propos du crime commis tout récemment. Il existe autant de
procédés dans la recherche de la vérité sur le
crime.
Mais comme le viol se commet généralement loin
des curieux, on remarque souvent qu'avant d'appeler au secours, la victime
jette un coup d'oeil sur elle pour vérifier si elle est dans un
état présentable. Cette réaction tout à fait
humaine comporte le risque de faire disparaître certains indices.
Ce comportement fait que la victime porte plainte
généralement plusieurs jours après les faits.
Dès lors, à part l'opportunité d'un aveu
non extorqué et qui perdure de l'OPJ au juge, les autres moyens
probatoires connaissent des limites, des obstacles d'autant plus complexes que
les intervenants (OPJ, OMP, juge) ont du mal à confirmer le vrai
coupable du crime. A travers cette section, nous allons présenter la
fragilité des moyens de preuve disponibles dans nos juridictions. Nous
aborderons plus précisément les modes de preuve qui sont plus
usités en matière de viol à savoir la preuve
médicale et la preuve testimoniale.
§1.
Difficultés liées à l'administration de la preuve
médicale
Si le viol est commis et que la victime ne tarde pas à
aller à l'hôpital, les conclusions tirées des
résultats du laboratoire sont souvent déconcertantes : vagin
habitué, rien à signaler, congestion des organes sexuels, des
rapports auraient eu lieu, la fille est depuis longtemps
déviergée, présence de spermes, etc.119(*)
Tous ces résultats provenant du médecin non
seulement ne désignent pas l'abuseur, mais aussi ne font pas le constat
d'une marque de violence. En effet, sauf de rares cas, les femmes ayant maintes
fois eu des rapports sexuels, donc déviergées, ne
présentent rien lors de l'examen. Dès lors, la
matérialité des faits s'avère complexe, le devoir le plus
ardu reste de prouver que le rapport ayant eu lieu, il n'y a pas eu
consentement dans le chef de la victime.
On assiste aussi aujourd'hui à un autre grand obstacle,
auquel se heurte la preuve médicale. En effet, les rapports d'expertise
médicale faits par des experts sont aujourd'hui de plus en plus
contesté par les policiers qui redemandent dans la plupart des cas une
contre expertise pour être sûr des résultats qui leur sont
délivrés. Ce manque de crédibilité est dû
surtout sur le fait que les médecins experts sont imprécis dans
leurs résultats et plus encore certains se permettent de qualifier
l'infraction alors que cela n'est pas de leur ressort.
§2. Les
difficultés liées au témoignage
Le témoignage étant le récit fait par une
personne à l'occasion d'un procès, de ce qu'elle prétend
avoir vu ou entendu à propos d'une infraction, il est difficile pour le
magistrat de juger sans des témoins qui sont pour lui « les yeux et
les oreilles de la justice ».120(*)
Mais dans ce cas, le rôle du témoin est seulement
d'exposer ce qu'il a vu, entendu ou appris mais pas d'exprimer sa propre
opinion ou son jugement de valeur, sur la gravité des faits ou sur la
responsabilité de leur auteur.
En cas de viol, infraction qui se commet en cachette, les
témoins oculaires du crime sont très rares. On trouve surtout
dans ce cas des témoins auriculaires. Ils ont entendu parler d'un viol
commis dans le quartier par monsieur X sur mademoiselle Y. Mieux, ils ont
ouï des cris d'une femme appelant au secours.
Bien que très fréquemment employée, cette
preuve par témoins est loin d'être sûre car elle est souvent
entachée d'erreurs volontaires ou surtout involontaires.
L'expérience a démontré que le
témoignage absolument exact constitue l'exception, même s'il est
pour son auteur le reflet de la réalité.
Il s'y trouve des lacunes, des additions, des transformations
inconscientes et des confusions de temps et de lieu. Son appréciation
appelle la prudence, la connaissance de la psychologie du témoin et de
sa façon de s'exprimer.
Il importe donc de démontrer ici la fragilité et
les difficultés découlant de cette forme de preuve lorsqu'un viol
a été commis.
I.
L'invraisemblance
L'invraisemblance se fonde sur l'appréciation des
déclarations faites par les témoins soit pour étayer ou
pour nier la matérialité des faits. Ainsi, certaines
déclarations contrarient et défient la logique de la raison
humaine et sont loin d'emporter l'intime conviction quant à la
véracité des faits.121(*)
Ainsi, les témoins à décharge dans un cas
de viol disent n'avoir rien entendu à cette heure là aux environs
du cabaret où ils étaient avec d'autres témoins à
charge, qui a tort, qui a raison ?
II. Faux
témoignage et subornation de témoins
Le législateur burundais réprime le faux
témoignage et la subornation de témoins aux art.269 et 265 du C.P
sans toutefois les définir.
MERLE et VITU définissent le faux témoignage
comme une déposition faite sous serment autour d'un procès
pénal, civil ou administratif, lorsqu'elle contient une
altération volontaire de vérité, propre à tromper
les juges en faveur d'une des parties en cause ou contre elle et qu'elle est
devenue irrévocable.122(*)
Les différentes composantes de l'infraction peuvent
être occupées en deux séries : il faut une
déposition faite en justice et sous serment d'une part, il faut d'autre
part une altération de la vérité, exprimée
matériellement par certaines formes de mensonges causant
préjudice à autrui et faite dans l'intention de tromper la
justice. L'absence de rétractation du mensonge ou le caractère
irrévocable de la déposition étant plus une exigence
procédurale de la répression qu'une condition de son
existence.123(*)
Distincte du faux témoignage, la subornation de
témoin s'entend de la provocation à commettre celui-ci.
La subornation de témoin est le fait d'user de
promesses, offres ou présents, de pressions, menaces, voies de fait,
manoeuvres ou artifices pour déterminer autrui à faire ou
délivrer une déposition, une déclaration ou une
attestation mensongère, soit au cours d'une procédure et en tout
état de cause, soit en toute matière en vue d'une demande ou
d'une défense en justice.124(*)
Le juge doit donc être vigilant et beaucoup faire
attention face à la constitution de groupes de faux témoins aussi
bien du côté des victimes que des prévenus ou des membres
de leurs familles respectives. Ainsi, les amis de la présumée
victime diront qu'elle a bel et bien été violentée, qu'ils
ont entendu ses cris, qu'ils sont même allés la secourir ; ce qui
diverge souvent à ce qu'a offert la victime auprès des
enquêteurs ou devant le juge.
III.
Témoignage erroné
Certains témoins sont distraits lors des faits et tous
ont des souvenirs dont la précision s'estompe avec le temps. Pour le cas
du témoignage erroné, le témoin est objectif mais il a
été inattentif à une partie des faits et raconte une
histoire qu'inconsciemment il a réécrite par suite de lacunes,
additions, transformations, falsifications inconsciente.125(*)
La vérité recherchée donc dans le
procès de viol repose entre autre sur les témoignages à
charge ou à décharge qui ont entendu ou qui n'ont pas entendu la
victime crier, les appeler au secours. C'est un véritable combat qui met
aux prises le ministère public et la partie civile contre
l'accusé, les témoins servant de base arrière de repli
tactique.
Dans tous les cas, pour ou contre, les témoins perdent
l'OPJ qui à son tour rejette la charge de la recherche de la preuve
à l'OMP. Il convoque les deux côtés et tire de chaque
penchant une lueur de vérité allant dans tel sens ou dans tel
autre. Rien à confirmer ni à infirmer. Une contradiction qui perd
tous ses intervenants dans la confusion.
Il appartient donc au juge devant qui le témoignage est
produit de savoir qu'il a affaire à un mode de preuve fragile et user de
circonspection dans son appréciation.
§3.
Difficultés de réunir les preuves
La difficulté de réunir les preuves tient
à la nature même de l'infraction. Elle a pour conséquence
le recours systématique et quasi exclusif du certificat médical.
En effet, la primauté du certificat médical sur les autres
preuves fait que cette preuve est la seule invoquée au niveau des
tribunaux alors que les autres preuves comme le témoignage
étaient ficelées. Mais les réalités nationales en
matière de santé font parfois qu'il est difficile de
répondre à cette exigence sans oublier que pour certaines
victimes généralement les majeures, cette catégorie de
preuve n'apporte généralement pas de contribution.
§4. Les
fausses victimes ou faux viols
Face à l'insuffisance et à la
précarité de la preuve en matière du crime de viol ;
certaines personnes, le plus souvent des femmes et des jeunes filles,
conscientes de cet handicap, accusent injustement d'autres personnes.
On assiste souvent à des cas où certaines
filles, le plus souvent des prostituées, s'en prennent aux patrons qui
les déplacent dans leurs voitures. Aussi, ce cas se remarque chez
certaines femmes qui, par règlement de compte ou vengeance, s'attaquent
aux hommes qui leur ont fait du mal en les accusant de viol. Le plus souvent,
leurs maris ou leurs amants.
Autant sont donc les cas où la preuve des faits
constitutifs du viol est impossible, fragile ou difficile à trouver.
Seulement, l'insuffisance de voies probatoires est aggravée par
l'état de sous-développement technique ou techno-logique dans
lequel est classé notre pays et par conséquent nos services
judiciaires. Aussi, des perspectives sont à préconiser pour une
justice moins dubitative.
Section II.
La technologie au service de la preuve en cas de viol
Lorsqu'un viol se commet et que la victime porte plainte
devant l'OPJ qui a pour mission de recevoir les dénonciations, plaintes
et rapports relatifs aux infractions, celui-ci l'écoute et rédige
un procès-verbal (PV) d'audition qui constitue le dépôt de
plainte. Il interroge donc la victime sur les détails de l'infraction
(la date, l'heure, le lieu d'agression, l'auteur présumé,...)
afin de recueillir un maximum d'indices.
Comme nous l'avons dit supra, la première chose que
l'OPJ fait est d'envoyer la victime chez le médecin expert qu'il
désigne lui-même afin qu'il lui délivre le certificat
médico-légal qui servira de preuve. En effet, le médecin
examine les organes génitaux de la victime pour établir la
matérialité des faits. Les résultats du laboratoire
concluent parfois à des lésions, inflammation (sang encore frais,
marque de frottement, écorchures, présence de spermes dans le
sexe féminin, une grossesse en cours si un temps est
écoulé, etc.).
Malheureusement, les hôpitaux nationaux ne sont pas
encore en mesure d'établir que ces spermes sont attribuables à
tel et non à tel autre, que le frottement ayant enflammé la
partie intérieure du sexe de la victime est le fait de tel abuseur
surtout en se basant sur les marques ou les traces encore visibles (que cette
grossesse est l'oeuvre de tel homme, etc.).
L'OPJ chargé des dossiers peut également
procéder à l'audition d'autres personnes (témoins, auteur
présumé), afin de récolter un maximum
d'éléments pour réunir des preuves sur l'existence ou
l'absence d'infraction ainsi que sur l'identification du présumé
coupable. Mais comment se fier aux seules déclarations des
témoins ou du présumé violeur, comment savoir s'ils disent
réellement la vérité face à la fragilité du
témoignage qui peut s'avérer erroné ou purement mensonger
comme nous l'avons vu plus haut.
A cet égard, BORRICAND écrira que « les
progrès de la science donnent aux juges des certitudes et ont
déjà évité des erreurs judiciaires.
»126(*)
Il faut donc faire recours à des techniques permettant
d'obtenir l'individualité d'une trace, d'un échantillon comme
entre autres la dactyloscopie, l'analyse des empreintes
génétiques, l'hypnose, le détecteur de mensonge, la
narco-analyse, la psychiatrie, le prélèvement sanguin, les
écoutes électroniques, etc.
§1. Les
empreintes génétiques
La preuve par empreintes génétiques ou ADN est
souvent présentée aujourd'hui comme la preuve parfaite permettant
de confondre l'auteur d'un crime dès lors qu'il a laissé sur les
lieux du crime ou sur le corps de la victime quelques cellules de son sang,
salive, sperme,... et qu'une comparaison pourra être faite avec des
cellules appartenant à son propre corps s'il est
soupçonné. D'où un engouement pour ce
procédé dans beaucoup de pays et spécialement souvent dans
leur législation.
Les analyses d'ADN sont donc indispensables dans la
détermination des vrais auteurs de l'acte incriminé. Pour le cas
du viol, les spermes laissés par le violeur sont comparés
à ceux du prévenu plaidant non coupable. C'est un travail qui se
déroule au laboratoire.
L'individualité des gènes permet d'éviter
les risques de confusion et de doute sur le coupable et d'indiquer
précisément l'auteur du viol.
La même technologie débouche à la
découverte du vrai père de l'enfant et donc l'auteur de la
grossesse disputée. A l'heure qu'il est, il est même possible de
prélever ne fût-ce que la salive du père et de l'enfant et
après examen du laboratoire, des similitudes excluant toute autre
personne se dessinent sans conteste.
§2. La
dactyloscopie
La dactyloscopie est l'étude des empreintes digitales
permettant d'identifier un individu. Cette étude des empreintes
digitales est longtemps restée un moyen privilégié
d'identification des personnes et reste encore très utilisée. Les
empreintes digitales sont en effet formées par des crêtes de la
peau présentes exclusivement à la face palmaire des mains et des
pieds. Ils sont uniques chez chaque individu, y compris chez les vrais jumeaux
constituant ainsi un moyen sur l'identification des personnes.
En cas de viol, l'examen des empreintes digitales
laissées sur le corps de la victime pendant l'affrontement peut conclure
à une part jouée par le présumé violeur.
Dès la commission de ce crime, la victime devra alors
être présentée tout droit au technicien qui ne
relève pas seulement les traumatismes causés sur les organes,
mais aussi et surtout toutes les autres taches, traces, marques dont
l'individualité va conclure à affirmer ou infirmer le rôle
joué par le présumé violeur.
§3. La
narco-analyse
Cette technique consiste à pratiquer un examen
neuropsychiatrique sur une personne après lui avoir infecté un
narcotique par voie intraveineuse. A cet instant, les barrages psychiques
volontaires ou involontaires disparaissent temporairement ; ce qui permet
à la personne d'exprimer des idées ou des sentiments qu'il
n'extériorisait pas par méfiance ou inhibition, ou qui
étaient refoulées dans son subconscient.
Selon JORDAN, le degré de fiabilité et
d'efficacité de cette technique à des fins probatoires semble
faible. Il s'explique en disant qu'en France des expériences furent
effectuées dans un hôpital de BESANCON et les résultats
furent loin d'être probants.
En effet, seulement 12% parmi ceux-ci furent jugés
satisfaits alors que 60% furent négatifs et 30% jugés
intéressants sur des détails secondaires. Il semble, conclut-il
que plusieurs individus demeurent apte au mensonge malgré l'effet de la
drogue.127(*)
Si nous adaptons cette utilisation de la drogue à la
situation qui prévaut dans notre pays, on remarque souvent que les
soûlards qui se querellent ont tendance à révéler
facilement ce qu'ils avaient caché et le racontent à haute voix
sous pression justement de l'alcool qui fonctionne dans ce cas comme de la
drogue. Un adage latin va dans le même sens «in vino veritas
».128(*)
§4.
L'hypnose
L'hypnose est utilisée par les forces policières
pour des fins d'enquête ainsi que par les psychiatres pour appuyer leur
diagnostic. Par cette technique, on peut plonger dans le subconscient d'un
individu pour y rechercher des souvenirs qui seraient inaccessibles de
façon consciente.
Mais est-il vrai que la personne dit la vérité
lorsqu'elle est en transes hypnotiques ? Le droit burundais réprime les
extorsions d'aveux notamment par la torture, et les preuves par divination,
envoûtement,... sont prohibées.
Cependant pour BELANGER et hors le cas de confusion, il peut
arriver que l'hypnose constitue le seul moyen de permettre le rappel des
événements, surtout si ces derniers furent la cause d'un blocage
émotionnel.129(*)
Selon cet auteur, s'il est retenu que ce procédé
psychiatrique peut déboucher à la découverte de la vraie
face du drame, le danger d'influencer la mémoire d'un sujet sous hypnose
est grand pour dire que le potentiel manipulatoire diminue la fiabilité
des résultats de l'hypnose. Il dit aussi que même après la
séance hypnotique le sujet risque de considérer véridiques
des pseudo souvenirs qu'il aurait inventé de toutes pièces
pendant l'hypnose. Il y aurait alors fabulations, c'est-à-dire tendance
chez la femme hypnotisée à combler ses trous de mémoire
par du matériel fantasmé ou imaginé, matériel qui
sera ultimement accepté comme étant véridique par
l'hypnotisé et trop souvent par l'hypnotiseur.130(*)
§5. Le
détecteur de mensonge
Pour PATENAUDE, le détecteur de mensonge permet de
connaître le secret de la pensée. En effet, les conflits
antérieurs et l'inquiétude résultant du mensonge
créent souvent une augmentation du rythme respiratoire, de l'afflux
sanguin dans le système circulatoire et une activation des glandes
sudoripares.131(*)
S'il est besoin d'adapter cette technique, la détention
du mensonge est une pratique répandue dans les sociétés
traditionnelles. Au moyen âge, les européens considéraient
que le menteur se retrouvait la bouche sèche. En Inde, on imposait au
suspect d'avaler du riz consacré et une salivation déficiente
l'empêchait de l'avaler. En Afrique, le sorcier utilise son olfaction
pour sentir le menteur, car le mensonge de ce dernier et la crainte
d'être découvert le font transpirer.132(*)
Cette technique peut contribuer quant à la
vérification des dires du présumé violeur pour sa
défense. Mais les résultats de cette technique sont à
prendre avec attention car le détecteur de mensonge peut s'affoler alors
que la personne dit la vérité mais est tout simplement
impressionnée et émue. En effet, un tel appareil repose sur le
résultat qu'un mensonge entraîne une réaction
émotive mesurable ; ce qui est encore controversé aujourd'hui car
des études ont montré que certains sujets, les véritables
menteurs seraient capables de contrôler leurs réponses physiques
et ainsi tromper les résultats.
Mais alors, existe-il des manifestations propres au mensonge ?
Un chercheur américain répond à
l'affirmatif en disant que ces manifestations pourraient être visibles
grâce à l'IRMF (Imagerie fonctionnelle par résonance
magnétique nucléaire). Cette technique permet de visualiser les
zones de cerveau en activité. Or, mentir ou dire la vérité
ne mobilise pas les mêmes zones. Globalement, l'activité
cérébrale est plus intense quand on tente de cacher la
vérité. Les menteurs les plus habiles et les plus
expérimentés n'y résisteraient pas.133(*)
§6.
Ecoutes électroniques
PRADEL affirme que pour lutter contre la criminalité
organisée, le magnétophone peut rendre de grands services et que
les écoutes téléphoniques peuvent être très
bénéfiques. En effet, une jurisprudence traditionnelle se
montrait le plus souvent favorable à l'emploi de ces
procédés, tout en affirmant qu'ils valaient non comme aveux, mais
comme simples indices pouvant s'ajouter à d'autres indices et fondant la
conviction du juge si les droits de la défense n'avaient subi aucune
atteinte ; ce principe n'était pas hostile à l'emploi de ces
techniques insistant toutefois sur la double nécessité d'une
commission rogatoire et d'une absence de provocation. On pouvait invoquer en
faveur du procédé : « le fait que le juge ne se montre
pas plus déloyal quand il intercepte une communication
téléphonique que lorsqu'il saisit une lettre. »134(*)
En matière de viol, cet enregistrement ou fixation de
la parole au moyen du magnétophone, des écoutes
téléphoniques serait localisé aux appels au secours de la
victime ou aux menaces qui lui proférait le présumé
violeur par téléphone.
Il convient de conclure alors que la valeur probable de
l'enregistrement dépendra de sa qualité technique. Un mauvais
enregistrement pourra être soit inaudible soit inintelligible. Evidemment
la mauvaise qualité de l'enregistrement ne devait pas le rendre
irrecevable en preuve car il s'agit là d'une question de fait relevant
de l'appréciation du juge.
§7. La
photographie
Pour PATENAUDE, le téléobjectif permet de capter
la conduite d'une personne sans qu'une intuision physique soit
nécessaire. Il continue en disant que la nuance des personnes peut
être suivie par la détection de chaleur et ce, même à
travers des parois opaques, que la technique de starton permet la photographie
de noirceur, que même des appareils quasi-microscopiques bien
dissimulés peuvent capter des photographies de nos mouvements.
135(*) Cela
s'avère être un outil merveilleux de surveillance pour un Etat
capable de s'en procurer.
Dans la particularité du crime de viol qui nous
intéresse, la photographie peut viser les contacts qui ont marqué
les deux partenaires avant le drame, le lieu du crime notamment si c'est dans
la brousse, les arbrisseaux cognés pendant l'affrontement, le gazon
meurtri par leurs corps, les habits déchirés et toute autre trace
laissant présumer qu'il s'est passé quelque chose. Cela exige
encore la présence d'un photographe. C'est du moins possible que
l'enquêteur, l'OPJ en l'occurrence, puisse se déplacer sur les
lieux directement avec un appareil photographique.
§8. Quid
de la fiabilité des techniques modernes de la preuve ?
Avec l'exploitation des connaissances en matière
scientifique, la tentation est forte chez les pénalistes, juges,
procureurs et policiers d'utiliser ces connaissances pour détecter et
confondre les malfaiteurs. Mais, des obstacles à un usage
généralisé se présentent cependant à
l'esprit, dont il faut mesurer la valeur.
Le premier obstacle touche à la fiabilité de ces
moyens scientifiques. Est-ce que tous les procédés modernes sont
susceptibles d'avoir une égale et totale confiance ?
Pour PRADEL, la réponse est certainement non. Il
l'explique en disant que la narco-interrogatoire qui tend à l'obtention
d'aveux est d'une efficacité réduite : l'aveux ne peut être
obtenu avec certitude et celui qui est obtenu n'est pas forcément vrai
si l'on songe à l'existence d'un phénomène
d'auto-accusation. Le détecteur de mensonge ou polygraphe par contre
peut tout au plus donner des indications pour orienter l'enquête. De son
côté, le narco-diagnostic qui vise à détecter une
simulation ou des troubles psychiques peut s'avérer faible. Et ce
procédé plus moderne qu'est le prélèvement de
cellules aux fins de détermination de l'empreinte
génétique d'un individu (A.D.N) est indéniablement d'une
grande fiabilité dès lors que les conditions de recueil des
échantillons et leur degré de pureté sont au-dessus de
tout soupçon .Il conclut en disant que l'argument de la non
fiabilité ou d'un doute sur la fiabilité n'est donc dans
l'ensemble pas très solide, sauf en ce qui concerne le «
sérum de vérité ».136(*)
Aussi délicat est le second obstacle, tiré du
respect des droits de l'homme. Il s'agit plus précisément de
l'inviolabilité du corps à propos des prélèvements,
de l'intimité de la personne à propos notamment des
écoutes téléphoniques et des droits de la défense,
spécialement dans leur aspect concernant le droit au silence.
Face à cet obstacle, LEVASSEUR s'exprime en disant que
la véritable raison permettant de faire appel aux procédés
scientifiques et de balayer en conséquence l'argument des droits de
l'homme est celle-ci : la justice pénale sanctionne les graves atteintes
à l'intérêt général contrairement à la
justice civile, et pour défendre cet intérêt
général, la justice doit disposer de moyens
particulièrement efficaces. D'où l'on peut déduire que
plus est grand le péril à l'intérêt
général plus les procédés scientifiques utilisables
pourront être contraignants.137(*)
LEVASSEUR continue en expliquant que par exemple, l'appel
à l'A.D.N doit être possible pour la preuve de toute infraction
grave car la détermination du coupable va dans le sens de
l'intérêt général en permettant à la fois
d'éviter de la part de celui-ci la commission d'autres infractions et la
condamnation d'un innocent contre lequel il y aurait eu des indices à
charge. En clair, conclut-il, entre deux maux l'atteinte « très
réduite » aux droits de l'homme d'un individu et l'atteinte
à l'ordre social, il faut choisir le moindre.138(*)
Nous approuvons donc l'idée de ces deux auteurs car
nous soutenons que les techniques modernes au service de la preuve sont d'un
grand intérêt dans la recherche de la vérité
lorsqu'une infraction est commise. Pour le cas du viol qui nous concerne,
l'analyse des empreintes génétiques et des empreintes digitales
laissées sur le corps de la victime par le violeur serait
indéniablement d'un grand intérêt dans la
détermination de l'identité de celui-ci.
Néanmoins, des garanties s'imposent. La décision
de recourir à une preuve scientifique doit être prise en principe
par un juge, défenseur naturel de libertés. Dans le cas du
prélèvement sur la personne, il faut que la mesure
n'entraîne aucune souffrance ou suites fâcheuses. Enfin, dans tous
les cas, il faut que l'intéressé puisse discuter les
résultats.
CONCLUSION
GENERALE
Le viol est un crime qui ne cesse de se propager malgré
sa sévère répression. Dans le procès dont il fait
l'objet, les acteurs de la justice peinent à prouver de façon
indéniable sa véracité. A moins que heureusement le
prévenu plaide coupable, chose qui est rare comme nous avons eu à
en faire part tout au long de notre travail.
L'absence d'une définition légale de viol dans
le Code pénal burundais amène souvent des confusions entre
celui-ci et les autres infractions de tendance sexuelle telle que l'attentat
à la pudeur et les outrages publics aux bonnes moeurs. C'est ce qui rend
la tâche plus complexe aux magistrats dans l'application de ces
textes.
Dans le premier chapitre réservé aux
généralités, nous avons présenté les notions
de viol et les infractions de tendance sexuelle telles que l'attentat à
la pudeur, les outrages aux bonnes moeurs. Nous avons distinguer le viol commis
sur des mineurs du viol commis sur des majeurs. ce premier puni
sévèrement, n'exige pas l'absence de consentement parmi ses
éléments constitutifs. En fin de compte ce chapitre nous a donc
permis de connaître précisément le sens et la
réglementation du crime de viol, ses différentes formes, ses
caractéristiques et distinctions avant de chercher à atteindre la
véracité de sa perpétration ou commission.
Le deuxième chapitre a consisté en l'analyse
juridique des divers modes de preuves auxquels recourent les services de la
justice pour établir le responsable du crime de viol. Nous avons d'abord
décrit les preuves en général tout en soulignant que le
droit retient en règle générale le principe de la
liberté de preuve. Pour dire que la preuve est établie par tous
les moyens à l'exception des moyens probatoires prohibés telle
que la torture. Les voies probatoires les plus employés ont
été décrites notamment l'aveu, le témoignage, les
constations matérielles et les présomptions.
Plus particulièrement en matière de viol, nous
avons démontré que les voies de preuve les plus courantes sont
les témoignages oculaires et auriculaires, l'aveu qui est rare vu le
caractère secret du crime en question et les expertises
médico-légales. Nous avons aussi montré la
précarité de ces moyens de preuve de viol qui sont souvent
utilisés. S'agissant des interrogatoires, nous avons observé que
la confrontation des déclarations des différentes personnes ayant
joué un quelconque rôle dans le crime commis peut aboutir, par
analyse, à des mensonges. Nous avons cité le cas de la divergence
entre les déclarations de la victime majeure et la déposition du
témoin oculaire.
L'analyse des expertises médico-légales peut
aussi faire conclure dans un sens ou dans un autre. Ainsi, une expertise
mentionnant que la victime mineure parvenue chez le médecin dans trois
semaines qui présente encore des traces de sang récent laisse le
juge penser que la victime a été violentée après
l'arrestation du prévenu.
Nous avons en outre présenté les
différentes conclusions qui sont tirées par l'expert lesquelles
laissent parfois l'OMP et le juge au dépourvu. Par exemples « il
n'y a pas de signe d'un traumatisme au sexe ; rien à signaler ; viol
difficile à confirmer ni à infirmer », etc.
Le dernier chapitre réservé aux perspectives de
modernisation des moyens de preuve nous a conduit à deux sections. D'une
part, nous avons relaté les difficultés éprouvées
par les enquêteurs lors de l'utilisation des voies de preuve disponibles
dans notre pays en matière de l'infraction de viol. Nous avons alors
démontré la fragilité du témoignage. Il peut
être faux de bonne foi, il peut être faux de mauvaise foi selon la
moralité du témoin. Il peut avoir été
soudoyé. Des promesses de dons, d'argent, de contrepartie dans une autre
affaire sont monnaie courante dans notre monde judiciaire. Surtout quand il y a
décalage temporel entre le moment du crime et l'enquête. Les
témoins s'alignent facilement en deux camps opposés alors que
tous déclarent avoir assisté à la commission du crime ou
avoir quelque information sur le viol commis.
L'expertise médico-légale dont nous avons
relevé les mentions les plus utilisées est destinée
à établir la matérialité des faits. Dans notre
pays, le médecin se contente de dire qu'il y a des lésions, des
inflammations, les déchirures de l'hymen ou l'absence de
virginité et conclut que les rapports sexuels ont été
tenté ou ont eu lieu.
Cependant, il n'indique pas de qui sont les spermes
laissés sur les organes de la victime, de qui sont les traces de doigts,
les écorchures constatables sur l'endroit examiné.
La suspicion ne suffit pas d'autant plus qu'il existe aussi
des viols inventés dans le but d'un règlement de compte,
calculés pour obtenir, d'un patron, de l'argent, etc. Nous avons donc
montré que les capacités médicales de nos hôpitaux
ne sont pas en mesure d'individualiser les résultats obtenus. Nous avons
dès lors présenté dans la seconde section les
différentes techniques mises en oeuvre dans les pays
développés pour établir le vrai auteur des faits
génétiques qui s'individualisent, la dactyloscopie, le
détecteur de mensonge ; la narcose ou sérum de
vérité, la photographie, l'enregistrement, l'hypnose, etc.
Particulièrement pour le cas du viol, nous avons
noté que le recours aux exemplaires génétiques et à
la dactyloscopie établit bien précisément et
sûrement de qui sont les traces laissées sur la victime en les
comparant à celles prélevées sur le suspect. Dans tous les
cas, même quand le prévenu appréhendé n'est pas
finalement le vrai auteur selon les examens effectués, il y a lieu de
comparer les traces retenus aux autres éléments à
prélever chez d'autres suspects possibles dans le but de
découvrir en fin de compte le vrai auteur des faits
incriminés.
En somme, les moyens probatoires disponibles dans notre pays
sont précaires et ne permettent pas aux enquêteurs de prouver la
responsabilité du prévenu accusé de viol. A savoir que les
témoins peuvent facilement mentir, peuvent être achetés vu
d'ailleurs la gravité ou la lourdeur des peines infligées
à l'auteur condamné et que l'expertise requise au Burundi
n'indique pas le coupable des faits matériels constatés sur les
organes génitaux de la victime ; Quelle justice rendre à cet
égard ? Le juge se perd dans le doute ou s'aventure à trancher
injustement.
Nous ne manquerions pas à recommander :
§ Au gouvernement : d'envisager l'utilisation des
technologies modernes utilisées dans les pays développés
dont les empreintes génétiques et la dactyloscopie qui
établissent bien précisément et sûrement de qui sont
les traces sur la victime en les comparant à celles
prélevées sur le suspect afin d'épauler la justice dans la
recherche de la preuve.
§ A la magistrature :
- De considérer le problème de la preuve en
matière de viol comme un cas qui requière plus d'attention en
mettant au point un régime spécial de la preuve spécifique
au viol
- De traiter avec célérité les dossiers
de viol. En effet la lenteur de la justice dans le traitement de ces dossiers
fait souvent disparaître les preuves.
§ Aux autorités de la police nationale :
- Envisager des formations constantes pour équiper
véritablement leurs agents et de leur doter de tout le nécessaire
pour l'accomplissement effectif de leur tâche. Cela s'avère
être très nécessaire dans la lecture et
l'interprétation du certificat médico-légal.
- Recruter des agents ayant au préalable des
connaissances juridique et de faire respecter véritablement la loi en
veillant à l'applicabilité des dispositions légales.
BIBLIOGRAPHIE
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: Enquête sur les violences sexuelles dans les sites des
sinistrés et leurs alentours dans les communes de Buyengero, Burambi,
Rumonge, Kayogoro, Nyanza-lac, Bukeye et Ruhororo, Bujumbura,
inédit, 2006,70p
3. Ministère de la justice, Recueil des
décisions judiciaires burundaises, Contentieux des violences
sexuelles, Bujumbura, inédit, 2003.
4. Ministère de la santé publique, Manuel de
formation pour la prise en charge de victimes de violences sexuelles à
l'attention du personnel de santé, Bujumbura, inédit, 2002.
VI. Sites Internet
1.
http://www.sosfemme.com/violences/viol.menu.htlm.(27/08/200)
2.
http://www.wikipedia.org.(27/08/2007)
3.
http://www.resilience.netfirms.com.(27/08/2007)
TABLE DES
MATIERES
DEDICACE i
REMERCIEMENTS ii
SIGLES ET ABREVIATIONS
iii
INTRODUCTION GENERALE iv
CHAPITRE I : DES GENERALITES
vii
Section I : Notions
générales vii
§1. Définition de
l'infraction de viol vii
§2. Eléments
constitutifs x
I. L'élément
légal x
II. L'élément
matériel xi
1. Notion de
pénétration sexuelle xi
2. Absence de consentement
xiii
a. Violence xiii
b. Les menaces xiv
c. Surprise xiv
d. Abus d'une personne xv
III. L'élément moral
xv
§3. Quid de la tentative de
viol xvi
§4. Les formes de viol
xvii
I. Le viol individuel
xvii
II. Viol collectif xvii
III. Viol avec violence
xviii
IV. Viol incestueux xviii
V. Viol par une autorité
morale xix
VI. Viol conjugal xix
VII. Viol en temps de guerre
xxi
§5. Viol contre la personne
d'un mineur xxv
Section 2 : Le viol et infractions
voisines xxvi
§1. Le viol et l'attentat
à la pudeur xxvii
I. L'acte matériel
xxviii
II. L'élément
intentionnel xxviii
III. La tentative xxix
§2. Le viol et les outrages
publics aux bonnes moeurs xxxi
CHAPITRE II. PRECARITE DES MOYENS DE
PREUVE DE L'INFRACTION DE VIOL xxxiii
Section I. La preuve en
matière pénale xxxiii
§1. La charge de la preuve
xxxiv
§2. Principe de la
liberté de la preuve xxxvi
I. Portée du principe
xxxvi
II. Fondement du principe
xxxvi
III. Les limites de la
liberté de preuves xxxvii
1. Respect des formes
déterminées par la loi xxxvii
2. Respect de la libre contradiction
des preuves xxxvii
3. Respect de la dignité de
la personne humaine xxxviii
§3. Principe de l'intime
conviction xxxviii
§4. Les modes de preuve en
matière pénale xxxix
I. L'Aveu xl
II. Le témoignage
xli
III. Les constatations
matérielles xliii
1. La descente sur les lieux
xliii
2. Les saisies perquisitions
xliii
3. Les expertises xliv
IV. Les présomptions
xlv
Section II : Analyse de preuves
spécifiques au viol xlvi
§1. L'aveu xlvi
§2. Témoignage
xlvii
§3. Objets matériels et
traces corporelles xlviii
§4. Expertise
médico-légale xlix
Section III. Le viol sur mineur et
sa preuve lii
§1. L'administration de la
preuve médicale liii
I. La preuve physique
liii
II. L'examen médical
proprement dit liii
§2. La recevabilité de
la déclaration de l'enfant lvi
I. La valeur juridique de la
déclaration de l'enfant lvi
II. Vérification du
bien-fondé des accusations de l'enfant lviii
1. La confrontation de l'enfant avec
son agresseur lviii
2. L'expertise de
crédibilité lix
III. Complexité et
précarité de la preuve lix
CHAPITRE III. POUR UN RENFORCEMENT
ET UN ETABLISSEMENT EFFECTIF DE LA PREUVE DE L'INFRACTION DE VIOL
lxi
Section I. Des problèmes
liés à la preuve en matière de viol lxi
§1. Difficultés
liées à l'administration de la preuve médicale
lxii
§2. Les difficultés
liées au témoignage lxiii
I. L'invraisemblance
lxiii
II. Faux témoignage et
subornation de témoins lxiv
III. Témoignage erroné
lxv
§3. Difficultés de
réunir les preuves lxv
§4. Les fausses victimes ou
faux viols lxvi
Section II. La technologie au
service de la preuve en cas de viol lxvi
§1. Les empreintes
génétiques lxvii
§2. La dactyloscopie
lxviii
§3. La narco-analyse
lxix
§4. L'hypnose lxix
§5. Le détecteur de
mensonge lxx
§6. Ecoutes
électroniques lxxi
§7. La photographie
lxxii
§8. Quid de la fiabilité
des techniques modernes de la preuve ? lxxii
CONCLUSION GENERALE
lxxiv
BIBLIOGRAPHIE lxxix
TABLE DES MATIERES
lxxxiv
* 1 Le doute profite à
l'accusé
* 2 D.L. n°1/6 du 4 avril
1981 portant réforme du code pénal, art.385
* 3 RP 13. 684 RMP 108.695
République du Burundi, ministère de la justice, T.G.I. Bujumbura,
in recueil des décisions judiciaires, contentieux des violences
sexuelles,Bujumbura ,inédit, p. 12.
* 4 VERON, M., Droit
pénal spécial, 2ème éd., Paris,
Masson, 1982, p. 192.
* 5 CORNU, G., vocabulaire
juridique, 4ème éd., Paris, PUF, 2003, p. 931
* 6 BOUCHET-SAULINE R.F,
Dictionnaire pratique du droit humanitaire, paris , la
découverte et Syros, p. 381
* 7 RASSAT, M.L., Droit
pénal spécial, infractions des et contre les particuliers,
3ème éd.,paris, Dalloz, 2001, p.484
* 8 RASSA, M.L., op.
cit., p. 484.
* 9 Idem, p. 485.
* 10 PHILIPPE, C et PATRICK,
M., Droit pénal général, 6ème
éd., Jouve,Armand colin, 2002, p. 123.
* 11 RASSAT, M.L., op.
cit., p.210.
* 12 D.L. n°1/6 du 4
avril 1981 portant réforme du code pénal, art. 386.
* 13 D.L. n°1/6 du 4
avril 1981 portant réforme du code pénal, art. 387
* 14 PRADEL, J. et DANTI-JUAN,
M., droit pénal spécial, 2ème éd, Paris,
Cujas, 2001, p.612
* 15 GATTEGNO, P., Droit
pénal spécial, 5ème éd., Paris,
Dalloz, 2003, p. 80.
* 16 D.L. n°1/6 du 4
avril 1981 portant reforme du code pénal, art.164
* 17
GATTEGNO,P.,op.cit.,p80
* 18 Idem, p.81
* 19 CORNU, G., Vocabulaire
juridique, 6ème éd., Paris, P.U.F, 1996, p. 196.
* 20 MINEUR et VOVIN, droit
pénal spécial, 3ème éd., Paris, Dalloz, 1992,
p.326
* 21 BOLONGO, L., Droit
pénal spécial Zaïrois, Paris, Librairie de droit et de
jurisprudence, 1985, p. 332.
* 22 RASSAT, M.L, op.
cit. , 2001, p. 481
* 23 BOLONGO, L.,
op.cit, p.333.
* 24 DURRIEU & WANQUET :
Aide aux victimes : les agressions sexuelles :
http://www.SOSfemmes.com/violence/viol.menu.httm
(27/08/2007)
* 25 BOLONGO, L., op.
cit., p.334.
* 26 GARCON, G., Attentat
contre les personnes, ministère de la justice, édition RCN,
Kigali, 2004, p.36
* 27 Ibidem.
* 28 MACKELLAR, J., Le viol
« l'appât et le piège », Paris, Dalloz, 1980, p.50
* 29 BROWNMILLER, S., Le viol,
New York, Stock pour tradition française, 1975, p112
* 30 Ibidem.
* 31 Ministère de la
santé publique, manuel de formation pour la prise en charge de victimes
des violences Sexuelles à l'attention du personnel de santé,
Bujumbura, inédit, 2002, p. 12
* 32 LEVASSEUR, G., Cours
de droit pénal spécial, Paris, les cours de droit, 1967-1968,
p. 395.
* 33 MERLE, R. et VITU, A.,
Traité de droit criminel, D.P.S., 4ème
éd., Paris, Cujas, 1981, p. 1506.
* 34 Ligue des droits de
l'homme « ITEKA » : Rapport annuel sur la situation des droits de
l'homme, Bujumbura, 2007, p. 106.
* 35 Ligue des droits de
l'homme « ITEKA », Rapport annuel sur la situation des droits de
l'homme, Bujumbura, 2007, p. 106.
* 36 Ligue des droits de
l'homme « ITEKA », Rapport annuel sur la situation des droits de
l'homme, Bujumbura, 2007, p. 106.
* 37 Ligue Burundaise des
droits de l'homme « ITEKA » : Rapport annuel sur la situation des
droits de l'homme, Bujumbura, inédit, 2007, p. 106.
* 38 . Ligue Burundaise des
droits de l'homme « ITEKA » : Enquête sur les violences
sexuelles dans les sites des sinistrés et leurs alentours dans les
communes de Buyengero , Burambi , Rumonge, Kayogoro, Nyanza-lac, Bukeye et
Ruhororo, Bujumbura, inédit, 2004, p. 7
* 39 DURRIEU-DIEBOLT et
WANQUET, aide aux victimes des agressions sexuelles,
http://www.SOSfemme.com/violences/viol.menu.htm.
(27/08/2007)
* 40 Viol,
http://fr.wikipedia.org
(27/08/2007)
* 41 Viol, http :
fr.wikipedia.org (27/08/2007)
* 42 Ligue Burundaise des
droits de l'homme « ITEKA » : Enquête sur les violences
sexuelles dans les sites
des sinistrés et leurs alentours dans les communes de
Buyengero , Burambi , Rumonge, Kayogoro,
Nyanza-lac, Bukeye et Ruhororo, Bujumbura,
inédit, 2004, p. 8
* 43 JOSSE E, Violences
sexuelles et conflits armés en Afrique :
http://www.resilience.netfirms.com.(27/08/2007)
* 44 JOSSE E, Violences
sexuelles et conflits armés en Afrique :
http://www.resilience.netfirms.com.(27/08/2007)
* 45 JOSSE E, Violences
sexuelles et conflits armés en Afrique :
http://www.resilience.netfirms.com.(27/08/2007)
* 46 JOSSE E, Violences
sexuelles et conflits armés en Afrique :
http://www.resilience.netfirms.com.(27/08/2007)
* 47 Ligue Burundaise des
Droits de l'homme « ITEKA », Rapport annuel sur la situation des
droits de l'homme, Bujumbura, inédit, 2007, p.101.
* 48 Ligue Burundaise des
Droits de l'homme « ITEKA », Rapport annuel sur la situation des
droits de l'homme, Bujumbura, inédit, 2007, p.102.
* 49 D.L n°1/6 du 4 avril
1981 portant réforme du Code pénal, art. 385 al 2
* 50 RPA 198/GIT, RP1609, RNP
20177/GIT, in Recueil des décisions judiciaires burundaises :
Contentieux des violences sexuelles, Bujumbura, 2003, p.55.
* 51 Projet de loi portant
réforme du Code pénal de 1981, art.552 al. 1 et 2
* 52 RCN Justice et
Démocratie, Cours de droit pénal spécial, p.78.
* 53 BOLONGO, L., op.
cit., p.340.
* 54 LEVASSEUR, G., Le
droit pénal appliqué, Paris, Cujas, 1969, p.108. cité
par BIGIRIMANA,A.,De l'attentat a la pudeur en droit pénal
burundais,mémoire,UB.,Bujumbura,1992,p.10
* 55 VOUIN, R., Droit
pénal spécial, Paris, Dalloz1988, p.457
* 56 LARGUIER, J., Droit
pénal spécial, 3ème éd., paris, Dalloz, 2000,
p.83
* 57 Ibidem .
* 58 RCN justice et
démocratie, op.cit., p80
* 59 RCN justice et
démocratie, op.cit., p80.
* 60 VOUIN, R.,
op.cit., p.500.
* 61 D.L n°1/6 du 4 avril
1981 portant réforme du Code pénal, art.388
* 62 D.L n°1/6 du 4 avril
1981 portant réforme du Code pénal, art.390
* 63 LAHAYE, N., L'outrage
aux moeurs, Bruxelles, Bruylant, 1980, p.108
* 64 VERON, M., op.
cit., p.202
* 65 VERON, M., op.
cit., p.202
* 66 LAHAYE,
N.,op.cit.,p.110
* 67 CORNU, G., Vocabulaire
juridique, 6e éd, Paris, P.U.F, 1996. p.693.
* 68 MERLE ,B. et VITU ,A.,
traité de loi criminel T.II, procédure pénale,
4è éd. Paris ,Cujas, 1989, p 151
* 69 RASSAT, M.L.,
procédure pénale, 2ème éd., Paris, P.U.F, 1995,
p.299
* 70 GRIERE DE L'ISLE, G. et
COGNIART, P., procédure pénal, tome II, Paris, Armand
colin, 1972, p.11
* 71 BRAAS, G.,
précis de procédure pénale,T.III,
3ème éd.,Bruxelles, Bruyant,1951, p. 554.
* 72 GRIERE DE L'ISLE, G. et
COGNIART, P., op. cit., p.15
* 73 GRIERE DE L'ISLE, G. et
COGNIART, P., op. cit., p.15
* 74 MERLE et VITU,
op.cit., p.154.
* 75 PRADEL, J.,
procédure pénale, 11ème éd.,
Paris, Cujas, 2002, p.338.
* 76
RASSAT, M. L., op. cit.p.324
* 77 Les novelles, Droit
pénal, T.I, V.D, Bruxelles, Larcier, 1982, p.60, n°3436.
* 78 PRADEL, J., op.
cit., p. 340.
* 79 RASSAT, M.L., op.
cit., p.328.
* 80 PRADEL, J., op.
cit., p.391.
* 81 RASSAT, M.L.,
op.cit, p.392.
* 82 SOYER, J.C., Droit
pénal et procédure pénale, 8ème éd.,
Paris, LGDJ, 1990, p.228
* 83 MERLE et VITU, op.
cit., 3ème éd. p.196.
* 84 CONTE, P., et MAISTRE DU
CHARBON, P., Procédure pénale, 4ème éd.,
Jouve, Armand colin, 2002, p.22.
* 85 GRIERE DE L'ISLE, G. et
COGNIART, P., op.cit., p.179
* 86 RASSAT, M.L.,
op.cit, p.385
* 87 LARGUIER,
Procédure pénale, Paris, Dalloz, 1979, p.53.cité
par NZINAHORA, P.,Le régime de la preuve en matière
pénale,mémoire,U.O.B.,Bujumbura,1973,p.68
* 88 RASSAT, M.L., op.
cit., p390
* 89 SOYER, J.C.,
op.cit, p230
* 90 CONTE, P., et MAISTRE DU
CHARBON, P., Procédure pénale, 4ème éd.,
Jouve, Armand colin, 2002, p.250
* 91 MERLE et VITU, op.
cit., 3ème éd. p.203.
* 92 BRAAS, G., op.cit.,
p. 600.
* 93 SOYER, J.C., Droit
pénal et procédure pénale, 8ème
éd., Paris, L.G.D.J, 1990, 290p.
* 94 SOYER, J.C., Droit
pénal et procédure pénale, 8ème
éd.,Paris, L.G.D.J, 1990, 291p.
* 95 GRIERE DE L'ISLE, G. et
COGNIART, P., op.cit., p 182
* 96 RPA 2342, RP 1162, RNP
98.249, Recueil de décisions judiciaires burundaises, Contentieux des
violences sexuelles, Bujumbura, inédit, 2003, p.133.
* 97
D.L n°1/015 du 10 juillet 1999 portant reforme
du code de procédure pénale, art.48
* 98 RPA 422/GIT, RP 3200,
RNP, 27.398/KR, in Recueils des décisions judiciaires burundaises :
contentieux des violences sexuelles, Bujumbura, inédit, 2003,
p.107.
* 99 Ministère de la
Santé publique, Manuel de formation pour la prise en charge de
victimes des violences sexuelles à l'attention du personnel de
santé, Bujumbura, inédit, 2002, p.103.
* 100 Ministère de la
Santé publique, Manuel de formation pour la prise en charge de
victimes des violences sexuelles à l'attention du personnel de
santé, Bujumbura,inédit, 2002, p.106.
* 101 Ministère de la
Santé publique, Manuel de formation pour la prise en charge de
victimes des violences sexuelles à l'attention du personnel de
santé, Bujumbura,inédit, 2002, p.107
* 102 Ministère de la
Santé publique, Manuel de formation pour la prise en charge de
victimes des violences sexuelles à l'attention du personnel de
santé, p.108.
* 103 DELMORE, C., Les
victimes des violences sexuelles, saint Etienne, imprimerie raynaud-42000,
1992, p.82
* 104 RPA 1959, RP685, RNP
1060/NA, Recueil de décisions judiciaires burundaises, Contentieux
des violences sexuelles, Bujumbura, inédit, 2003, p.167.
* 105 DELGATIA, L., La
réparation des abus sexuels envers les enfants, Montréal,
1993, p.459
* 106 DELMORE, C., op.
cit., p.82
* 107 MARIELLE, B. et CHOULOT,
J.J., le mineur et le droit pénal, Paris, l'harmattan, 1997, p.67
* 108 TOCH, A., «
Techniques d'enquête policière » in Manuel de formation
des magistrats, Kigali, RCN 1509, p.6.
* 109 MARIELLE, B. et CHOULOT,
J.J., op.cit., p.67
* 110 DELMORE, C.,
op.cit., p.82
* 111 DELMORE, C.,
op.cit., p.84
* 112 MERLE, R. et VITU, A.,
op. cit. 3e éd., p. 182.
* 113 ACM N°43 RAM
122/97/K, Recueil de décisions judiciaires burundaises : Contentieux
des violences sexuelles, Bujumbura, inédit, 2003, p.139.
* 114 Sélection de
documents clé de l'union africaine relatifs aux droits de l'homme,
Pretoria Universit y Law Press, 2006, p.57
* 115 CRETIN, T., La
preuve impossible, Québec, RSC, 1992, p.53.
* 116 Ibidem
* 117 MARIELLE, B. et
CHOULOT, J.J., op. cit., p.69.
* 118 WOLF, V.A, « La
parole et la souffrance de l'enfant victime d'abus sexuels »,
cité par MARIELLE et CHOULOT, op. cit., p.70.
* 119 JASPARD, M.,
Violences contre les femmes, Paris, édition la découverte,
2005, p.37
* 120 BRIERE DE L'ISLE, G. et
COGNIART, P., op. cit., p.67.
* 121 BRIERE DE L'ISLE, G. et
COGNIART, P., op. cit., p.70
* 122 MERLE, R. et VITU, A.,
Traité de droit criminel, D.P.S, Paris, Cujas, 1981, p.430.
* 123 KINT, R., Droit
pénal spécial burundais, Notes de cours stincillées,
U.B., Bujumbura, 1993, p.135.
* 124 CORNIOT, S.
Dictionnaire de Droit, T.I, 2e éd., Librairie, Paris,
Dalloz, 1966, p.808.
* 125 BRIERE DE L'ISLE, G. et
COGNIART, P., op. cit., p.75
* 126 BORRICAND, J., Droit
pénal et procédure pénale, Paris, Dalloz, 2000, p.270.
* 127 JORDAN,J.C., «
The phosphatase use of psychonarcosis in France »cité par
PATENAUDE;la preuve des techniques modernes et le respect des valeurs
fondamentales,Sherbrooke,neuve de droit,1990,p.175
* 128 La vérité
se trouve dans le vin
* 129 BELANGER, J.,
L'hypnose psycho légale : une histoire à suivre,
Montréal, 1984, p.866.
* 130 BELANGER, J., op.
cit., p. 53
* 131 PATENAUDE, P.,
Expertise en preuve pénale, Les sciences techniques modernes
d'enquête, de surveillance et d'identification,Québec,
éditions Yvon Blais, 2003, p.57.
* 132 LYKKEN, D. cité
par PATENAUDE, op. cit., p.53
* 133 Détecteur de
mensonge, un article de wikipedia, encyclopédie libre :
http://fr.wikipedia.org.(27/08/200)
* 134 PRADEL, J.,
Procédure pénale, 11e éd., Paris, Cujas,
2002, p.395.
* 135 PATENAUDE, P., op.
cit., p.56
* 136 PRADEL, J., op.
cit., p.392.
* 137 LEVASSEUR, G., Les
méthodes scientifiques de recherche de la
vérité,Paris, RIDP, 1972, p.321.
* 138 LEVASSEUR, G., Les
méthodes scientifiques de recherche de la vérité,
Paris, RIDP, 1972, p.321
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