Syndrome de la guerre : lorsque le psychisme ne cesse de rappeler( Télécharger le fichier original )par Shqipe BUJUPI Institut libre Marie Haps - Assistante en psychologie 2005 |
Chapitre VIII : La prise en charge de la victime
« Si certains, par quelque capacité d'oubli ou de résistance, semblent traverser à l'envers l'Achéron sans trop de difficultés, d'autres en gardent une blessure profonde. C'est eux que nous tentons de comprendre, voire de soigner »158(*). (C. Barrois) Tous les auteurs s'accordent sur le fait que le type de prise en charge de la victime a une grande importance. Plus l'intervention ou l'aide apportée est précoce, plus on a de chance de prévenir ou atténuer une chronicisation de ces troubles. C'est très important d'écouter la victime, de s'intéresser à ce qu'elle a éprouvé. Aider la personne à accepter ses réactions. Ces réactions sont normales face à une situation anormale. Ceci aide la personne à réduire le risque de développement de la culpabilité. 1. L'intervention immédiatePour les victimes une aide psychologique sur le terrain qui consiste à prodiguer des soins d'urgence s'avère importante. La méthode préconisée est celle de defusing159(*). Le defusing ou déchoquage psychologique en est la première approche. Certains sont angoissés, agités et logorrhéiques. Ils présentent un discours sans suite, peu cohérent, désarticulé. D'autres hébétés, sidérés sont le plus souvent muets, parfois agités, parfois hallucinés. C'est ainsi que se présentent les victimes qui viennent de voir l'enfer. L'intervention consiste à apaiser leurs souffrances et prévenir l'installation de séquelles psychotraumatiques chroniques. D'après Damiani160(*) le moment qui suit directement le traumatisme plonge le sujet dans un sentiment terrible de solitude et de détresse car, comme dit F. Lebigot161(*), dans le moment de l'effroi le langage l'a abandonné. L'importance de l'accueil de la victime : de la rencontrer, de la toucher, de lui parler, de lui demander des mots, c'est de lui demander de venir avec nous, dans le monde du vivant. De ce dialogue une parole s'invente, ce qui permet de mettre un début d'ordre dans ce chaos. Voici comment s'exprime Daligand : « le soin véritable à apporter à la victime est non dans la négation du trauma ou son effacement, non dans son exploration symptomatique mais dans la reconnaissance de la personne et dans la renaissance de son être de parole »162(*). Ce type d'intervention peut être effectuée individuellement ou par petits groupes. L'intervention en groupe (maximum six personnes) ne se fait qu'avec les personnes qui viennent de vivre le même événement. * 158 Barrois, C. (1988). Les névroses traumatiques. Paris : Dunod * 159 Defusing (to defuse, désamorcer) est une technique hérité de la « psychiatrie d'avant » de Salomon. C'est une première approche psychologique qui se fait à proximité du lieu (car le lieu même incite des reviviscences pathogènes) de l'événement. De Clercq, M. & Lebigot, F. (2001). Les traumatismes psychiques. Paris : Masson. Page 153 * 160 Ibidem. Page 156 * 161Pour Lebigot, un soldat ayant perdu sa section, une personne agressée dans une rue déserte, etc. sont des expériences de détresse extrême, d'absolue déréliction et vont installer d'emblée un état grave. Le souvenir de ces premières heures après le vécu traumatique sera parfois une source de souffrance psychique plus grande que l'événement lui-même, quelle qu'ait été sa violence. Ibidem. Page 100, 157. * 162 Ibidem. Page 160 |
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