REMERCIEMENTS
Pour la réalisation de ce
mémoire, nous avons bénéficié de près ou de
loin, du concours fort appréciable de certaines personnes. Nous
voudrions ici leur témoigner notre profonde gratitude.
Nos remerciements vont à l'endroit de tous nos
illustres maîtres de la faculté de droit des Universités de
Bouaké et d'Abidjan qui ont suscité en nous l'amour de la
recherche.
Nous remercions de façon toute particulière, le
Professeur MELEDJE DJEDJRO qui a accepté de diriger nos travaux
malgré ses lourdes responsabilités. Nous profitons de l'occasion
pour marquer toute notre admiration pour ce monument intellectuel, aux
qualités insoupçonnées.
SOMMAIRE
Introduction.................................................................................5
Chapitre préliminaire :
Considérations générales sur la notion de terrorisme en
droit
international...........................................................................12
Section 1 : L'émergence de difficultés
dans la recherche
d'une définition du
terrorisme..........................................13
Section 2 : La spécification de l'infraction
de terrorisme...........................32
PREMIERE PARTIE : L'ENCADREMENT NORMATIF DE LA
LUTTE CONTRE LE
TERRORISME.................................52
Chapitre 1 : Le dispositif
préventif de lutte antiterroriste...........................53
Section 1 : Les obligations des Etats dans la prise
mesures internes...............53
Section 2 : Les obligations de coopération des
Etats aux
fins de
prévention............................................................66
Chapitre 2 : Le dispositif répressif
de lutte antiterroriste..............................77
Section1 : Les mesures de contrainte applicables au
terrorisme......................................................................................77
Section 2 : La répression pénale du
terrorisme..........................................96
DEUXIEME PARTIE : LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME
A L'EPREUVE DES FAITS
............................................................................111
Chapitre 1: Une approche dangereuse dans le
traitement du terrorisme.........112
Section 1 : Le changement de posture dans le
traitement du terrorisme.............113
Section 2 : La violation des normes internationales
dans la campagne antiterroriste
terrorisme.....................................................................................133
Chapitre 2 : Une approche non pertinente
dans le traitement du terrorisme........153
Section 1 : La relative efficacité des
mesures coercitives pacifiques
décidées dans le cadre de la
lutte antiterroriste...........................153
Section 2 : La justice contemporaine, une
réponse inadaptée à l'infraction de
terrorisme....................................................................................168
Conclusion........................................................................180
PRINCIPAUX SIGLES ET ABREVIATIONS
I- Annuaires, recueils et revues
AJIL American Journal
of International Law
AFDI Annuaire
français de droit International
Ann. CDI Annuaire de la
Commission du droit international
Ann. IDI Annuaire
de l'Institut du droit international
DAI Documents
d'actualité internationale
EJIL European Journal
of International Law
JDI Journal
de droit international
RBDI Revue belge de
droit international
RCADI Recueil des
cours de l'Académie de droit international
de la Haye
Rec. CIJ Recueil de
la Cour internationale de justice
RGDIP Revue
générale de droit international public
RICR Revue
internationale de la Croix-rouge
RSA Recueil des
sentences arbitrales
II- Institutions et organisations
AIEA Agence internationale
de l'énergie atomique
CAERT Centre africain
d'études et de recherche sur le terrorisme
CCT Comité de
lutte contre le terrorisme des Nations Unies
CICTE Comité
interaméricain contre le terrorisme
GAFI Groupe d'action
financière sur le blanchissement d'argent
IDI Institut de droit
international
OACI Organisation de
l'aviation civile internationale
OCI Organisation de la
Conférence islamique
OIP-Interpol Organisation
internationale de police criminelle
OMI Organisation
maritime internationale
ONUDC Organisation des Nations
Unies contre la drogue et le crime
SFDI
Société française pour le droit international
TPIR Tribunal
pénal international pour le Rwanda
TPIY Tribunal
pénal international pour l'ex-Yougoslavie
Introduction
Notre histoire, l'histoire de l'humanité est
aussi celle des contradictions, des antagonismes et de la confrontation. Elle
s'est bâtie et continue de se construire sur le ciment de l'horreur, de
la terreur, et des hécatombes. Elle s'écrit au fil des jours
avec l'encre du sang, sous la plume de la violence. Cette violence qui
empoisonne l'existence humaine est omniprésente et protéiforme.
Le terrorisme est l'une des formes de violence les plus répandues dans
le monde1(*). Il a
traversé les époques et a survécu au temps, marquant
l'histoire humaine d'une empreinte indélébile. Ce
phénomène s'est révélé en effet, être
un élément catalyseur dans la survenue des tragédies qui
ont bouleversé le cours de l'histoire ancienne2(*) et contemporaine3(*). Pour ce qui de l'histoire
contemporaine, deux événements majeurs retiennent
particulièrement notre attention : il s'agit de la Première
Guerre mondiale et des attentats du 11 septembre 2001.
Les évènements qui précèdent
immédiatement la Première Guerre mondiale sont bien connus en
raison des conséquences cataclysmiques qu'ils devaient avoir sur l'ordre
mondial. On se souvient que c'est un membre d'une jeune organisation terroriste
« Jeune Bosnie », Gavrilo PRINCIP, qui, en assassinant
à Sarajevo l'archiduc François-Ferdinand de Habsbourg le 28
juillet 1914, mit en branle la succession des évènements qui
aboutit au déclenchement du premier conflit mondial4(*)...
Tournée la sombre page des conflits mondiaux qui ont
charrié des millions de victimes, l'effondrement des deux blocs
idéologiques est et ouest qui marqua la fin de la guerre froide5(*), offrit au monde une trêve
éphémère. L'humanité qui sortait fraîchement
de plusieurs décennies de blessures entra dans une nouvelle ère,
faisant désormais face à une nouvelle forme de menace.
Le 11 septembre 2001, notre histoire s'ouvrit sur une nouvelle
page sombre. Le monde venait de basculer en ce début de
21ème siècle dans une forme de violence d'une
gravité inqualifiable. L'Occident, sinon la planète
terrifiée, crut vivre un horrible cauchemar. En quelques minutes
seulement, l'humanité fut plongée dans « un nouveau
désordre mondial »6(*), mettant à rude épreuve
l'équilibre déjà précaire du système
géopolitique international. On se souvient en effet, que ce
jour-là, des islamistes sunnites détournèrent quatre
avions de lignes américaines, les transformant en missiles humains. Le
monde assista alors médusé par l'effet de
l'instantanéité de l'information, à la
réalité sanglante de l'acte terroriste. La tragédie laissa
voir un spectacle de ruines, des milliers de familles d'innocents
endeuillées. D'une certaine manière, l'onde de choc du drame
américain remit au goût du jour la fameuse théorie du
« clash des civilisations »7(*) empruntée au célèbre sociologue
américain Samuel HUNTINGTON qui inscrivit dès 1993 les relations
interculturelles et par delà les relations internationales dans une
vision manichéenne.
Face à la montée en puissance du terrorisme de
type nouveau « mythifié » par le 11 septembre - que
l'on désigne volontiers sous le vocable
« d'hyperterrorisme »8(*) ce « nouveau totalitarisme » qui a
« grandi, mûri et (...) devenu désormais adulte
»9(*) - l'on ne peut
que s'interroger sur l'efficacité des mécanismes de
prévention et de répression mis en place pour vaincre ce
fléau. Le fait marquant, c'est que les attentats contre les deux tours
jumelles du World Trade Center semblent avoir achevé de
convaincre les plus sceptiques, de la vulnérabilité et de la
porosité des mécanismes de prévention et de
règlement des conflits mis en place depuis plus de 60 ans, et ce en
dépit des progrès technologiques réalisés ces
dernières années1(*)0.
Au de là de son actualité, le sujet
témoigne d'un grand intérêt scientifique. Il est vrai que
le droit international constitue depuis longtemps l'un des instruments
privilégiés par lesquels les Etats dans leur ensemble, ont
entendu articuler leur réponse aux activités qu'ils ont fait
entrer dans la catégorie des actes de terrorisme international. Il est
tout aussi vrai que la question de l'adéquation du corpus de
règles qui composent ce droit à la lutte contre le terrorisme,
fut posée avec acuité et une insistance toutes
particulières à la suite des attentats du 11 septembre 2001. L'on
ne compte plus, en effet, les constats de carence qui
furent dressés à cet égard dans les jours et les
semaines qui ont suivi ces terribles évènements1(*)1. Dans un premier temps, comme
l'observe Monsieur Luigi CONDORELLI1(*)2, la référence au droit international
fut tout simplement absente du discours des responsables politiques ; le
droit apparu aux yeux de ces derniers comme dépourvu de pertinence,
incapable de jouer un rôle dans l'appréciation des faits et dans
le choix des actions à mener. Ce n'est que dans un second temps que les
débats juridiques enflèrent et que se multiplièrent les
remises en cause du cadre offert par les normes juridiques internationales
existantes pour répondre à des actes d'une telle gravité.
Ainsi que le note un observateur de la scène internationale,
« le droit international lui, aussi semble frappé de stupeur,
incapable de nommer ce qui venait de se produire et qui n'obéissait
à aucune de ses catégories homologuées »1(*)3. Le droit existant se
révéla alors inadapté, « atone ». La
question de sa nécessaire adaptation, de son évolution à
la suite des évènements en cause et dans un certain sens de sa
pertinence paru donc logiquement appeler un examen approfondi des normes
internationales. Parallèlement, dans un contexte plus politique,
plusieurs des Etats les plus activement engagés dans la lutte contre le
terrorisme mirent avec insistance l'accent sur le caractère exceptionnel
des situations auxquelles ils avaient à faire face pour justifier la
mise à l'écart d'un certain nombre de normes internationales, en
particulier dans le domaine de la protection des droits de la personne humaine.
A cet égard encore, le cadre juridique existant se révéla
peu adapté et pouvait dès lors être ignoré ou,
à tout le moins, mis entre parenthèse. Comme le souligne avec
perspicacité le Professeur Pierre KLEIN, que ce soit en raison du
prétendu ou du réel « vide juridique »
diagnostiqué par plusieurs observateurs ou du caractère
exceptionnel des situations en cause, qui auraient rendu inadéquates ou
non pertinentes un certain nombre de règles existantes, l'ordre
juridique international contemporain a subi une considérable
« mise à l'épreuve »1(*)4. Ce sont en effet, plusieurs
de ses composantes les plus essentielles qui furent remises en cause et souvent
mises à mal dans ce cadre.
Malgré tout, la lutte contre le terrorisme reste un
défi constant et permanent pour le droit international. Il
apparaît évident que pour éradiquer la violence terroriste,
il ne suffit pas de la nier, ni de la dénoncer seulement, mais voir
lucidement ce qu'elle est, ses effets, et la manière dont on peut lui
résister1(*)5.
« Il s'agit au fond de transformer un problème qui pourrait
paraître abstrait en une réalité
concrète »1(*)6. Cette réalité est
appréhendée par le droit, parfois maladroitement, mais avec la
volonté affirmée de l'abolir. Expliquer le terrorisme, le nommer
et le caractériser pour ensuite organiser la lutte, tel est l'essentiel
de l'éventail des tâches qui incombe au juriste. Or, si pareille
initiative peut paraître exaltante et hardie, elle n'en demeure pas moins
périlleuse et ardue. En effet, dans un premier temps, l'entreprise de
définition du terrorisme en droit en général et en droit
international en particulier relève d'un travail si
herculéen que le Professeur Jean-Marc SOREL s'est interrogé
sur le point de savoir si on pouvait définir le terrorisme, et si
on devait le définir1(*)7. Car, ainsi que le souligne avec justesse Mme
Marie-Hélène GOZI, souvent abordé avec passion, le
thème de terrorisme tient la raison en échec1(*)8.
Dans un second temps, l'impossibilité ou du moins la
difficulté de parvenir à une définition consensuelle et
tangible du terrorisme en droit international augure assurément bien
d'incertitudes dans la lutte contre ce phénomène. Et, on pourrait
à bon droit se demander, comment lutter efficacement contre un mal qu'il
est difficile de circonscrire ; ou plus encore, comment circonscrire le
champ d'extension d'un combat contre un mal insaisissable parce
qu'indéfinissable. La pratique révèle pourtant que
l'absence de définition générale et consensuelle du
terrorisme n'empêche pas la communauté internationale de combattre
le phénomène en question.
Il apparaît dès lors tout indiqué de nous
poser un certain nombre de questions qui intéresse l'étude. Un
faisceau de questionnement effleure l'esprit lorsqu'on aborde la question de la
lutte contre le terrorisme sous le jour du droit international ; et on
pourrait légitiment se poser les questions suivantes :
- Quels sont les mécanismes de prévention pour
contrer la menace terroriste ?
- Quels sont les mécanismes de répression pour
vaincre, à tout le moins pour
faire face au terrorisme ? Plus particulièrement,
quelle est la place du recours à la force armée dans la lutte
contre le terrorisme ? Sur quel fondement juridique et dans quelles
conditions l'option militaire est-elle envisageable ?
- Quel est impact réel des mesures de contrainte non
armée dans le cadre de la lutte antiterroriste ?
- Quelle est la place de la justice dans la lutte contre le
terrorisme ?
Une telle étude ne saurait se passer de l'examen des
faits, ce qui nous amène tout naturellement à nous interroger sur
les aspects pratiques de la question.
- Comment alors, dans les faits la lutte contre le terrorisme
a été perçue et menée dans le cadre
multilatéral de sécurité collective et comment elle est
engagée dans une perspective unilatérale depuis
l'avènement des Nations Unies à nos jours en passant par les
tragiques évènements du 11 septembre 2001.
Les réponses données au terrorisme ne sont-elles
pas plus dangereuses que le terrorisme lui-même ? Il s'agit en un
mot de réfléchir sur les aspects relatifs à l'organisation
de la lutte contre le terrorisme en droit international pour en faire ressortir
éventuellement les faiblesses et les limites.
Nous tenterons de répondre à toutes ces
interrogations à travers deux parties : La première partie sera
consacrée à l'encadrement normatif de la lutte contre le
terrorisme ( Première partie) et la seconde partie consistera à
examiner les aspects factuels de cette lutte, d'où la lutte contre le
terrorisme à l'épreuve des faits (Deuxième partie).
Toutefois, étant donné que le terrorisme pose a priori
des problèmes quasi insolubles de définition, cette
démarche bipartite s'enrichira d'un chapitre préliminaire qui
portera sur la notion même de terrorisme en droit international (
Chapitre préliminaire).
CHAPITRE PRELIMINAIRE
CONSIDERATIONS GENERALES SUR LA NOTION DE TERRORISME EN DROIT
INTERNATIONAL
|
La notion de terrorisme est source
d'étonnement pour tout chercheur qui s'intéresse au sujet. En
effet, le chemin de la recherche d'une définition tangible de ce
phénomène semble parsemé d'embûches (Section 1), au
point même où certaines sciences sociales et humaines, à
l'instar de la sociologie, de la science politique ou de la philosophie
semblent avouer leurs limites eu égard aux confusions conceptuelles qui
sont parfois maladroitement entretenues entre cette violence et d'autres formes
de violence. Dans cette grisaille intellectuelle, le droit tente lui aussi,
tant bien que mal d'apporter des éléments de réponse par
un exercice de spécification de l'incrimination (Section 2).
Section 1 : L'émergence de
difficultés dans la recherche
d'une définition du
terrorisme
Face au caractère quasi
insaisissable du terrorisme (Paragraphe1), la nécessité de
parvenir à une définition consensuelle et acceptable du
phénomène en droit, a cédé le pas à la
tentation de qualifier diversement le phénomène criminel, non
sans créer des confusions (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Le terrorisme, une notion
insaisissable
Le concept de « terrorisme »
est bien difficile à appréhender et constitue une gageure
intellectuelle saisissante. Bien que familier, le mot est
« mystérieux » 1(*)9 et controversé2(*)0, utilisé pour signifier des situations
hétérogènes et disparates2(*)1. Il n'existe toujours pas du terrorisme une
perception unique, ni une définition recueillant l'assentiment
général. Le terrorisme serait l'un de ces concepts que l'on croit
connaître de prime abord mais qui se révèlent, à la
réflexion et une fois que la question de leur signification
posée, bien difficile à circonscrire2(*)2. Il s'agit là d'une
notion diffuse, aussi fuyante que complexe. Le mot n'a pas un sens constant et
n'a pas couvert, selon les époques, les mêmes
réalités2(*)3. Il est difficile de trouver les germes d'une
définition tangible de ce phénomène dans l'histoire car
l'actualité reflète largement les incertitudes du passé.
La science politique2(*)4
aussi bien que la sociologie ou la philosophie2(*)5 ne parviennent à fournir une
définition univoque du fléau. On constate ici des renversements
de significations, des querelles sémantiques réduisant ou
étirant la notion en raison de son potentiel émotionnel, de la
résonance affective du mot, et la conceptualisation du terrorisme semble
à plusieurs égards inaccessible. Le droit n'est pas non plus d'un
grand secours. Ici également, on constate l'échec d'une
définition générale du terrorisme (A) qui trouve sa
source dans des obstacles (B) liés au caractère relatif de la
notion qui reste, de toute évidence, un terrain d'affrontement des
idéologies et des intérêts corrélatifs des Etats.
A- Le constat d'échec d'une définition
générale et tangible du
terrorisme en droit International
A la question de savoir,
« existe-t-il une définition universelle du terrorisme
? », la réponse est probablement : non2(*)6. A l'instar de la notion
d'agression, la notion de terrorisme échappe depuis des décennies
au droit international, qui n'est pas parvenu à en donner une
définition généralement acceptée et faisant
autorité. La première tentative conventionnelle et internationale
d'organisation de la répression du terrorisme date de
l'élaboration par la SDN de deux conventions signées à
Genève le 16 novembre 1937. A la suite de sa saisine, le Comité
d'experts de l'Organisation élabore deux textes. L'un intitulé
« Convention pour la prévention et la répression du
terrorisme », l'autre « Convention pour la création
d'une Cour pénale internationale ». La Convention pour la
prévention et la répression du terrorisme offre une
première caractérisation de ces actes. L'article 1 alinéa
2 énonce que ce sont « les faits criminels
dirigés contre un Etat et dont le but ou la nature est de provoquer la
terreur chez des personnalités déterminées, des groupes de
personnes ou dans le public ». L'article 2 donne une liste des
différents actes qui constituent des infractions de terrorisme au sens
de l'article 12(*)7.
Cependant, le recours à la notion de terreur ne faisait qu'inscrire la
définition du terrorisme au centre d'un cercle vicieux. En effet,
n'est-il pas vrai que, caractériser un concept par un autre
imprécis relève de l'aporie2(*)8 ?, le mot « terreur »
étant lui même sujet à questionnement. En
définitive, il ne ressort de cette Convention aucune définition
tangible de l'acte. Une caractérisation aussi large peut fort bien
comprendre toute sorte de faits délictueux, même peu graves, dont
la nature serait de répandre la terreur. Néanmoins, elle offre
à la notion un premier critère concret ; l'infraction
nécessite effectivement l'emploi intentionnel de moyens de nature
à provoquer la frayeur. Ce caractère de l'acte servira à
déterminer les éléments de l'infraction terroriste2(*)9. Les critiques
formulées sur les travaux de Genève expliquent certainement que
ce texte n'ait pas abouti. Toutefois, son incidence politique est à
remarquer. En effet, les débats de Genève sont l'occasion d'une
condamnation internationale du terrorisme. La question de sa définition
a encore été posée dans le cadre des négociations
sur le Statut de Rome portant création de la Cour pénale
internationale. Une fois de plus, les difficultés consécutives
à toute tentative d'élaboration d'une théorie juridique du
terrorisme sont d'une telle importance, que les efforts déployés
tant par la doctrine que par les juristes, dans les congrès et les
conférences internationales sont restés vains. Cependant, comme
précédemment annoncé, cet obstacle n'empêche pas la
communauté internationale de condamner unanimement ce
phénomène3(*)0. Nous pouvons néanmoins regretter avec Madame
Marie-Hélène GOZI, que la facilité et l'opportunisme aient
cédé la place à la recherche nécessaire de la
nature juridique du terrorisme3(*)1. N'est-il pas étonnant de condamner un acte
sans lui avoir donné au préalable un contenu précis ?
Ainsi, de lege lata, Il n'existe à ce jour,
aucune définition de la notion de terrorisme qui recueille le consensus
suffisant pour permettre son insertion dans un texte conventionnel de droit
international général32. Du moins, le seul texte de
portée internationale en vigueur qui prohibe expressément et de
façon générale le terrorisme reste l'article 33 de la
Quatrième Convention de Genève, du 12 août 1949 sur la
protection des personnes civiles en temps de guerre. Cependant, il ne vise que
les cas des conflits armés internationaux. C'est pourquoi, il est
inadapté au terrorisme que vivent actuellement les Etats3(*)3. C'est de façon
très différente que la question du terrorisme et, dans une
certaine mesure de sa définition, a été abordée par
la suite par le biais de diverses conventions, souvent qualifiées de
« sectorielles »3(*)4. Du reste, les obstacles à
l'établissement d'une définition unanimement admise du terrorisme
ont principalement pour source sa subjectivité. C'est avant tout le fait
que le terme « terrorisme » est lourdement connoté
qui rend son utilisation problématique dans un contexte strictement
juridique, c'est-à-dire prétendant à une certaine
objectivité. Abordé la plupart du temps sous l'angle
idéologique, le terrorisme pose une nouvelle fois le problème de
l'infraction politique. C'est pourquoi l'ensemble des débats
internationaux portant sur ce fléau est marqué par un
désaccord des Etats s'agissant de sa définition.
B- Les obstacles : Les pierres d'achoppement et la
question des
exclusions
L'émergence d'une définition
générale consensuelle du terrorisme en droit international est
principalement tenue en échec par la vive controverse née autour
de l'exclusion des mouvements de libération nationale (1) et la
lancinante question du terrorisme d'Etat (2).
(1)- La vive controverse sur l'exclusion des actes des
mouvements de libération nationale des actes de terrorisme
Suite à l'échec de la
défunte Société Des Nations (SDN), l'Organisation des
Nations Unies (ONU) s'est engagée, elle aussi, sur le chemin tortueux
de la recherche d'une définition générale acceptable du
terrorisme. Les réflexions qui ont débuté dans les
années 19403(*)5 se
sont finalement cristallisées en 1996, date du début des travaux
relatifs au Projet de Convention générale sur le
terrorisme3(*)6. Cependant
ces discussions n'ont pas connu de progrès significatifs depuis 2002.
Les raisons de ce blocage tiennent à l'impossibilité de
dégager un accord entre les Etats sur l'opportunité d'exclure les
actes des mouvements de libération national du champ d'application de la
future convention.
La controverse née autour de la signification de la
terreur, de la portée et des bénéficiaires réels du
droit à l'autodétermination, ainsi que des moyens et des
méthodes utilisés pour assurer sa réalisation a
été le principal obstacle auquel s'est heurtée la mise au
point d'une définition exhaustive du terrorisme et d'un traité
exhaustif sur le terrorisme3(*)7. Les clivages idéologiques et les divergences
de vues qui ont empêché au cours de la période de
décolonisation, l'obtention d'un large consensus persistent encore
aujourd'hui dans les relations internationales. Le droit à
l'autodétermination est le droit collectif d'un peuple de
déterminer son statut politique, et d'assurer librement son
développement économique, social et culturel. Il occupe une place
de choix dans la charte des Nations Unies3(*)8. Consacré par les deux Pactes internationaux
de 1966 relatifs aux droits de l'homme3(*)9, il est réaffirmé dans certaines
résolutions majeures de l'Assemblée Générale des
Nations Unies, notamment la résolution 1514 (XV) du 14 décembre
1960 relative à la Déclaration sur l'octroi de
l'indépendance aux pays et aux peuples coloniaux. Il relève aussi
du droit coutumier et la CIJ y voit « un des principes essentiels du
droit international contemporain »4(*)0. Ce droit est même parfois qualifié de
norme de jus cogens4(*)1, alors que la CIJ a vu dans l'obligation de le
respecter, une obligation erga omnes4(*)2. Le droit à
l'autodétermination comporte nécessairement le droit de l'exercer
et le droit de prendre des mesures dans cette perspective4(*)3. Il reste que la
portée précise de ce droit en tant que droit de recourir à
la force armée (jus ad bellum) et de s'engager dans des guerres
de libération nationale a toujours constitué un sujet majeur de
dissension. Avant que l'application du droit international humanitaire ait
été étendue, en 1977, aux guerres menées par
l'exercice du droit à l'autodétermination4(*)4, l'Assemblée
Générale des Nations Unies avait adopté un certain nombre
de résolutions dans lesquelles elle laissait entendre que l'emploi de
la force dans les luttes de libération était légal
dès lors qu'il constituait une mesure de légitime défense
contre le colonialisme, et indiquait que le DIH dans son
intégralité s'appliquerait aux luttes de libérations
nationales. A ce titre, cette instance a estimé que les pays sous
domination coloniale pouvaient user de tous « les moyens en leur
pouvoir »4(*)5
ou « nécessaires » en qualifiant ce droit
d' « inhérent »4(*)6. De nombreux pays4(*)7 du tiers-monde parvenus à
l'indépendance adoptèrent cette terminologie selon laquelle, tout
individu ou tout mouvement qui luttaient contre l'oppression coloniale et / ou
la domination coloniale ne devaient pas être qualifiés de
« terroristes » mais méritaient plutôt le
titre de « combattants de la liberté ». Les
Etats en développement ont tiré de la légitimité et
de la licéité des luttes de libération nationale4(*)8 l'idée-force selon
laquelle les mouvements de libération nationale, en situation
d'infériorité, peuvent avoir recours à tous les moyens
à leur disposition. Cette position a été exprimée
par certains Etats au sein du Comité spécial du terrorisme
international créé par l'AGNU en
1972 : « (...) les luttes de libération
anticoloniale, la lutte des peuples combattant contre des agresseurs et des
envahisseurs pour recouvrer leur liberté sont légitimes parce
que fondées sur le droit inaliénable des peuples à
l'autodétermination et autorisent ceux qui les mènent à
utiliser tous les moyens à leur disposition y compris la
force »4(*)9. Cette solution est vivement dénoncée
par certains analystes occidentaux qui voudraient bien y voir la boîte de
pandores ouverte à toutes les dérives. Pour eux, la position des
Etats du Sud entretiendrait une confusion entre le jus ad bellum,
c'est-à-dire le droit de recourir à la force armée, et le
jus in bello5(*)0, le droit régissant les conflits armés
indépendamment de la licéité du recours à la
force. En effet, le jus in bello étant indifférent aux
causes poursuivies par les belligérants, l'argument avancé par
les Etats du Sud suivant lequel la légitimité des luttes de
libération nationale justifie que l'on ferme les yeux sur la
manière dont la lutte est conduite, est critiquable. Reconnaître
le droit des mouvements de libération nationale à employer tous
les moyens introduirait une discrimination entre les parties au conflit et
reviendrait à exonérer les mouvements de libération
nationale des obligations élémentaires qu'impose le DIH. Qui plus
est, l'exigence des Etats du Sud d'exclure les actes des mouvements de
libération nationale des conventions antiterroristes, et donc de les
dissocier des actes terroristes quelle que soit la nature des moyens
employés, semble ambiguë : le bloc des Etats du Sud accepte la
qualification terroriste quand il s'agit d'en examiner les causes sous
jacentes, les ferments (le colonialisme, la domination et l'occupation
étrangères) ; mais il refuse le mot seulement quand il est
question d'organiser juridiquement la répression5(*)1. De sorte à faire dire
à Monsieur Pierre D'ARGENT5(*)2 qu' « on ne sait pas trop cependant
si ces Etats considèrent qu'il existe une forme de terrorisme
légitime (auquel cas il y aurait une exception au sein de la
définition du terrorisme lorsque des actes correspondant
matériellement à la définition sont
perpétrés en vue de la libération d'un peuple sous
domination coloniale), ou s'ils considèrent que les actes posés
dans le cadre d'une guerre de libération nationale ne peuvent jamais par
la nature de leur finalité, revêtir les caractéristiques
objectives d'un acte terroriste ». Cette analyse bien que
fondée, appelle tout de même quelque remarque. En effet, en
situation de légitime défense, d'extrême
nécessité, le droit n'exclut pas absolument le droit de la
victime d'une attaque d'user de tous les moyens dont elle dispose, aussi
longtemps que sa réaction sera proportionnée à
l'attaque5(*)3.
La question du terrorisme d'Etat se pose avec autant
d'acuité.
(2)- La lancinante question du terrorisme d'Etat et de
son exclusion des actes de terrorisme
En ce qui concerne les actes des forces
armées et du terrorisme d'Etat, la question s'est posée de savoir
dans quelle mesure les instruments conventionnels visant à
réprimer le terrorisme pouvaient leur être appliqués.
Celle-ci a été soulevée dans le cadre de la Convention de
1997 pour la répression des attentats terroristes à l'explosif.
L'article 19 de ce texte exclut assez largement les agissements des forces
armées de son champ d'application, en disposant que :
« Les activités des forces armées en période de
conflit armé, au sens donné à ces termes en droit
international humanitaire, qui sont régis par ce droit ne sont pas
régies par la présente convention, et les activités
menées par les forces armées d'un Etat dans l'exercice de leurs
fonctions officielles, en tant qu'elles sont régies par d'autres
règles de droit international, ne sont pas non plus régies par la
présente convention ». Une disposition identique a finalement
été incluse dans l'article 4, paragraphe 2, de la Convention de
2005 sur la répression des actes de terrorisme nucléaire5(*)4, non sans avoir
préalablement suscité d'important débats au cours des
travaux qui ont mené à l'adoption de ce texte5(*)5.
Le raisonnement qu'on pourrait tenir est le suivant : en
application de cette clause d'exclusion, des destructions à l'explosif (
dans le 1er cas) ou l'utilisation de matières ou engins
radioactifs (dans le 2ème cas) par des membres de forces
armées, même dans un contexte autre que celui de conflit
armé, ne seraient donc jamais susceptibles d'être qualifiés
de terrorisme sur pied de l'une ou de l'autre convention en cause. Or, autant
l'exclusion du champ d'application de ces instruments d'actes accomplis par les
forces armées en période de conflit armé pouvait se
comprendre eu égard au fait de l'interdiction et de l'incrimination de
ces actes dans le cadre du droit international humanitaire, autant l'exclusion
des actes commis en dehors de tels contextes du simple fait qu'ils
sont « régis par d'autres règles de droit
international » soulève des difficultés. Plus
généralement, il est manifeste que l'ensemble du débat
renvoie inévitablement au concept de « terrorisme
d'Etat ». Dire que les actes des forces armées
échappent au champ d'application des différentes conventions
visant à lutter contre le terrorisme, ne reviendrait-il pas en fin de
compte à remettre en cause le fait que le terrorisme puisse aussi
être « d'Etat » ?5(*)6
Les difficultés inhérentes à l'entreprise
de définition du terrorisme a souvent occasionné des amalgames
entre le terrorisme et certains crimes internationaux.
Paragraphe 2 : Quelques confusions dans la
qualification de certains actes criminels
La réflexion sur la construction juridique
de l'incrimination du terrorisme a une finalité : garantir
l'indispensable jugement, trouver le moyen juridique d'engager des poursuites
pénales contre les auteurs des actes de terrorisme, leurs complices,
leurs organisateurs. Or, on le sait désormais, le droit international,
tergiverse, balbutie et bégaie devant l'impérieuse
nécessité de proposer une définition
générale satisfaisante du terrorisme. Ce vacuum juris
n'empêche pas pour autant la qualification juridique d'actes criminels.
Et, il n'est pas rare de constater qu'au moment de la détermination de
la sanction applicable, l'extrême gravité de certains actes
criminels5(*)7 conduise
à opérer des confusions entre, d'une part, terrorisme et crime
contre l'humanité (A), et d'autre part, entre terrorisme et crime de
guerre (B).
A- Terrorisme et crime contre
l'humanité
La notion de crime contre l'humanité
relève d'une rare complexité comme en témoignent les
divergentes de vues au sein de la doctrine. Celle-ci a connu une
évolution notable en droit international, depuis sa consécration
au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, pour poursuivre tous les crimes
commis en application du plan d'attaque du gouvernement du
IIIème Reich contre des individus appartement à
certains groupes raciaux, ethniques etc. Cette évolution s'est traduite
par un assouplissement progressif de la notion5(*)8 qui facilite aujourd'hui le rapprochement avec la
notion voisine du terrorisme. Cet assouplissement est particulièrement
visible à l'article 7 du Statut de la Cour pénale internationale
adopté le 17 juillet 1998, qui définit le crime contre
l'humanité comme : « (...) l'un des actes
ci-après commis dans le cadre d'une attaque
généralisée ou systématique lancée contre
une population civile et en connaissance de cette attaque (...) ».
L'article poursuit : « Par attaque lancée contre une
population civile, on entend le comportement qui consiste en la commission
multiple d'actes visés au paragraphe 1 à l'encontre d'une
population civile quelconque, en application ou dans la poursuite d'un Etat ou
d'une organisation ayant pour but une telle attaque ». L'analyse de
cette disposition appelle quelques développements ; pour être
constitué, l'élément matériel du crime contre
l'humanité doit répondre à deux conditions
cumulatives : d'une part, les actes énumérés doivent
être commis de « façon systématique ou sur
une grande échelle » (conditions alternatives). D'autre part,
ces actes doivent être perpétrés à l'instigation ou
sous la direction d'un « Etat ou d'une structure
organisée » (conditions alternatives). Il faut entendre par le
terme façon systématique, le fait que les actes doivent
s'inscrire dans un plan ou une politique préconçue5(*)9. Cela se traduirait par la
commission répétée et continu d'actes inhumains6(*)0. Ce critère n'est pas
exclusif du crime contre l'humanité et ne permet pas de faire le
détachement des deux notions, dans la mesure où le recours au
terrorisme peut bien répondre à une politique
préconçue. Le caractère continu et
répété fait généralement partie de la
logique du terrorisme, comme l'illustrent très bien les situations en
Palestine, en Espagne, en Algérie6(*)1... En outre, l'acte de terrorisme peut
répondre à l'exigence d'une multiplicité de victimes comme
en témoigne d'ailleurs la tragédie du 11 septembre 2001, avec
l'effondrement des tours jumelles du World Trade Center qui a
coûté la vie, on s'en souvient, à 2973 victimes de toutes
nationalités confondues, au point même où ces attentats
avaient fait l'objet de qualificatifs divers, épouvantables pour
certains, effroyables pour d'autres. En ce qui concerne l'autre condition,
celle qui met en évidence, l'entité instigatrice de ces actes
criminels, il ne s'agit plus exclusivement de l'implication d'un Etat6(*)2.
On considère désormais qu'à l'instar de
l'Etat, toute autre structure organisée peut planifier la
perpétration de crimes contre l'humanité6(*)3. Il suffit simplement que les
auteurs soient pourvus d'un pouvoir de fait ou organisés en bandes ou en
groupes criminels. Or de toute évidence, le terrorisme est presque
toujours imputable à un groupe ou une organisation plus ou moins
structurés6(*)4 qui
revendiquent le plus souvent leurs actions terroristes. Ainsi qu'on vient de le
voir, le critère matériel ne permet pas à lui seul de
distinguer le crime contre l'humanité du terrorisme. C'est d'ailleurs ce
chevauchement de qualifications qui a poussé certains juristes de renom
à l'instar de Yann JUROVICS à qualifier les
évènements du 11 septembre de crimes contre
l'humanité6(*)5,
lesquels en porteraient effectivement les stigmates, en présenteraient
les symptômes6(*)6.
En revanche, cette argumentation apparaît insuffisante pour d'autres
auteurs dont William A. SCHABAS et Clémentine OLIVIER6(*)7 qui rappellent à
dessein, et à toutes fins utiles les termes de l'article 22 (2) du
Statut de Rome selon lesquels : « La définition d'un
crime est d'interprétation stricte et ne peut être étendue
par analogie (...) ». Pour eux, s'il est vrai que des actes
susceptibles de terroriser les populations civiles et ayant des objectifs
politiques peuvent également, dans certains cas précis,
constituer des crimes contre l'humanité, des crimes génocides,
des crimes de guerre, ces notions se recoupant de toute évidence, il
n'en demeure pas moins que ces crimes graves gardent chacun toute leur
singularité. Ce qui explique d'ailleurs qu'ils aient fait l'objet d'une
catégorisation spécifique dans le Statut de la CPI et non de
confusion. L'un des arguments de poids qu'on avance généralement
au soutien du détachement entre le terrorisme et les autres crimes
graves en général, et tout particulièrement du crime
contre l'humanité, puisque c'est de lui qu'il s'agit ici, serait son
absence très remarquée du Statut de la CPI6(*)8. De ce fait, qualifier le
terrorisme en tant que tel de crime contre l'humanité serait sans
conteste néfaste pour cette catégorie de crimes dont la
consistance doit être préservée. Faire entrer tous les
actes terroristes, d'une grande diversité et de degrés et
gravité variables, dans la catégorie des crimes contre
l'humanité supposerait d'opérer une mutation décisive et
irréversible de la notion de crime contre l'humanité qui
reviendrait à la dénaturer. Le professeur Brigitte STERN a
prévenu que « (...) l'ambiguïté même du
terme humanité invite à toutes les dérives et le
crime contre l'humanité risque fort d'être instrumentalisé
pour remplir tous les vides répressifs auxquels la communauté
internationale doit faire face »6(*)9. Il ne faudrait pas aborder la notion de crime
contre l'humanité comme une notion « fourre-tout »,
permettant d'appréhender tous les actes répréhensibles non
incriminés ailleurs. Le terme contre l'humanité ne
signifie pas « horrible » ou « hautement
condamnable » mais recouvre un sens technique très
précis7(*)0. A bien
y regarder, le détachement des deux notions n'apparaît en
réalité évident qu'en considération de
l'élément moral. Par exemple, la qualité des victimes
pourrait constituer un élément déterminant dans
l'entreprise de sépécifcation des différents crimes. En
effet, outre la notion de « population civile », la
qualification de crime contre l'humanité nécessiterait
l'appartenance de la victime à un groupe racial, national, ethnique ou
politique7(*)1. Pour le
Professeur GRYNFOGEL, « (...) la part prise par la qualité de
la victime, dans l'élément moral, est essentielle. Si le criminel
cherche à l'atteindre, c'est parce qu'elle appartient- et uniquement
parce qu'elle appartient- à telle race, à telle religion ou
à telle ethnie réputée inférieures et /ou
nuisible »7(*)2.
Dans ces conditions, le terrorisme ne saurait répondre à la
qualification de crime contre l'humanité, dans la mesure où en
général, ce crime frappe indistinctement, sans discrimination.
Il s'agirait ci d'une violence aléatoire qui ne s'embarrasse pas de
mobile discriminatoire.
Les développements antérieurs nous autorisent
à refermer cette page, sans toutefois oublier de paraphraser
Jean-Christophe MARTIN, pour qui le terrorisme et le crime contre
l'humanité répondent à des politiques de terreur
différentes, ce qui empêche le télescopage des deux
concepts7(*)3.
Quid du crime de guerre ?
B- Terrorisme et crime de
guerre
Répondre à la question de savoir si
le terrorisme constitue un crime de guerre- un problème de droit
international qui a été âprement débattu au sein de
la doctrine- revient à résoudre l'énigme,
l'épineuse équation de la nature même du terrorisme,
puisque le crime de guerre ne se définit a priori que par
rapport à une situation de guerre ou plus exactement de conflit
armé7(*)4. De la
qualification juridique de conflit armé dépendra en retour le
corpus de règles applicables en la matière : il
s'agit ici- on le sait déjà- du droit des conflits armés
ou le droit international humanitaire ou encore le jus in Bello7(*)5. La question se pose
alors de savoir si le terrorisme est un conflit armé au sens des
règles du jus in bello. D'un point de vue théorique, la
question garde toute son importance quand on sait que dans le cadre particulier
du conflit armé, la belligérance- et donc l'usage de la force
armée par les combattants, dans une mesure définie7(*)6- est légale.
D'un autre point de vue, celui-là plus pragmatique, la
question prend toute son importance, dans le contexte particulier des attentats
du 11septembre 2001,
lesquels ont souvent été qualifiés
d' « actes de guerre »7(*)7. Mais le contexte de conflit armé- condition
première du crime de guerre- était-il avéré en
l'espèce ? Rien n'est certain78. Nous sommes donc
invités à réfléchir sur le terme de conflit
armé en droit international. A défaut de fournir une
définition tangible du conflit armé- en raison notamment, de
l'absence de définition du seuil à partir duquel une violence
considérée peut être qualifiée de conflit
armé, le DIH propose des critères de base sans lesquels on ne
saurait parler de conflit armé. En effet, un conflit armé suppose
au moins l'existence de deux parties identifiables, ce qui n'est pas le cas des
terroristes qui opèrent généralement dans la
clandestinité, n'ont pas de signes distinctifs et ne portent pas les
armes ouvertement. L'article 1er paragraphe 2 du Protocole
additionnel II de 1977 complétant les Conventions de Genève de
1949, applicables aux conflits armés non internationaux exclut
expressément de son champ d'application les « situations de
tensions internes et de troubles intérieurs (...) comme les meurtres,
les actes isolés ou sporadiques de violence et autres actes
analogues »7(*)9. En outre, la jurisprudence du TPIY dans
l'Affaire Tadic8(*)0 retient deux autres critères qui
permettent, pour le moins de faire le distinguo entre un conflit armé
interne et les situations d'insurrections armées, de banditisme :
il s'agit de l'intensité des affrontements, leur prolongement dans le
temps et l'organisation des parties belligérantes. Chacun de ces
critères supposerait un certain degré à partir duquel la
situation peut être juridiquement qualifiée de conflit
armé. De manière générale, le terrorisme ne
franchirait pas ces seuils8(*)1 comme le laisse supposer le CICR :
« (...) des actes de violence sporadiques n'étant pas
suffisants pour rendre le droit humanitaire applicable, les actes de terrorisme
qui frappent sans discrimination le public de pays en paix ne relèvent
pas de ce droit »8(*)2. On en déduira tout naturellement que le
terrorisme ne pouvant être considéré comme un conflit
armé au sens classique du terme8(*)3, au sens que voudrait lui imprimer le jus
in Bello, seuls certains actes terroristes commis en temps de
guerre8(*)4, peuvent
être couverts par ce droit.
En définitive, les confusions entretenues entre le
terrorisme et les autres crimes graves répréhensibles par le
droit international nous invitent à spécifier l'infraction en
question.
Section 2 : La spécification de
l'infraction de terrorisme
La définition des actes
de terrorisme en tant qu'infractions pénales se présente comme
l'articulation de deux éléments, l'un matériel et l'autre
moral. Par élément matériel, on entend l'acte accompli,
alors que l'élément moral s'intéresse à l'intention
de l'auteur de l'acte. En matière de terrorisme, l'élément
moral ne se réduit pas au dol général, volonté
consciente de commettre une infraction, mais le terrorisme se distingue
d'autres crimes en ce qu'il comporte un dol spécial, une intention
spéciale qui se traduit par un objectif déterminé le but
que l'auteur se propose d'atteindre. La qualité de la définition
du terrorisme dépend donc de la manière dont sont définis
et combinés les éléments matériel (Paragraphe
1) et moral (Paragraphe 2), l'objectif étant de parvenir
à une définition qui couvre l'ensemble des actes terroristes.
Paragraphe1: L'élément matériel
des infractions terroristes
Face au défaut d'accord
général sur une définition unanimement admise du
terrorisme et à la difficulté d'une telle entreprise, les Etats
ont opté pour une approche sectorielle du problème, qui s'est
traduite par l'élaboration progressive de traités ne couvrant que
certaines manifestations du terrorisme (A). Mais depuis quelques années,
des définitions générales du terrorisme
ébauchées au plan régional connaissance une
consécration au plan international (B).
A- L'approche sectorielle ou
fragmentaire
L'approche sectorielle ou fragmentaire dans
l'entreprise de définition du terrorisme répond au défaut
de conceptualisation du phénomène, tant il peut apparaître
à première vue, rebelle à toute caractérisation,
à toute systématisation, du fait de sa complexité. Les
conventions universelles qui qualifient les infractions terroristes sont
considérées comme antiterroristes, alors même que plusieurs
d'entre elles n'ont pas été élaborées pour lutter
spécifiquement contre le terrorisme8(*)5. On observe ainsi que la plupart des conventions ne
font aucune mention du mot « terrorisme » 8(*)6. Elles sont cependant
considérées comme telles, soit par des traités
postérieures8(*)7
qui utilisent une définition par renvoi8(*)8, soit par les résolutions de
l'Assemblée générale des Nations Unies8(*)9.
Dans l'ensemble, les conventions actuelles sur le terrorisme
ont un champ de compétence limité dans la mesure où elles
ne couvrent qu'une catégorie bien définie d'actes. Les actes
terroristes en question ne correspondent pas à des catégories
homogènes. Pour les besoins de l'étude, nous tenterons de les
regrouper au regard des moyens utilisés et du mode opératoire (1)
et au regard de la cible visée (2).
(1) - Les actes terroristes au regard des moyens
et du mode opératoire
Peuvent entrer dans cette catégorie
d'actes terroristes, les prises d'otages (a), les attentats terroristes
à l'explosif (b), le terrorisme nucléaire (c), auxquels il faut
ajouter le financement des activités terroristes (d).
a) Les prises
d'otages
Les Conventions de Genève de 1949,
relatives à la protection des personnes civiles en temps de guerre,
prohibent la prise d'otages et la considère comme un crime de
guerre9(*)0. Ainsi, le
caractère de gravité de l'infraction est déjà
reconnu quand, en 1979, la République fédérale d'Allemagne
demande à l'ONU d'élaborer un texte sur ce point9(*)1. Cet Etat souhaite faire de
ce méfait une infraction non exclusive de l'état de guerre. Le
17 décembre 1979, l'AGNU adopte à New York une Convention
internationale contre les prises d'otages. Ce traité considère
dans son préambule les actes de prise d'otages comme
des « manifestations du terrorisme international » et
il définit cette infraction comme le fait de s'emparer ou de
détenir une personne et de menacer de la tuer, de la blesser ou de
continuer à la détenir9(*)2. L'acte en question doit avoir pour but de
contraindre une tierce partie, à savoir un Etat, une organisation
intergouvernementale, une personne physique ou morale ou un groupe de personnes
à accomplir un acte quelconque ou à s'en abstenir en tant que
condition explicite ou implicite de la libération de l'otage9(*)3.
b)- Les attentats
terroristes à l'explosif
Les attentats à l'explosif
constituent une des méthodes les plus usitées par les
terroristes9(*)4. La
communauté internationale consciente de cette menace récurrente
va adopter, par le truchement de l'AGNU, la Convention internationale pour la
répression des attentats terroristes à l'explosif le 15
décembre 1997. L'infraction définie à l'article 2 est
commise quand « toute personne, illicitement et intentionnellement,
livre, pose, ou fait exploser ou détonner un engin explosif ou autre
engin meurtrier dans ou contre un lieu public, une installation gouvernementale
ou une installation publique, un système de transport public ou une
infrastructure » soit « dans l'intention de provoquer la
mort ou des dommages corporels graves » soit « dans
l'intention de causer des destructions massives de ce lieu, cette installation,
ce système ou cette infrastructure, lorsque ces destructions
entraînent ou risquent d'entraîner des pertes économiques
considérables ». L'intention de tuer ou de blesser des
individus ou de détruire des biens constitue le dol
général exigé pour que de tels attentats entrent dans le
champ de la convention. Cependant, comme nous le verrons, cet
élément ne permet pas à lui seul, de déduire une
intention terroriste spécifique inhérente à l'utilisation
d'explosifs. Du reste, il est à relever que cette convention incrimine
certaines des formes de « terrorisme de destruction
massive » en ce qu'il vise expressément les attentats
terroristes à l'explosif au moyen « de toute arme ou de tout
engin qui est conçu pour causer la mort (...) par l'émission, la
dissémination, ou l'impact de produits chimiques toxiques, d'agents
biologiques, toxines ou substances analogues ou de rayonnement ou de
matières radioactives»9(*)5.
c)- Le terrorisme
nucléaire
Le terrorisme nucléaire est visé
par la Convention du 3 mars 1980 sur la protection physique des matières
nucléaires. Cette convention définit comme infraction, les faits
intentionnels suivants : « le recel, la détention,
l'utilisation, la cession, l'altération, l'aliénation ou la
dispersion de matières nucléaires, sans y être
habilité, et entraînant ou pouvant entraîner la mort ou des
blessures graves pour autrui ou des dommages considérables pour les
biens », ainsi que le vol, le détournement et autre
appropriation indue de matières nucléaires, et le
« fait d'exiger des matières nucléaires par la menace,
le recours à la force ou
par toute autre forme d'intimidation »9(*)6. Il faut souligner que le 8
juillet, la Conférence des Etats parties à cette convention a
adopté au siège de l'AIEA (Vienne), un amendement substantiel.
Ainsi, l'article 7 susmentionné vise désormais « un
acte dirigé contre une installation nucléaire, ou un acte
perturbant le fonctionnement d'une installation nucléaire, par lequel
l'auteur provoque intentionnellement ou sait qu'il peut provoquer la mort ou
des blessures graves pour autrui ou des dommages substantiels aux biens ou
à l'environnement par suite de l'exposition à des rayonnements ou
du relâchement de substances radioactives, à moins que cet acte ne
soit entrepris en conformité avec le droit national de l'Etat partie sur
le territoire duquel l'installation nucléaire est
située ». Cette infraction de sabotage couvre donc les actes
de nature terroriste contre les installations nucléaires ; encore
que la détention d'un certain type d'armement à haut risque,
même s'il elle fait l'objet d'interdiction par certaines
conventions9(*)7, demeure
une question qui se pose avec une extrême acuité en droit
international9(*)8.
d)- Le financement
du terrorisme
Le financement du terrorisme, bien que ne
consistant pas en la commission d'attentats9(*)9, tombe néanmoins sous le coup d'une
incrimination par la
Convention du 9 décembre 1999 relative à la
répression du financement du terrorisme, ainsi que certains textes
subséquents1(*)00.
Il constitue une infraction internationalement définie connexe par
rapport aux infractions terroristes et autonome. Cette autonomie se
caractérise par le fait que le financement du terrorisme constitue en
lui-même un crime indépendamment de tout attentat. De la sorte,
l'infraction de financement du terrorisme est constituée même en
l'absence d'attentat. La notion de financement de terrorisme est définie
de manière très extensive par la Convention de 1999
susmentionnée. En effet, son article 2 incrimine non seulement le fait
de fournir des fonds, mais aussi de réunir des fonds à des fins
terroristes. Peu importe d'ailleurs que les fonds soient issus
d'activités illégales ou légales. De plus, l'article 1
paragraphe 1 de la même convention retient une définition
très large du terme « fonds »:
« Fonds s'entend des biens de toute nature, corporels ou incorporels,
mobiliers ou immobiliers, acquis par quelques moyens que ce soit, et des
documents ou instruments juridiques sous quelque forme que ce soit, y compris
sous forme électronique ou numérique, qui attestent un droit de
propriété ou un intérêt sur ces biens, et notamment
les crédits bancaires, les chèques de voyage, les chèques
bancaires, les mandats, les actions, les titres, les obligations, les traites
et les lettres de crédit, sans que cette énumération soit
limitative ».
(2) - Les actes terroristes au regard des cibles
Ces actes terroristes visent des cibles
particulières : il s'agit soit de lieux stratégiques en
raison de leur caractère très sensible ou de personnes
protégées par le droit international en raison de leur
qualité officielle. Peuvent entrer dans cette autre catégorie, le
terrorisme aérien (a), le terrorisme maritime (b), et le terrorisme
contre les personnes jouissant d'une protection internationale (c).
a)- Le terrorisme aérien
Le terrorisme aérien trouve ses
manifestations les plus courantes dans la piraterie aérienne et certains
actes illicites contre la sécurité de l'aviation civile1(*)01.
Le caractère particulièrement meurtrier de ces
actes1(*)02 a
suscité de nombreuses réflexions au sein de la communauté
internationale, ce qui s'est traduit dans l'adoption de quatre traités
internationaux sur la sécurité aérienne. Les Conventions
de Tokyo (1963) et de la Haye (1970) réagissent aux tentatives à
l'époque de détournements d'aéronefs en vol1(*)03. Le champ d'application de
la première Convention est général et très extensif
puisque, aux termes de l'article 1er, le traité s'applique
aux infractions aux lois pénales et aux « actes qui,
constituant ou non des infractions, peuvent compromettre ou compromettent la
sécurité de l'aéronef ou de personnes ou de biens à
bord, ou compromettent le bon ordre et la discipline à
bord ». On le voit, cette convention n'est pas exclusive aux
actes de terrorisme
puisque son champ d'application s'étend aux infractions
aux lois pénales relatives à la sécurité
aérienne1(*)04.
La Convention de la Haye (ou Convention pour la répression de la capture
illicite d'aéronefs) vise les actes de toute personne à bord d'un
aéronef qui « illicitement et par violence ou menace de
violence s'empare de cet aéronef ou en exerce le contrôle ou
tente de commettre l'un des ses actes », c'est-à-dire la
capture illicite d'aéronefs. La Convention de Montréal de 1971,
quant à elle, concerne les destructions d'aéronefs en vol.
L'article 1er de cette convention1(*)05 retient une énumération assez longue
d'actes considérés comme infractions. Ce faisant, la Convention
de Montréal complète de manière assez satisfaisante les
deux conventions antérieures.
d)- Le terrorisme
maritime
Tout comme le terrorisme aérien, le
terrorisme maritime se manifeste dans la piraterie maritime ainsi que certains
actes illicites contre la sécurité de la navigation maritime. Le
phénomène de la piraterie maritime n'est pas nouveau et
était jusqu'en 1958 sous l'empire d'une règle
coutumière1(*)06.
La Convection de Genève du 29 avril 1958 sur la haute mer qui la
codifie, n'incrimine pas toutes les formes de violence pouvant être
commises contre un navire et ses occupants. L'adoption par l'OMI, le 10 mars
1988, de la Convention de Rome pour la répression d'actes illicites
dirigés contre la sécurité de la navigation maritime,
répondait en partie au besoin de combler une telle lacune. Cette
dernière fait largement référence dans son
préambule au terrorisme. Son article 3 oblige les Etats à
réprimer le fait de s'emparer d'un navire, de causer au navire ou
à sa cargaison des dommages qui sont de nature à compromettre la
sécurité de la navigation du navire, de placer ou de faire placer
à bord d'un dispositif de nature à mettre le navire en danger, de
mettre en danger la sécurité de la navigation en endommageant
gravement des installations de navigation maritime ou en communiquant de
fausses informations. Sont aussi visées très
généralement les faits de blesser ou de tuer toute personne
lorsque ces faits présentent un lien de connexité avec l'une des
infractions susmentionnées. Ainsi qu'on peut le noter, bien
qu'étant plus ancienne que la piraterie aérienne, la piraterie
maritime n'a pas fait l'objet de nombreuses réflexions1(*)07. Pourtant cette tendance
pourrait se renverser dans la mesure où on assiste à une forte
progression de cette forme de criminalité1(*)08. De façon plus
décisive, les cas récurrents de piraterie maritime en
Somalie1(*)09, et plus
encore ceux qui ont eu cours ces derniers mois dans le golfe d'Aden et aux
larges des côtes kenyanes et tanzaniennes1(*)10, pourraient constituer - si ce n'est
déjà le cas - une sorte d'électrochoc au sein de la
communauté internationale, dans la perspective de l'approfondissement
des réflexions en cette matière1(*)11.
b)- Le terrorisme contre les personnes
jouissant d'une protection
internationale
Depuis longtemps, le droit
international a posé un certain nombre de règles fondamentales
relatives à l'inviolabilité, aux privilèges et aux
immunités diplomatiques1(*)12. A leur suite, chaque Etat de résidence
s'est engagé à assurer le respect des privilèges et
immunités et à prendre toutes les mesures de protection
nécessaires. Cependant, la fin des années 1960 marque une
recrudescence de la délinquance en la matière. Ainsi, devant la
difficulté d'augmenter les obligations des Etats de résidence et
celle de mettre en oeuvre leur responsabilité, l'AGNU saisit la
Commission du droit international aux fins d'examiner la question et de faire
des propositions1(*)13.
Ses travaux aboutissent en 1973 et se soldent par l'adoption aux Nations Unies,
de la Convention sur la prévention et la répression des
infractions contre les personnes jouissant d'une protection internationale, y
compris les agents diplomatiques1(*)14. La Convention en question vise les attentats
contre les chefs d'Etat, chefs de gouvernement, et ministres des affaires
étrangères qui se trouvent dans un Etat étranger, ainsi
que les membres de leur famille qui les accompagnent. Elle vise de même
les attentats contre tout « représentant, fonctionnaire ou
personnalité officielle » d'un Etat ou d'une organisation
internationale qui a droit à une protection officielle. Elle vise enfin
les attaques, par recours à la violence contre les locaux officiels, le
logement privé ou les moyens de transport d'une personne jouissant d'une
protection internationale, de nature à mettre sa personne ou sa
liberté en danger1(*)15. Il est à noter que cette convention
suppose, pour que l'infraction y définie soit réalisée,
que l'auteur d'une attaque ait eu connaissance du statut spécial de la
personne protégée, ce qui tranche avec l'esprit de la Convention
sur les prises d'otages.
La compilation des définitions de manifestations du
terrorisme offre ainsi qu'on vient de le voir, une définition
fragmentaire et partielle, « par agrégation », de
l'infraction de terrorisme selon le droit international. Si l'approche
sectorielle peut apparaître, intellectuellement peu satisfaisante, il
faut bien reconnaître que la codification par étapes a eu le
mérite de pallier l'impossibilité de parvenir à une
définition générale du terrorisme. En cela, l'approche
sectorielle illustre bien la formule de Mme Mireille DELMAS-MARTY selon
qui « (...) l'incomplétude des idées peut
apparaître comme une faiblesse féconde si, en évitant le
dogmatisme et l'idéologie, elle facilite la recherche de
solutions » 1(*)16.
B- L'approche générale
On le sait désormais, les
premières tentatives de définition générale du
terrorisme au plan universel n'ont pas abouti. Cependant, des
définitions globales nous sont fournies par certaines conventions
régionales. Deux techniques distinctes sont utilisées pour
décrire l'élément matériel de l'infraction
terroriste : l'énumération analytique et la formulation
synthétique. L'énumération est un procédé
utilisé par certaines conventions dans le but de caractériser
l'infraction terroriste. L'avantage d'une telle définition est
lié à sa précision : elle permet en effet,
d'éviter que n'entrent dans la définition des actes qui ne
devraient pas y figurer, alors même que leurs caractéristiques
correspondent à la description de la définition. De la sorte, les
définitions par énumération analytique laissent de
manière générale aux pouvoirs publics, mais et surtout au
juge, une marge de manoeuvre très restreinte dans la qualification des
faits1(*)17. Cette
technique est par exemple utilisée par les rédacteurs de la
Convention de l'Union européenne sur le terrorisme contenue dans la
position commune du Conseil européen 2001/931/PESC (27 décembre
2001), puis la décision-cadre 2002/475/JAI du 13 juin 2002. L'article 1
énumère in extenso, tous les actes terroristes
considérés comme tels1(*)18. En revanche, les définitions analytique
ont le défaut, outre leur lourdeur, d'être limitatives et donc
lacunaires, puisqu'il apparaît quasiment impossible
d'énumérer dans une seule et même convention tous les actes
entrant sous la qualification terroriste. Or, comme le fait remarquer à
juste titre Ghislaine FRAYSSE-DRUESNE1(*)19, il y a « (...) un risque
d'imprécision par l'omission de tel ou tel détail »
ainsi que des problèmes d'interprétation. De l'autre
côté, si la définition synthétique peut
paraître intellectuellement plus satisfaisante, il n'en demeure pas moins
qu'elle est techniquement plus complexe1(*)20 à trouver. Pourtant, plusieurs instruments
contiennent aujourd'hui une définition synthétique du terrorisme
qui se révèle ainsi, plusieurs décennies après la
Convention de la SDN de 1937, un gage de modernité dans la lutte contre
le terrorisme. On citera à titre d'exemple la Convention de l'OUA dont
l'article 1 paragraphe 3 définit l'élément matériel
du terrorisme comme « tout acte ou menace d'acte en violation des
lois pénales de l'Etat partie susceptible de mettre en danger la vie,
l'intégrité physique, les libertés d'une personne ou d'un
groupe de personnes, qui occasionne ou peut occasionner des dommages aux biens
privés ou publics, aux ressources naturelles, à l'environnement
ou au patrimoine culturel (...) ». Les Conventions de la ligue arabe
et de l'Organisation de la Conférence islamique dégagent, quant
à elles, une définition commune de l'élément
matériel du terrorisme qui couvre « tout acte de violence ou
menace de violence, quels que soient ses motifs ou ses fins,
perpétré pour exécuter un projet criminel, individuel ou
collectif » ( article 1 § 2)1(*)21. Au plan universel, on note une ébauche de
définition générale du terrorisme dans les Conventions de
1999 sur le financement du terrorisme. L'article 2 du traité de 1999
complète les définitions des actes de terrorisme des conventions
sectorielles, en ce qu'il vise « Tout autre acte destiné
à tuer ou à blesser grièvement un civil, ou tout autre
personne qui ne participe pas aux hostilités dans une situation de
conflit armé1(*)22, lorsque, par sa nature ou son contexte, cet acte
vise à intimider une population ou à contraindre un gouvernement
ou une organisation internationale à accomplir ou à s'abstenir
d'accomplir un acte quelconque ». Si cette définition
constitue à bien d'égards un grand pas vers un consensus autour
d'une définition internationale générale du terrorisme,
elle pèche toutefois par son caractère restrictif et
limité dans la mesure où elle fait référence aux
situations de conflits armés.
En définitive, deux éléments
méritent d'être combinés pour définir de
manière synthétique, l'élément matériel du
terrorisme : les comportements (modes opératoires) et les dommages
qui en résultent (cibles et gravité), la pertinence des
auteurs1(*)23 des actes
terroristes ne paraissant pas s'imposer prima facie.
Quid de l'élément moral de l'infraction
terroriste ?
Paragraphe 2 : L'élément moral des
infractions terroristes
L'élément moral du terrorisme
se rapporte à une intention spécifique, qui suppose que
l'infraction terroriste est exclusivement intentionnelle. L'auteur de l'acte
criminel doit non seulement être conscient de la terreur qui pourrait
résulter de ses actes, mais que c'est précisément le
résultat qu'il en attend1(*)24. L'effet terrorisant de l'acte ne suffit donc pas,
encore faut-il que la terreur constitue le but principal de l'auteur. C'est
là résumé, le dol spécial de l'infraction
terroriste. Il convient de voir, dès à présent, la
définition qui nous est offerte de l'intention spécifiquement
terroriste (A), ainsi que de ses manifestations (B).
A- Les définitions de l'infraction
spécifiquement terroriste
Il ressort grosso modo de
l'étude des différentes conventions, deux buts
spécifiquement terroristes : provoquer la terreur ou intimider (1)
et contraindre une autorité à certaines décisions (2).
(1)- Provoquer la terreur ou intimider
C'est la composante élémentaire
du dol spécial du terrorisme qu'on retrouve en substance dans toutes les
définitions conventionnelles du terrorisme. La Convention antiterroriste
mort-née de 1937 incriminait ainsi en son article 1er les
« faits criminels dirigés contre un Etat et dont le but ou la
nature est de provoquer la terreur1(*)25 chez des personnalités
déterminées, des groupes de personnes ou dans le
public »1(*)26. Les formulations sont aussi nombreuses que
variées et retiennent deux effets psychologiques de masse : terreur
et intimidation. Ces deux notions se recoupent assez largement. Le mot terreur
est défini dans le langage usuel comme « une peur
extrême qui bouleverse, paralyse »127, alors
que le verbe intimider signifie quant à lui « remplir
(quelqu'un) de peur en imposant sa force, son autorité ». Le
TPIY définit également la notion de terreur comme une
« peur extrême »1(*)28. Pour certains esprits critiques, définir
le terrorisme par sa racine étymologique terreur relève tout
simplement de la tautologie. Pourtant, il faut bien admettre qu'une telle
définition est certes, intellectuellement décevante, mais elle a
le mérite d'être réaliste et pragmatique, d'autant plus
qu'elle semble satisfaire les exigences pratiques du droit. En effet,
définir ainsi le dol spécial du terrorisme, rend l'incrimination
opératoire au regard du sacro-saint principe nullum crimen nulla
poena sine lege. Du reste, l' « option
tautologique » est classiquement suivie par les codificateurs, car il
semble a priori difficile de substituer à la notion de terreur,
une expression explicite plus satisfaisante129.
(2)- Contraindre une autorité à certaines
décisions
Plusieurs conventions définissent aussi
l'intention spécifique du terroriste comme étant de contraindre
des centres de décisions à changer d'attitude. La Convention de
1999 sur le financement du terrorisme qualifie de terroristes, certains
actes1(*)30, s'ils
visent « à contraindre un gouvernement ou une organisation
internationale à accomplir ou à s'abstenir d'accomplir un acte
quelconque ». Cette intention dolosive est considérée
comme but alternatif du terroriste. Même si en effet, l'effet terrorisant
peut être le but recherché par le terroriste, le but peut
être plutôt de contraindre que d'intimider1(*)31.
Enfin, il faut noter que de plus en plus, on assiste à
un certain élargissement du dol spécial dans les conventions
régionales. Celles-ci, il faut le dire, ajoutent trois finalités
terroristes à celles précédemment étudiées.
Il s'agit notamment de créer
une situation de crise1(*)32, de créer une
insurrection générale ou mettre en danger l'unité
de l'Etat1(*)33,
d'endommager l'environnement1(*)34.
B- Les manifestations de l'intention spécifiquement
terroriste
On peut observer que les actes de terrorisme
consistent parfois dans des procédés criminels communs (tels que
les assassinats), alors que d'autres procédés semblent plus
exclusifs au terrorisme (attentats suicide, détournements d'avions par
exemple). Ainsi, l'intention spécifique du terrorisme est
inhérente à la nature (1) de
certains actes, mais elle peut aussi ressortir du contexte (2)
d'actes dont le caractère n'est pas avéré par leur
nature1(*)35.
(1)- Les actes terroristes par leur nature
La nature de certains actes pourrait en
révéler la finalité terroriste. Dans ces cas, il est
inutile de prouver si l'auteur a recherché le résultat de semer
la terreur, la nature de l'acte criminel en attestant déjà de la
finalité terroriste. Peuvent être considérés
prima facie comme actes terroristes par leur nature, ceux qui sont
visés par les conventions universelles, de portée sectorielle,
qui sont classiquement considérées comme antiterroriste. Ces
conventions définiraient des infractions « purement
objectives », sans exiger la recherche d'une intention
spécifique. Le dol spécial serait ici inhérent au choix
des modes opératoires considérés (utilisation des
explosifs, prise d'otages...) ou des cibles (aéronefs, navires,
personnes jouissant d'une protection internationale...). La difficulté,
comme il a été souligné un peu plus haut, c'est que la
plupart des conventions n'ont pas été rédigées
spécifiquement pour lutter contre le terrorisme1(*)36.
(2)- Les actes terroristes par leur contexte
Certains actes dont la nature ne
révèle pas la finalité terroriste recherchée par
l'auteur peuvent aussi être considérés comme terroristes.
Il le sont au regard de leur « contexte », selon les
définitions de la Convention de 1999 précitée. Par
exemple, un assassinat, l'attaque d'une installation publique ou un incendie
volontaire peuvent relever du terrorisme, mais ici, l'intention
spécifique du terrorisme n'est pas inhérente à l'acte et
doit être établie au regard du contexte de la commission de
l'acte. Mais, la définition du terrorisme par référence au
contexte des actes est assez critiquable puisque la notion de contexte n'est
pas définie, qu'aucune indication supplémentaire n'est
apportée sur le sens et la portée du mot, qui est vague et
incertain. Cette définition du terrorisme se révèle
à l'analyse, teintée d'imprécisions, donc susceptible de
générer des interprétations diverses, offrant ainsi une
grande marge d'appréciation quant à son application. Ces
développements montrent bien l'immensité de la difficulté
qui réside dans l'entreprise de définition du terrorisme. Et la
crise ivoirienne du 19 septembre 2002 pourrait en fournir des preuves
éloquentes1(*)37.
Cependant l'équarrissage ou le polissage de cette
notion était nécessaire, tant il est vrai que l'un des plus
grands drames de l'homme est d'être jugé sans lois1(*)38, sans règles
précises. Au fond, tout ce déblayage aura permis, pour reprendre
les termes du Doyen Jean-Marc SOREL, de trouver la
« molécule »1(*)39 du terrorisme, sans d'ailleurs être certain
que le vaccin éventuel qui pourrait couronner cette recherche se
révèle efficace pour combattre le virus, tant ce dernier est
multiforme, sournois et s'attaque à toutes les parties du corps
international1(*)40. Car
à l'évidence, le caractère peu tangible de la notion de
terrorisme en droit international se présente à l'esprit, comme
l'un des symptômes pathologiques les plus visibles
caractéristiques de ce mal pernicieux, apparemment incurable et rebelle
à tout remède, qu'il soit préventif ou curatif.
PREMIERE PARTIE
L'ENCADREMENT NORMATIF DE LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME
|
Le dispositif normatif de lutte antiterroriste
a une double orientation : c'est un dispositif a priori,
c'est-à-dire un dispositif orienté vers la prévention
( Chapitre 1 ) et a posteriori,
c'est-à-dire un dispositif orienté vers la répression (
Chapitre 2 ).
CHAPITRE I: LE DISPOSITIF PREVENTIF DE LUTTE
ANTITERRORISTE
Nous étudierons successivement
les obligations internationales qui pèsent sur les Etats de prendre des
mesures internes (Section 1) et les mesures de
coopération qui lient les Etats entre eux (Section 2).
Section 1 : Les obligations des Etats dans la prise
de mesures internes
On peut distinguer parmi les obligations pour
les Etats de mettre en oeuvre des mesures internes, les obligations qui puisent
leur source dans l'ordre international (Paragraphe 1), lesquelles sont
complétées par celles découlant des conventions
régionales (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Les obligations universelles
Dans l'ordre international les obligations qui
pèsent sur les Etats dans la prise des mesures internes afin de
prévenir le terrorisme sont secrétées par les Conventions
internationales (A) et certaines résolutions des Nations Unies dont
notamment la Résolution 1373 (B).
A- Les obligations conventionnelles de prendre des mesures
internes
De ces obligations on peut distinguer
les obligations préventives d'action (1) et les obligations
préventives d'abstention (2).
(1)- Les obligations préventives d'action
(obligation de faire)
Il semble que la première
convention antiterroriste à traiter de la prévention du
terrorisme de manière générale est la Convention de
Montréal de 1971 pour la répression d'actes illicites
dirigés contre la sécurité de l'aviation civile, dont
l'article 10 paragraphe 1 est ainsi rédigé : « Les
Etats contractants s'engagent, conformément au droit international et
national, à s'efforcer de prendre les mesures raisonnables
en vue de prévenir1(*)41 les infractions visées à l'art.
1er ». L'obligation de prévention est
générale dans cette convention puisque les Etats doivent prendre
les mesures nécessaires de prévention avant l'embarquement comme
après, que l'aéronef soit en vol ou non. Nous notons
l'utilisation ici de l'expression « mesures raisonnables »
qui suppose un équilibre entre plusieurs intérêts. Les
Etats doivent concilier certains impératifs, ce qui apparaît
à la fois comme une garantie contre des mesures trop radicales et comme
une manière de préserver les différences entre
systèmes juridiques. Monsieur G.KYRIAKOPOULOS commente ainsi l'adjectif
« raisonnable » en estimant, à la lumière de
l'article 3 bis de la Convention de Chicago du 7 décembre 19441(*)42, que les
mesures « (...) ne doivent pas être de nature à
compromettre la vie des passagers et des membres de l'équipage ou la
sécurité de l'aéronef concerné ( en ce qui concerne
les mesures préventives au vol), ainsi que la santé des passagers
et l'intégrité des bagages contrôlés (quant aux
mesures de prévention appliquées au sol) »1(*)43. Ce traité parle de
« prévention », de manière
générale, mais ne contient aucune précision sur sa
substance. Certains traités contiennent en revanche des obligations
complémentaires en matière de prévention. Par exemple,
l'article 4 de la Convention de New York sur la prévention et la
répression des infractions contre les personnes jouissant d'une
protection internationale y compris les agents diplomatiques énonce que
« Les Etats parties collaborent à la prévention des
infractions à l'article 2, notamment : - en prenant toutes les
mesures possibles afin de prévenir la préparation, sur leurs
territoires respectifs, de ces infractions destinées à être
commises à l'intérieur ou en dehors de leur territoire ; -
en échangeant des renseignements et en coordonnant les mesures
administratives et autres à prendre, le cas échéant, afin
de prévenir la perpétration de ces infractions ». Les
obligations ainsi formulées souffrent à notre sens d'un trop
grand laxisme dans la mesure où la disposition en elle-même manque
de précision quant aux mesures à mettre en oeuvre. Les Etats
bénéficieraient donc d'une grande marge de manoeuvre dans le
choix des moyens à utiliser pour la prévention du terrorisme.
C'est ce que semble traduire l'idée de « toutes les mesures
possibles », nonobstant l'indication de quelques mesures telles
l'échange de renseignements, la coordination de mesures
administratives1(*)44...
Enfin, il faut noter que la Convention de 1972 relative aux armes biologiques
et celle de 1993 relative aux armes chimiques, bien que ne contenant aucune
référence au terrorisme, sont des instruments importants de
l'action préventive internationale contre ce crime1(*)45. La convention de 1972 a
pour but d'interdire l'obtention d'armes bactériologiques et à
toxines. Son article 4 engage les Etats parties « (...) à
prendre, selon les procédures (...), les mesures nécessaires,
pour interdire et empêcher la mise au point, la fabrication, le stockage,
l'acquisition ou la conservation des agents, des toxines, des armes, des
équipements et des vecteurs dont il est question dans l'article premier
de la Convention sur le territoire d'un tel Etat, sous sa juridiction ou sous
son contrôle en quelque lieu que ce soit ». Cette disposition,
qui attend des Etats la mise en place d'un régime juridique interne
approprié vise aussi bien la fabrication que l'acquisition d'armes
biologiques dans la sphère de compétence des Etats parties. La
Convention de 1993 sur les armes chimiques1(*)46 a une portée similaire à celle de
1972 pour ce qui est de l'interdiction de la fabrication, de l'acquisition et
de la conservation d'armes chimiques. L'article 1 paragraphe 1 de cette
convention interdit aux Etats parties, à l'instar de la Convention de
1972, de « (...) transférer directement ou indirectement, des
armes chimiques à qui ce soit ». Son article VII paragraphe 1,
qui régit les « mesures d'application nationales »
et précise les interdictions, se lit comme suit :
« Chaque Etat partie adopte, conformément aux
procédures prévues par sa constitution les mesures
nécessaires pour s'acquitter des obligations qu'il a contractées
en vertu de la présente Convention. La convention oblige donc les Etats
parties à modifier leur législation pénale nationale en
vue d'interdire aux personnes tant physiques que morales d'entreprendre les
activités interdites aux Etats, soit le développement, la
production, l'acquisition, le stockage et les transferts d'armes chimiques.
(2)- Les obligations préventives d'abstention
(obligations de ne pas faire)
Les obligations de ne pas faire se
résument en l'interdiction faite à un Etat de ne soutenir en
aucune manière le terrorisme, ce soutien pouvant être actif ou
passif. Si la plupart des traités internationaux gardent le silence sur
le soutien de l'Etat au terrorisme1(*)47, l'interdiction y est implicite puisque les Etats
s'engagent à lutter contre le terrorisme. Toutes les conventions
obligent les Etats parties à mettre en oeuvre des mesures de
prévention et de répression et un Etat qui ne remplit pas ses
obligations, par négligence, manque de volonté ou par simple
choix délibéré devient laxiste à l'endroit des
terroristes et leur confère ipso facto un soutien
passif1(*)48. Cela est
particulièrement patent en ce qui concerne l'obligation pour les Etats
de prendre « toutes les mesures possibles » pour
empêcher que leur territoire ne soit utilisé pour préparer
des actes terroristes (destinés à être commis à
l'intérieur ou à l'extérieur de leur territoire). Cette
obligation conventionnelle de l'interdiction qui est faite aux Etats de
soutenir le terrorisme, même passivement, trouve ses racines dans le
principe exprimé par la maxime Sic utere tuo ut alienum non
laedas. Selon ce principe général de droit international, un
Etat voit sa liberté de conduire certaines activités, même
non interdites, limitée par le droit des autres Etats de ne pas subir de
préjudice1(*)49.
Le devoir de vigilance ou de diligence (due diligence en anglais) qui
en découle suppose donc qu'un Etat ne saurait tolérer sur son
territoire des activités nuisibles pour les Etats1(*)50 ; il couvre par
conséquent le refuge de terroristes sur le territoire d'un Etat et
frappant à l'extérieur1(*)51. La CDI a ainsi qualifié de
« bien établi » le principe de droit international
« selon lequel tout Etat doit faire en sorte que son territoire ne
soit pas utilisé pour la préparation d'infractions
destinées à être commises dans d'autres
Etats »1(*)52.
A Ceci, il convient d'ajouter que la prévention du terrorisme doit aussi
et nécessairement s'orienter vers la lutte contre les moyens de cette
criminalité, notamment le financement des activités terroristes.
Toutefois la convention générale de 1999 sur le financement du
terrorisme porte non pas sur la prévention du terrorisme, mais
plutôt sur la répression de son financement comme en
témoigne son intitulé. Mais on peut le penser, cette solution
imprime à la convention une ambition plutôt dissuasive, et on y
voit incriminé toute forme de financement, cette notion y étant
elle-même définie de manière très extensive1(*)53.
B- Les obligations préventives de la
Résolution 1373 des
Nations Unies
Adoptée après les
attentats du 11 septembre 2001 contre les tours jumelles du World Trade
Center, la Résolution 1373 (2001) des Nations Unies1(*)54 est un instrument de
référence de lutte contre le terrorisme. Elle très
édifiante en matière de prévention du terrorisme, et
investit un champ de compétence assez élargi. Cette
résolution réaffirme l'obligation qui pèse sur les Etats
de s'abstenir de soutenir, de quelque manière que ce soit, toutes
activités terroristes1(*)55. Aussi les Etats se voient-ils obligés
d'interdire à « leurs nationaux ou à toute personne ou
entité se trouvant sur leur territoire de mettre des fonds, avoirs
financiers ou ressources économiques ou services financiers ou autres
services connexes à la disposition, directement ou indirectement, de
personnes qui commettent ou tentent de commettre des actes de terrorisme, les
facilitent ou y participent, d'entités appartenant à ces
personnes ou contrôlées, directement ou indirectement, par elles
et de personnes et entités agissant au nom ou sur instruction de ces
personnes »1(*)56. Elle impose également à tous les
Etats d'« empêcher que ceux qui financent, organisent,
facilitent ou commettent des actes de terrorisme n'utilisent leurs territoires
respectifs pour commettre de tels actes contre d'autres Etats ou contre les
citoyens de ces Etats (...) »1(*)57. Le Conseil de sécurité tire de
cette obligation deux mesures corollaires ayant trait à l'infiltration
et à la circulation d'éléments terroristes. Il s'agit
notamment du refus d'accorder l'asile et le statut de
réfugiés aux terroristes (1) et le contrôle aux
frontières pour empêcher l'infiltration ces terroristes (2).
(1)- Le refus d'accorder l'asile et le statut de
réfugiés aux terroristes
L'asile en droit international a
été défini par l'Institut de droit international
comme « (...) la protection qu'un Etat accorde sur son
territoire ou dans un autre endroit relevant de certains de ses organes
à un individu qui est venu la chercher »1(*)58. Cette protection contre
les poursuites par un autre Etat peut être accordée souverainement
par un Etat, dont la responsabilité internationale ne peut être
engagée en principe : l'asile est une protection accordée
dans des considérations d'humanité par un Etat à un
individu ressortissant d'un autre Etat qui craint des persécutions. Dans
son arrêt du 20 novembre 1950 en l'Affaire Droit d'asile, la CIJ
avait présenté ainsi l'articulation du principe et de
l'exception : « En principe donc l'asile ne peut être
opposé à l'action de la justice. Il n'y a d'exception à ce
principe que si, sous le couvert de la justice, l'arbitraire se substitue au
règne de la loi ». Tel serait le cas si l'administration de la
justice se trouvait viciée par des mesures clairement inspirées
par l'esprit politique. L'asile protège le criminel politique contre
toutes mesures que le pouvoir prendrait ou tenterait de prendre contre ses
adversaires politiques et dont le caractère extralégal serait
manifeste »1(*)59. L'asile est donc une exception au principe de la
coopération en matière judiciaire liée au caractère
discriminatoire des poursuites. La question connaît une acuité
particulière en matière de crimes politiques. Il est en revanche
reconnu que le droit d'asile ne peut être invoqué dans le cas
des poursuites réellement fondées sur un crime de droit commun ou
sur des agissements contraires aux buts et aux principes des Nations
Unies1(*)60. Or de
manière générale et abstraite, il ne fait désormais
aucun doute que les actes terroristes sont contraires aux buts et principes des
Nations Unies, puisqu'ils constituent une menace contre la paix et la
sécurité internationales1(*)61. A cet égard, l'importante
Déclaration contenue dans la Résolution 49/60 (9 décembre
1994) de l'AGNU le confirme. Selon le paragraphe 5 (f ), les Etats
« doivent également remplir les obligations que leur imposent
la Charte des Nations Unies et d'autres dispositions du droit international
dans la lutte contre le terrorisme (...) dont celle de prendre les mesures
voulues, avant d'accorder l'asile, pour s'assurer que le demandeur d'asile n'a
pas eu d'activité terroristes et, après avoir accordé
l'asile, pour s'assurer que le statut de réfugié n'est pas mis
à profit pour contrevenir aux dispositions de l'alinéa a)
ci-dessus »1(*)62. Nous pouvons conclure de cette formulation et en
particulier de l'emploi du mot « obligation » que la norme
a une portée coutumière1(*)63. L'exception terroriste à l'asile et au
statut de réfugié relève donc certainement du droit
international général1(*)64. Il n'est donc pas surprenant que la
Résolution 1373 impose aux Etats en son paragraphe 2 (c) de ne pas
accorder l'asile aux terroristes et à leurs soutiens : les Etats
« refusent de donner l'asile à ceux qui financent, organisent,
appuient ou commettent des actes de terrorisme ou recèlent les auteurs
». Un Etat pourrait voir sa responsabilité internationale
engagée pour avoir accordé l'asile en méconnaissance de
cette disposition. Ainsi, la mise en oeuvre de cette obligation suppose en
principe l'identification des personnes impliquées dans le terrorisme et
une procédure de vérification pour chaque demandeur d'asile ou
jouissant de l'asile.
2- Les contrôles aux frontières pour
empêcher
l'infiltration des terroristes
La Résolution 1373 contient par
ailleurs une autre obligation, celle de ne pas laisser son territoire
être utilisé par les terroristes. Il s'agit de l'obligation
d'exercer un contrôle aux frontières et un contrôle des
documents de voyage. Le paragraphe 2 (g) de la résolution est ainsi
formulé : les Etats « empêchent les mouvements de
terroristes ou de groupes de terroristes en instituant des contrôles
efficaces aux frontières, ainsi que des contrôles lors de la
délivrance de documents d'identité et de documents de voyage et
en prenant des mesures pour empêcher la contrefaçon, la
falsification ou l'usage frauduleux de papiers d'identité et de
documents de voyage ». Le Conseil de sécurité ne
faisait que rappeler la nécessité du renforcement d'un tel
contrôle. Cette attitude ne peut être interprétée
pour autant comme une immixtion dans les « affaires qui
relèvent essentiellement de la compétence nationale d'un
Etat » selon les propres termes de l'article 2 paragraphe 7 de
la Charte des Nations Unies1(*)65. En effet, en agissant ainsi, l'organe
sécuritaire ne s'écarte pas de la légalité, puisque
le même article l'y autorise pour les besoins du maintien de la
paix1(*)66. Ainsi que le
concluent les Professeurs Alain PELLET et Patrick DAILLIER, « (...)
dans l'intérêt général, exprimé par le
Conseil de sécurité, les souverainetés étatiques
doivent s'incliner devant les exigences du maintien de la
paix »1(*)67.
Ajoutons enfin que la Résolution 1373 n'est cependant pas
complètement innovante puisque en la matière des obligations
équivalentes figurent déjà dans certaines Conventions
régionales.
Paragraphe 2 : Les mesures
complémentaires des
conventions régionales
Avant d'exposer les mesures préventives des
conventions régionales, quelques précisions méritent
d'être faites. Contrairement aux conventions internationales qui ont une
vision sectorielle, fractionnelle ou fragmentaire du terrorisme, les
conventions régionales appréhende le phénomène
à travers une approche globale ou générale. On analysera
successivement, de façon arbitraire, pour les besoins de l'étude,
les mesures préventives de la Convention africaine (A) et celles de la
Convention européenne (B).
A- Les mesures préventives de la
Convention africaine
L'Afrique n'est pas épargnée par le
terrorisme. Les évènements survenus en août 1998 avec la
tentative de destruction des ambassades des Etats-Unis d'Amérique
à Nairobi, ont montré l'ampleur du phénomène, son
caractère pernicieux et dévastateur. Ce fléau en rajoute
aux difficultés aiguës1(*)68 que connaît le continent noir, lesquelles le
maintiennent implacablement dans le sous développement. La menace
à la paix et à la stabilité que représente le
terrorisme commande des actions concertées et conjointes, des
ajustements et réformes législatifs et une harmonisation des
procédures. C'est, de ces impératifs que procèdent
l'élaboration et la mise en oeuvre de la Convection de l'OUA sur la
prévention et la lutte contre le terrorisme, adoptée à
Alger le 14 juillet et entrée en vigueur le 6 décembre
20021(*)69. La
convention africaine fait apparaître en filigrane l'opposition
tranchée entre les pays du Sud et ceux du Nord au sujet de l'exclusion
des actes des mouvements de libération nationale des actes de
terrorisme. En effet, son préambule réaffirme « le
droit légitime des peuples à l'autodétermination et
à l'indépendance »1(*)70. Il est à noter que l'intitulé
même de cette convention entretient une certaine ambiguïté,
puisqu'elle semble faire la part des choses entre prévention et lutte
contre le terrorisme. Or, il ne fait aucun doute que la prévention
participe de la lutte contre le terrorisme. Il faut peut être comprendre
cette formulation comme une insistance toute particulière sur l'aspect
préventif de la lutte. Des similitudes se dégagent entre la
convention africaine, la Convention de la Ligue arabe1(*)71 et la Convention de
l'Organisation de la Conférence islamique1(*)72. Elles obligent d'abord
les Etats parties à renforcer la protection et la sécurité
de personnalités, missions diplomatiques ou consulaires ou organisations
internationales1(*)73.
Cette obligation tient compte de leur qualité de cibles
privilégiées, qui supposent logiquement une protection
spéciale. Celles-ci emboîtent ainsi le pas à la Convention
de New York de 1973 sur la prévention et la répression des
infractions contre les personnes jouissant d'une protection internationale, y
compris les agents diplomatiques. Au titre de ces dispositions, les Etats se
doivent de prendre toutes les mesures afin d'empêcher que des actes
terroristes soient commis sur leur territoires contre des personnalités
d'autres Etats. Cette obligation trouve son fondement dans l'obligation
générale de vigilance (due vigilance)1(*)74 visant pour un Etat
à protéger les droits des autres Etats sur son territoire. Ces
obligations supposent des mesures appropriées aux situations et aux
risques, et la protection attendue des missions diplomatiques ou consulaires ou
des organisations internationales est clairement renforcée de par leur
nature de cible potentielle. Les trois textes régionaux obligent ensuite
les Etats parties à traiter les données relatives au
terrorisme1(*)75. Ils
envisagent la création de bases de données nationales en vue de
la collecte et de l'analyse des renseignements relatifs aux
« éléments, groupes, mouvements et organisations
terroristes ». Une des finalités de ce traitement
systématique des données pertinentes est l'échange
d'informations entre Etats. Les traités africain, arabe et islamique
prévoient enfin que les Etats doivent établir des liens de
coopération entre services nationaux de sécurité et les
citoyens pour les « sensibiliser » et les encourager
à livrer des renseignements1(*)76.
B- Les mesures préventives de la convention
européenne
La Convention européenne pour la
prévention du terrorisme adoptée le 16 mai 2005, à
Varsovie, dans le cadre du Conseil de l'Europe, engage les Etats-parties
à mettre en oeuvre des politiques nationales en vue de prévenir
les infractions terroristes et leurs effets négatifs. Ces politiques
nationales sont complexes et portent sur quatre aspects disparates. Il s'agit
notamment de : - la formation, la culture, l'information, les
médias et la sensibilisation du public1(*)77 : chaque Etat est laissé libre de
définir les modalités de mise en oeuvre de cette disposition,
mais il est précisé que les mesures préventives
adoptées par les Etats doivent garantir le respect des droits de
l'homme1(*)78.
- La coopération entre les autorités
nationales1(*)79 :
cette coopération porte notamment sur l'échange d'informations,
le renforcement de la protection des personnes et des infrastructures ainsi que
l'amélioration « des plans de formation et de coordination
pour des situations de crise . Cette disposition porte ainsi tant sur la
prévention des actes terroristes que sur la lutte contre leurs effets.
- La promotion de la tolérance1(*)80 : les Etats sont
tenus d'encourager « le dialogue inter religieux et transculturel, en
impliquant, le cas échéant, des ONG et d'autres acteurs de la
société civile à participer, en vue de prévenir les
tensions qui pourraient contribuer à la commission d'infractions
terroristes ».
- La coopération des citoyens avec les autorités
compétentes1(*)81 : les Etats doivent « mieux
sensibiliser le public à l'existence, aux causes, à la
gravité et à la menace que représentent les infractions
terroristes et « envisager d'encourager le public à fournir
aux autorités compétentes une aide factuelle et
spécifique, qui pourrait contribuer à la prévention des
infractions terroristes (...) ».
Si la Convention européenne de 2005 apparaît
originale concernant les mesures des paragraphes 1 et 3 de l'article 3, on
constate que, s'agissant de la coopération entre autorités
nationales et de la coopération des citoyens avec les autorités,
ce traité recoupe certaines mesures des conventions de la ligue arabe,
de l'OCI et de l'OUA, comme pour les trois autres conventions, dans la
« dénonciation » et la fourniture de renseignements.
Au-delà de l'obligation faite aux Etats de prendre des
mesures internes afin de prévenir le terrorisme dans ces
différentes manifestations, la nécessité d'une
coopération s'est aussi imposée.
Section 2 : Les obligations de coopération
des Etats aux
fins de prévention
La dimension internationale du terrorisme
contemporain a révélé au grand jour l'importance de la
coopération en matière de prévention, tant et si bien que
ce vocable en est devenu le maître mot1(*)82. La coopération des Etats aux fins de
coopération emprunte diverses voies, dont deux classiquement
identifiées. Les Etats peuvent coopérer directement entre eux
selon le modèle relationnel (Paragraphe 1). La coopération
peut aussi être institutionnalisée, c'est-à-dire
organisée au sein des organisations internationales (Paragraphe
2).
Paragraphe 1 : La coopération
préventive inter étatique
selon le modèle relationnel
La coopération préventive inter
étatique en matière de lutte contre le terrorisme est
adossée à une obligation majeure, celle d'échanger des
renseignements (A), laquelle cohabite avec d'autres mesures de
coopérations (B). Il convient donc de les examiner les unes après
les autres.
A- L'obligation d'échanger des renseignements
Les conventions antiterroristes traitant de la
prévention du terrorisme contiennent toutes l'obligation
d'échanger des renseignements. Cette obligation constitue à n'en
point douter le moyen principal privilégié de collaboration aux
fins de prévention, ainsi que l'a souligné la Résolution
49/60 de l'AGNU1(*)83.
D'ailleurs, l'AGNU considère l'échange de renseignements comme
une obligation de droit international général puisque, par une
formulation elle « (...) demande instamment à tous les Etats
de se conformer aux obligations que leur impose le droit international (...)
dont coopérer entre eux en échangeant des informations relatives
à la lutte contre le terrorisme et à sa
prévention »1(*)84. Dans leur grande majorité, les obligations
d'échanger des renseignements à titre préventif sont
rédigées avec une grande simplicité, à l'image de
la Convention de 1973 sur la prévention et la répression des
infractions contre les personnes jouissant d'une protection internationale, y
compris les agents diplomatiques, dont l'article 4 se lit, pour ce qui nous
intéresse comme suit : « Les Etats parties collaborent
à la prévention des infractions (...) en échangeant des
renseignements (...) ». Cette simplicité confère un
caractère très général à l'obligation, dont
l'exécution n'est liée à aucune condition, aucune
situation. De plus la nature des informations est laissée à
l'entière discrétion des Etats. Il est dès lors difficile
d'apprécier le respect de cette disposition par les Etats parties, mais
tout au plus peut-on affirmer que l'Etat qui ne fournit pas de renseignements
aux fins de prévention la viole. Encore cela suppose-t-il que l'Etat ait
des renseignements à communiquer, ce qui est bien difficile à
prouver. La Convention de l'OMI sur la sécurité maritime de
19881(*)85, la
Convention de 1997 sur les attentats terroristes à l'explosif et la
Convention de 2005 sur le terrorisme nucléaire reprennent à leur
compte cette disposition avec quelques aménagements pour les deux
dernières citées1(*)86.
Les Etats peuvent en outre être liés par une
obligation nettement plus précise de transmission préventive de
renseignements, celle d'alerter les autres de la préparation d'un
attentat. C'est l'obligation d'alerte. Elle est insérée dans la
Convention de Montréal de 1971 sur la sécurité
aérienne dont l'article 12 prévoit
que : « Tout Etat contractant qui a lieu de croire que
l'une des infractions prévues à l'article 1er sera
commise fournit, en conformité avec les dispositions de sa
législation nationale, tous renseignements utiles en sa possession aux
Etats... ». Cette obligation pèse sur les Etats qui ont
connaissance d'un projet d'attentat concernant un autre Etat. La disposition a
été reprise à l'article 14 de la Convention de 1988 sur la
sécurité maritime et, plus récemment, la Convention de
2005 sur la répression des actes de terrorisme nucléaire a aussi
inclus une disposition relative à l'alerte. L'article 7 paragraphe 1 (b)
de ce traité, relatif à l'échange de renseignements,
prévoit qu' « en particulier, tout Etat Partie fait le
nécessaire pour informer sans délai les autres Etats (...) de
toute infraction visée à l'article 2 et de tous
préparatifs de telles infractions dont il aurait eu connaissance, ainsi
que pour en informer, le cas échéant, les organisations
internationales ». Dans la Résolution 1373 (2001), le Conseil
de sécurité a enfin décidé que les Etats
« prennent les mesures voulues pour empêcher que les actes de
terrorisme ne soient commis, notamment en assurant l'alerte rapide d'autres
Etats par l'échange de renseignements »1(*)87.
B- Les autres mesures de
coopération
L'obligation d'échanger des renseignements
aux fins de prévention du terrorisme est accompagnée, dans les
traités antiterroristes, de l'obligation générale sinon
abstraite de prendre d'autres mesures de collaboration. Les conventions
ajoutent ainsi à l'obligation d'échanger des renseignements,
celle de « (...) coordonner les mesures administratives et autres
à prendre, le cas échéant, afin de prévenir la
perpétration de ces infractions ». La remarque d'ordre
général qui s'impose à leur lecture est que, en ce
domaine, les Etats conservent une grande marge de manoeuvre et restent libres
dans le choix des mesures à prendre, puisque les traités ne
précisent pas la nature des mesures à prendre. Ainsi, la CDI
commentant un projet d'article relatif à la Convention de New York
(1973) sur la prévention et la répression des infractions contre
les personnes jouissant d'une protection internationale, y compris les agents
diplomatiques, explique que : « (...) l'article se borne
à énoncer le principe général et n'entre pas dans
le détail du mode d'exécution et des obligations imposées.
La nature et la portée (...) des mesures administratives (...) devraient
être déterminées par les Etats sur la base de leur propre
expérience et de leurs propres besoins. Elles comporteraient
naturellement aussi bien une action policière qu'une action judiciaire,
selon les exigences variables des circonstances »1(*)88. Le contenu de
l'obligation est donc particulièrement flou, la disposition étant
rédigée en termes très généraux.
L'utilisation de la mention « le cas
échéant » confère un caractère assez
contingent à l'obligation et la mention est susceptible
d'interprétations divergentes de la part des Etats parties.
Au-delà de l'obligation de coordonner des mesures administratives ou
autres, les conventions régionales prévoient d'autres mesures
moins précises qu'on pourrait qualifiées de
« fourre-tout ». On relève par exemple que les
Conventions de la Ligue arabe et de l'OCI se bornent simplement à
imposer aux Etats de « coopérer et coordonner l'action entre
les pays contractants, notamment ceux qui sont voisins et qui pâtissent
des crimes terroristes, de façon similaire ou commune »1(*)89 On note le silence de la
disposition quant à la nature des mesures à mettre en oeuvre. La
convention de l'OUA présente, quant à elle, une formulation
particulièrement souple : « Les Etats membres s'engagent
(...) à encourager la coopération entre les organes
chargés d'appliquer la loi en matière de détection et de
prévention en matière des actes terroristes »1(*)90. On constate ici que les
Etats s'engagent non pas à coopérer mais à
encourager la coopération.
Paragraphe 2 : La coopération préventive
institutionnalisée
Nous nous intéresserons ici à
l'action opérationnelle des organisations internationales (A), mais
aussi au renforcement des capacités Etats en matière de lutte
préventive (B).
A- La coopération préventive des
organisations internationales
La lutte contre le terrorisme est une
tâche pour laquelle la coopération entre organisations
internationales apparaît de plus en plus développée. On
constate une coopération croissante entre les organisations du
système des Nations Unies, ainsi qu'à d'autres niveaux, par
exemple entre l' OTAN et l'Union européenne. La collaboration de
nombreuses organisations internationales avec le Comité de lutte Contre
le Terrorisme (CCT) des Nations Unies est notamment remarquable, celui-ci
jouant un rôle de coordination de l'action des institutions
internationales dans la lutte contre le terrorisme1(*)91. Ainsi, le texte issu de
la réunion spéciale du CCT avec cinquante-sept organisations
internationales et régionales le 6 mars 2003 a défini une
« approche coordonnée » fondée sur la
complémentarité de l'action des organisations internationales
pour éviter « les doubles emplois et le gaspillage des
ressources » et l'effort indépendant par lequel
« dans la structure de coordination globale, chaque organisation
poursuivra son mandat et ses initiatives propres avec plus de
rigueur »1(*)92. Une structure d'action concertée
ambitieuse, menée par le CCT, se dessine donc. L'action des
organisations internationales pour la prévention du terrorisme embrasse
diverses activités. Nous avons vu précédemment que les
conventions antiterroristes imposent aux Etats d'échanger mutuellement
des informations aux fins de prévenir la réalisation d'actes
terroristes. L'échange d'informations peut aussi passer par la voie
institutionnelle. Plusieurs organisations internationales sont
compétentes en ce domaine et assurent une centralisation et une
diffusion de données pertinentes. La principale d'entre elles est sans
conteste l'Organisation Internationale Police Criminelle OIPC-Interpol. Le but
de cet organe est « d'assurer et de développer l'assistance
réciproque la plus large de toutes les autorités de police
criminelle, dans le cadre des lois existant dans les
différents »1(*)93. Si les membres de cette instance sont des
organismes officiels de police désignés par leur pays, il faut
toutefois préciser que, contrairement à une idée
répandue, il ne s'agit pas d'une force de police internationale.
Interpol n'exerce en soi aucune fonction opérationnelle de police et ne
peut, par exemple, conduire une enquête ou arrêter des individus.
Il s'agit principalement d'un forum institutionnalisé d'échange
de renseignements. Ainsi, « tous les actes de coopération
policière internationale sont accomplis par des policiers nationaux
agissant sur leur propre territoire et dans le cadre de leur
législation »1(*)94. Interpol qui est une organisation sui
generis1(*)95,
jouissant de la personnalité juridique à laquelle le Conseil
économique et social de l'ONU a reconnu en 1971 la qualité
d'organisation internationale1(*)96, n'est pas compétente pour connaître
des infractions de caractère politique1(*)97, ce qui l'a empêchée de
connaître pendant longtemps des actes de terrorisme1(*)98. L'OIPC face à
l'ampleur du phénomène terroriste a toutefois estimé que
les crimes « inacceptables » ne sauraient êtres
considérés comme politiques, quel qu'en soit leur mobile. Cette
volonté manifeste d'estomper le fléau, à tout le moins
d'en amoindrir les effets, s'est traduite par l'adoption de deux
résolutions dans lesquelles, l'institution a réaffirmé la
nécessité de le combattre1(*)99. L'OIPC, on peut l'affirmer, est compétente
en matière de terrorisme, puisque l'article 3 de son Statut qui exclut
de son champ de compétence les crimes politiques, semble ne pas viser
les actes terroristes. Concrètement l'OIPC-Interpol cumule les fonctions
d'échange d'informations, ce qui constitue l'activité principale
de coopération centralisée, et d'analyses de données pour
dégager des évaluations des menaces régionales ou
globales, des tendances du terrorisme et de ses modes opératoires.
D'autres organisations internationales permettent aussi l'échange
d'informations entre Etats membres. A cette fin, l'Union européenne
s'est dotées de l'Office européen de police criminelle (Europol),
créé par une convention internationale2(*)00 et effectif depuis le
1er juillet 1999. Europol, dont la compétence s'étend
au terrorisme2(*)01, a
pour fonction principale l'échange d'informations2(*)02 et la convention
prévoit la création d'un « système
d'informations » de centralisation et diffusion des
renseignements2(*)03.
L'OTAN a quant à elle spécialement créé une
« Unité de renseignement sur la menace terroriste »
au lendemain du 11 septembre 2001, qui est devenue permanente à la fin
de 20032(*)04. On peut
encore citer le Centre africain d'études et de recherche sur le
terrorisme (CAERT) de l'Union africaine dont l'une des premières
missions est l'échange de renseignements opérationnel entre Etats
membres2(*)05... A
côté des activités ayant pour objet essentiel de
prévenir le terrorisme, d'autres actions peuvent participer à la
prévention de manière incidente ou intégrer une dimension
préventive sans que cela soit forcément leur but premier. Ainsi
d'une manière générale, les opérations de maintien
de paix peuvent intégrer une dimension opérationnelle de
prévention2(*)06.
La KFOR (la force militaire de l'OTAN) a ainsi mené en République
fédérale de Yougoslavie des activités sécuritaires
qui relèvent de la prévention du terrorisme22(*)07. La police de la MINUK,
outre ses fonctions de maintien de l'ordre public, a fourni une formation et
des conseils en vue de la création d'une force de police au Kosovo. La
MINUK a aussi promulgué des législations contre la
criminalité organisée et le terrorisme2(*)08. Enfin, bien que cette
liste ne soit pas exhaustive, il convient de terminer tout en rappelant le
rôle essentiel de l'Agence Internationale de l'Energie Atomique (AIEA)
dont les activités de protection ou de contrôle de matières
sensibles et de détection des trafics, telles que les matières
nucléaires ou radioactives participent à n'en point douter
à la prévention du terrorisme, plus précisément du
terrorisme nucléaire2(*)09. La coopération préventive
institutionnalisée sera plus efficace si elle est accompagnée de
mesures visant à renforcer les capacités des Etats.
B- Le renforcement des capacités des Etats aux
fins de
prévention
Le renforcement de l'aptitude des Etats à
lutter contre le terrorisme repose à titre principal sur l'assistance
technique qui peut leur être apportée dans le perfectionnement de
leur législation et le renforcement de leurs capacités. Le
Conseil de sécurité et l'Assemblée générale
ont particulièrement insisté sur cet aspect de la lutte. Dans la
déclaration visant à compléter la résolution 1373
(2001) adoptée dans la résolution 1456 (2006), le Conseil a
affirmé que les Etats « doivent s'entraider pour renforcer
leur capacité de lutte contre le terrorisme et prévenir les actes
de terrorisme ; le Conseil note qu'une telle coopération facilitera
l'application prompte et intégrale de la résolution 1373 (2001)
et invite le Comité contre le terrorisme (CCT) à redoubler
d'efforts pour faciliter cette assistance, notamment dans le domaine technique,
en définissant, dans ce domaine, des objectifs et priorités de
portée mondiale »2(*)10. Il s'agit certes de coopération
internationale, mais l'objectif est clairement de renforcer l'aptitude de
chaque Etat à lutter contre le terrorisme. Ainsi, le Comité
contre le terrorisme créé par la Résolution 1373 (2001)
joue un rôle cardinal en matière d'assistance technique dans la
lutte contre le terrorisme en ce qu'il contribue à l'octroi de cette
assistance technique, sans toutefois la fournir directement. Précisons
que le CCT ne fournit pas lui-même l'assistance aux Etats ou
organisations internationales, mais il dispose à cette fin d'une
équipe d'assistance technique qui coordonne l'assistance en proposant
une grille des requêtes d'assistance, permettant d'évaluer les
besoins d'assistance en vue de l'application de la Résolution 1373, et
des informations sur les programmes d'assistance technique dont elle a
connaissance. Le CCT apparaît ainsi comme une plate-forme de coordination
et de centralisation de l'assistance technique et travaille de ce fait en
étroite collaboration avec l'Office des Nations Unies contre la drogue
et le crime (ONUDC). L'ONUDC quant à lui assiste les Etats dans
l'élaboration de leur législation antiterroriste et la mise en
oeuvre des obligations internationales2(*)11. Au plan régional, le Protocole de 2004
à la Convention de l'OUA de 1999 sur la lutte contre le terrorisme,
donne pour mission au commissaire chargé des questions de paix et de
sécurité de la Commission de l'Union africaine, aidé par
le CAERT (Centre africain d'études et de recherche sur le terrorisme),
de « fournir l'assistance technique concernant les questions
juridiques et l'application de la loi, y compris les questions relatives
à la lutte contre le financement du terrorisme, la préparation de
législations et de lignes directrices types afin d'aider les Etats
membres à formuler des législations et autres mesures connexes de
préventions et de lutte contre le terrorisme »2(*)12.
Nous refermons ainsi cette page qui a servi à analyser
sommairement les règles relatives à la prévention du
terrorisme, pour en ouvrir une autre qui servira cette fois-ci à
examiner celles relatives à la répression du terrorisme.
Chapitre II : Le dispositif répressif de
lutte
antiterroriste
Par opposition aux mesures
préventives qui interviennent en amont, c'est-à-dire bien avant
la commission des actes terroristes, les mesures répressives sont
destinées à punir. L'observation de la pratique montre que les
Etats utilisent une panoplie très diversifiées de mesures
destinées soit à donner une riposte appropriée à
une agression armée caractérisée soit à exercer des
pressions sur d'autres Etats, lesquelles sont loin d'être
constituées par des moyens militaires ; le point commun de ces
mesures, c'est qu'elles sont toujours présentées par les Etats
comme une réponse au comportement illicite de l'Etat contre lequel
elles sont dirigées. Selon les circonstances de leur adoption, et leurs
caractères, ces réactions constituent des actes de contrainte
(qu'elle soit armée ou non) ou des
« sanctions »2(*)13 (A). Et, dans cette phase répressive, il
n'est pas n'exclu la possibilité de recourir à la sanction
pénale pour punir les criminels (B).
Section 1 : Les mesures de contrainte applicables au
terrorisme
Le système de sécurité des
Nations Unies est adossé a une gamme variée de mesures
répressives applicables au terrorisme. Ces mesures vont de la mesure la
plus punitive, les mesures les plus radicales, qui font appellent à des
moyens militaires (Paragraphe 1), aux mesures les moins
sévères de coercition, de contrainte destinées à
faire pression sur un Etat indélicat pour l'amener à renoncer
à son comportement illicite. Ces dernières ont ceci de
particulier, qu'elles se juxtaposent au cadre onusien, mais font l'objet d'une
reconnaissance par le droit international (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Les mesures de contrainte militaire en
réaction au terrorisme
Nous entendons par mesures de
contrainte2(*)14
militaires toutes mesures utilisant des moyens militaires y compris l'usage de
la force armée. A priori, la force et le droit sont
inconciliables puisque, de manière générale, le droit
interdit le recours à la force et que de manière plus
particulière, le système international de sécurité
collective est fondé sur l'interdiction du recours à la force,
même si dans les faits les conflits armés restent
omniprésents. Mais en réalité, le droit et la force sont
indissociables puisque non seulement le respect du droit est assuré par
la contrainte mais encore le droit est, tout au moins en partie, l'expression
à un moment donné de rapports de force. Les liaisons dangereuses
entretenues par la force et le droit ont retenu l'attention des philosophes,
des juristes de droit interne et de droit international2(*)15. Jusqu'au début du
vingtième siècle, le recours à la force était
considéré comme le mode de régulation des rapports inter
étatiques, l'usage de la force constituant un attribut de la
souveraineté des Etats2(*)16. Mais la nécessité de vivre dans une
société solidaire de paix et de démocratie, dans laquelle
la valeur de la vie humaine pourrait être reconnue et
protégée, s'est imposée comme un idéal. Ainsi la
licéité du recours à la force a progressivement
cédé le pas à l'interdiction du recours à la force
dans les relations inter étatiques2(*)17. La prohibition du recours à la force,
sorte de révolution copernicienne en droit2(*)18, va connaître un
réel épanouissement, une généralisation avec la
Charte des Nations Unies2(*)19. Mais, faut-il le préciser, ce principe
d'interdiction du recours à la force n'a qu'un caractère relatif
dans la mesure où la Charte légalise ses exceptions2(*)20 au nombre desquelles, la
possibilité d'agir en légitime défense (A). C'est donc
principalement sous l'angle de cette institution que les Nations Unies
entendent réprimer toute agression armée, non sans poser de
sérieux problèmes relativement à l'applicabilité ou
à l'extension de cette mesure au terrorisme. Il faut ajouter à
cette contrainte armée, les mesures militaires de l'article 42 de la
Charte des Nations Unies (B).
A- L'usage de la force armée au titre de la
légitime défense
(article 51 de la Charte des Nations Unies)
La notion de « légitime
défense » a de l'importance dans les communautés
juridiques où la protection du droit (entendez droit objectif) et des
droits (entendez droits subjectifs) est une fonction exclusive d'organes
appropriés et où il est interdit aux membres de ces
communautés de se faire justice eux-mêmes. Cette institution
apparaît alors comme une exception vivante de l'exclusion du recours
à la justice privée, à la force dans le commerce
juridique, là où le droit est amené à
reconnaître et à régler bien parfois la question de
l'autoprotection des sujets2(*)21. C'est d'une façon générale
le cas dans les relations internationales où un sujet de droit
international, notamment un Etat, peut être victime d'une agression
armée. Il est alors tentant de se demander ce qui pourrait advenir en
pareille occurrence, en terme de réaction de la part de la victime. La
réponse à cette interrogation nous est fournie par les termes de
l'article 51 de la Charte des Nations Unies2(*)22 qui fait de la légitime défense un
droit naturelou inhérent (dans la version anglaise). La victime d'une
attaque est donc fondée à réagir tout naturellement sur la
base de la légitime défense en guise de riposte. Cet article
permet l'emploi de la force armée seulement en réaction à
une agression armée et à condition que soient observées
les normes de procédure qui prescrivent que le Conseil de
sécurité soit « immédiatement »
informé de l'action armée en légitime défense. Il
apparaît donc clairement que la condition de fond de mise en oeuvre de
la légitime défense est la constatation d'une
« agression armée » (armed
attack » dans la version anglaise), c'est-à-dire le
recours à la force armée d'un type caractérisé.
L'utilisation de la contrainte physique est donc exigée, excluant la
controverse sur l'agression idéologique ou économique2(*)23. L'article 51 semble en
outre imposer que l'agression soit réalisée, c'est-à-dire
qu'il ne couvre a priori pas la menace d'agression. La
difficulté réside dans le fait que la notion d'agression
elle-même n'est pas définie dans la Charte, bien qu'elle s'y
trouve employée à plusieurs reprises. Une définition nous
est, en revanche, fournie par l'AGNU dans sa Résolution 3314 (XXXIX),
adoptée par consensus le 14 décembre 1974. L'article
1er prévoit que l'agression « (...) est l'emploi de
la force armée par un Etat contre la
souveraineté, l'intégrité territoriale ou
l'indépendance politique d'un autre Etat2(*)24, ou de tout autre
manière incompatible avec la Charte des Nations Unies
(...) »2(*)25.
De façon stricte l'agression armée est donc le fait d'un Etat
contre un autre Etat2(*)26, et la légitime défense
apparaît comme relevant d'un rapport interétatique. Cette solution
trouve une confirmation dans un avis récent de la CIJ d'un
intérêt très particulier pour notre étude, en ce
qu'il concerne des actes terroristes : « L'article 51 de la
Charte reconnaît ainsi l'existence d'un droit naturel de légitime
défense en cas d'agression armée par un Etat contre un autre Etat
(...) »2(*)27. Il
s'ensuit logiquement qu'un acte de terrorisme, quelle qu'en soit la
gravité, ne saurait en principe, selon la théorie classique,
déclencher la légitime défense, à moins
d'être directement imputable à un Etat. La condition de
procédure tient, quant à elle, à l'obligation d'informer
« immédiatement » le Conseil de
sécurité. L'information du conseil de sécurité qui
ne peut s'analyser en une demande d'autorisation préalable,
s'expliquerait par la préférence pour une réponse
multilatérale institutionnalisée à la réaction
unilatérale décentralisée de l'Etat victime de
l'agression2(*)28. La
lecture de l'article 51 de la Charte donne à constater que la
réaction en situation de légitime est rigoureusement
enfermée dans des limites de deux ordres : temporel et
matériel. Ratione temporis, il ne fait l'ombre d'aucun doute
que la légitime défense ne peut être mise en oeuvre, en
principe, qu'à partir du moment de la réalisation de
l'agression armée2(*)29. On peut le noter, elle a un caractère
provisoire et subsidiaire dans la mesure où son maintien n'est en
réalité subordonné qu'à l'impossibilité pour
le Conseil de sécurité de prendre les mesures qui lui semblent
nécessaires aux fins de rétablissement de la paix et de la
sécurité internationales. Autrement dit, un Etat est en situation
de légitime défense « jusqu'à ce que le Conseil
de sécurité ait pris les mesures nécessaires pour
maintenir la paix et la sécurité internationales ». Ce
qui signifie a contrario, que la réaction en légitime
défense doit normalement s'estomper si le Conseil de
sécurité décide de régler lui même, de
quelque manière qu'il juge nécessaire le problème. La
clarté de la mention n'occulte pas cependant les difficultés
d'interprétation de l'expression « mesures
nécessaires ». Que faut-il entendre par « mesures
nécessaires » ?, ou plutôt dans quelle mesure le
Conseil prend-il des mesures « nécessaires » ?.
Toutes les mesures qu'il peut adopter sont considérées comme
nécessaires, ou cela doit-il s'apprécier dans chaque
espèce ? Toutes ces interrogations se justifient au regard de la
réaction américaine aux attentats du 11 septembre 2001. En effet,
on se souvient que les mesures américaines mises en oeuvre au titre de
la légitime défense n'ont pas été levées
malgré la Résolution 1373 (2001) du Conseil de
sécurité, adoptée sous le Chapitre VII et imposant de
strictes obligations aux Etats pour lutter contre les terroristes coupables.
Ces mesures, pour nécessaires qu'elles étaient, paraissaient
suffisantes2(*)30 pour
interrompre les droits des Etats-Unis d'Amérique de recourir à la
force armée en Afghanistan ? Pourtant le Conseil de
sécurité y « réaffirmant le droit naturel de
légitime défense (...) » dans le
préambule2(*)31,
celui-ci semble ne pas avoir suspendu le droit de légitime
défense nonobstant l'adoption de mesures d'une portée juridique
certaine. On peut le penser, il y a ici une juxtaposition de deux
catégories de mesures différentes, la légitime
défense d'une part, et d'autre part les mesures
nécessaires prises dans le cadre de la monumentale
Résolution 1373. Cette situation a d'ailleurs été
dénoncée par Monsieur Luigi CONDORELLI qui estime
qu'« (...) il y a simultanément prise de mesures par le
Conseil et reconnaissance de la persistance du droit de légitime
défense » ce qui constitue une
« anomalie »2(*)32 évidente. De plus, il est à noter
que les opérations militaires américaines se sont poursuivies en
Afghanistan même après l'adoption par le Conseil de
sécurité des résolutions 1368 (2001) et 1390 (2002), cette
dernière Ayant pourtant mis en place une opération de maintien de
la paix2(*)33.
Ratione materiae la réaction en
légitime défense est sujette à deux autres limites : il
s'agit de la nécessité de la réaction et de sa
proportionnalité2(*)34. En vertu du critère de
nécessité, l'emploi de la force armée ne doit être
justifié que par la nécessité pour l'Etat de se
protéger. En effet, l'agression armée est une violation manifeste
et caractérisée des droits souverains de la victime, laquelle en
ayant recours à la légitime défense, ne fait rien d'autre
que d'agir pour la réalisation de ses droits. Ceci implique qu'une fois
l'agression armée repoussée, la légitime défense
tombe en caducité, elle doit donc cesser d'exister. En
conséquence, la victime de l'agression ne doit pas occuper le territoire
de l'agresseur, à moins que cela ne soit strictement nécessaire
pour l'empêcher de continuer l'agression avec d'autres moyens, en tout
cas jusqu'à ce que cesse un tel danger imminent et grave. Ainsi pour
Monsieur Antonio CASSESE, l'article 51 de la Charte ne permet pas une action
militaire qui aille au-delà de ce qui est nécessaire pour
repousser l'agression2(*)35 ; il s'agirait donc ici d'une interdiction
implicite qui est faite à l'agressé, d'occuper militairement et
de façon prolongée le territoire de l'agresseur, a
fortiori de l'annexer2(*)36. En vertu du critère de
proportionnalité, les mesures de l'Etat victime d'une agression ne
doivent pas être disproportionnées, car la légitime
défense ne relève pas d'une logique de vengeance mais d'ultime
protection. La légitime défense apparaîtra alors ici,
rarement comme un droit que possède
« naturellement » l'Etat pour lutter contre le terrorisme.
Un pont s'établit à coup sûr entre
l'institution de la légitime défense en tant que moyen militaire
de faire face à une agression armée et les mesures de contraintes
militaires de l'article 42 de la Charte des Nations Unies.
B- Les mesures de contrainte militaire ( de l'article 42 de
la Charte des
Nations Unies)
La constatation de l'existence d'une menace
contre la paix, d'une rupture de la paix ou d'un acte d'agression constitue le
« sésame » sans lequel il n'est pas d'accès
au pouvoir de coercition découlant du Chapitre VII de la Charte des
Nations Unies2(*)37. Si
le Conseil de sécurité entend faire usage des importantes
prérogatives que lui confère l'article 42 de la Charte, il lui
incombe de procéder au préalable, en principe, à ce
jugement tout à fait déterminant. Il semble que des trois
situations visées à l'article 39, la menace contre la paix et la
sécurité internationales est la plus large2(*)38. Rien n'empêche en
effet d'y recourir pour qualifier des faits qui auraient pu ressortir à
la rupture de la paix, de l'agression et pourquoi pas au terrorisme. La menace
contre la paix suppose simplement l'existence d'un danger actuel et non pas
simplement virtuel. Mais si à l'origine l'actualité de la
« menace contre la paix et la sécurité
internationales » était comprise de façon stricte, du
seul point de vue sécuritaire, la fin de la guerre froide a
consacré la prise en compte de d'autres formes de menace. Ainsi, le
Conseil de sécurité a déclaré le 31 janvier 1992
que « la paix et la sécurité internationales ne
découlent pas seulement de l'absence de conflits armés. D'autres
menaces de nature non militaires à la paix et à la
sécurité internationales trouvent leur source dans les domaines
économique, social humanitaire ou écologique2(*)39 ». Dans le
prolongement de cette déclaration, le Secrétaire
général a affirmé que les nouvelles menaces trouvent tout
autant leur source dans des conflits internes et des problèmes
économiques et sociaux que dans des conflits
interétatiques2(*)40. Le rapport du groupe de personnes de haut niveau
qui fait suite à la demande du Secrétaire général
d'évaluer les menaces contre la paix et la sécurité
internationales concluait clairement que « tout
évènement ou phénomène meurtrier qui compromet la
survie et sape les fondements de l'Etat constitue une menace contre la paix et
la sécurité internationales »2(*)41. Sur cette base, six
catégories de menace ont été listées au nombre
desquelles le terrorisme2(*)42. C'est donc tout naturellement que les Nations
Unies ont réaffirmé dans certaines de leurs résolutions
que le terrorisme constituait une menace à la paix et la
sécurité internationales2(*)43. Qualification qui est bien trop souvent mal
accueillie au sein de la doctrine. L'article 42 donne au Conseil le pouvoir
d'entreprendre des actions militaires coercitives dans le cadre du
système de sécurité collective. A cet égard, il est
considéré comme le pendant de la légitime
défense2(*)44. La
tendance dominante de la doctrine contemporaine voudrait bien y voir le cadre
juridique de la légalité des opérations
multilatérales2(*)45. Si l'on garde à l'esprit que la Charte
offre deux solutions alternatives, ou du moins successives en cas de besoin, la
légitime défense et l'action coercitive de l'article 42, la
tendance à privilégier la seconde formule traduit le souhait de
bénéficier au maximum de l'effet légitimant de cette base
juridique, effet supposé plus marqué que celui de l'autorisation
de la légitime défense qui ne fournit que la confirmation que la
réaction armée est licite2(*)46.
La décision de recourir aux mesures de coercition
armée de l'article 42 relève de la seule compétence du
Conseil de sécurité. En effet, l'article en question
bénéficie du champ d'application du Chapitre VII de la Charte,
qui « confère au Conseil tous les pouvoirs nécessaires
pour traiter de tous les types de menace contre la paix et la
sécurité internationale auxquels les Etats sont
confrontés »2(*)47. Il reste que la formulation de l'article 42 donne
lieu à une interprétation controversée au sein de la
doctrine. L'activation de l'article 42 est-elle subordonnée à la
mise en oeuvre préalable de l'article 41? Tout porte à le croire
à première vue dans la mesure où il y est fait recours
« si le Conseil de sécurité estime que les mesures
prévues à l'article 41 seraient adéquates ou qu'elles se
sont révélées telles ». Une telle
interprétation pour simple qu'elle paraisse, même si elle est
défendable, ne manque pas toutefois de susciter quelques contestations.
En effet, il est brandi au soutien de la thèse contraire, l'esprit
même de l'article 42 qu'il faut rechercher dans les travaux
préparatoires. A ce propos, un auteur2(*)48 nous rapporte que les travaux préparatoires
montrent clairement que le Conseil de sécurité peut prendre
directement des décisions en vertu de l'article 42 sans devoir s'en
référer au préalable à l'article 41. Un autre
argument de poids- la théorie des pouvoirs implicites de l'Organisation
internationale2(*)49-
est avancé pour faire accepter le pouvoir discrétionnaire de
l'organe sécuritaire en la matière. Une autre question qui surgit
est la suivante : quels sont les Etats susceptibles d'être
visés par les mesures de contrainte militaire de l'article 42 ?
Théoriquement et juridiquement, il est possible d'admettre que tous les
Etats sont susceptible d'être visés par l'article 42. Mais sur le
plan politique, il faut probablement soustraire de cette catégorie, tous
les Etats dotés de l'arme nucléaire. On voit mal en effet quelle
serait la crédibilité de la menace d'un recours à des
mesures coercitives réellement dissuasives de la communauté
internationale à l'égard de ces Etats. On pourrait en outre
s'interroger sur la nature même de ces mesures. La lecture de l'article
42 offre un tableau assez riche et diversifié des mesures militaires
envisageables pour réagir à toute menace à la paix et
à la sécurité internationales, et donc à toute
attaque terroriste. Il s'agit entre autres des
« démonstrations »2(*)50, des « mesures de blocus » et
d'autres opérations menées par des forces aériennes,
navales ou terrestres de Membres des Nations Unies. L'emploi de l'expression
« autres opérations » montre bien l'étendue
des actions militaires susceptibles d'être entreprises, celles-ci pouvant
couvrir tout l'espace territorial de l'Etat visé à savoir,
l'espace terrestre, l'espace maritime et l'espace aérien. Les conditions
d'emploi de l'article 42 laissent aussi entendre que le principe
d'efficacité mais aussi celui de proportionnalité ont leur place
et un rôle à jouer dans le choix du moment, de la durée et
de l'intensité des mesures coercitives armées2(*)51. Il reste qu'à la
différence des Opérations de maintien de la paix (OMP), les
mesures coercitives de l'articles 42 n'ont pas à s'inscrire dans la
problématique d'impartialité et de neutralité non plus que
du consensualisme : le destinataire de ces mesures
n'est en réalité pas en position de revendiquer
de telles garanties2(*)52. Enfin, peut-être, faut-il s'étonner
avec le Professeur Patrick DAILLIER du curieux destin juridique de l'article
42, dont l'utilité comme fondement juridique n'est jamais explicitement
reconnue, alors qu'il est admis qu'elle constitue la pierre angulaire ou la
garantie ultime face aux échecs des autres moyens de pression du
système de sécurité collective2(*)53.
Paragraphe 2 : Les mesures de contrainte non
militaire
contre le soutien étatique au
terrorisme
L'article 2 paragraphe 4 de la Charte des Nations
Unies interdit de manière générale le recours à la
force ; bien que cela ne soit pas précisé par cette
disposition, il est établi que la notion de recours à la force
couvre non seulement le recours direct à la force par les troupes
régulières d'un Etat, mais embrasse aussi le recours
« indirect » par le soutien apporté par un Etat
à des groupes privés qui mènent des attaques armées
contre un autre Etat2(*)54. Soit le soutien se traduit par un contrôle
effectif de l'Etat et les actes de terrorisme sont alors imputables à
l'Etat, soit le soutien est moins substantiel et se limite par exemple à
la fourniture de fonds d'armes ou à un appui logistique, alors les actes
terroristes ne sont pas en principe imputables à l'Etat. Dans ce dernier
cas, le soutien relève moins d'un recours à la force
prohibée que d'une intervention dans les affaires intérieures
d'un Etat2(*)55. En
effet, le soutien de l'Etat au terrorisme peut également constituer une
intervention prohibée alors qu'un acte de terrorisme
déterminé n'est pas attribuable à l'Etat2(*)56. De telles
hypothèses appellent des mesures autres que la légitime
défense qui nécessite pour sa mise en oeuvre- on l'a
déjà dit- la perpétration d'une attaque directe, plus
exactement d'une agression armée contre la souveraineté d'un
Etat. Le jus gentium ou droit des gens reconnaît alors aux Etats
la faculté de mettre en oeuvre des mesures unilatérales contre un
Etat pour l'amener à changer d'attitude et cesser un comportement
manifestement illicite. De façon rigoureuse, on distingue les mesures de
rétorsion (A) des contre-mesures (B), bien que la tendance actuelle
conduise à opérer des confusions entre les deux catégories
de mesures.
A- La consistance des mesures de
rétorsion contre le soutien
étatique au terrorisme
Les Etats peuvent réagir au soutien
d'un Etat au terrorisme en adoptant des mesures inamicales mais
intrinsèquement licites2(*)57. Les mesures de rétorsion ne supposent donc
pas pour leur mise en oeuvre l'atteinte à un droit subjectif de l'Etat
qui les met en oeuvre. Un Etat peut en effet adopter des mesures de
rétorsion sans que le comportement d'un autre Etat l'affecte
directement. De ce pas, les mesures de rétorsion peuvent bien
répondre à un fait internationalement illicite, tel que le
soutien d'un Etat au terrorisme. Elles consistent plus
généralement en des mesures vexatoires à l'égard
des ressortissants de l'Etat mis en cause et concernent des domaines aussi
sensibles que la diplomatie et l'économie. La Déclaration de
Tokyo du G7 du 6 mai 19862(*)58 constitue la consécration de la
rétorsion « contre le terrorisme et contre ceux qui le
commandent ou le soutiennent ». Les sept puissances les plus
industrialisées y envisageaient plusieurs mesures dont le
« refus d'exporter des armes », la « limitation
stricte de la taille de leurs missions diplomatiques », une
« immigration plus stricte »... La plupart de ces mesures
inamicales composent le régime des mesures de rétorsion face au
soutien prétendu d'un Etat au terrorisme. Au nombre de ces
dernières, on peut citer la rupture des relations diplomatiques2(*)59 qui se traduit notamment
par le rappel des agents diplomatiques représentant un Etat accusateur
auprès de l'Etat accusé de soutenir le terrorisme, la fermeture
des ambassades de celui-ci sur le territoire de celui-là. C'est ensuite
le cas des mesures prises dans le domaine économique. Sur cette base, un
Etat peut souverainement mettre en oeuvre des mesures de contrainte affectant
ses relations économiques et commerciales avec un autre Etat. Les
mesures de contrainte économiques consistent généralement
en la cessation des vols internationaux en provenance ou en direction des pays,
la cessation du commerce de matériel et de toute formation de personnel
militaire, l'arrêt des investissements, la cessation progressive des
achats de matière premières et de produits
énergétiques etc. La CIJ a jugé dans son Arrêt de
1986 qu'il n'y a pas d'interdiction en droit international
général de telles mesures2(*)60. Au constat, les mesures
précédemment énumérées se rapprochent
très sensiblement et très substantiellement des mesures de
l'article 41 de la Charte des Nations Unies qui ne revêtent pas pour
autant la qualification de mesures rétorsion. En effet, le Conseil de
sécurité en vertu du Chapitre VII de la Charte peut
décider sur le fondement de cet article quelles « mesures
n'impliquant pas l'emploi de la force armée doivent être prises
(...) et peut inviter les Membres des Nations Unies à appliquer ces
mesures. Celles-ci peuvent comprendre l'interruption complète ou
partielle des relations économiques et des communications
ferroviaires, maritimes, aériennes, postales,
télégraphiques, radiophoniques et des autres mesures de
communications, ainsi que la rupture des relations
diplomatiques »2(*)61. On notera que la Résolution 1373 (2001) a
été très décisive, très incisive en ce qui
concerne les mesures économiques à prendre contre les Etats
soutenant le terrorisme, en ce qu'elle impose à tous les Etats de
geler « (...) sans attendre les fonds et autres avoirs
financiers ou ressources économiques » des terroristes
eux-mêmes ainsi que des personnes morales ou physiques qui les
soutiennent2(*)62. Mais,
à la différence des mesures prises dans le cadre du Chapitre VII
de la Charte, lesquelles font suite à une menace contre la paix et la
sécurité internationale2(*)63, les mesures de rétorsion ne
répondent pas forcément à cette exigence. Elles sont
prises unilatéralement soit par un seul Etat, soit par plusieurs Etats
de concert, en dehors du cadre onusien, alors que les mesures de l'article 41
de la Charte sont des décisions du Conseil de sécurité qui
jouit de la faculté de les imposer ou non aux Etats parties. Du reste,
on peut supposer que les décisions collectives présentent une
efficacité plus grande que les mesures d'un Etat isolé. Au niveau
politique, la désapprobation est mieux affirmée ; sur le
plan économique, les conséquences des mesures restrictives sont
aussi, normalement plus dissuasives. Les mesures de rétorsion peuvent
par ailleurs viser non seulement un Etat isolé pour son soutien au
terrorisme, mais la pratique des relations internationales montre que des
mesures de rétorsion identiques peuvent être prises
simultanément contre plusieurs Etats accusés ensemble de soutenir
le terrorisme2(*)64.
Si les mesures de rétorsion ont l'avantage de
bénéficier d'une certaine légitimité, leur
licéité étant acquise, il en va différemment des
contre-mesures qui sont plus ou moins contestées.
B- La licéité des contre-mesures contre le soutien
étatique au
terrorisme en question
De manière générale, le
droit international prohibe le recours aux représailles armées
dans les relations internationales. A moins de répondre aux
critères de la légitime défense ou d'en remplir les
conditions, les représailles armées se présentent comme
des actes de contrainte militaire contraire au droit international mis en
oeuvre pour répondre à un comportement d'un autre Etat
lui-même contraire au droit international2(*)65. Cependant, si la licéité des
représailles armées est plus que douteuse, celle des
contre-mesures, c'est-à-dire les représailles non armées
est admise. On entend par « contre-mesures », l'ensemble
des actes par lesquels un Etat riposte à une mesure prise par un autre
Etat et qui seraient illicites dans des circonstances normales, mais deviennent
licites du fait qu'ils répondent à un comportement lui-même
illicite2(*)66. En
d'autres mots, ce sont des mesures intrinsèquement illicites mais dont
l'illicéité est exclue par l'antériorité du fait
illicite d'un autre Etat. Elles consistent plus généralement en
l'inexécution temporaire par l'Etat lésé de ses
obligations internationales envers l'Etat responsable. Les Etats peuvent donc
invoquer le droit que leur reconnaît la coutume internationale2(*)67 de recourir à des
contre-mesures pour justifier leur réaction contre un Etat qu'ils
accusent de soutenir le terrorisme. Leur but est limité, et elles ne
peuvent être mises en oeuvre que pour amener l'Etat responsable à
s'acquitter de ses obligations. Par conséquent, « il doit
être mis fin aux contre-mesures dès que l'Etat responsable s'est
acquitté des obligations qui lui incombent à raison du fait
internationalement illicite (...) »2(*)68. Les contre-mesures sont des instruments
subjectifs puisque l'illicéité du comportement initial est
appréciée unilatéralement par l'Etat qui en est
l'auteur2(*)69. De ce
fait, les contre-mesures peuvent apparaître comme un instrument
privilégié de lutte contre le terrorisme. Encore faut-il pour
leur mise en oeuvre, qu'elles soient soumises à certaines conditions
qu'il convient d'énumérer. Suivant la jurisprudence
Naulilaa2(*)70, deux conditions suffisent pour
établir le droit d'un Etat de recourir à des contre-mesures pour
réagir au comportement illicite d'un autre Etat. Cette jurisprudence est
d'un intérêt particulier en matière de lutte contre le
terrorisme, en ce qu'un Etat, sur le fondement de cette dernière, peut
recourir à des contre-mesures en réaction au soutien d'un autre
Etat au terrorisme. La première condition est relative à la
qualité de réagir en contre-mesures. En effet, l'Etat qui met en
oeuvre des contre-mesures doit être lésé par une violation
du droit international attribué à un autre Etat, et prouver le
caractère illicite et l'imputation à l'Etat du comportement
contre lequel il réagit. Tout Etat n'est donc pas habilité
à adopter des contre-mesures en réaction au fait illicite d'un
autre Etat2(*)71, car
« la légalité des contre-mesures est (...)
subordonnée à l'existence d'un titre, d'une compétence de
réaction dont un sujet dans une espèce donnée, c'est la
qualité d'agir »2(*)72. Selon la théorie classique de la
responsabilité internationale de l'Etat, par « qualité
pour agir », il faut entendre l'atteinte à un droit subjectif
concrétisé par un dommage matériel. Ainsi seul l'Etat qui
subit un dommage matériel résultant de la violation d'une
obligation peut recourir à des contre-mesures. Recentré dans le
contexte de la lutte antiterroriste, l'Etat qui agit en contre-mesures doit
faire la preuve que l'Etat contre lequel il entend agir, a lésé
ses droits du fait de son soutien avéré au terrorisme.
L'intérêt à agir résulte donc d'une atteinte
réelle et spéciale à l'Etat. L'autre condition tient
à une exigence procédurale : L'Etat qui entend réagir
en contre-mesures doit sommer préalablement l'Etat cible, en l'invitant
à respecter ses obligations. L'Etat qui notifie ses intentions à
l'autre Etat ne pourra alors recourir aux contre-mesures contre ce dernier, si
et seulement si la sommation restait vaine, sans suite. La sommation aurait
alors pour effet de permettre à l'Etat considéré comme
fautif, d'ajuster son comportement, ou alors d'entrer en négociations.
Cette exigence minimale fait croire à Messieurs Jean COMBACAU et Serge
SUR que « les contre-mesures demeurent un instrument de communication
entre Etats et se situent dans un contexte de négociation, pouvant
contribuer au règlement pacifique des différends en
rétablissant l'équilibre des droits et des
intérêts »2(*)73. Par ailleurs, il faut souligner
le fait que la réaction en contre-mesures est tout comme la
légitime défense, enfermée dans des limites. Selon la CIJ,
une contre-mesure doit être dirigée contre l'Etat responsable du
fait illicite, elle doit viser les biens de l'Etat responsable ou ses
ressortissants2(*)74.
Une contre-mesure ne saurait donc viser un Etat tiers au différend. Les
contre-mesures doivent en outre être limitées dans leur impact
conformément au principe bien établi de proportionnalité,
et la CDI a aussi retenu leur caractère temporaire ou
réversible. Si la riposte ne respecte pas le standard de
proportionnalité, l'Etat réagissant pourra voir sa
responsabilité internationale mise en jeu par l'Etat visé2(*)75.
En pratique, des problèmes se posent lorsqu'il s'agit
de définir la limite, d'établir la frontière entre les
contre-mesures et les mesures de rétorsion. A quel moment peut-on
considérer qu'un Etat réagissant à un acte terroriste
recourt aux contre-mesures ou aux mesures de rétorsion ? La
question n'est pas dénuée de sens quand on sait que les
contre-mesures peuvent aussi bien consister en la rupture des relations
diplomatiques et/ou économiques (par l'imposition par exemple d'embargo
sur des produits) et correspondre aux mesures de rétorsion. Il n'est
donc pas aisé de répondre à la question et
l'intérêt de la distinction n'est en réalité que
théorique. La confusion terminologique entretenue entre les deux
catégories de mesures rend bien compte de cette
difficulté2(*)76.
En sus, le problème de leur contrôle se pose avec une
extrême acuité, puisqu'à priori contre-mesures et mesures
de rétorsion sont envisagées unilatéralement, en dehors du
cadre des Nations Unies. En tout état de cause, la
nécessité d'articuler ces mesures avec celles de l'article 41 de
la Charte des Nations Unies s'imposent d'autant plus que toutes ces mesures se
recoupent, se rejoignent.
L'étude du régime de coercition en
réponse au terrorisme ayant fait l'objet de larges
développements, aussi convient-il dans les développements qui
vont suivre d'aborder la question de la répression pénale.
Section 2 : La répression pénale du
terrorisme
Cette section aurait pu s'intituler «
Répression judiciaire du terrorisme », et contenir le
problème de la responsabilité judiciaire des Etats pour soutien
au terrorisme, cette dernière étant essentiellement de nature
civile. Bien que cette question paraisse d'une grande importance à nos
yeux, nous l'avons occultée à dessein pour nous intéresser
principalement et essentiellement à la responsabilité
pénale des individus pour actes terroristes. Ce choix se justifie par
l'abondance de la doctrine en cette matière, étant entendu que
les développements précédents se sont largement appesantis
sur la mise en oeuvre de la responsabilité de l'Etat par des mesures
coercitives, et que nous réservons le traitement de cette
dernière question à la deuxième partie de nos travaux.
La délimitation de notre champ d'étude ayant
étant établie, nous entendons traiter dans la présente
section, successivement le problème de la répression du
terrorisme par les juridictions pénales nationales (Paragraphe
1) et celui de la répression par les juridictions
internationales pénales (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : La répression pénale du
terrorisme par les
juridictions nationales
La compétence est un aspect
important de la souveraineté. Aussi, consciente de l'importance de cette
question, la CPIJ avait énoncé que « tout ce que l'on
peut demander à un Etat, c'est de ne pas dépasser les limites que
le droit international trace à sa
compétence »2(*)77. De ce pas, les juridictions nationales sont
fondées à établir leurs compétences traditionnelles
aux fins de répression du terrorisme (A). Le caractère
particulier du terrorisme a en revanche nécessité
l'élargissement, dans les conventions internationales antiterroristes,
de la compétence des juridictions nationales à un titre de
compétence spéciale dit « compétence
universelle » (B).
A- Les titres de compétence traditionnels
Le droit international identifie
différents types de compétences classiques dont peut se
prévaloir un Etat en vertu de sa souveraineté, pour poursuivre
certaines infractions graves y compris le terrorisme. Le premier titre de
compétence est la compétence territoriale, c'est le titre de
compétence de base2(*)78, en ce que l'Etat est en principe compétent
pour tout ce qui se produit sur son territoire. Ratione loci, la
souveraineté de l'Etat s'étend sur la zone
géographiquement délimitée constituant le territoire
exclusif de l'Etat. Le principe de la compétence exclusive de l'Etat en
ce qui concerne son propre territoire est un principal cardinal du droit
international qui découle directement du principe de
l'égalité souveraine des Etats. L'Etat sur le territoire duquel
est commis un acte de terrorisme est compétent pour juger les auteurs
dudit acte, selon un titre général sans nul besoin qu'une
convention internationale n'ait à le prescrire. Les conventions
antiterroristes universelles mentionnent quasiment toutes2(*)79 la compétence
territoriale. C'est ainsi que la Convention de Montréal de
1971 établit cette compétence par une formulation on ne peut
plus claire: un Etat partie a compétence obligatoire « si
l'infraction est commise sur le territoire de cet Etat ». On notera
la spécificité de la Convention de 1999 sur le financement du
terrorisme, selon laquelle un Etat est aussi compétent si l'infraction
de financement avait pour but ou a eu pour résultat la commission d'une
infraction terroriste sur son territoire2(*)80. On note que Ces conventions internationales ne
définissent pas les conditions dans lesquelles un acte est
considéré comme commis sur le territoire d'un Etat, alors que la
notion de commission peut être interprétée de diverses
manières et viser la préparation, la consommation, les
effets...si certains Etats exigent que l'acte criminel lui-même soit
commis sur leur territoire2(*)81, beaucoup acceptent que leur compétence se
fonde seulement sur les effets que l'acte criminel - commis à
l'étranger - produit sur leur territoire2(*)82. L'autre difficulté qui apparaît
sous-jacente, c'est celle relative à la notion de double
incrimination2(*)83. Il
est certes vrai que les conventions internationales antiterroristes consacrent
la compétence territoriale des Etats en la matière, mais encore
faut-il que l'ordre juridique interne de l'Etat poursuivant incrimine comme tel
l'acte délictueux, sinon sur quel fondement établirait-il sa
compétence, quand on connaît la valeur du sacro-saint principe
nullum crimen nulla poena sine lege en matière pénale. A
supposer par exemple que les attentats manqués contre le 1er
Ministre ivoirien reçoivent après coup, les enquêtes ayant
livré leurs conclusions, la double qualification de terrorisme
aérien (Convention de Tokyo de 1963 sur la sécurité
aérienne) et d'attentat à l'explosif (Convention internationale
pour la répression des attentats terroristes à l'explosif du 15
décembre 1997)2(*)84. Sur quel fondement les criminels pourraient-ils
être poursuivis en Côte-d'Ivoire, quand on sait que l'ordre
juridique pénal ivoirien méconnaît le crime
terroriste2(*)85.
Qu'adviendrait-il alors en pareille hypothèse ? Pour ainsi dire, un
Etat pourra établir sa compétence territoriale en matière
de terrorisme pour autant que son ordre pénal interne le lui permettra,
c'est-à-dire en faisant de l'acte criminel une incrimination expresse.
De là, il appert que la compétence territoriale
se double d'un autre titre de compétence non moins essentielle, la
compétence matérielle (ratione materiae) dont les
conventions internationales antiterroristes sectorielles
précédemment étudiées ne sont que le reflet, les
manifestations. Lorsqu'un Etat ne peut fonder sa compétence sur le
critère territorial, il peut agir sur le fondement de la
compétence extraterritoriale dite
« personnelle » : ratione personae, certains
actes commis à l'étranger peuvent entrer dans la
compétence d'un Etat du fait de la nationalité des protagonistes
impliqués. La nationalité, en tant que lien d'allégeance
primordial et manifestation de la souveraineté de l'Etat, constitue un
titre à agir classique et légitime de l'Etat. Il faut à
cet égard distinguer néanmoins la compétence personnelle
dite « active » et celle dite
« passive », selon que le ressortissant de l'Etat est
auteur présumé de l'acte ou victime. En vertu du titre de
compétence personnelle active, l'Etat peut juger le comportement de ses
ressortissants à l'étranger. Ce titre de compétence est un
élément crucial du dispositif répressif car il permet
d'assurer la poursuite des criminels alors que de nombreux Etats refusent
l'extradition de leurs nationaux. En outre, la possibilité est offerte
aux Etats dans les conventions, d'étendre leur compétence
personnelle active pour des actes commis à l'étranger par des
individus qui n'ont pourtant pas leur nationalité. Tel est le cas de
l'apatridie qui révèle une acuité particulière en
matière de terrorisme dans la mesure où certains Etats
déchoient volontiers de leur nationalité certains ressortissants
reconnus comme terroristes notoires2(*)86. Les Etats dans lesquels les apatrides ont leur
résidence habituelle peuvent fonder leur compétence pour les
actes de terrorisme que ces derniers ont commis à l'étranger. Le
titre de compétence personnelle passive est celui en vertu duquel un
Etat est compétent pour juger les auteurs d'un crime commis à
l'étranger à l'égard de ses ressortissants2(*)87. Il s'agirait là du
titre de compétence le moins justifiable et le plus controversé,
ce qui explique d'ailleurs qu'il figure dans les conventions
antiterroristes2(*)88 en
tant que titre de compétence facultatif et non obligatoire. Enfin
plusieurs traités antiterroristes établissent la
compétence des Etats pour connaître des atteintes commises
à l'étranger contre leurs intérêts
« supérieurs » ou « vitaux ».
Ces atteintes portent plus généralement sur la
sécurité de ces Etats, leurs institutions. C'est la
compétence réelle ou de protection. C'est une
compétence « (...) liée aux éléments
fondamentaux de leur souveraineté et de leur
existence »2(*)89. Il est à ce propos intéressant de
relever que l'objet de la Convention de New York de 1973 relève de la
compétence réelle, puisque sont ici visées les infractions
commises contre les personnes jouissant d'une protection internationale y
compris les agents diplomatiques. Les Etats parties sont compétents
d'après l'article 3 paragraphe 1 (c) « lorsque
l'infraction est commise contre une personne jouissant d'une protection
internationale au sens de l'article premier, qui jouit de statut en vertu
même des fonctions qu'elle exerce au nom dudit Etat ».
Sur cette base, un éventuel attentat terroriste contre
un agent d'un Etat jouissant de la qualité officielle serait
aussitôt perçu comme une attaque contre l'Etat
lui-même2(*)90.
Du reste, certaines conventions permettent aux Etats de
connaître des actes terroristes sur la base d'un titre de
compétence exorbitant, extraordinaire et spécial : la
compétence dite universelle.
B- Un titre de compétence
spécial: la compétence universelle
La compétence universelle se
justifie par l'adage latin « Ubi te invenero, ibi te
judicieuse » qui signifie littéralement, « où
je t'aurai trouvé, je te jugerai ». Elle se donne en droit
comme l'« aptitude reconnue aux tribunaux de tout Etat à juger
des faits commis à l'étranger, quels que soient le lieu de
l'infraction et la nationalité de l'auteur ou de la
victime »2(*)91. C'est
une technique de procédure pénale, qui permet à un Etat de
poursuivre et de juger des délits et des crimes qui autrement lui
échapperaient en vertu des critères traditionnels de la
compétence pénale. Elle est établie pour permettre la
répression de certaines infractions particulièrement graves et
qui violent certaines valeurs communes de l'humanité. Elle a pour
objectif d'assurer une répression sans failles des crimes d'une
extrême gravité, lesquels troublent non plus simplement l'ordre
public interne d'un Etat, mais celui de la communauté internationale
dans son ensemble. Concrètement, au titre du principe de
l'universalité, l'Etat sur le territoire duquel se trouve l'auteur
présumé d'une infraction internationale a compétence
juridictionnelle sur l'infraction qui n'a pas été commise sur son
territoire, alors que ni l'auteur ni les victimes n'ont la nationalité
de l'Etat, et que ni ses intérêts ni sa sécurité
n'ont été - du moins directement - mis en danger. C'est donc la
seule présence de l'auteur présumé sur le territoire de
l'Etat qui suffit à lui conférer compétence pour le juger.
Il s'agit en cela d'une compétence
« exceptionnelle » au regard de la problématique de
l'intérêt à agir. Ainsi, la volonté de lutter
contre l'impunité des crimes heurtant les valeurs communes à
l'ensemble des Etats a conduit à une extension pragmatique de la
compétence juridictionnelle de ces derniers. Assez
généralement, la compétence universelle peut être
simplement facultative2(*)92 ou
obligatoire. Elle est conférée dans les traités dans le
cadre de l'adage Aut dedere, aut judicare2(*)93, selon lequel l'Etat sur le territoire duquel se trouve
un individu, s'il ne l'extrade pas doit le poursuivre. Il convient de noter que
la compétence universelle se présente dans les conventions
antiterroristes comme une obligation subsidiaire2(*)94 conditionnée par l'absence d'extradition. En
matière de terrorisme, un pas est franchi dans l'exercice de la
compétence universelle2(*)95, en ce que ce titre de compétence extraordinaire,
n'est plus une simple faculté laissée à
l'appréciation de l'Etat de refuge sur lequel pèse
désormais l'obligation alternative de poursuite ou d'extradition des
présumés terroristes . La Convention de la Haye de 1970 pour la
répression de la capture illicite d'aéronefs serait ainsi la
première convention à obliger les Etats à établir
leur compétence universelle et poursuivre les terroristes sur ce
fondement, conformément à la maxime « Aut dedere, aut
judicare ». Le principe « Aut dedere, aut
judicare » constitue désormais le principe fondamental des
instruments de lutte contre le terrorisme, ce qui explique par ailleurs le
fait qu'il ait été réaffirmé par le Conseil de
sécurité dans sa Résolution 1373 (2001)2(*)96. L'établissement de la
compétence universelle, est donc une étape décisive dans
la lutte contre le terrorisme, d'autant plus que le criminel ne saurait ainsi-
théoriquement- trouver refuge auprès d'un Etat. Gardons toutefois
à l'esprit le fait qu'en matière de terrorisme, la
compétence universelle reste un titre de compétence
conventionnel, or tous les Etats ne sont pas liés par les conventions
pertinentes en vertu de la règle res inter alios acta. Au demeurant, Les
conventions antiterroristes, en obligeant les Etats de refuge à exercer
leur compétence universelle, constituent une entorse à la
souveraineté des Etats, d'où la difficulté de la mettre en
oeuvre en pratique2(*)97.
Suivant le principe de la subsidiarité2(*)98, corollaire naturel du principe
de la souveraineté, l'impossibilité pour l'ordre interne de
régenter une situation juridique déterminée appelle le
secours de l'ordre international. Il importe donc de traiter dans les
développements qui vont suivre la répression du terrorisme par
les juridictions internationales pénales.
Paragraphe 2 : La répression pénale du
terrorisme par les
juridictions internationales
L'étude de la répression
pénale du terrorisme donne à constater que le
phénomène est difficilement justiciable des juridictions
internationales. En effet, la nécessité de réprimer ce
crime contraste bien avec l'absence de juridiction pénale internationale
disposant d'une compétence générale en matière de
terrorisme (A). Le seul point de soulagement reste la modeste contribution des
tribunaux pénaux internationaux à la répression de
certains actes terroristes (B).
A- L'absence de juridiction pénale
internationale disposant
d'une compétence
générale en matière de terrorisme
L'institution d'une juridiction
pénale internationale disposant d'une compétence
générale en matière de terrorisme s'est imposée et
continue de s'imposer à la communauté internationale comme une
étape plus que décisive, un défi permanent dans la lutte
contre le terrorisme. Cependant, les ambitions avant-gardistes d'instituer une
juridiction spéciale contre le terrorisme, à la veille de la
Seconde Guerre mondiale, avaient buté sur un cinglant désaveu.
Cet échec était du reste prévisible, puisque
l'effectivité de cette juridiction était en réalité
subordonnée à l'entrée en vigueur de la Convention qui la
portait. Or justement, les deux conventions jumelles2(*)99 sur le terrorisme
simultanément adoptées, sous les auspices de la SDN le 16
novembre 1937, sont restées lettre morte. La première
déjà évoquée dans les développements
antérieurs3(*)00,
et qui portait la mention « Convention pour la prévention
et la répression du terrorisme » avait une portée
générale en termes de lutte organisée. La seconde, qui
portait le titre « Convention pour la création d'une Cour
pénale internationale » avait un objet beaucoup plus
spécifique. Son champ de compétence restait exclusivement
limité au jugement des individus accusés d'infractions
terroristes à caractère international prévues par sa
convention jumelle3(*)01. Ceci apparaissait dès lors comme une
innovation parfois qualifiée de « hardie »3(*)02 par certains observateurs
de la vie internationale. Il semble que le contexte historique- à la
vielle de la Seconde Guerre mondiale- dans lequel se sont inscrits ces projets
n'était sans doute guère propice à l'avènement de
cette juridiction. L'on sait en effet que, suite à la Seconde Guerre
mondiale, la répression pénale internationale s'est portée
prioritairement sur les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité
perpétrés durant le conflit mondial. Mais il s'avère en
outre que le projet était nettement trop ambitieux pour l'époque,
les Etats n'étant certainement pas prêts à accepter une
telle évolution. L'intention de la Conférence des Etats
était à l'époque d'instituer une cour compétente
à l'origine uniquement pour connaître des infractions terroristes
internationales, mais pouvant acquérir à termes d'autres
compétences qui devait être exclusivement compétente pour
juger les individus3(*)03. Cette juridiction, qui devait siéger
à la Haye, aurait été une juridiction permanente. Elle
n'aurait toutefois eu à se réunir qu'à l'occasion de sa
saisine pour une poursuite relevant de sa compétence3(*)04 soit un acte de terrorisme
« incriminé » dans la première convention de
1937. Ainsi, on relève des différences notables entre la
juridiction mort-née et l'actuelle Cour pénale internationale
dont le Statut a été adopté à Rome en 1998. On peut
déjà souligner qu'à la différence de la juridiction
mort-née dont le champ de compétence était limité
aux actes terroristes, l'actuelle Cour pénale internationale
méconnaît l'infraction terroriste, y était
indifférente. Elle n'est compétente que pour les crimes de
guerre, les crimes contre l'humanité, les crimes de génocides et
le crime d'agression, encore que cette dernière infraction y est
logée sans définition.
Ainsi, comme on peut s'en apercevoir, à ce jour, il
n'existe de juridiction internationale pénale de portée
générale en matière de terrorisme. Le mérite
revient en revanche aux tribunaux pénaux internationaux ad-hoc
pour leur apport à la répression du terrorisme.
B- La contribution des tribunaux pénaux internationaux
ad -hoc à la
répression du terrorisme
La mission des tribunaux
ad-hoc consiste à juger de crimes de guerre et de crimes contre
l'humanité commis dans le cadre d'un conflit armé précis.
Le terrorisme peut quant à lui être perpétré dans un
contexte de paix relative comme dans un contexte de guerre. L'apport de la
jurisprudence des tribunaux ad hoc ne peut dès lors concerner
qu'une facette du terrorisme, celles des actes terroristes commis dans le cadre
d'un conflit armé. Les statuts des tribunaux ad-hoc ne
prévoient pas l'infraction de terrorisme comme infraction distincte et
ne prévoient la compétence des tribunaux ad-hoc que pour
juger de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité. Dès
lors, l'analyse de leur jurisprudence ne sera intéressante pour notre
étude que dans la mesure où cette jurisprudence peut être
interprétée comme condamnant certains actes de terrorisme. Le
Statut du TPIR envisage expressément la compétence3(*)05 de ce tribunal pour
connaître des actes de terrorisme. L'article 4 du Statut du TPIR3(*)06, consacré aux
violations de l'article 3 commun aux Conventions de Genève et du
Deuxième Protocole additionnel3(*)07 cite les « actes de
terrorisme » parmi les infractions vis-à-vis desquels ce
tribunal a juridiction. Le Statut du TPIR reprend ici les termes de l'article 4
du Protocole additionnel II, intitulé « garanties
fondamentales » , et qui cite « les actes de
terrorisme » parmi les actes « prohibés en tout
temps et en tout lieu » à l'égard des personnes qui ne
participent pas directement aux hostilités. On peut noter que l'article
en question incrimine la « prise d'otages » avant de faire
cas de la prohibition des « actes de terrorisme ». Ces
deux mentions mise l'une à côté de l'autre autorisent
à penser que le Statut du TPIR exclut la prise d'otages de la
catégorie des actes terroristes, ce qui contrarie la Convention
internationale de New York du 17 décembre 1979 qui considère
dans son préambule les actes de prise d'otages comme
des « manifestations du terrorisme
international »3(*)08. Sur le fondement de l'article 23 de son Statut,
une personne coupable d'un acte quelconque de terrorisme3(*)09 peut être passible
d'une peine d'emprisonnement, la peine de mort étant exclue des
sanctions applicables aux infractions qui ressortent de son champ
d'application.
Cependant, on peut le noter avec Madame Cécile
TOURNAYE3(*)10,
qu'aucune condamnation n'a été prononcée sur cette base.
Le Statut du TPIY3(*)11
n'a pas de disposition semblable. C'est donc ailleurs qu'il faudra rechercher
les éléments caractéristiques de son apport à la
répression pénale du terrorisme. On sait par exemple que ce
tribunal a pris en compte la terreur infligée aux populations civiles
dans le cadre d'inculpation pour crime contre l'humanité3(*)12. Comme on peut bien s'en
apercevoir, les tribunaux pénaux internationaux ad-hoc
connaissent de la question du terrorisme non pas comme une infraction autonome,
mais plutôt comme un crime connexe du crime contre l'humanité
et/ou du crime de guerre.
Mais, c'est semble-t-il du point de vue de l'engagement de la
responsabilité pénale individuelle que l'apport des tribunaux
ad hoc sera plus remarquable. De ce point de vue, leur utilisation de
la théorie du « but commun », aussi
dénommée « entreprise criminelle conjointe »,
comme mode d'engagement de la responsabilité individuelle dans l'ordre
international, est peut-être leur contribution majeure pour une
répression efficace du terrorisme dans l'ordre international.
L'imputation d'un acte illicite est toujours difficile lorsqu'il s'agit d'une
criminalité de groupe. C'est pourquoi la théorie du but commun,
qui permet d'imputer le crime à un plus grand nombre que les
théories classiques de mise en jeu de responsabilité, a
été considérée à plusieurs reprises dans la
lutte contre la criminalité de groupe. Elle rend chacun des
« participants » à l'entreprise criminelle
également responsable de tous les crimes commis dans le cadre de cette
entreprise3(*)13. Il
importe peu que l'un des membres ait, plus ou moins, contribué que
d'autres à l'élaboration, à la planification puis à
la commission du crime. Tous les membres de l'entreprise encourent une
responsabilité pour la commission du crime résultant de
l'entreprise criminelle. Sur cette base, on peut envisager l'inculpation de
tous les membres d'une organisation terroriste telle que Al-Qaida, dans la
chaîne d'organisation des actes criminels qui ont été
perpétrés sur le territoire américain le 11 septembre
2001, depuis leur préparation, leur financement, jusqu'à leur
réalisation3(*)14.
Les règles relatives à la lutte contre le
terrorisme ayant été exposées, tout l'intérêt
de notre sujet réside dans la nécessité de confronter la
théorie à la réalité.
DEUXIEME PARTIE
LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME A L'EPREUVE DES FAITS
|
La deuxième partie de notre travail
nous permettra d'avoir une lisibilité plus nette du sujet, la seule
analyse des règles étant insatisfaisante pour tirer des
enseignements utiles et propres à l'élaboration de conclusions
objectives. On s'intéressera plus particulièrement à
l'approche utilisée pour réagir contre le phénomène
criminel. De ces approches, l'on retiendra deux aspects importants : Dans
un premier temps, il est à observer que, globalement, le recours
à la force armée a fait l'objet d'une approche dangereuse
(Chapitre I). Dans un second temps, l'approche utilisée relativement aux
mesures de contrainte non armées et le traitement judiciaire du
terrorisme paraissent manquer de pertinence (Chapitre II). On le comprend, ce
phénomène provoque- il faut l'avouer- une perte de
visibilité des schémas classiques dessinés par le droit
international.
Chapitre I : Une approche dangereuse dans le
traitement du terrorisme
Les réflexions sur le recours à
la force dans la lutte contre le terrorisme permettent de mettre en
évidence le caractère dangereux de l'approche utilisée.
Ainsi qu'on le verra, on est graduellement passé d'un changement de
posture
(Section 1) à une violation pure et simple des normes
internationales dans la lutte contre le terrorisme (Section 2), ce qui
dénote d'une certaine évolution pernicieuse.
Section 1 : Le changement de posture dans le
traitement du terrorisme
La présente section a ceci
d'intéressant, qu'elle s'inscrit dans une perspective historique,
laquelle ne rime pas forcément avec une démarche exclusivement
chronologique3(*)15. La date mémoire du 11
septembre 2001 permet de bien comprendre les subtilités de
l'évolution de l'approche dans le traitement du terrorisme. Bien
d'auteurs se sont efforcés à mettre en évidence ce
changement de cap en indiquant que l'analyse des aspects juridiques de la lutte
contre le terrorisme s'enrichissait d'un « avant 11
septembre » et d'un après « 11
septembre ». On note ainsi que bien avant le 11 septembre 2001, le
recours à la force armée a fait l'objet d'une approche
restrictive, confiné à des possibilités limitées
(Paragraphe 1), alors que les attentats du 11 septembre ont ouvert le
champ ou la voie à des perspectives nouvelles dans le traitement du
terrorisme (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Le recours à la force
armée avant le 11 septembre
2001 : Un traitement restrictif
et mesuré
Le recours à la force armée avant
le 11 septembre a fait l'objet d'un traitement restrictif, un traitement
mesuré que reflète la pratique antérieure des Etats (A).
Cette pratique s'est d'ailleurs confirmée par la jurisprudence (B).
A- Un traitement restrictif et
mesuré reflétant la pratique
Depuis la fin des années 1970, un petit
nombre d'Etats a tenté de justifier des recours à la force
opérés contre d'autres Etats par le fait qu'il s'agissait
d'actions menées en légitime défense, en réponse
à des actes de terrorisme dont ces Etats ou leurs ressortissants avaient
été victimes. Ce fut, en particulier, le cas de l'Afrique du Sud,
d'Israël et des Etats-Unis d'Amérique. Il est frappant de constater
que ces différentes actions ont fait l'objet de condamnations quasiment
systématiques, et que l'argument de la légitime défense en
réponse à des actes de terrorisme n'a pas été
accueilli. Ainsi les actions militaires menées contre le Liban en 1972
et contre la Tunisie en 1985, qu'Israël a tenté de justifier sur
cette base, ont été clairement condamnées par le Conseil
de sécurité3(*)16. Il en est allé de même des actions
entreprises par l'Afrique du Sud à l'encontre de certains Etats
voisins3(*)17. Le
bombardement de la capitale libyenne, Tripoli, par l'aviation
américaine, en 1986, a lui aussi été justifié par
l'exercice du droit de légitime défense des Etats-Unis
d'Amérique, à la suite d'un attentat attribué à la
Libye - survenu quelque temps plutôt à Berlin, où un soldat
américain avait trouvé la mort. L'argument de la légitime
défense fut cependant écarté, et le bombardement de
Tripoli condamné, par l'Assemblée générale cette
fois-ci3(*)18. En
réalité, dans ces différentes situations, les autres Etats
ont analysé les actions militaires justifiées par la
nécessité de répondre à des actes de terrorisme non
comme des actions de légitime défense, mais plutôt comme
des actes de représailles armées3(*)19, clairement interdits par le droit international
contemporain3(*)20. Il
est vrai que la pratique a connu une certaine inflexion à cet
égard après la fin de la guerre froide. A un certain nombre de
reprises, au cours des années 1990, les Etats-Unis d'Amérique ont
mené des actions militaires qu'ils ont justifiées au titre de la
légitime défense, en réponse à des attentats ou
à des tentatives d'attentats dont ils ont été victimes.
Ainsi, on se souvient que les Etats-Unis avaient bombardé Bagdad en
1993, en riposte à une tentative d'assassinat visant l'ancien
président George BUSH3(*)21. De la même façon, en 1998, les
Etats-Unis d'Amérique ont frappé des cibles en Afghanistan ( des
camps d'entraînement de groupes terroristes) et au Soudan (une usine
pharmaceutique suspectée de contribuer à la production d'armes
chimiques), en riposte aux attentats qui avaient détruits les ambassades
américaines à Nairobi et Dar es Salam. Les deux pays visés
par ces frappes étaient en l'occurrence accusés d'avoir
toléré la présence sur leur territoire de groupes ou de
personnes impliqués dans ces attentats. A l'opposé des situations
évoquées plus haut, ces dernières actions militaires n'ont
fait l'objet d'aucune condamnation formelle de la part d'organes de l'ONU. Le
bombardement, en 1998, d'objectifs situés en territoire soudanais a
cependant été condamné par d'autres organisations dont la
Ligue des Etats arabes3(*)22. Pour autant, la manière dont les autres
Etats y ont réagi est loin de manifester une approbation claire de tels
actes, et moins encore des justifications juridiques qui avaient
été avancées à leur appui. Un nombre
appréciable d'Etats ont, au contraire, exprimé leur
désapprobation de ces actes. Nombre d'autres Etats se sont
limités à affirmer qu'ils « comprenaient »
les actions militaires menées par les Etats-Unis d'Amérique, sans
pour autant endosser l'argumentaire juridique qui avait été
développé pour les justifier3(*)23. Il paraît donc difficile de voir, dans
ces derniers précédents des signes convaincants d'une
évolution des normes internationales sur ce point. En conclusion, on
note avec le Professeur Pierre KLEIN que rien dans cette pratique ne
paraît de nature à remettre en cause la définition de
l'agression , telle qu'elle avait été élaborée au
sein de l'Assemblée générale des Nations Unies et
confirmée par la Cour internationale de justice.
B- Un traitement restrictif et mesuré
confirmé par la jurisprudence
L'Affaire des Activités militaires
et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci éclaire davantage
la lanterne des juristes sur la possibilité de recourir à la
force armée au titre de la légitime défense. S'il ne porte
pas spécifiquement sur une situation où le recours à la
force effectué au titre de la légitime défense visait
à répondre à des actes de terrorisme, ce
précédent confirme néanmoins très clairement les
conditions dans lesquelles cet argument pouvait être valablement
invoqué. Pour mieux comprendre les tenants et les aboutissants de ce
précédent, autoriserons-nous à en faire un bref rappel des
faits. De 1956 à 1979 le Nicaragua vit sous la domination du clan Somoza
que les Etats-Unis soutiennent. En 1978 l'opposition rassemblée dans le
Front sandiniste, déclenche l'insurrection. Le dernier Somoza de la
famille abandonne alors le pouvoir en 1979. Les Sandinistes prennent alors peu
à peu le pouvoir en s'appuyant sur Cuba et l'URSS. Un mouvement contre
révolutionnaire y fait alors face, le mouvement « Contra ». En
1983 les Etats-Unis d'Amérique voyant d'un mauvais oeil la constitution
du pôle révolutionnaire des Sandinistes décide de soutenir
financièrement et militairement les contre-révolutionnaires
(«Contras»). Le Nicaragua soulève alors la violation par les
Etats-Unis d'Amérique de principes fondamentaux du droit international
tels que l'interdiction de l'emploi de la force dans les relations
internationales et de toute ingérence dans les affaires d'un autre pays.
En avril 1984, cet Etat assigne les Etats-Unis d'Amérique devant la CIJ,
en raison de l'aide apportée par ceux-ci aux mouvements d'opposants au
régime sandiniste, se livrant à des attaques armées, dans
ce pays et contre ce pays. Le gouvernement du Nicaragua protestait, notamment
contre la pose des mines limitant l'entrée et la sortie des ports
nicaraguayens, le survol de son territoire, des opérations
lancées contre des installations pétrolières et une base
navale3(*)24. Cependant,
afin d'être en mesure de statuer sur ce conflit, la Cour devait pouvoir
identifier les règles du droit international coutumier3(*)25 relatives au non-recours
à la force et à la non-intervention. C'est ainsi que dans
l'arrêt qu'elle a rendu en 1985 la Cour, après avoir
affirmé que la Résolution 3314 (XXIX) pouvait être
considérée « comme l'expression du droit international
coutumier »3(*)26, a indiqué que « si la notion
d'agression armée englobe l'envoi de bandes armées par un Etat
sur le territoire d'un autre Etat, la fourniture d'armes et le soutien
apporté à ces bandes ne sauraient être assimilées
à l'agression armée. Néanmoins, de tels activités
peuvent fort bien constituer un manquement au principe du non-emploi de la
force ainsi qu'une intervention dans les affaires intérieures d'un Etat,
c'est-à-dire d'un comportement certes illicites, mais d'une
gravité insuffisante que l'agression armée ». Sur le
fond, un certain nombre de questions ont été tranchées
par la Cour. Dans un premier temps, si la Cour a, à une large
majorité, admis le bien-fondé de la réclamation du
Nicaragua, en considérant que les Etats-Unis d'Amérique, par leur
aide aux forces « Contras » avaient violé le
traité d'amitié américano-nicaraguayen et le droit
international coutumier, elle se refusa cependant, à assimiler la
fourniture d'armes et le soutien apporté à ces forces
contre-révolutionnaires à une agression armée,
motif pris de ce que de telles activités- certes illicites- ne seraient
néanmoins pas suffisamment graves pour caractériser
l'illicéité en question. Elle a en revanche, tout aussi
écarté l'argument de la légitime défense,
invoqué par les Etats-Unis pour justifier leurs actions militaires
contre le Nicaragua. Cet Etat fondait- faut-il le souligner- son
prétendu droit à la légitime défense en
considération du soutien apporté par l'URSS au Nicaragua dans le
contexte tendu de guerre froide. On peut l'affirmer, dans cette affaire, la
Cour s'est abstenue de donner une possible extension à la notion
d'agression et par ricochet à celle de légitime défense.
Ainsi qu'on vient de le voir, avant le 11 septembre 2002, le
recours à la force armée est restée confinée
à des possibilités limitées. Il en va différemment,
on le verra maintenant, après le 11 septembre.
Paragraphe 2 : Le recours à la force
après le 11 septembre 2001 :
Un traitement largement
renouvelé
L'analyse des données relatives au
traitement du terrorisme après le 11 septembre 2001 révèle
une évolution notable dans l'approche de la question. Cette
évolution réside tant dans l'interprétation des
règles gouvernant le recours à la force (A) que dans les moyens
d'action du Conseil de sécurité, lesquels ont subi de profondes
mutations, des aménagements significatifs (B).
A- Des règles en mutation ?
Il a parfois été soutenu que le
11 septembre 2001 marquait le point de départ d'une évolution des
règles gouvernant le recours à la force. A la
réalité, il s'agit moins d'une mutation de ces règles que
d'une interprétation sujette à caution, à questionnement.
On note de ce fait que cette date a d'abord ouvert la voie à une
acceptation massive de la légitime défense (1), puis à une
acceptation extensive et laxiste de la légitime défense (2).
(1)- Une acceptation massive de la légitime
défense
Contrairement à l' « avant 11
septembre », l' « après 11
septembre » a donné lieu une acceptation massive de la
légitime défense. En effet, au lendemain des attentats contre les
Twin Towers du World Trade Center de Manathan, le Conseil de
sécurité à l'unanimité de ses membres, ainsi que
par la communauté internationale des Etats ont condamné de
manière énergique les attaques dont étaient victimes les
Etats-Unis d'Amérique. Cette condamnation unanime s'est par ailleurs
soldée par la reconnaissance du droit naturel de légitime
à la victime de ces attaques. Dans les Résolutions 1368 (2001) et
1373 (2001) adoptées respectivement les 12 et 28 septembre 2001, le
Conseil de sécurité a inscrit une référence au
droit « naturel » de légitime défense3(*)27. Ainsi, le
Président du Comité contre le terrorisme institué par la
Résolution 1373 (2001) a précisé que le Conseil de
sécurité « (...) authorised, under self-defense
provisions of Article 51 of the UN Charter, the use of force in pursing those
responsible for attacks »3(*)28. Au-delà de ces résolutions,
force est de constater que la communauté internationale a apporté
un soutien très large à la riposte anglo-américaine aux
attaques du 11 septembre 2001 et à l'argument de légitime
défense avancé pour la justifier. Ainsi le Conseil
européen a exprimé son soutien sans réserve dans une
déclaration du 08 octobre 2001, accompagnée en cela d'un grand
nombre d'Etats « associés »3(*)29. De même, les Etats
membres de l'OTAN ont déclaré le 6 décembre 2001 qu'ils
considèrent « (...) les évènements du 11
septembre comme une attaque armée dirigée non pas contre un seul
Allié, mais contre chacun d'entre eux, et c'est pourquoi ils ont
invoqué l'article 5 du Traité de Washington3(*)30. En conséquence,
ils ont décidé de soutenir, individuellement et collectivement,
les opérations militaires actuellement menées, sous la direction
des Etats-Unis, contre les terroristes qui ont commis les atrocités du
11 septembre et contre ceux qui leur fournissent un
sanctuaire »3(*)31. D'ailleurs les alliés de l'OTAN ont
facilité les opérations militaires en autorisant notamment
l'accès de leur espace aérien, de même que plusieurs autres
Etats3(*)32. L'OEA a
aussi rapidement reconnu la situation de légitime défense3(*)33 et le principe d'une
offensive militaire en Afghanistan a été accepté par
plusieurs organisations régionales dont la Ligue des Etats arabes, le
Mouvement des non-alignés, l'OCI et l'OUA. La massivité du
soutien est enfin mise en évidence par le débat de novembre 2001
à l'AGNU3(*)34.
Au-delà de cet aspect, il apparaît évident que le concept
de légitime défense- ainsi qu'on le verra- a fait l'objet d'une
extension inédite, laissant entrevoir un nouveau modèle d'action
contre le terrorisme.
(2)- Une acceptation extensive et laxiste de la
légitime défense
La référence explicite au droit
« naturel » de légitime défense3(*)35 en réponse aux
« épouvantables » attaques du World Trade
Center ne manque pas de soulever des difficultés majeures en droit
international. On note en effet une interprétation extensive des
règles gouvernant le recours à la force par invocation de la
légitime défense. Cette extension est perceptible à
plusieurs points de vue. La première difficulté apparaît
dès lors qu'il s'est agi de qualifier ces attaques d'agression
armée. Par rapport aux canons admis par le droit international,
Classiquement, ainsi que l'on l'a précédemment
évoqué3(*)36, l'agression armée est entendue au sens
d'attaque militaire de la part de forces armées d'un Etat ou de force
effectivement dirigées par un Etat. Si la notion plus vague d'attaque
« armée »3(*)37 n'est pas impossible à caractériser
dans le contexte du 11 septembre 2001, c'est bien plus principalement sur le
terrain de leur imputabilité que se cristallisent les difficultés
d'interprétation liées à leur qualification. Faut-il le
rappeler- c'est désormais un secret de polichinelle- les attaques du 11
septembre 2001 ont été revendiquées par l'internationale
terroriste Al Qaida, c'est-à-dire dire une organisation
privée3(*)38.
L'imputation suppose alors que l'on considère les Taliban auxquels
semble appartenir cette organisation comme un gouvernement de l'Etat afghan,
pour être en présence d'attaques constitutives d'une agression
armée. Or, là dessus, nous savons à quel point la
situation de l'Afghanistan à l'époque des faits était
complexe et ambiguë. L'Afghanistan était dans un état de
délitement avancé, le gouvernement légal étant en
exil bien que représentant toujours le pays dans les instances
internationales. Le pouvoir effectif était alors entre les mains de la
faction islamiste Taliban à l'exception d'une petite portion du
territoire sous le contrôle des opposants de l'Alliance du Nord. Le
gouvernement effectif des Taliban n'était alors reconnu que par une
poignée d'Etats3(*)39. Les autres Etats, à commencer par les
Etats-Unis d'Amérique, refusaient de reconnaître le gouvernement
des Taliban en Afghanistan et le Conseil de sécurité a pris le
soin de viser dans ses résolutions « la faction
afghane dénommée Taliban »3(*)40. L'existence même
d'une agression armée attribuable à un Etat apparaît
dès lors, ici, plus que douteuse. Cet état de fait a d'ailleurs
suscité de nombreuses critiques au sein de la doctrine, donnant lieu
à une dénonciation extensive du concept de légitime
défense3(*)41. De
ce pas, il nous est malaisé et difficile de suivre les explications
fournies par le Professeur Pierre Michel EISEMANN qui assimile le soutien des
Taliban à Al Qaida à un « cas classique » de
légitime défense3(*)42.
A supposer même que ce soutien soit réel, on ne
serait pas pour autant en présence de faits constitutifs d'une agression
armée au sens de l'article 51 de la Charte que la Résolution 3314
a entendu compléter en donnant à cette notion une
définition des plus satisfaisantes. A l'inscrire dans une perspective
jurisprudentielle, l'agression armée doit concerner l'envoi de bandes
armées par un Etat sur le territoire d'un autre Etat, et non simplement
la fourniture d'armes ou le soutien apporté à ces bandes
armées. Or en l'espèce, les certitudes qu'on avait
jusque-là sur le fait que Al-Qaida est un démantèlement du
pouvoir de fait- et non légal3(*)43- des Taliban, reposent encore sur de simples
présomptions3(*)44. A quoi s'ajoute le fait que la réaction
aux attentats du 11 septembre s'est largement éloignée de la
logique opérationnelle de la légitime défense. A
l'analyse, elle n'apparaissait plus nécessaire puisque le Conseil de
sécurité semblait avoir pris les mesures
nécessaires3(*)45
. De plus, les Etats-Unis d'Amérique ne se sont nullement soumis
à l'obligation minimale d'informer le Conseil de sécurité
avant d'entreprendre toute opération militaire. Le Professeur Pierre
Marie DUPUY3(*)46 y a
d'ailleurs vu la volonté de ce pays de faire échapper
l'opération « justice immuable » au contrôle
international des Nations Unies en restant dans le cadre d'une
référence très générale à un droit
« naturel » de légitime défense. On peut tout
aussi s'interroger sur les caractères de cette réaction. A-t-elle
été immédiate ? Il faut en douter, puisque cette
réaction- qui s'est révélée par la suite être
une traque assidue de l'organisation terroriste Al Qaida et des Taliban- a
été longuement et minutieusement préparée. En
effet, les opérations militaires se fondant sur cette
« légitime défense » ont effectivement
débuté le 7 octobre 2001, soit environ un mois après les
attaques. La réaction a-t-elle été proportionnée,
bien adaptée ? Les développements
ultérieurs3(*)47
nous autorisent à penser le contraire, même si certains auteurs ne
veulent pas courir le risque de répondre à pareille
interrogation3(*)48. En
conclusion, il apparaît évident que si l'on veut affronter le
terrorisme contemporain, il faut accepter de prendre en considération le
fait qu'il a dépassé le stade, parfois atteint, du terrorisme
d'Etat, pour devenir un phénomène de réseaux et que
vouloir chercher à tout prix un Etat directeur derrière lui,
revient à se condamner à ne pas agir3(*)49. Pour ce faire, la notion
même d'agression mérite d'être redéfinie pour lui
permettre de mieux répondre au phénomène tel qu'il est
vécu aujourd'hui. Pour l'heure, on a assisté jusque-là
à une interprétation extensive des règles gouvernant le
recours à la force dans le cadre de la lutte conte le terrorisme, ce qui
augurait assurément d'une transformation ou du moins d'un
aménagement des moyens d'action de l'organe qui en a la charge.
B- Des moyens d'action en transformation ou sous
aménagement
La nécessité de lutter
efficacement contre le terrorisme a servi de prétexte au renforcement
des pouvoirs du Conseil de sécurité, à l'extension de
ceux-ci. Cet organe s'est alors attribué certaines compétences
qui ne sont pas originellement les siennes. Dès lors, on a vu ce
dernier sortir sans gênes et sans sourciller de son champ de
prédilection traditionnel pour s'adjuger et s'arroger d'autres
rôles. Cette situation créée- en amont- par une
surenchère de qualifications (1) a abouti -en aval- à une
concentration de tous les pouvoirs entre les mains du Conseil de
sécurité (2), apparaissant ainsi tantôt comme un dictateur
ou du moins comme une autorité excédant ses pouvoirs3(*)50, tantôt comme un
hors-la loi pour qui les règles internationales devenaient de plus en
plus « encombrantes » (?) comme un boulet à ses
pieds, devant l'absolue nécessité et l'extrême urgence
d'éradiquer (est-ce possible sous ce seul angle ?)3(*)51 l'hyper terrorisme.
(1)- De la surenchère des
qualifications par le Conseil de sécurité : le terrorisme
« comme l'une des plus graves contre la paix et la
sécurité internationales »3(*)52 ...
Du moment où le
terrorisme constitue « le premier phénomène de
déstabilisation et de structuration des Etats
contemporains »3(*)53, on peut convenir qu'il puisse, d'une certaine
manière- et non pas dans l'absolu- se rattacher au maintien de la paix
et de la sécurité internationales3(*)54. L'importance de l'opération de
qualification comme étape préliminaire à la mise en oeuvre
par le Conseil de sécurité des pouvoirs que lui confère le
Chapitre VII de la Charte est bien connue. Aux brèches ouvertes à
l'insécurité internationale, la communauté internationale
et son organe sécuritaire, le Conseil de sécurité, ne peut
opposer que les sésames à sa disposition pour les refermer. Ces
sésames- faut-il le rappeler- sont la menace contre la paix et la
sécurité internationales, la rupture de la paix, l'agression.
L'on ne saurait toutefois contester la très large marge
d'appréciation dont cet organe bénéficie à cet
égard, tant en ce qui concerne la décision de qualifier- ou non-
telle ou telle situation de menace qu'en ce qui a trait au type de mesure qu'il
choisit d'adopter pour y faire face . Le concept de menace contre la paix s'est
ainsi avéré évolutif, le Conseil de sécurité
qualifiant de la sorte des types de situation très différentes au
fil du temps3(*)55.
C'est bien plus la manière dont le Conseil de sécurité a
exercé son pouvoir de qualification dans ce domaine, que l'inclusion du
terrorisme dans cette notion qui est problématique3(*)56. L'Affaire
Lockerbie est fréquemment présentée comme le
principal point de départ de l'implication du Conseil de
sécurité dans la lutte contre le terrorisme. Il n'est pourtant
pas sans intérêt de rappeler qu'à cette occasion, ce n'est
pas le terrorisme en lui-même, ou des actes de terrorisme
spécifiques, que le Conseil de sécurité qualifiait de
menace à la paix et à la sécurité, mais bien le
refus de la Libye de répondre aux demandes qu'il avait formulées
antérieurement, dont celle d'extrader les individus suspectés
d'être impliqués dans les attentats en cause3(*)57. Il en est allé de
même à l'occasion des mesures prises à l'encontre du Soudan
en 19963(*)58 et des
Talibans en 19993(*).
Durant cette période, le Conseil de sécurité a
régulièrement exprimé sa conviction plus
générale que « la répression du terrorisme
international est essentielle pour le maintien de la paix et de la
sécurité internationales », sans pour autant qualifier
des actes terroristes spécifiques de menace pour la paix et la
sécurité.
La Résolution 1368 (2001) adoptée au lendemain
des attaques du 11 septembre 2001, marque l'amorce d'une évolution
significative sur ce point. Le Conseil de sécurité y
« considère de tels actes, comme tout acte
de terrorisme international, comme une menace à la paix et à
la sécurité internationales »3(*)59. C'est donc dire que,
désormais, tout acte présenté comme relevant du terrorisme
international, est une menace à la paix et à la
sécurité internationales. Cette extension des qualifications
s'est encore accentuée par la suite. Ainsi, à partir de 2003, cet
organe a assorti sa condamnation de chacun des actes en cause de la mention du
fait « qu'il considère qu'un tel acte, comme tout
acte de terrorisme, constitue une menace à la paix et à
la sécurité »3(*)60. Dès ce moment, il n'est donc plus
nécessaire, aux yeux du Conseil de sécurité, qu'un fait de
terrorisme présente un caractère international3(*)61 pour justifier une
réaction de sa part, au titre des compétences que lui
reconnaît la Charte ou à tout le moins de l'interprétation
qu'il en fait. Enfin, une étape supplémentaire a encore
été franchie par la suite, puisque le Conseil de
sécurité en est venu à affirmer en 2004 que « le
terrorisme sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations constitue
l'une des menaces les plus graves contre la paix et la
sécurité »3(*)62. Cette façon bien singulière et
incommode de traiter la question du terrorisme est qualifiée
tantôt de « surenchère de
condamnation »3(*)63, tantôt de « surenchère de
qualifications »3(*)64. Le Professeur Pierre KLEIN3(*)65 fait remarquer à ce
sujet que l'extension de la qualification de menace contre la paix et la
sécurité à des actes de terrorisme qui ne
présentent aucun caractère international place cette
évolution en porte-à-faux par rapport aux règles
conventionnelles existantes dans ce domaine. En effet, dans l'ensemble des
conventions « sectorielles » adoptées en vue de
prévenir et de réprimer les diverses activités
terroristes, un élément d'extranéité est
systématiquement exigé pour que les faits en cause tombent sous
le coup du régime conventionnel applicable. Ainsi, on assiste, du fait
des qualifications extrêmement larges opérées par le
Conseil de sécurité, à la création d'une
disparité de régime entre réponse- conventionnelle et
institutionnelle- au terrorisme. En deuxième lieu, le caractère
systématique de cette qualification n'est pas non plus sans poser
quelque interrogation. Des doutes très sérieux paraissent pouvoir
être exprimés quant au fait que tout acte de terrorisme
(international a fortiori non international) puisse- ou doive-
être considéré comme une menace à la paix et
à la sécurité internationales3(*)66. Cette surenchère
des qualifications n'annonçait-elle pas déjà une extension
sans précédent du domaine d'action du Conseil de
sécurité ? Il faut le croire, surtout que- on le verra
maintenant- le Conseil de sécurité par un tour de passe et de jeu
bien subtil, en est arrivé progressivement à s'arroger tous les
pouvoirs.
(2)-... A la confusion des pouvoirs : le Conseil de
sécurité en tant que détenteur des pouvoirs
exécutif, judiciaire et législatif
Dans le système de la Charte
des Nations Unies, le Conseil de sécurité a été
conçu comme un organe doté de compétences de nature
essentiellement « exécutive ». Il lui revient
principalement d'oeuvrer en faveur du règlement des différends
internationaux, dans le cadre du Chapitre VII de la Charte, ou d'agir pour le
maintien de la paix et de la sécurité internationales, y compris
par le biais de l'imposition de mesures coercitives, en vertu du Chapitre VII.
Dans ce dernier contexte, les pouvoirs qui lui sont reconnus ont vocation
à être mis en oeuvre pour une période limitée
à l'égard de situations particulières où la paix et
la sécurité internationales se trouvent en danger, en vue
d'empêcher leur aggravation et de permettre le règlement de la
crise, soit par les parties elles-mêmes, soit à l'intervention
d'un organe tiers, en particulier la CIJ. Il s'agit donc d'interventions
ponctuelles, par rapport à des situations de crise
précisément identifiées. Cette conception traditionnelle
des pouvoirs du Conseil de sécurité s'est profondément
remise en question à partir des années 1990, dans le contexte de
la lutte contre le terrorisme, qui a fourni l'occasion à celui-ci de
mettre en oeuvre- à côté de sa compétence naturelle
et classique d'exécution- des compétences de nature judiciaire,
puis législative. L'Affaire Lockerbie constitue le point de
départ de ce mouvement d'extension. En réaction à
l'implication présumée d'agents des services secrets libyens dans
deux attentats visant des avions de ligne français et américain,
le Conseil de sécurité a relayé, par sa Résolution
732 (1992), la demande de la France, du Royaume-Uni et des Etats-Unis
d'Amérique visant à ce que la Libye leur fournisse un certain
nombre d'informations susceptibles de les assister dans leurs enquêtes
sur ces attentats. En l'absence de réponse de la part des
autorités libyennes, le Conseil de sécurité a
adopté peu de temps après une deuxième résolution
beaucoup plus contraignante3(*)67. Il y exige de la Libye qu'elle satisfasse aux
demandes d'extradition présentées par les trois Etats occidentaux
et impose à l'Etat libyen des mesures coercitives non armées en
vue de le contraindre à accepter cette solution. La Libye, estimant que
les exigences occidentales portaient atteinte aux droits qu'elle
détenait en vertu de la Convention de Montréal de 1971 sur les
actes illicites dirigés contre la sécurité de l'aviation
civile internationale, dont elle affirmait qu'elle lui donnait le droit de
juger elle-même les suspects en cause, avait entre-temps saisi la CIJ
d'une demande en indication de mesures conservatoires en vue de faire
protéger ses droits. Comme l'a affirmé un auteur, alors que la
Libye demandait l'application de la règle classique Aut dedere aut
judicare contenue dans la Convention de 1971, le Conseil de
sécurité exigeait pour sa part le respect d'un
« principe » à l'autorité nettement moins
établie : « extradite or extradite ».
En l'occurrence, la CIJ n'a pu que conclure à l'impossibilité
d'indiquer les mesures conservatoires demandées en raison de la
primauté, en vertu de l'article 103 de la Charte3(*)68, des exigences
formulées dans la Résolution 748 (1992) sur les dispositions de
Montréal. Le Conseil de sécurité a donc agi en
l'espèce comme un juge3(*)69 en tranchant le différend juridique
opposant les Etats, privant ainsi la Libye de la possibilité d'invoquer
les droits qu'elle tirait d'une convention internationale applicable à
la situation. Le Conseil s'est ainsi substitué indirectement à la
Cour internationale de justice ou a, à tout le moins, significativement
interféré dans l'exercice des compétences de cette
dernière. Qui plus est, il a cumulé en l'espèce ce pouvoir
de nature judiciaire avec son rôle
« exécutif » traditionnel, puisqu'il a assorti sa
décision de mesures de contrainte visant à en assurer la mise en
oeuvre forcée.
L'adoption de la Résolution 1373 (2002)
précédemment évoquée3(*)70 marque le franchissement
d'un autre seuil par le Conseil de sécurité à cet
égard. Elle impose aux Etats membres des Nations Unies un ensemble
d'obligations en vue de lutter efficacement contre le terrorisme. Elle
transforme en normes de portée générale des obligations
conventionnelles3(*)71.
En adoptant de la sorte des énoncés obligatoires,
généraux, permanents et abstraits - puisque que leur application
n'est en rien limitée, ni dans le temps, ni à une situation
particulière3(*)72- le Conseil de sécurité se pose,
pour la première fois de son histoire, en créateur de normes
générales, exerçant sur la scène internationale un
pouvoir en tous points semblables à celui du législateur3(*)73 dans l'ordre juridique
interne des Etats, bien qu'une partie de la
doctrine rechigne à le reconnaître3(*)74. Dès lors, on
s'éloigne une nouvelle fois considérablement de la figure
« classique » du Conseil en tant qu'organe « de
police », chargé de faire face à des situations
particulières de menace pour la paix et la sécurité
internationales en adoptant des mesures ponctuelles pour juguler les crises.
Pour autant, ici encore, le Conseil de sécurité ne se
départit pas de sa fonction « exécutive ». A
l'instar de ce qu'il avait fait dans le cadre de l'Affaire Lockerbie,
il cumule plutôt cette fonction traditionnelle avec les pouvoirs nouveaux
qu'il s'est arrogés, comme le montre la mise en place par la
Résolution 1373 (2001) d'un mécanisme de contrôle - le
Comité de lutte contre le terrorisme (CCT)3(*)75- chargé de la
surveillance de l'exécution par les Etats membres des obligations que
cette résolution met à leur charge. Rarement le Conseil de
sécurité s'est-il autant préoccupé du suivi de ses
décisions qu'en ce qui concerne la Résolution 1373. Cette
incursion du Conseil de sécurité dans le champ législatif
s'est répétée en 2004, avec l'adoption de la
Résolution 1540 (2004), dans laquelle cet organe énonce de
nouvelles obligations de portée générale pour l'ensemble
des Etats en vue de prévenir l'utilisation par des groupes terroristes
d'armes de destruction massive. Ici encore, ce sont les impératifs de la
lutte contre le terrorisme qui paraissent justifier l'exercice de pareils
pouvoirs exceptionnels. Ces différents précédents mettent
donc pleinement en évidence la tendance du Conseil de
sécurité à cumuler les fonctions
« exécutives » ou de « police »
qui sont les siennes selon la Charte des Nations Unies- mais aussi
« judiciaires » et
« législatives » qu'il n'a jamais été
question de lui reconnaître dans le système de la Charte. Ils
posent de très sérieuses questions quant à
l'équilibre des pouvoirs au sein des Nations Unies ou, plus globalement,
quant à la notion d'un Etat de droit sur la scène internationale.
Cette concentration des pouvoirs entre les mains du Conseil de
sécurité s'avère d'autant plus préoccupante qu'elle
intervient en l'absence de tout mécanisme de contrôle de leur
exercice, que ce soit au plan politique ou judiciaire3(*)76. En particulier,
l'idée d'un contrôle de légalité des actes du
Conseil de sécurité par la CIJ, évoquée de
manière répétée au moment de l'Affaire
Lockerbie, paraît actuellement bien loin de recevoir une
quelconque concrétisation. Ce faisant, le Conseil de
sécurité s'est mis, à plusieurs reprises, en marge du
droit de la Charte, plus encore du droit international. En effet, alors que
jusque-là, cet organe avait assorti un nombre significatif de ces
résolutions de l'exigence du respect du droit international et du droit
de la Charte3(*)77,
l'immédiat post-11 septembre 2001, a donné lieu à une
« éclipse » 3(*)78 de la prise en considération des
règles internationales dans la lutte contre le terrorisme. Ce
piétinement du droit international s'empirant- cette fois-ci- dans le
cadre unilatéral de lutte contre le terrorisme.
Section 2 : La violation des normes
internationales
dans la campagne antiterroriste
La réaction aux évènements
du 11 septembre 2001 a été l'occasion d'une violation importante
de certaines des normes pertinentes du droit international. Cette violation
était du reste prévisible et inéluctable, parce que la
campagne contre le terrorisme s'est forgée autour de concepts nouveaux
dont la teneur semble n'avoir aucune assise dans le droit international positif
contemporain (A). Ces concepts ont pourtant été le ferment
à la consolidation de pratiques attentatoires aux droits et
libertés (B).
Paragraphe1 : Des choix sémantiques aux
conséquences
juridiques incertaines
La réaction unilatérale des Etats
en bute au terrorisme s'est consolidée après le 11 septembre, sur
le ciment de paradigmes nouveaux. Le problème, c'est que ces paradigmes
qui ne sont pas le fruit du hasard ont été
délibérément construits en marge du droit international,
bien que leurs thuriféraires aient soutenu le contraire. Ainsi, a-t-on
prétendu que la thèse de la légitime défense
préventive était juridiquement valide et que la doctrine de la
préemption était licite (A). On a même souvent argué
qu'à l' « hyper terrorisme » devait
correspondre une « hyper réaction » 3(*)79 qui s'inscrirait dans la
durée. Cette idée marginale a manifestement donné
naissance au concept de « guerre contre le terrorisme » qui
n'est pourtant pas neutre et sans conséquences en droit international
(B).
A- Du droit d'agir de manière préventive en
légitime défense à
la « préemption » contre le
terrorisme
La légitime défense renvoie
à l'autoprotection, à la réaction
décentralisée à une attaque par celui-là même
qui en est la victime. Et, la problématique de la légitime
défense préventive est loin d'être nouvelle. Dans un
ouvrage de 1758 resté célèbre, VATTEL écrivait:
« Le plus sûr est de prévenir le mal qu'on veut lui faire,
d'opposer la force, et tout moyen honnête, à celle qui agit
actuellement contre elle, et même aller au devant des machinations, en
observant toutefois de ne point attaquer sur des soupçons vagues et
incertains, pour ne pas s'exposer à devenir elle-même un injuste
agresseur »3(*)80. Faisant écho à cet
énoncé, une interprétation controversée du droit de
légitime défense consiste à affirmer que le recours
à la force est autorisé de manière préventive en
cas de menace imminente d'agression armée (1).
Dépassant les limites traditionnellement retenues par les tenants de
cette thèse, l'Administration américaine a récemment
développé une doctrine tendant à justifier le recours
à la force à titre préventif face à une menace
naissante ou n'apparaissant pas comme imminente. Il convient donc
d'élargir notre réflexion relativement à la
licéité des actions menées en examinant aussi les
perspectives de cette doctrine dite de la
« préemption » (2).
(1)- De la validité de la thèse de
légitime défense préventive
Il peut paraître à première
vue oiseux et saugrenu de poser le problème de la validité de la
légitime défense préventive tant la réponse en
droit international contemporain semble couler de soi. Mais en
réalité, ce débat se trouve restauré par les
controverses doctrinales alimentées par certains juristes autour de
cette question. Nous l'avons vu, l'article 51 de la Charte des Nations Unies
limite littéralement le droit de légitime défense à
une agression réalisée, ce qui paraît en toute
hypothèse conforme à la jurisprudence classique3(*)81 et récente3(*)82 de la CIJ. Cela
n'empêche toutefois pas certains auteurs de défendre l'existence
d'une légitime défense préventive en se fondant sur
plusieurs arguments. Pour MM. Jean COMBACAU et Serge SUR, « (...) la
légitime défense préventive paraît juridiquement
possible, et n'est pas condamnée par la Résolution 3314 (XXIX)
portant définition de l'agression »3(*)83. Pour ces derniers donc,
il se produit des situations où face à une agression imminente,
l'efficacité de la défense nécessite l'anticipation de
l'attaque. Dans de telle circonstance, l'Etat menacé peut recourir en
premier à la force armée, en se fondant sur une légitime
défense préventive384. Le défaut de
condamnation dans cette importante résolution tendrait ainsi a
contrario à faire admettre le caractère préventif de
la légitime défense. D'autres avancent, pour étayer cette
position, que la légitime défense peut être mise en oeuvre
non seulement en cas d'agression armée, mais aussi pour les autres
violations de l'article 2 paragraphe 4 de la Charte qui interdit non seulement
l'emploi de la force mais aussi la menace de l'emploi de la
force385. Cette lecture est à notre sens très
éloignée de la lettre de l'article 51de la Charte dans la mesure
où il est difficile de considérer que l'absence de la mention
menace à l'article 51 puisse être considérée comme
un simple oubli alors qu'elle apparaît clairement à l'article 2
paragraphe 4 de la Charte. Certains autres auteurs estiment pour leur part que
l'article 51 de la Charte n'aurait pas supplanté le droit coutumier
antérieur qui autorise la légitime défense
préventive3(*)86.
Il est certes vrai que la CIJ a affirmé la
dualité du régime juridique de la légitime défense
(conventionnel et coutumier)3(*)87, mais il est aussi bon de rappeler sa
jurisprudence relative aux rapports des sources en droit international
public : « (...) d'une manière générale,
les règles conventionnelles ayant le caractère de lex
specialis, il ne conviendrait pas qu'un Etat présente une demande
fondée sur une règle de droit international coutumier si, par
traité, il a déjà prévu des moyens de régler
une telle demande »3(*)88. Or la lex specialis de la Charte qui
emporte dérogation de la lex generalis de la pratique
coutumière des Etats, est on ne peut plus clair sur les conditions
d'activation de la légitime défense. Certains auteurs, dans un
ultime effort de légitimation d'une hypothétique approche
préventive de la légitime défense, n'hésitent pas
à emprunter les chemins glissants et scabreux de l'interprétation
évolutive de l'article 51 de la Charte, alléguant une
obsolescence de cette disposition. Cette interprétation pour
séduisante qu'elle puisse paraître ne peut cependant
prospérer de lege lata, car la légitime défense
telle qu'elle découle de la lettre et de l'esprit de l'article 51 de la
Charte est limitée- faut-il le rappeler- à une agression
armée (« armed attack » dans la version
anglaise), c'est-à-dire qu'elle justifie une réaction militaire
à une agression in actu, une agression actuelle. Cette
conception était d'ailleurs satisfaisante à l'époque de la
rédaction de la Charte de San Francisco, quand l'agression armée
supposait la mobilisation visible de forces armées d'un Etat
donné à la frontière d'un autre Etat. On ne peut ignorer
le fait que depuis, le contexte géostratégique a grandement
changé, avec les évolutions technologiques en matière
d'armement, une attaque très dévastatrice pouvant être
conduite avec une extrême célérité et sans signes
avant-coureurs3(*)89. Il
faut bien convenir en bon sens et selon des considérations de
légitimité, en marge du droit international positif, que la
gravité d'une telle attaque et ses caractères
imprévisibles et irrésistibles rendent difficilement acceptable
l'unique solution de la réaction. Un Etat devrait-il être
condamné à attendre de subir une attaque pour être
autorisé à réagir ? Il est tentant de répondre
par la négative, et l'on peut se demander si l'article 51 n'est pas
susceptible de recevoir une nouvelle lecture, en application du principe de
l'effet utile3(*)90. La
CIJ a toutefois considéré dans son avis consultatif du 18 juillet
1950 relatif à l'interprétation des traités de paix conclu
entre la Bulgarie, la Hongrie et la Roumanie que le principe de l'effet utile
ne permet pas d'interpréter dans un sens qui contredit la lettre et
l'esprit d'une disposition3(*)91, qui permettrait une interprétation
évolutive de cette disposition. A la vérité, le
problème tient moins à une relecture de l'article 51 de la
charte- qui jouit déjà d'une très grande clarté-
qu'à un réaménagement en profondeur de la disposition,
pour lui permettre de répondre efficacement aux défis nouveaux de
sécurité internationale et d'être adapté aux
évolutions très rapides de notre monde en cette matière.
Monsieur Antonio CASSESE estime que l'on pourrait par exemple modifier
l'article 51 de la Charte pour autoriser la légitime défense
préventive face à un danger imminent (... )3(*)92. Mais avant d'y arriver-
il convient, bien entendu, de se garder de mettre la charrue avant les boeufs-
on insistera sur le fait que le jus gentium positivium n'autorise pas
en l'état actuel de la Charte le jus praeventionis qui est un
droit difficile à encadrer. Comme on peut le présupposer, les
conditions de nécessité et de proportionnalité peuvent
s'avérer problématiques s'agissant d'une action par anticipation,
le caractère imminent d'une attaque pouvant tout aussi être
particulièrement difficile à vérifier3(*)93. Et, en pareille
circonstance on peut craindre que la légitime défense
préventive fasse l'objet d'invocations par trop extensives, abusives ou
par erreur. Ce faisant, M. Robert KOLB3(*)94 voit dans la légitime défense
préventive rien moins que le « démantèlement du
système des Nations Unies », dans la mesure où
« le jus contra bellum se transforme en jus pro
bello largement discrétionnaire ». Plus contestable
encore sera la notion de « préemption » qui renvoie
à une catégorie particulière de légitime
défense préventive.
(2)- De la licéité de la
« préemption »
Employée dans la doctrine politique et
militaire de l'Administration BUSH, la notion de
« préemption »3(*)95 est utilisée pour qualifier une
opération préventive alors que la menace naissante est
incertaine. Elle est de ce fait une action face à un risque d'attaque,
une attaque hypothétique et sans certitude3(*)96. Elle se rapproche
dès lors du principe de précaution en droit international de
l'environnement. De façon singulière, elle vise dans la doctrine
américaine, la collusion entre « Etats voyous » et
terroristes et principalement, l'acquisition d'armes de destruction massive.
Dans l'actuel contexte géopolitique en perpétuelle mouvance, la
légitime défense classique serait ainsi inadaptée face aux
nouvelles forme de menace liées à l'utilisation d'armes de
destruction massive par des groupes terroristes, c'est-à-dire des
acteurs non étatiques qui représentent des intérêts
qui ne sont pas géographiquement circonscrits. La préemption
défendue par les Etats-Unis d'Amérique revient ainsi à
l'action unilatérale par anticipation de telles menaces, avant qu'elles
ne soient véritablement cristallisées, et même dans
l'incertitude quant aux lieux et moments de l'attaque. Une telle option
stratégique fait craindre des errements encore plus graves que la
thèse de la légitime défense préventive, parce que
contrariant de façon flagrante le droit international positif. Il est
particulièrement inquiétant de constater qu'aucun critère
n'est avancé pour définir les cas dans lesquels la
préemption par la force sera mise en oeuvre. L'Administration
américaine se réserve donc manifestement un pouvoir
d'appréciation discrétionnaire qui débouche
inéluctablement sur l'arbitraire. L'expédition punitive de la
coalition anglo-saxonne en Irak en 2003 avait été
dénoncée par la communauté internationale dans son
ensemble et suscité une vague de désapprobations et de
protestations tous azimuts dans le monde. On se souvient que des Membres du
Conseil de sécurité aussi influents que la Chine, la Russie et la
France avaient marqué des réserves et même des
réticences face à une telle opération militaire dont ils
doutaient du bien-fondé, préférant une logique
multilatérale (par le truchement des Nations Unies) plus regardante des
normes internationales. Cette désapprobation générale fut
relayée au plus niveau de l'instance onusienne, par la voix de son
Secrétaire général d'alors, Monsieur Koffi ANNAN qui
affirmait : « Cette logique constitue un défi fondamental
aux principes sur lesquels, même si cela ne l'était que d'une
manière imparfaite, la paix et la stabilité mondiales ont
été fondées depuis 58 ans. Ce qui m'inquiète c'est
que , si cette logique était adoptée, elle pourrait créer
des précédents conduisant à la multiplication de l'usage
unilatéral de la force, avec ou sans justification crédible
»3(*)97. Ces
inquiétudes sont d'autant plus justifiées que
« preemptive self defense would provide legal justification for
Pakistan to attack India. For Iran to attack Iraq, for Russia to attack
Georgia, for Azerbaijan to attack Armenia, for North Korea to attack South
Korea, and so one »398. Cette doctrine qui relève
plus de la rhétorique stratégique ou de la spéculation que
du droit3(*)99 est, dans
l'unilatéralisme antiterroriste, la boîte de pandores ouvertes
à tous les abus, à tous les excès4(*)00. C'est sans nul doute
pourquoi elle n'a pu avoir la caution de ceux même des juristes qui sont
pourtant favorables à la thèse de la légitime
défense préventive4(*)01. Envers et contre la philosophie de
l'hégémonisme4(*)02, nous pensons honnêtement que la campagne
unilatérale des Etats-Unis d'Amérique contre le terrorisme
contribue à la délégitimation du mécanisme de
sécurité collective mis en place depuis des décennies, ce
qui a pour conséquence fâcheuse de provoquer une certaine
complexification des relations internationales. Un autre concept- la
« guerre » contre le terrorisme- est mis en avant dans la
lutte contre le phénomène criminel.
B- De l'invocation du concept de « guerre »
contre le terrorisme
Le recours à la force en
réponse à tel ou tel type d'acte relève toujours d'un
choix. Le choix opéré par un Etat est immanquablement
influencé par un certain nombre de facteurs politiques ou
stratégiques, mais aussi culturels, qui déterminent le paradigme
dans le lequel cet Etat s'inscrit in fine pour répondre aux
actes et aux menaces qui le visent. Ce paradigme est clairement militaire pour
les uns, essentiellement juridique pour les autres. Selon une certaine approche
anglo-saxonne, le terrorisme doit être conçu comme une guerre de
basse intensité (a law intensity conflict). C'est bien
évidemment au nom de cette conception que la réaction aux
attentats du 11 septembre 2001 a été montée par les
Etats-Unis d'Amérique4(*)03. Le choix de cette terminologie, la guerre contre
le terrorisme n'est pas le fruit du hasard. On peut lui trouver une
justification : la tendance des décideurs à se situer dans
un état d'exception et de dérogation au droit commun. Le langage
de la guerre offre d'indéniables avantages à celui qui le manie.
Il lui permet en effet de légitimer sa propre violence à
venir4(*)04, de se
placer dans la situation d'exception que le contexte de guerre constitue
traditionnellement et de revendiquer les pouvoirs qui accompagnent l'invocation
de pareille situation d'exception, généralement moins
encadrée par la règle de droit. Bien évidemment, la marge
de manoeuvre des autorités qui s'inscrivent dans cette logique peut
ainsi s'en trouver sensiblement accrue, et les contraintes que leur impose en
temps normal l'ordre juridique (national ou international) se voient
réduites. Ces possibilités de dérogation se manifestent
avant tout, dans le domaine des droits fondamentaux, qui font très
fréquemment l'objet d'empiètement importants au nom de la
prétendue guerre contre le terrorisme. Ces risques sont d'autant plus
importants lorsque la guerre se présente comme une
guerre « juste », une qualification parfois
revendiquée de manière explicite dans le cas
d'espèce4(*)05.
On a ainsi exprimé la crainte que ce retour de la « guerre
juste » 4(*)06
se traduise par la remise en cause de certains principes bien établis du
jus in Bello, tels que celui de l'égalité des
belligérants devant le droit de guerre. Le vocable de la guerre juste
sert alors ni plus ni moins à justifier tous les abus qui pourraient
être commis dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Il permet
également d'échapper aux contraintes temporelles
inhérentes à la notion même de légitime
défense. Alors que celle-ci ne peut être valablement
invoquée que dans un délai relativement bref, après l'acte
d'agression auquel elle répond, la notion de guerre projette
généralement celle de durée, ouvrant ainsi, dans les
esprits au moins, le droit de recourir à la force pour se
défendre sans limite de temps4(*)07. Ici encore, l'idée de la dérogation
à la règle, justifiée par une situation d'exception, est
bien présente. La caractérisation de la lutte contre le
terrorisme comme une « guerre » se voit cependant remise en
cause par le manque de cohérence de ceux qui tiennent ce discours. En
effet, plusieurs commentateurs4(*)08 ont souligné que les Etats qui inscrivaient
la lutte contre le terrorisme dans un paradigme guerrier n'étaient pas
prêts à en assumer toutes les conséquences,
particulièrement en ce qui concerne l'application des règles du
droit des conflits armés à leurs opposants. Cette question s'est
posée avec une acuité particulière au sujet de la
création, par les autorités américaines, de la
catégorie d'«ennemi combattant », non reconnue par le
droit humanitaire qui devait trouver à s'appliquer aux personnes
capturées en Afghanistan. On a également observé que
l'utilisation du vocable de la guerre aurait pour effet de transformer en
cibles légitimes les installations et les forces militaires des Etats
engagés dans cette « guerre »4(*)09. Or, il est loin
d'être évident que ceux-ci soient prêts à accepter
une telle conséquence du recours au vocable de la guerre. Au regard de
ces différents éléments, il n'est pas surprenant que, dans
la doctrine juridique tout au moins, la très grande majorité des
auteurs se soit refusée à avaliser la conception selon laquelle
les attentats du 11 septembre 2001 auraient donné naissance à une
situation de guerre et marqué le point de départ d'une
« guerre contre le terrorisme » à long terme4(*)10. Ces choix
sémantiques qui sont entachés d'un vice congénitalement
rédhibitoire vis-à-vis du droit international- ainsi qu'on vient
de le voir, débouchent - on le verra maintenant - sur des
dérives, ouvrant ainsi le champ libre à des pratiques
attentatoires aux droits et libertés.
Paragraphe 2 : Des pratiques attentatoires aux droits
et
libertés
La question de l'impact du terrorisme sur les
droits de la personne a suscité un débat aussi classique que
complexe. Dans un premier temps, l'accent a fréquemment
été mis sur le fait qu'en raison de leur caractère violent
et généralement indiscriminé, les actes de terrorisme
portaient une atteinte grave aux droits humains4(*)11. Cette première dimension des rapports
entre terrorisme et protection des droits de la personne est évidemment
fondamentale. Mais la question des relations entre terrorisme et jouissance des
droits et libertés se pose également sous un autre angle. De
fait, au fur et à mesure de l'adoption, par les Etats, de mesures
législatives ou d'actions de terrain visant à lutter contre des
actes qualifiés de terroristes, les risques que faisaient naître
pareilles mesures et actions pour la protection des droits de la personne
eux-mêmes sont apparus de plus en plus significatifs. Nombreux sont en
effet les pays où, selon les époques et les menaces-
réelles ou ressenties-, des mesures visant à restreindre la
jouissance de certains droits fondamentaux ou à y déroger
à plus ou moins long terme ont été adoptées. Les
attentats du 11 septembre, en particulier, ont occasionné l'instauration
d'un « Etat d'exception » aux Etats-Unis d'Amérique
(A) et l'établissement d'une « zone de non droit »
(B) à l'extérieur de ce territoire.
A- L'instauration d'un « Etat
d'exception »
Les attentats du 11 septembre 2001 ont souvent
servi de prétexte à la violation massive et grave des droits et
libertés. Cette violation a été particulièrement
ressentie à travers les transformations accélérées
subies par les codes de procédures pénales de certains
pays4(*)12. Les mois et
parfois les jours qui suivent cette date historique, les gouvernements ont pris
des mesures qui restreignent les libertés publiques ainsi que
l'autonomie de la vie privée. Les Etats-Unis d'Amérique ont
été les premiers à prendre de nouvelles mesures
antiterroristes. L'USA Patriot Act entré en vigueur le 26
octobre 2006 corse les pouvoirs de la police et des services de renseignements.
Les autorités peuvent ainsi arrêter et retenir, pour une
période non déterminée, des étrangers
soupçonnés d'être en relation avec des groupes terroristes.
Ce qui met naturellement en mal, la présomption d'innocence4(*)13. Dans la foulée,
le Président George W. BUSH prit un décret-
l'Exécutive Order- à la date du 13 novembre 2001, qui
met en place des tribunaux militaires d'exception chargés de juger les
étrangers accusés de terroristes. Le procès peut
être secret et il n' y a pas de procédure d'appel devant une
juridiction civile4(*)14. Destinés à supprimer tout
mécanisme de protection aux étrangers arrêtés, ces
mesures procèdent à une suspension du droit des Etats-Unis
d'Amérique pour les individus qui ne possèdent pas la
nationalité américaine. Parallèlement, ce mécanisme
discriminatoire se double d'une suspension des normes pertinentes du droit
international. Les atteintes souvent très sérieuses, aux droits
fondamentaux que ces pratiques impliquent ont été
fréquemment dénoncées par diverses instances
internationales et organisations de défense des droits de
l'homme4(*)15. Ces
pratiques ont toutes un point commun, celui d'être justifiées par
les Etats qui y recourent au nom d'une situation d'urgence ou d'exception, qui
trouve sa source dans les graves menaces que le terrorisme fait peser sur la
vie même des nations concernées et sur leurs populations. C'est ce
discours fondé sur l'urgence et l'exception, qui est mis en avant par
les Etats qui adoptent de telles mesures, pour justifier les écarts
qu'elles impliquent par rapport aux normes internationales existantes dans le
domaine des droits fondamentaux, voire pour mettre à l'écart
purement et simplement la règle de droit. Ces discours et pratiques
laissent dans une large mesure entendre que, face à pareilles situations
d'exception, le droit existant est atone, inopérant, ou que son
application est incompatible avec la situation à laquelle il faut faire
face. Cet argument se révèle pourtant problématique. En
effet, les instruments internationaux pertinents envisagent
précisément les situations d'exception et organisent, en pareil
cas, la possibilité pour les Etats de mettre à l'écart une
partie significative des règles que ces textes énoncent, mais
enserrent cette faculté de restriction et de dérogation dans
certaines limites. Il n'est donc pas contesté que des situations dans
lesquelles les Etats sont confrontés à la perpétration
d'actes graves de terrorisme, à une échelle importante, puissent
être qualifiées de « danger public exceptionnel
menaçant l'existence de la nation ». D'une manière
générale, l'article 4 du Pacte international de 1966 relatif aux
droits civils et politique dispose que « dans le cas où
un danger public exceptionnel menace l'existence de la nation et est
proclamé par un acte officiel, les Etats parties au présent Pacte
peuvent prendre, dans la stricte mesure où la situation l'exige, des
mesures dérogeant aux obligations prévues dans le présent
Pacte, sous réserve que ces mesures ne soient pas incompatibles avec les
autres obligations que leur impose le droit international et qu'elles
n'entraînent pas une discrimination fondée uniquement sur la
race, la couleur, le sexe, la religion ou l'origine
sociale »4(*)16. C'est donc en violation de cette
disposition pertinente que les Etats-Unis d'Amérique ont instauré
un mécanisme discriminatoire visant à enlever à tous les
étrangers soupçonnés d'avoir des liens avec des groupes
terroristes toutes garanties judiciaires et de traitement. De façon
particulière, le fait pour un Etat d'être confronté
à des activités terroristes d'envergure a été
reconnu à diverses reprises comme une circonstance où l'existence
de la nation pouvait être considérée comme étant en
péril et où, partant, des mesures de dérogation aux droits
et libertés pouvaient être adoptées. La Cour
européenne des droits de l'homme fut d'ailleurs confrontée
à cette problématique dans plusieurs espèce 4(*)17. Les
précédents mettent en évidence le fait que l'affirmation
même d'une situation d'urgence ou de péril grave par l'Etat qui
est confronté à des activités terroristes fait l'objet
d'un contrôle- même limité- par la Cour. Il ne suffit donc
pas à un Etat partie de proclamer l'existence de semblable péril
ou urgence pour que la décision de déroger aux droits et
libertés protégés par les droits et libertés soit
ipso facto validée. En tout état de cause, les
Etats-Unis d'Amérique auraient très vraisemblablement
été en mesure d'invoquer avec peu ou prou de succès
« l'existence d'une situation de danger public exceptionnel
menaçant l'existence de la nation », à la suite des
attentats du 11 septembre 2001, pour justifier le recours sur cette base des
dérogations aux droits et libertés protégés par le
Pacte international relatif aux droits civils et politiques4(*)18. Ce ne fut toutefois pas
le cas. Les Etats-Unis d'Amérique se sont abstenus d'adopter- et a
fortiori de notifier aux autres Etats parties - quelque mesure de
dérogation au Pacte que ce soit, et ne paraissent jamais eu l'intention
de le faire4(*)19. En
résumé, les attentats du 11 septembre, loin d'avoir
occasionné un état d'exception dans la lutte contre le
terrorisme- ce qui aurait eu sans doute l'avantage de couvrir certaines
dérogations aux droits et libertés d'une couche de
légitimité- a plutôt contribuer à asseoir aux
Etats-Unis d'Amérique, un Etat d'Exception4(*)20 peu soucieux des normes
pertinentes des droits de l'homme. Cette suspension du droit
caractéristique de cet Etat d'exception est également
perceptible à l'extérieur des frontières de ce pays.
B- L'établissement d'une
« zone de non-droit »
A la suite des attentats du 11 septembre 2001,
et plus encore du déclenchement des opérations militaires contre
l'Afghanistan dans les semaines qui ont suivi, plusieurs centaines de personnes
ont été arrêtées et placées en
détention par les forces armées des Etats-Unis d'Amérique.
La plupart de ces personnes ne possédaient pas la nationalité
américaine et ont graduellement été
transférées et regroupées sur la base militaire de
Guantanamo Bay, située en territoire cubain mais qui continue
d'être contrôlée et utilisée par les Etats-Unis
d'Amérique en vertu d'un accord de cession à bail conclu entre
cet Etat et Cuba en 1903. La quasi-totalité d'entre elles se sont
trouvées détenues sur ce territoire durant plusieurs
années, sans être jugées, ni même
présentées à un juge. Un grand nombre de ces
détenus ont également été soumis à des
mauvais traitements4(*)21 au cours de cette période. Dès 2001,
les autorités américaines ont soutenu de manière constante
que les détenus de Guantanamo ne disposaient d'aucun recours judiciaire
pour mettre en cause la légalité de leurs conditions de
détention, dès lors que le territoire de Guantanamo ne relevait
pas de la souveraineté des Etats-Unis et qu'il ne pouvait de ce fait
être question d'y appliquer les garanties juridiques
traditionnelles4(*)22.
Des responsables politiques américains ont ainsi laissé entendre
à diverses reprises que les personnes incarcérées à
Guantanamo pourraient y être maintenues en détention
jusqu'à ce que la guerre contre le terrorisme soit gagnée4(*)23. L'argument selon lequel
le caractère « extraterritorial » de la base de
Guantanamo excluait toute possibilité, pour les personnes qui y
étaient détenues, d'exercer un recours juridictionnel contre
leurs conditions de détention ou pour demander qu'il soit statué
sur le bien-fondé de celle-ci a été reçu par
plusieurs tribunaux américains4(*)24. Cette absence de toute possibilité, pour
les détenus de Guantanamo, de saisir un tribunal afin qu'il se prononce
sur la légalité de leur détention a néanmoins fait
l'objet de critiques de plus en plus significatives, sur la scène
internationale d'abord, puis aux Etats-Unis d'Amérique. Plusieurs
instances internationales ainsi que divers commentateurs ont ainsi mis en cause
l'existence à Guantanamo d'une « zone de non
droit »425. Et les appels se sont par la suite
multipliés pour demander la fermeture complète de ce lieu de
détention4(*)26.
A cet égard, il a été rappelé à de
nombreuses reprises que c'était le critère du contrôle
effectif exercé sur un territoire, et non celui de l'existence de droits
souverains, qu'il convenait de prendre en compte pour déterminer
l'applicabilité, aux situations se présentant sur ce territoire,
des normes internationales de protections des droits de la personne4(*)27. Le principe est, en
effet, solidement établi. Ainsi, dans son observation n° 31 rendue
en 2004 sur « la nature de l'obligation juridique imposée aux
Etats parties au Pacte relatif aux droits civils et politiques », le
Comité des droits de l'homme des Nations Unies expose que :
« aux termes du paragraphe premier de l'article 2, les Etats parties
sont tenues de respecter et garantir à tous les individus se
trouvant sur leur territoire et à tous ceux relevant de leur
compétence les droits énoncés dans le Pacte. Cela signifie
qu'un Etat partie doit respecter et garantir à quiconque se trouve sous
son pouvoir ou son contrôle effectif les droits reconnus dans le Pacte
même s'il ne se trouve pas sur son territoire »4(*)28. Le Comité insiste
à cette occasion sur le fait que les garanties du Pacte doivent
s'appliquer à toute personne qui se trouve sous le contrôle
effectif d'un Etat partie, y compris par le biais des forces armées de
cet Etat agissant en dehors de son territoire, indépendamment de toute
question de nationalité4(*)29. En s'appuyant sur de nombreux
éléments de la pratique, la Cour internationale de Justice est
arrivée aux mêmes conclusions en ce qui concerne l'application du
Pacte international relatif aux droits civils et politiques dans son avis
consultatif de 2004 sur les Conséquences juridiques de
l'édification d'un mur dans le territoire palestinien
occupé4(*)30. Il ne fait donc aucun doute que les garanties, y
compris procédurales, des droits fondamentaux découlant du Pacte
de 1966 s'appliquaient, dès le départ, en faveur des personnes
détenues à Guantanamo Bay et qu'elles possédaient, de ce
fait, le droit de se faire entendre devant un tribunal. Il n'existait, à
cet égard, aucun « vide juridique » justifié
par le caractère extraterritorial de cette base militaire. C'est, en fin
de compte, aux mêmes conclusions qu'est parvenue la Cour suprême
des Etats-Unis d'Amérique à partir de l'année 2004 et tout
récemment en juin 2008. La haute juridiction a en effet
décidé, dans les affaires Rasul vs. Bush (2004)
et Boumediene vs. Bush (2008) que la loi fédérale
(Statute) relative à l'habeas corpus conférait
compétence aux tribunaux américains pour statuer sur des demandes
formulées par des détenus de Guantanamo Bay 4(*)31. Ces décisions
battent ainsi en brèche l'argument selon lequel l'absence de
souveraineté sur le territoire en cause aurait pour effet de priver les
personnes qui y sont détenues de toute possibilité de recours
judiciaire contre le principe et les conditions de leur détention. En
définitive, ce « trou noir judiciaire »4(*)32 laissé
artificiellement béant ne serait qu'une « lacune de
convenance »4(*)33, rien de plus. Il n'y a plus qu'à
espérer que le nouveau président américain Barak OBAMA qui
a récemment révélé ses intentions de fermer ce lieu
de détention, joigne l'acte à la parole.
Si l'usage de la force- ainsi que l'on l'a vu- a fait l'objet
d'une approche dangereuse dans le traitement du terrorisme, les
développements qui vont suivre concluent à la non pertinence de
l'approche dans le recours aux mesures de contrainte non armée et aux
juridictions.
Chapitre II: UNE approche non pertinente dans le
traitement du terrorisme
Le traitement de la question du terrorisme a
révélé les limites et les insuffisances de l'approche
usitée pour y faire face. D'abord, on constate que les mesures de
coercition non militaires en réponse au phénomène
terroriste sont caractérisées par leur relative efficacité
(Section 1). Ensuite, il semble que la justice contemporaine constitue une
réponse inadaptée à cette forme de criminalité
(Section 2).
Section 1 : La relative efficacité des
mesures de contrainte non armée décidées dans le cadre de
la lutte antiterroriste
Le Conseil de sécurité des Nations
Unies a réagi au soutien au terrorisme en édictant des mesures de
coercition non armée à plusieurs occasions. La mise en oeuvre de
ces « sanctions », ainsi que le constat de
résistance des cibles nous amèneront à nous interroger sur
leur efficacité. Ce faisant, l'étude de
l'efficacité des mesures coercitives non armée
décrétées dans le cadre du traitement du terrorisme invite
d'abord à en présenter le régime juridique
( Paragraphe 1), puis en apprécier la portée
( Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Le régime des mesures de
contrainte non
armée
décidées
Avant même d'exposer le
régime des mesures de contrainte non armée sous lequel a
été traitée la question du terrorisme, quelques
précisions importantes méritent d'être faites :
Premièrement, les mesures de coercition non armée dont il s'agit
ici se définissent par certaines caractéristiques. Ce sont
d'abord des mesures verticales, ce qui les distingue des contre-mesures, qui
s'inscrivent dans un schéma horizontal. Ainsi, le rapport n'est vertical
que lorsque l'Etat cible des mesures est membre de l'organisation
internationale. Au contraire, quand une organisation internationale adopte des
mesures contre un Etat non membre, le rapport est horizontal et relève
des contre-mesures4(*)34. Deuxièmement, l'étude de la
pratique des « sanctions » internationales
révèle que le cadre universel des Nations Unies est le seul dans
lequel des « sanctions » ont été
adoptées contre un Etat. Ces précisions faites, nous envisageons
aborder la question du régime des mesures coercitives non armée
décidées dans le cadre de la lutte contre le terrorisme sous deux
angles : de façon synthétique, on planchera dans un premier
temps sur le choix des moyens (A), puis dans un second temps sur le choix des
cibles (B).
A- Le choix des moyens
De nombreuses situations conflictuelles ont
amené le Conseil de sécurité à prendre des
« sanctions » en réponse au soutien de certains
Etats au terrorisme. Pourtant, seulement deux espèces que nous
considérons comme des cas classiques seront analysées pour les
besoins de l'étude. Il s'agit notamment des
« sanctions » édictées contre la Libye en
1992 (1) et celles qui ont été prises à l'encontre
l'Afghanistan des Taliban en 1999.
(1)- Le cas de la Libye
On se souvient qu'en 1988, un attentat est
commis contre le vol 103 de la Pan Am, assurant la liaison Francfort- New York.
L'avion américain explose en plein vol au-dessus du village
écossais de Lockerbie, tuant ainsi les 259 personnes à bord de
l'appareil ainsi que 11 personnes au sol. Puis l'année suivante,
survient un deuxième attentat contre le vol 772 de l'Union des
Transports Aériens (UTA). L'avion français, en provenance de
Brazzaville (Congo), s'écrase dans le désert du
Ténéré, une région du Sahara situé au Niger,
provoquant la mort de 170 personnes. Suites aux enquêtes menées
par les gouvernements concernés, les Etats-Unis d'Amérique et le
Royaume-Uni demandent l'extradition de deux ressortissants libyens
inculpés dans l'attentat contre le vol 103 de la Pan Am. Quant à
la France, elle lance un mandat d'arrêt international contre quatre
ressortissants libyens, sans pour autant déposer de demande
d'extradition auprès du gouvernement libyen4(*)35. Ces deux affaires
occasionnent par ailleurs l'activation de l'article 39 de la Charte des
Nations Unies4(*)36 dont
l'organe sécuritaire se saisira de la question. Une série de
résolutions est alors adoptée pour répondre aux actes
illicites. La première Résolution (732/ 1992) dans laquelle le
Conseil de sécurité déplore le fait que la Libye n'ait pas
favorablement répondu aux demandes des pays victimes relativement aux
procédures judiciaires, exige de ce pays qu'il livre d'une part ses deux
ressortissants accusés d'avoir perpétrés l'attentat contre
le vol 103 de la Pan Am. D'autre part, la résolution entendait arracher
à la Libye son engagement ferme à « cesser de
manière définitive toute forme d'action terroriste et toute
assistance aux groupe terroriste (...) », tout en montrant par des
actes concrets, et cela le plutôt possible, sa renonciation au
terrorisme. Dans la Résolution 1192 (1998), le Conseil de
sécurité réitère formellement les exigences de la
précédente résolution. Toutefois, il raffine ses
injonctions en décidant que les « sanctions » contre
Tripoli ne seront suspendues qu'une fois les deux accusés libyens
livrés aux Pays-Bas en vue de leur jugement par une cour
écossaise. Les « sanctions » contre la Libye ont
été imposées en deux temps. Les mesures de la
Résolution 748 (1992) ont été effectives le 15 avril 1992.
Il s'agissait de « sanctions » diplomatiques et
économiques, concernant :
- différents aspects des liaisons
aériennes : tous les Etats devaient refuser le décollage,
l'atterrissage ou le survol à tout aéronef s'il prévoyait
d'atterrir sur le sol libyen ou s'il en avait décollé (sauf
exception humanitaire). Les Etats devaient interdire à leurs nationaux
de fournir des avions ou composants d'avions ou autres services
d'ingénierie ou maintenance etc.4(*)37, et empêcher le fonctionnement des bureaux
de la compagnie Libyan Arab Airlines4(*)38.
- la fourniture d'armes et de matériel
militaire : tous les Etats devaient aussi interdire à leurs
nationaux de fournir à la Libye des armements et des matériels
militaires (munitions, véhicules, pièces détachées,
etc.), accords de brevets pour leur fabrication et entretien, et conseils
techniques ou assistance. Les Etats devaient ainsi retirer leurs agents
diplomatiques en Libye conseillant les autorités libyennes dans le
domaine militaire4(*)39.
- Les effectifs et les activités des
représentations diplomatiques et consulaires libyennes : tous les
Etats devaient encore réduire « de façon
significative » le nombre et le niveau du personnel diplomatique et
consulaire, et restreindre ou contrôler leurs déplacements.
- Le traitement des nationaux libyens reconnus auteurs ou
soupçonnés d'activités terroristes : tous les Etats
devaient enfin prendre toutes les mesures pour refuser l'entrée de
terroristes libyens avérés ou soupçonnés ou
procéder à leur expulsion4(*)40. Face à la résistance de Tripoli, le
Conseil de sécurité a décidé de renforcer le
régime des mesures de coercition par de nouvelles mesures entrées
en vigueur le 1er décembre 1993. Ce renforcement des
« sanctions » n'a pas emmené la Libye, qui les
considéraient « illégales », à
satisfaire les exigences du Conseil de sécurité. Ce dernier n'a
pourtant pas adopté de nouvelles « sanctions » mais
simplement déclaré son intention de le faire dans la
résolution 11924(*)41 si les deux inculpés n'étaient pas
livrés aux Pays-Bas en vue de leur jugement par un tribunal
écossais ou jugés aux Etats-Unis ou au Royaume-Uni. Le
renforcement des mesures n'a pas été nécessaire puisque la
Libye a finalement accepté de livrer ses ressortissants.
(2)- Le cas de l'Afghanistan des Taliban :
Pour l'histoire, on
retiendra que les Taliban4(*)42 au pouvoir depuis 1996 revendiquent la mise en
place d'un Emirat4(*)43
islamique d'Afghanistan. En face, se trouvent différentes factions qui
se sont alliées afin de former un Front uni (aussi appelé
l'Alliance du Nord) et qui défendent l'Etat islamique d'Afghanistan. Le
conflit afghan dure depuis de nombreuses années, et malgré les
diverses tentatives de médiation des nations Unies qui désirent
mettre en place un gouvernement provisoire représentatif des diverses
factions en attendant l'organisation d'élections, aucun cessez-le-feu
n'est envisagé par les deux parties en présence. Ce conflit
menaçait la stabilité régionale au point où
d'importants flux de réfugiés cherchant à fuir le conflit
ont été enregistrés, le trafic de drogue et son corollaire
de criminalité étant par ailleurs devenus un problème
sérieux pour cette partie du monde dans la mesure où ce
fléau connaissait une nette croissance4(*)44. C'est dans un tel contexte de
délitement de l'Etat afghan4(*)45 que les ambassades américaines de Nairobi
(Kenya) et de Dar es Salam (Tanzanie) sont la cible d'attentats terroristes.
Quelques 260 personnes y trouvent la mort et 4.500 autres blessés.
L'enquête judiciaire menée par les Etats-Unis d'Amérique
sur ces deux attentats met en cause l'internationale nébuleuse
terroriste Al Qaida dont la simple évocation rappelle le
« tristement célèbre » milliardaire oussama
BEN LADEN. Cet attentat serait la manifestation d'une réaction contre le
rapprochement entre le leader spirituel du Soudan, Hassan El-Tourabi, et les
Etats-Unis d'Amérique, rapprochement qui signifierait la fin du Front
islamique international4(*)46. Les attentats ont donc servi d'avertissement
à la puissance mondiale afin de mettre fin à ce rapprochement, et
s'inscrivent du reste dans la lignée de la fatwa
décrétée par BEN LADEN4(*)47. Les sanctions imposées par la
Résolution 1267 (1999) à la « faction afghane
dénommée Taliban », et non formellement à l'Etat
afghan concernent son soutien au terrorisme. Elle exige que les
« Taliban remettent sans plus tarder BEN LADEN aux autorités
compétentes (...) » et insiste que la faction afghane
« se conforme sans attendre aux résolutions antérieurs
du Conseil et cesse, en particulier, d'offrir refuge et entraînement aux
terroristes internationaux et à leurs organisations (...) ».
Le régime des « sanctions » ciblées contre
les Taliban imposé par la Résolution 1267 consistait à la
fois en un embargo de restriction des voies aériennes sur les fonds et
biens financiers des Taliban. Le paragraphe 4 de la résolution imposait
en effet à tous les Etats de :
- refuser aux aéronefs appartenant aux Taliban ou
affrétés ou exploités par les Taliban ou pour le compte
des Taliban l'autorisation de décoller de leur territoire ou d'y
atterrir sauf exception humanitaires (y compris religieuses telles que le
pèlerinage à La Mecque).
- geler les fonds et autres ressources financières,
notamment de biens appartenant aux Taliban ou contrôlés
directement ou indirectement par eux, ou appartenant à toute entreprise
appartenant aux Taliban ou contrôlés par eux.. A l'instar des du
cas précédemment présenté, le Conseil a
renforcé le régime des « sanctions ». Il a
principalement imposé dans la Résolution 1333 (2000) un embargo
sur les armements et matériels militaires (et véhicules,
pièces de recharge...) et obligé les Etats à
empêcher la vente de conseils techniques, d'assistance ou
entraînement aux activités militaires des Taliban par leurs
nationaux, ainsi qu'à retirer les agents et individus présents en
Afghanistan pour conseiller les Taliban sur le plan militaire et
sécuritaire. Cette mesure était ainsi prometteuse puisqu'elle
visait à affecter les Taliban sur le champ de bataille contre l'Alliance
du Nord. Des « sanctions » diplomatiques ont en outre
été décidées. Enfin, s'agissant des liaisons
aériennes, les Etats devaient fermer immédiatement tous les
bureaux de la compagnie aérienne Ariana Afghan Airlines sur leur
territoire, d'y atterrir ou de le survoler si cet aéronef a
décollé d'un endroit situé sur le territoire de
l'Afghanistan désigné par le Comité comme étant par
les Taliban.
Au total, Il s'agissait pour l'essentiel pour le Conseil de
sécurité de faire infléchir ces Etats accusés de
soutenir le terrorisme, afin d'obtenir d'eux leur engagement ferme d'y
renoncer. L'objectif étant cependant d'amener ces Etats à
composition en minimisant les répercussions néfastes des
« sanctions » pour les populations, celles-ci
(« les sanctions ») devait être ciblées.
B- Le choix des cibles
Le ciblage des « sanctions »
va nous amener à déterminer, dans deux cas qui intéressent
notre étude, les destinataires de ces mesures (1), lesquelles mesures
s'accompagnent de dérogations dites humanitaires (2).
(1)- Les destinataires des
« sanctions » décidées
Le choix des cibles dans les deux cas
d'étude appelle certaines remarques. S'agissant d'abord du régime
des mesures coercitives prises à l'encontre de la Jamahiriya arabe
libyenne, ces dernières visent l'Etat en tant que tel, ne sont pas
ciblées contre l'appareil gouvernemental mais affectent globalement
l'Etat et sa population. Par contre, des mesures particulières visent en
outre certains individus libyens, ceux qui sont des auteurs reconnus ou
soupçonnés d'actes de terrorisme4(*)48. Le Conseil de sécurité oblige les
Etats à prendre toutes les dispositions pour empêcher leur
entrée sur le territoire. Il s'agit de mesures très
ciblées mais dont la compatibilité avec le droit international
est mise à rude épreuve. En effet, on comprend mal pourquoi les
« sanctions » consistent à se débarrasser de
ces individus, quand bien même ce sont- par définition- des
auteurs reconnus ou soupçonnés d'actes terroristes. Cela semble
contraire aux principes du système de répression internationale
élaboré sur le plan universel qui, comme nous l'avons vu, repose
sur la coopération entre Etats et l'ubiquité de la
répression. Il aurait suffit en pareille circonstance de rappeler la
nécessité de la mise en oeuvre du principe Aut dedere aut
judicare.
S'agissant, enfin, du choix de prendre pour cible la
« faction afghane dénommée Taliban », il
répond au croisement de plusieurs considérations. Primo,
ces mesures ont pour objectif la lutte contre le terrorisme, contre O. BEN
LADEN, activement recherché depuis les attentats du 7 août 1998
contre les ambassades américaines de Nairobi et de Dar es Salam, et son
organisation. Comme l'a noté l'Equipe d'appui analytique et de
surveillance des sanctions contre les Taliban et Al-Qaida :
« Habitué à traiter avec les Etats, le Conseil a
décidé de s'opposer à l'organisation Al-Qaida4(*)49 en l'empêchant de
tirer parti de l'appui infrastructurel que lui fournissaient ses hôtes
les Taliban »4(*)50. Secundo, le Conseil de
sécurité, en ciblant la faction afghane dénommée
Taliban, entendait la distinguer de l'Etat afghan, ce qui traduisait par
ailleurs son refus de la reconnaître comme gouvernement de l'Afghanistan
quelque que pu être l'effectivité de son pouvoir dans le pays.
(2)- Les dérogations humanitaires en faveur
des
populations
La prise en compte des effets
néfastes et non souhaitables des « sanctions » sur
la population des pays sanctionnés a amené le Conseil de
sécurité à accompagner dans de nombreux cas ses
« sanctions » d « exceptions
humanitaires ». Il s'agit d'aménager certaines exceptions au
régime de « sanctions » décidé au
regard des circonstances factuelles particulières ; ceci pour
éviter les abus et préserver l'efficacité de la
contrainte. Le Conseil de sécurité institue à cette fin
des comités de sanctions qui jouent un rôle crucial pour
équilibrer l'efficacité des sanctions et les
considérations humanitaires. Des dérogations humanitaires ont
ainsi été appliquées en faveur de la population libyenne
et de la population afghane.
Dans la situation libyenne, le Conseil de
sécurité a inséré dans la Résolution 748
(1992) une exception au blocus aérien pour certains vols
autorisés par le Comité des sanctions « pour
d'importants motifs d'ordre humanitaire »4(*)51. Conformément
à ses missions, le Comité doit « examiner toute demande
formulée par un Etat aux fins de l'autorisation de vols pour
d'importants motifs d'ordre humanitaire conformément au
paragraphe 4 et à prendre à ce sujet des décisions
rapides »4(*)52. Il ressort qu'au titre des exceptions au blocus
aérien figurent deux types de vols : ceux assurant
l'évacuation sanitaire4(*)53 d'urgence et ceux permettant les transports de
pèlerins à La Mecque pour faire le Hadj4(*)54.
Ces dérogations sont apparues pourtant insuffisantes
aux yeux de l'OUA qui a estimé dans une déclaration en date du 10
juin 1998 que les « sanctions » « (...)
empêchent l'observance des obligations religieuses, la fourniture des
secours humanitaires d'urgence (...) et ont causé « (...) de
graves pertes humaines et économiques (...) au peuple libyen et à
bon nombre de peuples africains »4(*)53. En ce qui concerne la situation afghane, la
Résolution 1267 (1999) prévoit des exceptions aux mesures du
paragraphe 44(*)54.
Ainsi, les Etats devaient mener l'embargo aérien « à
moins que le Comité des sanctions n'ait préalablement
approuvé le vol considéré pour des motifs d'ordre
humanitaire, y compris les obligations religieuses telles que le
pèlerinage à La Mecque »4(*)55, geler les fonds des
Taliban « à moins que le Comité n'ait donné une
autorisation contraire, au cas par cas, pour des motifs
humanitaires ». Enfin, on peut relever que lors des consultations
officieuses tenues le 4 janvier 2002 par le Conseil de sécurité,
M. Lakdhar BRAHIMA, Représentant spécial du Secrétaire
général pour l'Afghanistan, a recommandé que les
« sanctions » prises à l'encontre de la compagnie
aérienne Ariana Afghan Airlines, qui n'était plus sous le
contrôle des Taliban, soient levées dans les plus brefs
délais afin de faciliter le voyage à La Mecque des
pèlerins afghans.
Les régimes des mesures de coercition non armées
ayant fait l'objet de larges développements, tout l'intérêt
du débat réside en ceci qu'on doit mesurer l'efficacité de
celles-ci à l'aune de leur portée.
Paragraphe 2 : La portée des mesures de
contrainte non
armée
décidées
L'étude de l'efficacité des
« sanctions » décidées dans le cadre de la
lutte contre le terrorisme tient compte de multiples paramètres.
Primo, il faut avoir à l'esprit le fait que la raison
principale de ces « sanctions » a son siège dans le
renoncement effectif des Etats visés à soutenir le terrorisme.
Secundo, l'on se doit de mesurer l'impact (matériel ou
psychologique) de ces « sanctions » sur les populations
civiles, ce qui ne paraît pas a priori aisé pour le
juriste. Pour le Professeur Jean CHARPENTIER, les sanctions sont
appropriées si elles répondent à deux séries de
facteurs : l'adaptation au degré de vulnérabilité de
l'Etat sanctionné (possibilité pour lui de se passer des produits
dont on veut le priver...) et la réception de ces dernières par
les opinions publiques internes et externes4(*)56. Le premier constat à dresser est que dans
les deux cas d'étude, les Etats visés ont fait preuve d'une
grande résistance (A), toute chose qui a d'ailleurs
nécessité- ainsi qu'on l'a vu- un corsage du régime
initialement décrété. Le deuxième constat à
tirer est lié aux effets contre-productifs de ces mesures (B).
A- La résistance à l'égard de
certaines mesures de contrainte non armée
L'analyse du régime de
« sanctions » montre le relatif succès des
injonctions du Conseil de sécurité. Si les Nations Unies ont pu
obtenir de la Libye leur engagement ferme à renoncer à soutenir
officiellement le terrorisme, la résistance dont ont fait preuve ces
Etats trahissent dans les faits ces engagements.
S'agissant de la Libye, le régime de M. KADHAFI a
résisté pendant dix années pour finalement accepter un
compromis. Le Conseil de sécurité menaçait d'ailleurs la
Libye dans sa Résolution 1192 (1998)- adoptée à
l'unanimité- de recourir à des mesures supplémentaires
« si les deux accusés ne sont pas arrivés ou n'ont pas
comparu aux fins du procès » aux Pays-Bas. Cette
résistance s'est également manifestée par la violation
répétée de certaines mesures dont l'imposition des
embargos. De multiples violations de l'embargo aérien ont donc
été constatées régulièrement par le Conseil
de Sécurité et son comité des sanctions. Elles ont tout
naturellement donné lieu à de fermes condamnations. Les
violations constatées ont conduit à des avertissements, parfois
répétés à plusieurs Etats4(*)57. On note aussi que les
violations de l'embargo décrété contre la Libye
présentent un aspect organisé et une grande originalité en
ce qu'elles ont été encouragées par une position de
principe adoptée par l'Organisation de l'unité africaine. En
effet, la Conférence des chefs d'Etat et de gouvernement de l'OUA avait,
sous l'impulsion du Burkina Faso, appelé à la session de
Ouagadougou, le 10 juin 1998, les Etats membres à « ne plus se
conformer » dès le 1er septembre suivant aux
sanctions considérées comme violant la Charte des Nations Unies
et entraînant de graves pertes en vies humaines (...) »4(*)58. Cette décision
« (...) a représenté une brèche dans la
solidarité internationale, dans la mesure où elle a ouvert la
voie à une série de violations de l'embargo par plusieurs chefs
d'Etats africains »4(*)59.
On peut l'affirmer, cette désobéissance
collective jouit d'un poids symbolique très fort ; elle est au
demeurant riche d'enseignement quant aux considérations de
légitimité du Conseil de sécurité, la question de
sa composition restreinte et inégale suscitant des débats
à l'actualité brûlante4(*)60.
Dans le cas des Taliban, l'inefficacité des «
sanctions » est patente, les exigences du Conseil de
sécurité n'ayant jamais été satisfaites. On pouvait
douter du succès de l'embargo aérien imposé à
l'Afghanistan par la Résolution 1267 (1999) alors qu'une seule compagnie
aérienne était concernée et qu'elle n'assurait qu'une
ligne internationale. Il s'est posé à l'évidence un
problème d'adéquation de cette mesure au contexte afghan. Quant
aux autres mesures, elles n'ont pas su contraindre le régime Taliban
à livrer BEN LADEN et renoncer à soutenir son organisation
terroriste. On sait bien évidemment que c'est l'offensive armée
dirigée par les Américains qui a mis fin à ce soutien, par
l'effondrement du régime Taliban4(*)61 et que BEN LADEN n'a pas été
appréhendé pour autant.
Au-delà de la résistance à l'égard
des « sanctions », il faut aussi envisager les effets
contre-productifs à court, moyen et long terme de ces dernières.
B- Les effets contre-productifs des mesures de
contrainte non
armées
Malgré les dérogations
humanitaires, les mesures de coercition non armée, par leur aspect
afflictif (leurs conséquences matérielles et psychologiques pour
la population), peuvent avoir des effets contre-productifs qui ne sauraient
être minorés : une pauvreté accrue, le repli
aggravé de la population derrière son gouvernement, un profond
sentiment d'injustice, etc. Ainsi que l'explique un auteur, « (...)
les sanctions peuvent si elles sont appliquées sans discernement se
solder par une déstructuration de la société, ajoutant
ainsi aux problèmes de santé ceux liés à un profond
sentiment de désespérance »4(*)62. Les Taliban ont ainsi essayé d'en tirer parti en
conduisant une campagne de désinformation dans les zones sous leur
contrôle, une propagande contre les mesures de coercition onusiennes, ce
qui a conduit le Secrétaire général à envisager
à l'avenir une campagne de diffusion auprès de la population
touchée d'informations objectives sur la nature exacte de telles
mesures4(*)63. Les mesures prises
à l'encontre de la Libye ont aussi provoqué un repli des Libyens
derrière leur chef4(*)64.
Au-delà de ces quelques aspects réels, il faut toutefois avouer-
ainsi qu'on l'annonçait déjà- qu'il est
concrètement difficile d'apprécier avec justesse l'impact des
mesures coercitives pour la population. Ainsi, si on a pu constater une nette
détérioration des conditions de vie des Libyens4(*)65, les mesures ciblées
contre la Jamahiriya n'en sont, de l'avis de certains4(*)66, la cause directe.
L'appréciation de l'impact des mesures de coercition sur la population
afghane est aussi très incertaine devant la précarité de
la situation au début de ces mesures4(*)67 et la multiplication des facteurs
déstabilisants : sécheresse depuis plusieurs années,
violations massives des droits des l'homme, épidémies, invasions
de parasites. Les rapports de l'ONU sur les répercussions humanitaires
des mesures de contrainte contre les Taliban qualifient l'impact de ces
dernières de « tangible mais limité »4(*)68. Le secrétaire
général Koffi ANNAN a ainsi constaté que les mesures en
question « n'ont eu que des répercussions limitées sur
la situation humanitaire »4(*)69.
Au total, l'analyse de l'efficacité des
« sanctions » décidées dans les deux cas
d'étude permet d'établir un bilan peu reluisant. De ce fait,
l'application des mesures de contraintes non armées prévues par
le droit international sont vite apparues insuffisantes et la justice
contemporaine démontre davantage tout le malaise éprouvé
par le droit international face au terrorisme.
Section 2 : La justice contemporaine, une
réponse
inadaptée à
l'infraction de terrorisme
Le règlement pacifique des
différends interétatiques en tant qu'obligation majeure
internationale4(*)70 peut emprunter
divers canaux. Ces canaux sont de nature tantôt politique (ou non
juridictionnelle) tantôt juridictionnelle (ou judiciaire)471. Selon les
termes de l'article 33 de la Charte des Nations Unies, « les Partis
à tout différend dont la prolongation est susceptible de menacer
le maintien de la paix et de la sécurité internationales doivent
en rechercher la solution avant tout, par voie de négociation,
d'enquête, de médiation, de conciliation, d'arbitrage, de
règlement judiciaire (...) ». Au constat, les affaires
liées au terrorisme ont donné lieu à des querelles quasi
interminables. De plus, l'histoire nous montre bien que la justice a
été très peu sollicitée dans les affaires relatives
au terrorisme, ce qui traduit par ailleurs une sorte de malaise. En effet,
l'on note que les juridictions actuelles (qu'elles soient internationales ou
nationales) sont à court d'argument face à cette infraction,
laissant ainsi transparaître des signes visibles d'essoufflement. Les
symptômes de ce malaise sont perceptibles et on peut les rechercher et
les retrouver tant dans la mise en oeuvre de la responsabilité des Etats
pour leur soutien au terrorisme (Paragraphe 1) que dans la mise en oeuvre de la
responsabilité des individus en tant qu'auteurs des attentats
(Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : La marginalisation de la justice
internationale dans la mise en oeuvre de la responsabilité des Etats
pour soutien au terrorisme
Tout ordre juridique suppose que les sujets
de droit engagent leur responsabilité lorsque leurs comportements
portent atteinte aux droits et intérêts des autres sujets de
droit. Ceci est d'autant plus vrai pour la société internationale
où, en vertu de sa souveraineté, l'Etat détermine
librement ses décisions et se heurte à une liberté
égale des autres Etats. La responsabilité internationale4(*)72 des Etats apparaît
dès lors comme le mécanisme régulateur nécessaire
de leurs rapports mutuels4(*)73. Le terrorisme ou plus précisément
le soutien étatique aux activités terroristes a été
l'occasion de la mise en ouvre de cette responsabilité. Mais on s'en
apercevra, dans la pratique, cette responsabilité est restée
limitée et exclusive dans la mesure où, la Juridiction
internationale c'est-à-dire la CIJ n'a pas eu à connaître
de ces affaires. Il s'agirait donc là d'une responsabilité
tantôt para judiciaire tantôt extrajudiciaire. L'Affaire
Rainbow Warrior (A) et Lockerbie (B)
permettent d'illustrer cet état de fait.
A- LA responsabilité para judiciaire de la France dans
l'Affaire Rainbow
Warrior
Nous nous autoriserons à exhumer
ici, pour les besoins de l'étude, l'Affaire Rainbow Warrior
dont l'historique remonte aux années 1980. Rappelons que le 10 juillet
1985, le Rainbow Warrior, navire battant pavillon britannique et
appartenant au mouvement écologiste international Greenpeace, se
préparait à manifester contre les expériences
nucléaires françaises à Mururoa4(*)74 ; alors qu'il
mouillait dans le port néo-zélandais d'Auckland, il fut
coulé par des agents relevant des services secrets français
(DGSE). Un photographe, de nationalité néo-zélandaise,
mais d'origine portugaise, étant remonté à bord, entre
deux explosions, trouva la mort en se noyant. Cet incident fut à
l'origine de la démission du ministre français de la
Défense nationale. Il s'agissait là bien évidemment d'un
acte de sabotage terroriste4(*)75. La responsabilité de la France
était incontestablement engagée, et elle l'a été
à plusieurs niveaux. Dans un premier temps, le gouvernement
français, après avoir reconnu sa responsabilité, a
accepté d'indemniser à l'amiable la famille de la victime
à hauteur de 2,3 millions de francs français. Quant au
contentieux international entre la France et la Nouvelle-Zélande, les
deux gouvernements sollicitèrent M. Javier Perez De CUELLAR, alors
Secrétaire Général des Nations Unies dans le cadre de sa
médiation4(*)76
pour régler les problèmes nés de ce différend. Bien
que les deux parties eussent accepté à l'avance de se
« conformer au règlement retenu », on était
pourtant bien loin d'un règlement arbitral classique4(*)77. Aux termes du
règlement qui fit l'objet d'un accord international, sous forme
d'échange de lettres, en date du 9 juillet, la France a adressé
une lettre d'excuses et accordé 7 millions de dollars d'indemnité
(soit 50 millions de francs français), tandis que la
Nouvelle-Zélande a accepté que les deux officiers français
inculpés soient, après une année de détention
affectés pour trois ans, sur une base française dans le
pacifique. Il y a donc eu à la fois satisfaction, en réparation
du dommage moral, et indemnisation4(*)78.
En ce qui concerne le litige entre la France et
l'organisation Greenpeace, la réparation des dommages subis par
l'association écologiste a été soumise à un
arbitrage transnational (non publié) qui a abouti, en 1987, à
l'octroi d'une indemnité de 8 millions de dollars (soit 50 millions de
francs français de l'époque)4(*)79. On ne voit donc pas apparaître dans ce
différend une quelconque référence à la Cour
internationale de justice qui aurait pu à bon droit statuer en
l'espèce- tout au moins en ce qui concerne le différend
interétatique franco-néozélandais- bien que sa saisine
soit optionnelle. L'idée de privilégier un arrangement - soit-il
mauvais- au détriment d'un procès- même bon- était
bien présente.
B- La responsabilité extrajudiciaire de la Libye dans
l'Affaire Lockerbie
L'attentat commis en 1988 contre le vol 103 de la
Pan Am, assurant la liaison Francfort- New York, qui avait explosé
au-dessus du village de Lockerbie, a donné lieu à
d'interminables tractations et intrigues politico-diplomatiques. Des
négociations directes entre les trois Etats (Libye, Etats-Unis,
Angleterre ) ont porté sur l'indemnisation par la Libye des victimes de
l'explosion et ont abouti à la conclusion d'un accord tripartite, le 11
mars 2003, par lequel la Libye a accepté sa responsabilité.
Ainsi, la Libye s'est engagée au versement d'indemnités aux
victimes, à hauteur de dix millions de dollars pour chacune des 270
victimes et en contrepartie de la levée définitive des
sanctions4(*)80. Le
Ministre libyen des Affaires étrangères déclarait à
ce sujet le 29 avril 2003 : « Mon pays a accepté de
prendre sa responsabilité civile pour les actions de ses
fonctionnaires dans l'Affaire Lockerbie, conformément au
droit civil international4(*)81 et à l'accord survenu en mars
à Londres entre les responsables libyens, américains et
britanniques »4(*)82. Ceci n'a pas pour autant empêché,
l'entérinement de l'accord le 15 août 20034(*)83. Comme on peut s'en
apercevoir, la responsabilité internationale de cet Etat n'a pas
été mise en cause devant un juge ou un arbitre international par
les Etats victimes d'actes terroristes prétendument ou réellement
imputables à l'Etat africain. La CIJ, saisie par la Libye dans l'Affaire
dite Lockerbie, n'a pas eu à connaître de la
responsabilité de cet Etat. Seul le Conseil de sécurité-
ainsi qu'il l'a été précédemment
évoqué4(*)84- organe politique dont les décisions
échappent aux exigences d'un traitement judiciaire, a été
saisi de la question de l'imputabilité et, partant, de la
responsabilité.
En ce qui concerne l'Affaire du vol 772 UTA,
l'indemnisation des familles des victimes de l'explosion du DC-10
d'UTA en 1989 au dessus du désert du Ténéré a
été acceptée du côté libyen par la Fondation
Kadhafi4(*)85. On note
cependant qu'à la différence de l'affaire Lockerbie
où la Libye a reconnu officiellement sa responsabilité dans
les attentats, l'Affaire du DC-10 UTA a donné lieu à une
indemnisation ex gratia4(*)86, alors même que ce pays semblait n'avoir
jamais reconnu sa responsabilité dans ces attentats. L'objet de ces
indemnisations était en réalité de réparer les
préjudices subis par des individus, personnes privées, pour
écarter formellement une relation interétatique. C'est sans nul
doute pourquoi les accords internationaux d'indemnisation ont été
passés entre une organisation privée- La Fondation Kadhafi- qui
ne saurait être apparentée à un organe de l'Etat libyen, et
les familles des victimes regroupées en collectif4(*)87. Il n'empêche que
l'accord de principe qui a été obtenu le 11 septembre 2003 entre
la France et la Libye sur l'indemnisation des victimes en contrepartie de la
levée des « sanctions » qui frappaient la Libye,
s'est matérialisé par la mise sur pied, depuis 2004, d'un Fonds
d'indemnisation. Il faut souligner que les protagonistes libyens avaient
toutefois inscrit leurs démarches dans une perspective volontaire
à vocation caritative ou humanitaire, ce qui dénote entre autre
du refus de cet Etat de voir sa responsabilité être
engagée.
Si la mise en oeuvre de la responsabilité des Etats
devant les instances judiciaires relève- ainsi qu'on vient de le voir-
d'un procédé marginal, celle des individus a abouti- on le verra
maintenant- à une dilution des mécanismes judiciaires.
Paragraphe 2 : La dilution des mécanismes
judiciaires dans la mise en oeuvre de la responsabilité des individus
pour commission d'actes terroristes
La revendication politique de la plupart des
attentats terroristes constitue une difficulté quasi insurmontable dans
le jugement équitable des mis en cause4(*)88. Naturellement, cette situation a pour
corollaire, l'interférence ou l'intrusion de la politique dans les
procédures judiciaires, provoquant ainsi une dilution des solutions
judiciaires. Pour s'en convaincre nous étudierons deux affaires :
nous reviendrons dans un premier temps sur l'Affaire Lockerbie
précédemment évoquée (A) et dans un second temps
nous évoquerons une nouvelle affaire, celle-là toujours pendante,
l'Affaire Hariri (B).
A- L'hybridité de la solution dans la mise en oeuvre
de la
responsabilité des mis en cause dans l'affaire
Lockerbie
Le Conseil de sécurité a dans
l'Affaire Lockerbie, imposé à la Libye la livraison des
suspects libyens, le comportement de l'Etat arabe étant
considéré comme menaçant la paix et la
sécurité internationales4(*)89 . Cette injonction- faut-il le rappeler-
correspondait du reste aux demandes des pays victimes des attentats terroristes
en l'occurrence les États-Unis d'Amérique et l'Angleterre qui ont
manifesté leur volonté de voir les inculpés être
traînés devant leurs juridictions nationales. La Libye
s'était par ailleurs opposée à cette solution qu'elle
considérait comme une violation manifeste de sa souveraineté et
des principes du droit international. Après un bras de fer de plus d'une
décennie, l'Affaire Lockerbie a trouvé son
dénouement dans un modus vivendi original : le jugement
des deux accusés par une cour écossaise
dépaysée4(*)90 dans un Etat tiers neutre, les Pays-Bas. Cette
solution a été trouvée grâce à la
médiation de plusieurs intervenants, tels que l'ambassadeur d'Arabie
saoudite à Washington et le Président sud-africain Nelson
MANDELA. On a voulu dans cette solution couper la poire en deux en
contentant les parties concernées. Le jugement des deux accusés
s'imposait avec acuité d'autant plus qu'il devait constituer un
élément catalyseur dans la décrispation, le dégel
des relations entre la Libye et les pays occidentaux. Dans cette dynamique de
pacification et de normalisation des relations qui existent entre ces Etats, la
Libye fit part de livrer les deux suspects au 6 avril 1998, dans une lettre du
19 mars adressée au Secrétairegénéral4(*)91. Le régime KHADHAFI
qui a obtenu notamment l'assurance de la levée définitive des
« sanctions » au lieu de leur simple suspension, se
prétend alors satisfaites dans ses exigences4(*)92. L'accord de principe a
été consacré par le Conseil de sécurité dans
sa Résolution 1192 (25 août 1998) adoptée sur le fondement
du Chapitre VII. Le Conseil y décide que la Libye doit remettre les deux
accusés aux Pays-Bas4(*)93, mais n'exige pas exclusivement le jugement par la
Cour écossaise aux Pays-Bas puisqu'il envisage la suspension des
« sanctions » soit si la Libye livre ses ressortissants aux
Pays-Bas, soit s'ils font l'objet d'un jugement aux Etats-Unis
d'Amérique ou au Royaume-Uni4(*)94. Cette procédure suscite quelque remarque
qui mérite d'être mise en évidence. Comme on peut s'en
apercevoir, la décision de juger les présumés terroristes
dans l'Affaire Lockerbie relève d'une concertation
entérinée par un organe politique. C'est à
l'évidence le Conseil de sécurité qui, en l'espèce,
a déterminé les responsabilités dans la procédure
de transfert des inculpés. Une telle solution était-elle valide
et viable ? juridiquement entachée
d'irrégularité4(*)95, la solution semble s'inscrire dans une
perspective de Realpolitik, l'enjeux des débats étant
aussi d'ordre politique. En ce qui concerne le jugement des deux accusés
proprement dit, Abdelbaset Ali Mohamed Al Megrahi et Al Amin Khalifa Fhimah ont
été remis au Secrétaire général adjoint de
l'ONU à Tripoli le 5 avril 1999 puis transférés aux
Pays-Bas. Extradés à leur arrivée aux Pays-Bas vers le
Royaume-Uni4(*)96, ils
seront jugés par la Haute Cour écossaise le 3 mai 2000 pour les
chefs d'inculpation suivants : complot, meurtre et violation de la
législation aérienne sans curieusement retenir l'inculpation de
terrorisme. La Cour finit par rendre son verdict le 31 janvier 2001; l'un des
inculpés Abdelbaset Ali Mohamed Al Megrahi est condamné à
la prison à vie, en application du droit écossais, tandis que
l'autre Al Amin Khalifa Fhimah est purement et simplement acquitté faute
de preuves suffisantes. Ce verdit ainsi que le déroulement du
procès va susciter de vives critiques, certains observateurs y
dénonçant l'interférence des intérêts
politiques4(*)97.
B- La complexité de l'Affaire Hariri du
fait des intérêts géopolitiques
L'attentat contre l'ex-premier ministre libanais
Rafic HARIRI intervient le 14 février 2005 dans un contexte de tension
politique aiguë. Le Liban traversait une période
d'instabilité liée à l'influence syrienne dans le pays et
Monsieur Rafic HARIRI était farouchement opposée à cette
présence étrangère qui occupait le sud du pays4(*)98. L'attentat qui a
causé la mort de vingt personnes et blessé deux cent vingt autres
personnes fera l'objet d'une vive condamnation par le Conseil de
sécurité de l'ONU, lequel a prié le Secrétaire
général de lui faire rapport d'urgence sur les circonstances, les
causes et les conséquences de cet attentat4(*)99. Suite à une
recommandation, le Conseil de sécurité décide à
l'unanimité le 7 avril 2005 dans sa Résolution 1595 (2005)
d'instituer une commission d'enquête internationale indépendante,
basée au Liban, « (...) afin d'aider les autorités
libanaises à enquêter sur tous les aspects de cet acte de
terrorisme et notamment à en identifier les auteurs, commanditaires,
organisateurs et complices ». La première mission
d'établissement des faits dépêchée par le
Secrétaire général avait précisé dans son
rapport de mars de 2005 que la tâche de la commission d'enquête
dont elle recommandait la création serait difficile « ( ...)
tant que les responsables actuels des services de sécurité
libanais resteront en place »5(*)00. Cette mission a conclu au manque de
volonté des autorités libanaises et a ainsi
considéré qu'il fallait une réorganisation, une
réforme et une rééducation des services de
sécurité libanais5(*)01. Il faut préciser que de lourds
soupçons pesaient déjà sur le Président libanais,
M. Emile LAHOUD accusé d'avoir orchestré cet attentat de concert
avec les autorités de Damas5(*)02. Malgré tout, le Conseil de
sécurité va demander au Liban de traduire en justice les auteurs,
organisateurs et commanditaires de l'attentat et l'exhortera à prendre
en compte les conclusions de la commission d'enquête. Il est
décide par ailleurs que la Syrie5(*)03 et le Liban devront coopérer avec la
commission d'enquête aux fins d'établissement de la
vérité. Contre toute attente, la Syrie va montrer une certaine
réticence à l'égard de cette commission5(*)04, toute chose qui
compliquera davantage l'issue de cette affaire. Or, la commission
d'enquête n'était pas habilitée à arrêter les
suspects, son rôle étant d'enquêter sur tous aspects de
l'acte de terrorisme et « (...) notamment en identifier les auteurs,
les commanditaires, organisateurs et complices ». Pour autant, les
autorités syriennes se sont vues inquiétées et
menacées par cette enquête. Au demeurant, bien qu'il ressorte
clairement du paragraphe 2 de la Résolution 1595 (2005) que les
individus mis en cause par les conclusions de l'enquête
indépendante auraient à l'origine dus être traduits en
justice et poursuivis par les juridictions nationales libanaises, sous les
regards de la communauté internationale, le Conseil de
sécurité a décidé, en accord avec le gouvernement
libanais, d'instituer un tribunal international ad hoc pour juger les
personnes mises en cause dans l'attentat du 14 février 2005.
L'espèce HARIRI est le cas topique des
affaires relatives au terrorisme dont la complexité est entretenue par
des intérêts de positionnement géopolitiques.
Au total, au regard de ce qui précède, il
apparaît évident que la justice contemporaine éprouve des
difficultés certaines à réprimer le terrorisme. Cela est
d'autant plus vrai que ce phénomène est alimenté de
charges affectives, religieuses et politiques. Tout ceci semble donner raison
au Professeur Hervé ASCENSIO qui pense que les juridictions
actuelles constituent une réponse peu adaptée à
l'infraction de terrorisme5(*)05.
Conclusion
Les événements du 11 septembre
2001 ont montré l'extrême nécessité de lutter contre
le terrorisme. L'impact de ces évènements et des
développements qu'ils ont entraînés dans le domaine de la
lutte contre le terrorisme sur l'évolution de l'ordre juridique
international se révèle pour le moins contrasté. D'un
côté en effet, le droit international est apparu aux Etats comme
un instrument de choix pour organiser la prévention et la
répression des actes de terrorisme. D'un autre côté, en
revanche, l'ordre juridique international a subi, depuis le début du
nouveau millénaire, une mise à l'épreuve sans
précédent, la pertinence de certaines de ses normes les plus
fondamentales se voyant très sérieusement mises en cause par
divers Etats au regard des exigence affirmées de la lutte
antiterroriste. Pour ce qui est du premier aspect de ce constat, l'on ne
saurait nier l'intérêt que les Etats engagés dans la lutte
contre le terrorisme ont montré pour les normes et les mécanismes
juridiques. Paradoxalement le discours légaliste que ces derniers
mettent en avant dans la campagne antiterroriste est trahi par des pratiques
qui contrarient l'ordre juridique international. Madame Barbara DELCOURT
observe à ce sujet que : « Le droit international
classique est officiellement considéré comme un
élément fondamental de la lutte contre le terrorisme, mais la
légitimité des actions entreprises par les Etats en son nom
repose souvent (...) des pratiques qui en sapent les
fondements »5(*)07. En ce qui concerne le second aspect, le droit
international- nous l'avis dit- a été sérieusement mis
à l'épreuve à la suite du 11 septembre 2001. C'est le
fondement même du dispositif de sécurité internationale qui
s'en est trouvé affecté, par l'affirmation d'une conception
élargie et laxiste de la légitime défense. Ce
débordement s'est s'accompagnée d'un renforcement
considérable de certains pouvoirs du Conseil de sécurité,
qui, en fin de compte, outrepassant ses compétences traditionnelles,
s'est adjugé d'autres pouvoirs. Un tel développement- que l'on a
vite fait de justifier par le caractère exceptionnel de la situation-
est loin d'obtenir un soutien au sein de la communauté des juristes,
quand on peut présumer des conséquences fâcheuses qu'il
peut répercuter sur l'ordre international. La concentration de tous les
pouvoirs entre les mains d'un organe restreint tel que le Conseil de
sécurité peut s'avérer dangereuse pour l'équilibre
des relations internationales quand on imagine que ces Etats pourraient
utiliser les pouvoirs en question pour la défense des
intérêts qui leurs sont propres , tout en mobilisant à cet
effet une rhétorique « communautariste » et des
instruments d'action collective5(*)08. Les politiques de lutte contre le terrorisme
menées par un certain nombre d'Etat se sont par ailleurs traduites par
la multiplication des dérogations et des restrictions aux règles
du droit internationale des droits de la personne, de même par une
application aléatoires des normes du droit international humanitaire, si
ce n'est qu'elles (ces normes) sont purement et simplement
écartées ou ignorées dans certains cas. Au surplus, la
lutte contre le terrorisme sert aujourd'hui d'arme politique à certains
Etats qui y voient une occasion rêvée de régler des comptes
à des ennemis5(*)09. Enfin, il faut avouer que la lutte contre le
terrorisme pour son efficacité ne saurait se satisfaire des seuls normes
et mécanismes juridiques. Elle ne peut être perçue
exclusivement sous le prisme réducteur du droit qui, de toute
évidence, connaît des limites. Il faut intégrer à
l'approche juridique l'approche sociale du phénomène, laquelle
cherche à comprendre les fondements du terrorisme en recherchant les
causes sous-jacentes5(*)10 de ce fléau pernicieux qui tend à
désagréger le corps international dont l'unité souffre
déjà d'une précarité chronique.
BIBLIOGRAPHIE SELECTIVE
DOCTRINE
I- Ouvrages
A- Ouvrages généraux
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TRAITES et RESOLUTIONS
I- Traités internationaux
A- Traités universels
- Convention relative aux infractions et à certains
autres actes survenus à bord des aéronefs, signée à
Tokyo le 14 septembre 1963 (entrée en vigueur le 14 décembre
1969)
- Convention pour la répression de la capture
illicite d'aéronefs, signée à la Haye
le 16 décembre 1970 (entrée en vigueur le 14
octobre 1971)
- Convention pour la répression d'actes illicites
dirigés contre la sécurité de
l'aviation civile, signée à Montréal le
23 septembre 1971 (entrée en vigueur le 26 janvier 1973)
- Convention sur la prévention et la
répression des infractions contre les
personnes jouissant d'une protection internationale, y
compris les agents diplomatiques, adoptée par l'Assemblée
générale des Nations Unies le 14 décembre 1973
(entrée en vigueur le 20 février 1977)
- Convention internationale contre la prise d'otages,
adoptée par l'Assemblée
générale des Nations Unies le 17
décembre 1979 (entrée en vigueur le 3 juin 1983)
- Convention sur la protection physique des matières
nucléaires, signée à Vienne
le 3 mars 1980 (entrée en vigueur le 8 février
1987)
- Convention pour la répression d'actes illicites
dirigés contre la sécurité de la
navigation maritime, signée à Rome le 10 mars
1988 (entrée en vigueur le 1er mars 1992)
- Convention internationale pour la répression des
attentats terroristes à l'explosif,
adoptée par l'Assemblée générale
des Nations Unies le 15 décembre 1997 (entrée en vigueur le 23
mai 2001)
- Convention internationale pour la répression du
financement du terrorisme
adoptée par l'Assemblée générale
des Nations Unies le 9 décembre 1999 (entrée en vigueur le 10
avril 2002).
B- Traités régionaux
- Convention du Conseil de l'Europe pour la prévention
du terrorisme, Varsovie 16 mai 2005.
- Convention arabe de lutte contre le terrorisme, Le Caire, 22
avril 1998 (entrée en vigueur le 7 mai 1999).
- Convention de l'Organisation de la Conférence
islamique sur la lutte contre le
terrorisme, Ouagadougou, 1er juillet 1999
- Conférence de l'OUA sur la prévention et la
lutte contre le terrorisme, Alger, 14
juillet 1999, (entrée en vigueur le 6 décembre
2002)
III- Résolutions des Nations Unies
A- Résolutions de l'Assemblée
générale
- Résolution 1514, (14 décembre 1960)
- Résolution 3314, (14 décembre 1974)
B- Résolutions du Conseil de
sécurité
- Résolution 1373, (28 septembre 2001)
DECISIONS DE JUSTICE
A- Arrêts
Ø Activités militaires et paramilitaires au
Nicaragua et contre celui-ci, Rec., 1984,
p. 169
B- Avis
Ø Licité de la menace ou de l'emploi de l'arme
nucléaire, 8 juillet 1996, Rec., 1996, p. 66
WEBOGRAPHIE
ü
http://documents.un.org/simple.asp
ü
www.interpol.int/
ü
www.icj-cij.org
ü
http://www.ejil.org/forum_WTC
ü
http://www.unodc.
org/odccp/terrorism.htlm.
ü
http://www.ulb.ac.be/droit/cdi
ü
http://www. ulb.ac.be/droit/
ü
http://usinfo.state.gov/regional/af/security/french
ü http://
www.uspolicy.be/issues
/terrorism/letint.021402htm.
ü http://www. rsf. org / www.
libertés-immuables.net
ü http://www.i-p-o.org/lockerbie_observer
_mission.htm
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http://www.scotcourts.gov.uk/download/lockerbiejudgement
ü http://
www.webdo.ch
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http://www.grip.org
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www.gwu.edu./-nsarchiv.
ü www.asil .org/taskforce/oconnell.
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http://www.un.org/french/docs/committees/1373.
TABLE DES MATIÈRES
Remerciements........................................................................1
Sommaire...............................................................................2
Liste des sigles et
abréviation.........................................................3
Introduction..............................................................................4
Chapitre préliminaire :
Considérations générales sur la notion de terrorisme en
droit
international..........................................12
Section 1 : L'émergence de
difficultés dans la recherche
d'une définition du
terrorisme.............................................13
§1 : Le terrorisme, une notion
insaisissable.............................................13
A- Le constat d'échec d'une définition
générale et tangible du
terrorisme en droit
International..................................................15
B- Les obstacles : les pierres d'achoppement et la question
des exclusions...17
1- La vive controverse sur l'exclusion des actes des
mouvements de libération des actes de
terrorisme.............................................18
2- La lancinante question du terrorisme d'Etat et de son
exclusion des actes de
terrorisme.............................................................22
§2 : Quelques confusions dans la qualifications de
certains actes criminels.........23
A- Terrorisme et crime contre
l'humanité...........................................24
B- Terrorisme et crime de
guerre....................................................29
Section 2 : La spécification de
l'infraction de terrorisme..............................32
§1: L'élément matériel des
infractions terroristes.......................................32
A- L'approche sectorielle ou
fragmentaire.................................33
(1) - Les actes terroristes au regard des moyens et du mode
opératoire...34
a- Les prises
d'otages............................................................34
b- Les attentats terroristes à
l'explosif.......................................34
c- Le terrorisme
nucléaire........................................................35
d- Le financement du
terrorisme...............................................37
(2)- Les actes terroristes au regard des
cibles...................................38
a- Le terrorisme
aérien...........................................................38
b- Le terrorisme
maritime.......................................................39
c- Le terrorisme contre les personnes jouissant
d'une protection
internationale..................................................................41
B- L'approche
générale...........................................................42
§2 : L'élément moral
des infractions terroristes...............................45
A- Les définitions de l'infraction
spécifiquement terroriste..................45
(1)- Provoquer la terreur ou
intimider..........................................45
(2)- Contraindre une autorité à certaines
décisions...........................46
B- Les manifestations de l'intention
spécifiquement terroriste...............47
(1)- Les actes terroristes par leur
nature.........................................48
(2)-Les actes terroristes par leur
contexte........................................49
PREMIERE PARTIE : L'ENCADREMENT NORMATIF DE LA
LUTTE CONTRE LE
TERRORISME....................................52
Chapitre 1 : Le dispositif
préventif de lutte antiterroriste...........................53
Section 1 : Les obligations des Etats dans la
prise de
mesures
internes............................................................53
§1: Les obligations préventives
universelles.............................................53
A- Les obligations conventionnelles de prendre des mesures
Internes.............................................................................53
(1) Les obligations préventives d'action (obligations
de faire)................54
(2) Les obligations préventives d'abstention
(obligations de ne pas faire)....56
B- Les obligations préventives de la
résolution 1373 des
Nations
Unies..................................................................58
(1)- Le refus d'accorder l'asile et le statut de
réfugiés aux terroristes.........59
(2)-Les contrôles aux frontières pour
empêcher l'infiltration des
terroristes...............................................................................61
§2 : Les mesures complémentaires des
conventions régionales.......................62
A- Les mesures préventives de la
convention africaine...........................62
B- Les mesures préventives de la convention
européenne........................64
Section 2 : Les obligations de coopération des
Etats aux
fins de
prévention............................................................66
§1 : La coopération préventive inter
étatique selon le modèle
relationnel..............................................................................66
A- L'obligation d'échanger des
renseignements......................................66
B- Les autres mesures de
coopération................................................68
§2 : La coopération préventive
institutionnalisée........................................70
A- La coopération préventive des organisations
internationales..................70
B- Le renforcement des capacités des Etats aux
fins de prévention...............74
Chapitre 2 : Le dispositif
répressif de lutte antiterroriste..............................77
Section 1 : Les mesures de coercition applicables
au terrorisme......................77
§1: Les mesures de contrainte militaire en
réaction au terrorisme..................78
A- L'usage de la force armée au titre de la
légitime défense
(article 51 de la Charte des
Nations)............................................ 80
B- Les mesures de contrainte militaire de l'article
42 de la
Charte des Nations
Unies.......................................................84
§2 : Les mesures de contrainte non militaire
contre le soutien
étatique au
terrorisme...............................................................89
A- La consistance des mesures de rétorsion contre
le soutien
étatique au
terrorisme...............................................................90
B- La licéité des contre-mesures contre le soutien
étatique au
terrorisme en
question..............................................................93
Section 2 : La répression pénale du
terrorisme............................................96
§1 : La répression pénale du terrorisme
par les juridictions
nationales.................................................................................97
A- Les titres de compétence
traditionnels..........................................98
B- Un titre de compétence spécial: la
compétence universelle...............102
§2: La répression pénale du
terrorisme par les juridictions
internationales...............................................................................104
A- L'absence de juridiction pénale
internationale disposant
d'une compétence générale
en matière de terrorisme.......................105
B- La contribution des tribunaux pénaux
internationaux ad -hoc à
la répression du
terrorisme........................................................107
DEUXIEME PARTIE : LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME A
L'EPREUVE
DES
FAITS...............................................................111
Chapitre 1: Une approche dangereuse dans la
lutte contre le terrorisme.........112
Section 1 : Le changement de posture dans le
traitement du terrorisme............113
§1 : Le recours à la force armée
avant le 11 septembre 2001 :
Un traitement restrictif et
mesuré...................................................113
A- Un traitement restrictif et mesuré reflétant
la pratique.....................113
B- Un traitement restrictif et mesuré confirmé
par la jurisprudence.........115
§2 : Le recours à la force après
le 11 septembre 2001 :
Un traitement largement
renouvelé.................................117
A- Des règles en mutation ?
...................................................118
(1)- Une acceptation massive de la légitime
défense.................................118
(2)- Une acceptation extensive et laxiste de la
légitime défense......................120
B- Des moyens d'action en
transformation.......................................123
(1)- De la surenchère des qualifications par le
Conseil de sécurité : « Le terrorisme comme l'une
des plus grandes menaces à la paix et à la sécurité
internationales »...........................................................................124
(2)... A la confusion des pouvoirs : le Conseil de
sécurité en tant que détenteur des pouvoirs
exécutif, judiciaire, et
législatif................................................128
Section 2 : La violation des normes
internationales dans la campagne antiterroriste
.................................................................................................133
§1 : Des choix sémantiques aux
conséquences juridiques
incertaines...................................................................................133
A- Du droit d'agir de manière préventive en
légitime défense à la
« préemption » contre le
terrorisme.............................................134
(1)- De la validité de la thèse de la
légitime défense
préventive....................................................................................135
(2)- De la licéité de la doctrine de la
préemption.................................138
B- De l'invocation du concept de
« guerre » contre le
terrorisme................................................................................141
§2 : Des pratiques attentatoires aux droits et
libertés.................................144
A- L'instauration d'un « Etat
d'exception ».......................................145
B- L'établissement d'une
« zone de non-droit »..............................149
Chapitre 2 : Une approche non pertinente
dans le traitement du terrorisme......153
Section 1 : La relative efficacité des
mesures de contrainte non armée
décidées......................................................................................153
§1 : Le régime des mesures de contrainte
non armée décidées.....................153
A- Le choix des
moyens............................................................154
(1)- Le cas de la
Libye...............................................................154
(2)- Le cas de l'Afghanistan des
Taliban.............................................157
B- Le choix des
cibles...............................................................159
(1)- Les destinataires des mesures de coercition non
armée
décidées.................................................................................159
(2)- Les dérogations en faveur des
populations.................................161
§2 : La portée des mesures de contrainte
non armée
décidées......................................................................................163
A- La résistance à l'égard de certaines
mesures de contrainte non
armée...................................................................................163
B- Les effets contre-productifs des mesures de contrainte
non armée.............166
Section 2 : La justice contemporaine, une
réponse inadaptée
à l'infraction de
terrorisme.............................................168
§1 : La marginalisation de la justice
internationale dans la mise en
oeuvre de la responsabilité des Etats pour
soutien au terrorisme..............169
A- La responsabilité parajudiciare de la France dans
l'Affaire Rainbow
Warrior.............................................................................170
B- La responsabilité extrajudiciaire de la Libye dans
l'affaire Lockerbie.....171
§2 : La dilution des mécanismes
judiciaires dans la mise en oeuvre de la
responsabilité des individus pour commission
d'attentats
terroristes....................................................................................174
A- L'hybridité de la solution dans la mise en oeuvre
de la responsabilité des accusés des attentats de
Lockerbie.....................................................174
B- La complexité de l'Affaire Hariri du fait
des enjeux géopolitiques......177
Conclusion..............................................................................180
Bibliographie...........................................................................182
Table des
matières.....................................................................188
* 1 L'année 2007 a
été particulièrement meurtrière. Elle fut
ensanglantée par une vague d'attentats terroristes un peu partout dans
le monde. La chaîne de télévision française France
24 dressait un sombre bilan à ce sujet, quand elle annonçait que
plus de 780 personnes ont trouvé la mort dans des attentats terroristes.
Sur France 24, édition télévisée du
28 /12/2007
* 2 Les spécialistes
du terrorisme font généralement remonter la genèse de ce
phénomène au 1re siècle de notre ère,
à l'époque des Sicaires (du nom de Sica, genre d'arme blanche),
extrémistes juifs du 1er siècle qui rejetaient le
monde grec au profit d'une tradition juive.
* 3 Si le terrorisme en tant
que donnée factuelle est apparu au 1er siècle de notre
ère, il faut croire que la notion de « terrorisme »
elle-même est née sous la révolution française.
Robespierre était qualifié de terroriste à la suite de la
chute du régime ayant utilisé la terreur comme mode de
gouvernement à partir du 30 août 1793. Voir
Marie-Hélène GOZI, Le terrorisme, Ellipses, Paris,
2003, page 8.
* 4 Voir Bruce HOFFMAN,
La mécanique terroriste, Calman Lévy, Paris, 1999, p.
26
* 5 Etait-ce là la
« fin de l'histoire » comme le laisse entendre M. Francis
FUKUYAMA ?. Voir Francis FUKUYAMA, La fin de l'histoire et le dernier
homme, édition Flammarion, 1992. L'auteur y affirme que la fin
guerre froide marque la victoire définitive de la démocratie et
du libéralisme sur les autres régimes politiques, et par
là, l'avènement de la paix perpétuelle. Il présente
le modèle américain comme « fin de
l'histoire » et la démocratie libérale comme le
modèle parfait de tout système politique.
6 Voir Didier BIGO, « Grands
débats dans un petit monde », Culture et conflits
disponible sur http://www.conflits.org
7 Voir Samuel HUNTINGTON, Le choc des
civilisations, Odile Jacob, 1997
* 8 Ce néologisme
d'hyperterrorisme est de plus en plus usité pour désigner le
terrorisme de destruction de masse auquel correspond sans nul doute les
attentats hautement meurtriers du 11 septembre 2001. Voir René PASSET et
Jean LIBERMAN, Mondialisation financière et terrorisme :
la donne a-t-elle changé depuis le 11 septembre, Enjeux
planète, Paris, 3ème trimestre 2002, p.85
* 9 F. RACHLINE, « Le
terrorisme est un totalitarisme », dans P. BONIFACE (dir. pub.),
Le 11 septembre, un an après, PUF. Coll. Enjeux
stratégiques, IRIS, 2002, p. 39
* 10 Ce sentiment est
largement partagé au sein de la doctrine. Voir entre autres auteurs,
Paul TAVERNIER, « Terrorisme et compétence
universelle », SFDI, Les nouvelles menaces contre la paix et la
sécurité internationales, journée franco-allemande,
Pedone, Paris, 2004, pp. 237 et s. Voir égalemnt Brigitte STERN
« Rapport introductif : Le contexte juridique de l'après
11 septembre 2001, Karine BANNELIER ; Théodore CHRISTAKIS;
Olivier CORTEN ; Barbara DELCOURT ( dir.pub. ), Le droit international face
au terrorisme. Après le 11 septembre 2001, Pedone, Paris, 2002,
pp. 3 et s.
11 Cette « inadaptation » du
droit international avait déjà été
dénoncée par certains auteurs antérieurement aux
évènements du 11 septembre 2001. ( Voir par exemple M. REISMAN,
« International Legal Responses to Terrorism », Houston
JIL, 1999, p. 60) et a continué à l'être par la suite
(Voir par exemple Abraham D. SOFAER, « On the Necessity of
Preemption », EJIL, 2003, pp. 210 et 221)
12 Voir Luigi CONDORELLI, « Les
attentats du 11 septembre et leurs suites : où va le droit
international ? », RGDIP, 2001, p. 829.
* 13 Voir C. TREAN, Le
Monde, 18 et 19 novembre 2001, citée par Brigitte STERN,
« Le contexte juridique de
l' « après » 11 septembre 2001,
dans Karine BANNELIER, Théodore CHRISTAKIS, Olivier CORTEN et Barbara
DELCOURT, (dir. Pub.), Le droit international face au terrorisme.
Après le 11 septembre 2001, op.cit, pp. 3-4
* 14 Voir Pierre KLEIN,
« Le droit international à l'épreuve du
terrorisme », Cours de l'Académie de droit international de la
Haye, 2007.
15 Voir Marie HELENE GOZI, Le terrorisme,
op.cit, page 5 « Introduction »
* 16 Voir Albert CAMUS,
Réflexions sur le terrorisme, éd. Nicolas Philippe,
Paris 2002.
* 17 Voir Jean Marc SOREL,
« Existe-t-il une définition universelle du
terrorisme ? », BANNELIER (Karine) ; CHRISTAKIS
(Théodore) ; CORTEN (Olivier) ; DELCOURT (Barbara) (dir.pub.
), Le droit international face au terrorisme. Après le 11 septembre
2001, op.cit., pp. 35 et s.
18 Voir Marie-Hélène GOZI, op.cit.,
p. 6
* 19 Voir Jean Christophe
MARTIN, Les règles internationales relatives à la lutte
contre le terrorisme, Bruylant, Bruxelles, 2006, p. 20.
20 La controverse est nourrie par le relativisme du
concept. En fait, la décision d'appeler une personne ou de qualifier une
organisation de « terroriste » devient presque
inévitablement subjective, et dépend largement des rapports de
sympathie ou d'opposition que l'on entretient avec la personne, le groupe ou la
cause concernée. Si l'on s'identifie aux victimes de la violence, ces
actions sont alors du terrorisme. Si au contraire, on s'identifie à
l'auteur de ces actions violentes, on les considère avec plus de
sympathie, et sinon de manière positive ; il ne s'agit plus de
terrorisme. D'où l'adage populaire « terroristes pour les uns,
combattants de la liberté pour les autres ». Voir Bruce OFFMAN,
op.cit., p. 39.
21 La définition proposée par Mme
Isabelle SOMMIER rend bien compte de la difficulté d'aboutir à
une définition précise du terrorisme qui se présente pour
elle comme un ensemble de « modes d'actions
hétéroclites pouvant s'inscrire dans des stratégies
classiques autant que d'autres formes de violence ». Voir Isabelle
SOMMIER, Le terrorisme, Flammarion, Dominos, Paris, 2000, p. 11.
* 22 « Si nous
avons obscurément conscience de ce qu'est le terrorisme, il est
toutefois difficile de traduire explicitement ce savoir immédiat ?
», P. REGIMBALD, « Qu'est-ce que le terrorisme »,
Encyclopédie Syllabus (en ligne), 2005, site Internet :
www.cvm.qc.ca/encephi/Syllabus/Histoire/Articles/Terrorisme.htm
* 23 Monsieur Bruce HOFFMAN
évoque à ce propos des glissements de sens du mot dans une
perspective historique. « A la différence de son usage
contemporain, (...) le terme bénéficia d' une connotation
résolument positive pendant la Révolution française
où il fut vulgarisé ». Op.cit, p.18
24 Sans toutefois le définir, la science
politique va appréhender le terrorisme selon les finalités et les
modes opératoires. Ainsi, à l'aide de sigles, le terrorisme
à vocation révolutionnaire (TVR) est distingué du
terrorisme à vocation nationaliste ou indépendantiste (TVNI), le
terrorisme national (TN) du terrorisme transnational (TT)...Ces sigles sont
empruntés à l'étude de D. HERMANT et D. BIGO,
« Un terrorisme ou des terrorismes », in
Esprit, n° 94-95, 1986, pp. 23-27.
25 L'approche sociologique et philosophique du
terrorisme privilégie par exemple l'étude des causes
sous-jacentes du phénomène. Le droit semble
méconnaître une telle démarche, s'y refuse. Ceci est
perceptible dans l'ensemble des instruments de lutte contre le terrorisme qui
ignorent le problème des causes sous-jacentes du terrorisme. Celles-ci y
ont été expurgées. En fait, depuis les années 70,
alors que certaines délégations, notamment celles des pays du
Sud, voulaient favoriser la recherche de l'origine du terrorisme, d'autres, les
délégations des pays occidentaux privilégiaient
plutôt les mesures de répression du phénomène. La
position occidentale a finalement prévalu dans les conventions.
* 26 Voir Jean-Marc SOREL,
op.cit., pp.35 et s.
27 Il s'agit notamment des faits dirigés
contre la vie de chefs d'Etat, de la destruction de biens publics, de la
fabrication ou de la détention d'armes ou d'explosifs.
28 Voir Marie-Hélène GOZI, Le
terrorisme, op.cit., p. 73
*
*
* 29 Voir en
infra, sur la « spécification de l'infraction
terroriste ».
* 30 La preuve nous est
largement fournie par de nombreuses résolutions édictées
dans le cadre des Nations Unies, lesquelles condamnent fermement le terrorisme.
On citera à titre d'illustration, la Résolution 1368 du 12 sept.
2001 condamnant les attaques perpétrées la veille.
31 Op.cit., p. 71
32 Pour le Professeur Pierre KLEIN, en
réalité, l'affirmation selon laquelle aucun instrument juridique
à vocation universelle ne comporte de définition
générale du terrorisme, s'avère un peu radicale. ( C.f
Cours de l' Académie de la Haye, op.cit.). En effet, de plus en plus,
on trouve des esquisses de définition générale du
terrorisme dans certaines conventions régionales, mais également
dans la Convention de 1999 sur le financement du terrorisme, laquelle a une
prétention à l' universel. Nous y reviendrons.
*
* 33 A ce sujet, il est
à préciser que les actes de terrorisme ne peuvent pas se
concevoir de la même manière en temps de paix et en temps de
guerre. Dans ce dernier cas, ils relèvent du jus in bello et
consistent plus généralement en des pratiques inutilement
cruelles ou odieuses contre des populations civiles ou des prisonniers de
guerre. Les actes incriminées constituent dans de telles périodes
des violations du DIH. L'article 33 de la 4ème Convention de
Genève prohibe ainsi « les peines collectives, de même
que toute mesure d'intimidation ou de terrorisme »
(italique ajouté).
* 34 Voir en
infra, « L'approche sectorielle ».
* 35 En 1948, le Comte
BERNADOTTE, alors médiateur des Nations Unies en Palestine, est
assassiné. Cette affaire devient le prétexte pour l'Organisation
qui décide de se saisir de la question du terrorisme. L'AGNU demande
alors un avis consultatif à la CIJ sur certains points de droit. L'avis
rendu le 11 avril 1949 est célèbre parmi les juristes pour son
apport à la théorie des Organisations internationales mais
n'aborde pas le problème du terrorisme.
36 Pour une analyse approfondie du Projet de
Convention générale sur le terrorisme international, voir Pierre
D'ARGENT, « Examen du projet de Convention générale sur le
terrorisme international » in Karine BANNELIER et al. (dir.
pub.), op.cit., pp. 122-157
* 37 Voir Bruce HOFFMAN,
op.cit p. 39 et s.
* 38 C.f art. 1 § 2 et
25
* 39 C. f. art. 1 commun
40 CIJ, Arrêt du 30 juin relatif au Timor
Oriental, Rec. CIJ, 1995, § 29
41 Voir Patrick DAILLIER et Alain PELLET, Droit
international public, LGDJ, Paris, 7ème éd.,
2002, p. 520.
42 CIJ, Affaire du Timor Oriental,
Rec. CIJ, 1995, p. 102, § 29 CIJ, Affaire du
Timor Oriental, Rec. CIJ, 1995, p. 102, § 29
43 Ce ne serait qu' interpréter le droit des
peuples à disposer d'eux-mêmes selon la règle de l'effet
utile (appliquée par la CIJ dans la jurisprudence Détroit du
Corfou, 9 avril 1949, Rec. CIJ, 1949, p. 24) que de consacrer
le droit pour les
peuples de recourir à la force armée, et il
s'agit là d'une lecture raisonnable de l'article 2 paragraphe 7 de la
Charte des Nations Unies.
* 44 Le Protocole
additionnel I du 8 juin 1977 aux Conventions de Genève de 1949 qualifie
de conflits armés internationaux les conflits « dans lesquels
les peuples luttent contre la domination coloniale et l'occupation
étrangère et contre les régimes racistes dans l'exercice
du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes » (art.
1)
* 45 Résolution 3070
(XXVIII) du 30 octobre 1973
* 46 Résolution 2621
(XXV) : « droit inhérent des peuples coloniaux de lutter
par tous les moyens nécessaires contre les puissances coloniales qui
répriment leur aspiration à la liberté et à
l'indépendance ».
* 47 Des pays aussi
différents qu'Israël, le Kenya, Chypre, l'Algérie doivent au
moins en partie leur indépendance à des mouvements politiques
nationalistes qui employèrent la violence armée contre les
puissances coloniales. C'est aussi pendant cette période que la
terminologie de « combattants de la
liberté » se répandit, comme la marque de
légitimité politique des combats pour la libération
nationale et de l'autodétermination accordée par la
communauté internationale, dont le soutien était activement
recherché par la plupart de ces mouvements.
* 48 Si la
licéité des mouvements de libération nationale est
désormais un acquis en droit international, le droit des Gens (jus
gentium) contemporain se refuse cependant à reconnaître la
licéité des minorités de faire sécession. Pour
aller plus loin, voir Madjid BENCHIKH, « Le terrorisme, les
mouvements de libération nationale et de sécession et le droit
international », in Karine BANNELIER et al.(dir.), op.cit,
pp. 69 et s.
* 49 Voir Rapport du
Comité spécial du terrorisme international, A/9028, 1973, p. 8,
§ 22. (Italique ajouté)
50 Nous notons également l'existence d' un
conflit entre les Résolutions précitées (Résolution
3070 (XXVIII) la Résolution 3070 (XXVIII) ) et les dispositions
pertinentes du DIH. En effet, alors que ces Résolutions autorisent
l' usage de « tout
moyen » « nécessaires », le DIH (
dans sa version droit de la Haye ) restreint le droit des parties quant aux
moyens à employer dans les conflits armés, pour éviter les
maux ou souffrances inutiles ou superflu(e)s.
Cf. Francisco MELEDJE DJEDJRO, Cours de DIH, DESS droits de
l'homme, CERAP/IDDH, Abidjan, 2005-2006.
* 51 Voir la position de
Jean-Christophe MARTIN, op.cit p. 75
52 Voir Pierre D'ARGENT, « Examen du projet
de Convention générale sur le terrorisme
international » op.cit., pp. 134 et s.
* 53 La
question s'est déjà posée en droit international, et
soumise à la sagacité de la CIJ sur la licéité
de la menace ou de l'emploi l'arme nucléaire. La CIJ s'est
prononcée sur la question dans un avis consultatif, en date du 8 juillet
1996 (Voir en infra)
* 54 Voir également
l'avant-dernier considérant du préambule de la Convention, qui
énonce déjà que « les activités des
forces armées des Etats sont régies par des règles de
droit international qui se situent hors du cadre de la présente
convention ».
55 Voir sur ce point le rapport du coordonnateur sur
les résultats des consultations bilatérales officieuses, dans
Rapport du Comité spécial créé par la
résolution 51/210 de l'AG en date du 17 décembre 1996,
7ème session (2003), Documents officiels de l'AG, doc.
A/58/37, 2 avril 2003, annexe II, point B, paragraphes 3-7
* 56 Cette position doit,
néanmoins, être relativisée au regard de la
définition du terrorisme d'Etat donnée par Mme Kalliopi KOUFA,
dans son rapport final de 2004 sur « Le terrorisme et les droits de
l'homme ». Elle en donne deux sens plausibles : dans une
première acception, le terrorisme d'Etat renvoie à l'application
d'une politique de terreur sur le plan interne, érigée en quelque
sorte en système de gouvernement. Dans un deuxième sens, le
terrorisme s'entend du recours à des actes et méthodes
terroristes « parrainés par l'Etat »,
« lorsque le gouvernement planifie, soutient, oriente et
contrôle des opérations terroristes dans un pays
tiers ».
* 57 Dont les
épouvantables attaques du 11 septembre 2001.
* 58 Par exemple, la
connexité avec le crime de guerre n'est plus une exigence constitutive
du crime contre l'humanité et la planification du crime n'est plus
exclusive d'un gouvernement, mais peut être celui d'un groupe
quelconque. Pour d'autres détails, voir William A. SCHABAS et
Clémentine OLIVIER, « Terrorisme : crime contre
l'humanité ? » in SOS, ATTENTATS,
Terrorisme, victimes et responsabilité pénale
internationale,Calman-Lévy, Paris, 2003, p. 379 et s. Voir
également Marco SASSOLI et Antoine A. Bouvier, Un Droit dans la
guerre ? Volume 1, CICR, Genève 2003, pp. 307 et 308. Et
René DEGNI SEGUI, Le tribunal pénal international, Cours de DEA,
droit public, Université de Cocody, 2006-2007.
* 59 Cf. Rapport de la CDI
sur les travaux de sa 48ème session, A/51/10, 1996, pp.
114-117
60 Voir Jean Christophe MARTIN, op.cit. p. 225
61 Pour aller plus loin, voir Bruce HOFFMAN, La
mécanique terroriste, op.cit
62 Il en était ainsi de la jurisprudence du
Tribunal de Nuremberg de 1945. William A. SCHABAS et Clémentine OLIVIER
expliquent à ce sujet que, dans le cadre du jugement des criminels sous
le IIIème Reich, la conception traditionnelle était
que, en fait, « non seulement une politique devait exister mais
qu'elle devait être celle d' un Etat, comme dans le cas de l'Allemane
Nazie ». Mais, bien que cela ait pu être le cas durant la
Seconde Guerre mondiale, (...) ce n'est plus le cas aujourd'hui. Voir op.cit,
p. 383
* 63 On constate que, ni le
statut des TPIY et TPIR ni celui de la CPI ne posent comme condition que le
crime contre l'humanité soit perpétré ou encouragé
par les autorités étatiques. L'article 5 du Statut du TPIY et
l'article 3 du TPIR gardent le silence sur cette question. Au surplus, la CDI
précise que « c'est l'instigation ou la direction soit d'un
gouvernement ou d'une organisation, ou d'un groupe
quelconque, qui donne à l'acte sa dimension et en fait un crime
contre l'humanité... » (Voir rapport
précité).
64 On citera comme exemples d'organisations
terroristes contemporaines l'ETA en Espagne (Euzkadi Ta Azkatasma qui se
traduit par « le pays Basque et sa liberté »), le
HAMAS en Palestine, le HEZBOLLAH au Liban, et la nébuleuse
internationale terroriste Al Qaida de Oussama BEN LADEN.
65 Il faut préciser que cet auteur ne
conclut pas à une généralisation des actes terroristes
comme crimes contre l'humanité. Bien au contraire, pour lui,
« la qualification de crime contre l'humanité pourrait
s'avérer pertinente s'agissant des seuls actes commis sur le
territoire américain ». Poursuit-il, cette qualification
repose cependant sur des considérations de faits établis sans
beaucoup de recul et constitue, par ailleurs, une solution dont la
validité reste
confinée au seul cas d'espèce, la question de la
qualification générale du terrorisme n'étant en rien
résolue. Voir
Yann JUROVICS, « Les controverses sur la question de
qualification du terrorisme », in Karine BANNELIER et al.
Le droit international face au terrorisme. Après le 11
septembre, op.cit., p.101.
66 William A. SCHABAS et clémentine OLIVIER
reconnaissent pour leur part que les attentats du 11 septembre 2001 ont
été « généralisés » et
« systématiques » et que les victimes étaient
« civiles », sans toutefois se plier à la
qualification de crimes contre l'humanité proposée par certains
auteurs. Op. cit. pp. 379 et s.
67 Ibid. p. 387
* 68 L'Acte final de la
Conférence de Rome, adopté en même temps que le Statut,
regrette qu'il n'ait pu être possible de s'accorder sur une
définition du terrorisme, mais prévoit que la situation pourrait
changer lors de la révision du Statut sept ans après son
entrée en vigueur. (Voir UN. Doc. A/CONF. 183/10)
69 Voir préface de l'ouvrage de Yann
JUROVICS, Réflexions sur la spécificité du crime
contre l'humanité,
LGDJ, Paris, 2002, p.7
* 70 Yann JUROVICS,
« Les controverses sur la question de qualification du
terrorisme », loc. cit., p. 101
71 Le critère de discrimination en tant que dol
spécial du crime contre l'humanité ne fait pas l'unanimité
au sein de la doctrine, mais est porté par un fort courant de
pensée. Voir Mario BETTATI, « Le crime contre
l'humanité » in H. ASCENSIO et al. Dir., Droit
international pénal, p. 303. Toutefois, le Statut de Nuremberg par
exemple ne contient pas de critère de discrimination.
72 C. GRYNFOGEL, « crimes contre
l'humanité », Juris-Classeur, Droit
pénal, Fasc. 20, 1998, p. 19 cité par Jean-Christophe
MARTIN, op.cit., p. 258
* 73 Jean-Christophe MARTIN,
ibid. p. 258
* 74 La terminologie
usitée par le droit international est celle de conflit armé. Les
Conventions de Genève de 1949 et les textes subséquents
préfèrent le terme de conflit armé à celui de
guerre .
* 75 Le jus in
Bello ou le DIH se donne en substance comme l'ensemble des règles
juridiques applicables aux conflits armés (internes et internationaux)
et aux situations d'occupation militaire, indépendamment et
indifféremment de la légalité des conflits.
* 76 Si le DIH n'interdit
pas l'usage de la force dans les combats, certaines de ces règles
restreignent par ailleurs le droit des combattants quant au choix des armes
à utiliser. Il s'agit bien notamment des armes qui peuvent causer des
souffrances inutiles et superflues aux victimes. Cf. MELEDJE DJEDJRO, op.cit.
* 77 Le Président
américain Georges W. BUSH a lui-même qualifié les attentats
du 11 septembre d'« actes de guerre » devant le
Congrès le 20 septembre 2001 dans un discours. Voir DAI,
1er nov. 2001, n° 21, p. 833
78 D'ailleurs, nous constatons avec soulagement
que les juristes qualifient rarement ces attentats de crimes de guerre. Le
Professeur Alain PELLET est de ceux- là qui dénient à ces
attentats, la qualification de crime de guerre. ( voir Alain PELLET,
« No, this is not war ! », 3 octobre 2001, Discussion-forum
de l'EJIL, site Internet :
http://www.ejil.org/forum_WTC). MM.
François DUBUISSON et Olivier CORTEN opinent que l'usage de la force
armée par des bandes armées contre la souveraineté d'un
Etat ne crée pas juridiquement une situation de guerre. (Voir
François DUBUISSON et Olivier CORTEN, « Lutte contre le
terrorisme et droit à la paix : une conciliation
délicate », in Emmanuelle BRIBOSIA et Anne WEYEMBERGH (dir.),
op.cit., p.41) En revanche, la position de Yann JUROVICS est très
nuancée sur la question ; pour lui, si ces actes ne peuvent
raisonnablement être qualifiés de crime de guerre, la situation
mérite cependant peut être une réponse plus prospective. Si
la condition de contexte de conflit armé n'est pas présente en
l'espèce, la situation y ressemblerait tout de même beaucoup et la
qualification du contexte reposerait plus sur un arsenal juridique qui
semblerait de plus en plus inadapté à l'évolution
récente des conflits que sur une analyse réaliste de la
situation. En sus, le fait que les terroristes aient visé un objectif
militaire, en l'occurrence le Pentagone, ajoute une dimension
stratégique aux attaques, non sans souligner que le droit des conflits
armés est en retard d'une génération de conflit. Voir
op.cit., pp.102 et s.
79 Le Statut de Rome reprend la même
solution, et en termes identiques, à son article 8 (d) et (f) s'agissant
des conflits armés ne présentant pas un caractère
international.
80 Cf. Affaire Tadic n° IT-94-1-AR72,
paragraphe 70 : « (...) un conflit armé existe
chaque fois qu'il y a recours à la force armée entre Etats ou un
conflit armé prolongé entre les autorités gouvernementales
et des groupes armés organisés ou entre de tels groupes au sein
d' un Etat ».
* 81 Le problème de
seuils se pose avec une extrême acuité : on peut se demander
en effet, à partir de quel seuil d'intensité une situation de
tensions, de troubles ou plus généralement de violence peut
être qualifiée de conflit armé, à partir de quel
degré d'organisation un groupe armé peut être
considéré comme une partie belligérante, un acteur
d'un conflit armé ?
82 Voir Déclaration du CICR, A/
C.6/53/WG.1/INF/1 du 09 octobre 1998
* 83 De facto, le
terrorisme est considéré d' un point de vue sociologique comme un
conflit de basse intensité « a low intensity
conflict » ou une « guerre
asymétrique » selon les terminologies anglo-saxonnes. Voir J.
BAUD, La guerre asymétrique ou la défaite du
vainqueur, Ed. du Rocher, Paris, 2003, 212 p.
84 Pour une étude plus exhaustive des actes
terroristes susceptibles d'être qualifiés de crime de guerre, se
référer à l'étude de Michel VEUTHEY,
« Le droit international humanitaire face à la guerre contre
le terrorisme », in SOS, ATTENTATS, Terrorisme,
victimes et responsabilité pénale internationale,
Calman-Lévy, Paris, 2003, pp. 516 et s. On passera en revue
quelques uns de ces actes :
- L'article 27 de la IVème Convention
de Genève de 1949 exige que les personnes civiles soient
« traitées, en tout temps, avec humanité et
protégées notamment contre tout acte de violence ou
d'intimidation, contre les insultes et la curiosité
publique » ;
- L'article 33 de cette même Convention interdit
« les peines collectives, de même que toute mesure
d'intimidation ou de terrorisme » à son alinéa 1,
tandis que l'alinéa 3 du même article interdit « les
mesures de représailles à l'égard des personnes
protégées et de leurs biens » ;
- L'article 34 de la même Convention interdit la prise
d'otages ;
- L'article 51, alinéa 2, du Protocole additionnel I
interdit « les actes ou menaces de violence dont le but principal est
de répandre la terreur parmi la population civile ». Son
alinéa 5 définit les attaques indiscriminées ; son
alinéa 6 réaffirme l'interdiction des représailles contre
la population civile ou des personnes civiles ;
- L'article 3 commun aux quatre Conventions de Genève,
sans utiliser le terme de terrorisme, interdit à l'égard des
personnes qui ne participent pas (ou plus) directement aux
hostilités : les atteintes portées à la vie et
à l'intégrité corporelle, notamment le meurtre sous toutes
ses forme, les mutilations, les traitements cruels, tortures et
supplices ; les prises d'otages ; les atteintes à la
dignité des personnes, notamment les traitements humiliants et Ces
interdictions sont d'autant plus importantes qu'elles s'adressent tant aux
gouvernements qu'aux parties non étatiques aux conflits et que la CIJ,
dans l'Arrêt Activités militaires et paramilitaires au
Nicaragua fond (27 juin 1986), les a déclarées applicables
en toutes situations de conflits comme « considérations
élémentaires d'humanité ».
* 85 Parmi les diverses
conventions sectorielles, seules cinq évoquent le terrorisme :
Convention de 1979 sur la prise d'otages,
préambule : « (...) prévenir,
réprimer, et punir tous les actes de prise d'otages en tant que
manifestations du terrorisme international » ; Convention l'OMI
de 1988, préambule; Convention de 1998 sur les attentats terroristes
à l'explosif, préambule ; Convention de 1999 sur le
financement du terrorisme ; Convention de 2005 pour la répression
des actes de terrorisme nucléaire.
* 86-87 Certains
traités internationaux incorporent par renvoi les définitions
fragmentaires des traités antiterroristes universelles. Ces
traités ne définissent pas à proprement parler les
infractions terroristes qu'ils incorporent, mais délimitent leur champ
d'application « terroriste ». L'exemple le plus topique est
certainement la Convention contre le financement du terrorisme de 1999. On peut
déduire de son article 2§1 que sont terroristes les actes
constituant une infractions au regard et selon la définition des
traités énumérés en annexe, soit tous les
traités antiterroristes antérieurs, à l'exception de la
Convention de Tokyo de 1963 qui ne définit pas d'infraction et de la
Convention sur le marquage à l'explosif aux fins de détection qui
n'a pas de dimension pénale.
* 88 Pour
« définition par renvoi », voir Jean SALMON (sous
la direction de), Dictionnaire de droit international public,
Bruylant, Bruxelles, 2001, p. 971. Le renvoi y est défini comme la
« technique de formulation de textes juridiques consistant à se
référer expressément à d'autres textes juridiques,
sans les reproduire ».
* 89 Cf. rapports annuels du
Secrétaire général des Nations Unies sur les
« Mesures visant à éliminer le terrorisme
international » et le « Guide législatif sur les
Conventions et Protocoles mondiaux contre le terrorisme »,
préparé en 2003 par l'Office des Nations Unies contre la drogue
et le crime (ONUDC), disponible sur le site Internet :
http://www.unodc. org/odccp/terrorism.htlm
* 90 Cf. article 3 commun aux
quatre conventions de Genève
* 91 Cette demande est
formulée dans la Résolution 31/103/ du 15 décembre 1979
* 92 Cf. article 1 de ladite
convention
* 93 Pour aller plus loin sur
la question, voir Marie-Hélène GOZI, op.cit., p.87
* 94 Les exemples
foisonnent en cette matière, mais on se souviendra plus
particulièrement de l'attentat de février 1993 contre le
World Trade Center de New York, des attentats de 1998 contre les
ambassades américaines de Nairobi et Dar-Es-Salaam.
* 95 Cf.
art.1er, § 3 (b).
* 96 Cf. art. 7 de ladite
convention
97 Par exemple, la Convention de 1972 sur les armes
bactériologiques (biologiques) ou à toxines oblige en son article
IV les Etats parties à adopter les mesures nécessaires pour
interdire et empêcher le stockage et la conservation des agents, toxines,
armes et équipements entrant dans l'objet du traité. Un autre
traité de 1993 concerne aussi la détention d'armes chimiques et
impose en son article VII aux Etats parties d'interdire dans leur
législation pénale le stockage et la détention par des
personnes physiques ou morales de certaines matières ou armes.
* 98 Nous soulevons
à dessein un problème de droit international dont la consistance
et l'actualité nous paraissent ne souffrir d'aucune
ambiguïté. Il s'agit notamment de
l'illicéité de l'emploi des armes
nucléaires. Diverses affirmations militantes contestent la
détention d'armes nucléaires, comme constitutive d'une menace
objective d'emploi incompatible avec la Charte des Nations Unies. Cette
position est évidemment contredite par le traité sur la
non-prolifération des armes nucléaires (T.N.T) qui
reconnaît l'existence des cinq puissances officiellement
nucléaires. Le débat s'est par la suite polarisé sur
la licéité de la menace ou de l'emploi de ces armes. La
CIJ s'est prononcée sur la question dans un avis consultatif, en date du
8 juillet 1996, en des termes assez complexes ; il en ressort les
éléments suivants :
* - L'arme nucléaire est
singulière en raison de ses capacités de destruction. Mais son
emploi est soumis au droit international général, dont les
principes « intransgressibles » du droit
humanitaire ;
- Dans cette mesure, menace ou emploi de l'arme
nucléaire sont généralement illicites ;
- Toutefois, dans une circonstance extrême de
légitime défense où la survie même de l'Etat est en
cause, la Cour ne peut conclure que la menace ou l'emploi de cette arme serait
licite ou illicite ;
- Il existe enfin une obligation de poursuivre et de mener
à terme des négociations conduisant au désarmement
nucléaire. (Voir Jean COMBACAU et Serge SUR, Droit international public,
Montchrestien, 6ème édition, Paris, 2004, p. 682).
Ces conclusions laissent transparaître un conflit de normes entre droit
humanitaire et légitime défense. On en déduit tout
naturellement que la menace ou l'emploi de l'arme nucléaire
n'est pas exclue aussi longtemps qu'elle s'inscrit dans une perspective de
légitime défense et qu'elle ne viole pas les normes pertinentes
du droit humanitaire, telle par exemple la préservation de la vie des
populations civiles dans les tueries. En pareille circonstance, il n'est pas
oiseux de se demander si l'utilisation d'une arme nucléaire, fut-elle
sous l'angle licite de la légitime défense, peut épargner
la vie des populations civiles naturellement protégées par le
droit humanitaire. Nous avons encore en mémoire le largage sur Hiroshima
(6 août 1945) et Nagasaki (9août 1945) de deux bombes atomiques,
ayant causé la mort de milliers de personnes, sans discrimination.
99 Cela est d'autant plus vrai que, le financement
du terrorisme concerne moins la commission d'attentats terroristes que la
participation ou le soutien aux activités terroristes.
* 100 Il
s'agit notamment des Résolutions 1333 (19 décembre 200) et 1373
(28 septembre 2001). On notera qu'il existe également au plan
régional des conventions qui incriminent le financement du terrorisme.
On citera de façon discrétionnaire, la Convention de l'OUA sur le
financement du terrorisme, la Convention européenne relative au
blanchiment, au dépistage, à la saisie, au gel, et à la
confiscation des produits du crime et au financement du terroriste, en date du
16 mai 2005 signée à Varsovie, pour ne citer que ces
dernières.
*
* 101 Il faut faire observer
que les différentes conventions traitant de la question de la piraterie
aérienne et des actes illicites contre la navigation aérienne
n'emploient pas le terme de terrorisme aérien. Il n'empêche
cependant que la doctrine, dans la perspective de la convention de 1999 sur le
financement du terrorisme, les considère comme tels. Voir par exemple
Marie-Hélène GOZI, Le terrorisme, op.cit., pp 82-85.
102 Le terrorisme contre l'aviation civile est
toujours d'une grande actualité. On souvient, pour les
évènements les plus récents, des destructions en vol du
Boeing de la PanAm en 1988 et du DC 10 d'UTA l'année suivante. Plus
récemment, le détournement simultanément de quatre
aéronefs commerciaux le 11 septembre 2001 ayant occasionné la
mort de trois mille personnes environ aux USA, avait créé
l'émoi dans le monde.
103La Convention de la Haye de 1970 fait
certainement suite au détournement, le 22 juillet 1968, d'un avion de la
compagnie israélienne EL AL, assurant la liaison entre Rome et Tel-Aviv
par un commando du FPLP (Font Populaire de Libération de la Palestine,
un des groupes de l'OLP).
* 104 C'est sûrement
le caractère par trop général et extensif de cette
convention qui a favorisé son exclusion de la liste des
différentes conventions antiterroristes annexées à la
Convention de 1999 sur le financement du terrorisme
105 « Commet une infraction
pénale toute personne qui illicitement et intentionnellement :
a) accompli un acte de violence à l'encontre d'une
personne se trouvant à bord d'un aéronef en vol, si cet acte est
de nature à compromettre la sécurité de cet
aéronef ; b) détruit un aéronef en service ou cause
à un tel aéronef des dommages qui le rendent inapte au vol ou qui
sont de nature à compromettre sa sécurité en vol ; c)
place ou fait placer sur un aéronef en service, par quelque moyen que
ce soit, un dispositif ou des substances propres à détruire ledit
aéronef ou à lui causer des dommages qui le rendent inapte au vol
ou qui sont de nature à compromettre sa sécurité en
vol ; d) détruit ou endommage des installations ou services de
navigation aérienne ou en perturbe le fonctionnement, si l'un des actes
est de nature à compromettre la sécurité d'aéronefs
en vol ; e) communique une information qu'elle sait être fausse et,
de ce fait, compromet la sécurité d'aéronefs en
vol ».
106 Selon cette règle coutumière, le
pirate peut être poursuivi dans tout Etat. Voir, V. HIGGINS et COLOMBOS,
Le droit international de la mer, Pedone, 1952, p. 294 cité par
Marie-Hélène GOZI, op.cit., p. 80.
* 107 Voir en ce sens
Marie-Hélène GOZI, ibid., p.81
* 108 Entre 1993 et 2003,
le nombre d'actes de piraterie maritime dans le monde aurait plus que
triplé. Selon un rapport du Bureau maritime international, plus de 263
actes de piraterie ont été recensés dans le monde, soit
une augmentation de 10% par rapport à l'année
précédente. Sur www. Radio-Canada.ca/nouvelles/international
* 109 On dénombre 36
cas de détournements de navires par les pirates somaliens depuis le
début de l'année. On se souvient qu'au mois d'avril dernier le
navire français le Ponant était la cible de ces terroristes, dans
le port d'Eyl à environ 500 km de la capitale Mogadiscio. Sur
http://www.rfi.fr/french/actufr/articles.
110 La capture du pétrolier géant
saoudien le Sirius Star, le 17 novembre 2008, une cible d'une dimension
inédite, circulant de surcroît très au sud de l'aire
d'action habituelle du golfe d'Aden des pirates somaliennes, à 800 Km au
large du Kenya et de la Tanzanie, et d'autres navires (un chalutier
thaïlandais, un cargo immatriculé à Hong Kong et un vraquier
grec), marque une escalade dangereuse de la piraterie maritime. Par Monique MAS
propos recueillis sur le site
http://www.rfi.fr/french/actufr/articles.
* 111 L'adoption de la
résolution 1816 (juin 2008) traduit un regain d'intérêt de
la communauté internationale à l'égard de cette
criminalité. Elle élargit l'approche de la communauté
internationale aux autres volets de la piraterie en instituant, pour palier les
carences du droit international, un droit encadré de poursuivre les
pirates dans les eaux territoriales somaliennes lorsqu'ils s'y replient, et
évoque la possibilité d'y intervenir militairement.
* 112 La Convention de Vienne
de 1961 sur les relations diplomatiques, la Convention de Vienne de 1963 sur
les relations consulaires et la Convention de New York de 1969 sur les missions
spéciales ont codifié la coutume en la
matière.113 Cf. Résolution 2780 de 1971
114 Cf. le texte de la Convention des Nations Unies
sur la protection des agents diplomatiques 1973, doc. ONU, 3166, A/9407
* 115 Cf. article 2 de ladite
convention
* 116 Voir
Mireille DELMAS-MARTY, Le relatif et l'universel, p. 396,
cité par Jean-Christophe MARTIN, op.cit.,
p. 45
* 117 Ce procédé
a pour avantage de sauvegarder l'intégrité du procès
pénal, le raisonnement par analogie étant proscrit.
118 L'article 1er de la
Convention vise notamment « (...) a. les atteintes à la
vie d'une personne, pouvant entraîner la mort ; b. les atteintes
graves à l'intégrité physique d'une personne ; c.
l'enlèvement ou la prise d'otages ; d. le fait de causer des
destructions massives à une installation gouvernementale ou publique,
à un système de transport, à une infrastructure, y compris
un système informatique, à une plate-forme fixe située sur
le plateau continental, à un lieu public ou une propriété
privée, susceptible de mettre en danger des vies humaines ou de produire
des pertes économiques considérables ; e. la capture
d'aéronefs, de navires ou d'autres moyens de transport collectif ou de
marchandises ; f. la fabrication, la possession, l'acquisition, le
transport, la fourniture ou l'utilisation d'armes à feu, d'explosifs,
d'armes nucléaires, biologiques ou chimiques ainsi que, pour les armes
biologiques ou chimiques, la recherche et le développement ; g. la
libération de substances dangereuses, ou la provocation d'incendies, d'
inondations ou d'explosions, ayant pour effet de mettre en danger des vies
humaines ; h. la perturbation ou l'interruption de l'approvisionnement en
eau, en électricité, ou toute autre ressource naturelle
fondamentale ayant pour effet de mettre en danger des vies humaines ; i..
la menace de réaliser un comportement énumérés de
a à h ; j. la direction d'un groupe
terroriste ; k. la participation aux activités d'un groupe
terroriste, y compris en lui fournissant des informations ou des moyens
matériels, ou toute forme de financement de ses activités, en
ayant connaissance que cette participation contribuera aux activités
criminelles du groupe ».
* 119 Voir Ghislaine
FRAYSSE-DRUESNE, « La Convention européenne pour la
répression du terrorisme », RGDIP, 1978, p. 990
120 La CDI a, en effet, bien rendu compte de la
difficulté technique de parvenir à une définition
générale du terrorisme. Cf. Rapport CDI, 47ème
session, 1195, A/50/10, Annuaire CDI, vol II, 2ème partie,
pp.28-29 § 105.
* 121 Pour une analyse
critique des conventions précitées, voir Jean-Christophe MARTIN,
op.cit, pp.48-49. L'auteur pense que la formule utilisée par les
rédacteurs de la Convention africaine est « assez convaincante
par la diversité des situations qui y sont couvertes, non sans
pertinence ». En revanche, il n'en va pas de même de la
définition de l'élément matériel du terrorisme
commune aux Conventions de la Ligue arabe et de l'Organisation de la
Conférence islamique. En effet, ces conventions semblent manifestement
pécher par leur simplicité : « n'est-il pas trop
large de dire que le terrorisme peut consister en tout acte ? ».
Dans sa diversité, le terrorisme se caractérise par certains
critères qu'il aurait été judicieux de préciser.
122 C'est nous qui mettons en italique.
* 123 On peut distinguer
les diverses formes de terrorisme à partir de plusieurs critères
dont celui de l'auteur de la commission de l'acte criminel : en ce sens,
on distingue, selon les terminologies usitées, le terrorisme
institutionnel du terrorisme individuel / Le terrorisme d'Etat ou
étatique du terrorisme non étatique / Le terrorisme d'en haut du
terrorisme d'en bas.
124 Cf. TPIY, Affaire Galic (
« Sarajevo), n° IT-98-29, décision du 03 octobre 2002,
§ 32 et jugement du 05 décembre 2003, § 136.
* 125 C'est nous qui
soulignons
126 On trouve les formules suivantes :
« répandre la terreur parmi les gens, ou à les
terroriser en leur portant préjudice » (Convention arabe et
Convention de l'OCI), « intimider, provoquer une situation de
terreur » (Convention de l'OUA), « intimider une
population » (Convention sur le financement du terrorisme).
127 Cf. Le petit Robert
128 Cf. Affaire Galic,
(Sarajevo), n° IT-98-29, décision du 03 octobre 2002, § 32 et
jugement du 5 décembre 2003, § 136. Dans cette affaire le TPIY a
condamné le général Stanislav GALIC pour « crime
de terrorisation de la population civile ».
* 129 C.f. commentaire de
la CDI sur l'article 2 du projet du Code des crimes contre la paix et la
sécurité de l'humanité : « le mot terreur a
été jugé préférable à d'autres
expressions parce qu'il était compris par tout le monde (...) ».
in Rapport de la CDI sur les travaux de la 47ème
session, 1995, A/50/10, p.29 § 111.
*
* 130 Il s'agit de tout
« acte destiné à tuer ou blesser grièvement un
civil, ou toute autre personne qui ne participe pas directement aux
hostilités dans une situation de conflit
armé (...) ».
131 Pour mieux comprendre la mystique du
terrorisme, voir Bruce OFFMAN, La mécanique terroriste, op.cit.
* 132 Par exemple, la
Convention de l'OUA retient comme dol spécial du terrorisme l'intention
de « perturber le fonctionnement normal de services publics, la
prestation des services essentiels aux populations ou créer une
situation de crise au sein des populations ».
* 133 Les Conventions de
l'OUA et de l'OCI étendent encore le dol spécial du terrorisme
à l'intention « de créer une insurrection
générale dans un Etat partie » (OUA). Ou
« menacer la stabilité, l'intégrité
territoriale, l'unité politique, ou la souveraineté d'Etats
indépendants » (OCI).
134 Les Conventions arabe et islamique retiennent
comme dol spécial du terrorisme le but d'endommager l'environnement. La
Convention arabe couvre les actes « visant (...) à endommager
l'environnement ». Celle de l'OCI couvre les actes
« exposing the environment (...) to hazards ».
Cela n'est pas sans rappeler le droit des conflits armés et, plus
précisément, le Premier Protocole de 1977 aux Conventions de
Genève de 1949 qui prévoit clairement une protection de
l'environnement et l'interdiction de certaines méthodes du fait de leur
(art. 35 par. 3 et 55). Voir à ce sujet, K. BANNELIER, La
protection de l'environnement en temps de conflit armé, Pedone,
Paris, 2001.
*
*
* 135 La distinction est
opérée dans la définition de la Convention de 1999 sur le
financement du terrorisme qui prévoit qu'un comportement est terroriste
lorsque « par sa nature ou son contexte, il a pour but d'intimider
une population ou de contraindre un gouvernement ou une organisation
internationale à faire ou à ne pas faire quelque
chose ».
Cette question prend tout son sens dans le cadre de la crise
ivoirienne. En effet, le 29 juin 2007, le Premier Ministre Guillaume K. SORO
est la cible d'un attentat à la roquette, alors que ce dernier se
trouvait à bord d' un aéronef. S'agissait-il d'un simple
assassinat politique ou d'un acte terroriste pur et simple ? Les deux
thèses sont plausibles si l'on considère la finalité
ultime des criminels. D' une part, il pourrait s'agir d' une simple tentative
d'assassinat politique : l'enjeu de la crise ivoirienne étant la
prise du pouvoir, la mort du Premier Ministre aurait créé une
situation de confusion politique, mettant à mal le processus de
normalisation de la vie de la nation et de l'Etat, amorcé par l'Accord
de Ouagadougou ( 04 mars 2007 ), ce qui aurait profité d' une certaine
manière aux criminels. D'autre part, il pourrait s'agir d'un acte
terroriste appréhendé sous divers angles : au regard du mode
opératoire et de la cible (constitution de l'élément
matériel) et au regard de la finalité recherchée par les
criminels (constitution de l'élément moral). Au regard du mode
opératoire et de la cible, il est question dans le cas d'espèce
d'un attentat à la roquette, donc d'un attentat terroriste à
l'explosif ( Convention internationale pour la répression des attentats
terroristes à l'explosif du 15 décembre 1997), dirigé
contre un Premier Ministre, personnalité jouissant d' une protection
diplomatique (Convention sur la prévention et la répression des
infractions contre les personnes jouissant d'une protection internationale, y
compris les agents diplomatiques de 1973), à bord d'un aéronef,
donc un acte de terrorisme aérien (Conventions de Tokyo (1963) et de la
Haye (1970)). Pour la détermination de l'élément moral,
point n'est besoin de rechercher l'intention spécifiquement terroriste
des auteurs, c'est-à-dire provoquer la terreur ou
intimider ou contraindre une autorité à
certaines décisions, puisque la nature même de ces actes en
révèle déjà la finalité terroriste.
* 136 Voir en supra
* 137 En ce qui concerne la
crise ivoirienne du 19 septembre 2002, il faut apprécier les
évènements au regard de leur contexture, et au regard de
l'évolution même de la crise, de sa progression dans le temps.
Pour rappel, des insurgés ont tenté un coup d'Etat qui a
avorté. Ces derniers dans leur retranchement ont constitué un
kyste dans les zones Centre Nord et Ouest du pays, défiant le pouvoir
politique légal d'Abidjan. Ce fut le début des hostilités
ouvertes entre la rébellion armée et le pouvoir politique
d'Abidjan. Nous restituerons certains faits importants de la crise dans leur
contexte aux fins d'analyse.
Premièrement, aux premières heures de la crise,
les insurgés ont assassiné l'ex-ministre de l'intérieur
feu maître Emile BOGA DOUDOU. Il s'agit à notre sens d'un
assassinat politique, puisque ces derniers ont avancé des motifs
politiques au soutien de leurs actes. D'ailleurs le contexte de coup d'Etat
renforce d'avantage nos convictions. De plus, du fait que les criminels aient
expressément visé une personnalité politique non des
moindres en rajoute à la dimension politique du crime. Les autres actes
commis dans cette période qui revêtent les critères du
crime terroriste pourraient être considérés comme tels. On
a encore en souvenir la prise d'otage d'un ministre de la République
Monsieur François AMICHIA. On mentionnera à toutes fins utiles
que le code pénal ivoirien dans sa mouture actuelle incrimine certains
actes graves susceptibles de faire peser un péril sur la nation :
on y retrouve ainsi incriminés l'insurrection armée, les
atteintes à la sûreté de l'Etat...Plus encore, la
Convention de l'OUA sur le terrorisme incrimine les actes délictueux
pouvant « perturber le fonctionnement normal des services publics, la
prestation de services essentiels aux populations ou de créer une
situation au sein des populations » ou pouvant
« créer une insurrection générale dans un Etat
partie ». Sous les effets conjugués des principes
« pacta sunt servanda » et « res inter
alios acta », les dispositions de cette convention s'appliquent
de jure à la Côte d'Ivoire. Mais, on le sait l'amnistie
prévue dans le cadre des différents accords de pacification du
pays efface ces faits. Cependant on peut se poser la question de savoir si les
effets de cette amnistie s'étendent également à la
convention africaine.
Deuxièmement, la tuerie de la cinquantaine de gendarmes
à Bouaké avait créé l'émoi dans le monde,
les chaînes étrangères ayant abondamment relayé les
évènements. Ces actes, à notre sens mériteraient la
qualification de crime de guerre dans la mesure où ils ont
été accomplis dans un contexte d'hostilité. Certes, il
n'est pas du tout aisé de déterminer avec précision le
contexte de conflit armé surtout que les combats n'avaient pas atteint
une certaine intensité. Toutefois, on peut a priori l'admettre
puisque les parties belligérantes étaient constituées,
d'un côté les forces loyalistes et de l'autre côté
les forces rebelles, même si on peut regretter que ces dernières
n'appliquaient pas les disposions pertinentes du DIH qui exigent le port ouvert
d' uniforme et des armes. Ici encore, la qualité des victimes en rajoute
au qualificatif crimes de guerre ; il s'agit de gendarmes. La nature du
conflit suscite des questionnements : la participation reconnue active
d'étrangers et le soutien avéré d'Etats voisins aux
belligérants n'ajoutent t-ils pas une dimension internationale au
conflit ?
Troisièmement, les massacres perpétrés
dans l'Ouest de la Côte d'Ivoire (Guitrozon et Petit Duekoué)
avaient donné lieu à des supputations de toute nature au point
où certains ont parlé de génocide. Il s'agit à
notre sens ni plus ni moins de crimes contre l'humanité compte tenu de
la gravité des crimes, du nombre importante des victimes civiles, et de
la répétition de ces actes qui ont été
perpétrés plus d'une fois. Dans ce cas on peut supposer que ces
attaques poursuivaient bien une politique préalablement
planifiée. Il est vrai que la situation de conflit armé aidant,
il n'est pas impossible de qualifier ces actes de crimes de guerre. Le
raisonnement que nous tenons est cependant le suivant : ces actes
s'inscrivent dans une perspective d'attaques sporadiques et isolés
surtout que la zone d' interposition constatant le cessez le feu avait
créé une situation de relative accalmie dans le pays.
Enfin, les évènements de novembre 2004 sont
encore plus difficiles à qualifier : s'agissait-il simplement
d'actes de forces armées ou de terrorisme d'Etat? Il serait à
notre sens plus sage de se garder de toute conclusion hâtive,
précoce et prématurée, pour ne retenir pour l'instant que
la qualification plus générale de crime de droit commun commis
par les forces armées d' une puissance étrangère dans
l'exercice de ses fonctions sur la population d' un pays hôte. Nous
excluons à dessein la qualification de crime de guerre puisque la France
n'était apparemment pas partie au conflit. Il reste que la qualification
crime contre l'humanité ne paraît pas aller de soi.
138 Voir Albert CAMUS, L'homme
révolté, éd. Gallimard, collection Folio
139 Voir Jean-Marc SOREL, op.cit., p. 52. L'auteur
estime également que les définitions du terrorisme, si elles
apparaissent dans les conventions récentes restent
énumératives, descriptives et, pour tout dire, quelque
peu « fourre- tout ». « Ne faudrait-il pas
invoquer plutôt des approches du terrorisme (...) » au lieu
de définition du terrorisme ?
140 Ibid., pp. 39-40.
* 141 C'est nous qui mettons
en italique
* 142 Cet article de la
Convention relative à l'aviation civile internationale se lit
ainsi : « a) Les Etats contractants reconnaissent que
chaque Etat doit s'abstenir de recourir à l'emploi d'armes contre les
aéronefs.
* 143 Voir Georges
KYRIAKOPOULOS, La sécurité de l'aviation civile en droit
international public, Sakkoulas/Bruylant, Athènes, 1999 cité
par Jean-Christophe MARTIN, op.cit , p. 239
144 L'emploi de l'adverbe
« notamment » autorise à penser que
l'énumération n'est pas limitative.
145 Dans la résolution du 7 décembre
2001 sur « La contribution de l'Organisation pour l'interdiction de
l'arme chimique (OIACI) à la lutte mondiale contre le
terrorisme » (EC-27/DEC.5), le Conseil exécutif affirme que
l'application intégrale et efficace des dispositions de la Convention de
1993 « constitue en soi une contribution à la lutte mondiale
contre le terrorisme ».
* 146 Sont des armes
chimiques au sens de la Convention les produits chimiques toxiques et leurs
précurseurs à l'exception de ceux qui sont destinés
à des fins non interdites par la Convention ; les munitions et
dispositifs spécifiquement conçus pour provoquer la mort ou
d'autres dommages par l'action toxique des produits chimiques toxiques qui
seraient libérés du fait de l'emploi de ces munitions et
dispositifs ; les armes chimiques abandonnées et anciennes.
* 147Seules les conventions de
la Ligue des Etats arabes (art. 3) de l'OCI (art. 3, 1) et de l'OUA (art. 4
paragraphe 1) mentionnent l'interdiction de soutenir le terrorisme.
148 Voir I. FICHET-BOYLE et M. MOSSE,
« L'obligation de prendre des mesures internes nécessaires
à la prévention et à la répression des
infractions », in H. ASCENSION, E. DECAUX et A. PELLET (dir.pub),
Droit international pénal, Pedone, Paris, 2000, pp. 115-128 et
817-886
* 149Voir par exemple
Affaire de la Fonderie du Trail, sentence arbitrale du 11 mars
1941.
* 150 Voir le
deuxième rapport de P. S RAO à la CDI, A/CN.4/501, 5 mai 1999,
p. 6 para. 20
* 151 L'obligation de
vigilance porte aussi sur la prévention des actes de terrorisme commis
sur le territoire de l'Etat contre des intérêts d'un autre Etat,
par exemple la protection d'une ambassade. L'Association de droit international
a ainsi affirmé que l'Etat a une obligation générale de
prévention : « a State is legally obliged to exercise due
diligence to prevent the commission of acts of international terrorism within
its jurisdiction » : Rapport de la 61ème
Conférence de l'International Law Association
* 152 Rapport A/8710/Rev.
1, Ann. CDI, 1972, vol II, p. 345.
* 153 Est incriminé
par l'article 2 non seulement le fait de fournir des fonds, mais aussi de
réunir des fonds à des fins terroristes. Peu importe que les
fonds soient issus d'activités légales ou illégales et
l'article1 retient une définition très large du terme
« fond » : « Fonds s'entend des biens de
toute nature, corporels ou incorporels, mobiliers ou immobiliers, acquis par
quelques moyens que ce soit, et des documents ou instruments juridiques sous
quelque forme que ce soit, y compris sous forme électronique ou
numérique, qui attestent un droit de propriété ou un
intérêt sur ces biens, et notamment les crédits bancaires
les chèques de voyage... »
154 Voir préambule alinéa ( c ), Le
Conseil de sécurité, « Réaffirmant
également sa condamnation sans équivoque des attaques
terroristes commises le 11 septembre 2001 à New York, à
Washington et en Pennsylvanie, et exprimant sa détermination
à prévenir tous actes de ce type » (C'est nous
qui soulignons).
155 Voir § 2 (a) de la Résolution
1373
* 156 Cf. § 1 (d) de la
Résolution 1373
* 157 Cf. § 2 (d) de la
Résolution 1373
* 158 Cf.
Résolution : « L'asile en droit international
public », Session de Bath (1950), Ann. IDI, 1950, vol., p.
375
* 159 Rec. CIJ,
1950, p. 284
* 160 Voir en ce sens
Résolution de l'AGNU 217 A (III) du 10 décembre 1948 et article 4
de la « Déclaration sur l'asile territorial »,
Résolution 2312.
* 161 Nous y reviendrons
* 162 L'alinéa a)
concerne l'interdiction d'organiser, financer et tolérer les
activités terroristes et de laisser son territoire être
utilisé pour l'entraînement des terroristes.
* 163 Voir François
DUBUISSON, « Vers un renforcement des obligations de diligence en
matière de lutte contre le terrorisme ? », in K.
BANNELIER et al. (dir.), Le droit international face au terrorisme,
op.cit., pp. 151-152
164 Au niveau conventionnel, la Convention de
l'OUA contient l'obligation de « s'assurer, en accordant l'asile, que
le demandeur d'asile n'est pas impliqué dans un acte
terroriste » (art. 4, 2, g).
* 165« Aucune
disposition de la présente Charte n'autorise les Nations Unies à
intervenir dans les affaires qui relèvent essentiellement de la
compétence nationale d'un Etat (...) » ;
* 166« (...)
toutefois, ce principe ne porte en rien atteinte à l'application des
mesures de coercition prévues au Chapitre VII ».
* 167 Patrick
DAILLIER ; Alain PELLET, Droit international public, LGDJ, Paris,
7ème éd., 2002, p. 443
168 Ces difficultés ont pour nom entre
autres, guerres fracticides, famine, épidémies, pauvreté,
mauvaise gouvernance...
* 169 Pour remonter dans le
temps sur les concertations qui ont présidé à
l'élaboration de cette convention, voir Roch Gnahoui DAVID,
« Le terrorisme : cadre juridique au plan de l'Union
africaine », SOS, ATTENTATS, Terrorisme, victimes et
responsabilité pénale internationale, op.cit. pp. 102 et s.
On note avec cet auteur que les réflexions sur le terrorisme ont
véritablement commencé à partir de 1992.
170 « Réaffirmant le droit
légitime des peuples à l'autodétermination et à
l'indépendance, conformément aux principes du droit international
et aux dispositions des Chartes de l'Organisation de l'Unité Africaine
et des Nations unies, ainsi que de la Charte africaine des droits de l'homme et
des peuples ».
171 La Convention arabe de lutte contre le
terrorisme a été adoptée le 22 avril 1999 au Caire et est
entrée en vigueur le 7 mai 1999
172 La Convention de l'Organisation de la
Conférence islamique (OCI) sur la lutte contre le terrorisme
international a été adoptée à Ouagadougou le
1er juillet 1999.
173 Cf. article 4 pour la convention africaine et
article 3 pour les conventions arabe et islamique.
* 174 Selon le
Dictionnaire de droit international public de Jean SALMON (dir. pub.),
l'obligation de vigilance est l' « observation requérant
d'un sujet de droit international de protéger les Etats
étrangers, leurs représentants et leurs ressortissants ou des
espaces, contre tout acte illicite perpétré par des particuliers,
que ces actes se réalisent sur son
territoire ou sous sa juridiction ou sous son
contrôle », op.cit, p. 770
* 175 Cf. Convention de
l'OUA : article e) ; Convention de la Ligue arabe : article 3, I
paragraphe 8 ; Convention de l'OCI : article 3, A) paragraphe 8
* 176 Cf. article 3,
paragraphe 2, 5 des Conventions arabe et islamique, et également
article 4 paragraphe 2, i de la Convention africaine.
177 Cf. § 1 de la Convention
européenne.
* 178 L'article 3 § 1
cite « la Convention européenne de sauvegarde des Droits de
l'Homme et des libertés fondamentales, (...) le Pacte international
relatif aux droits civils et politiques, et d'autres obligations relatives au
droit international, lorsqu'ils sont applicables ».
* 179 Cf. article 3 § 2
de la Convention
180 Cf. article 3 § 3 de la Convention
* 181 Cf. article 3 § 4
de la Convention
* 182 Voir Sandrine SANTO,
« L'ONU face au terrorisme », GRIP, 2007, wesite
www.grip.fr
* 183 Nous citons :
« 6. Pour combattre efficacement la multiplication des actes de
terrorisme, leur caractère et leurs effets internationaux croissants,
les Etats doivent renforcer leur coopération dans ce domaine, en
particulier en rendant systématique l'échange d'information sur
la prévention du terrorisme et les moyens de le combattre ».
* 184 Voir
Résolution 44/ 219 (1989), paragraphe 4 (d) et 46/51 (1991), paragraphe
4.
* 185 Voir article 13 de la
Convention
* 186 Les articles 15 ( b )
du traité de 1997 sur les attentats terroristes à l'explosif et
l'article 7 paragraphe1 (b) de la Convention de 2005 sur le terrorisme
nucléaire précisent en effet que les Etats contribuent à
la prévention de ces actes terroristes « en
échangeant des renseignements exacts et
vérifiés en conformité avec les dispositions de
leur législation internes. ». L'ajout pourrait emporter
comme conséquence immédiate le filtrage des informations à
fournir, puisqu'il s'agit bien évidemment d'informations
vérifiées et exactes.
187 § 2 (b).
* 188 Cf. Rapport de la CDI
sur les travaux de sa 24ème session, A/8070/REV.1,
Ann CDI, 1972, vol II, p. 345
* 189 Cf. article 3, I, 2
* 190 Cf. article 18 de la
Convention
* 191 Voir Sandra SZUREK,
« La lutte internationale contre le terrorisme sous l'empire du
Chapitre VII : un laboratoire normatif », RGDIP, 2005,
pp. 31-33
* 192 Cf. document du CCT
S/AC. 40/2003/SM. ¼ du 6 mars 2003, p. 1
* 193 Cf. article 2 de son
Statut.
* 194 Voir A. HUET et R.
KOERING-JOULIN, Droit pénal international, Thémis, PUF,
Paris, 2ème éd., 2001,
p. 304
195 Nous notons à ce propos la nature assez
singulière de L'OIPC. En effet, cet organe procède non d'un
traité classique mais plutôt de la seule volonté de l'AGNU
qui a adopté, en 1956 à Vienne, le Statut de la défunte
Commission internationale de police criminelle, l'ancêtre d' Interpol.
Elle a été négociée non par les Etats mais
directement par les autorités de police. L'OIPC n'est donc pas une
organisation intergouvernementale au sens propre du terme.
196 La reconnaissance a été implicite
en 1971 (Résolution 1579) puis explicite en 1975 (Décision 109,
LIX). Auparavant, l'OIPC avait le statut d'ONG aux Nations Unies. Voir Jean
MONTREUIL, « Organisation internationale de police
criminelle (Interpol) », Juris-Classeur Droit international,
Fascicule 405-30, p. 7.
198 Voir l'article 3 de son Statut,
également la Résolution de l'Assemblée
générale d'Interpol n° 7 de sa 53ème
session (Luxembourg), AGN/53/RES/7, 1984, « Application de l'article
3 du Statut ».
199 Voir la Résolution n° 6 de sa
53ème session (Luxembourg), AGN/53/RES/6, 1984,
« Criminalité violente communément appelée
terrorisme », dans laquelle l'Assemblée générale
de l'OIPC reconnaît que le caractère politique d'une infraction
est déterminé par le droit interne mais que le terrorisme doit
être combattu. 200 Dans la Résolution n° 6
AGN/53/RES/6, 1984 précitée, l'OIPC considérait qu'il
était essentiel de combattre le terrorisme. Il ressort en outre de la
Résolution AGN/53/RES/7, 1984, précitée que le terrorisme
ne relève pas de l'interdiction de l'interdiction de l'article 3 du
Statut de l'OIPC.
200 La Convention a été établie
par acte du Conseil de sécurité le 26 juillet 1995, JOCE
C 316 du 27 novembre 1995. L'Office est créée par l'article 1
paragraphe 1 de la Convention.
* 201 Cf. article
2 § 2 de la Convention Europol
202 Cf. article 3 § 1 de la Convention
Europol
203 Cf. articles 6 à 9 de la Convention
Europol
204 Les attentats du 11 septembre ont
engagé l'OTAN dans la lutte contre le terrorisme en vertu de l'article 5
du traité.
205 L'article 4 du Protocole de 2004 à la
Convention de l'OUA sur la lutte contre le terrorisme prévoit que le
Conseil de paix et de sécurité de l'OUA récemment
rebaptisée UA, doit entre autre, mettre en place un système
opérationnel de collecte, traitement et diffusion de l'information
relative au terrorisme.
* 206 Le Groupe de
réflexion sur les implications du terrorisme pour les politiques de
l'ONU a recommandé dans son rapport de « prendre en compte les
problèmes liés au terrorisme dans les mandats des
opérations de maintien de la paix, par exemple en s'assurant que les
forces de la police civiles des Nations Unies suivent une formation
appropriée aux mesures permettant d'identifier et de combattre les
groupes terroristes » : Rapport A/52/273, p. 15
(Recommandation 23).
207 Voir Résolution 1345 (2001) du Conseil de
sécurité, § 1 et 10.
* 208 Cf. Rapport de la MINUK
sur l'application de la Résolution 1244 (1999) du Conseil de
sécurité, S/2001/600, p. 7, paragraphe 27, p. 8, paragraphe
32.
209 Cf. Rapport du Secrétaire
général des Nations Unies sur les « Mesures visant
à éliminer le terrorisme international », A/58/116,
2003, pp.13-14.
* 210 Cf. § 5 de ladite
déclaration
* 211 Consulter le Document
sur le programme de l'ONUDC en matière d'assistance technique sur le
site Internet :
www.unodc.org/pdf/crime/terrorism
212 Cf. article 7 § 2 (a) du Protocole
* 213 Le mot sanction ne
doit pas faire illusion et doit être compris au sens strict du terme.
Ainsi, stricto sensu Le vocable « sanctions » renvoie à
un processus judiciaire ou disciplinaire, et s'écarte de ce pas de la
logique des mesures coercitives du Conseil de sécurité,
lesquelles relèvent avant tout de la police internationale. (voir Jean
COMBACAU et Serge SUR, op.cit, p. 646)
* 214 La notion de
« contrainte » croule sous le poids d'une vive
polémique : appréhendée stricto sensu, elle
serait toute forme de pression autre que le recours à la force, d'une
gravité suffisante pour pouvoir infléchir la décision
d'une personne (physique ou morale). Cette définition très
restrictive est quelque peu étriquée. Aussi, semble-t-il loisible
de recourir au sens généralement admis du mot.
Appréhendée lato sensu, la contrainte doit être
entendue au sens habituel de « pression de quelque forme que ce soit
qui porte atteinte au libre arbitre d'un sujet de droit ». Dans ce
sens très large, la contrainte inclut le recours à la force
armée, y compris la force non armée.
Alain PELLET, Patrick DAILLIER, op.cit, p. 929
* 215 Des penseurs aussi
variés que Aristote ( dans Politique, Jean Aubonnet, Paris,
Les belles lettres, 1971), Blaise PASCAL (dans Pensées, 1671,
posthume, Brunschwicg, Paris, Hachette, 1897), SAINT-AUGUSTIN, (dans La
cité de Dieu, in OEuvres de saint Augustin, 12 vol, G.
Bardy, Paris, Desclée de Brouwer, Bibliothèque augustinienne,
1975-1989, Emmanuel KANT ( dans Projet de paix perpétuelle,
esquisse philosophique, Jean Gibelin, Paris, 1999), ont réfléchi
sur la question. Les juristes non plus ne sont pas restés insensibles
à cette préoccupation. Pour le Doyen CARBONNIER, « le
droit est la politesse de la force » (dans Flexible droit,
Paris, LGDJ, 8ème éd. 1995). Mais ce sont surtout les
juristes du droit international qui se sont interrogés sur les rapports
entre le droit et la force, de GROTIUS dans son célèbre opuscule
De jure belli ac pacis ( Le droit de la guerre et de la
paix, P. Pradier-Fodéré, présent. et éd.
Simone Goyard-Fabre, Paris, PUF, 1999), à G. SCELLE qui a
réfléchi sur la juridicité du recours à la force
(dans Précis du droit des gens, éd. du CNRS, 1984, p. 64
et s.) jusqu'à R-J DUPUY pour qui la paix par le droit est un mythe
(Résumé annuels des cours au collège de France,
Recueil de textes, « Dialectiques du droit
international », Institut du droit de la Paix et du
développement, Nice-Paris, éd. Pedone 1999, pp. 335-339).
* 216 Voir Patrick
DAILLIER ; Alain PELLET, Droit international public, LGDJ, Paris,
7ème éd., 2002, p. 935.
« Jusqu'en 1919, on ne veut voir dans la guerre
qu'une manifestation normale de la souveraineté des Etats ».
217 Pour aller plus loin sur cette question, voir
Thierry GARCIA, « Recours à la force et droit
international », Perspectives internationales et
européennes, mis en ligne le 21 juillet 2005, sur
http://revel.unice.fr/pie/document.html
218 Voir Michel VIRALLY, « Commentaire de
l'article 2 paragraphe 4 », in La Charte de l'Organisations
Des Nations Unies. Article par article cité par
Félix Sohuily ACKA, « La guerre pour la paix en Afrique :
de quel droit ? » , in Actualité
juridiques, n° 55, AIDD, Abidjan, 2007, p. 142.
* 219 Cf. article 2 §
4 : « Les membres de l'Organisation s'abstiennent, dans leurs
relations internationales, de recourir à la menace ou à l'emploi
de la force, soit contre l'intégrité territoriale ou
l'indépendance politique de tout Etat, soit de toute autre
manière incompatibles avec les buts des Nation Unies ». Il
faut toutefois reconnaître avec le Professeur Félix Sohuily ACKA
que le principe de l'interdiction du recours à la force est moins
explicite dans la Charte qu'en doctrine ou en droit positif. En doctrine par
exemple le principe est qualifié de « norme
impérative » par Patrick DAILLIER et Alain PELLET, (op.cit, p.
967), et revêt de ce fait valeur de règles de jus
cogens, catégorie de règles dont la violation entache de
nullité toute convention qui la méconnaîtrait (Joe
VERHOVEN, Droit international public, Bruxelles, Larcier 2000, p.
671). Cette érection du principe en norme de jus cogens est
d'ailleurs reconnue par le droit positif, la Commission du droit international
ayant retenu cette solution (Annuaire CDI, 1996, p. 270, paragraphe
1). La CIJ quant à elle tient l'interdiction pour « un
principe fondamental ou essentiel » (Activités militaires
et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, CIJ, Rec.
1986, p. 90, paragraphe 190). Pour aller plus loin sur la valeur du principe,
voir Félix Sohuily ACKA, op. cit., pp. 142 et s.
* 220 L'une des exceptions
au principe de l'interdiction du recours à la force armée se
trouve logée dans l'inusité article 107, relatif à la
possibilité d'action militaire contre les anciens Etats ennemis au
cours de la Seconde Guerre mondiale: « Aucune disposition de la
présente Charte n'affecte ou n'interdit, vis-à-vis d'un Etat qui,
au cours de la Seconde Guerre mondiale, a été l'ennemi de l'un
quelconque des signataires de la présente Charte, une action entreprise
ou autorisée, comme suite de cette guerre, par les gouvernements qui ont
la responsabilité de cette action ».
* 221 Voir Antonio CASSESE ,
« Commentaire de l'article 51 » in Jean-Pierre COT ; Alain
PELLET; Mathias FORTEAU (dir.), La Charte des Nations Unies :
Commentaire article par article, 3ème édition,
Économica, Paris 2005, p.1328
* 222 Nous citons in
extenso « Aucune disposition de la présente Charte ne
porte atteinte au droit naturel de légitime défense, individuelle
ou collective, dans le cas où un Membre des Nations Unies est l'objet
d'une agression armée, jusqu'à ce que le Conseil de
sécurité ait pris les mesures nécessaires pour maintenir
la paix et la sécurité internationales. Les mesures prises par
des membres dans l'exercice de ce droit de légitime défense sont
immédiatement portées à la connaissance du Conseil de
sécurité et n'affectent en rien le pouvoir et le devoir qu'a le
Conseil, en vertu de la présente Charte, d'agir à tout moment de
la manière qu'il juge nécessaire pour maintenir ou
rétablir la paix et la sécurité
internationales ».
* 223 Voir Antonio CASSESE,
« Commentaire de l'article 51 de la Charte des Nations
Unies », in Jean-Pierre COT et al. (dir.pub.), La Charte des
Nations Unies, Commentaire article par article, 2ème
édition, Economica, Paris, pp. 789-790.
224 C'est nous qui mettons en italique
* 225 Il ne s'agirait
là que d'une « interprétation authentique de la Charte
des Nations Unies », voir J. ZOUREK, « Enfin une
définition authentique de l'agression, AFDI, 1974, p. 28. On
peut considérer que la Résolution en question a une valeur
coutumière : voir CIJ, Aff. Activités militaires et
paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, 27 juin 1986,
Rec. CIJ, 1986, p.103 § 195.
226 Cf. Jean SALMON, Dictionnaire de droit
international public (dir.), op.cit, p. 52
227 Cf. Avis du 9 juillet 2004 relatif aux
Conséquences juridiques de l'édification d'un mur dans le
territoire palestinien occupé, Rec. CIJ, 2004,
p.194 § 139.
* 228L'article 51
précise d'ailleurs que les mesures prises par
l'Etat « n'affectent en rien le pouvoir et le devoir qu'a le
Conseil, en vertu de la présente Charte, d'agir à tout moment de
la manière qu'il juge nécessaire pour maintenir et
rétablir la paix et la sécurité
internationales ».
229 Et pourtant, plusieurs Etats ont
prétendu recourir à la force armée au titre de la
légitime défense préventive. C'est principalement le cas
d'Israël qui s'en est prévalu à plusieurs reprises, en 1967
contre l'Egypte, en 1975 contre le
* Liban, en 1981 contre l'Irak
(réacteur nucléaire) ; c'est aussi le cas des USA, qui ont
invoqué le concept au soutien à leurs offensives contre le Soudan
et l'Afghanistan, en 1998, et tout récemment contre l'Irak en 2003 s'est
forgé le doctrine de la préemption ou preemptive self
defense (sous le prétexte fallacieux de la détention d'armes
de destruction massive par l'Irak). Nous y reviendrons dans les
développements ultérieurs.
* 230 La Résolution
1373 est à notre sens un catalogue inédit de règles en
matière de lutte contre le terrorisme. Voir ladite résolution en
Annexe.
* 231 Résolution 1373,
préambule, § 5
232 Voir Luigi CONDORELLI, « Les attentats
du 11 septembre et leurs suites : où va le droit international?
RGDIP, 2001, p. 841.
* 233 Voir Patrick
DAILLIER, « Les Nations Unies et la légitime
défense », in Rostane MEHDI, Les Nations Unies et
l'Afghanistan, 11èmes Rencontres internationales
d'Aix-en-Provence, Pedone, Paris, 2003, p. 117 et en particulier note 42,
cité par Jean-Christophe MARTIN op.cit, p. 292. L'auteur estime que
l'autorisation d'exercer la légitime défense s'éteint
juridiquement avec la Résolution 1390 et souligne
l'ambiguïté des relations entre les forces armées
américaines et la Force internationale d'assistance et de
sécurité.
* 234 Voir Antonio CASSESE,
op.cit, pp 1328 et s. La CIJ a noté dans plusieurs affaires (notamment
dans son arrêt du 27 janvier 1986 relatif aux Activités
militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci :
CIJ. Rec., 1986,
* p.103, §194, son avis
consultatif de 1996 relatif à La licéité de la menace
ou de l'emploi de l'arme nucléaire : CIJ.
Rec. 1996 (I), p. 245, § 41, et son arrêt du 6 novembre
2003 relatif à l'Affaire des plates-formes
pétrolières : CIJ. Rec. 2003, pp. 35-37, § 73-77)
que l'exercice de la légitime défense est soumis, en vertu du
droit international coutumier, aux doubles critères de
nécessité et de proportionnalité.
* 235Ibid.
* 236 En 1975, le
délégué israélien avait soutenu la thèse
contraire, lors d'une intervention au Conseil de sécurité, en
affirmant, après avoir cité l'article 51de la Charte qu':
« Aucun principe ou disposition de la Charte n'interdit des
changements de frontières, en particulier après le recours
à la force en vertu du droit de légitime défense et tout
particulièrement lorsqu'il n' y a pas de frontières
internationales sûres entre la victime de l'agression et les Etats qui
n'ont cessé depuis 25 ans, de se livrer à la guerre contre elle,
en violation de la Charte ». (s/ 1733ème
Séance, 20 juillet 1973, § 75). Antonio CASSESE y répond,
estimant que cette thèse est sans fondement, ce qui explique qu'elle ait
été rejetée par la quasi totalité des Etats (ibid.
pp. 1333-1334).
* 237 Voir Pierre D'ARGENT et
al., « Article 39 » » in Jean-Pierre COT ; Alain
PELLLET ; Mathias FORTEAU (dir.pub.) , La Charte des Nations Unies,
commentaire par commentaire, Economica, Bruylant, Bruxelles,
3ème éd., 2005, p. 1133
* 238 Ibid., p. 1154
* 239 Cf. S/ 23500
240 Cf. A/47/277
* 241 Cf. rapport du
Groupe de personnalités de haut niveau sur les menaces, les défis
et les changements, 2 décembre 2004, A/625, p. 2
*
* 242 Il s'agit de menaces
d'ordre économiques (pauvreté), de conflits
interétatiques, de conflits internes d'armes nucléaires, de la
criminalité organisée. A noter cependant que le Professeur
Patrick DAILLIER se refuse à aller au-delà des situations
classiques, ne retenant pas ainsi les hypothèses de crises alimentaires,
les effets transfrontières des violations massives des droits de l'homme
ou les perspectives terroristes. Voir « Article 42 », in
Jean Pierre COT et al. (dir. pub.), La Charte des Nations Unies,
Commentaire article par article, op.cit., p.1249.
243 Voir notamment la Résolution 1373
(2001), préambule, paragraphe 4 « Réaffirmant
(...) que (...) tout acte de terrorisme international, constitue (nt) une
menace à la paix et à la sécurité
internationales ».
244 Voir Patrick DAILLIER, « Article
42 » ibid., p. 1241
245 R. ZACKLIN, « Le Chapitre
VII de la Charte des Nations Unies », Colloque SFDI de
Rennes, 1994, Pedone, Paris, 1995, p. 194
246 Voir Patrick DAILLIER, op. cit., p. 1249
*
*
*
*
247 Cf. Rapport du groupe des personnalités
éminentes, 2004, point 54, p. 94/ Voir aussi Avis consultatif de la CIJ
relatif à Certaines dépenses des Nations Unies, CIJ,
Rec. 1962, p. 165 : « L'action qui est uniquement de
la compétence du Conseil de sécurité est celle dont il est
fait mention dans le titre du Chapitre VII ».
248 Voir R.B RUSSEL et J.E MUTHER, « A
history of United Nations Charter, Brookings Institution, Washington, 1958, p.
676) cité par Patrick DAILLIER, « Article 42 »
in Jean-Pierre COT ; Alain PELLLET ; Mathias FORTEAU (dir.), La
Charte des Nations Unies, commentaire par commentaire, Economica,
Bruylant, Bruxelles, 3ème éd., 2005, p.1252).
* 249 Cf. Avis de 1949,
CIJ Rec. 1949, p. 182 : « Selon le droit
international, l'Organisation doit être considérée comme
possédant ces pouvoirs (implicites) qui, s'ils ne sont pas
expressément énoncés dans la Charte, sont, par une
conséquence nécessaire, conférés à
l'Organisation en tant qu'essentiels à l'exercice des fonctions de
celle-ci... »
*
* 250 Nous avouons que le
terme même de « démonstrations »
résiste à notre compréhension ; s'agit-il de
contrôles militaires de la navigation maritime ou
aérienne comme le laisse penser le Professeur Alain PELLET ?
251Telle semble être la leçon des
critiques pour le manque d'encadrement ou de contrôle a priori
ou a posteriori des bombardements de l'OTAN en Serbie lors de
l'Affaire du Kosovo en 1999.
*
*
* 252Il convient de
souligner que certaines actions qui, à première vue, pourraient
être considérées comme relevant de l'article 42, n'ont
aucun rapport avec ce texte. Ainsi les Opérations de maintien de la paix
(OMP), notion inventée par la pratique des Nations Unies, non
prévue par la Charte se distinguent des opérations de
rétablissement autoritaire de la paix face à une agression ou
plus généralement face à une menace ou une situation de
rupture de la paix. Suivant l'avis consultatif de la CIJ, du 20 juillet 1962,
les OMP n'impliquent pas en principe de mesures coercitives contre un Etat
coupable d'un acte d'agression ou d'une atteinte à la paix et la
sécurité internationales et qu'elles ne peuvent être
entreprises qu'avec le consentement de l'Etat intéressé
(CIJ, Rec. 1962, pp. 170-171, p. 177)
253 Mme Brigitte STERN fait également
observer que l'article 42 qui aurait pu être utilisé à bon
droit dans le contexte de l' « après 11
septembre » comme ce fut le cas dans la crise du Golfe le 17 janvier
1991, a paradoxalement été jeté aux oubliettes,
relégué aux calendes grecques. Voir Brigitte STERN,
« Le contexte juridique
de l'après 11 septembre 2001 », in Karine
BANNELIER et al. (dir. pub.), op.cit., pp. 15 et s.
254 Ainsi selon la règle coutumière
énoncée dans le premier principe de la Résolution 2625
(XXV), l'interdiction couvre le soutien d'un Etat au terrorisme :
« Chaque Etat a le devoir de s'abstenir d'organiser et d'encourager
des actes de guerre civile ou des actes de terrorisme sur le territoire d'un
autre Etat, d'y aider ou d'y participer, ou de
* tolérer sur son territoire
des activités organisées en vue de perpétrer de tels
actes, lorsque les actes mentionnés dans le présent paragraphe
impliquent une menace ou l'emploi de la force ».
*
* 255 Il faut rester
très lucide, dans l'abord de cette question puisque la CIJ a
considéré que « le simple envoi de fonds aux Contras
(...) ne représente pas en lui-même un emploi de la force »
(Rec. CIJ, 1986, arrêt de 1986 relatif aux Activités
militaires et paramilitaires p. 119, § 228 ainsi que p. 127,
paragraphe 247).
* 256 La CIJ a
estimé dans le même arrêt que « (...) l'appui
fourni par les USA, jusqu'à la fin septembre 1984 aux activités
militaires et paramilitaires des Contras au Nicaragua, sous forme de soutien
financier, d'entraînement, de fournitures d'armes, de renseignements et
de soutien logistique constitue une violation indubitable du principe de
non-intervention (Rec. CIJ, 1986, p. 124, paragraphe 242).
* 257 Il faut toutefois
souligner avec Alain PELLET et Patrick DAILLIER que le principal
problème juridique posé par les mesures de rétorsion, par
hypothèse licites, tient précisément à la
définition de ce que l'on peut appeler « seuil de
licéité ». S'il n'est pas douteux en effet, qu'un Etat
peut entretenir ou ne pas entretenir de relations diplomatiques, commerciales
ou autres avec un autre Etat, en l'absence de tout engagement conventionnel
contraire, il reste que cette liberté n'est sans doute pas
absolue : limité d'une part par l'obligation faite aux Etats de
respecter les normes impératives du droit international (jus
cogens), elle l'est également par l'interdiction de l'abus de droit
(op.cit, p. 957).
* 258 Publiée in
RGDIP, 1986, pp. 811-812
* 259 La CIJ a reconnu en
la matière « le pouvoir discrétionnaire qu'a tout Etat
accréditaire de rompre les relations diplomatiques avec un Etat
accréditant et de demander la fermeture immédiate de la mission
coupable » (Rec. CIJ, 1980, p. 41 paragraphe 85),
de sorte à faire admettre l'idée selon laquelle,
« aucun Etat n'a l'obligation d'entretenir des relations
diplomatiques ou consulaires avec un autre » ( Affaire Personnel
diplomatique et consulaire des Etats-Unis à
Téhéran ; Ordonnance en indication de mesures
conservatoires du 15 décembre 1979, Rec. CIJ, 1979, p. 20,
paragraphe 41 ).
* 260 « Bien
entendu, un Etat n'est pas tenu de poursuivre des relations commerciales
particulières plus longtemps qu'il ne juge utile, si un traité ou
une autre obligation juridique spécifique ne s' y oppose
pas ». ( Rec. CIJ, 1986, p. 138, paragraphe 276). Ces
mesures peuvent cependant être illicites au regard d'obligations
conventionnelles spéciales, notamment en matière commerciale
où certains disposions peuvent s'en trouver affectées ( par
exemple Accord de Marrakech d'avril de 1994 : liberté de transit,
article V ; élimination des restrictions quantitatives, article
XI...)
* 261 C'est nous qui
mettons en italique
* 262 Voir paragraphe 1
(c) de la Résolution.
* 263 L'idée selon
laquelle le terrorisme constitue une menace à la paix et la
sécurité internationale a été diversement
reçue, accueillie, appréciée au sein de la doctrine. Nous
y reviendrons dans les développements ultérieurs.
* 264 Le G7 et l'Union
européenne utilisent cette méthode ( voir par exemple
Déclaration des ministres des Affaires
étrangères des Douze, Bruxelles, 27 janvier 1986, qui
prévoit de ne pas exporter d'armes « vers des pays qui
sont clairement impliqués dans le soutien au terrorisme ».
* 265 Voir
Alain PELLET ; Patrick DAILLIER, op.cit, p. 948 et s.
* 266 Cf.
définition de « contre-mesures » donnée par
la CDI et rapportée par PELLET et Patrick DAILLIER, ibid., p. 956
* 267 L'article 22 du
texte sur la responsabilité élaborée par la CDI et
adoptée par l'AGNU codifie donc le droit international en retenant les
contre-mesures
* 268 Cf. articles 49 et
53 du texte de la CDI précité
* 269 Cf. Sentence arbitrale
du 9 décembre 1978 dans l'Affaire concernant l'Accord relatif aux
services aériens du 27 mars 1946 entre les USA d'Amérique et la
France, RSA, vol. XVIII, p. 483, paragraphe 81.
270 Cf. Tribunal arbitral germano-portugais, sentence
arbitrale du 31 juillet 1928, RSA, vol. II, p. 1026
271 Ce ne serait là qu'une application conforme
au droit international qui ne reconnaît pas de manière
générale l'actio popularis. (CIJ, Aff.
Sud-Ouest africain, arrêt du 18 juillet 1996, Rec. CIJ,
1996, pp. 6 et 47)
*
*
* 272 Voir Denis AllAND,
Justice privée et ordre juridique international, cité
par Jean-Christophe MARTIN, op.cit,
p. 488
* 273 Voir Jean COMBACAU et
Serge SUR, p. 218
* 274 Arrêt
Gabcikovo-Nagymaros, 25 septembre 1997, § 83. Voir
également § 249 de l'arrêt de 1986 relatif à
l'Affaire des Activités militaires et paramilitaires, Rec.
CIJ, 1986, p. 127, article 49, § 1 et 2.
* 275 Cf. Article 49 al. 3
de l'Arrêt précité « Les contre-mesures
doivent, autant que possible, être prises d'une manière qui
permette la reprise de l'exécution des obligations en
question ».
* 276 Il est symptomatique
de remarquer que la plupart des ouvrages qui abordent le sujet ignorent la
distinction entre contre-mesures et mesures de rétorsion. Les auteurs
utilisent alternativement le termes rétorsions et contre-mesures mais
rarement les deux à la fois. Seul l'ouvrage précité de MM.
Alain PELLET et Patrick DAILLIER nous a permis d'opérer la distinction.
* 277 CPIJ, Affaire du
Lotus, 1927, Rec. CPIJ, série A, n° 10.
* 278 Comme la CPIJ l'a
constaté, « (...) le principe de la territorialité du
droit pénal est à la base de toutes les
législations » : Lotus, 7 septembre 1927, Rec.
CPIJ, Série A, arrêt n° 10, p.20
* 279 A l'exception de la
Convention de Tokyo de 1963 dont l'article 3 n'oblige que l'Etat
d'immatriculation de l'aéronef à établir sa
compétence, et de la Convention de la Haye de 1970 pour la
répression de la capture illicite d'aéronefs (article 4)
« pour laquelle la question ne se posait
guère » : l'objet de cette convention est en effet
limité aux aéronefs en vol. Cette convention assimile ainsi,
selon une fiction juridique acceptée, l'aéronef en vol au
territoire de l'Etat d'immatriculation voire de l'Etat d'exploitation.
280Cf. article 7 § 2, a.
*
* 281 Notons que la
décision-cadre du Conseil de l'Union européenne relative à
la lutte contre le terrorisme (13 juin 2002) précise en son article que
le principe de territorialité couvre l'infraction commise ou
préparée ou en partie dans un Etat membre, sans toutefois retenir
le critère des effets.
* 282 La CPIJ avait par
ailleurs constaté qu' « (...) il est constant que
les tribunaux de beaucoup de pays, même de pays qui donnent à leur
législation pénale un caractère strictement territorial,
interprètent la loi pénale dans ce sens que les délits
dont les auteurs au moment de l'acte délictueux se trouvent dur le
territoire d'un autre Etat, doivent néanmoins être
considérés comme ayant été commis sur le territoire
national si c'est là que s'est produit un des éléments
constitutifs du délit et surtout ses effets » : CPIJ,
Aff. Lotus, Rec.CPJI, Série A, n° 10, p. 23
* 283 Le problème
de la double incrimination des faits est plus perceptible en matière de
procédure d'extradition. Elle en est la règle de base. En effet,
« l'exigence d'une qualification pénale par la loi de l'Etat
requérant apparaît s'imposer au nom du bon sens » , voir
FOURNIER repris par André HUET et Renée KOERING-JOULIN,
Droit international pénal, Thémis, PUF, Paris,
2ème éd, 2001, p. 347. Et on imagine mal que l'Etat
requis extrade un individu pour un comportement que son système
juridique ne pénalise pas.
* 284 Supra, note de bas de
page 29.
* 285 Il faut souligner que
l'actuel code pénal ivoirien n'incrimine pas de façon expresse le
terrorisme. Cependant on peut noter que l'incrimination de certains actes
graves correspond bien à la qualification d'actes terroristes de la
convention antiterroriste de l'OUA. Il s'agit notamment des atteintes à
la sûreté de l'Etat, des insurrections armées.
* 286 C'est notamment le
cas d'Oussama BEN LADEN, déchu de sa nationalité saoudienne en
1994 et qui en situation d'apatridie.
* 287 La Convention de
Tokyo de 1963 est encore plus extensive en ce qu'elle prévoit en son
article 4 (b) qu'un Etat peut avoir compétence pour connaître
d'une infraction commise par ou contre « une personne ayant sa
résidence permanente » dans cet Etat.
* 288 Voir Jean Christophe
MARTIN op.cit, p. 138
289 Voir Brigitte STERN, « A propos de la
compétence universelle... », Liber amicorum Mohamed
Bedjaoui,
Kluver Law International, La Haye-Londres-Boston, 1999, p.775,
cité par Jean Christophe MARTIN ibidem.
290 Cinq autres conventions proposent aux Etats
d'établir leur compétence réelle : la Convention de
Tokyo de 1963 (art. 4, c) si l'infraction « compromet la
sécurité dudit Etat » ; les Conventions de New
York de 1997 (art. 6 par.2, b) et 2005 (art.9 paragraphe 2, b) quand
« l'infraction est commise contre une installation publique dudit
Etat située en
dehors de son territoire, y compris une ambassade ou des
locaux diplomatiques ou consulaires dudit Etat » ; la Convention
de New York de 1999 (art. 7 par. 2, b), quand « l'infraction avait
pour but, ou a eu pour résultat, la commission d'une infraction (... )
contre une installation publique dudit Etat située en dehors de son
territoire, y compris ses locaux diplomatiques ou
consulaires » ; et la Convention de l'OUA (art. 6 paragraphe e)
si « l'acte est commis contre la sécurité de cet Etat
partie ».
*
*
* 291 Voir Jean SALMON
(dir.pub.), Dictionnaire de droit international public, Bruylant,
Bruxelles, 2001, pp. 212-213
* 292 Comme c'est le cas
en matière de piraterie. La piraterie est un crime pour lequel le droit
international reconnaît une compétence universelle, autorisant la
capture des pirates en haute mer de tous les Etats. Cette règle a
été codifiée par la Convention de Genève sur la
haute mer de 1958 (articles 14 à 22), ainsi qu'à l'article 105 de
la Convention de Monte go Bay sur le droit de la mer (1982), qui autorise les
Etats à appréhender et juger les pirates en haute mer ou
« en tout autre lieu ne relevant de la juridiction
d'aucun Etat » (article 105). Il ne s'agissait jusque- là que
d'une simple faculté et non d'une obligation comme ce l'est maintenant
avec les conventions antiterroristes.
293 Nonobstant sa consécration
récente dans le droit international positif (à partir de 1970),
il est bien connu que l'adage a été préconisé par
Hugo de Groot dit GROTIUS dans son ouvrage monumental de 1625, De jure
belli ac Pacis (Le droit de la guerre et de la paix), Livre II,
Chapitre XXI, IV, 1, réed. PUF, Paris, 1999, p.513
294 Sur le caractère subsidiaire de la
compétence universelle en matière de terrorisme, se
référer aux explications fournies par le Professeur Paul
TAVERNIER, « Compétence universelle et terrorisme »
in SFDI, Les nouvelles
menaces contre la paix et la sécurité
internationales, journée franco-allemande, Pedone, Paris, 2004, pp.
237 et s., précisément p. 244. L'auteur note que l'analyse de
toutes les conventions qui établissent la compétence universelle
montre que celle-ci est subsidiaire à un double point de vue. Tout
d'abord la compétence universelle n'entre en jeu que s'il n'y a pas
d'extradition, (soit qu'elle n'ait été pas demandée, soit
qu'elle ait été refusée). Mais, par ailleurs, elle est
subsidiaire par rapport aux titres de compétence traditionnels que
l'Etat peut invoquer pour poursuivre les auteurs d'actes de terrorisme
* 295 Voir l'opinion
individuelle du Président Gilbert GUILLAUME dans l'Affaire du Mandat
d'arrêt du 11 avril 2000, Rec. CIJ, 2002, p. 38 paragraphe
7. « Un nouveau pas sera franchi (...) à partir de 1970 en vue
de lutter contre le terrorisme international. A cette fin, les Etats mirent en
effet sur pied un dispositif sur pied inconnu jusqu'alors : celui de la
compétence universelle, encore que subsidiaire »
*
*
* 296 Cette obligation y
apparaît implicitement à travers l'interdiction faite aux Etats
de « tolérer » sur leurs territoires respectifs
le terrorisme dans ses différentes manifestations (voir
préambule, avant dernier paragraphe).
297 Nous y reviendrons dans les développements
ultérieurs.
298 La règle de subsidiarité limite le
champ d'application des compétences internationales à tout ce qui
ne peut trouver de solutions dans l'ordre interne.
*
*
* 299 Ces deux conventions
étaient intimement liées dans la mesure où aux termes de
son article 53 paragraphe 2, l'entrée en vigueur de la
« Convention portant création de la Cour
pénale » restait tributaire de la « Convention pour
la prévention et la répression du terrorisme ». Cette
dernière n'ayant jamais reçu de ratifications et n'étant
de ce fait jamais entrée en vigueur, il est évident que la
«Convention portant création de la Cour pénale
internationale » n'a jamais pu être mise en oeuvre.
* 300 Voir les
développements en supra sur « Le constat
d'échec d'une définition générale et tangible du
terrorisme ».
301 Cf. Article Premier
302 Jean Christophe MARTIN, op.cit, p. 227
* 303 Comme l'analyse
à propos Mario BETTATI, « le texte de la ( Convention portant
création ce la Cour pénale internationale) suscita des
réserves encore plus vives. De nombreux gouvernements estimèrent
que l'institution d'une cour pénale internationale était inutile
et irréaliste » ; voir « Les échecs de
la SDN », in « La lutte internationale contre le
terrorisme », Problèmes politiques et sociaux,
n° 259, 30 mai 1975, La documentation française, p.24
* 304 Cf. Article 3
*
*
* 305 La compétence
ratione materiae du TPIR s'étend au génocide (article 2
du Statut), aux crimes contre l'humanité (article 3 du statut), et
à la violation de l'article 3 commun aux conventions de Genève
(article 4 du Statut).
* 306 L'article 4 du Statut
du TPIR mentionne expressis verbis : « Le tribunal
international pour le Rwanda est habilité à poursuivre les
personnes qui commettent ou donnent l'ordre de commettre des violations graves
de l'article 3 commun aux Conventions de Genève du 12 août 1949
pour la protection des victimes en temps de guerres, et du Protocole
additionnel II aux dites Conventions du 8 juin 1977. Ces violations comprennent
sans s'y limiter : a) les atteintes à la vie, à la
santé, et au bien être physique ou mental des personnes, en
particulier le meurtre, de même que les traitements cruels tels que la
torture, les mutilations ou toutes formes de peines corporelles ; b) les
punitions collectives ; c) la prise d'otages (italique
ajouté) ; d) les actes de terrorisme (italique
ajouté) ; e) les atteintes à la dignité de la
personne notamment les traitements humiliants et dégradants
(...) ».
* 307 L'article 3 commun
aux Conventions de Genève mentionne expressis verbis :
« En cas de conflit armé ne présentant pas un
caractère international et surgissant sur le territoire de l'une des
Hautes Parties contractantes, chacune des Paries au conflit sera tenue
d'appliquer au moins les dispositions suivantes : 1- les personnes qui ne
participent pas directement aux hostilités, y compris les membres des
forces armées qui ont déposé les armes et les personnes
qui ont été mises hors de combat par maladie, blessure,
détention, ou pour toute autre cause, seront en toutes circonstances
traitées avec humanité, sans aucune distinction de
caractère défavorable basée sur la race la couleur, la
religion ou la croyance, le sexe, la naissance ou la fortune, ou tout autre
critère analogue. A cet effet, sont et demeurent prohibés en tout
temps et en tout lieu, à l'égard des personnes mentionnées
ci-dessus :
-a) les atteintes à la vie et à
l'intégrité corporelle, notamment le meurtre sous toutes ses
formes, les mutilations, les traitements cruels, les tortures ou
supplices ; b) les pises d'otages (italique ajouté) ;
c) les atteintes à la dignité des personnes, notamment les
traitements humiliants et dégradants (...) ».
308 Voir en supra
309 On pourrait se demander ce que le Statut du
TPIR entend par « actes de terrorisme » ou du moins quels
sont les actes qu'il qualifie comme tels puisqu' a priori, ainsi qu'on
l'a démontré, la prise d'otages est exclue de la catégorie
de ces actes.
* 310 Voir Cécile
TOURNAYE, « L'apport des tribunaux ad-hoc à la
répression du terrorisme », in SOS, ATTENTATS, Terrorisme,
victimes et responsabilité pénale internationale,
Calman-Lévy, Paris, 2003, p. 417
311 La compétence ratione materiae
du TPIY s'étend aux infractions graves de Genève de 1949 (article
2 du statut), à la violation des lois et coutumes de la guerre (article
3), au génocide (article 4), aux crimes contre l'humanité
(article 5).
312 L'auteur précité rapporte dans
plusieurs affaires la prise en compte de la terreur en tant
qu'élément déterminant dans la définition du crime
contre l'humanité. Ainsi dans l'Affaire Krstic notamment, la
terreur infligée à la population civile a permis d'établir
le caractère forcé du transfert de cette population hors
Srebrenica. La terreur a aussi été prise en compte dans
l'appréciation des traitements cruels et inhumains reprochés
à l'accusé dans le cadre du chef d'accusation de
persécutions. Enfin le jugement de première instance dans
l'Affaire Blaskic a tenu compte de la terreur au stade de la peine, en
tant que circonstance aggravante. Le jugement cite ainsi, parmi les
circonstances aggravantes, « le recours à des moyens et
méthodes de combat aléatoires, disproportionnées et
terrorisantes, tels l'usage des bébés bombes, des
lance-flammes, grenades ou d'un camion bourré d'explosifs, mais
également les souffrances physiques et psychologiques évidentes
endurées par les survivants de ces évènements
brutaux. ». Ibid. pp. 417 et s.
* 313 Le délit
d'appartenance à une organisation criminelle était prévu
dans le Statut du Tribunal militaire international de Nuremberg, en 1945,
mais il n'avait alors été utilisé qu'avec parcimonie. On
lit expressis verbis à l'article 9 du Statut :
« Lors d'un procès intenté contre tout membre d'un
groupement ou d'une organisation quelconques, le Tribunal pourra
déclarer (à l'occasion de tout acte dont cet individu pourrait
être reconnu coupable) que le groupement, ou l'organisation criminelle
à laquelle il appartenait était une organisation
criminelle ».
314 Les attentas du 11 septembre feront l'objet de
développements plus approfondis dans la deuxième partie de notre
travail.
* 315 Pour James Mouangue
KOBILA, l'approche historique paraît d'autant plus intéressante
qu'elle a rarement été privilégiée dans certains
travaux antérieurs. L'auteur tout en les enjambant, révèle
avec finesse, dextérité et perspicacité les deux lignes de
césure doctrinales auxquelles l'on recourt traditionnellement pour
aborder la question du traitement du terrorisme : il s'agit notamment de
l'avant /après 1992 (date de l'attentat de Lockerbie) ou de
l'avant/ après 11 septembre 2001 ( date des attentats contre les
Twin Towers du World Trade Center ). Son analyse qui n'est pas moins
intéressante, se situe cependant de « part et
d'autre » de ces deux lignes de césure, ou plus exactement
« au-dedans et au dehors » de ces lignes comme dirait
DIDEROT, admirablement cité par l'historienne et romancière Assia
DJEBAR, dans son « Discours de réception » à
l'Académie française le 22 juin 2006. Voir James Mouangue KOBILA,
« Le processus d'intervention du Conseil de sécurité
dans la lutte conte le terrorisme international », in Recueil des
travaux du Centre d'études de l'Académie de droit international
de la Haye, 2007, p. 3.
En ce qui concerne la présente étude, sans s'y
perdre, elle fera une incursion dans le labyrinthe de la deuxième ligne
de césure- l'avant/ après 11 septembre 2001-
* 316 Voir respectivement les
Résolutions 313 (1972) du 28 février 1972 ; 508 (1982) et
509 (1982) des 5 et 6 juin
1982 ; 573(1985) du 4 octobre 1985.
317 Voir entre autres les Résolutions 527
(1982) du 15 décembre 1982 et 546(1984) du 6 janvier 1984.
*
* 318 Voir Résolution
41/38 du 20 novembre 1986.
* 319 Voir les positions des
Etats clairement reprises sur le site Internet du Centre de droit international
de
l'Université libre de Bruxelles
(http://www.ulb.ac.be/droit/cdi)
* 320 Sur ce point, voir
entre autres Pierre KLEIN, « Vers la reconnaissance progressive d'un
droit à des représailles
armées ? », in Karine BANNELIER et
al.(dir. pub), op.cit., pp 249-257.
* 321 Voir notamment sur ce
précédent, Olivier CORTEN et François DUBUISSON,
« Opération liberté immuable : une extension
abusive du concept de légitime défense »,
RGDIP, 2002, p. 57.
* 322 Lettre du 21
août 1998 adressée au président du Conseil de
sécurité, S/1998/789, reproduite à l'adresse
suivante :
http://www. ulb.ac.be/droit/
* 323 Voir notamment,
à propos de l'action menée contre l'Irak en 1993, les positions
de la France (S/PV. 3245, p.
13) ; du Japon (ibid., p. 16) ; du Brésil
(ibid., p. 18), de l'Espagne (ibid., p. 24)
* 324 Pour le sommaire de
cette affaire, voir David RUZIE, Droit international public, Dalloz,
Mémento, 18ème éd.,
Paris, 2006, pp. 216-217
* 325 L'article 38 du
statut de la CIJ évoquant les différentes sources du droit
international dont la coutume, définit
celle-ci comme « preuve d'une pratique
générale, acceptée comme étant de droit ».
Reflétant ainsi la pratique
de l'ensemble des Etats de la société
internationale, elle fait partie du droit international général
en tant que
l'une de ses sources principales à côté
du traité.
* 326 Cf.
l'énoncé de l'article 3 alinéa g, de ladite
résolution.
* 327 La Résolution
1368 (2001) utilise l'expression « droit inhérent »,
traduction de la langue anglaise de l'article 51
de la Charte. La Résolution 1373 emploie plutôt
l'expression plus compréhensible en français de « droit
naturel ».
* 328 Voir J. GREENSTOCK,
combating international terrorism : The contribution of the United
Nations,
contribution au symposium tenu à Venise les 3-4 juin
2002, site internat des Nations Unies :
http://www.un.org/french/docs/committees/1373.
* 329 Déclaration
sur les actions contre les Taliban. Voir aussi la déclaration de Gand du
19 octobre 2001 sur La lutte
contre le terrorisme, DAI, n° 23,
1er déc. 2001, p.920.
* 330 Bien entendu, cet
article est relatif à une clause de solidarité qui veut que les
autres Etats du traité de l'OTAN
interviennent même militairement pour venir à
bout d'une attaque dont l'un des Membres de cette
organisation serait la victime.
* 331 Voir
Déclaration : la réponse de l'OTAN au terrorisme,
DAI, n° 3, 1er février 2002, pp. 118-119. Cette
déclaration fait par ailleurs état du soutien
de nombreux autres Etats.
* 332 Citons la Georgie ,
Oman, le Pakistan, les Philippines, le Qatar, l'Arabie Saoudite, le Tadjikistan
, la Turquie et
l'Ouzbékistan.
* 333 Resolution
Strengthening Hemispheric Cooperation to Prevent, Combat, and eliminate
Terrorism et Terrorist
Threat to the America, 21 septembre 2001, ILM, 2001, vol.
XL, pp. 1270 et 1273
* 334 Voir Procès
verbaux des réunions de l'AGNU, A/56/ PV.44 et s. Les seuls Etats ayant
condamné ou critiqué
l'action militaire en Afghanistan sont : l'Irak, l'Iran,
la Corée du Nord, Cuba, et la Malaisie. Voir Luigi
CONDORELLI, « Les attentats du 11 septembre et leurs
suites : où va le droit international ? », op.cit,
p. 840,
note 7.
* 335 Voir les
résolutions 1368 (2001) et 1373 (2001) précitées.
336 Voir supra, pp. 52 et s.
337 Certains auteurs soutiennent qu'il ne serait pas
réaliste de rechercher dans les attaques du 11 septembre une
arme par nature, mais il faudrait plutôt considérer
les avions qui ont explosé comme une arme létale par destination.
Voir Pierre-Marie DUPUY, « La communauté internationale et le
terrorisme », in SFDI, Les nouvelles menaces contre la paix et la
sécurité internationales, Paris, Pedone, 2004, p. 65
338 Il faut souligner au passage que dans son
récent avis (en date du 9 juillet 2004) relatif aux
Conséquences juridiques de l'édification d'un mur dans le
territoire palestinien occupé, la CIJ a récusé le
recours à la notion de légitime défense et donc aussi
à la notion d'agression contre les actes d'un groupe non
étatique : « L'article 51 de la Charte reconnaît
ainsi l'existence d'un droit naturel de légitime défense en cas
d'agression armée par un Etat contre un autre Etat. Toutefois,
Israël ne prétend pas que les violences dont il est victime soient
imputables à un Etat étranger ». (paragraphe 139).
* 339 Il s'agit notamment
de l'Arabie Saoudite, des Emirats arabes unis et du Pakistan.
* 340 Voir par exemple la
Résolution 1267 (1999).
* 341 Voir entre autres
auteurs, Josiane TERCINET « Le Conseil de sécurité et
le terrorisme », in Stanislav KIRSCHBAUM (dir. pub.), Terrorisme
et sécurité internationale, Association Franco-canadienne
d'études stratégiques, Bruylant, Bruxelles, 2004 pp. 49 et s.
Voir également Pierre- Marie DUPUY, « La communauté
internationale et le terrorisme », in SFDI, Les
nouvelles menaces contre la paix et la sécurité
internationales, Paris, Pedone, 2004, pp. 37 et s. ; et Brigitte
STERN, « Le contexte juridique de l'après 11 septembre
2001 »,
in Karine BANNELIER et al.(dir. pub.), op.cit., pp. 17 et
s. ; Voir enfin James Mouangue KOBILA, « Le processus
d'intervention du Conseil de sécurité dans la lutte contre le
terrorisme international », in Recueil des
travaux du centre d'études de l'Académie du
droit international de la Haye », 2007.
* 342 Voir Pierre Michel
EISEMANN, « Attaques du 11 septembre et exercice d'un droit naturel
de légitime défense », in Karine BANNELIER,
Théodore CHRISTAKIS, Olivier CORTEN, Barbara DELCOURT (dir.pub.), Le
droit international face au terrorisme. Après le 11 septembre,
Pedone, Paris, 2001, pp. 239 et s, précisément, p. 242. Le
Professeur Pierre Michel EISEMANN admet une adaptation mutatis
mutandis de la légitime défense dans le contexte des
évènements du 11 septembre. Par là, l'on peut bien voir
que son analyse s'accommode mal d'une certaine ambiguïté. En effet,
on ne peut évoquer- en ce qui concerne les attentats du 11 septembre -
un « cas classique » de légitime défense, et
tenter de faire comprendre dans le même temps le fait que ces attaques
aient ouvert la voie à une adaptation mutatis mutandis de la
légitime défense. Des deux choses l'une et non les deux à
la fois. On comprend d'ailleurs difficilement que cette conviction qui souffre
d'un manque de cohérence, soit partagée par un autre auteur. Pour
une opinion convergente, voir Jean-Marc THOUVENIN, « Conclusions
générales » in SFDI, Les nouvelles menaces contre la
paix et la sécurité internationales, op.cit. pp. 11 et 12.
Cet auteur, citant, l'avis de la CIJ sur la licéité de la
menace et l'emploi de l'arme nucléaire du 8 juillet 1996,
(« la Cour ne saurait au demeurant perdre de vue le droit fondamental
qu'à tout Etat à la survie, et donc le droit qu'il a de recourir
à la légitime défense, conformément à
l'article 51 de la Charte, lorsque cette survie est en cause », CIJ,
Avis cons. du 8 juillet, 1996, §. 96), avoue peiner à croire qu'un
Etat agressé par une organisation privée, ne puisse pas
intervenir, alors que son droit « naturel » à la
légitime défense que lui commande sa survie, l'y
prédispose. Pour lui donc, il n'est pas interdit de penser qu'une
entreprise terroriste puisse porter atteinte à la survie d'un Etat par
une agression armée, en particulier si elle mettait en oeuvre des moyens
de destruction massive. A suivre mécaniquement sa logique, ne
courrait-on pas le risque de s'écarter du droit en versant dans du
sentimentalisme ?
343 Le rapport du pouvoir de facto au
pouvoir de jure renvoie au rapport de l'effectivité à la
légalité et par ricochet de la légitimité
à la légalité. Il s'agit d'une question qui semble
à première vue inextricable en droit. Dans la présente
espèce, c'est bien le pouvoir légal- quoiqu'en exil- qui semble
avoir été reconnu par la
communauté internationale, ( nouveau sujet de droit
international ?).
* 344 On savait seulement
jusque-là que Ben LADEN et son organisation Al-Qaida étaient
simplement les hôtes des Taliban. Bien plus, la composition
hétéroclite de l'organisation Al-Qaida au sein de laquelle
collaborent des personnes
de diverses nationalités en dit long sur le
caractère international de la nébuleuse terroriste, dont les
revendications excèdent celles d'une simple
organisation terroriste de type séparatiste comme l'ETA basque ou de
type nationaliste comme le FNL algérien. Al Qaida projette de vaincre
par tous les moyens les Etats-Unis d'Amérique qu'elle considère
comme le « grand Satan » pour faire éclore un
« nouvel ordre mondial » plus
juste.
345 Sur ce point précis de la question, se
référer aux analyses de MM. François DUBUISSON et de
Olivier CORTEN, « Lutte contre le terrorisme et droit de la
paix : une conciliation délicate », in Emmanuelle
BRIBOSIA et Anne WEYEMBERGH (dir. Pub.), Lutte contre le terrorisme et
droits fondamentaux, éd. Bruylant, Bruxelles, 2002, pp 59 et s.
Ces auteurs notent que la Résolution 1368 adoptée au lendemain
des évènements, soit le 12 septembre 2001 traduit en tout cas la
volonté des Nations Unies à se saisir du dossier, à
traiter elles-mêmes le problème. Cette conviction est davantage
renforcée par l'adoption ultérieure de d'autres
résolutions (1373 (28 septembre 2001) ; 1377 (12 novembre 2001);
1386 (6 décembre 2001).
* 346 Voir Pierre Marie DUPUY
« La communauté internationale et le terrorisme »,
in SFDI, Les nouvelles menaces contre la paix et la
sécurité internationales, Paris, Pedone, 2004, pp. 37 et
s.
* 347 Voir infra,
Section 2 : « La violation des normes internationales ».
348 Voir, Pierre- Marie DUPUY, ibid. p. 61 :
« Qui répondra sans hésiter à cette
interrogation ? » « Qui sait comment réagir
à bon escient contre un acte terroriste ? »
349 Ibid., p. 60.
* 350 Madame Evelyne
LAGRANGE et Monsieur Pierre Michel EISEMANN relèvent en ce sens
« la propension du Conseil de sécurité à
l'excès de pouvoir ». Voir Evelyne LAGRANGE et Pierre Michel
EISEMANN, « Article 41 », in Jean Pierre COT et al., La
Charte des Nations Unies : commentaire article par article,
3ème éd., Tome 1, Économisa, 2005, p. 1225.
351 Nous y reviendrons dans la conclusion de notre
exposé.
352 Voir Rés. CS 1535, Doc. Off. CS. NU, 2004,
49 36ème séance, Doc. NU S/RES/ 1535 au
2ème considérant du préambule.
353 Voir Yves JEANCLOS, « Terrorisme et
sécurité internationale », in Stanislav J. KIRSCBAUM
(dir. pub.), Terrorisme et sécurité internationale,
Bruxelles, Bruylant, 2004, pp. 13-45.
354 Voir James MOUANGUE KOBILA, op.cit. p. 3
* 355 Voir à ce
sujet Jean-Pierre QUENEUDEC, « Conclusion », in SFDI,
Les nouvelles menaces contre la paix et la sécurité
internationales, op.cit., p. 288. Pour cet auteur, dire qu'il existe une
menace contre la paix et la sécurité internationales a longtemps
signifié avant tout qu'il y avait un risque de déclenchement d'un
conflit armé entre deux ou plusieurs Etats, - pour autant, bien entendu,
que la paix puisse se définir comme étant essentiellement
l'absence d'état de guerre entre Etats. Evoquer une menace contre la
sécurité internationale, c'est faire référence,
semble -t-il, à une situation présentant un risque d'atteinte
soit à l'inviolabilité ou à l'intégrité
territoriale, soit à l'indépendance politique d'un ou plusieurs
Etats... ce qui peut aussi apparaître comme une menace pour la paix. La
sécurité internationale peut être définie comme un
état de tranquillité, du moins comme une situation de
stabilité existant au
sein d'un groupe d'Etats et résultant de l'absence de
véritables menaces contre la paix. L'auteur note donc que la conception
de la menace contre la paix et la sécurité internationales a subi
un élargissement depuis 1945
356 Voir Pierre KLEIN, « Le Conseil de
sécurité et la lutte contre le terrorisme : dans l'exercice
de pouvoirs toujours plus grands ? », in Revue
québécoise de droit international, Hors série ,
Québec 2007
Voir sur ce point, Jean-Marc SOREL,
« L'élargissement de la notion de menace contre la
paix », in SFDI, Le Chapitre VII de la Charte des Nations,
Paris, Pedone 1995, p. 52 cité par Pierre Klein
* 357 Voir Rés. CS
1054, 10ème considérant du préambule
* 358 Voir Rés. CS
1267, 8ème considérant du préambule
* 359 Cf. Rés. CS
1368, Doc.off.CS NU, 2001, 4370ème séance, Doc NU
S/RES/ 1368, art. 1er. ( Italiques ajoutés).
360 Cf. Rés. CS 1465, Doc. Off. CS. NU, 2003,
4706ème séance, Doc. NU S/RES/1465, art .
1er (Italiques
* 361 Mais, on peut se
demander à bon droit, à partir de quel stade le terrorisme
s'internationalise, les résolutions, toutes les résolutions
gardant un mutisme froid sur cet autre aspect du problème. Par les
victimes ? Par les auteurs ? Par ses répercussions
inadmissibles au plan humain ou humanitaire ?
* 362 Cf. Rés. CS.
1535, 2ème considérant du préambule ; voir
aussi Rés. CS 1566, Doc. Off. CS. NU, 2004, 5053ème
séance, Doc. NU S/RES/1566 au 7ème considérant
du préambule.
* 363 Voir James MOUANGUE
KOBILA, op.cit. p. 7
364 Voir Pierre KLEIN, ibid. p. 141
365 Voir Pierre KLEIN, loc.cit. p. 141
* 366 Sur ce point
précis, MM. Alain PELLET et Vladimir TZANKOV sont d'avis que
« même lorsqu'il s'agit de terrorisme international, on pouvait
fortement douter qu'il constituât toujours (...) » une menace
à la paix et à la sécurité internationales. Voir
Alain PELLET et Vladimir TZANKOV, « L'Etat victime d'un acte
terroriste peut-il recourir à la force armée ? »,
in SFDI, Les nouvelles menaces contre la paix et la sécurité
internationales Paris, Pedone, 2004, pp.95-107. Dès lors, on peut
tout aussi raisonnablement s'imaginer combien de fois des actes de terrorisme
de dimension interne, isolés et localisés peuvent
s'éloigner de pareille qualification. Pour illustration, l'attentat qui
a conduit à la mort récente de l'ex-premier ministre pakistanaise
Benhazir BUTHO peut-il être considéré comme une menace
à la paix et à la sécurité internationales ?
* 367 Il s'agit en
l'occurrence de la Résolution CS 748, Doc. Off. CS. NU, 1992,
3063ème séance, Doc. NU S/RES/748
368 L'article 103 mentionne expressis
verbis : « en cas de conflit entre les obligations des
Membres des Nations Unies en vertu de la présente Charte et leurs
obligations en vertu de tout autre accord international, les premières
prévaudront. »
369 Situation contre laquelle Mme Josiane TERCINET
a vite fait de s'insurger : « Le Conseil de
sécurité n'est pas un juge. Son rôle n'est pas de dire le
droit ; il est de maintenir la paix et la sécurité
internationales (...) », Josiane TERCINET « Le Conseil de
sécurité et le terrorisme », in Stanislav KIRSCHBAUM
(dir. pub.), Terrorisme et sécurité internationale,
Association Franco-canadienne d'études stratégiques, Bruylant,
Bruxelles, 2004, p. 50
* 370 Voir en supra, pp.36
et s.
* 371 C'est
précisément le cas de la Convention de 1999 sur la
répression du financement du terrorisme qui n'avait jusque-là pu
produire d'effet juridique, puisque cette dernière n'est pas encore
entrée en vigueur en raison d'un nombre particulièrement
réduit de ratifications.
372 Voir sur ce point Josiane TERCINET,
loc.cit.p.50 : Pour cet auteur, la Résolution 1373 du 28 septembre
2001 apparaît comme une assertion de pouvoir normatif ou
législatif sans précédent du Conseil de
sécurité. Elle poserait en effet des règles
générales de lutte contre le terrorisme international, qui
s'imposent en vertu de l'article 25 : (« Les Membres de
l'Organisation conviennent d'accepter et d'appliquer les décisions du
Conseil de sécurité conformément à la
présente Charte ») à tous les Etats membres de l'ONU,
et qui l'emportent en vertu de l'article 103 susmentionné sur toutes
obligations bilatérales ou multilatérales relatives au terrorisme
qui pourraient être en contradiction avec elles.
373 Madame Brigitte STERN croit pouvoir trouver les
causes de la naissance de ce pouvoir législatif dans le fait que l'ONU
qui a vu ces dernières années ses pouvoirs de coercition
militaire se réduire comme peau de chagrin, du fait de la volonté
unilatérale hégémonique des Etats-Unis de faire
« cavalier seul » dans la campagne antiterroriste- pour
parler comme René PASSET et Jean LIBERMANN-, et du fait du recours
intempestif au veto, a voulu compenser cette faiblesse en s'assignant d'autres
rôles. Voir Brigitte STERN, « Le contexte juridique de l'
après 11 septembre 2001 », in Karine BANNELIER et al. (dir.
pub. ) , op.cit., p. 29.
* 374 Pour un son de
cloche discordant ou dissonnant, voir Olivier CORTEN, « La
participation du Conseil de sécurité à
l'élaboration, à la cristallisation ou à la consolidation
de règles coutumières », in RBDI, 2004, notes
44, p. 562. L'auteur y opine que « les résolutions à
vocation généraliste édictées par le Conseil dans
le cadre de la lutte contre le terrorisme (les résolutions 1373(2001) et
1540(2004) se présentent comme des décisions de type
réglementaire, et non comme l'expression de règles
générales », dans la mesure où « ces
résolutions s'appuient sur un droit international général
(...) incidemment rappelé dans les
considérants ». Pour James MOUANGUE KOBILA, le Conseil serait
plutôt matériellement resté dans les frontières du
« pouvoir législatif limité » aux
circonstances de crise que lui reconnaît Hans KELSEN, en le
redimensionnant toutefois au caractère également permanent de la
crise. Voir James MOUANGUE KOBILA, op.cit., p.21.
375 Pour aller plus loin sur le Comité de
lutte contre le terrorisme, voir James MOUANGUE KOBILA, « La gestion
de la lutte contre le terrorisme par le Conseil de
sécurité », in Annuaire français de
Relations internationales, 2007.
* 376 Le juge Mohamed
BEDJAOUI qualifie ce contrôle de la CIJ de
« zéphyrien », à l'image de ce vent doux et
léger qu'est le zéphyr, comme pour traduire l'idée d'un
contrôle à la fois modeste et modéré exercé
à l'occasion par exemple de l'Affaire Certaines dépenses des
Nations Unies, 20 juillet 1962. Voir Mohamed BEDJAOUI, « Du
contrôle de légalité des actes du Conseil de
sécurité », in International Law at a time of
perplexity, Essays in Honour of Shabtai ROSENNE, Editor, Professor Yoram
DISTEIN, Associate Editor, Dr Mala TABORY, published by Martinus Nijohff
publishers, P.0 BOX 163, 3300 AD Dordrecht, The Netherlands, pp. 89-90.
G. CAHIN va jusqu'à qualifier ce contrôle de
« contrôle d'une intensité proche de
zéro ». Voir, G. CAHIN, « La notion de pouvoir
discrétionnaire appliquée aux organisations
internationales », RGDIP, 2003, p. 597, cité par
Pierre D'Argent et al., « Article 39 », in Jean Pierre COT
et al., op.cit., pp. 1131-1170 (note) et 1143-1144
377 Alors que par exemple dans sa Résolution
579 ( 1985), le Conseil demande instamment aux Etats « la mise au
point et (...) l'adoption de mesures efficaces, conformes aux règles
du droit international, destinées à faciliter la
prévention et la répression des actes de prise d'otages et des
enlèvements de toutes sortes » ( Italiques ajoutés).,
la Résolution 1269 ( 1999) relatives à diverses mesures
générales de lutte contre le terrorisme inclut quant à
elle la compatibilité des actes du Conseil, cette fois-ci, non plus avec
le droit international, mais avec le droit de la Charte. On
voit dès lors - pour paraphraser un auteur- poindre la zone grise de
chevauchement du droit international et du droit de la Charte. Voir James
MOUANGUE KOBILA, op.cit., p. 23. Tout ceci est d'ailleurs stigmatisé
par Evelyne LAGRANGE et Pierre Michel EISEMANN, qui parlent de
« l'application parfois brouillonne » de la Charte par le
Conseil, dans nombre de ces résolutions. Voir Evelyne LAGRANGE et Pierre
Michel EISEMANN, ibid., note 50, p. 1205.
* 378 Pour aller plus
loin, voir James MOUANGUE KOBILA, op., pp. 22 et s, précisément
p. 22. Cet auteur évoque à ce sujet une inconstance de la
prise en compte du droit international par le Conseil de sécurité
dans la lutte contre le terrorisme.
* 379 Voir à ce
propos René PASSET et Jean LIBERMAN, Mondialisation
financière et terrorisme : la donne a-t-elle changé
depuis le 11 septembre, op.cit., pp.85 et s.
380 E. De VATTEL, Le droit des gens ou
principes de la loi naturelle appliquée à la conduite et aux
affaires des nations et des souverains, 1758, Londres, Livre II, Chapitre
IV, p. 50
* 381 Cf. Arrêt,
Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua
précité.
* 382 Cf. Arrêt du 6
novembre 2003 relatif à l'Affaire des Plates-formes
pétrolières opposant les Etats-Unis à l'Iran,
Rec.CIJ, 2003, p. 189, paragraphe 57, p. 191, paragraphe 64, p. 195,
paragraphe 72 ; également Avis consultatif du 9 juillet 2004 sur
Les Conséquences juridiques de l'édification d'un mur dans le
territoire palestinien occupé, Rec. CIJ, 2004, p. 194, p.
194, paragraphe 139. La lecture que fait la Cour de l'article 51, ici, est
étroite.
383 Voir Jean COMBACAU et Serge SUR, Droit
international public, op. cit, 6ème édition, p.
626.
384 Ibid. p. 628
* 385 Voir Antonio CASSESE,
« Article 51 », in Jean-Pierre COT, Alain PELLET et Mathias
FORTEAU (dir. pub) , La Charte des Nations Unies : Commentaire article
par article, 3ème édition, Economica, Paris,
2005, p. 1335.
386 Ibid. p. 1336. Monsieur Antonio CASSESE y
recense les auteurs favorables et opposés à cet argument. L.
CASEY et D. RIVKIN estiment pour leur part que la pratique des Etats depuis
1946 confirme la survivance de la légitime défense
préventive à la Charte de San Francisco. (Voir notamment dans
Anticipatory Self Defense against terrorism is legal , Washington
legal Foundation, 14 décembre 2001)
* 387 Rec. CIJ,
1950, p. 229
* 388 Ibid. p.
137, § 274.
* 389 Cf. discours de
l'ex-Secrétaire général des Nations Unies Koffi ANNAN
devant l'AGNU, le 23 septembre 2003, communiqué de presse SG/SM/8891.
* 390 Le principe de
l'effet utile (exprimé par la maxime Ut res magis valeat quam
pereat), relatif à l'interprétation des traités,
stipule que l'interprète doit toujours choisir le sens qui permet une
application effective de la règle en question. 391 La
Commission de codification considère que cette règle est
inhérente au principe de bonne foi.
Voir affaire Détroit du Corfou, (aff. Royaume-Uni c/
Albanie, CIJ, Rec. 1949, ) : « Il serait en effet
contraire aux règles d'interprétation généralement
reconnues de considérer q'une disposition (...) insérée
dans un compromis soit une disposition sans portée et sans
effet » (p. 24).
*
* 392 Pour M. Antonio
CASSESE l'éventualité d'une adaptation de l'article 51 de la
Charte pour autoriser la légitime défense face à un danger
imminent, pourrait être subordonnée à de strictes
conditions dont l'existence de preuves crédibles de la menace d'une
attaque imminente, inévitable et massive : « Article
51 », La Charte des Nations Unies: Commentaire article
par article, 3ème édition op.cit., pp.1342 et
s.
393 Voir C.GREENWOOD, « International Law
and the preemptive use of force: Afghanistan, Al-Qaida and Irak » in
San Diego International Law Journal, 2003, pp. 8-36
394 Voir Robert KOLB, «Quelques
réflexions sur le droit relatif au maintien de la paix au début
du XXIème siècle », in AADI, vol.
11-2003, pp. 193-215, cité par James MOUANGUE KOBILA, op.cit., p.
18.
* 395 La notion de
préemption n'est pas inconnue du langage juridique. Dans son sens le
plus courant, la notion renvoie à l'action d'acheter avant un autre, ou
la priorité d'un acheteur sur les autres en raison d'une qualité
qui lui est propre. Selon le Lexique des termes juridiques (Dalloz,
12ème éd., 1999, p. 406), le droit de
préemption est le droit reconnu
dans certains cas à l'Administration, et à
certains organismes de droit privé accomplissant une mission de service
public, d'acquérir la propriété d'un bien lors de son
aliénation par préférence à tout autre acheteur. Le
mot vient du
latin praeemption (praeemptio) et son
étymologie repose sur la combinaison de prae (avant) et
emptio (achat). Par là,
on constate une dénaturation, un dévoiement ,
une instrumentalisation du mot à des fins politico-militaro
stratégiques.
* 396 Voir M.E O'CONNELL,
« The myth of preemptive self-defense », août 2002,
The Americana society of international law task on terrorism,
pp. 12-13 sur www.asil .org/taskforce/oconnell.pdf.
* 397 Cf. Propos tenus
à la tribune de l'AGNU le 23 septembre 2003, A/58/PV.7 et
Communiqué de presse SG/SM/8891
398 Cf. M.E O'CONNEL, « The myth of
preemptive self-defense », op.cit. C'est le lieu de rappeler que
l'opération menée en Irak en 2003 l'a été, non
seulement au mépris du système de la Charte, mais pire encore
l'expédition a été ordonnée sous le couvert de
l'argutie spécieux de la détention par ce pays d'armes de
destruction massive. Or, on s'en est vite rendu compte, les enquêtes qui
avaient été diligentées par les experts des Nations Unies
avaient révélé à la face du monde, le chantage
éhonté dont l'Iraq était victime de la part des
Etats-Unis ; cette situation avait d'ailleurs conduit le
Secrétaire d'Etat américain d'alors, M. Collin POWELL à la
démission.
* 399 Le Professeur Djiena
WEMBOU opine à ce propos que les prétendues justifications
à cette belle construction théorique relèvent purement et
simplement de la spéculation. Elle est de ce fait inapplicable car ses
auteurs sont incapables d'indiquer les méthodes par lesquelles l'on
pourrait évaluer avec précision et objectivité la
menace d'une agression imminente. Voir dans Le droit international dans un
monde en mutation : Essais écrits au fil des ans,
L'Harmattan, Collection Logiques juridiques, Paris, 2003, p. 131.
400 Voir, entre auteurs, René PASSETet Jean
LIBERMANN, Mondialisation financière et terrorisme : la donne
a-t-elle changé depuis le 11 septembre ? Op.cit. ; voir
précisément le Chapitre IV « De l'unilatéralisme
à l'ivresse impériale », pp. 93 à 102.
401 MM. Jean COMBACAU et Serge SUR réfutent
la doctrine américaine de la préemption alors qu'ils approuvent
dans le même temps la thèse de la légitime défense
préventive. Voir loc.cit., p. 628
402 Nous apprenons par Monsieur Stéphane
PAQUIN, qu'une conception politiste assez marginale-
l'hégémonisme- tend à faire admettre l'importance de
l'émergence d'une puissance dominatrice comme facteur de
régulation des relations internationales à un moment donné
de la vie internationale. Voir dans Economie politique internationale,
éd. Montchrestien, Paris, 2005.
* 403 Jacot MARTINE,
« Le jour où le monde libre est entré dans une nouvelle
guerre », in Le Monde, 12 septembre 2001, repris par Marco
SASSOLI et Antoine A. BOUVIER, Un droit dans la guerre ? Volume
II, op.cit. p-1969.
* 404 F. MEGRET, «
War ? Legal semantics and the move to violence », EJIL,
2002, p. 365, cité par Pierre KLEIN, op. cit. p. 376
405 Voir spécialement en ce sens la lettre
ouverte de soixante personnalités du monde académique
américain, « Sixty prominent US Academics say war on terrorism
is just », disponible sur http: //
www.uspolicy.be/issues
/Terrorism/letint.021402htm.
406 Voir entre autres théoriciens de la
« guerre juste » M. WALZER, Just and unjust wars. A
moral argument with historical illustrations, New York,
3ème éd. 1980, p. 134 ; voir
particulièrement l'approche de H. GROTIUS (In De jure belli ac
pacis) : la guerre juste serait celle qui est motivée par des
causes justes telles par exemple la défense du territoire,
l'immunité des ambassades... La guerre injuste au contraire serait
motivée par des causes injustes telles que l'oppression des peuples ou
la volonté d'affaiblir la puissance d'une communauté politique
voisine ; cités par Félix Sohuily ACKA, op.cit, p. 143.
* 407 Voir
spécialement sur ce point F. MEGRET, cité par Pierre KLIEN, loc
cit, p. 376.
* 408 Voir Notamment
Philippe WECKEL, « Terrorisme et droit de la guerre : le droit
de la guerre contre le terrorisme », in SFDI, Les nouvelles
menaces contre la paix et la sécurité internationales,
Paris, Pedone, 2004, p. 177. Pour cet auteur doctrine américaine
étend certes la définition de la guerre à la situation qui
a prévalu suite aux attaques du 11 septembre 2001, mais cette ouverture
ne s'accompagne d'aucune extension du champ d'application du droit
international humanitaire. Ainsi, les terroristes sont qualifiés de
combattants sans bénéficier pour autant d'un régime de
protection accordé par le jus in bello . En invoquant le droit
de la guerre, les USA n'entendaient en réalité appliquer aucun
des régimes de protection que ce droit comporte, et s'y
réfèrent dans un but complètement étranger aux
finalités poursuivies par les règles du DIH. Il s'agit bien
évidemment d'un « droit de la guerre » fondé
sur un contresens, d'abord invoqué pour entreprendre des poursuites sur
la base d'un crime, la belligérance irrégulière
méconnu du droit international, ensuite pour, paradoxalement
écarter les différentes protections apportées aux
personnes par le droit international (...). La guerre contre le terrorisme sert
en réalité une militarisation de la lutte contre le terrorisme
* 409 Voir L.N SADAT,
« Terrorism and the rule of law », Washington University
global studies law review, 2004, p. 151, cité par Pierre KLEIN, ibidem.
* 410 Voir à ce
propos P-M DUPUY « The law after the destruction of the
towers », Forum EJIL, op. cit p. 1
disponible sur ( http://
www.ejil.org/forum_WTC / ) . Voir
également Philippe WECKEL, « Terrorisme et droit de la
guerre : le droit de la guerre contre le terrorisme », in SFDI,
Les nouvelles menaces contre la paix et la sécurité
internationales, Paris, Pedone, 2004, pp. 176 et s. Cet auteur conclut
à la non pertinence du droit de la « guerre contre le
terrorisme » en droit international.
411 Cette préoccupation a été
exprimée de manière explicite par la Résolution 48/122 du
20 décembre 1993, intitulée « Droits de l'homme et
terrorisme ». Cette dernière condamne ainsi
« catégoriquement tous les actes, méthodes et pratiques
terroristes, sous quelque forme que ce soit et dans toutes leurs
manifestations, où qu'ils se produisent et quels qu'en soient les
auteurs, en tant qu'activités qui visent l'anéantissement des
droits de l'homme, des libertés fondamentales et de la
démocratie, tout en menaçant l'intégrité
territoriale et la sécurité des Etats, déstabilisant des
gouvernements légitimement constitués, sapant les
sociétés civiles pluralistes et ayant des conséquences
préjudiciables pour le développement économique et social
des Etats » et « invite les Etats, conformément aux
normes internationales relatives aux droits de l'homme, à prendre toutes
les mesures voulues pour empêcher, combattre et éliminer
effectivement le terrorisme ».
* 412 Pour avoir une
idée plus nette sur l'ensemble des codes de ces pays et les commentaires
qui sont en faits, voir, SOS, Attentats, Terrorisme, victimes et
responsabilité pénale internationale, op.cit., le Chapitre
II.
* 413 Pour aller plus loin
sur cette législation liberticide, voir Jean-Claude PAYE,
« Lutte antiterroriste, la fin de l'Etat de droit », in
Revue trimestrielle des droits de l'homme, n° 57,
15ème année, 1er janvier 2004, Collection
Droit et justice, éd. Nemessis, Bruylant, Bruxelles, 2003, pp. 61-75.
On note aussi que cette loi ne définit pas clairement les actes
terroristes, ce qui débouche forcément sur l'arbitraire, biaisant
par là même le procès pénal.
414 Voir Jean-Claude PAYE, ibid., p. 64
415 Voir sur Internet le site www. rsf. org / www.
Libertés-immuables.net
* 416 C'est nous qui mettons
en italiques
* 417 Voir par exemple
Affaire Lawless c. Irlande (fond), 1er juillet 1961,
série A, n° 1, p. 56, § 28. Dans cette affaire, la Cour
européenne des droits de l'homme de Strasbourg a jugé que les
activités terroristes menées sur le territoire irlandais et en
dehors de celui-ci en 1957, avaient créé une situation qui
correspondaient bien à une « une situation de crise ou de
danger exceptionnel et imminent qui affecte l'ensemble de la population et
constitue une menace pour la vie organisée de la communauté
composant l'Etat ». Selon la Cour, la situation était telle en
Irlande que l'application des lois ordinaires apparaissaient manifestement
insuffisante pour assurer le maintien de l'ordre, ce qui justifiait la
proclamation, par les autorités irlandaises, d'un état
d'exception, assorti de dérogations aux obligations de la Convention.
Voir également Affaire Aksoy c.Turquie, 18 décembre
1996, Rec. 1996-VI, n° 26, p. 2281, paragraphe 70. Dans cette autre
affaire, les juges de Strasbourg ont considéré que
« l'ampleur et les effets particuliers de l'activité
terroriste du PKK dans le Sud-est de la Turquie ont indubitablement
créé, dans la région concernée, un danger public
menaçant la vie de la nation »
* 418 Les Etats-Unis
d'Amérique sont parties au Pacte depuis le 8 juin 1992.
419 Voir S. Von SCHORLEMER, « Human Rights:
substantive and institutional implication of the war against
terrorism », EJIL, 2003, p. 280, cité par Pierre
KLEIN, op.cit.
* 420 Cette notion-
« Etat d'exception »- est parfaitement
opérationnelle pour rendre compte d'évènements historiques
tels que la suspension par le pouvoir nazi, de tous les articles garantissant
les libertés individuelles, contenus dans la Constitution de Weimar.
Elle reste productive pour cerner la situation actuelle.
Considérée comme un fait purement politique, la notion d'Etat
d'exception n'est pas facile à cerner juridiquement puisqu'elle fait
normalement référence à une situation inhabituelle, non
couverte par le droit. Elle se trouve cependant, tel que l'exprime Carl
SCHMITT dans « une frange ambiguë et incertaine, à
l'intersection du juridique et du politique ». La
spécificité de l'approche de cet auteur, véritable
théoricien engagé de l'Etat Nazi, consiste dans la
réintégration, comme ordonnancement du réel, du non droit,
de « la violence pure », dans le domaine juridique. Dans le
contexte de la lutte contre le terrorisme, cette forme de gouvernement
s'inscrit dans la durée, celle d'une guerre de longue haleine contre un
ennemi constamment remodelé. Carl SCMITT présente l'Etat
d'exception comme une doctrine de souveraineté. Voir Carl SCHMITT,
Théologie politique, Gallimard, 1988.
* 421 Pour aller plus loin,
voir Philippe WECKEL, « Le statut incertain des détenus sur la
base américaine de Guantanamo, RGDIP, 2002, pp. 357-369.
* 422 Voir à ce sujet
le mémorandum adressé par le Département de la Justice au
conseiller juridique du Département de la Défense des USA en date
du 28 décembre 2001 disponible sur le site http://
www.gwu.edu./-nsarchiv/NSAEBB/NSAEBB12701.
* 423 Voir par exemple P.A
Thomas, cité par Pierre KLEIN, op.cit
* 424 Ainsi dans l'Affaire
Coalition of Clergy v. BUSH, la cour de district du neuvième
circuit a rejeté la demande d'habeas corpus
introduite, au bénéfice des détenus de Guantanamo Bay, par
une coalition de défense des droits civiques, au motif, entre autres,
que cette base militaire était située en dehors du territoire
souverain des Etats-Unis. (Décision du 20 janvier 2002, 189 F. 2d (CD
Cal. 2002), p. 1049. Pour les juges, il en résultait qu'aucune
juridiction américaine n'avait compétence pour se prononcer sur
une telle demande.
425 On note cependant que cette qualification de
zone de « non-droit » est contestée par certains
auteurs : voir spécialement en ce sens Fleur JOHNS,
« Guantanamo Bay and the annihilation of the exception, in
EJIL, 2005 pp.614 et s, cité par Pierre KLEIN, op.cit.
426 Voir entre autres les observations finales
présentées par le Comité des Nations Unies contre la
torture, en date du 19 mai 2006 disponible sur le http://
www.unog.ch/. Cf. Résolution
1433 (2005) de la 14ème assemblée parlementaire du
Conseil de l'Europe, Résolution B660112/06 du Parlement européen
2006
* 427 Voir entre autres
les observations de J. PAUST, « Antiterrorism Military
Commissions : Postscript concerning the ad hoc DOD rules of
procedure », Michigan Journal of IL, 2002, vol 23, pp.5 et 6,
cité par Pierre KLEIN, op.cit.
428 Cf. Doc. CCPR/C/21Rev.1/Add., 13-26 mai
2004, § 10
429 Cf. ibid.
* 430 Cf. Avis consultatif du
9 juillet 2004, Rec. CIJ, 2004, § 109-109
* 431 Cf. Décision
du 28 juin 2004, 542 US (2004), pp 15-16. Pour la seconde décision,
consulter le site http://www.supremecourts.opinion /17pdf.
* 432 Pour aller plus loin,
voir William BOURDON, « Les détenus français à
Guantanamo : un trou noir judiciaire », in SOS, ATTENTATS,
Terrorisme, victimes et responsabilité pénale
internationale, Calman-Lévy, Paris, 2003, pp. 186 et s.
433 Voir Pierre KLEIN, op.cit
* 434 Voir Jean Christophe
MARTIN, op.cit., p. 500
* 435 Pour un rappel des
faits plus exhaustif, voir Sandrine SANTO, « L'ONU face au
terrorisme », Groupe de recherche et d'information sur la paix et la
sécurité (GRIP), Website : www.grip.org
* 436 Il s'agit là
d'une possibilité inédite, puisque c'est la première fois
dans la pratique du Conseil de sécurité que celui-ci qualifie de
menace à la paix et à la sécurité internationales
le soutien d'un Etat au terrorisme.
* 437 § 4
438 § 6, b
* 439 § 5
* 44 0 § 6,
c.
*
* 441 § 9
442 Les Taliban sont des étudiants en religion
443 Un Emirat est par définition un Etat
gouverné par un Emir, c'est-à-dire un gouverneur ou un prince
dans le monde musulman.
444 Rappelons que l'Afghanistan est le premier
producteur et exportateur mondial d'opium avec 75% de la production
mondiale.
445 Au rang des contestations, des luttes et des
querelles politiques, il convient de souligner le fait que les Taliban qui
contrôlait la majeure partie du territoire afghan (soit environ 90%) -
aussi paradoxal que cela puisse paraître- ne jouissaient de la
reconnaissance que d'une poignée de pays à l'instar des Emirats
arabes unis, du Pakistan, de l'Arabie Saoudite). La communauté
internationale, reconnaissant l'ancien gouvernement et le roi Zahler CHAH en
exil refusait dans son ensemble de reconnaître comme gouvernement cette
faction extrémiste, régnant par la terreur et commettant des
exactions au nom de leur lecture extrémiste de la Charia.
*
*
*
*
* 446 Créée en
1998 par BEN LADEN, le Front islamique international regroupe différents
groupes radicaux islamistes.
447 Voir le site Internet de L'Hebdo,
www.webdo.ch
*
* 448 Voir § 6
(c) la Résolution 748 (1992) précitée
* 449 Voir Premier Rapport,
S/2004/679, p. 5, § 8
450 Ce changement de ton a d'ailleurs
été mis en évidence par Madame Josiane TERCINET qui a pu
parler de « désétatisation » et de
« déterritorialisation » des destinataires des
résolutions des Nations Unies dans le cadre de la lutte contre le
terrorisme. Voir Josiane TERCINET, « Le Conseil de
sécurité et le terrorisme », in Stanislav KIRSCBAUM,
(dir. Pub.), Terrorisme et sécurité internationale,
op.cit. , pp. 59-63
* 451 Cf. §4, a de la
dite résolution
452 Voir § 9, e de la résolution
(Italiques ajoutés)
* 453 S'agissant des vols
d'évacuation sanitaire, le Comité en a approuvé 21 en 1994
et 42 en 1995, 63 vols en 1996 et 70 en 1997, 91 vols en 1998 et 25 en 1999.
Cf. Rapport S/1996/2, p. 6, § 23
* 454 S'agissant des vols
aller et retour sur la Mecque, l'Egypte a demandé par note verbale le 18
avril 1995 l'autorisation pour Egypt Air d'assurer 45 vols aller et retour pour
transporter 6000 pèlerins libyens. Cf. Rapport précité.
* 453 Voir Jean Christophe
MARTIN, op.cit., 517.
454 Rappelons que le § 4 de la Résolution
1267 imposait aux Etats de : - refuser aux aéronefs appartenant
aux Taliban ou affrétés ou exploités par les Taliban ou
pour le compte des Taliban l'autorisation de décoller de leur territoire
ou d'y atterrir sauf exception humanitaires (y compris religieuses telles que
le pèlerinage à La Mecque. - geler les fonds et autres ressources
financières, très notamment de biens appartenant aux Taliban ou
contrôlés directement ou indirectement par eux, ou appartenant
à ou contrôlés par toute entreprise appartenant aux Taliban
ou contrôlés par eux.
* 455 Plusieurs vols
humanitaires (11 précisément) ont ainsi été
autorisés, de même qu'un grand nombre de voyages aller-retour sur
La Mecque (90 vols précisément). Voir respectivement les Rapports
S/2000/1254, ( pp. 5-6) du 29 décembre 2000 et S/2002/101, ( p.5) du 5
février 2002.
* 456 Cité par
Jean-Christophe MARTIN, op.cit., p. 519, note de bas de page n° 286.
* 457 Voir Rapport des
activités du Comité S/1996/2, p. 7 ; S/1996/ 1079 ; pp.
3-4, §§ 10-14 ; S/1997/1030, §§ 8-10 ;
S/1998/1038. Les Etats mis en cause sont : la Libye, l'Arabie Saoudite,
le Burkina Faso, l'Erythrée, la Gambie, le Ghana, le Mali, le Niger, le
Nigeria, l'Ouganda, la RDC, le Soudan, la Tunisie, le Tchad.
458 Cette déclaration est reproduite dans le
document de l'ONU A/53/179
459 Voir entre autre Moncef DJAZIRI, « La
crise de Lockerbie et le processus de réintégration de la Libye
dans le système international », in Annuaire de l'Afrique
du Nord, 1998, p. 190.
* 460 Des auteurs
présagent, conjecturent l'échec des actions du Conseil de
sécurité au regard de sa composition retreinte et inégale.
En effet, étant donné que l'organe sécuritaire de par sa
mission de maintien de la paix et de la sécurité internationales
est investi d'un mandat de représentation de tous les membres de
l'Organisation, sa composition restreinte pose problème. Nous savons que
cet organe est composé de quinze membres dont cinq permanents qui
jouissent du droit de veto et les dix autres élus par l'AG pour un
mandat de deux ans. L'inégalité se retrouve en outre dans la
procédure de décision puisque les décisions doivent
être adoptées par neuf voix comprenant le vote favorable des cinq
membres permanents. Alors que la décision d'agir est toujours
collective, l'inaction peut être le fruit- outre du fait majoritaire- de
la décision unilatérale d'un des cinq membres dotés du
droit de veto. Il y aurait dans cette capacité de blocage un
déficit démocratique manifeste et anachronique, les cinq membres
permanents n'étant véritablement pas représentatifs de la
communauté internationale. Ce déficit démocratique est
stigmatisé par Bardo FASSBENDER qui parle d'une hiérarchie entre
membres. (Voir UN Security Reform and the Right of Veto. A Constitutional
Perspective, Kluver Law International, Boston/Londres/La Haye, 1998, p.
8). La possibilité même d'un abus du droit de veto fait peser de
lourds soupçons de partialité sur l'organe sécuritaire.
Pour le Professeur Pierre- Marie DUPUY, il manque à la communauté
internationale « (...) un organe suffisamment objectif et impartial
pour défendre l'ordre public international sans discrimination et avec
la vigilance suffisante » ( Voir « L'unité de
l'ordre juridictionnel », Cours de l'Académie de droit
international de la Haye, 2002, p p. 338-339). Bref, la question de la
réforme de la composition et de la procédure de décision
du Conseil de sécurité étudiée aux Nations Unies
depuis 1993 (Cf. Rés. 48/26 du 3 déc. 1993) est à l'ordre
du jour dans les instances internationales. Voir en ce sens par O. FLEURENCE,
La réforme du Conseil de sécurité. L'état du
débat depuis la fin de la guerre froide, Bruylant, Bruxelles, 2000,
p. 371 et pp. 90 et s.
* 461 La chute du
régime Taliban a par ailleurs permis l'organisation d'élections
en Afghanistan en 2004. Ces élections ont porté au pouvoir
l'actuel président Harmid KARZAI.
* 462 Cf. Rostane MEHDI,
cité par Jean Christophe MARTIN, op.cit., p. 524
463 Voir Rapport du secrétaire
général sur les répercussions humanitaires des sanctions
contre les Taliban, S/2001/1215, p.2, § 8.
464 Voir L. MARTINEZ, « Libye :
transformations socio-économiques et mutations politiques sous
l'embargo », in Annuaire de l'Afrique du Nord, 1998, p.
211
* 465 Résolution
n° 15/29-P, adoptée à la session des 25-27 juin 2002 par la
Conférence des ministres des Affaires étrangères de l'OCI.
* 466 Il ne faut pas perdre
de vue le fait que l'Afghanistan était déchirée par
plusieurs décennies de guerre. En effet ce pays qui a acquis son
indépendance en 1921 vivait jusque-là dans une instabilité
chronique, la guerre contre les forces étrangères et les guerres
intestines internes rendant impossible la réalisation d'une paix
durable.
* 467 Rapport S/2001/241,
p. 3, § 16. Voir les §§ 36-39.
468 Voir Rapport sur les répercussions
humanitaires des sanctions contre les Taliban, S/2001/1215, p. 2 § 5
469 Voir Tim NIBLOCK, « Irak, Libye,
Soudan : efficacité des sanctions? » in politique
étrangère, 2000, p. 106
* 470 Cette obligation-on
le sait déjà- découle de la lettre et de l'esprit de
l'article 2 § 3 de la Charte des Nations Unies :
« Les Membres de l'Organisation règlent
leurs différends internationaux par des moyens
pacifiques (...) »
471 Voir entre autre, Jean CHARPENTIER,
Institutions internationales, Mémentos, Dalloz,
15ème édition, Paris 2002,
pp. 50 et s.
* 472 Rappelons simplement
que la responsabilité se limite classiquement à une obligation de
réparer un dommage. Elle doit être établie autour d'un
ensemble d'éléments qui la conditionnent : il s'agit
d'abord du dommage, c'est-à-dire l'atteinte à un droit subjectif,
ensuite le fait générateur ou l'origine de la
responsabilité : Le fait générateur doit
présenter deux caractères : il doit être imputable
à un Etat, c'est-à-dire être son fait, c'est
l'imputabilité et être illicite au regard du droit international,
c'est l'illicéité internationale . Voir Jean COMBACAU et Serge
SUR, Droit international public, op.cit., p. 515 et s.
* 473 Voir Alain PELLET et
Patrick DAILLIER, Droit international public, op.cit., p. 762
474 Base d'expérimentation française
de charges nucléaires (depuis 1966) en Polynésie à 1200 km
de Tahiti.
* 475 La qualification
« terroriste » de ces actes n'était plus à
démontrer d'autant plus que les éléments constitutifs de
l'infraction étaient bien présents : l'élément
matériel réside dans l'acte de sabotage du navire (terrorisme
maritime) avec effet d'explosion (attentat à l'explosif).
L'élément moral ou psychologique peut être recherché
dans la volonté de la France d'intimider les Membres de Greenpeace afin
de faire avorter la manifestation contre les essais nucléaires.
*
* 476 Voir
Communiqué commun de la Nouvelle-Zélande et de la France du 19
juin 1986.
* 477 S'il est vrai que la
médiation de M. Perez De CUELLAR présente à certains
points de vue les caractères d'un arbitrage (notamment le consentement
des Etats en vertu d'un accord spécial, le compromis
d'arbitrage), elle s'en éloigne cependant par le seul fait que
l'arbitrage est désormais l'apanage d'un organe collégial et non
plus l'apanage d'une seule personnalité comme ce fut le cas autrefois
où l'arbitre unique était le Souverain. Voir David RUZIE,
Droit international public, Mémentos, Dalloz,
18ème éd. Paris, 2006, pp. 174-175.
* 478 Rappelons que le
droit international envisage la réparation sous diverses
modalités : La restitutio in integrum, la
réparation par équivalence ou indemnisation, la satisfaction pour
les préjudices moraux qui prend la forme d'excuses.
* 479 Pour aller plus loin
sur cette affaire, voir David RUZIE, op.cit., p. 257
* 480 Cette
réparation- faut-il le souligner- dépendait du respect des
conditions posées par la Libye : Tripoli s'engage à verser
une somme de quatre millions de dollars une fois que les sanctions des Nations
Unies à son encontre seront levées. Quatre autres millions de
dollars seront versés si les USA lèvent à leur tour leurs
propres sanctions. Deux millions enfin seront versés si Washington
retire son « Iran-Libya Sanctions Act ». Si les
USA ne lèvent pas leurs sanctions dans les huit mois, la Libye ne
versera qu'un million de dollars...
* 481 Cette formule
relative à un « droit civil international » semble
déplaire à une partie de la doctrine, voir par exemple, Jean-Marc
SOREL, « L'épilogue des affaires dites de Lockerbie devant la
CIJ » : le temps du soulagement et le temps des regrets,
RGDIP, 2003, pp. 933-946. L'auteur y stigmatise ce vocable, et parle
à son propos de « flou artistique » et de terme
« inadapté ».
* 482 Italiques
ajoutés
* 483 La Libye a, pour ce
faire, envoyé une lettre au Conseil de sécurité ce
même jour du 15 août 2003, dans laquelle elle écrit
qu'« en tant qu'Etat souverain (...) elle a facilité la
traduction en justice des deux suspects accusés de l'explosion de
l'appareil PanAm 103 et accepte d'assumer la responsabilité des actes de
ses agents ».
* 484 Voir en
infra, pp.85 et s.
* 485 Cette fondation
caritative est dirigée par Seif al-Islam KADHAFI l'un des fils du
colonel KADHAFI.
* 486 Cette réparation-
faut-il le souligner- dépendait du respect des conditions posées
par la Libye : Tripoli s'engage à verser une somme de quatre
millions de dollars une fois que les sanctions des Nations Unies à son
encontre seront levées. Quatre autres millions de dollars seront
versés si les USA lèvent à leur tour leurs propres
sanctions. Deux millions enfin seront versés si Washington retire son
« Iran-Libya Sanctions Act ». Si les USA ne
lèvent pas leurs sanctions dans les huit mois, la Libye ne versera qu'un
million de dollars
* 487 Le Ministre
français des affaires étrangères Dominique De VILLEPIN en
a donné la pleine confirmation en précisant dans une
déclaration faite le jour même de la signature de l'accord que cet
arrangement s'inscrit « directement dans un cadre privé entre
la Fondation Kadhafi et les familles françaises » : Voir
M. NAIM, « La Libye accepte d'indemniser les victimes du DC-10
UTA », in Le Monde, 10 janvier 2004. La déclaration
conjointe de la France et de la Libye du 9 janvier 2004 parle à cet
égard d'« accord qui vient d'être conclu à un
niveau non gouvernemental ».
* 488 Plusieurs voix se
sont fait entendre et ont plaidé en faveur de la dépolitisation
de l'infraction terroriste. Voir entre auteurs Marie Hélène
GOZI ( Le terrorisme, op.cit.) et Pierre KLEIN (Le droit
international à l'épreuve du terrorisme, op.cit)
* 489 Voir
Résolution 731 (adopté à l'unanimité le 21 janvier
1992) précitée.
* 490 Le tribunal en
question, c'est-à-dire la Cour de Camp Zeist n'est pas une juridiction
internationale, mais une juridiction dépaysée parce que
siégeant en dehors du territoire dont elle est l'organe. Il s'agit par
ailleurs d'un tribunal dont la compétence est limitée à la
seule espèce. Elle applique au fond le droit écossais et suit la
procédure pénale écossaise.
* 491
Reproduite in DAI, n° 9, 1er mai 1999, p. 352
492 Cf. Communiqués de presse SG/SM 6933 et
SG/SM 6935
493 Cf. § 4
494 Cf. § 8
* 495 Bien que relatif
à l'inculpation de simples individus, le différend aurait
dû être porté devant la CIJ, puisqu'il s'agit d'abord et
avant tout d'un différend interétatique. Cette solution avait
d'ailleurs été privilégiée par la Libye
parallèlement à la saisine du Conseil de sécurité
par les Etats occidentaux. Dans une requête introductive d'instance,
enregistrée par le Greffe de la Cour le 3 mars 1992, la Libye avait
formulé une demande en indication de mesures conservatoires, dans
laquelle elle fit prévaloir le droit qui lui conférait la
Convention de Montréal de 1971 de juger les accusés en accord
avec le principe Aut dedere aut judicare. Les débats sur les
mesures conservatoires ouverts depuis le 26 mars ont été
« court circuités » par la Résolution 748
(1992) du Conseil de sécurité qui imposait la livraison le 31
mars 1992 des inculpés. Devant cette situation, la CIJ décida par
onze voix contre cinq que les circonstances de l'espèce n'étaient
pas de nature à exiger l'indication de mesures conservatoires.
L'interférence entre le traitement judiciaire par la Cour et le
traitement par le Conseil de sécurité au titre de ses fonctions
de sécurité collective confine manifestement au
« conflit de compétence ». (Voir Ordonnance du 14
avril 1992 (Libye c. Etats-Unis), Rec. CIJ, 1992, p. 127, § 44 et
Opinion dissidente du Juge M. BEDJAOUI jointe aux ordonnances, ibid. p.35,
§7. ). L'espèce soulève en filigrane la question de la
primauté, de la prépondérance des organes des Nations
Unies dans leurs rapports. De ce qui précède, il apparaît
clairement que l'organe politique (le Conseil de sécurité) jouit
d'une certaine préséance sur l'organe judiciaire (la CIJ), ce qui
est non sans poser des interrogations aiguës sur l'effectivité de
la séparation des pouvoirs au sein de cet Etat universel qu'est la
communauté internationale.
* 496 L'extradition a
été possible grâce à un accord bilatéral qui
existe entre les deux pays.
* 497 Voir la page Internet de
l'International Progress Orga-nization consacrée
à la mission d'observation du procès de Lockerbie :
http://i-p-o.org/lockerbie_observer _mission.htm. L'arrêt est disponible
sur
www.scotcourts.gov.uk/download.
498 Sous la pression de la communauté
internationale, les troupes syriennes ont finalement accepté de se
retirer du sud du Liban le 26 avril 2005.
499 Cf. Déclaration du Président
S/PRSDT/2005/4( 15 février 2005)
* 500 Cf. Rapport
S/2005/203, p. 21,§ 62.
501 Ibid., p. 21, § 63
502 Le Président Emile LAHOUD voyait dans le
rapprochement avec les autorités syriennes une occasion de
contrebalancer l'influence occidentale portée par Monsieur HARIRI.
* 503 Au § 11 de la
Résolution 1636 (2005), le Conseil « décide »
notamment que la « Syrie doit collaborer sans réserve et sans
condition avec la Commission ».
* 504 Cette
réticence de la Syrie à l'égard de la Commission a
été relevée par le Conseil de sécurité aux
§§ 5 de la Résolution 1636 (2005) et § 3 de la
Résolution 1644 (2005).
* 505 Voir Hervé
ASCENSIO, « Terrorisme et juridictions internationales », SFDI,
Les nouvelles menaces contre la paix
et la sécurité internationales, op.cit,
pp. 279.
* 507 Voir Barbara DELCOURT,
« De quelques paradoxes liés à l'invocation de l'Etat
et du droit », in Karine BANNELIER et al. (dir.pub.), Le droit
international face au terrorisme, op.cit., p. 204.
* 508 Voir Pierre KLEIN,
« Le droit international à l'épreuve du
terrorisme », op.cit.
509 Voir Robert CHARVIN, « La guerre
anglo-américaine contre l'Irak et le droit international :
Apocalypse Law, in Actualité et droit international, avril
2003, sur
http://www.ridi.org/adi
510 MM. René PASSET et Jean LIBERMAN
considèrent que le terrorisme pousse sur le
« terreau » de la « misère », de
« l'humiliation » et du « délitement des
valeurs » et est entretenu par « l'engrais » de
« l'argent sale », dans
Mondialisation financière et terrorisme :
la donne a-t-elle changé depuis le 11 septembre ? op.cit,
voir Chapitres I et II.