Approches de solutions durables de prise en charge des réfugiés en situation d'asile: le cas du Bénin( Télécharger le fichier original )par Dodzi Tagbédji Romaric ADAHA Université d'Abomey-Calavi - Maà®trise en Développement Communautaire 2009 |
IntroductionLe continent africain a connu une violence sans précédent ces deux dernières décennies1(*). Par voie de conséquences, on note des dizaines de milliers 2(*)de réfugiés politiques contraints de prendre le chemin de l'exil. Du Libéria au Sénégal en passant par la Sierra Leone, la Guinée, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Nigeria, le Togo, la Côte d'Ivoire ... et de l'autre côté du même continent, le Tchad, le Soudan, le Zimbabwe, le Kenya, etc. des conflits internes ont entraîné des déplacements massifs de populations parties chercher asile dans d'autres contrées, dans la précarité des camps de réfugiés qui essaiment de l'autre côté de la frontière (Nasreddine, L. 2005). En concret, la question touarègue au Mali et au Niger, les idéaux ethnico-religieux au Nigeria, l'irrédentisme casamançais, le soulèvement militaire en Guinée-Bissau, les conflits post-électoraux militaro-civiles au Togo, les guerres fratricides au Libéria et en Sierra Leone en sont quelques unes des causes3(*). Ces situations liées aux carences politiques4(*) de ces pays, qui, généralement, sont pauvres, fragilisent davantage le processus d'édification de l'Etat de droit (Tévoedjrè A, 2002). Dès lors, leur résolution mérite une attention particulière surtout dans notre Sous-Région. La problématique du réfugié se révèle au jour au jour comme un défi que l'Afrique doit relever pour tenir sa promesse de développement. La violence, l'intolérance, l'injustice, la pauvreté, et le SIDA sont autant de maux liés à la question des réfugiés. Ainsi, HOLO, T. (2004) notifie : « l'Afrique, ce berceau de l'humanité est aujourd'hui considérée comme la terre d'élection des réfugiés. Des citoyens sont contraints de quitter leur pays, n'ayant pour seule alternative que la valise ou le cercueil, en raison soit de leur origine, soit de leurs convictions religieuses, politiques ou philosophiques. A cette masse humaine s'ajoute d'autres êtres humains qui fuient soit la misère économique, soit les conflits internes, voire internationaux dont l'Afrique est encore le théâtre privilégié ». La question des réfugiés dans notre Sous-région, est devenue une particularité vécue au quotidien en sorte qu'elle a fini par entrer dans les habitudes que d'aucuns qualifient de "fait social". De même, les réfugiés constituent de sérieuses charges supplémentaires pour les pays d'asile qui sont généralement de petits pays pauvres confrontés déjà aux problèmes de survie. Ainsi, l'arrivée massive des réfugiés ne pourrait qu'aggraver une telle situation dans ces pays (HCR, 2004). En Afrique de l'Ouest, la République du Bénin est l'un des pays d'asile les plus fréquenté (KONAN, A.O. 2007). En effet, selon Amnesty International, « les reformes adoptées au début de l'année 1990 au Bénin ont entraîné des changements importants dans le domaine des Droits de l'Homme ainsi qu'un renforcement de l'Etat de droit ». Les réformes politiques auxquelles Amnesty International fait allusion sont le fruit de la Conférence des Forces vives de la Nation tenue du 19 au 28 février 19905(*), suite aux tensions sociales et politiques qui ont prévalu au Bénin en 1989. Quant aux changements, il faut reconnaître qu'il s'agit de l'alternance au pouvoir, de la reconnaissance de multipartisme, etc. Cette nouvelle atmosphère socio-politique qu'a connue le Bénin l'a mise sur une orbite appréciable et attrayante en sorte que les ressortissants des pays de la Sous-région encore moins ceux dont les pays sont en guerre y font leur demande d'asile. Ainsi, selon Césaire KPENONHOUN6(*), « le processus de l'édification d'un Etat de droit favorise [...] l'apaisement des tensions sociales et politiques. Et comme le Bénin vit dans contexte sous-régional où beaucoup de chefs d'Etat sont encore hostiles à l'amorce du processus de droit, les tensions sociales et politiques amènent leurs citoyens et ceux d'autres Etats africains comme d'ailleurs à s'exiler au Bénin ». Outre cette distinction particulière dont jouit le Bénin, on note sa participation aux différentes ratifications relatives au statut des réfugiés (Convention de l'ONU du 21 juillet 1951, Protocole relatif à la Convention de l'ONU du 21 juillet 1951, Convention de l'OUA régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique du 10 septembre 1969, Déclaration de Carthagène sur les réfugiés du novembre 1984). Or, l'article147 de la Constitution7(*) du Bénin stipule : « Les traités ou accords régulièrement ratifiés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie ». Tous ces éléments prédisposent une atmosphère favorable pour l'accueil des réfugiés au Bénin. Il a le devoir d'assurer la protection et l'assistance aux réfugiés exilés chez lui en attendant leur retour prochain dans leur pays d'origine, après l'établissement d'une paix durable. Car «c'est d'abord aux états qu'il incombe d'assurer la protection des demandeurs d'asile et des réfugiés qui se trouve sur leur territoire 8(*)». Ainsi, les réfugiés sont-ils accueillis dans les pays d'asile comme au Bénin, dans l'intention de retourner dans leur pays d'origine à la fin des violences et des conflits qui les ont contraint à fuir. Dans ce cadre, la communauté internationale a pu distinguer trois solutions dites durables sur lesquelles se base la gestion des réfugiés. Il s'agit du rapatriement librement consenti (le retour dans le pays d'origine à la suite d'une paix réinstaurée), l'intégration locale (l'intégration dans le pays d'asile) et la réinstallation (installation dans un pays du Nord). Le rapatriement librement consenti est reconnu par la communauté internationale comme la meilleure des trois solutions durables car « on ne vit mieux que chez soi ». Le Bénin étant devenu l'un des pays sûr9(*) de la Sous-région, donc pays d'asile aux réfugiés, il est appelé à mettre en oeuvre ces solutions durables dans le souci de soulager la peine et la souffrance des réfugiés. Dans ce cadre, le rapatriement librement consenti proposé aux réfugiés dont les pays d'origine ont connu la paix fait l'objet de réticence en leur sein. Cette situation de non-adhésion des réfugiés au programme de solutions durables en l'occurrence celui du rapatriement, est observée dans nombre de pays d'asile de la Sous-région. En effet, hormis le Bénin, on peut citer les cas de Guinée-Conakry et du Ghana. Or, ces réfugiés de la Sous-région proviennent des mêmes pays et sont les conséquences des mêmes conflits. Et c'est pour comprendre et cerner cet état de fait que la présente étude intitulée « Approches de solutions durables de prise en charge des réfugiés en situation d'asile en Afrique de l'Ouest : le cas du Bénin » s'évertuera. La première partie expose la contextualisation et la problématisation de la recherche, la deuxième est consacrée à la démarche méthodologique adoptée pour l'étude et la troisième présente les résultats, leurs analyses puis les suggestions et perspectives pour des approches de solutions durables. Mais avant toute chose, il faudrait présenter le contexte dans lequel s'inscrit cette étude et monter par suite le mobile qui le justifie. 1- CONTEXTUALISATION DE LA RECHERCHE1.1- Contexte et justification Depuis la Conférence des forces vives de la Nation, le Bénin s'est fait remarqué comme l'un des pays phares de la Sous-région ouest-africaine en matière de démocratie et de respect de Droits de l'homme. Signataire des Conventions internationales relatives aux réfugiés et reconnaissant la supériorité des Traités et Conventions internationaux sur les Lois de la République comme le notifie l'article 147 de sa Constitution, le Bénin a le devoir d'accueillir et de protéger les réfugiés de la Sous-région et de partout. Ce devoir lui incombe également en tant qu'Etat souverain et indépendant appelé à partager avec ses voisins leurs peines. Reconnu dans ce cadre comme l'un des grands pays d'asile d'Afrique de l'Ouest, le Bénin compte au 1er janvier 2006, 31989 personnes dont 30294 réfugiés (HCR-Bénin, mars 2006). C'est ainsi qu'on compte plus d'une vingtaine de nationalités de personnes vivant avec le statut du réfugié en République du Bénin. Le devoir du Bénin en tant que pays d'asile, face ces âmes en détresse, consiste à leur assurer la protection internationale, à leur «donner un abri«, et dans la limite de ses moyens, leur apporter l'assistance. Mais ce devoir est temporaire, c'est-à-dire qu'il prend fin le jour où le calme ou la paix est rétablie dans leurs différents pays de provenance. Dans ce cas, il faut que le retour se fasse dans la dignité et la sécurité. De leur côté, les réfugiés doivent respecter les lois de la République et se conformer aux lois qui régissent leur statut durant tout le temps que va durer l'exil. Du coup, ces personnes sans abri sont des êtres vulnérables et désespérés qu'il faut « protéger et assister ». Cela suppose la mise en place d'une politique de gestion ou du moins, d'une politique de recherche des solutions durables à leurs problèmes pour éviter un éventuel débordement socio-démographique et un exagérément dérapage géopolitique. Cela va sans dire que l'échec d'un tel défi pourrait être préjudiciable tant sur les plans économique, social et politique pour le Bénin. Dès lors, la question des réfugiés, telle que posée, constitue un problème de développement qu'il faut prendre au sérieux et traiter avec beaucoup de soin. Dans ce cadre, la République du Bénin a, à l'instar des autres pays d'asile de la Sous-région à travers le HCR, lancé les programmes des solutions durables conformément aux dispositions que leur mise en oeuvre nécessite. Le programme sur le rapatriement librement consenti qui consiste à organiser le retour des réfugiés dans la dignité et la sécurité dans le pays d'origine une fois que la paix y est revenue et qui est reconnu comme la meilleure des solutions durables aux problèmes des réfugiés, fait l'objet de désintéressement et de non-adhésion au sein des réfugiés concernés. Cette réticence se caractérise parfois par des violences et des pressions provenant de la part des réfugiés pour exiger auprès des autorités compétentes, d'autres solutions comme la réinstallation (solution durable qui consiste à faire installer un réfugié dans un pays du Nord parce que se sentant toujours menacé dans le pays d'accueil). Cette situation prend parfois des proportions inquiétantes d'autant plus qu'elle déstabilise l'ordre public instauré par les pouvoirs publics. On se rappelle encore de la séquestration pendant des heures du Représentant Régional du HCR lors de son passage sur le site des réfugiés à Kpomassè pour exiger l'accès à la réinstallation et des soulèvements des populations autochtones du site contre une telle pratique, des violences fréquentes portées sur le personnel du HCR et de la CNAR dans leur bureau respectif. Ces méthodes fâcheuses pratiquées par les réfugiés pour réfuter le rapatriement en faveur de la réinstallation peuvent conduire à un soulèvement social dont les conséquences pourraient être incalculables pour le pays d'accueil. Au risque de voir ces mesures de revendication perdurer pour devenir une norme pour les réfugiés et pour éviter d'éventuels événements, il est nécessaire de chercher à comprendre les réelles causes et les vrais motifs qui sous-tendent cette réticence au programme du rapatriement chez les réfugiés du Bénin enfin de lui trouver des solutions appropriées. Ce travail s'inscrit dans ce contexte. Si le contexte de la recherche et le mobile qui le justifient sont connus, il est tout de même nécessaire de présenter le champ dans lequel se fera cette étude.
1.2- Présentation du cadre physique et humain 1.2.1- Présentation physique La République du Bénin est un pays de l'Ouest africain situé dans la zone intertropicale entre l'Equateur et le Tropique nord. Il se présente comme « un point fermé qui sort de l'Océan Atlantique ». Il est limité au Nord par le fleuve Niger, au Sud par le Golfe de Guinée, à l'Est par le Nigeria, à l'Ouest par le Togo, et au Nord Ouest par le Burkina Faso. Sa superficie est de 114763 Km2. Excepté le Burkina Faso, le Bénin abrite sur son sol les réfugiés venant des autres pays limitrophes. C'est ainsi qu'on peut compter les Ogoni issus du Nigeria, les réfugiés togolais ainsi que des réfugiés nigériens au Bénin. 1.2.2- Population Le Bénin compte aujourd'hui environ huit millions habitants. C'est une population jeune avec un taux d'accroissement estimé à 28%. La population béninoise est essentiellement rurale et inégalement repartie. En effet les 2/3 des Béninois vivent dans la parie méridionale où la densité est de 215 hbt/km2. Le Nord est beaucoup moins peuplé : 27hbt/km2. Parmi la vingtaine de groupes ethniques qui composent cette population, on distingue en majorité : les Fon, les Yoruba, les Bariba ou Batombou, les Adja, les Mina ou Gen, les Dendi, les Somba, les Mahi, les Aïzo, les Goun, les Brésiliens créoles. Malgré la diversité des langues qui le caractérise, le Bénin s'est épargné des clivages ethniques et régionalistes qui rongent les pays voisins de la Sous-région dans laquelle il se trouve. Tous ces aspects positifs concourent à la paix dont il bénéficie et qui fait l'objet d'attirance et d'asile pour les réfugiés. 1.2.3- Les langues Les Béninois parlent une cinquantaine de langues parmi lesquelles le Fongbé arrive en tête pour plus de deux millions de personnes. Ensuite viennent le Yoruba, l'Adjagbé, l'Aïzogbé, le Gengbé, le mahigbé, le Baatonum, le Somba ou le Ditamari, le Dendi, etc. La langue officielle est le Français, parlée dans l'administration, dans les écoles et le commerce. L'effort de revalorisation de nos langues à travers un large programme d'alphabétisation est enclenché avec la création d'un ministère de la promotion des langues maternelles et de l'alphabétisation. Cette diversité de langues constitue hier comme aujourd'hui une véritable source de richesses inhérentes à l'histoire du pays, en sorte qu'elle caractérise son identité. Puisque l'hospitalité, la solidarité, la tolérance, etc. sont des vertus qui tirent leur sève nourricière de cette multiplicité de langues. Elle a réussi à constituer de façon tolérante et patiente l'histoire du pays. Cette histoire est aujourd'hui chargée d'enseignements et de leçons qui ont donné naissance à la démocratie béninoise enviée par le monde entier et qui permet à tous les réfugiés de vivre pleinement leur droit d'asile au Bénin.
Proclamée indépendante le 1er août 1960, la République du Dahomey a connu une instabilité politique jusqu'en octobre 1972 où le chef de bataillon Mathieu Kérékou arrive au pouvoir par un coup d'Etat militaire. Il engage le pays dans la voie du socialisme. Le marxisme-léninisme devient l'idéologie de l'Etat. « La dictature révolutionnaire » est mise en place. En 1975, le Dahomey devient République Populaire du Bénin, change de drapeau et le Parti de la Révolution Populaire du Bénin est crée. L'Assemblée Nationale Révolutionnaire (ANR), organe membres, les commissaires du peuple, élisent le Président de la République et lui confèrent sa légitimité. A partir de 1988, la grave crise économique mondiale, qui frappe plus particulièrement les pays en voie de développement, n'a pas épargné l'Etat Révolutionnaire du Bénin. Le retard de 3 à 6 mois dans le règlement des salaires des fonctionnaires du secteur public va entraîner des séries de grèves qui paralyseront les activités surtout économiques du pays. Le marxisme-léninisme à la béninoise a échoué. Le Gouvernement sous la pression de la rue, renonce en décembre 1989 à l'idéologie marxiste, convoque du 19 au 28 février 1990 une Conférence des « Forces Vives » de la Nation composées des Béninois de l'intérieur et de l'extérieur (surtout exilés politiques). Les Forces Vives de la Nation dénoncent le régime du Parti de la Révolution Populaire du Bénin (PRPB) et se prononcent pour un Renouveau Démocratique avec le multipartisme intégral et l'alternance au pouvoir. Le Général Kérékou s'et engagé à mettre en oeuvre de « façon réaliste toutes les décisions de la Conférence Nationale ». Un Gouvernement composé uniquement de personnalités civiles, nommées pour une période transitoire de 12 mois et dirigé par Nicéphore SOGLO, Premier Ministre désigné par la Conférence Nationale, est chargé de remettre le pays en marche et d'organiser des élections démocratiques. La nouvelle Constitution adoptée par référendum le 11 décembre 1990 opte pour un régime présidentiel avec une nette séparation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire. Les élections législatives et présidentielles furent organisées dans le calme et la transparence. Monsieur Nicéphore Soglo est élu Président de la République. Aujourd'hui les Institutions de contre-pouvoir recommandées par la Conférence Nationale à savoir : la Cour Constitutionnelle, la Cour Suprême, la Haute Cour de Justice, la Haute Autorité de l'Audiovisuel et de la Communication et le Conseil Economique et Social sont installées. Dès lors, le Bénin s'installe dans la pratique démocratique et fait figure d'exemple de l'émergence pacifique de la démocratie en Afrique, privilégié par les populations des pays voisins en guerre. Du coup, il est l'un des pays d'asile (pays sûr) en Afrique de l'Ouest. Quels sont à présent les instruments juridiques qui définissent son cadre juridique en tant que pays d'asile ? 1.3 - Présentation du cadre juridique de l'étude Le cadre juridique se fonde sur trois types de textes à savoir : - les textes normatifs internationaux; - les textes normatifs régionaux et - les textes normatifs nationaux. 1.3.1- les textes normatifs internationaux Les instruments juridiques internationaux se composent de la Convention de l'ONU du 21 juillet 1951 relatif au statut des réfugiés. Cette Convention constitue le pilier sur lequel se sont fondées les différentes dispositions qui définissent et régissent ce qu'est un réfugié, le statut du réfugié, un pays d'accueil ou d'asile, les principes directeurs qui les caractérisent. La Convention de l'ONU se révèle comme un instrument juridique référentiel pour la gestion du réfugié. Elle est composée de 46 articles. Protocole relatif à la Convention de l'ONU du 21juillet 1951sur le statut des réfugiés. C'est instrument juridique qui vient élargir l'approche définitoire du concept « Réfugié »tel que prescrit dans la Convention. Puisque « de nouvelles catégories de réfugiés sont apparues depuis que la Convention a été adoptée et que, de ce fait lesdits réfugiés peuvent ne pas être admis au bénéfice de la Convention » Statut du Haut Commissariat des Nations-Unies pour les Réfugiés, adopté par l'Assemblée générale dans sa Résolution 428(v) du 14 décembre 1950. C'est e Statut qui a fait naître, sous l'autorité de l'Assemblée générale des Nations-Unies, le HCR, lui permettant d'agir sous les auspices de l'ONU, en ce qui concerne les réfugiés qui entrent dans le cadre du Statut, et de rechercher des solutions durables permanentes au problème des réfugiés, en aidant les gouvernements et les organisations privées à faciliter le rapatriement librement consenti de ces réfugiés ou leur assimilation dans de nouvelles communautés nationales. Déclaration universelle des Droits de l'Homme. Il constitue un instrument juridique, comme l'idéal commun à atteindre par tous les peuples et toutes les nations afin que tous les individus et tous individus et tous les organes de la société, ayant la Déclaration à l'esprit, s'efforcent, par l'enseignement et l'éducation, de développer le respect de ces droits et libertés et d'en assurer, par des mesures progressives d'ordre national et international, la reconnaissance et l'application universelles et effectives, tant parmi les population des Etats membres eux-mêmes que parmi celles des territoires placés sous leur juridiction. 1.3.2- Les textes normatifs régionaux Convention de l'OUA régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique adoptée par la Conférence des chefs d'Etat et de Gouvernement lors de sa 6ème session ordinaire (Addis-Abeba, 10 septembre 1969), entrée en vigueur le 20 juin 1974. Cet instrument juridique est venu comblé un vide que souffraient les textes internationaux lorsqu'il s'agit de leur application aux problèmes des réfugiés en Afrique. En effet, notant avec inquiétude l'existence d'un nombre sans cesse croissant de réfugiés en Afrique, et désireux de trouver les moyens d'alléger leur misère et leurs souffrances et de leur assurer une vie et un avenir meilleurs, la Convention de l'OUA a vu le jour pour redéfinir le concept « Réfugié » à l'africain et se doter des dispositions régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique. Déclaration de l'Organisation de l'Unité africaine : des réfugiés qui ont impérativement besoin de protection international de juillet 2001. C'est un document juridique qui protège les réfugiés, les rapatriés et des personnes déplacées en Afrique. Déclaration de Carthagène sur les réfugiés adoptée en novembre 1984 est un instrument juridique qui a été adopté pour régir des problèmes juridiques et humanitaires qui ont surgi dans la région centraméricaine, au Mexique et au Panama en ce qui concerne les réfugiés en prenant en considération la coordination et l'harmonisation nécessaires entre les systèmes universels et régionaux et les efforts nationaux. C'est un document qui détermine la conduite à suivre à l'égard des réfugiés dans la région centraméricaine. 1.3.3- Les textes normatifs nationaux La Législation béninoise créée par Ordonnance n°75-41 du 16 juillet 1975 portant statut des réfugiés et le Décret n°97-647 du 31 décembre 1997 portant création, composition, attributions et fonctionnement de la Commission nationale chargée des Réfugiés (CNR). Les deux textes, à l'instar d'une loi, sont exécutés pour régir la gestion des réfugiés en République du Bénin (article 8 de l'Ordonnance). Le premier, c'est-à-dire la Législation béninoise reconnaît le droit de refuge aux étrangers en tant que réfugiés tels que définissent par les textes internationaux. De même, ils reconnaissent ces deniers comme réfugiés et « ne peuvent être expulsés du territoire dahoméen que pour des raisons de sécurité nationale, s'ils se livrent à des activités contraires à l'ordre public, ou s'ils sont condamnés à une peine privative de liberté pour des faits qualifiés de crime ou de délit d'une particularité grave » (article 4). Le même document donne aux réfugiés, les mêmes privilèges et avantages que les nationaux en ce qui concerne le droit à l'éducation et le droit du travail sur le marché de l'emploi (article 5 et 6). Quant au Décret, il a crée, défini, composé, attribué le fonctionnement la Commission nationale chargée des Réfugiés (CNR) au Bénin. En effet, elle est crée auprès du Ministre de l'Intérieur. Son siège est à Cotonou. Le Ministre de l'Intérieur, de la Sécurité et de l'Administration territoriale ou son représentant en est le Président. Il travaille en collaboration avec ses collègues surtout avec celui de la Justice, de la Législation et des Droits de l'Homme, des Affaires étrangères, de la Protection Sociale et de la Condition féminine. La Commission a pour mission de : - reconnaître la qualité de réfugié à toute personne qui relève du mandat du Haut Commissariat des Nations-Unies pour les Réfugiés ou qui répond aux définitions de l'article 1er de la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, complétée par le Protocole du 31 janvier 1967 et / ou à celle de l'OUA du 10 septembre 1969 ; - assurer la protection juridique et administrative aux réfugiés ; - examiner les requêtes qui lui sont adressées par les réfugiés tombant sous le coup d'une des mesures prévues par les articles 31, 32 33 de Convention du 28 juillet 1951 relative au séjour irrégulier des demandeurs d'asile sur le territoire national, et de décider du maintien ou de l'annulation de ces mesure est suspendue ; - statuer sur les demandes de révision introduite par les personnes auxquelles la Commission n'aurait pas reconnu la qualité de réfugié ; - mobiliser et coordonner toute forme d'aide et d'assistance nationale ou internationale au profit des réfugiés ; - coordonner les actions des structures gouvernementales, du système des Nations-Unies, des Organisations non gouvernementales et autres intervenants au profit des réfugiés (article 8). Les articles 12, 13, 14, 15, 16 et 17 définissent la reconnaissance du statut du réfugié. Elle se procède comme suit : - constitution d'un dossier comportant une demande manuscrite dûment signée de l'intéressé et exposant les motifs de sa requête ainsi que, dans la mesure du possible, toute pièce justificative de son identité ; - le dépôt de dossier peut être fait à l'un des Ministères (l'Intérieur ou Affaire étrangères) ou au Bureau du HCR ; - le président de la Commission centralise toutes les requêtes et les transmet au Comité d'éligibilité pour étude et propositions. Il convoque ledit Comté toutes les fois que le nombre ou l'urgence des affaires à examiner l'exige ; - la décision de la Commission intervient dans les 90 jours qui suivent sa première réunion sur le cas concerné. Son silence au terme des 90 jours équivaut à une reconnaissance de la qualité de réfugié au requérant. Il en de même pour la requête en révision. - le requérant peut être convoqué à la réunion du Comité d'éligibilité pour plus amples informations. Si régulièrement convoqué, il ne se présente pas sans excuse valable, le comité délibère ; - le Représentant du HCR assiste en qualité d'observateur aux réunions du Comité d'éligibilité et de la Commission nationale avec voix consultative. Il peut être entendu sur chaque affaire ; - la notification de la décision de la Commission est faite directement au postulant par son président ; - les personnes auxquelles la qualité de réfugié n'est pas reconnue et celles qui ont perdu cette qualité se verront appliquer les textes en vigueur réglementant le séjour des étrangers en République du Bénin. Quant à la perte de la qualité de réfugié, elle est constatée dans les cas suivants : - lorsque la personne ne relève plus du mandat du HCR ; - cas prévus par l'article 1er section F de ladite Convention de Genève du 28 juillet 1951 ; - cas prévus par l'article 1er section F de ladite Convention ; - cas prévus au paragraphe 4 de l'article 1er de la Convention de l'OUA du 10 septembre 1969 ; - lorsque les activités du réfugié porte atteinte à la sécurité nationale et à l'ordre public. Tels sont les textes qui constituent les instruments juridiques définissant et réglementant les différentes contraintes qu'exige la gestion des réfugiés dans les pays d'accueil en général. Les instruments juridiques nationaux cités ci-dessus viennent spécifier la procédure et les modalités internes qu'exploite le Bénin dans la gestion des réfugiés en tant que pays d'asile. Au regard de ces instruments juridiques qui définissent le contexte et les modalités d'application et de gestion des réfugiés au Bénin, il s'avère nécessaire, à présent, de présenter la situation générale qui caractérise la Sous-région ouest africaine dans la production et dans la gestion des réfugiés, avec à l'appui quelques cas. 1.4- L'aperçu général de la situation dans la Sous-région10(*) Jusqu'en 1989, la région d'Afrique de l'Ouest avait connu des mouvements de réfugiés. Le HCR supervisait les programmes de protection et d'assistance à partir d'un bureau sous-régional à Dakar au Sénégal. En avril 1989, suite aux conflits ethniques dans leur pays d'origine, quelques 50000 Mauritaniens ont trouvé refuge au Nord du Sénégal. Vers la fin de l'année, une insurrection au Libéria a provoqué la fuite des Libériens vers la Côte d'Ivoire et la Guinée principalement. Avant la fin de 1990, le nombre des réfugiés était passé de quelques centaines à plus de 800.000 dont la majorité était d'origine libérienne et mauritanienne. Le nombre des réfugiés en Afrique a atteint 1,5 million en 1994. La période entre 1995 et 1998, en particulier, a vu la résolution de plusieurs crises politiques notamment, au Togo, en Sierra Leone, en Guinée Bissau, au Libéria, au Mali et au Niger d'où la baisse du nombre de réfugiés dans ces pays. En 2005, il y a environ 465.000 réfugiés en Afrique de l'Ouest. Le problème des réfugiés a principalement été résolu à travers le rapatriement et l'intégration locale. Depuis 1990, moins de 40.000 réfugiés ont trouvé une solution durable à travers la réinstallation. 1.5- Quelques cas de pays producteurs des réfugiés de la Sous-région 1.5.1- Le cas du Libéria11(*) La situation des réfugiés libériens est celle qui a le plus affecté la sous région en terme de durée et du nombre de réfugiés, et par conséquent, l'impact négatif sur la sécurité. Déjà à partir de 1989, il y a eu des mouvements massifs des populations du Libéria vers la Sierra Leone, la Guinée, le Bénin et la Côte d'Ivoire, avec des mouvements directs et secondaires vers le Ghana et le Nigeria. Il y a aussi eu des mouvements considérables en direction des Etats-Unis et des autres pays occidentaux. En 1991 et 1992, une réduction du nombre de réfugiés libériens a été observée. Elle était principalement due au retour spontané et à la re-vérification. De plus, les hostilités déclenchées dans les pays hôtes en mars 1991, ont poussé près de 100.000 réfugiés libériens à être soit rapatriés ou alors transportés en Guinée. La reprise des hostilités en octobre 1992 résultait de l'exode continu dans les pays voisins. A la fin de 1996, la situation libérienne a commencé a commencé à s'améliorer résultant ainsi à quelques retours spontanés des réfugiés. En juillet 1997, les élections générales ont été organisées, résultant encore à des retours spontanés. Avant la fin de l'an 2000, quelques 377.000 réfugiés libériens avaient déjà, depuis le début du programme de rapatriement, regagné leur pays soit de manière spontanée, soit avec l`assistance du HCR. Cependant, 1999, les signes d'une éventuelle reprise du conflit avaient été observés dans la région de Lofa. Avant la fin de 1999, des incidents relatifs à la sécurité avaient pris de l'ampleur au Nord, poussant ainsi quelques 8.000 Libériens à fuir le pays pour la Guinée. La guerre civile proprement dite a repris en 2002, résultant à l'exode d'environ 100.000 Libériens, dont quelques 18.500 (chiffre rond) nouvelles arrivées en Côte d'Ivoire, 31.000 en Guinée et 40.000 en Sierra Leone. Depuis le départ de Charles Taylor en août 2003, la signature de l'Accord de Paix, le déploiement de 15000 forces de l'ordre et la fin du processus de DDRR, une nouvelle lueur d'espoir pour la paix et la stabilité a émergé au Libéria. Environ 100.000 personnes déplacées internes sont retournées de manière spontanée depuis la signature de l'accord de paix.
La situation des réfugiés en Sierra Leone a commencé avec l'insurrection en mars 1991 du Front Révolutionnaire Uni de Foday Sankoh. Avant la fin de l'année, quelques 140.000 Sierra Léonais avaient quitté le pays pour la Guinée et le Libéria, et dans une moindre mesure, la Gambie. Cet exode a continué en 1992. En 1993, quelques 40.000 réfugiés avaient quitté la Guinée et le Libéria pour retourner dans leur pays. Cependant, le conflit s'est intensifié en mi-janvier et l'exode a évidemment recommencé. Avant la fin de 1995, il y avait près de 379.000 réfugiés dans la région. 1996 était une année positive en Sierra Leone avec la tenue des élections générales et la signature, le 30 novembre 1996, de l'Accord d'Abidjan. Malheureusement, le coup militaire du 25 mai 1997 et fin 1999, quelques150.000 réfugiés Sierra Léonais se sont réfugiés dans les pays voisins. En Septembre 2000, suites aux attaques transfrontalières sur les villages guinéens par les rebelles Sierra Léonais et Libériens, le ressentiment contre les réfugiés s'est installé davantage car, ils étaient perçus comme les véritables responsables de ces attaques. Pour cette raison, les autorités ont demandé que les réfugiés, qui vivaient depuis le début des années quatre-vingt dix parmi la population guinéenne, soit transférée dans les camps. 55000 réfugiés avaient été transférés dans les nouveaux camps et 30.000 assistés à retourner dans leur pays ; certains autres réfugiés ont décidé de rester dans leur pays d'origine. Dès leur retour, de nombreux Sierra Léonais ont dû, au départ, être logés dans les camps ou dans des communautés hôtes. De la fin de l'an 2000 à la fin de 2001, la population des réfugiés libériens était passée de 400000 à 179000. En dépit de quelques revers, la situation en Sierra Leone s'est progressivement améliorée et les retours ont continué. La fin de la guerre en Sierra Leone a été déclarée en janvier 2002 et le programme de rapatriement a pris fin en 2004.
La situation des réfugiés togolais a débuté en 1992 lorsque, suite à des troubles sévères d'ordre politique, les réfugiés ont commencé à fuir leur pays en direction du Ghana et du Bénin. Après quelques mois seulement, près de 300.000 réfugiés avaient déjà traversé dans ces deux pays. A partir de 1994, la situation a commencé à s'améliorer, résultant à des retours spontanés. Une opération organisée de rapatriement avait été lancée en 1995 et a continué jusqu'en 1997. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, treize ans après ces événements togolais, une nouvelle crise politique sans précédent a secoué en avril 2005 le Togo à la suite d'un hold-up électoral. Effet, après la mort du Président GNASSINGBE Eyadema, un coup d'Etat constitutionnel14(*) permettant l'installation du fils de feu Président, a été pratiqué par les barons du régime pour l'entretenir et le pérenniser. La riposte du peuple contre une telle manoeuvre politique ne s'est pas faite entendre. Conséquence, le pays s'est retrouvé dans un affrontement militaro-civile. Les premières vagues de réfugiés sont observées derrière les frontières ghanéenne et béninoise. Ces déplacements forcés de premières heures vont s'accentuer au lendemain même des élections présidentielles organisées avec ferveur et contraintes par le régime et qui ont vu porter Faure GNASSINGBE au pouvoir. On comptait alors au Bénin 24650 réfugiés togolais15(*) issus de cette crise d'avril 2005. Les trois cas évoqués ci-dessus présentent une Afrique de l'Ouest très conflictuelle et moins stable pendant ces deux décennies. Outre la déstabilisation politico-économique de cette région de l'Afrique et la précarité sociale que ces crises ont engendrées, on note une migration forcée sans précédent des hommes, des femmes et des enfants souvent innocents fuyant les émeutes. Les solutions durables retrouvées pour pallier au mal sont-elles si idoines pour régler le problème ? La réponse à une telle interrogation nous renvoie aux résultats de cette présente recherche. A présent, abordons la problématisation de la recherche qui, en premier lieu, note l'étude documentaire. * 1 UNHCR, Rapport 2005. * 2 Idem * 3 TEVOEDJRE A. (2002). Vaincre l'humiliation, p110. * 4 UNHCR, Réunion des Experts sur les Solutions durables à la situation des déplacements Forcés en Afrique de l'Ouest (2005). * 5 KPENONHOUN, C. (2004). Les enfants réfugiés au Bénin, p4. * 6 Idem, p4 * 7 Loi N°90-32 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du bénin, article 147. * 8 UNHCR-Bénin, 2007 * 9 CARLIER J. I. ( 2008) . Les Droits de l'Homme et les solutions durables aux réfugiés. Communication, Infosec, 24 janvier * 10 UNHCR, Regional Experts Meeting on Sustainable Solutions to Situations of Forced Displacement in West Africa, 2005, Accra, 2-6pp. * 11 Idem, 2-6pp. * 12Idem, 2-6pp. * 13 Idem, 2-6pp. * 14 Déclaration du Président de la Commission de l'Union africaine au lendemain des événements socio-politiques survenus au Togo en avril 2005 à la suite de la mort du Président GNASSINGBE Eyadema. * 15 Le trait d'Union, l'Organe d'information du système des Nations Unies au Bénin, n°8-9, octobre 2005, pp 98-99. |
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