la société anonyme à directoire et à conseil de surveillance en tunisie(étude comparative France -Tunisie)( Télécharger le fichier original )par Kais Ben Saida Université de perpignan - master en droit privé et sciences criminelles 2005 |
B- la qualité de personne morale.La possibilité pour les personnes morales d'accéder aux nouveaux organes, porte en elle-même indice sur la vocation de l'organe social lui-même. Ici encore la situation diffère entre le directoire et le conseil de surveillance, pour ce dernier l'art 240 admet expressément cette possibilité, par contre l'art.225 interdit aux personnes morales de siéger au directoire. L'art 225 al.2 du CSC dispose que « le directoire peut se composer de cinq membres au maximum. Ils doivent obligatoirement être des personnes physiques ». Il ressort des dispositions de ce texte que les personnes morales sont exclues du directoire41(*), cette différence est alors constatée entre les membres de l'organe de contrôle et de l'organe de gestion. En outre, la doctrine estime qu' « il faut en déduire que toutes les délibérations auxquelles la personne morale irrégulièrement nommée aurait pris part, seraient semblablement nulles42(*)». Ceci dit que la personne morale nommée au directoire devra restituer les rémunérations qu'elle avait perçues43(*). En plus le conseil de surveillance, qui est l'auteur de cette nomination irrégulière, peut engager sa responsabilité. Le fondement de cette interdiction tient à la volonté du législateur d'assurer une meilleure gestion de la société en la dotant d'un directoire cohérent et efficace ; Or, cela présenterait au moins trois inconvénients. En effet, comme le choix du représentant permanent relève de la compétence exclusive de la personne morale celle-ci peut désigner une personne inappropriée. Ensuite, les décisions du directoire doivent être prises collégialement, or cette collégialité risque d'être altérée si certains membres du directoire à savoir les représentants permanents des personnes morales ne se décident qu'en fonction d'ordres venus de l'extérieur. En outre, au cas ou la personne morale exclue son représentant et ne le remplace que tardivement, ceci ne va pas avec le fait qu' « on a voulu un directoire fortement collégial, indépendant et stable, véritable source du pouvoir de gestion de la société 44(*)». Enfin, le représentant de la personne morale peut être remplacé fréquemment, ce qui peut porter atteinte à la cohésion du travail du groupe de l'organe de direction. Et en ce qui concerne l'appartenance des personnes morales au conseil de surveillance, cette dernière est presque naturelle, en effet cet organe se présente comme un relais permettant aux actionnaires y compris les personnes morales de surveiller l'action de la direction. D'ailleurs selon l'art 240 CSC : « une personne morale peut être nommée au conseil de surveillance ». Il ressort de cette disposition que le législateur Tunisien, comme son homologue français45(*), admet la nomination des personnes morales au conseil de surveillance. Cependant, et « à peine de nullité de leurs nominations, le président et le vice président du conseil de surveillance doivent être des personnes physiques » et ce conformément à l'art 244 al 2 CSC. En outre, comme la personne morale ne peut s'exprimer sur la scène juridique que par l'intermédiaire de son représentant -personne physique 46(*), l'art 240 du CSC dispose que : « une personne morale peut être nommée au conseil de surveillance ,lors de sa nomination elle est tenue de désigner un représentant permanent... », et précise que cette nomination doit se faire « lors de sa nomination », c'est-à-dire immédiatement. Ce caractère immédiat de la nomination est d'ailleurs confirmé par le fait que le même article précise que lorsque la personne morale révoque son représentant elle est tenue de pouvoir « en même temps » à son remplacement. Cette rapidité est nécessaire pour ne pas perturber la composition du conseil.47(*) On remarque que la loi traite ce représentant permanent comme un membre originaire du conseil de surveillance. Il est en effet « soumis aux mêmes conditions et obligations et encourt les mêmes responsabilités civiles et pénales que s'il était membre du conseil, en son nom propre, sans préjudice de la responsabilité solidaire de la personne morale qu'il représente », selon l'art 204 CSC. Il ressort de ce texte que le représentant est soumis aux mêmes droits et obligations que les autres membres, mais il est soumis à une double responsabilité individuelle et solidaire. Cette solidarité va pousser la personne morale et son représentant à se comporter comme un membre « avisé » et un mandataire « loyal » ;Cette responsabilité solidaire permet d'éviter la dilution des responsabilités ,ce qui pousse le représentant permanent à rendre convenablement sa mission . * 41-La même exclusion est prévue aussi en droit français dans l'article 120 alinéa 3 de la loi 1966.les personnes physiques sont les membres originaux et exclusifs du directoire. * 42-H.LABORD, op.cit, page 24. * 43-P. LE CANNU, th.précitée, p.221. * 44-P.LE CANNU, thése.précitée, n°273, p.226. * 45-aussi le droit français consacre la même solution dans l'article 135 de la loi 1966. * 46-art.5 du code des obligations et contrats. * 47-Dans ce cas et selon le droit français, elle est tenue aussi « de notifier sans délai à la société, par lettre recommandée, cette révocation, ainsi que l'identité de son nouveau représentant permanent » selon l'art.102 al.2 du décret français de 1967 ; il en est « de même en cas de décès ou de démission du représentant permanent » selon J.J.CAUSSAIN, J-CL ; Fasc.133-D, n°37, p.8. |
|