II. ANALYSE
QUALITATIVE
Après une analyse du nombre ou des effectifs des
papiers publiés sur la RCA, il importe maintenant de rentrer dans le
contenu pour comprendre la façon à laquelle les deux
hebdomadaires français ont traité les informations sur ce pays.
La RCA est une ancienne colonie de la France. A ce titre, l'Hexagone a des
liens étroits avec Centrafrique dans le cadre des accords de
coopération et d'assistance. Au-delà donc de la
considération de la RCA comme un pays comme tous les autres, et qui peut
faire l'objet d'un papier journalistique, il y a ce lien avec la France
à ne pas négliger. D'ailleurs le nombre considérable des
articles parus dans les deux magazines en 1979 fait la lumière sur cette
hypothèse. L'année 1979 est la fin de l'empire centrafricain, et
donc du règne de Jean Bedel Bokassa qui a des liens d'amitié avec
l'ancien président français Valérie Giscard d'Estaing.
Pour cela, les médias français avaient focalisé un
projecteur particulier sur le déroulement du renversement et de la chute
de Bokassa à Bangui. Il s'en est suivi de l'exil de ce dernier en
France, puis refugié à Abidjan en Côte d'Ivoire avant le
début des polémiques sur le don du diamant à
Valérie Giscard d'Estaing et l'affaire Delpey, proche ami de Bokassa et
travaillant à l'époque pour l'Elysée. Le Nouvel
Obs et L'Express ne pouvaient que s'intéresser à la
Centrafrique pour comprendre son lien avec la France et la suite de l'affaire
du diamant entre Bokassa et Giscard d'Estaing.
Le deuxième sujet qui a intéressé les
médias français et qui les a poussé à parler de la
RCA est les troupes françaises manoeuvrant à l'étranger.
Bangui compte de centaines d'hommes français qui tiennent une armada
militaire d'intervention dans la sous région (comme ce fut le cas pour
la guerre du Tchad). Des jaguars français décollent de
l'aéroport de Bangui pour des opérations militaires dans la sous
région. Ce même effet réapparaît en 1996 et 1997
pendant la mutinerie en Centrafrique où la France avait soutenu l'ancien
président Ange Félix Patassé. Pendant ces interventions de
la défense des intérêts de la France, de la protection des
ressortissants français etc, l'armée française avait
perdue deux hommes sur le terrain. En outre, le voyage de François
Mitterrand à Bangui en 1983 a augmenté le nombre des articles
diffusés sur la RCA, même si L'Express n'a rien dit sur
ce sujet à cette année là.
De tout ce qui précède, il en ressort que la
qualité et la façon du traitement des informations sur la
République Centrafricaine est stéréotypée et
orientée sur un angle français. En parcourant les articles
publiés, l'on se rend compte facilement que les journalistes
français se sont intéressés à la RCA que parce que
le sujet touche la France. C'est la « Loi de
proximité » qui consiste à ne traiter que les sujets
qui touchent le lectorat, qui intéressent le lectorat pour vendre et
faire du chiffre d'affaire. Le professionnalisme laisse la place au
marketing.
Par ailleurs, les papiers publiés sur la RCA concernent
pour la plupart des faits qui se sont déroulés à la
frontière. Le nom du pays est mentionné pour expliciter, faire
allusion aux pays frontaliers. Les grands articles du Nouvel Obs en
1986 concernaient le Tchad. Et comme la RCA est frontalière au Tchad, le
nom du pays y est mentionné à ce titre.
Les informations sont traitées de manière
superficielle avec des clichés. Dans la majorité des analyses,
les journalistes soulignent la pauvreté dans ce pays, les
différents problèmes d'infrastructure auxquels ce pays se
confronte. Sur l'ensemble des 91 articles publiés tant dans Le
Nouvel Obs que L'Express de 1979 à 2003, aucun ne fait
état d'un constat positif, d'un développement, ou de
l'amélioration de la situation dans ce pays. Il n'existe pas non plus
une analyse approfondie des sujets traités. Les articles ne mentionnent
presque jamais la situation géographique, sociodémographique,
historique de la RCA. Pratiquement tous les sujets sont orientés sur
l'économie et la politique. Et la politique en comparaison ou en lien
avec la France.
Les sujets abordés dans les pages de ces deux
hebdomadaires concernant la Centrafrique sont d'ordre militaire, politique et
économique. Le paradoxe est qu'en Centrafrique, il y a eu de nombreux
troubles militaro-politiques. Mais les deux magazines n'ont parlé que
des événements qui impliquent la France ou l'armée
française. L'exemple le plus probant est le cas du coup d'Etat du
général André Kolingba en 1981, quand il a chassé
du pouvoir David Dacko que la France a installé au pouvoir après
avoir chassé Bokassa en 1979. Ce putsch n'a pas été
mentionné dans les colonnes du journal L'Express, même si
Le Nouvel Obs l'a souligné. Le Nouvel Obs conserve
néanmoins une qualité de traitement d'informations relativement
objective par rapport à L'Express. Car, il s'efforce de traiter
des informations sur tous les sujets de société, même si
ces sujets sont en lien étroit avec la France. Par exemple, le magazine
a réalisé un reportage sur les avancées du virus du SIDA
à Bangui le 09 janvier 1987. Le sujet a été traité
avec un accent particulier sur les efforts des médecins et chercheurs de
l'Institut Pasteur de Bangui, qui est un institut français. Il faut
noter toutefois que ce magazine a publié au moins dans chacune des
années un article sur la RCA. Les articles étant
rédigés par des journalistes, nous allons maintenant comprendre
quel journaliste rédige ces différents articles, de leur milieu
à leur formation.
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