CHAPITRE I - APPROCHE ACTUARIELLE ET EVALUATION
OBLIGATAIRE
Section 1 : Les outils d'analyse actuariels Section 2 :
L'évaluation des obligations
CHAPITRE II - STRATEGIES DE GESTION OBLIGATAIRE
Section 1 : Les stratégies actives de gestion obligataire
Section 2 : Les stratégies passives de gestion obligataire
L'investisseur en obligations ne doit jamais se satisfaire de
savoir la nature de son obligation, la méthode de placement de celle-ci
ou encore les risques auxquels il se trouve confronté, mais il doit
toujours avoir une idée précise sur les outils de mesure de ces
risques et la maîtrise de l'évaluation de ses obligations
permettant de maximiser le plus possible son rendement et ainsi réduire
le risque.
En effet, la gestion obligataire a évolué avec
le temps ; il ne s'agit plus, pour les investisseurs, de choisir la dimension
de leur portefeuille et de maîtriser les outils actuariels classiques
tels que la duration ou la sensibilité d'une obligation au taux
d'intérêt, mais bien plus encore, l'appréhension d'une
modélisation efficace de la courbe des taux d'intérêt
s'avère incontournable pour le gérant de portefeuille
obligataire.
Toutefois, le processus de gestion obligataire repose sur des
stratégies bien spécifiques qui doivent être
appréhendées par l'investisseur dans un raisonnement
hiérarchique bien organisé et suffisamment structuré.
Souvent, la pertinence des choix des investisseurs dépend fortement des
stratégies entreprises, il s'agit de cibler la stratégie la plus
adéquate en fonction des situations pendant un horizon d'investissement
déterminé.
Tous ces instruments seront présentés dans cette
première partie purement théorique. Dans un premier chapitre,
nous présenterons les outils actuariels et les méthodes
d'évaluation d'obligations à travers l'analyse de la courbe des
taux d'intérêt. Le deuxième chapitre de cette partie sera
consacré à la présentation des différentes
stratégies de gestion obligataire.
Ce chapitre se structure comme suit :
Section 1 : Les outils d'analyse actuariels Section 2 :
L'évaluation des obligations
Le champ de la gestion obligataire est très
vaste, de la diversité des marchés financiers à la grande
variété d'actifs financiers, on assiste au développement
de nombreux outils d'analyse permettant de mieux comprendre le mécanisme
des obligations. Toutefois, ces outils sont appelés `actuariels', ils se
basent donc sur le principe de l'actualisation qui présente certains
avantages mais aussi des inconvénients.
Nous allons essayer dans ce chapitre d'expliquer
ce principe tellement répandu dans l'environnement financier et
présenter tous les outils nécessaires à la mesure du
risque de taux. Ensuite, nous opterons pour l'évaluation des obligations
à travers l'appréhension de la notion du taux
d'intérêt, la présentation de la structure par terme de
taux et d'en projeter les théories explicatives.
Section 1. Les outils d'analyse actuariels
Avant de passer à l'évaluation des obligations,
nous avons jugé nécessaire d'aborder en premier lieu les outils
d'analyse des risques pour pouvoir maîtriser, ensuite, le processus
d'évaluation. La sensibilité, duration et convexité des
obligations à taux fixes sont des éléments habituels des
financiers leur permettant d'apprécier le risque de taux. La
connaissance de ces valeurs instantanées d'un portefeuille et leur
projection permettent d'établir une stratégie d'investissement ou
de désinvestissement en fonction de l'anticipation de la courbe des
taux, tout en respectant certaines contraintes imposées sur ce
portefeuille.
1. Le taux de rendement actuariel
Le rendement actuariel (yield) constitue le premier outil
utilisé pour l'analyse des risques. Il est basé sur un concept
très important : l'actualisation.
1.1. L'actualisation
Pierre Vernimmen1 définit
l'actualisation comme étant : « la méthode consistant
à déterminer la valeur d'aujourd'hui de flux qui se produiront
dans le futur : elle est donc l'inverse de la capitalisation. Elle permet de
comparer des sommes reçues et versées à des dates
différentes. »
Soit P la valeur actuelle de l'actif
étant placé à un taux t pour n périodes, on aura au
terme des n périodes : Pn =
P.(1+t)n. Par contre, le montant P
payé en début de période est tel que : P =
Pn.(1+t)-n.
Ainsi, il est possible de calculer la valeur de l'actif
à n'importe quel moment de la période de son placement. Ce qui
permettra de comparer les évolutions des prix par rapport aux taux de
l'actif financier.
1.2. Le taux actuariel
Le taux actuariel est le taux calculé sur un
modèle actuariel, lequel est une simplification du processus
d'actualisation. Il s'agit du taux qui permet d'égaliser la somme des
valeurs futures (coupons + remboursement ou valeur de vente), et la valeur
d'émission du titre.
Le taux actuariel n'est autre qu'une solution de
l'équation qui dépend des caractéristiques propres au
titre obligataire. Ainsi, pour une obligation remboursable à
l'échéance et ayant pour variables :
1 Pierre Vernimmen, analyste
financier, diplômé du HEC, auteur du livre Finance
d'Entreprise.
P : prix de l'obligation en pourcentage de la
valeur nominale N : durée de vie de l'actif (en
années)
C : Les flux (intérêts
périodiques)
r : taux de rendement
On obtiendra :
C C C+K
P = + + · · · +
(1+r) (1+r)2 (1+r)N
De cette formule, on déduira que le taux actuariel
correspond tout simplement au taux nominal dans le cas où il n'existe ni
prime d'émission, ni prime de remboursement, et aussi lorsque les
paiements périodiques relatifs à l'obligation sont
réinvestis au même taux et pendant la même période
(annuel, semestriel, trimestriel...etc.).
Le taux de rendement nous paraît donc assez pratique vu
que le remboursement du nominal est généralement à
l'échéance de l'obligation (in fine), il se
caractérise aussi par sa simplicité de calcul et son apparence
car il est souvent proche des taux d'intérêt en vigueur sur le
marché, néanmoins, cet outil présente des
inconvénients.
En effet, l'inconvénient majeur du modèle
actuariel, qui applique le même taux d'actualisation à tous les
flux, est le fait que ce taux ne correspond véritablement à la
réalité que lorsque la courbe des taux est plate, un fait qui est
assez rare sur le marché.
Aussi, l'hypothèse selon laquelle les flux sont
réinvestis au même taux pour chaque période, fait du
modèle actuariel un champ d'analyse restreint.
Exemple
Prenons comme exemple une obligation remboursable in
fine ayant les caractéristiques suivantes :
P : 105%
Taux de coupon : 7% Maturité : 6
ans
Les cash-flows annuels qui sont payés sont composés
d'intérêts périodiques calculés sur le capital
restant dû : Intérêt = Coupon annuel x capital restant
dû1.
Le taux de rendement actuariel t relatif
à cette obligation est une solution de l'équation :
105 = 7
(1+t)
|
7 +...+7+100
+ (1+t)2 (1+t)6
|
Ainsi, et étant donné que le prix de l'obligation
change constamment, à chaque prix correspondra un taux actuariel
déterminé en remplaçant dans le formule
précédente.
2. La duration actuarielle
Le concept de duration est utilisé dans la mesure
temporelle d'un titre obligataire. En effet, l'investisseur sur le
marché financier peut se poser la question : comment mesurer la
durée de vie d'un titre à un instant donné ? La duration
vient en réponse à ce questionnement.
Le principe de la duration est une idée inspirée
par le financier Frédéric Macaulay en 1938, puis
développé quelques années plus tard par d'autres
personnalités du marché financier. Néanmoins, il ne sera
utilisé comme outil de gestion qu'au début des années 70
car il s'est avéré performant pour son utilisation dans ce
domaine.
2.1. Durée de vie de l'obligation
La duration peut être interprétée comme
durée de vie à maturité ou bien comme une durée
moyenne. Néanmoins, ces mesures ne reposent pas sur le modèle
actuariel.
2.1.1. La durée de vie à
maturité
Elle représente la durée pendant laquelle
l'investisseur attend pour recevoir son ultime flux. Elle peut être
calculée à n'importe quel moment après la date de
l'émission à condition qu'elle soir prévue dans le contrat
de l'émission.
Cette mesure est très pertinente en particulier si
l'obligation est remboursable in fine, cependant, cette mesure ne
concerne pas les obligations remboursables par amortissements
échelonnés.
2.1.2. Durée de vie moyenne
Cet outil a pour avantage de s'appliquer pour les obligations
tenues par le remboursement par amortissements, Frédéric Macaulay
a été le premier à définir ce concept comme «
l'essence de l'élément temps d'un prêt », il s'agit de
la moyenne pondérée des durées de chaque fraction de
l'emprunt, il suffit d'en calculer la maturité de chaque fraction
proportionnellement au nombre des titres. Par ailleurs, cette option doit
être prévue dans le contrat d'émission.
Exemple
Il suffit de prendre un exemple simple pour comprendre ce concept
: prenons un emprunt obligataire amorti annuellement selon
l'échéancier ci-après :
Tableau n°1 : Exemple durée de vie
moyenne
Années
|
Nombre de
titres remboursés
|
1
|
100
|
2
|
120
|
3
|
140
|
4
|
160
|
5
|
180
|
6
|
200
|
Total
|
900
|
Le durée de vie moyenne sera donc de :
Dm
100x1+120x2+140x3+160x4+180x5+200x6 = 3,89 années
= 900 Pour parvenir à ce résultat, la formule
générale utilisée est la suivante :
Où :
mj : amortissement à la jème
échéance. J :
période jusqu'à la jéme
échéance.
Ainsi, on en déduit que cette méthode n'est
applicable qu'aux emprunts amortissables avant l'échéance finale
puisque l'on sait que la durée moyenne d'une obligation remboursable
in fine est la maturité finale. Par ailleurs, nous remarquons
que la durée de vie n'utilise pas du tout le modèle actuariel car
elle repose sur le principe de composition des flux de diverses
échéances sans pour autant les actualiser.
La duration actuarielle permet de pallier à cet
inconvénient.
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