Section 2. Le marché obligataire
Sachant que le marché obligataire est un compartiment du
marché des capitaux, il est donc nécessaire d'étudier
celui-ci en général avant de passer au marché
obligataire.
1. Le marché des capitaux
Le marché des capitaux est le lieu de rencontre entre
les agents économiques à besoin de capitaux et les agents ayant
des excédents de fonds. Ces fonds sont drainés à l'aide
d'émissions de titres. Ils permettent le financement des investissements
à long terme ou bien de besoins à court terme.
Le marché des capitaux est composé de deux
grands compartiments : le marché monétaire destiné au
financement de besoins à court terme et le marché financier ayant
pour objet la mise à disposition des entreprises de capitaux
nécessaires aux investissements de longues périodes.
1.1. Le marché monétaire
Le marché monétaire est le marché de la
liquidité. Ce marché rassemble généralement les
offres et les demandes sur les fonds circulant dans l'économie et
qu'utilisent les entreprises, l'Etat, les institutions financières et
les particuliers. Toutefois, la règlementation a fait que ce
marché soit défini par l'échéance des
opérations qui y ont lieu, et qui s'étendent
généralement sur le court terme. C'est un marché
délocalisé traitant les offres et demandes de capitaux à
court terme.
Pendant de longues années, ce marché a
été réservé uniquement aux banques et à
quelques entités non bancaires. Mais, depuis les années 90 et la
dérégulation financière, le marché monétaire
a été élargi aux agents non financiers qui peuvent
désormais y intervenir en émettant ou en achetant des titres de
créance négociables (TCN).
A cet effet, il en existe deux compartiments du marché
monétaire : le marché interbancaire et le marché des
TCN.
1.1.1. Le marché interbancaire
Appelé aussi « marché de déport
», c'est un marché délocalisé où
s'échangent les capitaux entre les investisseurs institutionnels
seulement (les banques et sociétés d'assurance). Il permet un
financement à court terme.
Les taux d'intérêt se forment selon la loi de
l'offre et de la demande. Les transactions s'accomplissent de gré
à gré entre les intervenants qui entrent en relation soit
directement ou bien indirectement à l'aide d'intermédiaires.
1.1.2. Le marché des Titres de Créance
Négociables
C'est le marché des actifs monétaires facilement
transformables en liquidité. Sur ce marché interviennent à
la fois des emprunteurs financiers (Trésor Public, Etablissements de
crédits) et emprunteurs non financiers (entreprises). C'est le lieu
où se refinancent à court et moyen termes les opérateurs
économiques.
Les titres échangés sur ce marché sont de
trois types :
> Les valeurs de Trésor : ce
sont des titres à maturité relativement courte ayant pour
émetteur exclusif : l'Etat ;
> Les certificats de dépôt :
sont des instruments d'emprunt émis par des banques ;
> Les billets de trésorerie :
comme leur nom l'indique, ce sont des instruments de
créance permettant à leurs émetteurs (personnes morales
non bancaires ayant le statut de société par actions) de financer
leurs besoins momentanés en trésorerie.
1.2. Le marché financier
Deuxième grand compartiment du marché des
capitaux, le marché financier constitue la partie la plus importante en
termes de volumes échangés sur tout le marché des
capitaux. C'est le marché d'échange et de négociation,
à long terme, des valeurs mobilières dont les plus connues sont
les actions et les obligations. Nous nous baserons beaucoup
plus sur le développement du marché obligataire, objet de notre
étude.
1.2.1. Le marché des actions
C'est l'emplacement où s'échangent les titres de
propriété : « les actions », lors de la constitution du
capital d'une société ou bien lors d'une ouverture de capital.
Les actions sont des titres représentatifs d'apports en numéraire
ou en nature destinés à la constitution du capital d'une
société. Elles confèrent à leurs détenteurs
des revenus appelés dividendes.
1.2.2. Le marché obligataire
Le marché obligataire est le marché où
sont échangées et négociées les obligations qui
peuvent être émises par l'Etat, les collectivités
publiques, les entreprises et les institutions financières. Un lieu
d'échange qui est le `marché primaire'
et le lieu de négociation des obligations appelé
`marché secondaire'. Il convient donc de
détailler le marché obligataire, objet de notre étude,
dans le point qui suit.
2. Organisation du marché
obligataire
Le marché obligataire est constitué de deux grands
compartiments : le marché primaire et le marché secondaire. Ces
deux sous-marchés sont présentés en détail dans ce
qui suit :
2.1. Le marché primaire
Appelé également « marché du
neuf », c'est un marché délocalisé qui met en
relation directe l'émetteur et le souscripteur d'un titre. Les
entreprises, l'Etat, les institutions financières et les
collectivités publiques se rencontrent pour la première fois sur
le marché lors d'une émission de titres obligataires neufs.
Le marché primaire peut gérer plusieurs types
d'émissions, à savoir :
V' L'émission de nouveaux titres obligataires sur le
marché ;
V' La possibilité d'émission de titres
après transformation des bons de souscription en nouvelles obligations
;
V' L'assimilation d'une tranche nouvelle à une
émission déjà réalisée.
Ainsi, les valeurs émises sur ce marché peuvent
par la suite être négociées sur un autre marché plus
dynamique appelé le marché secondaire.
2.2. Le marché secondaire
Le marché secondaire représente le
marché où sont échangées et négociées
les obligations émises sur le marché primaire. C'est un
marché organisé ayant l'apparence d'une centralisation dans le
cadre du marché boursier. Il assure donc la liquidité des titres
aux investisseurs, et sert aussi à la détermination des prix des
obligations établis en fonction de l'offre et la demande sur le
marché.
3. Les intervenants sur le marché
obligataire
Le marché obligataire fait intervenir certains acteurs
qui contribuent à sa dynamique et qui installent une certaine
vivacité et continuité pour celui-ci. Il en existe
plusieurs intervenants qui sont : les émetteurs, les investisseurs et
les instances de régulation des
opérations sur le marché. Néanmoins, les
pouvoirs et les motivations diffèrent entre chacun des intervenants sur
le marché des émissions obligataires.
3.1. Les émetteurs
3.1.1. L'Etat et les collectivités
Les émissions effectuées par ces deux acteurs
représentent une part assez importante au regard du nombre des
émissions effectuées par les émetteurs. La politique
budgétaire suivie par l'Etat l'oblige parfois à procéder
à des émissions dans le but de financer ses insuffisances
budgétaires.
3.1.2. Les établissements de
crédit
Ce sont les banques et les entreprises financières qui
recourent aux marchés financiers en vue du financement de leurs besoins
économiques.
3.1.3. Les entreprises
La stratégie de développement et
l'évolution économique des entreprises les obligent à se
financer sur le long terme. En effet, le recours au marché obligataire
leur permet de financer leurs investissements dans la perspective d'une
croissance continue et stable. Les entreprises qui recourent le plus au
financement sur ce marché sont les Sociétés Par Actions
(SPA) en raison de leur valeur importante dans l'économie. En outre,
selon l'article 715 bis 82 du code de commerce :
« L'émission d'obligations n'est permise qu'aux
sociétés par actions ayant deux années d'existence et qui
ont établi deux bilans régulièrement approuvés par
les actionnaires, et dont le capital est entièrement
libéré ...».
3.2. Les investisseurs 3.2.1. Les banques
La mission que mène la banque sur ce marché est
celle d'intermédiaire entre les acheteurs et vendeurs de titres. Par
ailleurs, les banques peuvent constituer leurs propres portefeuilles
obligataires pour développer leur situation financière et
économique.
3.2.2. Les institutionnels
Ces institutions ont un rôle très important sur
le marché obligataire. Elles contribuent à la dynamique des
marchés de capitaux mondiaux. Cette catégorie d'investisseurs est
constituée de sociétés d'assurance, des caisses de
retraite, des caisses de dépôts et aussi les OPCVM (Organisme de
Placement Collectif de Valeurs Mobilières). Ces entités peuvent
ainsi émettre des obligations sur le marché.
3.2.3. Les institutions non financières et les
particuliers
Ce sont les établissements autres que financiers et toutes
personnes morales ou physiques, pouvant aussi investir dans les titres
obligataires.
3.3. Les acteurs du marché 3.3.1.
L'autorité du marché
Elle représente la tutelle du marché. En
Algérie, il s'agit de la Commission d'Organisation et de Surveillance
des Opérations de Bourse (COSOB) 1 pour les
titres corporatifs et de la Direction Générale du Trésor
pour les titres de l'Etat ; chargés notamment de :
V' L'organisation et la surveillance des opérations sur le
marché des valeurs mobilières ; V' La protection des
investisseurs et la transparence du marché.
A cet effet, l'autorité du marché doit accomplir
ses missions à travers :
> Un pourvoir règlementaire :
par lequel la COSOB impose les règles de bon fonctionnement des
marchés ;
> Un pouvoir de surveillance et de contrôle
: en s'assurant de la bonne application des règlements
qu'elle impose ;
> Un pourvoir disciplinaire et arbitral
: cette institution est habilitée à appliquer les
mesures disciplinaires nécessaires suite à la transgression des
lois et règlements ou à leur mal interprétation.
3.3.2. La société de gestion
La bourse des valeurs mobilières est un marché
réglementé où se négocient les différentes
valeurs cotées. La société de gestion est une entreprise
qui est chargée d'en assurer la gestion et la liquidité des
titres. En Algérie, c'est la Société de Gestion des
Valeurs Mobilières (SGBV) dont les actionnaires sont des
Intermédiaires en Opérations de Bourse (IOB) agrées par la
COSOB.
La loi définit les missions de la SGBV dont les
principales sont :
i' L'organisation pratique de l'introduction en bourse des
valeurs mobilières admises ; i' L'organisation et l'enregistrement des
séances de négociation ;
i' La publication des informations concernant les transactions en
bourse ;
i' La gestion du système de cotation et l'édition
d'un bulletin officiel de la cote.
1 Autorité de
régulation indépendante, jouissant de la personnalité
morale et de l'autonomie financière. Elle a été
instituée par le décret législatif n° 93-10 du 23 mai
1993, modifié et complété, relatif à la bourse des
valeurs mobilières.
3.3.3. Le dépositaire des titres (Algérie
clearing)
Depuis la dématérialisation des titres, qui sont
désormais gérés en comptes courants, la loi a
décidé de créer une institution sous forme de
société par action SPA dont le capital est souscrit par les
banques et sociétés cotées en bourse. Le
dépositaire central des titres établit des relations avec les
divers acteurs du marché pour une gestion efficace de l'information
financière. Il est soumis au contrôle de l'autorité du
marché.
1. Fonctions du dépositaire
central
V' Ouverture et administration des comptes titres pour les
teneurs de titres y adhérents ;
V' Mise en oeuvre des opérations sur titres
ordonnées par les sociétés émettrices ; V'
Codification des titres selon les normes internationales I.S.I.N 1
;
V' Publication des informations relatives au marché.
2. Les adhérents au dépositaire des
titres
V' Les banques et établissements financiers ; V' Les
intermédiaires en opérations de bourse ; V' Les
spécialistes en valeurs du trésor (SVT) ;
V' Les personnes morales émettrices de titres admis aux
opérations du dépositaire ;
V' Les dépositaires centraux étrangers
émetteurs de titres ;
3. Actionnaires d'Algérie
Clearing
Algérie Clearing compte à aujourd'hui huit
(8) actionnaires, partagés entre IOB (BNA, BADR, BEA, CPA, BDL et CNEP
banque) et deux sociétés cotées en bourse (SAIDAL et EL A
URASSI).
Par ailleurs, la Banque d'Algérie et le Trésor
Public sont des actionnaires de droit.
A noter aussi que la participation minimale au capital est
définie à deux (2) millions de dinars.
3.3.4. Les professionnels du marché
1. Les intermédiaires en opérations
de bourse (IOB) « Sont des professionnels du marché
boursier, ils détiennent l'exclusivité de la négociation
des valeurs mobilières en bourse, ils peuvent également exercer
des activités de gestion de portefeuille et de placement. En revanche,
l'achat ou la vente des bons du Trésor fait intervenir une autre
catégorie d'intermédiaires financiers qui sont les
spécialistes en valeurs du Trésor (SVT), agrées par la
Direction Générale du Trésor (DGT). Ces derniers assurent
la gestion de
1 International Securities
Identification Number.
prise ferme sur le marché primaire des valeurs du
Trésor et détiennent le monopole de négociation de ces
valeurs à titre mandataire sur le marché secondaire
»1.
Afin d'assurer la garantie des transactions, l'activité
des IOB est soumise au contrôle et à la surveillance de la
COSOB.
2. Les teneurs de comptes-conservateurs de titres
-TCC -2 : selon le règlement COSOB
n°03-02 du 18 mars 2003 : « La tenue de compte-conservation de titres
consiste, d'une part à inscrire en compte les titres au nom de leur
titulaire, c'est-à-dire à reconnaître au titulaire ses
droits sur lesdits titres, et d'autre part à conserver les avoirs
correspondants, selon des modalités propres à chaque
émission de titres »3, le
teneur-conservateur de titres assure la garde, la protection et
l'administration des valeurs au nom de leurs titulaires.
> Principaux organismes autorisés à
exercer l'activité de TCC :
- Les banques et établissement financiers
habilités ;
- Les intermédiaires en opérations de bourse (IOB)
;
- Les sociétés émettrices pour les valeurs
qu'elles émettent et qu'elles gèrent directement, et ;
- Les institutions autorisées à effectuer des
opérations de banques prévues par les dispositions
règlementaires qui les régissent.
3. Les organismes de placement collectifs en
valeurs mobilières (OPCVM) : Ont pour mission de placer
les valeurs mobilières et autres produits financiers et d'en assurer la
gestion. Les OPCVM représentent une opportunité de gestion
collective des valeurs mobilières permettant d'investir en bourse en
fonction d'une stratégie de gestion préalablement définie.
Les investisseurs y trouvent un moyen de gestion des titres de façon
active et professionnelle.
On distingue deux grandes familles d'OPCVM : les FCP (fonds
communs de placement) et les SICAV (sociétés d'investissement
à capital variable). Ces deux entités se distinguent non pas par
le mode de leur financement, mais par leur nature juridique : la SICAV est une
société par actions tandis que le FCP est un fonds de porteurs de
capitaux.
Les actions des SICAV et les parts des FCP ne sont pas
cotés en bourse. La négociation de ces titres se fait au niveau
de l'OPCVM lui-même.
1 COSOB, Guide des valeurs
mobilières, Août 2004, pages 2 et 3.
2 En Algérie, les teneurs de
comptes sont essentiellement des banques publiques : BDL, BNA, BEA, CNEP, CPA
et BADR.
3 Article n°02 du
règlement COSOB n° 03-02 du 18 mars 2003 relatif à la tenue
de compte -conservation de titres.
A travers ce chapitre, nous avons passé en revue
les différents titres obligataires qui sont échangés et
négociés dans un cadre règlemen taire et organisé,
que sont les marchés de titres. Ces produits sont émis par des
agents émetteurs au profit de différents investisseurs
habilités en vue de réaliser un certain rendement au profit d'un
risque pas forcément mesurable qu'il soit lié
spécifiquement aux obligations ou bien relatif au marché, et
négociés sur le marché secondaire à l'aide
d'intermédiaires règlementairement autorisés à
effectuer ces transactions moyennant des commissions non négligeables vu
les montants transigés sur ce marché.
Toutefois, la gestion d'un portefeuille ne
nécessite pas uniquement de définir les obligations dans
lesquelles on va investir, ou bien de déterminer le rendement
souhaité ou de connaître la situation des marchés, mais
bien plus, le processus de gestion contraint le gestionnaire à
évaluer les obligations, à analyser leurs risques ainsi que
l'évolution des indicateurs relatifs à une obligation par rapport
au marché.
PREMIERE PARTIE
LES ASPECTS THEORIQUES DE
LA GESTION OBLIGATAIRE
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