VI. SYNTHÈSE
Notre étude a permis de décrire l'état
nutritionnel des enfants de moins de cinq ans du DS de Tougan et d'identifier
certains des facteurs de risque associés.
Nous avons constaté que la prévalence de la M PE
chez ces enfants esttrès élevée : 37.9% [32.7 ; 43.4]
d'entre eux souffrentd'une forme ou d'une autre de M PE .Dans la tranche
d'âge de 6 à 59 mois, la prévalence de la M PE est de 45.0%
[39.0 ; 51,0]. Par rapport aux différentes formes de M PE, nous avons
trouvé les prévalences suivantes :
- émaciation :10.3% [7.3 ;14.2] chez les enfants de moins
de cinq ans et 12.2% [8.6 ;16.7] chez ceux de 6 à 59 mois;
- retard de croissance : 23.9% [19.5 ; 29.0] chez les enfants
de moins de cinq ans et 28.4% [23.2 ; 34.1] chez ceux de 6 à 59 mois;
- insuffisance pondéra : 24.8% [20.4 ; 29.9] chez les
enfants de moins de cinq ans et 29.5% [24.2 ; 35.2] chez ceux de 6 à 59
mois.
Notons que la prévalence de l'émaciation chez
les enfants de moins de 5 ans du D S de Tougan est 4 fois plus
élevée que celle de la population de référence de
l'O M S. Quant aux prévalences du retard de croissance et de
l'insuffisance pondérale, elles sont toutes supérieures à
10 fois celles de la population de l'OM S. Les enfants de 6 à 23 mois
semblent les plus touchés par ces différentes formes de M PE.
Les seuils de gravités de l'O M S sont franchis par
certaines formes de MPE. Il s'agit de la malnutrition aiguë chez les
enfants de 6 à 23 mois et de la malnutrition chronique chez ceux de 6
à 59 mois.
De multiples facteurs associés à la malnutrition
ont été mis en évidence. Certains de ces facteurs sont
liés aux enfants mais la plupart relèvent de urs parents. Par
rapport aux enfants, les facteurs suivants se sont
révélés
associés à la M P E : le faible poids de
naissance (R P= 2.25 1:1.09 ; 4 .7]), le rang de naissance inférieur
à 3 et supérieur ou égal à 6 (R P= 1.47 1:1.08 ;
2.00]), l'âge compris entre 6 et 59 mois (p< 10-6). En ce
qui concerne les parents, ces facteurs sont : le faible niveau
socio-économique (RP= 1.49 1:1.13 ; 1.96]), un intervalle de naissance
inférieur à 36 mois (p= 0.03) ,une taille du ménage
supérieure ou égale à 9 (RP= 1.42 1:1.06 ; 1.89]), le
niveau analphabète de la mère (RP= 1.47 1:1.03 ; 2.11]),
l'irrégularité du suivi nutritionnel (RP= 1.83 1:1.01 ; 3.31])et
le nombre d'enfants de moins de cinq ans supérieur ou égale
à 3 dans le ménage (RP= 1.66 1:1.24 ;2.21]).
Il faut noter que certains facteurs que nous suspections se
sont révélés non associés à la M PE soit
parce que notre étude n'a pas pu dégager les liens, soit parce
qu'effectivement ces associations ne sontpas statistiques. Ce sont notamment :
le statut vaccinal, le sexe, la qualité de l'alimentation de
complémentlors du sevrage, les interdits alimentaires. Nous pensons
qu'il est souhaitable q'une étude longitudinale soit organisée
dans le districtpour tester ces associations que nous n'avons pas pu
prouver.
Par rapport aux associations entre les infections et la M PE
d'une part et entre la diarrhée et la M PE d'autre part, notre
étude, conformément aux données de la littérature,
a permis de montrer que ces liens sontsignificatifs. Le climat chaud et humide
qui favorise certaines maladies comme le paludisme de même que les
conditions d'hygiène précaires constituent sans doute l'un des
ferments de ces infections et diarrhées dans le D S de Tougan.
Par ailleurs, notre étude a permis de se rendre compte
que malgré certains acquis, la planification de la lutte contre la M PE
au niveau des CSPS ainsi que l'activité de CNS comportentdes
insuffisances.
Au titre des acquis favorisant la lutte contre la MPE, nous avons
pu faire les remarques ci après.
- La M PE estperçue comme l'un des problèmes
prioritaires de santé par is agents de santé.
- Tous s CSPS disposent de plan d'action annuel qui prend en
compte la lutte contre la M PE.
- Les communautés sont impliquées dans la lutte
contre la M PE à
travers leur participation à l'élaboration des
plans d'action des CSPS. - Les carnets de SM I et les fiches infantiles
existent et sont gratuits.
- Le fleuve Sourou permet la pratique de cultures de contre
saison de
même que la pêche qui constitue une source non
négligeab de
protéines anima s.
Cependant, il reste à déployer plus d'efforts afin
de renforcer la lutte contre la malnutrition des enfants. En témoignent
les observations subséquentes.
- Une grande proportion (70.1%)des mères des enfants de
moins de
5 ans du D S de Tougan est analphabète.
- L'espacement des naissances n'est pas toujours
respecté : 27.1% seulement des enfants enquêtés et dont
nous avons obtenu l'intervalle inter génésique ont 36 mois de
plus que leur petit frère direct.
- Le niveau socio-économique d'une grande partie des
ménages est faible.
- la planification de la lutte contre la M PE comporte des
insuffisances : des stratégies importantes comme les
démonstrations culinaires et les visites à domicile ne sont pas
appliquées dans près de 55% desCSPS ;
s consultations de nourrissons sains en stratégie
avancée ne sont pas prévues dans certains villages
éloignés des CSPS ; seulement 9 (37.5%) plans sur 24 sont
satisfaisants dans le
domaine de la lutte contre la malnutrition infantile.
- Les C N S réalisées par les agents de
santé sont souvent non satisfaisantes :
la recherche de l'anémie et des oedèmes estpresque
ignorée lors des CNS,
l'explication de l'état nutritionnel des enfants etde la
conduite à tenir à leurs parents n'estréalisée que
dans la moitié des cas,
la détermination des indices nutritionnels et le
tracé de la courbe de surveillance nutritionnelle ne sontpas
systématiques.
lors de l'enquête, seulement 6 (12 .2%) agents sur 49 ont
pu conduire la C N S de façon satisfaisante.
La CNS n'est pas régulière dans le DS de Tougan :
12.4% seulement des enfants de moins de cinq ans sont
régulièrement suivis.
Nous estimons que cette situation nécessite des
solutions fortes et durables et nous pensons que les recommandations que nous
proposons peuvent être utiles à cet effet.
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