Conclusion
Ce travail voulait présenter une analyse des vertus de
la libéralisation financière dans une perspective des finances
publiques. Il part de l'intuition selon laquelle la libéralisation du
système financier assure son développement. Notre étude se
proposait alors d'apprécier le lien entre le système financier et
les finances de l'Etat. Plus précisément, il s'agissait de voir
si le développement financier affecte les déficits publics.
Pour y arriver, nous nous sommes proposés, dans un
premier temps, d'apprécier la libéralisation financière
dans une perspective du développement du système financier. La
crise bancaire de la fin des années 1980-début des années
1990 a profondément affecté les niveaux de développement
financier (LLY, BANK, PRIVATE et PRIVY) dans la zone. Ils sont faibles
comparés aux niveaux des pays de l'UEMOA et davantage par rapport
à l'Afrique du Nord. En considérant les niveaux de départ,
les mesures de libéralisation financière de première
génération n'ont pas amélioré l'état du
système financier de la CEMAC. Mais si l'on considère
l'acuité de la crise bancaire, ces mesures ont néanmoins assaini
le système bancaire. Bien plus, des réformes de deuxième
génération sont en cours, qui présentent
l'intérêt d'augurer de meilleures perspectives pour le
développement du système financier.
Dans un second temps, nous avons mis en relation les niveaux de
développement financier et les déficits publics de
manière empirique à l'aide d'outils statistiques. Plusieurs
arguments
théoriques sous-tendent le lien qui peut exister entre
système financier et finances de l'Etat. Un système financier
réprimé est propice au prélèvement de revenus
faciles pour le gouvernement. Il encourage aussi le laxisme dans la gestion
budgétaire. La taxe de répression financière et la taxe
d'inflation sont utilisées ensemble dans des économies à
système financier sous développé. Elles fournissent des
ressources bon marché pour le gouvernement au détriment du
secteur privé (ménages, entreprises et banques). Le
développement financier bloque les sources de revenus issus de la
répression financière et induit la perte des privilèges y
relatifs pour les pouvoirs publics. Pour certains auteurs,
l'amélioration de la situation du système financier est synonyme
de difficultés pour les finances publiques. Pour d'autres, la
suppression de la répression financière et de ses rentes
illégitimes astreindrait le gouvernement à plus de rigueur dans
la gestion des finances publiques. Il en résulterait alors la
réduction des déficits budgétaires.
Ces arguments sont corroborés par les données de
la CEMAC, l'UEMOA et l'Afrique du Nord sur la période 1987-2002. Les
coefficients de corrélation et le test de causalité
présentent une relation décroissante entre développement
financier et soldes budgétaires. La relation est plus intense en CEMAC
qu'en UEMOA ou en Afrique du Nord. En fait, les soldes publics des Etats
à faibles développement financier dépendent fortement du
système financier que ceux à fort développement financier.
L'investigation empirique suggère que le développement financier
devra dynamiser le secteur privé pour que celui-ci s'occupe à
relancer l'activité économique. La tâche de l'Etat se
limite alors aux activités traditionnelles de fourniture des biens
collectifs, de maintient de la sécurité... Celui-ci peut alors
s'employer à rationaliser ses déficits. Les résultats
suggèrent aussi que les Etats devraient réformer leur
fiscalité pour la rendre plus efficace. Ils pourraient ainsi
compensé la perte des revenus occasionné par le
développement financier ou la fin de l'interventionnisme.
Cette relation inverse entre développement financier et
déficits publics soulève d'importantes questions pour la
recherche et la politique économique. La première tient compte de
la relation directe entre développement financier et croissance et
impose qu'une attention soit accordée à la relation entre
système financier, finances publiques et croissance. Elle permettrait de
déterminer si ce n'est pas l'activité de l'Etat, plutôt que
celle du privé, qui est favorable à la croissance ; une grande
activité de l'Etat se traduisant par de lourds déficits.
La deuxième tient compte de la recommandation de
réformer le système fiscal. Elle dévoile l'importance
d'identifier des systèmes de taxation qui remplaceront la
répression financière,
avec des moyens plus efficients de collecter des revenus. Elle
pourrait contenir également l'élargissement de l'assiette fiscale
et la suppression des exonérations fiscales aux secteurs que le
gouvernement voudrait bien favoriser. Les recommandations s'élargissent
même à encourager les gouvernements à développer des
techniques d'information pour apprécier la frange de l'activité
économique qui échapperait encore à son système de
repérage (l'économie informelle).
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