Gestion locale des marchés public et service public local: le cas communal( Télécharger le fichier original )par Ikram El Qaouti Université Mohammed V des sciences juridiques économiques et sociales , (Maroc) Rabat Agdal - DESA en droit public 2009 |
B. Tutelle, représentation et délibération :La représentation veut que la décision communale soit prise par des représentants des citoyens, choisis notamment par le procédé de l'élection. La délibération, quant à elle veut que la décision soit le résultat d'un accord pris suite à la confrontation et à la comparaison des avis des représentants, par eux-mêmes. Certes, l'ordonnateur communal ne signe le contrat de marché public que suite aux délibérations du conseil communal, qui est un organe représentatif. Cependant, la représentativité et le procédé délibératif ne sont pas une fin en soi pour que la collectivité décentralisée puisse gérer démocratiquement ses affaires, ils ne sont non plus des procédés qui peuvent être utilisés de manière restrictive ou extensive, limitée ou poussée. Pour qu'une collectivité soit décentralisée, c'est que ses affaires sont gérées par un organe représentatif et délibérant ; les règles de la décentralisation sont claires, une fois la décision n'est l'oeuvre, la compétence propre, et unique de cet organe, elle ne peut nullement être considérée comme une décision décentralisée. La décision du marché communal, peut-elle donc être considérée comme une décision décentralisée ? Une décision décentralisée vient d'un organe décentralisé ; qu'un agent central participe à son élaboration, qu'il ait le droit de l'approuver, de l'annuler, d'y procéder lui-même...que l'intervention des autorités étatiques dépasse le contrôle comptable, d'audit et celui de la légalité, c'est que la décision n'est ni prise selon le délibératif, ni par les mandataires de la nation. Selon J. Stuart. Mill, pour apprécier le mérite d'un système politique, d'un gouvernement « il s'agit de savoir dans quelle mesure il pousse au bien public par l'emploi des facultés morales, intellectuelles et actives de chacun... » Et « ...quelle est son influence sur ces facultés, pour les améliorer ou les détériorer... ».185(*) La non considération ou la mauvaise estimation des facultés et capacités des élus locaux ont conduit à faire des marchés publics une décision centrale, quoique qu'elle émane, en principe, d'une collectivité décentralisée. Les représentants de l'Etat participent à l'élaboration de la décision, contrôlent son opportunité, l'approuvent ou la désapprouvent, cela ne dépend que d'eux. La tutelle d'opportunité met l'élu communal dans un perpétuel rapport de dépendance et donc un rapport de force «...l'Etat accorde dans les textes des compétences en sachant qu'il va les récupérer dans le stade de l'exécution ou qu'il aura le dernier mot pour les orienter dans le sens qu'il veut »186(*). - Deuxième partie : Gestion communale des marchés publics et services publics communaux : Rapports pratiques et pistes d'amélioration La quête de l'efficacité de l'achat public communal impose de dépasser, outre les complexités juridiques, les contraintes pratiques. L'achat public n'est pas une fin en soi, il faut que les normes procédurales et processuelles soient respectées ; mais il faut aussi que sa contractualisation soit socialement et économiquement ; utile et profitable au service public communal et à la qualité de vie du citoyen local. La première partie du présent travail de recherche a permis d'esquisser le premier handicap à la conclusion de « bons marchés communaux », à savoir, la forte tutelle politico-financière qui pèse sur la décision communale et qui agit défavorablement sur la qualité des services publics communaux. Toutefois, le volet théorique de l'étude est centré sur la problématique de l'ingérence centrale dans une affaire purement locale. Certes, les répercussions de cette ingérence sont accablantes, mais ne peut constituer, en elle seule, l'unique obstacle à la contractualisation de « bons marchés publics communaux ». D'autres facteurs sont en jeu qui relèvent des comportements des acteurs intervenant dans la passation et le suivi de l'exécution des commandes publiques , notamment les mandataires de la population communale. Pour déceler ces facteurs et afin d'identifier les points clés de la gestion communale des marchés publics dans son volet pratique ; il est nécessaire de positionner le marché public, par rapport à sa raison d'être, à ses éléments constitutif ainsi que par rapport à ses objectifs : · Un marché public est un investissement des deniers publics, que sont l'argent du contribuable ; celui-ci veut non seulement que ses fonds ne soient pas gaspillés ou détournés, mais qu'ils servent à améliorer de manière optimale la localité dans laquelle il vit. · Un marché public est un contrat qui s'élabore selon un processus complexe qui exige un ensemble d'étapes procédurales pour sa conclusion. Dès la définition des besoins jusqu'à la notification du marché à l'attributaire ; la personne publique acheteuse doit maitriser non seulement la procédural et l'administratif, mais aussi le commercial, le technique, l'environnement des affaires, les actualités de la sphère économique, les mutations en cours... Ceci dit, la raison existentielle de la commande publique à l'échelon local est la réalisation d'achats utiles et profitables à un contribuable soucieux du placement des ses deniers. Dès lors, un bon achat public exige de la part de l'élu communal ; la maitrise de la procédure dans sa complexité, dans ses exigences de connaissances administratives et de technicité, sans pour autant ignorer la problématique de la moralité dans la gestion des fonds publics. C'est ainsi qu'il est incontournable d'explorer la réalité communale de la contractualisation des marchés publics, ce qui exige bien évidemment une étude de cas réels. Or, dans les locaux des communes « on ne peut pas parler de marchés publics ; c'est un sujet tabou » ; ce qui donne aussi à réfléchir sur « le pourquoi » de la non diffusion d'informations publiques par définition. Profitablement, le rapport annuel de la cour des comptes de l'année 2006 précité comporte un ensemble de cas de figures permettant une étude comparative de la gestion des marchés publics communaux par les élus. C'est à partir des cas recueillis du rapport sus cité qu'une étude analytique et synthétique aura lieu ; et c'est sur la base des résultats obtenus de ladite étude que les points clés de l'environnement de la passation des marchés communaux seront connus. Dans le cas où des lacunes seront constatées, il serait question de réfléchir sur des éventuelles alternatives et certaines propositions afin de les combler. Cette partie consacrera donc le chapitre premier, à l'étude des cas pratique de marchés publics communaux. Et enfin, dans un deuxième chapitre, il serait question présenter les axes d'efficience ou de déficiences de la pratique des gestionnaires communaux, et de proposer des pistes d'amélioration, si bien évidemment des failles seront soulevées. * 185 J.Sturat Mill, le gouvernement représentatif, op-cite, p.65. * 186 A. Sedjari, les structures administratives territoriales P. 123. Cité in J. Chabih, les finances des collectivités locales au Maroc : essai d'approche globale des finances locales, op-cite P. 172. |
|