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Caractérisation socio-économique des Villages d'Appui à la Recherche Scientifique de la Zone Forestière

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par Koffi Agbéko DESSAH
Université de Lomé - BAC+4 2008
  

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Annexe 3

FONDATION DU VILLAGE D'AGOU NYOGBO-AGBETIKO

Le village de Nyogbo-Agbétiko sur la montagne (p. 62 à 67)

[...] Avant l'arrivée des ressortissants de Ouantchin, il existait sur la montagne le petit hameau de Botso. Les habitants, belliqueux et très méfiants, étaient toujours sur le qui-vive. Lorsqu'ils doivent combattre, le mot d'ordre circule de bouche en bouche « Nya de gbona » ''quelque chose va se passer''. Déformée, cette alerte donnera « Nyagbo » et devenu plus tard « Nyogbo » (voir carte des Allemands 1904).

Si certains Botso sont toujours à Nyogbo-Agbétiko, d'autres ont émigré vers la région de Hô, notamment à Nyogbo sroè

Nyogbo sroè avec son Chef Nyogbo Konda

Nyogbo Fiafe

Nyogbo Nyigbé

Nyogbo Mli

Nyogbo Odumase

Nyogbo Agodome

Nyogbo Gagbefe Chef Canton

Togbui OWUSU IX Togbui KODZOKPO Togbui ABOVE Togbui ADZA-YAWO Togbui DADRA Togbui OSUNU Togbui DABRA Togbui NYAGASI V

Le village de Nyogbo sur la montagne, appelé encore « Afégamé ou Togandzi » comporte trois quartiers

Le quartier Botso, le plus ancien, se nommait Nyogbo avant l'arrivée des gens de Ouantchin. Après cet événement tous les trois quartiers s'appelèrent Nyogbo.

Les futurs Agbétiko se trouvent sur la montagne au-dessus des autres, ils forment le quartier « Nyogbo Dzigbé ».

Les futurs Dalavé habitent le quartier « Nyogbo Nyigbé » quartier situé à une altitude inférieur à celle des autres.

Tout le village Nyogbo comporte plusieurs terrasses étagées, une vingtaine environ, disposées suivant les courbes de niveau. Retenus par des murettes en pierre sèche, hautes de 1 à 2m, les terrasses déterminent entre elles des espaces plats de 5 à 10m de large. On passe de l'une à l'autre par des escaliers de dalles. Sur les surfaces planes sont construites des cases plus ou moins rectangulaires en banco, le toît couvert de chaume. En général, chaque case comporte deux pièces: une antichambre où l'on fait aussi la cuisine lorsqu'il pleut, et une chambre à coucher. La porte est fermée avec une claie.

Au milieu du village se trouve le couvent des divinités protectrices. Jalousement gardées, les reliques de l'exode y sont conservées: tambour « gbagba », bol de bois « akplegba » etc.

En bas du village, on vénère aussi le ''Rocher à mamelles''. C'est un imposant rocher formant abri sous roche d'où jaillit une source claire dont l'eau, riche en calcium est réputée servir de remède contre la stérilité. Dans cette grotte en miniature se forment des embryons de stalactites; deux proéminences rocheuses sont assimilées à des mamelles.

Deux arbres datent de cette époque: un fromager et un rônier. Objets inanimés et par conséquent, muets,ils ne peuvent pas nous raconter ce qu'ils ont vu ou entendu. De la route de Nyogbo Dalavé à Nyogbo-Agbétiko, on les aperçoit aujourd'hui avec des cocotiers plantés seulement voici quelques décades.

Vie quotidienne au village de Nvogbo Afégamé (Togand2i) au début du XIXème siècle.

Les habitants de Nyogbo s'occupent essentiellement de l'agriculture. Leurs principales cultures sont le petit mil « li », l'igname, le palmier à huile.

La récolte de l'igname donnait lieu à des cérémonies de prémices pour remercier les divinités de la terre. Le palmier à huile fournissait le vin de palme, l'huile, le combustible, les matériaux de construction.

Le petit mil est la céréale par excellence. On s'en sert pour préparer la pâte et manger équivaut à ''porter le petit mil à la bouche'': « do li nu ». il servait à préparer la bière « liha ». Le petit mil « li » constitue la base de l'alimentation. L'élevage est important: le cheptel consiste en volailles, moutons, cabris, porcs. Hormis le porc, ces bêtes sont tuées surtout lors des cérémonies animistes. Source de l'alimentation carnée, la chasse dans les forêts giboyeuses se révèle une activité lucrative, les chasseurs sont auréolés de prestige. Poterie, huilerie, brasserie, savonnerie représentent l'artisanat.

Le problème d'eau ne se pose pas. De nombreuses sources susurrantes aux eaux claires, fraîches, potables jaillissent par-ci par-là. On les aménage souvent pour se préserver de la pollution.

Ainsi vivaient les gens de Nyogbo-Afégamé de ogandzi au début du XIXéme siècle.

Descente du village de Nvogbo au pied de la montagne

Dans la seconde moitié du XIXéme siècle, un fort courant se dessine à Nyogbo-Afégamé pour une descente du village au pied de la montagne.

Les partisans de la descente sont surtout les cultivateurs et les chasseurs. Dans la pyramide des âges, ils représentent la population active de 15 à 50ans environ.

Les raisons alléguées sont multiples. Elles sont d'ordre démographique: l'augmentation de la population entraine le besoin d'espace vital sur la montagne. La terre manque, les champs de plus en plus petits cultivés d'une façon intensive deviennent de moins en moins rentables. Il s'avère impérieux de descendre mettre en valeur les terrains de la plaine.

De leur côté, les chasseurs constatent que le gibier, traqué de tout côté sur la montagne, se réfugie dans la forêt de la plaine.

Les contacts entre la plaine et la montagne deviennent fréquents; or les communications sont malaisées. Ce sont les sentiers « capricieux », glissants, passant d'un rocher escarpé à la descente, on perd à la montée. Les risques de chutes graves font que la sécurité n'est pas garantie. Et surtout si la nuit vous surprend, c'est une véritable catastrophe. Comme dans la région règne une insécurité relative, le site définitif perd sa raison d'être. La dernière période d'insécurité (1869-1870) provient de la guerre contre les Achantis en 1873. ces derniers repoussés et par les Aguawo et par les Akposso n'osent plus recommencer leur invasion. Dès le milieu du XIXémesiècle, la traite des Noirs est presque complètement supprimée. Des navires de Grande-Bretagne et la France surveillent la côte et exercent en pleine mer le droit de visite afin de dépister quelques négriers récidivistes. S'il existe encore un commerce local, la chasse « au bois d'ébène » a irrémédiablement perdu son intensité et son importance. Plus de razzias pour enrichir les négriers.

L'esclavage terminé, la colonie commence. Des maisons de commerce établies dans les comptoirs français de Petit-Popo (Aného) et de Porto-Séguro (Agbodrafo), les produits importés d'Europe proviennent jusque dans les régions d'Agou. Comme la montagne n'arrive plus à s suffie, à vivre en autarcie, des courants d'échange de produits locaux et d'objets fabriqués s'établissent entre elle et les villages de la plaine. La région d'Agou reçoit les premières visites des missionnaires surtout les protestants de la Mission de Brême installés à Hô et à Péki depuis le milieu du XIXémesiècle.

Les partisans de la descente allèguent souvent comme raisons majeures, les querelles et conflits fréquents entre quartiers. Comme on ne s'entend plus, pour avoir la paix, il vaut mieux quitter des voisins trop turbulents. La vie devenant dure là-haut sur la montagne, certains désirent chercher le

calme et la tranquillité en bas.

Toutes ces raisons sont jugées insuffisantes par les vieux au-delà de 50ans environ, par les féticheurs et les sorciers. On ne doit pas abandonner à la légère le foyer ancestral, le cordon ombilical des habitants, c'est là qu'on a fait le serment de s'installer sous la protection des dieux « Démadzi ». Pour eux, la nostalgie du village des ancêtres prime toute autre considération. Par expérience, ils savent que toute période de relative sécurité est précurseur d'une période d'insécurité. Ce n'est donc qu'un leurre et ce serait commettre une épouvantable bévue que de se laisser berner. Accrochés à la tradition, et à la montagne, les ''gérontes'' rendus sages et prudents par l'âge se méfient des ''choses nouvelles''. Toute innovation est une épée à double tranchant. Ils aiment souvent répéter aux jeune ce proverbe éwé: ''la palme a dit au rameau: moi aussi j'ai occupé une fois le milieu''. L'opposition des fétiches et des sorciers se révèle plus irréductible encore. Les divinités, d'après les oracles n'agréent pas ce déménagement.

Elles préfèrent demeurer à l'endroit où elles ont élu domicile à l'arrivée de Ouantchin. Pour les féticheurs, c'est un problème délicat que de transférer un lieu sacré traditionnel, ancestral, dont l'ancienneté confère le respect.

Ils révèlent une étymologie du mot Agou qui signifie s'enfoncer: ''le grand fétiche Mawun transporté sur l'épaule par une fille vierge et précédent le clan à la recherche d'un site propice est tombé ici en disant: « medo agu da afisia » je m'enfonce ici''. Ils interprétent également ''la main gravée sur le rocher'' au-dessus de l'actuel village de Nyogbo-Dalavé comme la manifestation de désapprobation du dieu protecteur. Dans son courroux, devant la désobéissance, l'entêtement des habitants, dieu aurait frappé le rocher de dépit laissant ainsi cette empreinte comme signe de son mécontentement. Ajoutons que jusqu'au Xxémesiècle, cette gravure rupestre a été un lieu de pèlerinage pour les animistes, certains venant parfois de très loin. Les féticheurs ont encore recours à de multiples tentatives de dissuasion. Le moindre fléau de la nature, tout événement des divinités. Ils agitent avec frénésie le spectre du dragon. Des serpents fabuleux très venimeux abondent dans la forêt où vous voulez élire domicile: « da le aveame »: ''le serpent se trouve dans la forêt''. Voilà l'origine de Dalavé. Les partisans de la descente ne désarment pas pour autan. Ils usent des subterfuges. Les chasseurs les premiers; les autres ensuite établissent leur ferme dans la plaine où leur séjour devient de plus en plus long. Interrogés, ils répondent qu'ils cultivent du tabac; c'est le lieu des dupes, du mensonge: « blégbé » ancien nom de Nyogbo-Dalavé.

Au nom des divinités en courroux, les vieux, les féticheurs et les sorciers lancent un suprême avertissement aux partisans de la descente: ''l'enfant désobéissant qui ne veut pas écouter les conseils, c'est l'épine qui lui accroche les oreilles''. Les dieux s'en lavent les mains, rejettent toute responsabilité si un malheur vous survient en bas dans la plaine. Ce sera tant pis pour vous, vous l'aurez cherché vous-même: c'est que vous êtes ''fatigués de la vie'', « agbé tiko nami ». Malgré ces menaces, les ''fatigués de la vie'' deviennent si nombreux que le petit hameau de récalcitrants se transforme en le village de Nyogbo-Agbétiko.

Avec le temps, les rapports de force est en faveur des partisans de la descente. Vers 1875, tout le village Nyogbo se trouve sur la montagne, à 750-800m d'altitude. Le courant de descente se dessine.

Vers 1890, avec l'occupation allemande, les facteurs de descente l'emportent: sécurité assurée, routes construites permettant un commerce intense. L'introduction par les allemands de cultures arbustives de cacaoyers sur la montagne plus humide réduit considérablement les terrains consacrés aux cultures vivrières. Il faut descendre occuper une partie des champs de la plaine au risque de voir tous les terrains déclarés vacants séquestrés par les allemands.

Les blancs donnent moins d'importance à la montagne qu'à la plaine, terre d'avenir, où s'installent les européens avec leur école, leur dispensaire.

Le village de Nyogbo se scinde alors en deux/

sur la montagne: le vieux Nyogbo ou « Alt Nyogbo »

au pied de la montagne: le nouveau Nyogbo ou « Neu Nyogbo »

Vers 1900, la descente semble complètement accomplie, lorsque ont disparu par extinction les

derniers « montagnards » irréductibles.

En 1950 vivaient encore dans les villages de Nyogbo des vieux nés sur la montagne dans l'ancien Nyogbo.

L'implantation des allemands et surtout celle des missionnaires protestants, est si marquée à Nyogbo-Dalavé qu'on a consacré pour lui seul dans l'appellation orale le nom de Nyogbo, réservant alors celui d'Agbétiko à Nyogbo-Agbétiko.

1- cf Bulletin de l'Institut de l'Enseignement Supérieur du Bénin, N°6 Mai-Juin 1968 par H. Attignon. (pages 49 à 67)

2- cf Extrait des minutes du Greffe de la cour d'Appel d'Afrique Occidentale Française séant à Dakar (Sénégal).

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams