CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
INTR.ODUCTION GRNER.ALR
Dans le domaine des sciences de gestion, la décennie
1985-1995 a été caractérisée par le foisonnement de
concepts, outils et autres nouvelles méthodes, parmi lesquels, la
comptabilité de gestion à base d'activités occupe une
place de choix. Parmi les raisons qui expliquent ces multiples
émergences, il semble nécessaire de pointer les
différentes évolutions auxquelles ont été soumises
les organisations de ce début de siècle.
Les outils de gestion, comme l'ensemble des autres techniques,
sont apparus, le plus souvent, afin d'apporter des solutions aux
problèmes de leur époque. Leur construction est contingente. Elle
tient compte, naturellement, de l'environnement économique et technique
difficile. Ce qui entraîne le besoin pour les gestionnaires d'une
nouvelle vision du pilotage de l'entreprise. Cette dernière conduit
á l'inadaptation des méthodes et outils classiques
d'évaluation des coûts en contexte actuel.
La comptabilité de gestion (précédemment
dénommée comptabilité industrielle puis
comptabilité analytique) est née de la concurrence et du besoin
des entreprises de connaître les coûts de leurs productions.
[Chandler, 1988] montre que la nécessité d'une
comptabilité de gestion s'impose avec la mise en place de réseaux
de chemins de fer qui créent des conditions objectives de concurrence
entre les entreprises. [Nikitin, 1990] d'une manière
identique, date l'apparition d'un début de comptabilité
analytique chez Saint-Gobain, quand il fallut évaluer des prix de
transferts des usines au siège social.
Les années 1980 et celles qui ont suivi ont
été marquées par la remise en cause de certaines
méthodes de comptabilité et de gestion traditionnellement
utilisées. Ouvrages et articles spécialisés se sont
multipliés pour stigmatiser les insuffisances, les limites, voire
l'absence de pertinence d'un certain nombre d'outils, en particulier ceux
relatifs aux calculs des coûts.
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Aux Etats-Unis, certains auteurs, tels que [Johnson et
Kaplan, 1990] estiment que la décennie 1980 est celle de
«l'obsolescence des systèmes de comptabilité de
gestion» [Cooper, 1990] juge que le «
Contrôle de gestion ne répond plus », et
précise que les systèmes utilisés par les entreprises ont
perdu le rôle qui était le leur, les informations qu'ils
fournissent n'ayant plus la pertinence attendue. Le CAMI1,
regroupant des entreprises telles que General Motors, Siemens, IBM, Boeing,
Philips, Alcatel..., des cabinets d'audit et d'experts-comptables ainsi que des
universitaires et des chercheurs, consacre une de ses recherches à
développer un programme de comptabilité analytique adapté
au nouvel environnement économique.
En France, également, les systèmes existant
essuient les feux de la critique avec, il est vrai, des nuances dues au
caractère spécifique des modèles utilisés. Ainsi,
[Evraert et Mevellec, 1991] estiment que les méthodes
traditionnelles ne satisfont plus les besoins de l'entreprise moderne et qu'en
conséquence elles doivent être sérieusement remises en
cause2. [Chassang, 1987] pense qu'il faut
«réinventer» le contrôle de gestion parce qu'il
ne s'est pas adapté aux profonds changements qui ont marqué le
vingtième siècle.
L'entreprise est tout à la fois immergée dans un
environnement et confrontée à ses composantes. Elle doit
s'adapter aux évolutions de l'un et des autres. Ainsi, la
mondialisation, qui n'est autre que l'extension du périmètre
concurrentiel, a entraîné l'accroissement des structures
organisationnelles. L'étendue accrue des zones d'intervention a
restreint les avantages qui avaient été acquis. L'entreprise a
dû développer sa réactivité pour faire face aux
tendances erratiques des marchés sur lesquels elle intervient. Son mode
de production s'est progressivement modifié pour se transformer en un
véritable «pilotage par
1 CAMI (Consortium Advanced Management
International) qui a débuté ces travaux en 1966 associe des
grands groupes industriels, des cabinets de consultants, des
universités,... Modèle conceptuel développé par le
consortium de recherche- développement situé aux Etats-Unis, dont
les principes de base sont publiés en 1988 dans : C. Berlinger, J.
Brimson (ed), Cost Management for Today's Advanced Manufacturing, Boston,
Harvard Business School Press.
2 S. Evraert et P.
Mevellec, «Calcul des coûts : il faut
dépasser les méthodes traditionnelles»,
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l'aval». Ces modifications ont eu comme conséquence
d'accélérer l'évolution de l'environnement
caractérisée par une concurrence intense.
A cela s'ajoute d'importantes modifications subies tout au
long du vingtième siècle par la structure de coût des
entreprises. Leurs charges indirectes ont augmenté et leurs coûts
de la main d'oeuvre directe diminué. La diversité des produits et
services offerts est devenue inversement proportionnelle à leur
longévité. Pour accroître leur compétitivité,
les compagnies ont fait appel à des technologies de plus en plus
avancées, augmentant ainsi la part des frais généraux.
Malgré ces changements, la comptabilité analytique continuait de
fonctionner comme par le passé - la main d'oeuvre directe servant de
référence pour l'imputation des frais généraux,
bien que ces premiers représentaient souvent moins de dix pour cent des
coûts totaux de l'entreprise. En répartissant les coûts
indirects sur les produits en fonction des volumes produits, les
méthodes traditionnelles calculaient des coûts sans rapport avec
la véritable consommation de ressources par les produits et services.
Avec l'arrivée de la concurrence asiatique et la
mondialisation de l'économie, les entreprises ont dû aussi faire
face à une concurrence accrue. Cet accroissement de la concurrence est
dû autant à une faible augmentation des consommations qu'à
une démultiplication de l'offre, s'effectuant essentiellement par les
délais, par les prix ou par les services rendus. Elle est d'autant plus
sévère que dans ce marché dominé par la demande,
les comportements de la clientèle évoluent vers une plus grande
versatilité et des exigences accrues. Leur marge d'erreur est par
conséquent devenue beaucoup plus étroite, ne leur permettant plus
de « subventionner » le produit ou service «déficitaire
» par un autre produit ou service profitable.
La situation actuelle est caractérisée par une
crise de surproduction à laquelle s'ajoute un marché
«turbulent» qui l'emporte sur les comportements rationnels où
toute activité de gestion implique des efforts de
réactivité, de flexibilité et d'adaptabilité sans
précédents. C'est la spirale de la récession qui
inquiète et
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domine les comportements. La concurrence, impitoyable entre
les firmes concentrées, implique que les coûts soient
impérativement maîtrisés et la qualité
irréprochable. La recherche de l'avantage concurrentiel doit être
permanente. [Porter, 1986] décrit ainsi sa perception
du contexte : «...dans le monde entier, les firmes font face à
un ralentissement de la croissance et à des concurrents nationaux et
internationaux qui n'agissent plus comme si le gâteau, sans cesse plus
grand, suffisait à satisfaire tout le monde.
L'entreprise doit s'assurer de la vente et produire ensuite.
Le passage d'un processus de «flux poussés» à un
processus en «flux tirés» par l'aval modifie en profondeur
l'approche organisationnelle de l'entreprise. Dans ces conditions, il devient
primordial pour bon nombre d'entreprises d'accroître la finesse et la
précision de leurs systèmes d'évaluation, de
manière à ce que ces systèmes puissent continuer à
supporter des prises de décision stratégiques dans un contexte
où la sensibilité des résultats financiers de l'entreprise
est de plus en plus grande, face à la moindre variation des conditions
de l'exploitation.
Connaître les véritables coûts
de leurs produits ou services, des coûts d'utilisation de chaque canal de
distribution ou encore le coût de servir chaque type de client est devenu
vital.
La globalisation des facteurs et des lieux de concurrence
alliée à une différenciation des produits de moins en
moins durable, a conduit à une instabilité croissante des
marchés. Cette évolution a accru la demande en matière
d'outils de contrôle de gestion assurant la mise en oeuvre de la
stratégie et le pilotage de l'entreprise. Dans ce contexte
émergent des techniques dites «nouvelles». Car Le
contrôle classique s'inscrivait dans une logique de calcul des
coûts a posteriori, au sein d'une structure organisationnelle pyramidale.
Le développement des structures organiques aux systèmes
d'informations transactionnels et l'exigence d'un contrôle a priori
induisent un nouveau contrôle de gestion. Ce type de contrôle peut
être défini par les objectifs suivants : «planifier,
permettre un suivi, motiver, mesurer les performances» en identifiant
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les causes des coûts. A cette fin, il faut isoler les
processus qui permettront d'effectuer un pilotage de la structure
organisationnelle par la recherche d'informations différentes de celles
apportées par le système comptable.
Cela induit alors le besoin d'une vision nouvelle du pilotage
de l'entreprise, prenant en compte des indicateurs plus nombreux et plus
variés. En effet, les schémas classiques des systèmes de
décision hiérarchisés ne suffisent plus, face au besoin de
suivre avec finesse l'ensemble des activités de l'entreprise et de
disposer rapidement des informations nécessaires pour réagir
efficacement aux perturbations de toute nature qui peuvent affecter la vie de
l'organisation. Tout cela implique des systèmes d'informations
susceptibles de fournir aux gestionnaires et décideurs une
variété importante d'indicateurs leur permettant d'obtenir des
informations exploitables le plus rapidement possible et selon
différents points de vue. Il y a alors aujourd'hui un besoin
de suivi analytique détaillé des coûts des
opérations. Il ne suffit plus d'évaluer simplement le coût
de revient des produits : il faut d'abord que ce coût de
revient soit évalué avec précision, et que cette
connaissance permette, pour les productions futures, de chiffrer des devis avec
une fiabilité accrue. Il faut, de plus, connaître les coûts
associés aux clients, afin d'orienter la politique commerciale de
l'entreprise. Il faut enfin cerner les coûts induits par le
fonctionnement d'ensemble de l'entreprise, afin d'orienter les choix
d'organisation et de gestion vers une efficacité accrue.
On note aussi le besoin d'outils d'aide à la
décision stratégique. Ce besoin n'est pas spécifique au
contexte actuel. Cependant, il prend de l'acuité dans la mesure
où les marges de manoeuvre des dirigeants sont plus étroites.
Ainsi, l'évaluation des coûts doit être d'une
précision maximale, de manière à estimer les devis avec
finesse et orienter au mieux la stratégie commerciale. Car la gestion
des coûts n'implique pas uniquement leur réduction : il s'agit
aussi de pouvoir répondre aux questions stratégiques concernant
les leviers d'action les plus prometteurs, les décisions à
prendre en matière de gestion du portefeuille de produits ou de
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clients, les changements technologiques, l'opportunité
d'une externalisation, etc. La gestion des coûts renvoie donc à la
fois à une dimension opérationnelle, au pilotage des centres de
responsabilité, et à celui des coûts de revient et des
marges.
Ces différentes évolutions n'ont pas
épargné le continent africain en général, et le
Sénégal en particulier. Dans ce pays, la comptabilité de
gestion est restée sans intérêt jusqu'en 1945, c'est dans
la période des années 1950 à 1960 avec l'économie
agricole et l'apparition de la petite transformation que la comptabilité
des matières et mains d'oeuvre commence à susciter de
l'intérêt.
Les années 1960 à 1977
caractérisées par l'indépendance politique, on assiste
alors durant cette période à la naissance du tissu industriel et
l'industrie de transformation qui a favorisé la genèse d'une
organisation comptable avec l'avènement du Plan comptable, de la
comptabilité analytique et de la comptabilité du prix de
revient3.
Avec la nationalisation progressive du tissu économique
et les politiques nationales de développement et d'ajustement structurel
de 1977 à 1990, la comptabilité analytique commence à
glisser timidement vers le contrôle de gestion.
C'est à partir des années 1990 que le
contrôle de gestion commence à s'affirmer au Sénégal
avec la libéralisation, la privatisation,
l'homogénéisation du droit comptable et des affaires
(OHADA)4 et le boom des écoles de gestion, l'informatisation
et l'internet ont joué aussi pleinement leur rôle tant sur la
qualité que sur la fiabilité du traitement des informations du
contrôle de gestion.
3 Babacar Samba D.E.S.S Finance 2002/2003 IFACE UCAD : page 32
4 L'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des
Affaires (OHADA) a été créée par le Traité
relatif à l'Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique signé
le 17 octobre 1993 à Port-Louis (Ile Maurice).
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Cette affirmation du contrôle de gestion est
renforcée par l'adoption d'un nouveau système de
comptabilité appelé SYSCOA5 qui entre en vigueur en
janvier 1998. Il a pour objectif d'uniformiser le droit et les pratiques
comptables dans les pays membres de l'UEMOA6 et de moderniser les
systèmes comptables pour les rapprocher des normes internationales tout
en tenant compte des spécificités Africaines.
Le SYSCOA vise á favoriser une information mieux
organisée et plus complète. Il introduit des innovations majeures
qui paraissent bien adaptées aux entreprises africaines [Causse,
1999 ; Gouadain, 2000]7. Il « se veut un outil moderne
de gestion et d'aide á la décision, au service des entreprises et
de leurs partenaires (Etats, institutions financières, fournisseurs et
clients) » [UEMOA, 1996].
Au delà de la normalisation de la comptabilité
financière, il propose des méthodes et des outils pour l'ensemble
du système d'information comptable (comptabilité analytique de
gestion et analyse financière) qui sont des outils du contrôle de
gestion. C'est ainsi que le SYSCOA a proposé dans sa douzième
partie les principales méthodes de calcul de coûts dont l'ABC.
Cependant même s'il invite les entreprises á suivre au plus
prés leur gestion á l'aide d'une comptabilité analytique,
il n'en impose aucune. Ainsi l'adoption du SYSCOA n'est que la
conséquence logique de l'évolution du système de
comptabilité de gestion due á différents facteurs
cités plus haut (mondialisation, concurrence accrue, modification des
structures de coûts des entreprises etc....).
Toutes ces évolutions nécessitent pour l'entreprise
africaine, sénégalaise en particulier de se doter d'un outil de
système
5 SYSCOA : Système Comptable Ouest-Africane qui
sera remplacé plutard par L'OHADA (organisation pour l'harmonisation du
droit des affaires en Afrique)
6 UEMOA : Union Economique Monétaire
Ouest-Africane
7 Causse G, 1999, « vingt ans de normalisation
comptable et de PCG : son influence dans les pays d'Afrique Francophone »,
Comptabilité-Contrôle-Audit, mai
Gouadain D, 2000, « Le SYSCOA, ce méconnu »,
Comptabilité-Contrôle-Audit, Tome 6, vol1, mars.
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A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
d'information et de contrôle de gestion capable de
s'adapter au nouveau environnement mondial afin de pouvoir répondre aux
demandes des différents acteurs qui concourent á la gestion de
l'entreprise.
Compte tenu des difficultés que rencontrent nos
entreprises á mettre en place un système d'information et de
contrôle de gestion pouvant relier les objectifs et les stratégies
de l'entreprise aux indicateurs de performance, nous avons choisi de mener une
étude sur l'influence de l'utilisation de la méthode ABC\ABM sur
la performance de quatre entreprises sénégalaises. De ce fait, la
problématique de notre étude est de démontrer le lien qui
existe entre la comptabilité par activité et la performance des
entreprises qui l'utilisent. Nous tenterons donc de répondre á la
question centrale suivante « Quelle contribution en terme de
performance la méthode ABC\ABM a-t-elle apportée á ces
entreprises»?
La réponse á cette question fondamentale nous
amène á poser quatre questions spécifiques.
> La méthode ABC\ABM a-t-elle permis á ces
entreprises de maîtriser leurs coûts et donc de contribuer á
leur performance financière?
> L'abc\abm a-t-elle contribuée á une plus
grande prise en compte des besoins de la clientèle ?
> La méthode ABC\ABM a-t-elle permis á ces
entreprises de mettre en place des politiques d'innovations ?
> L'abc\abm a-t-elle permis de mieux impliquer le personnel
de ces entreprises dans leur gestion ?
Ces questions trouveront leurs réponses à travers
les objectifs de notre recherche qui sont au nombre de trois :
Le principal objectif de notre étude est de
démontrer le lien qui existe entre un système d'information
comptable et de contrôle de gestion en l'occurrence la méthode
ABC/ABM et la performance des entreprises qui l'utilisent. Donc il s'agira ici
de voir l'impact de la méthode ABC\ABM sur la performance des
entreprises sénégalaises qui l'ont adoptée.
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
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v Le second objectif de notre recherche est de montrer
l'importance qu'a cette méthode dans la gestion des entreprises
sénégalaises dans le contexte actuelle de
compétitivité accrue.
v Enfin il s'agira pour nous de découvrir les niveaux
d'application de la méthode ABC/ABM dans les entreprises
Sénégalaises et de découvrir les performances qui s'y
rattachent.
L'intérêt de notre travail réside dans le
fait qu'il entre en droite ligne avec les deux appels lancés au
début des années 80 par Kaplan et Hopwood.
Ainsi, pour [Kaplan, 1983]
«...l'important est de repérer les pratiques innovantes et
performantes mises en oeuvre par les entreprises afin de les documenter, de les
développer, de les partager et ensuite de les enseigner ». Pour
[Hopwood, 1983],
«...l'ambition est tout autre, il s'agit par l'analyse
des pratiques comptables de comprendre comment la comptabilité de
gestion s'insère dans la formation de la vie des organisations et
comment elle lie celle- ci à l'environnement social dans lequel baigne
l'organisation ». Ces deux appels ont surtout insisté sur la
nécessité de mener des études de cas dans la recherche en
sciences de gestion.
Donc le premier intérêt de notre étude est
d'apporter une réponse partielle á cet appel.
Ensuite dans un contexte où les entreprises ont moins
de marge de manoeuvre sur les prix, elles doivent s'orienter vers une plus
grande maîtrise de leurs coûts afin d'être
compétitives. D'ou l'intérêt pour nous d'étudier un
système d'analyse des coûts aussi novateur que l'ABC qui leur
offre cette opportunité.
Enfin puisque les systèmes de coûts restent encore,
pour les chercheurs, des boîtes noires dont il importe de repérer
les déterminants et les extrants
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
[Gosselin et Mévellec, 2003]. C'est dans
ce cadre que s'inscrit notre étude qui vise á mettre en
lumière des types d'ABC pratiqués par nos
entreprises8.
Notre travail porte sur quatre entreprises ce qui fait que
nous avons adopté une démarche holistico-inductive. Ainsi, le
guide d'entretien, le questionnaire et l'observation documentaire seront
utilisés comme instruments de collectes des données empiriques.
Pour le traitement de ces données, nous utiliserons l'analyse de
contenu.
Cette étude sera structurée en deux parties
théorique et empirique. Dans la première partie nous aborderons
les enseignements théoriques sur l'ABC/ABM et la Performance. La seconde
partie sera l'occasion pour nous d'étudier les apports de la
méthode ABC á la performance des entreprises qui l'utilisent.
Chacune de ces deux parties comportera deux chapitres.
8 Cette recherche a été effectuée
dans le cadre d'une étude globale qui prend en compte les
préoccupations d'un autre collègue du DEA de gestion. Celui-ci
travaille sur l'ABC mais sur l'angle des déterminants de son adoption et
rejet par les entreprises au Sénégal. Ce qui fait que
l'enquête par questionnaire prendra en compte son thème de
recherche.
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A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
Cette partie sera consacrée á une revue de la
littérature concernant les concepts de comptabilité par
activité ou ABC mais aussi de performance dans le premier chapitre. Dans
le second chapitre nous tenterons d'exposer les liens théoriques qui
existent entre la CPA et la performance pour les entreprises qui utilisent la
méthode ABC. Nous terminerons cette partie par faire ressortir les
limites de la méthode ABC d'après la littérature.
CHAPITRE I : GENERALITES SUR L'ABC/ABM ET LA
PERFORMANCE
Beaucoup de chercheurs se sont posé la question de
savoir pourquoi l'ABC ? Cette question est liée non seulement à
l'historique de la comptabilité de gestion mais aussi et surtout
à l'évolution de l'environnement économique qui a comme
conséquence actuelle le développement des services au niveau des
entreprises. Le développement des services notamment les services de
soutien engendre une augmentation des frais généraux. Ce qui doit
motiver le contrôleur de gestion à développer des outils
plus pertinents pour les mesurer mais aussi donner la possibilité au
dirigeant de mieux agir sur ces charges afin de les réduire. Dans ce cas
de figure une stratégie de réduction des coûts devient un
outil de gestion incontournable.
Dans ce chapitre, il s'agira pour nous dans une
première section de montrer les causes favorisant l'apparition de la
comptabilité par activité et les principes fondamentaux de cette
méthode. Ensuite dans la seconde section nous allons essayer
d'appréhender le concept de performance á travers la
littérature.
SECTION I : Emergence et principes fondamentaux de
l'ABC
L'étude d'un «nouveau» modèle de
comptabilité ne peut se faire sans avoir, au préalable, situer le
contexte dans lequel il émerge. C'est ainsi que dans ce paragraphe, nous
présenterons d'abord les causes de l'apparition de la méthode ABC
et ensuite nous étudierons les fondements de cette méthode.
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
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I) Les raisons de l'émergence de la
méthode ABC\ABM
Les fondements théoriques de la méthode ABC sont
surtout liés à l'évolution de l'environnement
économique mondial. Ce qui a amené les chercheurs à
critiquer la pertinence de la méthode traditionnelle du fait de son
inadaptation dans le contexte économique actuel. Cela est surtout
dû au renversement de la pyramide des charges.
Il y a 20 ans de cela la structure des entreprises
était telle qu'on observait 20% de frais généraux «
charges fixes » et 70 % de charges variables. Actuellement, on a la
tendance inverse. En effet, dans la plupart des entreprises les frais
généraux peuvent représenter 50 à 80% des charges
totales9.
Ce renversement de la pyramide des charges est surtout
dû au développement des services de soutien dans les entreprises
nécessaire pour satisfaire une clientèle de plus en plus
exigeante. C'est ainsi que nous allons exposer quelques raisons qui expliquent
l'apparition de l'ABC dans la gestion des entreprises.
1- Un nouveau contexte économique et technique
difficiles pour gérer
Dans les pays occidentaux, on assiste depuis quelques
années à une difficulté relative à la vente des
produits. Cette difficulté est causée, d'une part, par la
mondialisation avec l'ouverture accrue des frontières et des
marchés et d'autre part, par l'accès de certains pays du
tiers-monde à diverses formes d'industrialisation leur permettant de se
placer à des prix avantageux sur les marchés internationaux.
Cette concurrence accrue, due autant à une faible
augmentation des consommations qu'à une démultiplication de
l'offre, s'effectue essentiellement par les délais, par les prix ou par
les services rendus. Elle est d'autant plus sévère que dans ce
marché dominé par la demande, les comportements de la
clientèle évoluent vers une plus grande versatilité et des
exigences accrues. Pour s'adapter, les entreprises industrielles occidentales
doivent être capables de
9 Manuel et Application de contrôle de
gestion : Claude ALAZARD et Sabine SEPARI 4éme édition
Dunod
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diminuer les prix ou de différencier certains
marchés devenus "intenables" et d'évoluer vers des productions
à forte valeur ajoutée, caractérisées par leur
complexité, leur technicité, ou le volume important des
investissements qu'elles nécessitent.
De ce point de vue, on peut certes noter l'augmentation
relative du prix de certaines matières premières, mais aussi de
la hausse des masses financières mises en jeu par l'achat de moyens de
production plus complexes et plus performants. Dans ces conditions, il devient
primordial pour bon nombre d'entreprises d'accroître la finesse et la
précision de leurs systèmes d'évaluation, de
manière à ce que ces systèmes puissent continuer à
supporter des prises de décisions stratégiques dans un contexte
où la sensibilité des résultats financiers de l'entreprise
est de plus en plus grande, face à la moindre variation des conditions
de l'exploitation. [HERTERICH Pierre-Alexandre, MAROUANI Laetitia TUAL Lucie,
2001-2002].
2- Le besoin d'une vision nouvelle du pilotage de
l'entreprise
Comme nous venons de le voir, le contexte de concurrence
sévère et de baisse des marges contraint les entreprises à
faire face à une augmentation de la complexité et de la
variété des produits et des processus de production. Cela induit
alors, le besoin d'une vision nouvelle du pilotage de l'entreprise, prenant en
compte des indicateurs plus nombreux et plus variés.
En effet, les schémas classiques des systèmes de
décisions hiérarchisés ne suffisent plus, face au besoin
de suivre avec finesse l'ensemble des activités de l'entreprise et de
disposer rapidement des informations nécessaires pour réagir
efficacement aux perturbations de toute nature qui peuvent affecter la vie de
l'organisation.
Il y a alors aujourd'hui, un besoin de suivi analytique
détaillé des coûts des opérations. Il ne suffit plus
d'évaluer simplement le coût de revient des produits : il faut
d'abord que ce coût de revient soit évalué avec
précision, et que cette connaissance permette, pour les productions
futures, de chiffrer des devis avec
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
une fiabilité accrue. Il faut, de plus, connaître
les coûts associés aux clients, afin d'orienter la politique
commerciale de l'entreprise. Il faut enfin cerner les coûts induits par
le fonctionnement d'ensemble de l'entreprise, afin d'orienter les choix
d'organisation et de gestion vers une efficacité accrue.
Tout cela implique des systèmes d'information
susceptibles de fournir aux gestionnaires et décideurs une
variété importante d'indicateurs leur permettant d'obtenir des
informations exploitables le plus rapidement possible et selon
différents points de vue.
Il en résulte que les systèmes d'aide à
la gestion doivent être capables de conserver leur pertinence lorsque des
évolutions importantes du système opérant ou du
système de décision apparaissent. Ceci est difficile à
obtenir. Il s'agit alors de rechercher des systèmes de suivi des
coûts et des budgets, des indicateurs de performance et des
systèmes d'aide à la décision ouverts à des
modifications et à des adaptations en fonction des
nécessités du contexte d'où le besoin d'indicateurs et de
références de mesure qui présentent un caractère
d'invariant. Ainsi, des besoins nouveaux apparaissent, qui militent pour le
développement de nouvelles approches de la gestion, dépassant les
approches contre lesquelles nous allons faire la critique dans le point
suivant.
3- L'inadaptation des méthodes et des outils
classiques d'évaluation des coûts au
contexte actuel
Le but principal des méthodes de comptabilité
analytique est de calculer le prix de revient des produits fabriqués. Ce
prix de revient peut être décomposé en charges directes
(qui peuvent être clairement affectées à l'un ou l'autre
des produits dont on veut calculer le coût) ; et en charges indirectes
(qui seront imputées forfaitairement à ces produits). La
difficulté de connaître avec précision quelle part de
charges indirectes est supportée par chacun des produits explique la
multiplicité des méthodes.
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
La méthode de base la plus connue est celle des
coûts complets. Son principe consiste à découper
l'entreprise en centres d'analyse, chacun d'eux étant constitué
par un groupement de moyens concourant au même but, et dont
l'activité peut se mesurer en unités physiques
dénommées "unités d'oeuvre". On distingue les centres
principaux, liées aux produits commercialisés et les centres
auxiliaires. Les charges d'exploitation sont alors réparties par centre.
On ventile ensuite les charges des centres auxiliaires sur les centres
principaux. Puis on calcule les coûts par unité d'oeuvre. On
constate donc une inadéquation grandissante de cette méthode par
rapport à la réalité modélisée.
Tout d'abord le découpage de l'entreprise en centres
d'analyse a un caractère très arbitraire. Car ce découpage
pose le problème de la définition des clés de
répartition et des unités d'oeuvre. Ainsi, l'imprécision
liée à cette répartition voit son importance relative
augmenter dans l'évaluation des prix de revient et des coûts
complets des produits et services commercialisés.
Ensuite, on peut retenir une contradiction, de plus en plus,
flagrante entre la nécessaire flexibilité de l'organisation de
l'entreprise dans un contexte incertain et la rigidité des
modèles de comptabilité analytique. On se trouve donc
confronté au besoin de nouvelles techniques de calcul permettant de
réaliser des évaluations par rapport à un
référentiel stable qui ne peut pas être issu des approches
traditionnelles de la comptabilité analytique.
À l'heure actuelle, où l'importance relative de
la main-d'oeuvre diminue dans la valeur ajoutée produite, au profit de
la part créée par des équipements de plus en plus
sophistiqués, on conçoit fort bien que ces méthodes de
comptabilité des coûts soient, de plus en plus, inadaptées
aux besoins de gestion.
Enfin, on peut remarquer que, dans un contexte de concurrence
sévère, ce qui importe toujours est la valeur du produit aux yeux
du client. Cette valeur est représentative du prix que le client est
prêt à payer pour les fonctions et le service qu'il attend du
produit. C'est par conséquent, le coût de réalisation de
ces fonctions ou services qu'il importe d'évaluer et de suivre.
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
Cette analyse, qui recoupe celle de multiples experts,
notamment P. Mevellec et H. Bouquin, montre à l'évidence
l'écart qui s'institue entre les outils examinés et le besoin de
représenter et d'évaluer des organisations complexes et
plurielles dans lesquelles les indicateurs de performance et les dimensions de
l'évaluation ne sont plus seulement des indicateurs financiers. Il
résulte de tout cela la nécessité de mettre au point de
nouvelles approches méthodologiques plus conformes à
l'évolution du contexte industriel actuel.
4- L'émergence de l'approche par
activités dans la gestion de l'entreprise
Les insuffisances et les limites des approches classiques du
calcul et du contrôle des coûts telles qu'on vient de les voir, et
qui sont les éléments majeurs de la gestion industrielle, n'ont
laissé indifférents ni les pouvoirs publics, ni les
experts-comptables, ni les universitaires, ni bien sûr, les
industriels.
C'est ainsi que se sont développées les
idées de comptabilité basée sur les activités
"ABC", de l'anglais "Activity Based Costing", et de gestion par les
activités "ABM", de l'anglais "Activity Based Management". Cette
approche, qui connaît un engouement important depuis la fin des
années 1980, a fait l'objet de multiples expériences et de
nombreuses publications.
On peut faire remonter l'origine des approches de type ABC aux
Etats-Unis, dans les années 1960 : dans un certain nombre de grands
groupes industriels, et General Electric parmi les premiers, les insuffisances
des méthodes classiques de comptabilité analytique sont apparues,
dès lors que l'on voulait contrôler de manière plus
satisfaisante les frais généraux et leur incidence sur le
coût des produits.
Dans les milieux concernés, université, cabinets
d'expertise-comptable, associations de contrôleurs de gestion, grands
groupes industriels, les idées se sont donc progressivement
développées de la nécessité de mettre en place de
nouvelles approches permettant une analyse plus fine de l'ensemble des
coûts indirects et de leur imputation aux produits commercialisés
par l'entreprise.
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
À partir de là, il est assez naturel de
constater que tout processus de création de valeur dans l'entreprise
peut être envisagé comme une suite d'activité consommant
des ressources et que c'est de l'analyse fine des processus, des
activités et des consommations de ressources que peut résulter
une meilleure analyse des coûts et des performances.
De nombreuses publications furent donc effectuées sur
le sujet. Parmi lesquelles, nous retiendrons plus particulièrement celle
de R. Cooper, dont la contribution peut être considérée
comme l'une des plus décisives.
Par ailleurs, le CAM-I, par le biais de son programme de
recherche "Cost Management System", a fortement contribué,
d'une part à élaborer et à affiner les concepts et la
méthodologie de l'analyse par activités, d'autre part à
diffuser internationalement les idées nouvelles ainsi
développées.
En France, en 1988, sous l'égide du ministère de
la Recherche et de la Technologie, le groupe de recherche ECOSIP (Economie des
systèmes intégrés de production) a été
créé pour "réaliser un échange d'informations et
d'expériences sur le thème de l'évaluation
économique des activités industrielles". Il en est
résulté la publication, en 1990, de l'ouvrage Gestion
industrielle et mesure économique.
Toutes ces réflexions et tous ces travaux ont abouti
depuis une dizaine d'années à la publication de nombreux travaux
et ouvrages de Berliner (1988), Mevellec (1990), Cooper (1991), Lorino (1991),
Bescos (1994), etc. Ils ont également contribué à
développer l'engouement pour ce qu'il est convenu d'appeler "La
méthode ABC", c'est-à-dire l'Activity Based Costing et
l'Activity Based Management, en remplacement des systèmes
traditionnels de comptabilité analytique de plus en plus
condamnés par les experts.
Après avoir vu le contexte dans lequel est apparu la
méthode abc\abm, nous allons maintenant étudier les fondements
théoriques de cette méthode.
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
Il) Les principes de base de la méthode ABC/ABM
: les principes de base de la méthode
ABC\ABM
Dans les années 1980, un courant doctrinal
initié aux Etats-Unis à partir des travaux du CAM-I (Computer
Aided Manufacturaing-International) et de différents auteurs met
l'accent sur le déphasage croissant entre les méthodes
«traditionnelles » de la comptabilité analytique et les
nouveaux besoins de gestion des entreprises liés à
l'évolution du contexte économique. Ces travaux débouchent
sur une proposition de renouvellement dans la méthode de calcul des
coûts et introduisent l'option d'une comptabilité basée sur
les activités : Activity Based Costing (ABC). Depuis, cette
méthode a fait couler beaucoup d'encre et un véritable
débat s'est instauré pour tâcher de juger de son
utilité, de sa pertinence, de sa faisabilité, etc...
Dans cette section, il s'agira pour nous d'étudier
d'abord, la comptabilité par activité (ABC/ABM)
et ensuite de voir ces différentes composantes en nous appuyant
sur une large revue de la littérature. C'est-á-dire que nous
allons essayer de poser le débat portant sur les divergences et
convergences des auteurs concernant la définition des concepts de la
méthode.
1-Le Concept ABC/ABM
La gestion par les activités (Activity Based Costing)
est une nouvelle philosophie de gestion. Elle se traduit par une panoplie
complètement renouvelée d'outils et de méthodes, depuis la
mesure des performances opérationnelle jusqu'à la gestion
prévisionnelle de l'emploi, en passant par la gestion des flux de
matière, l'analyse de la valeur et l'évaluation des
investissements [Lorino, 91].
Ainsi pour [Lebas, 1999], on entend par
l'expression comptabilité par activités l'ensemble des
méthodes, principes et pratiques qui se fondent sur une
représentation de l'organisation en termes d'activités et de
processus. [Bachir WADE, 2005] de définir l'ABC comme
étant une nouvelle méthode de calcul
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
des coûts complets en privilégiant une logique de
causalité : les produits (ou autres objets de coûts) causent les
activités et les activités causent la consommation des
ressources. En d'autres termes, la méthode ABC est une variante des
coûts complets qui permet d'aller plus loin que le simple calcul des
coûts de revient. Cette logique permet d'assurer la
traçabilité des coûts et conduit á une imputation
fiable des charges indirectes. Pour ces dernières la méthode sous
sa forme la plus élémentaire, dite de première
génération consiste á :
- mesurer les consommations de ressources par les
activités
- définir le facteur explicatif du coût de chaque
activité - l'inducteur et calculer son coût unitaire.
- attribuer les coûts des activités aux produits
(ou autres objets de coûts) par le biais des volumes d'inducteurs
consommés.
L'ABC ne considère pas seulement les produits comme
objet de coûts, mais également les clients, les marchés et
les canaux de distribution. Contrairement aux systèmes traditionnels,
l'ABC ne concerne pas uniquement les coûts de production mais aussi les
coûts de vente et d'administration. Connaître un coût
constitue généralement le début d'une action de
management. Par conséquent, le management a besoin d'informations
pertinentes quant á la manière dont on peut réduire ces
coûts. Ces informations proviennent de l'approche horizontale du
modèle ABC qui concerne les processus. Avec l'ABC on part du principe
que chaque activité représente une partie d'un processus, chaque
activité est cliente d'une autre activité et a elle-même
des clients. C'est pourquoi [Bescos, P.Dobles, C Mendoza et All,
1994], disaient que la méthode á base d'activité
consiste á identifier les activités réalisées au
sein de l'organisation afin d'être á même de les relier de
la manière la plus directe possible avec la création de la valeur
(processus, produits, services,...). Le CAM-I (Computer Aided Manufacturing
International) de poursuivre en définissant l'ABC comme étant
conçue pour mesurer les coûts et les performances
d'activités en fonction de leur
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
consommation de ressources mais aussi ils sont affectés
aux objets générateurs de coûts en fonction de leur
utilisation d'activités. Donc, l'ABC identifie les relations causales
entre facteurs de coûts et activités. Pour [Richard
Milkoff, 1996], le principe de base de l'ABC est d'utilisé
l'activité comme interface entre les ressources et les produits, non
seulement pour tenter d'éviter des allocations arbitraires mais surtout
par ce que telle est ou semble être la réalité dans
laquelle « les produits consomment les activités, les
activités consomment les ressources »
Pour mettre au point une gestion des coûts par
l'activité il faut raisonner en amont :
Quelle est la cause du coût et pas la conséquence
?
Consomment consomment
Ressources F Activités F Produit / Service
|
Schéma 1 : fonctionnement de la méthode
ABC
Les produits consomment des activités, les
activités consomment des ressources.
Total des coûts
Coûts Directs
Coûts Indirects
Centre 1
Centre 2
Centre 3
Centre n
...
A 2
A 3
A 1
A 2
A 1
A 1
A 2
A 3
A 1
A 2
A 3
Inducteurs de coûts (Cost drivers)
Produit/ Service
1
Produit/ Service
2
On établit une succession de liens de causalité
plutôt que de répartir des coûts sur des produits à
partir de clefs de répartition imprécises et subjectives.
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
Figure 1 : affectation des coûts avec la
méthode ABC [Kaplan et Norton 1993]
Par conséquent l'ABC refuse la fatalité des
coûts pour s'attacher aux causes de l'existence des coûts. La
ventilation des coûts se fait donc sur la base des
générateurs des coûts (cost drivers) en lieu et place des
facturations basées sur la redevance, sur les volumes et/ou sur les
clés de répartition totalement arbitraires. Autrement dit l'ABC
constitue une nouvelle conception de la consommation efficiente des ressources
de l'entreprise qui s'intègre naturellement dans la stratégie de
base de l'entreprise et permet d'accroître la qualité des
processus [E.FAYE, 2007].
Par ailleurs, si le modèle ABC s'intéresse
essentiellement au calcul des coûts et des marges en donnant des
informations suffisamment pertinentes sur ces derniers, il importe de souligner
que sa finalité est d'assurer un pilotage efficace de l'organisation par
une optimisation des ressources disponibles et une gestion des
compétences et des processus orientés vers une
amélioration de la performance. Cette optimisation des ressources et
cette gestion des compétences et processus désignent le
modèle ABM (Activity Based Management) [El H FAYE,
2007].
Les deux modèles sont donc indissociables. L'un est un
outil de calcul des coûts, l'autre une démarche de management de
la performance et des progrès. Donc la finalité ou la suite
logique de l'ABC est l'ABM qui est une méthode de management de
l'entreprise qui permet un pilotage stratégique dans le but d'enclencher
et d'entretenir un processus continu d'amélioration des performances et
de création de la valeur [Bachir WADE, 2005]. Ainsi,
l'ABM est un principe et une pratique de management qui privilégient la
conception et le pilotage des processus et des activités dans une
perspective de chaîne de valeur comme moyen de réalisation de la
performance [Lebas, 1999]. On constate donc que l'ABM est plus
vaste que l'ABC, car le management des
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
activités se réfère á la
philosophie des managements englobant la planification, l'exécution et
la mesure des activités comme source d'avantages concurrentielle
[ROBE 1996]. La démarche ABM permet la réduction
des coûts en s'appuyant sur deux leviers :
> La restructuration des activités par
élimination des processus des activités sans valeur
ajoutée et par amélioration des activités essentielles,
créatrices de valeur en réduisant et en améliorant leur
performance.
> Le bench marking qui consiste á acquérir le
savoir-faire et la performance en se comparant á un meilleur choisi
parmi les concurrents ou les prestataires [Bachir WADE
2005].
En cela, nous pouvons dire que le management des
activités permet de mesurer l'activité en termes de coûts
et d'indicateurs de performance. C'est un levier de management qui permet de
rapprocher la mesure financière (les coûts) des critères
opérationnels (les causes).
En somme, le modèle ABC est une méthode de
calcul du coût de revient d'un objet (activité ou produit) qui
consiste à identifier les activités ou processus requis par la
création de cet objet et à en attacher les coûts au prorata
de la consommation d'activité. L'ABC offre ainsi une base potentielle
pour toutes les applications de gestion qui demandent une représentation
des « faire » et des savoirs « savoirs faire » de
l'entreprise. Il peut donc constituer la base commune de divers systèmes
de gestion de l'entreprise et de leur donner la cohérence, la
capacité de communication et d'intégration. La méthode
ABC/ABM doit être à la fois au service de la stratégie et
des responsables opérationnels. Pour cela, la nouvelle approche devrait
faciliter l'analyse des sources de la performance telles que (la
qualité, la flexibilité du système productif, les
délais de conception, de fabrication et de livraison, le niveau de
satisfaction des clients et les divers types de coûts) et
l'identification des DAS (Domaine d'Activité Stratégique) de
l'entreprise. Donc la mise en place de la comptabilité par
activités doit permettre
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
d'outiller correctement les dirigeants des entreprises qui
disposent désormais d'une information pluraliste et non uniquement
financière et comptable. Ceci a deux conséquences :
> L'accroissement de la visibilité
stratégique du manager d'entreprise (avec la différenciation
entre coût de fonctionnement et de développement).
> Le manager peut s'appuyer sur les outils de gestion
pertinents car étant flexibles grâce á la meilleure
répartition (affectation) des frais de structure permettant
d'améliorer la compétitivité prix des entreprises avec la
réduction des coûts adoptée.
La méthode ABC/ABM contribue ainsi á
l'identification des facteurs clés de succès d'une entreprise
afin de les renforcer. D'ailleurs l'analyse des activités et des sources
d'avantages concurrentielles qu'elle représente constitue actuellement
l'une des phases essentielle de la réflexion stratégique
[Philipe Deherripion].
Après cette définition des concepts ABC/ABM,
Mevellec conclut en précisant que le système ABC/ABM repose sur
un modèle de représentation de l'entreprise dont
l'activité est la « brique de base ». Autrement dit la
comptabilité par activité repose sur quelques concepts
fondamentaux, á savoir l'activité, l'inducteur de coût et
le processus dont nous allons voir leurs définitions.
2- L'activité
L'activité est l'ensemble des tâches
élémentaires réalisées par un individu ou un
groupe. Tâches homogènes en termes de performance permettant de
fournir un produit ou un service à un client (externe ou interne). Ces
tâches sont réalisées à partir d'un ensemble de
ressources (matérielles, heures de travail, jours
travaillés,...).
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
L'influence du concept de chaîne de valeur de
[Porter, 1986] a été déterminante dans les
travaux sur la méthode ABC/ABM. Porter définit l'activité
comme une composante de la structure de coût du segment
considéré : certaines de ces activités lui sont propres,
d'autres sont communes à plusieurs segments. La décomposition en
activités repose sur les critères suivants :
> Le recours à des technologies différentes
;
> L'existence de lois différentes d'évolution
de leurs coûts (exemple : économie d'échelle ou non) ;
> L'importance de la part qu'elles représentent dans
les coûts totaux ;
> L'impact de l'activité sur la différenciation
du produit par rapport à ceux des concurrents.
De nombreux auteurs en contrôle de gestion dont
[Mevellec, 1995, 1996, 2000 ; Lorino, 1996 ; Bouquin, 1997]
ont précisé les déterminants de l'activité au sein
de la méthode ABC/ABM. Nous en retiendrons la définition suivante
:
L'activité est un ensemble de
tâches dont la cause est commune. Elle peut se
décrire par des verbes, fait appel à un savoir faire et produit
un output bien précis. Elle constitue le plus petit commun multiple des
agrégats envisagés dans la modélisation de l'organisation.
Pour [El Faye, 2007] l'activité est une tâche ou
un ensemble de tâches homogènes caractéristique d'un
processus de réalisation de la chaîne de valeur. Ainsi
l'activité décrit ce que l'on fait dans les entreprises. Turney
de définir l'activité comme étant un processus ou une
procédure qui produisent du travail. Ces quelques définitions
démontrent s'il est de la divergence mais aussi de la diversité
d'appréhension de la notion d'activité par les praticiens et
académiciens (voir documents 2 et 3 en annexes). En définitive,
nous pouvons définir une activité comme une combinaison de
personnes, de technologies, de matières premières, de
méthodes et d'environnement qui permet de produire un produit ou un
service donné. Autrement dit, une activité est
un ensemble de tâches élémentaires :
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
· réalisées par une
entité,
· faisant appel à un savoir-faire
spécifique,
· homogènes du point de vue de leur
comportement de coûts et de performances, permettant de fournir un
output (une pièce fraisée, une facture...),
· à un client interne ou externe,
· à partir d'un panier d'inputs (travail,
machines, information) ((d'après Philippe Lorino).
les apports de l'activité au contrôle de
gestion
La première force de la méthode ABC/ABM est
qu'elle cherche à identifier les causes de consommation de ressources de
l'organisation au travers des activités qu'elle abrite au lieu de
chercher à répartir ces mêmes ressources directement sur
les produits, comme le font les outils traditionnels de comptabilité de
gestion. Les activités constituent, en outre, des
référentiels très explicites pour les acteurs au sein de
l'organisation.
Ce « pivot » activité permet
d'améliorer la fiabilité du calcul. [Lorino,
1991] estime que cela permet une bonne analyse, et donc une
maîtrise des coûts «indirects» (c'est-à-dire
indirects par rapport aux produits). Ces derniers, peu élevés du
temps de Taylor et de la création des outils traditionnels de
comptabilité de gestion, pèsent aujourd'hui beaucoup plus que les
coûts «directs». Dans leur majorité, les coûts
indirects peuvent être gérés selon leur comportement
réel, avec leur propre unité d' oeuvre et leur propre coût
unitaire, et non plus noyés dans un taux horaire global. La distinction
entre charges directes et indirectes sur laquelle repose le système
traditionnel disparaît et l'on obtient alors un coût direct presque
complet.
Le lien de causalité identifié par l'ABC/ABM
entre frais généraux et produits permet de déterminer
plus précisément comment les frais généraux sont
causés par les produits, et par cette meilleure imputation,
d'éviter les phénomènes de
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
subventionnements croisés entre produits de petites et
grandes séries [Cooper, 1993].
Le deuxième apport de la notion d'activité en
contrôle de gestion a une implication directe en management et en gestion
stratégique. L'analyse des activités au sein de l'organisation
permet de réfléchir au fait qu'elles sont ou non porteuses de
valeur, qu'elles constituent des goulets d'étranglement, qu'il y ait
moyen de les réorganiser ou les sous-traiter, aux mesures de performance
qu'il faut leur associer en vue de leur pilotage, etc. [Boisvert, 1994
; Lebas, 1994].
Enfin, grâce à cette maille de dimension
universelle qu'est l'activité, la méthode ABC/ABM offre
également une véritable interface pour beaucoup de pratiques
modernes de management, comme le target costing, le juste-à-temps,
l'analyse de la valeur, le reengineering. Toutes ces activités vont
être après regroupées dans des processus.
3-Le processus
Il s'agit d'un «mot latin désignant le
déroulement dans le temps d'un phénomène. En
économie, il désigne les différentes étapes, les
différents stades dans la réalisation d'une opération
économique ou tout simplement le mouvement dans le temps et dans
l'espace de développement d'une activité.» [Bouquin,
1993].
Un processus est un « ensemble d'activités
reliées entre elles par des flux d'information ou de matière
significatifs, et qui se combinent pour fournir un produit matériel ou
immatériel important et bien défini » [Lorino,
1997]. Le processus constitue le trait d'union entre les objectifs et
les activités. Car «Derrière un objectif, qu'il soit
opérationnel ou stratégique, se trouve toujours un processus qui
cherche à le réaliser » nous dit [Gervais,
2000]. Il s'agit par
exemple de la gestion des fournisseurs et des sous-traitants, de
la réponse des demandes clients, de la création d'un nouveau
produit...
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
Ainsi, le processus serait la symbolisation d'un acte
collectif caractérisé par la coopération, la coordination,
la planification et la communication entre opérateurs de fonctions
différentes. Sur ce point, [Davenport et Short, 1990],
cités par [Lorino, 1991] constatent que : «
Les entreprises trouvent de plus en plus nécessaire de
développer une capacité de travail plus flexible, plus
orientée vers les équipes, fondées sur la coordination et
la communication. En bref, plutôt que de maximiser la performance
d'individus ou de fonctions pris isolément, les entreprises doivent
optimiser des activités interdépendantes dans et à travers
toute l'organisation ».
Ces processus sont une nouvelle approche de la
coordination dans l'entreprise». De plus, la gestion par processus
intégrant les activités évite le risque de corporatismes
locaux des différentes équipes car le principe du processus est
qu'il traverse les différentes fonctions de l'entreprise. C'est la
performance globale qui est visée à travers la
qualité des interactions. Le processus est tout à la fois un
enchaînement d'activités à l'intérieur d'une
même fonction et une somme d'activités transfonctionnelles
[Rezkia BENMABROUK et Claude DORNIC, 2001]. La structuration
des processus est un indicateur de la finalité de l'entreprise.
Certaines activités peuvent être
représentées comme un processus de tâches
hiérarchisées et chronologiques. Il n'existe pas, a
priori, d'opposition fondamentale entre activités et processus,
simplement une différence de vision qui passe du petit au grand angle.
Il n'y a pas de processus sans activités. Une activité n'a de
sens qu'intégré dans un processus [Richard MILKOFF,
1996]. C'est ce que veut affirmer Bouquin, quand il écrit :
«Si, dans toute organisation, les tâches
élémentaires s'articulent entre elles selon des processus
finalisés pour former des activités, la notion de processus reste
pertinente à un niveau plus global, puisque les activités,
à leur tour, s'articulent en processus».
Les processus permettent à la méthode ABC/ABM de
traduire la transversalité de l'entreprise. Les processus sont
constitués d'activités, ils proposent une
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
description de l'entreprise en termes de modes
opératoires et non en termes politiques ou organisationnels (ils
décrivent des modes d'action et non des structures de pouvoir ou de
responsabilité). Par ailleurs, ils visent l'existant et non un
modèle-cible, les activités représentant ce que sait faire
l'entreprise et non pas ce qu'elle voudrait faire. Les processus regroupent et
agencent des activités selon une logique de produits, donc selon une
logique de clients internes ou externes, et non selon une logique introvertie
de métiers ou de fonctions [Lorino, 1996].
[Mévellec, 1996] précise que
les processus regroupant des activités dispersées au sein de
différentes fonctions sont le lieu d'élaboration de la valeur au
sein de l'organisation. Ils vont à cet effet, soit produire de nouvelles
variétés d'output à structure constante, soit être
réorganisés pour continuer à produire en consommant moins
de ressources et / ou en améliorant les attributs porteurs de valeur. En
cas d'incapacité à faire face à la concurrence,
l'entreprise peut être conduite à se séparer d'un de ses
processus en sous-traitant à un partenaire plus efficace un
élément de la chaîne de valeur qu'elle ne peut
réaliser dans des conditions satisfaisantes.
De plus, cette vision transversale de l'organisation qu'offre
le processus permet d'identifier les gisements importants de progrès qui
se situent aux interfaces des centres de responsabilités, dans les modes
de communication, de coopération et de coordination, interfaces qui
étaient négligées par les outils traditionnels de
comptabilité de gestion [Lorino, 1995].
L'examen de ces quelques définitions fait
apparaître un consensus quasi-général sur deux points : le
processus est un ensemble d'activités et il a une finalité
externe.
En revanche plusieurs points importants restent á
éclaircir. Pour certains auteurs, le processus se déroule au
sein d'une même entité organisationnelle, alors que pour
d'autres il a la propriété de franchir les frontières
entre services, donc
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
d'être transversal. Lorsque l'on sait que l'ABC
débouchant sur l'ABM a été ultérieurement
présenté comme un vecteur utile d'une vision transversale,
horizontale de l'organisation, cette précision sur le concept de
processus n'est pas indifférente. On constate également que les
définitions de [Mevellec, 1990] et de [Lebas,
1991] sont assez différentes des autres. Pour
[Mevellec, 1990], les activités rassemblées dans
un processus ne le sont pas en vertu d'une finalité commune mais
á cause d'un facteur de déclenchement commun. Certes dans la
pratique, ces deux façons de construire un processus peuvent être
équivalentes, mais l'énoncé a sans doute son
importance.
Selon nous, (le tableau 4 en annexe) révèle donc
deux conceptions implicites du processus. Pour certains auteurs, le processus
existe physiquement dans l'entreprise et la représentation comptable que
nous adoptons n'est que le reflet d'une réalité qui existe par
ailleurs, et qui a sa propre logique technique. Pour d'autres, le processus est
la construction opérée par les analystes en se fondant sur
différents critères, pour répondre á certains
besoins d'informations. On retrouve ainsi au niveau de la définition des
processus le caractère volontariste de la démarche adaptée
par [Mevellec, 1990], que nous avions déjà
signalé á propos de la définition de l'activité.
En revanche, la plupart des auteurs étudiés sont
en désaccord sur la hiérarchie qu'il faut établir entre
les deux concepts que nous venons de recenser : les tâches composent les
activités qui composent les processus. Il faut cependant mentionner la
position originale de [Bouquin, 1993] qui considère que
les tâches sont enchaînées au sein de processus,
appelées activités. Ceci n'empêche pas d'ailleurs que les
activités soient elles aussi enchaînées au sein de
processus plus vastes, « á un niveau plus global » (p.71).
Pour [Bouquin, 1993] donc, le terme de processus signifie
qu'il y a une articulation entre différents éléments,
quels que soient les éléments considérés.
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
4-L'inducteur
Les systèmes de coûts à base
d'activités reposent sur la relation existant entre le produit dont on
veut mesurer le coût et les activités qu'il consomme. La
construction du modèle rend indispensable d'une part, la recherche des
causes influant sur l'activité et, d'autre part, la détermination
de «l'unité de mesure» pour imputer les coûts des
activités aux produits ou services.
La recherche des causes influant sur l'activité, son
existence, l'augmentation ou la diminution de son niveau : il s'agit, dans
cette perspective, de déterminer ce qui induit le coût, ce qui y
conduit. L'expression anglaise qui définit cette cause originelle du
coût, «cost-driver, est traduite le plus fréquemment
par «inducteur de coût». Cet inducteur joue
un rôle éminemment stratégique puisqu'il est «le
responsable» sur lequel il va falloir que l'organisation intervienne pour
pouvoir effectuer les corrections ou modifications souhaitées avec un
pourcentage d'efficience important.
Ce nouveau terme définit les indicateurs de causes
profondes de consommation. L'objectif est de mettre en évidence ce qui
cause le coût, la loi économique sous-jacente ou les
caractéristiques technologiques dont le coût dépend
[Bouquin, 1997]. Pour [Bescos et Mendoza,
1994], l'inducteur de coût (cost driver) est donc un facteur
influençant les niveaux de performance d'une activité et sa
consommation de ressources. Mais l'intérêt des inducteurs repose
surtout dans la possibilité de suivre des indicateurs autres que ceux
purement financiers au sein des activités. Ainsi, les dimensions de
qualité et de délai peuvent être tracées au sein des
activités par des inducteurs appropriés, alors que les
systèmes traditionnels de comptabilité de gestion ne prenaient en
charge que le couple quantité / coût.
Le concept d'inducteur de coût est souvent
présenté comme un des apports originaux des méthodes
à base d'activités. Il est exact que la recherche des liens de
causalité marque la spécificité de cette méthode.
La mise en évidence
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
d'inducteurs de coûts est à rattacher à
celle des activités dans la mesure où la base conceptuelle de la
méthode est de justifier les événements par leurs causes
originelles, et non de constater simplement les effets. Ainsi, rechercher les
causes des coûts, les activités, conduit inévitablement
à rechercher les causes des activités, les inducteurs.
L'expression de langue anglaise «cost-driver» a donné
lieu à plusieurs traductions tels que «
générateurs de coûts» ou encore
«vecteurs de coûts». Certains auteurs utilisent le
concept d'unité d'oeuvre comme synonyme. Pourtant, il s'agit de deux
acceptions différentes.
En d'autres termes, cela revient à distinguer, le concept
d'inducteur en tant que tel et son utilisation, son
«opérationnalisation».
C'est la différence entre la notion «d'inducteur
structurel» et celle «d'inducteur opérationnel».
L'inducteur structurel : c'est la définition du concept d'inducteur que
donnent des auteurs tels que [Shank et Govindarajan, 1993] et
également, [Brimson, 1991]. En effet, pour ce dernier,
le «cost-driver» est : « le facteur qui crée l'apparition
du coût. C'est celui qui est la première cause du niveau
d'activité ». En d'autres termes l'inducteur de coûts est la
raison pour laquelle certaines activités sont nécessaires
entraînant, de fait, un montant de charges à supporter.
Entre le concept lui-même et son utilisation, la
différence est plus ténue qu'il n'y paraît. Distinguer
l'inducteur de coûts et la mesure de l'activité ne veut pas dire
qu'il n'existe pas une relation qui lie l'un à l'autre. L'inducteur de
coûts est et demeure la cause du niveau d'activité, par la
complexité qu'il impose, les tâches qu'il nécessite ou le
temps qu'il entraîne. Il crée, ainsi, par sa propre existence, les
conditions de variation de la mesure de l'activité.
5-Les ressources
Tout en employant parfois des termes différents, les
auteurs qui définissent les ressources s'accordent pour dire que
celles-ci sont constituées par les charges (au sens comptable) de
l'entreprise. Pour [Bescos et Mendoza, 1994, pp.40-41],
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
« les ressources constituent les moyens en hommes et
matériels disponibles pour obtenir les produits vendus (ou les services
offerts) ». Pour [Bouquin, 1993, p.95], « les
ressources telles que la comptabilité de gestion les voit sont des
ressources économiques, des facteurs de production : personnel,
matières, fournitures, locaux, matériels ». Enfin,
[Lorino, 1991, p.67] parle d'input, et rassemble sous ce
vocable « toutes les ressources consommées par l'activité,
qu'il s'agisse de composants, de matières premières,
d'informations (une gamme, un mode opératoire), d'utilisation
d'équipements ».
En définitive, la comptabilité par
activité peut être définie comme « une méthode
de calcul et de management des coûts remettant en cause l'approche
fondée sur les coûts complets par la prise en compte de la notion
d'activités permettant d'apporter une information pertinente et
diversifiée quant au pilotage de l'entreprise.
Autrement dit, l'Activity Based Costing (ABC) et l'Activity
Based Management (ABM) favorisent une meilleure perception des coûts et
de la rentabilité, entre autres, des produits et des clients. Il s'agit
de techniques permettant d'identifier les facteurs de coûts réels
et les économies de coûts potentielles.
En outre, la méthode ABC/ABM propose des concepts
novateurs et séduisants par rapport aux outils traditionnels de
comptabilité de gestion. Les trois principaux concepts de la
méthode ABC/ABM qui lui donnent une bonne capacité d'adaptation
sont ceux d'activité, de processus et d'inducteur. Ils en font
également un relais de la stratégie dans la gestion quotidienne
de l'entreprise et lui procurent une plus grande cohérence dans la
modélisation du fonctionnement de l'organisation que ne le faisaient les
outils traditionnels. Ainsi la notion d'activité permet le couplage de
la méthode avec les analyses stratégiques de l'organisation dans
un double mouvement : elle permet à la fois la déclinaison de la
stratégie dans l'organisation au niveau local, mais elle permet aussi
l'alimentation de l'analyse stratégique par ses remontées
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
d'information et par la carte des activités et processus
qu'elle dresse [Bréchet et Mévellec, 1999].
L'universalité du concept d'activité permet
aussi, la déclinaison de la stratégie à d'autres outils
récents de management et donc une cohérence de l'action de
l'organisation par rapport à sa stratégie. La méthode
ABC/ABM semble donc être une réponse particulièrement
pertinente aux problèmes contemporains liés au pilotage des
organisations.
Après avoir défini la comptabilité par
activités avec toutes ces composantes de la façon la plus large
possible, nous allons dans cette deuxième section appréhender le
concept de performance.
SECTION II : La performance un concept multicritère
Multidimensionnel
Comme le remarque [Robert Eccles, 1991],
« les révolutions commencent longtemps avant qu'elles soient
officiellement déclarées ».
Au cours des vingt-cinq dernières années,
praticiens et théoriciens ont réfléchi aux outils
permettant d'améliorer et de mieux mesurer la performance des
organisations. Ils ont notamment mis en évidence que la notion
même de performance ne se limite pas nécessairement à la
"performance financière" à court terme [Hayes et
Abernathy, 1980, Johnson, 1992, Bouquin, 1997, etc...] mais qu'elle
peut en réalité avoir plusieurs dimensions, telles que: la
qualité, les coûts ou la diversité des produits ou des
services, les délais de livraison, la satisfaction des clients, la
réactivité, l'innovation, qui sont autant
d'éléments sur lesquels se construit la
compétitivité d'une entreprise en fonction de sa stratégie
[Eccles, 1991]. D'ailleurs, les écrits sur les mesures
de la performance remettent en cause l'utilisation de mesures
financières comme seul système permettant d'apprécier
l'atteinte des objectifs et la réussite des entreprises.
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
Dans cette section, nous verrons comment la littérature
appréhende le concept de performance á travers les écrits
des différents auteurs.
I : les caractères multidimensionnels de la
performance
La performance a toujours été un sujet
controversé. Chaque individu qui s'y intéresse (chercheur,
dirigeant, client, actionnaire, etc.) l'aborde selon l'angle d'attaque qui lui
est propre. Ceci explique, sans doute, le nombre important de modèles
conceptuels proposés dans la littérature et les nombreuses
acceptions élaborées autour de ce concept. Comme l'affirme
[Marmuse, 1997], la performance n'existe pas. Il s'agit d'une
notion contingente et multidimensionnelle mais nécessaire pour
évaluer toute décision prise. C'est ainsi que la performance
d'entreprise est une notion centrale en sciences de gestion.
1- Evolution du concept de
performance
Depuis les années 80, de nombreux chercheurs se sont
attachés à la définir [Bouquin, 1986 ; Bescos et
al.1993 ; Bourguignon, 1995 ; Lebas, 1995 ; Bessire, 1999 ...]
et plus récemment cette notion est mobilisée dans la
littérature managériale pour évaluer la mise en oeuvre par
l'entreprise des stratégies annoncées de développement
durable [Capron et Quairel, 2005].
L'origine du mot performance remonte au milieu du 19ème
siècle dans la langue française. A cette époque, il
désignait à la fois les résultats obtenus par un cheval de
course et le succès remporté dans une course. Puis, il
désigna les résultats et l'exploit sportif d'un athlète.
Son sens évolua au cours du 20ème siècle. Il indiquait de
manière chiffrée les possibilités d'une machine et
désignait par extension un rendement exceptionnel. Ainsi, la performance
dans sa définition française est le résultat10
d'une action1 1, voir le succès12 ou l'exploit.
10 La performance résultat est
mesurée en comparant le résultat obtenu à l'objectif
fixé. Cette approche est celle retenue jusqu'alors en contrôle de
gestion
11 la performance action est appréhendée
à partir des moyens, des processus, des compétences, et des
qualités mises en oeuvre pour atteindre ces résultats
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
Contrairement à son sens français, la
performance en anglais « contient à la fois l'action, son
résultat et éventuellement son exceptionnel succès »
[Bourguignon, 1995, p.62]13.
2- Les dimension de la performance
Dans le domaine de la gestion, la performance a toujours
été une notion ambiguë, rarement définie
explicitement. Elle n'est utilisée en contrôle de gestion que par
transposition de son sens en anglais. Elle désigne alors l'action, son
résultat et son succès14. Pour expliquer la
performance, nous retiendrons la définition de [Bourguignon,
2000] car elle regroupe les trois sens recensés ci- dessus et
lui reconnaît explicitement son caractère polysémique.
Ainsi la performance peut se définir «comme la réalisation
des objectifs organisationnels, quelles que soient la nature et la
variété de ces objectifs. Cette réalisation peut se
comprendre au sens strict (résultat, aboutissement) ou au sens large du
processus qui mène au résultat (action)....» (p.934). Pour
[Lebas, 1995], la performance peut être comparée
aux fruits d'un arbre que l'on peut compter mais dont le nombre et la
qualité dépendent de la qualité du sol, des racines, de la
taille, etc. Ainsi, la performance d'une entreprise (qualité, coût
ou diversité des produits, délais de livraison, satisfaction des
clients, réactivité, innovation, etc.) dépend des
investissements, de la souplesse de fabrication et de conception, de la
maintenance, des relations avec les fournisseurs et les clients, des
partenariats, des compétences et de la formation du personnel, de la
capacité et de la rapidité d'adaptation de toute l'organisation,
de la fiabilité des modes
12 la performance succès est fonction des
représentations de la réussite [BES 99] et varie en fonction des
représentations que s'en font les acteurs, et de manière plus
générale l'organisation tout entière
13 Etymologie du mot performance, selon Bourguignon (1995,
p.62) : Le mot performance dans son acception française du 19ème
siècle dérive du mot anglais performance (fin du 15ème
siècle) qui désignait la réalisation, l'accomplissement,
l'exécution. Mais cette définition anglaise est empruntée
au mot français « performance » qui provient de l'ancien
français du 13ème siècle et qui signifiait accomplir,
exécuter.
14 La performance en tant que succès n'existe pas en
soi. Elle est fonction des représentations de la réussite et
varie selon les entreprises et les acteurs. La performance, résultat
d'une action, ne contient pas de jugement de valeur, contrairement à la
performance-succès. La performance-action est un processus et non un
résultat qui apparaît à un moment donné dans le
temps. Cette performance contient et dépasse largement la
performance-résultat. En effet, elle « inclut les résultats
mais aussi les activités, les tâches à accomplir »
(Bourguignon, 1995, p.64). Ce troisième sens est moins courant que les
deux premiers, car il est absent de la définition française de la
performance.
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
opératoires, du contexte social, etc. Il poursuit en
disant que la performance n'existe que si on peut la mesurer et cette mesure ne
peut en aucun cas se limiter à la connaissance d'un résultat.
Alors, on évalue les résultats atteints en les comparants aux
résultats souhaités ou à des résultats
étalons [Bouquin, 2004]. Dans ce contexte,
l'évaluation de la performance peut être assimilée au
« benchmarking »15. La définition de
[Bourguignon, 2000, p.934] s'applique autant à
l'organisation qu'à l'individu : « est performant celui ou celle
qui atteint ses objectifs » (1995, p.65). Pour [Bouquin,
2004] cité par [Baidari, 2007], la performance
peut être appréhendée á partir de ce qu'ils
appellent les trois « E » (Economie, Efficience &
Efficacité). Selon ces auteurs, l'économie consiste à se
procurer les ressources au moindre coût ; l'efficience est le fait de
maximiser la quantité obtenue de produits ou de services à partir
d'une quantité donnée de ressources (la rentabilité et la
productivité sont deux exemples d'efficience). Enfin,
l'efficacité est le fait de réaliser les objectifs et
finalités poursuivis. Ils sont rejoints en cela par [Mathe,
Chague & Hazebroucq, 1999], pour qui la performance signifie
«être efficace » mais aussi « être efficient ».
Autrement dit, la réalisation du but final ne suffit pas, la
manière d'atteindre ce but doit être également jugé.
Ainsi, on converge vers une autre vision de la performance : le triptyque
objectif- résultat- moyens dont l'efficacité mesure les
résultats par rapport aux objectifs. En outre, [Lorino, 2003]
considère qu'on peut définir la notion de performance
d'une manière simple «Est donc performance dans l'entreprise tout
ce qui, et seulement ce qui, contribue à améliorer le couple
valeur-coût, c'est-à-dire à améliorer la
création nette de valeur». La valeur, c'est la richesse
créée par l'entreprise pour ses clients, tandis que le
coût, c'est la richesse qu'elle consomme pour créer cette valeur.
Donc pour Lorino, la performance de l'entreprise repose donc sur sa
capacité à produire de la valeur utile pour ses clients en
consommant le minimum de ressources.
15 Technique de gestion et de marketing qui consiste à
comparer son entreprise à une ou plusieurs autres entreprises qui font
références dans un domaine spécifique.
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
De plus, [Bouliane, Guindon, Morin, 1996],
retiennent quatre critères de mesure de la performance,
organisationnelle. Il s'agit de la pérennité
représentée par la qualité du produit / service,
rentabilité financière et compétitivité ;
l'efficience économique mesurée par l'économie des
ressources et la productivité ; la valeur des ressources humaines, avec
comme indicateur la mobilisation, le développement personnel, le
rendement et le climat social; et enfin la légitimité de
l'organisation auprès des groupes externes qui se matérialise par
la satisfaction des bailleurs de fonds, de la clientèle, des organismes
régulateurs et de la communauté.
Aussi, [Marmuse, 1997], distingue-t- il quatre
dimensions de la performance :
> La performance stratégique qui correspond aux
approches par l'excellence de [Peters et Waterman, 1983], ou
bien encore d'intention stratégique de [Hamel et Prahalad,
1989];
> La performance concurrentielle qui regroupe les
contributions de [Hax et Majlouf, 1983] en termes d'analyse
des systèmes concurrentiels; le modèle de [Porter, 1981]
avec les cinq forces concurrentielles; ou encore de [Ansoff,
1968] à travers l'idée d'écart stratégique
;
> La performance socio-économique, basée sur
l'idée de performance organisationnelle [Kalika, 1995],
et la notion des coûts cachés [Savall, 1997];
> La performance économique et financière
évaluée à partir des documents comptables.
Enfin, et dans la même perspective, citons les travaux
récents de [BughinMaindiaux et Finet, 1999], mais aussi
de [Kaplan & Norton, 1992] qui appuient leurs
réflexions sur un système de mesures non financières. Ce
modèle prend en compte quatre dimensions en connexion avec la
stratégie : la dimension financière, la dimension clients,
processus internes, apprentissage organisationnel et croissance. D'ailleurs
c'est sur l'étude de Kaplan & Norton que notre étude sur la
performance va être basée.
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
L'ensemble de ces développements témoigne de la
réalité polymorphe du concept de la performance. Toute
appréciation ne peut qu'être contingente. Elle est relative
à l'orientation choisie par le chercheur et à l'angle suivant
lequel celui-ci décide de répandre son éclairage.
LIles principaux critères de maîtrise de
la performance
Définir la performance est complexe, car elle regroupe
plusieurs dimensions [Mathe, 1999]. A partir des deux
principaux critères d'appréciation de la performance que sont
l'efficacité et l'efficience, une première
classification de ces dimensions peut être réalisée. Le
succès (ou la réussite), la compétitivité, les
facteurs clés de succès constituent les dimensions principales
d'appréciation de l'efficacité ; la productivité, les
coûts, le rendement et la rentabilité, celles de l'efficience.
1-Les critères d'efficience et
d'efficacité
L'efficacité se défini comme la capacité
d'une organisation à atteindre l'objectif qu'elle s'est fixée
[Jacot, 97]. Pour [Longeaux, 1994]
l'efficacité est le meilleur rapport possible entre le degré de
satisfaction des clients et les moyens mis en oeuvre pour l'obtenir. La
satisfaction de la clientèle est dans ce cas une des dimensions de la
réussite organisationnelle. L'efficacité, la réussite
ou le succès sont alors des concepts proches. La
réussite est subjective [Bourguignon, 1995] et est
généralement mesurée à partir du concept de
compétitivité [Lesca, 1984]. La
maîtrise des Facteurs Clés de Succès(FCS) ou de
réussite, c'est-à-dire les atouts, le savoir-faire, est un gage
de compétitivité pour l'entreprise en termes d'avantages
concurrentiels [Bescos, 1994]. Trois facteurs clés de
succès sont considérés comme des facteurs principaux de
compétitivité de l'organisation : le prix, les délais et
la qualité [Bergeron, 1996]. L'efficience se
définit comme l'obtention du résultat fixé sous contrainte
de coûts. [Mathé et Chagué, 1999]
emploient le terme d'efficience productive, mesurée en termes
de coûts et de productivité. Cette dernière se
définit comme le rapport entre «
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
une production et l'ensemble des facteurs de production qui
ont permis de l'obtenir [Richard, 1993]». La
productivité est synonyme de rendement [Boisvert, 1995]
et constitue un instrument de mesure de l'efficience organisationnelle
[Villarmois, 1998], au même titre que la
rentabilité [Bouquin, 1986].
2- Une typologie de définitions de la
performance globale
[Bourguignon, 1998] propose une
définition de la performance à partir de trois sens
généraux : la performance résultat, la performance action
et la performance succès. La performance résultat est
mesurée en comparant le résultat obtenu à l'objectif
fixé. Cette approche est celle retenue jusqu'alors en contrôle de
gestion. La performance financière de l'organisation est mesurée
à partir de critères tels que la rentabilité, la
profitabilité, la productivité, le rendement des actifs et
l'efficacité. Si la performance résultat « n'est que le
résultat de l'action », la performance action est
appréhendée à partir des moyens, des processus, des
compétences, et des qualités mises en oeuvre pour atteindre ces
résultats. Enfin, la performance succès est fonction des
représentations de la réussite [Bessire, 1999]
et varie en fonction des représentations que s'en font les acteurs, et
de manière plus générale l'organisation tout
entière
3- Performance globale et indicateurs de
pilotage
L'environnement concurrentiel exige des informations plus
précises sur les coûts et les performances concernant les
activités, les processus, les produits et services ou les clients de
l'entreprise [Kaplan, 1995]. Les entreprises doivent alors
diversifier et différencier l'offre de leurs produits en s'appuyant sur
les caractéristiques jugées importantes pour la clientèle
; élargir la notion de produit avec l'intégration au produit
physique de services associés [Mathieu, 1998],
[Mevellec, 1998] ; maîtriser la qualité des
produits et des services proposés,
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
leurs délais de conception, de production, et de livraison
;être réactive et innover afin de s'adapter à la
réduction des cycles de vie des produits [David, 1998].
Cette évolution des stratégies des entreprises nécessite
la définition de nouveaux instruments de mesure de pilotage de la
performance globale [Dixon et al., 1990] proposent
une représentation pyramidale de l'organisation reposant sur un
triptyque Stratégie, Actions, Mesures. Le sommet de la pyramide
traduit la vision stratégique de l'entreprise. En conséquence,
les Actions à mettre en oeuvre et les Mesures de
performance doivent être adaptées à la stratégie
définie. La réalisation des activités, constituant la base
de la pyramide, et des objectifs intermédiaires sont garant de
l'atteinte des objectifs stratégiques.
Afin de maîtriser la performance globale, il convient
donc de s'intéresser aux facteurs explicatifs de la performance
(performance succès), aux relations de causalité qui lient les
processus, les actions engagées (performance action) aux
résultats obtenus (performance résultat). La performance doit
donc être mesurée à partir d'indicateurs
opérationnels [Kaplan, 1992] et de
pilotage [Selmer, 1998].
4-Une vision multicritère de la performance ou
Tableau de Bord Prospectif(T.B.P)
Cette approche globale et multicritère de la
performance est celle développée par Kaplan et Norton dans leur
proposition de Tableau de Bord Prospectif (TBP), dont la finalité est de
traduire la stratégie globale de l'entreprise à partir de quatre
dimensions ou « axes » (financier, clients, processus internes,
apprentissage organisationnel) correspondant à quatre objectifs de
performance. L'apport du TBP est de montrer l'interdépendance entre
l'ensemble des indicateurs et qu'« il convient d'équilibrer la
performance financière à court terme avec les vecteurs
d'opportunités de croissance à long terme pour leur performance
financière future [Kaplan, 1999]».
Les indicateurs de performance de l'axe clients s'articulent
ainsi autour de quatre notions : le temps (délais), la qualité
(des produits, des services), le coût
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
et la valeur procurée au client. La satisfaction de la
clientèle se traduit donc en termes de compétitivité et de
rentabilité pour l'entreprise [Ngobo, 2000]. L'atteinte
des objectifs externes visés par l'organisation (satisfaction de
l'actionnaire et du client) requiert la mise en place de processus internes
combinant des ressources, des capacités et des compétences.
Parmi ces processus figure le processus de production. Ce dernier
s'entend dans une acception large car il considère l'ensemble de
l'entreprise à travers ses flux physiques principaux (approvisionnement,
production, distribution). Par conséquent, la performance de ce
processus est appréhendée depuis le traitement des commandes
jusqu'à la livraison du produit final existant. Les indicateurs de
performance de ce processus s'articulent autour des concepts de
compétitivité- prix (efficience productive, coûts,
rendements, productivité, rentabilité) et hors- prix
(délais d'approvisionnement, de production, de livraison,
qualité, réactivité).
Enfin l'axe «apprentissage organisationnel» traduit
les moyens - essentiellement les moyens humains - mis en oeuvre pour atteindre
les objectifs de performance des trois autres axes.
Dans un monde compétitif, la réussite de
l'organisation implique la performance des hommes, laquelle peut être
appréciée à partir de la satisfaction des personnels, de
leur motivation, l'évolution de leurs compétences (savoir-faire)
et de leur rendement. Finalement, une vision synthétique de la
performance globale est proposée par Mc beth [Mc Beth, 1993],
lequel propose un modèle de causalité de la performance
(figure 2). Par conséquent les informations contenues dans les
indicateurs de performance doivent être de différentes natures :
interne/externe, stratégique/opérationnelle, financière/
non financière, ex-post/prédictive, quantitative/qualitative,
entreprise/environnement.
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
Figure 5 : un modèle de causalité de la
performance [Mcbeth, 1993]
5- Les indicateurs de performance comme outil de gestion
stratégique
Le contrôle de gestion peut être défini
comme un système qui permet d'influencer le comportement des individus
afin de réaliser les objectifs de l'entreprise [Langfiels-Smith,
1997]. En ce sens, les indicateurs de performance constituent un des
outils du système de contrôle de gestion. Cet outil permet aux
gestionnaires de déterminer si l'entreprise atteint la performance
voulue et motive, donc influence, les gens à travailler pour maintenir,
améliorer, corriger ou anticiper la performance [Bachir Wade,
2005].
S'il existe peu de recherches empiriques sur le contenu des
indicateurs de performance ou des systèmes de contrôle et de suivi
de la performance, les écrits théoriques sur le sujet abondent
cependant. La plupart de ces écrits utilisent comme fondement le
modèle de tableau de bord prospectif (TBP) présenté par
Kaplan et Norton dans un article publié dans Harvard Business Review
(1992) et développé dans un ouvrage sur le sujet en (1996).
Essentiellement, ces auteurs présentent le TBP comme un
outil servant à formuler la stratégie, à la
communiquer, à fixer des objectifs, à mettre
en cohérence les initiatives des acteurs pour atteindre un objectif
commun et à
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
renforcer le retour d'expérience et le suivi de la
stratégie. Il s'agit donc d'un outil de gestion qui ne vise pas
seulement à contrôler des activités. Le TBP, dans son
contenu, cherche aussi à saisir la réalité complexe de la
performance des entreprises qui ne peut pas être strictement
financière.
Le modèle du TBP permet de regrouper l'ensemble des
indicateurs de performance que pourrait avoir une entreprise en quatre grandes
classes. Ces classes constituent l'essentiel des dimensions sur lesquelles il
faut travailler pour réaliser une performance exceptionnelle du point de
vue des clients et des actionnaires. Les dimensions sont construites sur la
base de la vision et de la stratégie de l'entreprise et ne sont pas
indépendantes les unes des autres. Par exemple, un processus permettant
de répondre aux commandes des clients rapidement pourrait avoir des
effets sur la satisfaction de ces derniers qui, à son tour, permettra de
les fidéliser. Cela devrait se traduire sur la performance
financière de l'entreprise. Ainsi, construire des indicateurs de
performance sur chacun des éléments des dimensions apprentissage,
processus, clients et résultats financiers, fondés sur la
stratégie de l'entreprise devrait permettre à celle-ci
d'être guidée vers l'atteinte de la performance
souhaitée.
Par ailleurs, selon [Bouquin, 1986], une
mission importante du contrôle de gestion consiste à permettre une
gestion des risques (stratégiques, opérationnels, financiers). Le
TBP, dont le contenu se construit sur la stratégie et les facteurs
clés de succès de l'entreprise, peut jouer un rôle dans le
management de ces risques. Les indicateurs devraient informer, en temps
opportun, les gestionnaires des événements susceptibles
d'influencer défavorablement l'atteinte des objectifs. Ceux-ci devraient
pouvoir réagir en temps réel afin de contrôler ces risques.
En ce début de 21ème siècle, le TBP peut, en
plus d'être un outil essentiel pour guider l'entreprise vers la
performance souhaitée, devenir un instrument d'aide à la gestion
des risques.
Les quatre axes du TBP ne constituent pas un modèle
statique et universel. Ils forment plutôt une toile de fond ou un
cadre général d'analyse qui permet
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
d'appréhender le système d'indicateurs de
performance de l'entreprise dans un contexte, de plus en plus, concurrentiel
où la performance ne se traduit plus seulement en terme de rendement
financier. Il fournit également une articulation autour de la
stratégie, essentielle à l'efficacité du système de
mesure. Évidemment, chaque entreprise aura des indicateurs qui lui sont
propres en fonction de ses objectifs, de ses stratégies et des diverses
caractéristiques de son environnement. Pour ces raisons, le
modèle ne spécifie pas les indicateurs que l'on doit retrouver
dans chacun des quatre axes puisque ceux-ci seront très variables d'une
entreprise à l'autre et d'un contexte á un autre.
Cependant, pour chacun des axes, Kaplan et Norton proposent
des éléments de contenu qui permettront d'orienter les
concepteurs. Ils identifient de grandes classes de déterminants de la
performance qui devraient conduire à l'identification d'indicateurs de
performance. Rappelons que, dans l'étude des indicateurs de performance,
on ne pose pas l'existence d'un modèle unique et universel.
En résumé, pour relever le défi de la
compétitivité, les entreprises reconnaissent, rappelons-le
encore, qu'il est essentiel de disposer d'un système de mesure de
rendement multidimensionnel. La plupart des entreprises disposent
déjà d'un système de mesure de la performance. La question
est de savoir si ce système permet de saisir la performance à
partir d'indicateurs essentiels et reliés à toutes les facettes
de celle-ci. Le cadre d'analyse général du TBP apparaît
suffisamment complet pour servir de point de départ pour évaluer
les systèmes de mesure de la performance existants et proposer des
pistes d'amélioration qui permettront éventuellement
d'accroître la performance des entreprises.
Par ailleurs, ce cadre d'analyse, qui s'articule autour des
objectifs et stratégies de l'entreprise, pourra aussi être
utilisé pour évaluer l'efficacité des systèmes
existants.
Au-delà des pratiques et de la satisfaction des
dirigeants à leur égard, nous nous intéresserons
également à la question de l'efficacité du système
de mesure de la
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
performance. Pour être efficace, le système devrait
entretenir des liens étroits avec les objectifs et les stratégies
de l'organisation.
6-L'articulation de la stratégie et des mesures
de la performance
Les écrits en contrôle de gestion reconnaissent
la nécessaire interaction entre contrôle de gestion et
stratégie. [Bouquin, 1986] note que parmi les nombreux
facteurs susceptibles d'influencer le contrôle de gestion, la
stratégie devrait tenir une place importante. Par ailleurs, on
suggère que le système de contrôle de gestion doit
être conçu spécifiquement pour appuyer la stratégie
de l'entreprise ou des unités stratégiques, sur la base des
avantages compétitifs afin de conduire à une performance
supérieure [Dent, 1990 ; Simon, 1987]. Un certain
nombre d'études permettent de juger de l'intérêt des
chercheurs pour l'influence de la stratégie sur le système de
contrôle de gestion. L'étude de [Langfiels-Smith K.,
1997] fait, pour la période comprise entre 1972 et 1992, une
recension des recherches étudiant les relations entre différents
types de stratégies et différents types de systèmes de
contrôle. Il conclut que ces études démontrent clairement
que les caractéristiques des systèmes de contrôle
utilisés par les entreprises diffèrent selon qu'elles suivent une
stratégie de différenciation (ou de type prospecteur) ou une
stratégie de leadership des coûts (ou de type défendeur).
[Abernethy et Lillis, 1995] montrent que les entreprises
suivant une stratégie plus flexible, se rapprochant de la
différenciation, utilisent moins d'indicateurs financiers traditionnels
et plus d'indicateurs de performance qualitatifs. [Perera et Poole,
1997] observent, quant à eux, qu'une stratégie de
différenciation se traduira généralement par une
insistance plus grande sur l'utilisation de pratiques de management
avancées (qui comprend des mesures sur la qualité, sur la
dépendance face aux fournisseurs, etc.). L'étude de
[Chenhall et Langfiels-Smith, 1998] rejoint les
précédentes parce qu'elle examine les relations entre le type de
stratégies et les pratiques de management et de comptabilité.
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
Plusieurs techniques de gestion et pratiques comptables sont
examinées. En particulier, l'étude démontre que les
entreprises de haute performance qui mettent l'accent sur la
différenciation des produits gagneront de grands bénéfices
en suivant certaines techniques de gestion et pratiques de comptabilité
de management incluant des mesures de la performance financière et non
financière. Par ailleurs, les entreprises de haute performance
privilégiant le leadership des coûts gagneront de grands
bénéfices en appliquant certaines techniques de gestion et
pratiques de comptabilité qui incluent des techniques de
comptabilité de management traditionnelles. Ces études et les
écrits théoriques sur la performance, en particulier ceux de
[Kaplan et Norton, 1996], mettent en évidence la
nécessaire relation qu'il doit y avoir entre les objectifs et la
stratégie de l'entreprise et la construction de systèmes de
mesure de la performance efficaces.
L'étude des relations entre les objectifs, ou la
stratégie, et le système d'indicateurs de performance aidera
à mieux comprendre le degré d'efficacité de ces
systèmes pour faire le suivi et anticiper la performance des
entreprises. Mais, un système d'indicateurs de performance non
relié aux objectifs ou stratégies de l'entreprise pourrait
signifier que celle-ci n'utilise pas le système de façon globale
pour atteindre ses objectifs et stratégies. Mais plutôt pour
suivre à posteriori les effets d'une tactique et piloter les
activités à court terme. Cela pourrait aussi vouloir dire que les
ressources (financières, matérielles et humaines)
consacrées à la gestion de la performance sont utilisées
de manière inefficace et inefficiente. Dans le pire des cas, cela peut
mener à une moins bonne performance financière.
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
CHAPITRE II : L'ABC/ABM ET PERFORMANCE DANS
LES ENTREPRISES
Nous allons dans ce chapitre recenser ce que l'ABC a de
novateur et ce que cette méthode est supposée apporter aux
entreprises concernant leur performance. Notons que nous nous appuierons ici
principalement sur les arguments de ses « promoteurs ». L'ABC
s'illustre en premier lieu comme un outil de mesure, ainsi, nous verrons tout
d'abord ce que cette méthode apparaît apporter dans le calcul des
coûts de revient. Mais les apports de la méthode ABC ne semblent
pas se limiter à ce niveau. En effet, au delà du calcul des
coûts, elle offrirait certaines possibilités ayant trait au
pilotage de l'entreprise. Ainsi, nous verrons que cette méthode aurait
un impact au niveau de l'approche même de l'entreprise et de son pilotage
(diagnostics, stratégies, management...). Il s'agira donc de tenir
compte de cette dimension et d'évoquer les apports mis en avant par
différents auteurs à ce sujet.
Au paravent, nous allons procéder á un rappel sur
l'évolution du lien existant entre le contrôle de gestion et la
performance des entreprises.
SECTION I : Evolution du rapport contrôle de Gestion
et Performance : apport de la méthode ABC/ABM
« Tout contrôle de gestion qui se contente de
piloter le coût sans s'intéresser à la valeur est
unijambiste »
[Lorino, 1991].
La performance n'est pas un simple constat : elle se
construit, c'est-à-dire qu'elle est atteinte à travers ce que
fait l'entreprise et par la manière dont elle le fait. La
performance de l'entreprise repose donc sur sa capacité à
produire de la valeur utile pour ses clients en consommant le minimum de
ressources [Ernult, 1996].
I - Contrôle de gestion et performance
Il est habituel d'attribuer au contrôle de gestion la
mission de gérer la performance de l'entreprise dans son ensemble,
ainsi que la performance de
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
chacune des entités (centres de responsabilité,
activités, processus, projets, etc.) qui la composent,
c'est-à-dire à la fois d'aider les managers à
maîtriser leurs activités, afin d'atteindre leurs objectifs et de
coordonner les décisions que prennent ces managers afin d'assurer leur
cohérence et leur convergence avec les objectifs stratégiques de
la direction générale.
Or le contrôle de gestion et ses outils traditionnels
connaissent depuis plusieurs années une crise profonde. Cette crise du
contrôle de gestion et de ses outils traditionnels a été
largement commentée [Kaplan, 1984, Johnson et Kaplan, 1987,
Chassang, 1987, Berliner et Brimson, 1988, Laverty et Demeestère, 1990,
Lorino, 1989, 1991, etc.] et est aujourd'hui bien documentée.
On a ainsi pu constater que les outils du contrôle de gestion
étaient "en retard" par rapport aux réalités de
l'entreprise et qu'ils l'étaient d'autant plus que le degré
d'imprévisibilité de la demande et / ou de complexité des
processus de fabrication était élevé [Ernult,
1996].
Il s'agit en fait, d'un véritable bouleversement qui
remet en cause des pratiques établies depuis plusieurs décennies.
On constate en effet, que la mondialisation des marchés,
l'instabilité et l'incertitude croissantes de l'environnement qui en
résultent, la complexité des organisations et
l'interdépendance de plus en plus forte de leurs activités
remettent radicalement en cause les hypothèses sur lesquelles se fonde
le paradigme "classique" du contrôle : d'une part, la simplicité
du fonctionnement de l'entreprise (découpage en unités
partielles, spécialisées indépendantes et
juxtaposées) et, d'autre part, la stabilité des lois auxquelles
obéit ce fonctionnement (et donc la prévisibilité des
événements ou des résultats d'une action).
Il ne s'agit donc pas seulement de mesurer des résultats a
posteriori, mais d'identifier et d'agir sur (piloter) les facteurs à
l'origine de la performance.
La question qui se pose alors est «peut-on encore, dans
le contexte actuel, continuer à piloter la performance de l'entreprise
et de chacune des entités qui la composent (de l'extérieur) ou
bien faut-il fournir aux différents acteurs de
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
l'entreprise des représentations susceptibles
d'éclairer leurs propres choix stratégiques afin de pouvoir
décider "en connaissance de cause", en connaissance des causes ?
1- Un nouveau mode de contrôle de gestion pour
outiller le pilotage de la
performance
Le contrôle de gestion classique, stabilisé
depuis le début du 20èmesiècle,
n'apparaît désormais plus opérant. Cela notamment pour deux
raisons résumées ici :
- d'une part, il est basé sur l'unité de main
d' oeuvre horaire alors que les systèmes de production s'automatisent :
les opérateurs ne sont plus dans la réalisation concrète
de tâches de production mais de plus en plus dans la conduite du
processus de fabrication,
- d'autre part, il s'appuie sur la fonction de production
alors que les mêmes systèmes de production se tertiarisent et que
ces activités, dites indirectes, restent hors contrôle analytique,
ou tout du moins dans des conditions insatisfaisantes.
Pour que l'entreprise soit compétitive
économiquement sur un marché, le pilotage de l'entreprise doit
reposer sur une gestion fiable et sur des indicateurs pertinents. Ainsi, le
contrôle de gestion doit répondre à certains objectifs :
- dans un premier temps, savoir si les objectifs poursuivis par
l'entreprise sont atteints ;
- pour ensuite comprendre pourquoi l'entreprise est efficace ou
non ;
- de manière dans un troisième temps, à
orienter l'action vers l'amélioration des performances.
Dès lors, le pilotage de l'entreprise consiste en
définitive à déployer sa stratégie en actions
opérationnelles et de capitaliser les résultats et les
enseignements de l'action pour en enrichir la réflexion sur les
objectifs.
En ce sens, l'organisation de l'entreprise en activités
et processus répond à ces impératifs car selon
[Lorino, 1991], elle permet :
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE
ABC/ABM) A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE
ENTREPRISES
- de diagnostiquer et comprendre l'origine de la performance
à partir des conditions de réalisation des activités de
l'entreprise ;
- de piloter en orientant les activités selon les
objectifs globaux définis par la stratégie de l'entreprise ;
- gérer les compétences et les savoir-faire des
salariés.
Pour [Gervais, 2000], l'organisation de
l'entreprise sur la base d'activités va permettre d'obtenir une
évaluation des coûts plus fiable. Selon lui, «il est
logique de centrer la modélisation du système d'informatique
analytique sur les activités, car si les produits deviennent volatils,
les activités de l'entreprise (passation des commandes,
référencement des fournisseurs, facturation...) demeurent.
»
Face au caractère très
éphémère des produits et aux changements organisationnels,
cette méthode va baser le calcul des coûts non plus sur les
fonctions et les produits, mais sur le facteur structurant et permanent des
processus transversaux et des savoirs faire de l'entreprise, ce que
[Mévellec, 1996] appelle « l'usine
fantôme ». Ici, l'entreprise n'est pas pilotée par les
produits qu'elles offrent mais par les méthodes pour les produire.
2- Apport de l'ABC/ABM â la construction d'une
performance transversale dans les
entreprises
On a vu que la performance d'une entreprise repose sur sa
capacité à produire de la valeur utile pour ses clients en
consommant le minimum de ressources (maîtrise des coûts). On a vu
également que la valeur est créée par les attributs des
produits ou services (qualité, délais..), que l'entreprise offre
à ses clients potentiels en fonction de leurs attentes, et qui sont
valorisés par eux. Ces attributs sont le résultat des
activités et des processus, que l'entreprise choisit de mettre en oeuvre
dans sa chaîne de valeur et qui consomment des ressources. Comme toutes
les activités de l'entreprise ont pour vocation à être
créatrices de valeur (c'est-à-dire qu'elles peuvent ne pas
l'être), cette dernière doit identifier celles qui le sont pour
ses clients [Porter, 1985] au travers de la
comptabilité
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
par activité. Elle doit donc les analyser sous l'angle
de leur coût (consommation de ressources) et de leur capacité
à créer de la valeur pour ses clients. L'entreprise doit ainsi
identifier un portefeuille d'activités et de compétences lui
permettant de répondre rapidement aux exigences de ses clients
potentiels. Autrement dit, la compétitivité de l'entreprise est
fonction de sa capacité à ne regrouper que des activités
créatrices de valeur pour ses clients potentiels (donc à
supprimer toutes les activités sans valeur ajoutée utile pour le
client) et de sa capacité à réaliser ces activités
au moindre coût, c'est-à-dire de sa capacité à
réorganiser (reconfigurer) rapidement et complètement ses
processus (Business Process Reengineering).
Le pilotage du couple valeur-coût est donc chose
complexe, et ce d'autant plus que, comme le souligne [Lorino, 1996]
«la valeur est créée par des combinatoires
complexes d'activités et de multiples acteurs individuels et collectifs
» qui détiennent une double autonomie, à la fois cognitive
(chaque acteur détient sa part de connaissance et de compétence
nécessaire à la réalisation de l'activité) et
politique [Crozier et Friedberg, 1977] montrent que chaque
acteur détient une part de pouvoir dans la mesure où il
contrôle une zone d'incertitude). Faire face à cette
complexité implique de décentraliser le pilotage du couple
valeur-coût le plus près possible des compétences
nécessaires à l'action. C'est d'ailleurs, ce qu'a compris les
concepteurs de la méthode ABC/ABM en accordant une importance
particulière aux opérationnels dans son utilisation.
Le pilotage s'articule ainsi, sur les activités et leur
combinaison en processus, «réunion d'activités
complémentaires concourant toutes à la réalisation d'une
production finale commune, porteuse de valeur » [Mévellec,
2001]. L'activité apparaît ainsi comme l'unité
élémentaire, la "brique de base" qui permet différents
regroupements et niveaux d'agrégation (fonctions, processus, projets),
ainsi que différents niveaux d'analyse. Le processus apparaît,
notamment, comme le passage obligé entre coûts et valeur :
système d'action opérationnel
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
(au niveau des activités) qui contribue à la
création de valeur : Le terme de valeur doit être entendu au sens
du « prix que le client est prêt à payer en fonction du
jugement qu'il porte sur les prestations qui lui sont offertes, sur les
services qui lui sont rendus »[Zarifian, 1996] (en
satisfaisant les attentes des clients) et qui permet à l'entreprise de
s'assurer d'avantages concurrentiels (en faisant mieux que les concurrents).
Soulignons qu'il s'agit là d'une véritable inversion de
logique par rapport au paradigme "classique" du contrôle, puisque ce ne
sont plus les ressources consommées dans chaque centre de
responsabilité (inputs) et les produits obtenus (outputs) qui sont au
coeur du pilotage, mais les activités et les processus
(savoir-faire créateurs d'attributs valorisables par le client) et la
valeur (satisfaction du client). On passe ainsi d'une logique
"métiers-coûts de produits" à une logique "clients-valeur
des produits".
Des méthodes telles que l'ABC / ABM (Activity Based
Costing / Activity Based Management) tentent d'apporter des réponses
à cette recherche d'outils opérationnels de pilotage de la
performance.
L'apport fondamental de cette méthode consiste à
représenter l'entreprise comme un réseau d'activités.
Cette représentation permet pour résumer ce que l'on vient de
présenter plus haut :
dans un premier temps, de calculer directement et de
façon beaucoup plus fine le coût des activités (par le
biais d'inducteurs de coûts qui reflètent exactement la
manière dont les ressources sont consommées par les
activités) et ainsi de mieux comprendre les processus
générateurs de coûts (causes de la consommation des
ressources) avant de se préoccuper, dans un deuxième temps,
d'attacher directement aux objets (produits, services, clients) le coût
de ces activités et ce proportionnellement aux besoins.
de se poser des questions proches de la démarche BBZ
(Budget Base Zéro), telles que : a-t-on réellement besoin de
cette activité ? Peut-on réduire le coût d'un processus en
le réalisant d'une autre
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
manière ? Les modes opératoires peuvent
être comparés d'une entreprise à l'autre (Benchmarking),
les agencements d'activités peuvent être analysés et
optimisés (Business Process Reengineering).
d'intégrer les orientations stratégiques
majeures de l'entreprise et l'autonomie cognitive et politique des acteurs. En
effet, d'une part, cette représentation privilégie l'approche par
la chaîne de valeur, remettant ainsi en cause le contrôle par
centres de responsabilité au profit d'un pilotage par les processus
(souvent transversaux) ; d'autre part, elle prétend restituer à
l'acteur sa capacité d'interprétation, d'action et
d'apprentissage.
En résumé, l'amélioration de la
performance doit être conçue globalement, c'est- à-dire que
le système de pilotage de la performance doit permettre à la fois
de gérer le changement stratégique, de déployer les
objectifs stratégiques sur les processus créateurs de valeur et
de reconfigurer rapidement et complètement ces processus par rapport aux
attentes des clients.
Des méthodes telles que l'ABC/ABM, qui proposent
l'activité comme maille de base de l'analyse, permettent de
décliner les orientations majeures de l'entreprise dans l'action locale.
On passe ainsi du paradigme mécaniste du contrôle à un
paradigme social ouvert, celui du pilotage, susceptible d'évolutions du
fait même de l'initiative des acteurs qui repose sur leurs
capacités collectives d'interprétation des
événements qui se déroulent dans leur environnement.
ll Pratiques de performances avec I
"ABC/ABM
Il est important de signaler qu'une entreprise pour être
pérenne et performante doit disposer d'un système d'information
(comptabilité) et de contrôle qui puisse lui fournir des
informations et indicateurs sur sa situation mais aussi et surtout le niveau de
réalisation de ces objectifs. C'est pourquoi dans la partie suivante,
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
nous allons voir les différents apports de la
comptabilité par activité á la performance des
entreprises.
Avant d'aborder les apports et les limites de la
méthode ABC, il convient de signifier que leur appréhension est
« délicate » dans la mesure où différents
débats entourent cette méthode.
Une réflexion semble devoir présider à ce
développement, elle nous est proposée par P.Zarifian et stipule
« qu'un même outil technique peut conduire à des
évolutions différentes dans la mesure où les objectifs et
les pratiques qui sous- tendent son usage sont eux-mêmes
différents ». Nous ne perdrons donc pas de vue cette
réflexion. Si nous évoquerons, dans ce paragraphe, sans trop de
nuances, les apports de la méthode ABC recensés dans une certaine
littérature.
1- Apports au niveau du calcul des coûts de
revient : vers une plus grande Fiabilité
Comme nous l'avons déjà signifié, la
caractéristique majeure de la méthode ABC est de
s'intéresser aux activités et non plus aux produits. C'est sur la
base de ce principe central que la méthode ABC tend à se
distinguer des anciennes méthodes de calcul des coûts. Aussi, un
des apports les plus mis en avant dans la littérature traitant de la
méthode ABC est celui d'un calcul des coûts de revient plus fiable
pour l'analyse stratégique. En quoi le fait de s'intéresser aux
activités tend-il à rendre le calcul des coûts de revient
plus fiable ?
Dans ce paragraphe, nous allons résumer les
différents apports de la comptabilité par activité au
calcul des coûts. Les apports les plus mis en avant dans la
littérature traitant de la méthode ABC concernant le calcul des
coûts sont les suivants :
L'ABC permet une allocation pertinente des coûts
indirects sur les opérations, les produits, les clients et les canaux de
distribution. Elle a de ce fait permis d'obtenir les informations sur les
coûts nécessaires á la réduction de ceux-ci.
Autrement dit elle permet un calcul des coûts de revient plus fiables
tenant compte de la « formule » proposée par
[P.
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
Zarifian, 1995]: (CQFDI : Coût,
Qualité, Flexibilité, Délai, Innovation) pour mesurer la
« nouvelle » performance ;
n l'ABC permet de réduire les imputations arbitraires
de frais indirects et d'atteindre une meilleure pertinence de l'information sur
les coûts en réduisant l'incertitude sur la répartition des
charges indirectes et donc sur le calcul des coûts de revient et des
marges ;
n L'application de la méthode a également
contribué à fournir une vue d'ensemble de l'entreprise, d'un
service et de ses processus et a permis d'engager une réflexion sur
l'amélioration de cette organisation. Ceci a deux conséquences
majeures :
ü L'accroissement de la visibilité
stratégique des managers d'entreprises (différentiation entre
coûts de fonctionnement et de développement) ;
ü Les managers peuvent s'appuyer sur les outils de
gestion pertinents car étant flexibles grâce á la meilleure
répartition des frais de structures permettant d'améliorer la
compétitivité prix des entreprises avec la réduction des
coûts adapté.
ü La méthode permet de définir et de
dégager des indices de performance par activité, très
utiles pour jauger du bon fonctionnement général de l'entreprise,
et de la réalisation des objectifs fixés. Cela permet
également de cerner les dysfonctionnements et les coûts
cachés pour parfaire la rentabilité et mieux percevoir les
coûts consommés par chaque activité. Désormais, on
prend conscience au sein d'une organisation qu'il est utile non pas de calculer
un coût mais de le piloter.
En somme, le modèle ABC/ABM permet ainsi de calculer
le coût de revient, ce qui donne lieu á une meilleure
maîtrise des coûts et permet aussi de déterminer la
rentabilité par client ou par centre de profit. Les entreprises peuvent
alors mesurer la performance et dès le départ bien organiser
l'entreprise de façon à
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE
ABC/ABM) A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE
ENTREPRISES
gérer la croissance financière tout en
révisant sa politique de tarification et de proposition de ristourne par
exemple.
2- Apport au niveau de la gestion de
la performance
Dès lors que nous avons montré que le calcul
des coûts par le biais de la méthode ABC semble s'avérer
plus approprié aux caractéristiques actuelles de la production
(avec une large part de charges « indirectes »), les apports de cette
méthode apparaissent dépasser le seul champ du calcul et toucher
davantage aux possibilités de diagnostic et plus loin de pilotage. Comme
on l'a fait précédemment, nous allons aussi résumer ce que
la méthode ABC/ABM a apporté á ce niveau.
l'ABC permet d'éviter les écueils de la sous
qualité et de la sur qualité ainsi que celui de la dérive
des coûts de développement en se focalisant sur les processus.
L'ABC doit permettre la refonte de la structure organisationnelle en faisant
face aux contraintes de la concurrence. Il ne s'agit plus de calculer les
coûts justes, mais de bâtir une entreprise permettant d'obtenir des
coûts (en termes quantitatifs et qualitatifs) dont le niveau sera
pertinent face aux attentes des consommateurs, c'est-à-dire gérer
l'entreprise au travers de coûts cibles en créant la
compétitivité en amont (lors de la conception des produits
[Bruel O ,1994 n° 253]. La méthode ABC permet
ainsi de mieux gérer le cycle de vie des produits et services et prendre
en compte les problématiques de conquêtes et de
fidélisation des clients. En se référant au concept de
« différenciation » développé par M. Porter, la
notion d'activité peut s'avérer utile dans l'optique de
construire un avantage concurrentiel. Ainsi, la méthode ABC/ABM
contribuerait à l'identification des facteurs clés de
succès d'une entreprise. Aussi, cela la conduirait à une
réflexion « en interne » (comment favoriser ces FCS...) et
à une réflexion quant à son
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE
ABC/ABM) A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE
ENTREPRISES
positionnement sur le marché (quels FCS favoriser par
rapport à la concurrence...).
Donc l'apport de la méthode ABC/ABM est multiple et, est
á différents niveaux de l'entreprise :
ü Le premier d'entre eux est que le contrôle de
gestion se fait partout dans le langage des opérationnels puisque les
indicateurs de performance sont des indicateurs physiques (délai,
qualité, coûts, prix..) ;
ü Le deuxième apport, c'est que ces indicateurs
sont disponibles sans délais, chaque jour, chaque semaine ou chaque mois
selon le type d'activité ;
ü Le troisième apport concerne la conjonction
possible d'un contrôle d'efficacité par le budget et d'un
contrôle d'efficience par ces nouvelles mesures ;
ü Le quatrième avantage est le renforcement de la
cohérence, du comportement des acteurs au sein de l'entreprise.
3-l'abc/abm ; vers une nouvelle vision des performances de
l'entreprise
Au- delà de ces différents apports
supposés, la méthode ABC/ABM véhiculerait, selon un
certain nombre d'auteurs déjà cités, une nouvelle approche
de l'entreprise. Cette conception sous-tendrait d'ailleurs la plupart des
apports mis en avant.
La méthode ABC permet d'avoir une vision globale de
l'entreprise par la mise en évidence des processus dans lesquels
plusieurs services sont impliqués. La prise de conscience des
interdépendances permet de cerner le rôle de chaque
activité dans la chaîne de valeurs. Elle conduirait, en effet,
à une vision moins parcellaire. La prise de conscience des
interdépendances permettant de cerner le rôle de chaque
activité dans la chaîne de valeur en mettant l'accent sur les
processus. Aussi, selon P.L.
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
Bescos et C. Mendoza, « la réussite d'une
stratégie donnée passe de plus
en plus par une approche transfonctionnelle de l'organisation
».
Par ailleurs, selon [Zarifian, 1995] «
(...), la gestion par processus permet de s'approcher, de manière
pratique, de la notion de valeur. Qu'est-ce qu'en effet la valeur si ce n'est
la manière dont l'ensemble des processus d'une entreprise offreuse
convergent pour construire et développer le rapport à une
catégorie déterminée de client ? C'est chaque processus
pris isolément, et la manière d'organiser la convergence de ces
processus sur ce rapport qui sont déterminants ».
Ainsi, l'amélioration des processus reposerait donc
sur le diagnostic des causes de performance ou de contre-performance d'une
activité tenant compte de l'interdépendance entre les
différentes activités. L'analyse se trouverait enrichie par la
prise en compte du fait que la performance d'une activité peut parfois
trouver ses origines dans une activité éloignée de celle
étudiée. La vision des performances devient alors, plus globale
et il est possible de calculer les coûts de processus, ce qui peut
être intéressant dans un contexte de juste à temps et de
maximisation de la valeur pour le client. On retiendrait alors, une vision
unitaire de l'entreprise et P.Mevellec d'ajouter que « sa
productivité ne se partage pas, elle résulte de la conjonction
des efforts des uns et des autres ».
Pour différents auteurs, la méthode ABC/ABM
favorise une approche plus dynamique de la prise de décision mais aussi
permet de multiplier les échanges entre les différentes fonctions
de l'entreprise. Cette coopération des services de l'entreprise est
aujourd'hui considérée comme un important vecteur de performance.
Elle répondrait, en effet, aux besoins de réactivité et de
créativité qu'impose le contexte économique actuel. Or,
cette coopération pourrait être favorisée par
l'appréhension de l'entreprise selon ses activités et ses
processus.
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
Globalement, on peut résumer en quelques lignes les
différents apports de la méthode ABC dans la gestion d'une
entreprise. Ainsi, plusieurs avantages peuvent découler de l'adoption de
la comptabilité par activités notamment :
L'ABC, par l'identification d'inducteurs de coûts,
améliore la connaissance en termes de traçabilité des
coûts et conduit au renouvellement des hypothèses
opératoires en amont des procédures de mesure des coûts.
«Fondés sur une allocation de processus requis pour mettre le bien
ou le service à disposition du client, les coûts calculés
par l'ABC reflètent de façon lisible, malgré des
conventions inévitables, ce que l'entreprise fait pour satisfaire le
client» [Lebas, 1992].
SECTION II : La Comptabilité par activité et
pilotage de la performance dans les entreprises
La méthode de gestion par activités et processus
diffère peu de la méthode des centres d'analyse au niveau du
calcul, mais diverge fortement dans sa philosophie. Ainsi, le domaine du
pilotage des coûts et des performances connaît une nouvelle
approche.
Pour Lorino, qui représente l'un des tenants de la
méthode en France, l'idée de base est simple : la performance est
atteinte à travers ce que l'on fait, par la manière dont on le
fait, donc, à travers la maîtrise et le pilotage des
activités et de leur combinaison en processus. Ce qui est moins
évident c'est que cette nouvelle gestion se traduit « par une
panoplie complètement renouvelée d'outils et de méthodes,
depuis la mesure des performances opérationnelles jusqu'à la
gestion prévisionnelle de l'emploi, en passant par la gestion des flux
de matière, l'analyse de la valeur et l'évaluation des
investissements » [P. Lorino, 1991].
La gestion par activités et processus combine à
la fois une vision « maîtrise des coûts » et une vision
« création de valeur » par l'identification d'inducteurs de
performance axés sur les coûts, la qualité, les
délais, et liés aux activités et
CONTRIBUTION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES (METHODE ABC/ABM)
A LA PERFORMANCE DES ENTREPRISES SENEGALAISES : CAS DE QUATRE ENTREPRISES
processus mis en oeuvre. Selon cette méthode, le
pilotage de l'entreprise doit se faire sur la base de deux systèmes
distincts mais complémentaires : le système d'analyse (phase de
diagnostic) qui constitue le fondement du système de pilotage proprement
dit.
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