Devant l'absence d'un instrument de couverture du risque de
change bien défini par la réglementation, et devant l'importance
de ce risque, la nécessité de trouver une solution aux
entreprises algériennes s'impose.
Le change à terme est l'instrument le plus
utilisé à travers le monde, par sa simplicité de
fonctionnement et de mise en place. C'est un instrument sûr de couverture
du risque de change.
Dans cette section, nous nous proposons de décrire la
procédure qui peut être suivie par une banque pour structurer des
opérations de change à terme pour le compte de sa
clientèle.
1. Cadre réglementaire
· Les opérations de change à terme sont
autorisées : Règlement 95-07, article 27 ; elles sont
définies : Instruction 79/95, article 13 (1) ;
· Pour se faire, il a été institué un
marché des changes : Règlement 95-08, article 1 ; il a
été défini : Instruction 79/95, article 2 (2) ;
· Le marché des changes comprend deux compartiments,
dont l'un au comptant et l'autre à terme : Règlement 95-08,
article 2 ; Instruction 79/95, articles 3, 4 et 5 (3) ;
· Les banques disposent de certaines ressources en
devises qu'elles peuvent ne pas céder à la Banque
d'Algérie dont les montants achetés sur le marché des
changes et 50% des recettes des exportations hors hydrocarbures :
Règlement 95-08, article 4 (4) ;
· Les deux catégories précédentes de
devises doivent impérativement être utilisées pour couvrir
les opérations courantes de la banque ou de sa clientèle :
Règlement 95-08, article 5 (5) ;
· Les soldes de trésorerie devises doivent
être placés au jour le jour auprès de la banque
d'Algérie : Instruction 79/95, article 42. Sur ces placements les
banques reçoivent une rémunération de 0,5 % l'an :
Instruction 01 du 20 février 1991, article 5 (6) ;
· Les soldes des comptes correspondants doivent être
impérativement nuls (obligation de rapatriement): Règlement
95-07, article 29 (7) ;
· La prise de positions de change par les banques est
autorisée (dans le cadre des opérations de change au comptant et
à terme) : Instruction 78/95 (8) ;
· Les taux de change sont déterminés sur le
marché par le libre jeu de l'offre et la demande : Règlement
95-08, article 8 ; Instruction 79/95, article 8 (9) ;
2. La procédure de l'achat à terme
La procédure que nous proposons pour pouvoir structurer
des opérations d'achat à terme est la suivante :
· Achat des devises au comptant sur le marché des
changes ou auprès de la clientèle exportatrice1 (4),
(8);
· Vente à terme du montant acheté (1) ;
· Rapatriement auprès de la Banque d'Algérie
du montant acheté (7), (6) ;
· A l'échéance du terme, livraison de ce
montant en règlement de la vente à terme.
En suivant cette procédure, nous aboutissons aux
résultats suivants :
· La position de change de la banque est
immédiatement soldée ;
· Le solde du compte correspondant est annulé ;
· Plus le dépôt à la Banque
d'Algérie est rémunéré, plus le prix du terme sera
allégé par les intérêts produits ;
· Aucun risque pour la banque, pour le client et aussi pour
le marché ;
· Aucun impact négatif sur les réserves de
change ;
· Le montant rapatrié rentrera dans les
réserves de change ;
· A l'échéance du terme, le montant
rapatrié servira à couvrir la vente à terme ;
· Toutes les dispositions réglementaires sont
respectées.
Exemple
Le jour «j'' la banque achète au comptant
auprès d'un client EUR 1.000.000 reçu sur son compte
correspondant, au taux EUR/DZD = 86,5700.
La banque devient en position de change longue EUR 1.000.000.
Par ailleurs, un des clients de la banque a exprimé le
besoin d'acheter EUR 1.000.000 dans trois mois pour payer une importation.
La banque lui vend ce montant le même jour, valeur
«j' '+90.
1 La contre valeur en Dinar sera prise en charge par
la trésorerie dinar.
Les chiffres entre parenthèses correspondent à
ceux utilisés dans le cadre réglementaire (page
précédente).
La position de change de la banque est ainsi annulée.
Pour solder le compte correspondant, la banque rapatrie
auprès de la Banque d'Algérie le EUR 1.000.000, qui sera
rémunéré au taux de 0,5%.
Pour payer le EUR 1.000.000, la banque emprunte la
contre-valeur en Dinars pour 3 mois à 3,5%. Le montant de l'emprunt en
DZD va être pris en considération dans la gestion globale de la
trésorerie Dinar.
Le différentiel de taux : 3,5-0,5 = 3 % est en
défaveur de la banque. Il sera exprimé en points de change qui
seront répercutés dans le prix à terme.
nb jours ×
360
Le cours à terme sera égal à :
Cours à terme = cours spot + cours spot ×
tx DZD - tx EUR
1
+(nb jours×tx EUR 360)
0,03 5 - 0,005
+(90×0,5 360)
86,5700
+ 86,5700 ×
90
×
360
1
= 87,2185
Le cours à terme obtenu représente le coût
des devises auquel la banque doit ajouter une marge, que nous supposons de
0,5%. Le cours à terme proposé au client sera de :
Cours à terme de vente = cours à terme x (1+
marge)
= 87,2185 x 1,005
= 87,6546
A l'échéance la banque livre le EUR
1.000.000 contre DZD 87.654.600.
Après avoir exposé la procédure de l'achat
à terme, nous pouvons aboutir aux conclusions suivantes :
· L'introduction des opérations de change à
terme est possible ;
· Aucun changement de la réglementation n'est
nécessaire ;
· Aucun risque de change n'existe ni pour le client, ni
pour la banque.
Remarques
· Il est à souligner que les états des
déclarations destinées à la Banque d'Algérie ne
prévoient qu'en partie les canevas de déclaration des
opérations de change à terme.
· Les ressources dont disposent les banques pour
réaliser des opérations à terme (les montants
achetés sur le marché des changes et 50% des recettes des
exportations hors hydrocarbures) peuvent sembler insuffisantes pour satisfaire
la demande éventuelle du fait de la disproportion entre les importations
et les exportations. Toutefois, ces ressources permettront d'assurer le
lancement de cet instrument.
· La banque peut solder la position de change
résultant d'une vente à terme de devises par la conclusion d'une
opération inverse (achat à terme) ayant les mêmes
caractéristiques (montant, échéance, devise) avec un autre
client (exportateur). Toutefois cela est rarement possible.
· L'achat à terme de devises auprès des
exportateurs (vente à terme pour l'exportateur) peut paraître
impossible pour la banque. Cette dernière n'ayant pas la
possibilité d'emprunter des devises à tout moment et pour
n'importe quel montant (absence de marché monétaire devises).
Sa réalisabilité est conditionnée par le
développement des opérations d'achat à terme (ventes
à terme aux importateurs). Etant donné que ces dernières
peuvent être couvertes (en totalité ou en partie) par des
opérations de vente à terme ayant les caractéristiques
suivantes :
Même devise ;
Un montant supérieur ou égal à celui de
l'opération d'achat à terme (l'excèdent sera vendu sur le
marché) ;
Une échéance inférieure ou égale
à celle de l'opération d'achat à terme (la banque
reçoit les devises de l'exportateur qu'elle délivrera à
l'importateur si les échéances sont égales. Dans le cas
contraire, elle placera ces devises en attendant l'arrivée de
l'échéance).
A travers ce qui précède, nous pouvons maintenant
affirmer que le change à terme est possible en Algérie.
Cependant, sa généralisation reste entravée par plusieurs
contraintes et limites qui feront l'objet du point suivant.
3. Les contraintes et les limites à la mise en
place du change à terme
La mise en place du change à terme est soumise,
directement ou indirectement, à plusieurs contraintes et limites qui
sont :
· La lecture de certains textes réglementaires
prête à confusion ou donne lieu à plusieurs
interprétations :
· Aucun article ne définit explicitement la relation
banque/client au sein du marché des changes. Cela reste sous-entendu
;
· La réglementation ne spécifie ni les
opérations, ni à partir de quelle date l'opération de
change à terme peut être effectuée ;
· Les limites sur les positions de change perdantes ne sont
pas spécifiées ;
· L'instruction 78/95 portant règles relatives
aux positions de changes n'a pas été actualisée : elle
impose des limites sur les positions de change dans des devises qui n'existent
plus (FRF, DEM,...) ;
· Aucun article ne spécifie que les banques
peuvent ou pas procéder à la vente de devises au comptant ou
à terme au titre des opérations dont elles ne sont pas
domiciliataires ;
· Le marché des changes algérien est un
marché monopolistique du fait qu'il soit largement dominé par un
seul offreur (la Banque d'Algérie). La totalité des recettes des
exportations d'hydrocarbures continuent à être
cédées obligatoirement à la Banque d'Algérie. Les
intermédiaires agréés ne sont autorisés à
disposer que de 50 % des recettes d'exportation hors hydrocarbures. Ce qui
représente un sérieux handicap pour le développement du
marché spot et limite le marché forward ;
· Le dossier de bourse1 est un handicap pour
le fonctionnement et le développement du marché étant
donné que la banque ne peut exécuter les ordres de ses clients
qu'après deux jours. Donc le client achète à un prix qu'il
ne connaît pas et par conséquent ne peut pas négocier.
Chose qui est contraire au principe même de marché ;
1 Etat récapitulatif des montants des
transferts au titre des paiements extérieurs en devises. Il doit
être adressé à la Direction de la Gestion des Avoirs et des
Opérations avec l'Etranger de la BA trois jours ouvrés avant la
date de valeur. (Instruction 02-96 du 06/02/1996 relative à la
déclaration des opérations de change)
· La Banque d'Algérie n'incite pas les banques
à traiter entre elles compte tenu des spread très serrés
qu'elle affiche. Toutefois, cela peut s'expliquer par sa position
monopolistique. Tout élargissement des spread ne ferait en fait que
renchérir le coût des devises ;
· Le placement obligatoire des excédents en
devises auprès de la Banque d'Algérie au taux de 0,5% prive les
banques de tout autre possibilité mieux rémunératrice, ce
qui renchérit le prix du change à terme offert par les banques
;
· Absence d'un marché monétaire de devises ce
qui représente un sérieux handicap pour les banques quant
à :
· La rentabilisation des excédents en devises (ce
qui aurait permis de diminuer le prix de l'achat à terme de devises)
;
· L'emprunt de devises pour pouvoir structurer et offrir
aux exportateurs les ventes à terme de devises ;
· En dépit de l'obligation qui leur est faite par la
réglementation1, les banques n'offrent pas de cotations ;
· Les banques se rémunèrent par des
commissions et non pas sur les taux de change ;
· Les jours fériés pour les banques en
Algérie ne correspondent pas à ceux des banques à
l'étranger ce qui fait perdre aux banques deux jours de travail
(vendredi, dimanche)2 ;
· Décalage entre le marché des changes et le
marché monétaire : le marché des changes fonctionne le
vendredi, ce qui n'est pas le cas pour le marché monétaire.
Les ordres de transfert des banques reçus le jeudi par
la Banque d'Algérie sont exécutés le lendemain
c'est-à-dire vendredi. Le marché monétaire dinars ne
fonctionnant pas le vendredi, le gestionnaire de trésorerie doit prendre
en considération les montants des transferts du vendredi le jeudi.
Ainsi, si le compte de la banque devient débiteur, le trésorier
ne pourra pas intervenir. Par conséquent la banque subira des pertes.
4. L'expérience tunisienne
Compte tenu des limites et des contraintes que rencontre le
marché des changes en Algérie (et par conséquent la
procédure de change à terme proposée), nous allons nous
intéresser à l'expérience de la Tunisie, où le
change à terme a été introduit progressivement. Ceci nous
permettra d'en tirer quelques enseignements.
1 Article 8 de l'instruction 79/95 du 26
décembre 1995 portant organisation et fonctionnement du marché
des changes, Banque d'Algérie, op. cit.
2 Les clients perdent aussi deux jours étant
donné qu'ils ne travaillent pas généralement le jeudi et
le vendredi.
4.1. Cadre réglementaire
En Tunisie, avant de mettre en place un marché des
changes, il a été créé un marché
monétaire en devises en 1992 par la circulaire 92-13.1
Le marché des changes au comptant a été
institué en 1994 par la circulaire 94-0 1. Les règles relatives
à la surveillance des positions de change ont été
spécifiées par la circulaire 94-02.
En 1997, la circulaire 97-O7 a permis d'ouvrir le
marché des changes aux opérations à terme, et d'apporter
des modifications aux conditions de fonctionnement du marché des changes
au comptant.
Dans le cadre de la poursuite de la libéralisation des
opérations du marché des changes, de nouveaux instruments
financiers ont été introduits en 2001. Ainsi, par la circulaire
2001-11, il a été décidé d'étendre la
possibilité d'utilisation de la couverture de change à terme aux
opérations financières, d'instituer la possibilité de
réaliser les opérations de swaps de change devises/Dinars
tunisiens (TND) et de permettre aux banques ainsi qu'aux entreprises de couvrir
le risque de taux d'intérêt sur les devises par des accords de
garantie de taux d'intérêt (Forward Rate Agreement, FRA).
A la lecture de la réglementation tunisienne on
s'aperçoit qu'elle est très explicite et précise. On
remarque aussi qu'elle a fait l'objet de régulières
actualisations et perfections.
4.2. La pratique
Le marché des changes en Tunisie est relativement
liquide, les banques traitent entre elles avec un recours en dernier ressort
à la Banque Centrale à cause des cours dissuasifs qu'elle affiche
(larges spread).
Les banques peuvent procéder à l'achat ou à
la vente de devises (au comptant ou à terme) au titre des
opérations dont elles ne sont pas domiciliataires, chose qui donne un
sens à l'existence du marché des changes.
Pour le change à terme les banques proposent des
cotations jusqu'à un an pour les achats de devises et des cotations
jusqu'à 9 mois pour les ventes. Elles sont autorisées à se
porter contrepartie pour ces opérations dès la conclusion du
contrat pour les produits libres et dès domiciliation pour les produits
exclus du régime libre du commerce extérieur2.
1 Le financement des opérations commerciales
en devises, les crédits d'exploitation et les placements des devises
étaient possibles dés 1991 mais sous certaines conditions.
2 Les prestataires de services peuvent vendre
à terme le produit en devise des services rendus pour une durée
correspondant au contrat dans la limite d'une année et sans
excéder 30 jours à partir de la naissance de la
créance.
Les opérations avec la clientèle se font
après négociation instantanément par
téléphone (sans délais).
Les banques sont autorisées à prendre des
positions de change en devises1, tout en respectant les
règles prudentielles suivantes :
· Un rapport maximum de 10 % entre le montant de la
position de change dans chaque devise et le montant des fonds propres nets ;
· Un rapport maximum de 20 % entre le montant de la
position de change globale et le montant des fonds propres nets ;
· L'intermédiaire agréé qui accuse
une perte supérieure ou égale à 3 % de sa position de
change dans une devise, suite à une évolution défavorable
des cours, doit solder sa position lorsqu'elle est supérieure ou
égale à l'équivalent de TND 200.000.
La couverture des opérations de change à terme est
possible grâce à l'existence d'un marché monétaire
de devises, la possibilité d'effectuer des swaps de change devises/TND
ou devises/devises ainsi que la liquidité du marché
c'est-à-dire que le change à terme est demandé dans les
deux sens achat/vente.
Le change à terme a été banalisé,
c'est devenu un instrument qui est proposé par l'ensemble des banques de
la place et utilisé par l'ensemble des opérateurs
économiques. A ce titre, les opérations de change à terme
sont estimées en 2001 à TND 828,8 millions (dont 70 % de ventes
à terme), ce qui représente plus de 8 % du volume traité
sur le marché au comptant.
Après avoir exposé l'expérience tunisienne
que nous estimons assez concluante, nous allons essayer, en nous y inspirant,
de proposer quelques perspectives et recommandations.
5. Perspectives et recommandations
Afin de permettre une synergie et un dynamisme du marché
des changes avec ses deux compartiments, nous proposons les recommandations
suivantes :
· L'actualisation continue de la réglementation tout
en prévoyant explicitement tous les cas possibles qui peuvent se
présenter ;
· La mise en place d'un marché monétaire de
devises ;
· La déréglementation progressive qui
permettrait d'acquérir l'expérience nécessaire
graduellement tout en limitant les dégâts ;
· La suppression du dossier de bourse biaisant le
fonctionnement du marché ;
· Laisser aux banques la latitude de disposer librement de
leurs excédents de devises ;
1 La position de change en une devise est
égale au solde des avoirs en cette devise résultant des
opérations d'achat et/ou vente au comptant et à terme en cette
devise contre TND sur le marché des changes.
La position de change globale (toutes devises confondues) est
égale à la somme des contre-valeurs en TND des positions de
change par devise.
· L'élargissement relatif des spread dans les
cotations des devises par la Banque Centrale afin d'inciter les banques
à traiter entre elles ;
· Réorganisation de la fonction trésorerie
au niveau des banques et établissements financiers pour la rendre
unifiée (trésorerie dinar et trésorerie devises)
jusqu'à aboutir à la mise en place de salle de marchés
;
· La formation spécialisée du personnel
des banques intervenant sur le marché ;
· Généralisation de l'utilisation du Swift
en back office et du Reuter dealing en front office ;
· La mise en place de systèmes d'informations
performants susceptibles de véhiculer une masse croissante
d'informations en temps réel ;
· La diversification de l'économie
algérienne par la promotion des exportations hors hydrocarbures, chose
qui permettrait d'avoir des recettes supplémentaires en devises
susceptibles d'alimenter le marché des changes.
D'autres suggestions, techniquement difficiles à
réaliser du fait de la spécificité algérienne,
méritent d'être énumérées :
· L'alignement des jours fériés avec
l'étranger donc pour un week-end samedi/dimanche ;
· L'allégement voire la suppression du
contrôle des changes ;
· Laisser aux banques la possibilité de disposer
d'une part, voire de la totalité des recettes en devises des
hydrocarbures.
Dans cette section, nous avons mis en évidence la
possibilité du change à terme en Algérie compte tenu du
cadre réglementaire actuel. De ce fait, il reste aux banques de prendre
en main l'initiative pour la concrétisation de ce produit. Sa
réussite est toutefois conditionnée par l'harmonisation des
procédures.
Ce mémoire s'achève par une approche pratique de
la réalité du risque de change en Algérie. Un risque qui
n'a cessé de se répandre au sein de nos entreprises leur causant
ainsi un préjudice non négligeable. Devant cette situation et en
l'absence d'instruments de couverture, le change à terme s'avère
l'instrument le plus réaliste étant donné la
simplicité et la possibilité de sa mise en place.
Une entreprise est en risque de change dès qu'elle
engage une opération commerciale ou financière en devises. Ce
risque menace sérieusement la survie de l'entreprise par l'importance
des pertes qu'il peut engendrer.
Les fluctuations que connaissent les cours de change sur le
marché, ainsi que l'impératif de rentabilité
conjuguée à la compétitivité obligent les
entreprises à prêter une attention particulière à la
gestion de cet enjeu majeur.
C'est dans cet esprit que les entreprises s'entendent pour
mettre en place une stratégie de couverture du risque de change. Pour
mener à bien l'action de couverture, l'entreprise dispose d'un
éventail diversifié d'instruments où l'on distingue les
instruments traditionnels des nouveaux.
Les instruments traditionnels peuvent être
répartis en deux catégories, les instruments internes et les
instruments externes. Les instruments internes, tels le choix de la monnaie de
facturation et l'action sur les délais sont des instruments que
l'entreprise met en place sans faire appel à aucun organisme externe.
Les instruments externes nécessitent par contre le recours à des
organismes externes. On en énumère les avances en devises, les
contrats d'assurance et le change à terme.
Ces instruments présentent, en dépit de leur
rigidité et faible adaptabilité, un intérêt
irréfutable aux entreprises, surtout celles n'ayant pas accès aux
autres techniques.
Les nouveaux instruments de couverture, qu'ils soient des
contrats de futures, des swaps ou des options, sont venus huiler le
marché dont le mécanisme se trouve coincé par
l'insuffisance des instruments disponibles. Dérivés des nouvelles
variables et données financières, ces instruments jouissent d'une
parfaite flexibilité et une forte adaptabilité, ce qui leur
permet d'étayer et d'immuniser effectivement les entreprises contre les
péripéties du risque de change.
Il ne faut toutefois pas négliger leur
inconvénient majeur qui réside en le coût
élevé qu'ils engendrent. En effet, les primes des produits
dérivés peuvent s'avérer très
élevées, ce qui pèse lourdement sur la situation
financière de l'entreprise.
Néanmoins, il reste strictement irrationnel de coller
tel type de couverture à telle situation. Pour chaque situation, le
choix de l'instrument idéal est en fait tributaire de la
stratégie d'optimisation du couple : souplesse de fonctionnement /
coût de mise en place.
Pour le cas de l'Algérie, nous avons pu faire un zoom
sur l'évolution du régime de change et toutes les mesures qui
l'ont accompagnée depuis l'indépendance. Après une longue
période d'économie dirigée incarnant un régime de
change fixe, l'Algérie a adopté un régime de change
flottant où la valeur du Dinar est déterminée au
gré du marché. Ainsi, les autorités monétaires ont
mis en place un marché interbancaire de change contenant deux
compartiments : le marché spot et le marché à terme.
Le glissement continu de Dinar entamé en 1986, les deux
dévaluations de 1991 et 1994 ainsi que les fluctuations actuelles ont
pesé lourdement sur les entreprises algériennes qui activent au
niveau international. Ces entreprises ont enregistré d'importantes
pertes de change, le cas étudié de la SNTF en témoigne
pleinement.
Cependant, la SNTF ne se trouve pas seule dans cette tourmente
; le sondage que nous avons effectué nous a permis de faire le point sur
la situation des autres entreprises. Ainsi, la couverture de risque de change
se trouve-t-elle au coeur des préoccupations de nos entreprises qui
affichent d'ailleurs une réelle volonté de recourir aux
différents instruments de couverture et au change à terme en
particulier.
Ayant été prévu par la
réglementation, le change à terme paraît d'ores et
déjà l'instrument susceptible d'assurer aux entreprises
algériennes une couverture adéquate contre le risque de change.
En effet, nous avons démontré son applicabilité et ce en
tenant compte du cadre réglementaire actuel.
La gestion du risque de change en Algérie est à
ses balbutiements, c'est l'opinion que nous nous sommes forgés au terme
de ce travail de recherche. De gros efforts dans ce sens restent à
fournir pour se mettre au diapason des pays ayant une culture de gestion et de
couverture des risques.